Américanité et américanisation
Américanité et américanisation
Le continent américain dans son ensemble est marqué par le rôle central et l'influence des États-Unis, particulièrement au cours du 20e siècle, dans la définition du type de société mis en place (et dont la caractérisation sociologique va de la société postindustrielle à la société de la communication, ou de la société de masse à la société postmoderne) ainsi que dans le leadership assumé pour son développement. Ici, c'est aux événements de l'ensemble du 20e siècle qu'il faut référer pour appréhender les formes inédites de l'essor de ce type de société et de son développement particulier dans le contexte étatsunien d'abord, et américain au sens large du terme ensuite.
Il appert en effet aujourd'hui de plus en plus que c'est en accord avec les grandes lignes de ce modèle privilégiant le libéralisme commercial animé principalement par les corporations transnationales, les droits individuels et le principe de la démocratie de masse que se définissent les développements présents et à venir du contexte américain. Toutefois, il serait tout à fait réducteur d'interpréter les impacts d'une intégration des Amériques comme une entreprise accrue de la seule puissance économique et militaire des États-Unis. C'est dans ce sens que s'impose la nécessité de s'interroger sur l'appartenance des sociétés autres qu'étatsunienne à l'ensemble américain.
L'américanité est une façon de comprendre et de conceptualiser cette réalité d'une appartenance et d'une participation de tous les peuples du continent à une identité américaine continentale en actualisation, sans que cette réalité ne signifie pour autant la disparition pure et simple de spécificités culturelles autres au profit d'un modèle culturel dominant, en l'occurrence ici celui des États-Unis.
Dépassant ainsi le simple phénomène d'américanisation, compris comme une assimilation du système de valeurs, de la culture et du mode de vie étatsuniens, l'américanité met en lumière l'importance, dans la constitution de l'identité (québécoise, brésilienne, chicana, mexicaine, afro-cubaine ou autre), des appartenances, des références et des valeurs qui prennent source dans une dynamique culturelle non pas strictement nationale ou locale, mais bien continentale. L'américanité se pose donc dans ce cadre comme un rapport culturel et identitaire au continent américain, comme "une dimension plus large de partage identitaire qui ouvre sur d'autres lectures possibles de la question de l'intégration continentale."
Aussi, c'est en s'articulant à l'"expérience" continentale américaine, dans ses manifestations historiques et contemporaines, que l'américanité prend tout son sens. Elle permet en fait de nommer une spécificité continentale caractérisée par une production originale d'hybridation, par des rapports divers aux Peuples autochtones, par une nouvelle frontière sans cesse repoussée et par une symbolique du Nouveau monde renvoyant à un continuel recommencement. Parler en terme d'américanité c'est en fait mettre au fondement des questionnements identitaires et culturels la rencontre de l'autre, en d'autres mots, considérer l'altérité, radicale ou non, comme fondatrice d'une possible identité américaine continentale, sous toutes ses formes et expressions.