This WebLog is bilingual, some entries are in English and others are in French. A few of them have a version in either language. Other than that, the French entries are not translations of the English ones or vice versa. Of course, if you understand only English, the English entries ought to be quite understandable without reading the French ones.
Ce WebLog est bilingue, certaines entrées sont en anglais et d'autres sont en français. Quelques-unes ont une version dans chaque langue. À part ça, les entrées en français ne sont pas des traductions de celles en anglais ou vice versa. Bien sûr, si vous ne comprenez que le français, les entrées en français devraient être assez compréhensibles sans lire celles en anglais.
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2010-11-12 (vendredi)
J'avais évoqué autrefois la question suivante : comment vaut-il mieux visualiser les solides réguliers en dimension 4 ? (Je rappelle qu'ils sont au nombre de 6, contre 5 en dimension 3 : le 4-simplexe ou pentachore, qui est l'analogue du tétraèdre et qui est son propre dual ; le tesseract ou hypercube, qui est l'analogue du cube ; le 16-cellule ou hyperoctaèdre ou 4-orthoplexe, qui est l'analogue de l'octaèdre et le dual du précédent ; le 24-cellule ou icosatétrachore, qui n'a pas d'analogue en dimension 3 et qui est son propre dual ; le 120-cellule ou hécatonicosachore, qui est l'analogue du dodécaèdre ; et le 600-cellule ou hexacosichore, qui est l'analogue de l'icosaèdre.) Comme les solides réguliers sont très populaires (même ma maman sait qu'il y en a cinq en dimension 3, parce que j'avais un mobile au-dessus de mon lit qui les représentait, quand j'étais petit — une œuvre de mon papa), il y a beaucoup de gens qui ont essayé de représenter ces 4-polytopes réguliers (voyez par exemple sur Google images) : les façons populaires d'essayer consistent par exemple à projeter orthogonalement (en faisant éventuellement tourner en même temps), à utiliser une projection stéréographique, à faire des patrons, ou encore à utiliser le temps comme 4e dimension.
Mais il y a une autre façon de faire, que je n'ai encore jamais vue employée, et qui consiste à se rappeler qu'une autre façon de considérer les solides réguliers est de les voir comme des pavages de la sphère. Pour expliquer dans le cadre plus familier de la 2-sphère en dimension 3, le dodécaèdre, par exemple, peut être considéré comme un solide convexe en dimension 3, mais il peut aussi être considéré comme vivant sur la sphère (imaginez qu'au lieu d'inscrire votre dodécaèdre dans la sphère vous le gonfliez jusqu'à ce qu'il coïncide avec elle, mais en gardant le souvenir des limites des faces ; un peu comme un ballon de football traditionnel est cousu de pentagones et d'hexagones) : le dodécaèdre est alors une façon de paver la sphère avec 12 pentagones réguliers. Pour mémoire, les pentagones réguliers ne pavent pas le plan, et c'est bien le signe que la sphère a une courbure positive qu'on peut la paver avec des pentagones réguliers de sorte que trois se touchent à chaque sommet. De même, l'icosaèdre peut être vu comme une façon de paver la sphère avec 20 triangles équilatéraux (certes les triangles équilatéraux pavent déjà le plan, mais là on en met cinq autour de chaque sommet, alors que pour paver le plan on en met six : de nouveau, on voit que la courbure est positive), le cube comme une façon de paver la sphère avec six carrés, etc.
Exactement la même chose fonctionne une dimension au-dessus : chacun
des six solides réguliers de la dimension 4 correspond à un pavage
régulier de la 3-sphère. Pour le 120-cellule, par exemple, c'est avec
120 dodécaèdres réguliers : les dodécaèdres réguliers ne pavent pas
l'espace euclidien, mais grâce à la courbure de la 3-sphère ils
arrivent à la paver, elle. Vous allez me dire que ça n'aide pas
vraiment à visualiser les choses, mais en fait si : la 3-sphère étant
un espace de dimension 3, fût-il courbe, on peut espérer
l'appréhender. L'idée, donc, est de représenter ce que verrait d'un
120-cellule (par exemple) quelqu'un qui vivrait sur (ou
faut-il dire dans
?) une 3-sphère : un pavage régulier de tout
son univers par 120 dodécaèdres réguliers.
Quand j'ai proposé ça, je me disais que ce serait vraiment fastidieux à calculer : aucun programme de raytracing n'est prévu pour faire des calculs dans des espaces courbes, après tout. Mais j'avais une idée confusément à l'arrière de la tête, qui a fini par ressortir quand un ami s'est proposé d'essayer de réaliser ces calculs : la projection gnomonique.
La projection gnomonique est une façon de projeter une sphère sur
un plan (ou les objets analogues en dimension supérieure). Elle
consiste à projeter depuis le centre de la sphère sur un plan
tangent à elle en un point (qu'on appelle le centre de la
projection) ; c'est donc quelque chose de très facile à calculer, mais
elle est bizarrement beaucoup moins populaire et moins connue que
la projection
stéréographique (avec laquelle il ne faut pas confondre) qui,
elle, projette depuis le point de la sphère opposé au centre de
projection. Alors que la projection stéréographique conserve les
angles (on dit qu'elle est conforme
), la projection gnomonique
conserve l'alignement : les grands cercles de la sphère (c'est-à-dire
ses géodésique, ou « droites », ce que les navigateurs appellent
des orthodromies
) deviennent des droites dans la
projection gnomonique (c'est assez évident sur la description
géométrique). Autrement dit, le plus court chemin pour aller
de A à B (au moins s'ils sont dans le même
hémisphère que le centre de projection) s'obtient juste en traçant une
droite sur la projection gnomonique. La plupart des gens (et même pas
mal de mathématiciens) sont intimement persuadés que c'est
impossible : comme la sphère est courbe, on ne peut pas envoyer les
droites sur des droites
entend-on parfois dire. Pourtant, la
projection gnomonique fait bien ça (et c'est la seule), et elle
mériterait d'être plus connue même si elle a des défauts qui la
rendent peu utilisable en cartographie. Pour les géomètres : alors
que la projection stéréographique identifie naturellement la sphère à
la droite projective complexe (on parle de sphère de
Riemann), la projection gnomonique, elle, identifie naturellement la
sphère modulo antipodie au plan projectif réel.
Quel rapport avec mon problème ? Le point important est que la projection gnomonique fonctionne aussi bien de la 3-sphère vers l'espace euclidien de dimension 3, et ce que voit de la 3-sphère quelqu'un qui vit dessus est donné justement par la projection gnomonique centré au point où se trouve cet observateur. Voici la façon dont je justifiais ce fait dans un mail à un ami :
Le truc c'est le suivant : (1) pour quelqu'un qui vit dans S³ (en un point P, disons), les grands cercles de S³ apparaissent comme des droites, et (2) plus précisément, ce qu'il voit d'une configuration de droites (=grands cercles) de S³ est exactement la même chose que verrait quelqu'un dans ℝ³ qui verrait la projection gnomonique de ces droites à condition que cette projection gnomonique soit centrée en P.
La projection gnomonique d'une sphère centrée en un point P de celle-ci, c'est la projection centrale depuis le centre de la sphère (et pas depuis le point antipodal à P qui serait la projection stéréographique, bien plus connue) et sur l'hyperplan tangent à la sphère en P. En fait, c'est bêtement l'identification de la sphère quotientée par l'antipodie avec l'espace projectif de même dimension. L'intérêt, c'est que (a) la projection gnomonique préserve les droites (parce que les droites sont les intersections de la sphère avec des plans passant par l'origine). Par ailleurs, (b) au point P (mais seulement lui), la projection gnomonique préserve les angles (parce que c'est clair que la différentielle en ce point est l'identité, vu qu'on a justement pris le plan tangent). Ces deux propriétés (a) et (b) prouvent mon point (2) (puisque ce que voit un observateur en P sur S³ est déterminé par les angles des grands cercles passant par P et des points de la configuration de grands cercles proposée). Et mon point (2) implique notamment mon point (1).
Bon, je m'explique sans doute comme un pied, mais en tout cas la morale est que pour représenter ce que voit d'un solide régulier dans S³ un observateur P dans S³, on peut faire la chose suivante : déterminer l'image (dans ℝ³) par projection gnomonique centrée en P de tous les sommets et toutes les arêtes, et filer ça à un raytracer. L'avantage, c'est qu'on n'a pas à raytracer soi-même.
Sauf qu'il y a quand même un problème […] : pour les points qui sont dans l'hémisphère « cis » (celui qui contient P et qui est centré en P), tout se passe bien, mais pour les points qui sont dans l'hémisphère « trans », ils devraient apparaître au-delà de l'infini et on ne peut pas demander ça à un raytracer. (Concrètement, un mec qui vit dans ℝ³ et qui regarde une droite ne voit qu'une demi-droite qui se termine à un « point de fuite » ; alors qu'un mec qui vit dans S³ et qui regarde un grand cercle va vraiment voir le truc se prolonger tout à travers son champ de vision.)
J'ai quand même fait l'expérience de filer les choses à un raytracer (POVray), en me limitant aux points de l'hémisphère « cis » (et lorsqu'un segment relie les deux hémisphères, je le fais partir à l'infini) : pour les solides un peu remplis (le 120-cellule (« hécatonicosachore ») et le 600-cellule (« hexacosichore »)), c'est très joli. On voit qu'il manque l'hémisphère trans, mais le fait que les rayons partent à l'infini donne l'impression qu'il est noyé dans une brume noire impénétrable. Pour les autres solides réguliers, par contre, ça n'a aucun intérêt : ça donne juste un grand truc essentiellement vide.
Et pour faire une vidéo, je fais tourner la 3-sphère, ça n'apporte aucune difficulté supplémentaire.
Bref, j'ai réalisé des petites vidéos de tout ça : une visite du 120-cellule (qui pave la 3-sphère par 120 dodécaèdres réguliers, donc), et une visite du 600-cellule (qui la pave par 600 tétraèdres réguliers). Elles sont en basse qualité sur YouTube et téléchargeables en plus haute qualité ici (pour une fois elles sont assez petites pour que je ne m'embête pas à fabriquer des torrents pour le téléchargement). Si on regarde attentivement, on se rend bien compte que l'espace dans lequel on évolue est courbe : les polyèdres et polygones censés être réguliers ne le sont pas vraiment (ce qui est normal, vu que réguliers dans un espace plat ils ne peuvent pas paver), et les angles semblent se modifier subtilement quand la caméra se déplace. Et comme je l'explique ci-dessus, je ne montre malheureusement que ce qui se passe dans l'hémisphère « cis » de la 3-sphère (l'hémisphère proche de l'observateur).
Je fournirai prochainement ici le programme Perl qui a servi à générer (les fichiers POVray de) ces animations.
Par ailleurs, il serait intéressant de faire des animations semblables pour des pavages de l'espace hyperbolique : la géométrie hyperbolique est en quelque sorte le pendant à courbure négative de la géométrie sphérique, par exemple on peut y faire des pentagones réguliers à angles de 90° alors que les pentagones réguliers du 120-cellule ont des angles de 120° et en géométrie euclidienne bien sûr c'est 108°. (Par ailleurs, les « vrais » géomètres nous apprennent que la courbure négative est beaucoup plus intéressant que la courbure positive.) Il y a une image de ce genre ici, mais j'aimerais faire mieux. La projection gnomonique existe aussi pour l'espace projectif, donc la même approche fonctionne (avec la difficulté des deux hémisphères en moins, remplacée par la difficulté que les pavages sont infinis).
2010-11-09 (mardi)
Addendum à l'entrée précédente : on me fait remarquer que le maître de cérémonies d'un séminaire a, ou en tout cas devrait avoir, d'autres rôles : par exemple, quand le séminaire vise un certain public (et notamment si ce public est large), s'assurer que l'orateur reste compréhensible par ce public en interrompant, si besoin est, pour demander de rappeler la définition de tel ou tel concept, ou l'énoncé de tel ou tel théorème (même si le maître de cérémonies lui-même les connaît, probablement : le but est d'éviter aux gens qui ne connaissent pas d'être trop timides pour demander). Malheureusement, ce rôle-là est rarement tenu. De façon plus pragmatique, l'intérêt de la phrase d'introduction est aussi de demander à l'assistance de faire silence (dans la pratique, j'ai rarement l'impression que ce soit nécessaire, sauf dans de très grosses conférences), et de pousser un orateur peut-être un peu timide à se lancer.
Tant que j'y suis, je signale un autre aspect du « savoir-vivre »
mathématique que je trouve amusant : quand dans un exposé de séminaire
on cite un résultat, on écrit quelque chose comme Théorème
(Duschnock, 1995)
en donnant l'année de publication de l'article
quand c'est effectivement publié ; mais si on cite un théorème qu'on a
soi-même découvert, on met juste son initiale (ou ses initiales si on
a l'habitude d'écrire les prénoms) et la date éventuelle. Il m'a
fallu un certain temps pour comprendre ça.
Il y a sans doute quantité de règles comme ça que j'ai apprises et qui me semblent maintenant assez évidentes. Mais c'est un problème pour les gens qui débutent dans le métier : ce genre de règles n'est écrit nulle part — normalement ce devrait être le directeur de thèse qui les fait remarquer, mais il n'y pense pas toujours, ou parfois il n'est pas là. Ne pas les respecter peut être embarrassant (je me souviens avoir commis un impair une fois, mais je ne me rappelle plus de quoi il s'agissait).
2010-11-05 (vendredi)
Cet après-midi, j'ai assisté à trois heures d'exposés : une d'un groupe de travail géo.alg/crypto à Télécom (dont je suis vaguement un co-organisateur) et deux du séminaire Variétés rationnelles (qui pourrait s'appeler séminaire-des-élèves-de-Colliot-Thélène). Les séminaires de mathématiques (et probablement de beaucoup d'autres disciplines, mais je n'en ai pas vu assez pour pouvoir conclure de façon ferme) obéissent à un petit rituel qui m'agace (et que j'ai insisté pour éliminer à notre groupe de travail à Télécom) : ce rituel fait qu'il y a dans un exposé de séminaire deux personnes jouant un rôle distingué : l'orateur (ou conférencier), évidemment, qui est celui qui parle l'essentiel du temps, mais aussi quelqu'un qui est normalement un des organisateurs du séminaire et que j'appellerai (faute de connaître un nom plus standard à ce rôle) le maître de cérémonie (on pourrait aussi dire : le présentateur). Quand il y a plusieurs organisateurs d'un séminaire, ils exercent généralement la fonction de maître de cérémonie à tour de rôle, car ce rôle ne peut pas être collégial. Le maître de cérémonie doit impérativement être distinct de l'orateur : aujourd'hui, au séminaire Variétés rationnelles, comme un des organisateurs du séminaire était absent et que l'autre était un des exposants, il a fallu qu'une autre personne (en l'occurrence, Colliot-Thélène) joue ce rôle.
Le rôle en question, donc, est tout à fait rituel : lorsque le
séminaire va commencer, le maître de cérémonie prononce l'incantation
propitiatoire (quasiment verbatim) : Nous écoutons
maintenant
Lorsque l'orateur a fini de
parler, le maître de cérémonie dit sobrement $nom_du_conférencier
, qui va nous parler
de $titre_de_l_exposé
.merci
, et
l'assistance peut applaudir (cependant, au séminaire Variétés
rationnelles, quand Colliot-Thélène était un des
organisateurs, on n'applaudissait pas, selon le principe,
avec lequel je suis plutôt d'accord, qu'un exposé de mathématiques
n'est pas un tour de magie et qu'il n'y a pas spécialement lieu de
manifester son émerveillement). Ensuite, le maître de cérémonie
demande à l'assistance y a-t-il des questions ?
, les gens les
posent (sans attendre qu'on les invite individuellement à parler), et
quand les questions sont taries, le maître de cérémonie a le droit
d'en poser lui-même (ce qui est bien vu si l'assistance n'en a pas
posé du tout, histoire qu'il y en ait au moins une), et enfin il
invite l'assistance à remercier de nouveau l'orateur (on applaudit
donc deux fois, y compris s'il n'y a eu aucune question). Tout ceci
est extrêmement codifié.
Il y a, bien sûr, des variantes nationales. En anglais (langue
dans laquelle se font la plupart des séminaires hors des
mathématiques, et même en mathématiques un grand nombre de séminaires
et la majorité des conférences), le maître de cérémonies
annoncera : Our
; et à la
fin : ${if_first_speaker?
first:
next}
speaker for today is $speakers_name
, who will talk
about $title_of_talk
Let us thank the speaker
(on remarquera
qu'en anglais le maître de cérémonie invite l'assistance à remercier
l'orateur alors qu'en français il le remercie lui-même et l'assistance
se joint spontanément à ces remerciements), et
enfin : Let us thank the speaker again
. En
allemagne, on n'applaudit pas, on cogne la table avec l'articulation
des doigts (la main étant repliée en poing) — cela surprend la
première fois. (D'un autre côté, j'ai un ami qui m'a fait remarquer
que si une seule fois on regarde des gens en train d'applaudir en se
disant mentalement, mais qu'est-ce que c'est que ce rituel
idiot ?
, il est ensuite impossible de s'enlever cette idée de la
tête et on a à tout jamais du mal à se retenir de rire quand on se
trouve dans un groupe de gens en train d'applaudir.)
Bref. Je reconnais que le maître de cérémonie joue un rôle
important, qui est justement celui que je n'ai pas décrit : il fait
comprendre à un orateur qui déborderait son temps qu'il faut songer à
arrêter. (Ou il répond à la semi-question s'il me
reste
soulevée par l'orateur.)
En revanche, le rôle de prononciateur de la phrase magique qui ouvre
le séminaire, je trouve ça vraiment idiot. Je ne dis pas ça que par
iconoclasme : cette façon de procéder (qui est essentiellement celle
des soutenances de thèse) donne aux
séminaires un côté plus formel, plus rigide, donc aussi
plus intimidant (notamment pour les jeunes orateurs) que si
l'orateur se contentait de sonder vaguement le premier rang pour
savoir s'il peut commencer (et pareil quand il s'agit de savoir s'il
reste du temps). Le nom de l'orateur n'a pas besoin d'être répété, a
priori tout le monde l'a lu sur l'affiche ou l'annonce du séminaire
(et il vaut mieux le voir écrit de toute façon, parce que sinon on va
se tromper en l'écrivant), et quant au titre, l'orateur peut très bien
l'écrire au tableau. De même, je préfère que l'orateur demande
lui-même s'il y a des questions : c'est lui, après tout, qui vient de
faire une communication, il est normal que ce soit lui qui veuille
savoir si on veut lui en demander plus. Bref, je préfère qu'un exposé
ressemble à une discussion informelle entre collègues (et égaux) qu'à
une soutenance de thèse ou je ne sais quel cérémonial codifié.$n
minutes…?
Il y a d'ailleurs au moins un séminaire prestigieux où les choses
se passent sans cérémonial, c'est le
séminaire Bourbaki. Je
suppose que la logique est que le maître de cérémonie serait
logiquement Bourbaki, mais que bizarrement il n'est pas présent. Je
regrette d'ailleurs qu'il n'y ait pas une petite blague récurrente qui
consisterait à ce qu'à chaque séminaire Bourbaki quelqu'un
aléatoirement se lève pour annoncer à l'assistance : Monsieur
Nicolas Bourbaki, organisateur de ce séminaire, vous prie de bien
vouloir l'excuser pour son absence, due
à
L'humour mathématicien français a l'air d'avoir un peu décliné depuis
les années 30. Au demeurant, j'ai entendu des gens se plaindre du
séminaire Bourbaki du fait de son extrême opacité (on ne sait pas
comment les orateurs sont choisis, ni d'où vient l'argent), donc je ne
sais pas si c'est un modèle à suivre : mais j'apprécie l'absence du
cérémonial religieux qui commence la grande majorité des autres
séminaires.$raison_inventée_rigolote_et_différente_à_chaque_fois
.
2010-10-28 (jeudi)
Je continue dans mon
exploration graphique un peu aléatoire d'objets mathématiques
exceptionnels et mysérieux avec
le graphe
de Higman-Sims, dont je viens de
produire cinq onze
vues.
(Mise à jour (2010-10-29T17:15+0200) : J'avais
initialement écrit cinq
, alors que j'avais produit six vues, je
ne sais pas pourquoi ce lapsus. Mais de toute façon, je me suis rendu
compte entre temps que j'avais mal regardé les symétries et que ma
méthode produit non pas cinq ou six vues différentes
mais onze. Pour me faire pardonner, voici
une jolie
animation (également en mauvaise
qualité sur
YouTube) de ce graphe, qui passe par toutes ces différentes vues
(comme d'habitude, si vous n'arrivez pas à télécharger par BitTorrent,
vous pouvez retirer l'extension .torrent
à la fin de
l'URL pour accéder directement au fichier).
Le graphe de Higman-Sims est l'unique graphe ayant 100 sommets, chacun étant adjacent à 22 autres (ce qui fait donc 1100 arêtes au total), de sorte que deux sommets adjacents n'ont jamais de voisin commun (i.e., le graphe n'a aucun triangle) et que deux sommets non adjacents ont exactement 6 voisins en commun. Comme tout objet mathématique exceptionnel qui se respecte, il admet quantité de définitions ou de constructions équivalentes. Son groupe d'automorphismes (d'ordre 88704000), c'est-à-dire l'ensemble des façons dont on peut permuter les sommets en préservant la relation d'adjacence entre eux, est, à une extension d'ordre 2 près, le groupe du même nom, l'unique groupe simple fini d'ordre 44352000 et un des vingt-six groupes sporadiques. Si on fixe un sommet quelconque, le groupe restant (le stabilisateur d'un sommet, donc) est, de nouveau à une extension d'ordre 2 près, le groupe M22 de Mathieu (qu'on rencontre régulièrement sur ce blog) — ce qui explique que l'ordre du groupe de Higman-Sims soit 100 fois celui du groupe M22.
Il y a une autre façon de décrire le groupe de Higman-Sims, c'est
comme les automorphismes d'un certaine structure combinatoire appelée
la géométrie de Higman (qui comporte 176 « points » et 176
« quadriques », chaque quadrique comportant 50 points et chaque point
étant sur 50 quadriques — et l'automorphisme extérieur du groupe
de Higman-Sims correspondant à échanger points et qudratiques). Cette
description a été trouvée indépendamment, et on ne s'est pas rendu
compte immédiatement qu'il s'agissait du même groupe. Là où
le Club Contexte est très content,
c'est que le Higman
du groupe et du graphe Higman-Sims (Donald
G. Higman, un Américain) n'est pas le même que le Higman
de la
géométrie de Higman (Graham Higman, un Britannique) ; il semble qu'ils
n'aient même pas de lien de parenté évident, c'est tout de même très
fort. (Les blagueurs les appelaient les Higmen
.)
En fait, mes dessins représentent le graphe de Higman-Sims pas seulement comme un graphe abstrait mais comme un minuscule petit bout d'un autre objet mathématique exceptionnel et extraordinaire, le réseau de Leech.
Le réseau de Leech est réseau régulier de points en 24 dimensions
qui a des propriétés absolument mirobolantes ; on peut par exemple le
décrire comme la (seule) façon d'empiler des sphères de même rayon, en
24 dimensions, de façon que chaque sphère en touche 196560 autres (les
sphères sont centrées sur les points du réseau de Leech) ; il est
assez apparenté au réseau engendré par
le système de racines E8
dont je parlais récemment (et qui permet d'empiler des sphères en 8
dimensions, de façon que chaque sphère en touche 240 autres), si ce
n'est que le réseau de Leech n'est pas associé à un système de
racines. Les isométries laissant invariant le réseau de Leech (et
fixant l'origine) forment un autre groupe remarquable, le groupe ·0
(lire dot-oh
) de Conway, qui est une extension
par 2 de l'unique groupe simple fini (appelé ·1 par Conway) d'ordre
4157776806543360000, encore un sporadique. Malheureusement, il n'est
pas question de représenter le réseau de Leech (ou même sa première
couche), parce que déjà un polyèdre ayant 240 sommets en dimension 8
ayant 696729600 symétries, on n'y voit rien, alors représenter un
polyèdre ayant 196560 sommets en dimension 24 et ayant
8315553613086720000 symétries c'est un peu désespéré.
Néanmoins, on peut au moins représenter des tout petits bouts du réseau de Leech. Il se trouve que le graphe de Higman-Sims (comme la géométrie de Higman, d'ailleurs) apparaît naturellement comme un tout petit bout du réseau de Leech : si on choisit trois points quelconques du réseau dont les distances entre eux valent 3, 3 et 2, alors il y a exactement 100 points du réseau qui sont à distance 2 de chacun des trois points choisis, et si on relie par une arête ceux qui sont à distance 3, on obtient le graphe de Higman-Sims ; ceci plonge le groupe de Higman-Sims dans le groupe ·1 de Conway comme le groupe des isométries du réseau de Leech fixant le triangle choisi. Les dessins que j'ai fait sont des projections orthogonales du graphe de Higman-Sims tel que je viens d'expliquer qu'il apparaît dans le réseau de Leech, en choisissant une projection qui révèle la symétrie d'ordre 11 (il n'y a qu'une seule classe de conjugaison d'ordre 11 dans ·0, et elle est dans le groupe de Higman-Sims et, en fait, dans M22). Les 100 points sont organisés en un point au centre et 9 endécagones réguliers autour de lui ; et comme il restait un peu de liberté j'ai fait en sorte que les deux endécagones formés des points directement reliés au point central soient symétriques l'un de l'autre (formant donc un 22-gone régulier) — ce qui ne laisse plus, je crois, que les six projections que j'ai tracées.
Ça ne rend pas très joliment sur l'écran, mais imprimé sur du papier A3 c'est vraiment très esthétique. Ce n'est qu'un minuscule aspect des élégantes symétriques du réseau de Leech, mais c'est déjà inspirant.
2010-10-21 (Thursday)
[Une traduction française de cette entrée est à venir.]
The background: I leave my computers running 24 hours. Mostly because I'm a maniac, but also because they run a number of servers that I want to stay on all the time. The unfortunate thing is, computers make a hell of a noise. Even when I replace the fans by super-silent models, there seems to be a curse upon my boxen: silent fans become moderately noisy after a year, and super noisy the next year, and blowing the dust away just doesn't help. I yearn for fanless designs, but another facet of my curse is that I seem to always get the processor models which overheat enormously. So I thought I could look into mini-PC's like this one or that kind of boards, or something of the sort. One thing that always annoyed me, however, is that I couldn't ever find a mini-PC with dual gigabit LAN (or, at least, two Ethernet ports of which one is gigabit) : I don't want to mess with VLANs, so I really want two physically separate Ethernet ports. Well, it seems that mini-PC's aren't designed for routing, because one almost never finds two Ethernet ports on them, and never with gigabit speed; and extending them is rarely possible.
Anyway. One day I stumbled upon the GlobalScale GuruPlug Server Plus, and I was ecstatic: apart from the ridiculous name, it was exactly what I wanted. An ARM-compatible processor (yeah, non-Intel architectures are worth extra karma points), 512MB RAM and 512MB flash memory, dual gigabit Ethernet, external SATA connector, two USB connectors, µSD slot, Wifi b/g, all in a 95mm × 65mm × 48.5mm box which one plugs directly in a power socket and which uses just a few watts of power. So I rushed to order one. Nay, make that two. Now that was in May (2010-05-16, to be precise).
The device did not arrive for another five months. Not that I was in a hurry, and I understand that they were having technical difficulties (see below), but they could at least have kept their customers informed about the extra delays. I wrote to them in July and they apologized and said they'd be delivering by mid-August. Anyway, two months later, I was about to consider my money lost when, unexpectedly, I got note that my GuruPlugs were on their way, and I received them today.
Well, I think I would just as soon never have them: that would have spared me a moment of joy followed by bitter disappointment.
Apparently the technical difficulty that GlobalScale was having with their GuruPlugs is that they overheat. I guess they must have miscalculated the thermal envelope or something. Well, they responded in the obvious way: by adding a fan.
But that makes the whole thing useless. The whole point of the GuruPlug, as far as I was concerned, was to have a small and totally quiet server. The fan they added isn't just noisy: it's just unbearable. I think my Dyson vacuum cleaner is quieter! And I'm not the only one to think that.
I could, of course, open the device and try to replace the fan by a quieter one or a heatsink or change the casing altogether. That would invalid the warranty, which isn't much of a concern because returning the device, thanks to the scoundrels at FedEx, would probably cost me more in shipping and taxes than the device was worth; and also because the warranty is 30 days only (i.e., pointless). But ignoring that, I hate DIY tinkering: I've had enough blisters and headaches with full-sized PCs, which are made to be opened and modded, I have really no desire to try fiddling with small parts.
I hate fans with the burning hatred of a thousand suns.
And that's not my only grievance with the GuruPlug. There's no
nice and easy way to flash it if you brick it (someday remind me to
write another rant on how scandalously easy it is to brick computers
or computer parts by flashing their BIOS/firmware
in
what-used-to-be-ROM-and-is-now-EEPROM):
you have to use a very unfriendly-looking connector known
as JTAG
to access the internal flash memory or just to get a serial console.
It seems that, even when the thing is working, changing the kernel or
bootloader is a very tedious task that cannot be done simply from the
network: although they use Debian, it's not a simple matter
of apt-get dist-upgrade
, were it only because they need
various kernel patches and a non-standard Wifi driver (why,
oh why is it that Wifi drivers always suck, always require
inscrutable binary firmware, annoyingly hard-to-get sources and
hideously unmaintained patches?). And anyway, the distribution may be
based on Debian, but it's filled with ugly hacks and dubiously
commented scripts.
When you plug the thing in the outlet, apart from making the noise of a jet engine, it starts to function as a wireless access point. Since Wifi sucks completely (that's not GlobalScale's fault: Wifi just never works), my Eee PC was unable to associate to that network; but apparently they barfed the default network setup, meaning you can't use Ethernet either, so I had to set up my desktop PC's wireless card (which normally functions as an access point itself) to get a shell on my GuruPlug. I didn't have time to fully investigate, but what I did see was mostly: a mess.
So, maybe if there were a way to remove the fan yet avoid the overheating problem, and if it turned out that JTAG weren't such a pain to work, and if I could find out how to replace GlobalScale's ugly mess of a distribution by a clean Debian setup, maybe the GuruPlug would be an interesting buy. But I think it's not worth the effort and I'm just going to leave the second one in its box and try to find another way to have a small and fanless PC with two gigabit Ethernet connectors.
2010-10-20 (mercredi)
Je me posais la question de la toxicité relative de tous les sels possibles d'un halogénure de métal alcalin (par exemple, il est bien connu que le chlorure de sodium n'est pas vraiment toxique, c'est beaucoup moins évident pour l'iodure de rubidium). J'ai essayé de compiler une table avec les valeurs de LD50 (ORL-RAT), c'est-à-dire la quantité qu'il faut donner par voie orale à des rats pour en tuer la moitié, exprimée ici en milligrammes de sel par kilogramme de rat :
Lithium | Sodium | Potassium | Rubidium | Césium | |
---|---|---|---|---|---|
Fluorure | ? | 80 | 245 | ? | ? |
Chlorure | 526 | 3000 | 2430 | 4440 | 2600 |
Bromure | 1800 | 3500 | 3120 | ? | ∼2400 |
Iodure | ? | 4340 | ≥1900 | 4708 | 2400 |
L'ennui, c'est que les valeurs de toxicité varient de façon exorbitante pour un sel donné (même en fixant les paramètres comme je viens de le dire), d'une source à l'autre, plus que d'un sel à l'autre ! Et même en tirant toutes ces valeurs d'une seule source, je soupçonne qu'elles ne sont pas très cohérentes les unes avec les autres (ne serait-ce que parce que la précision donnée varie de façon très étrange). Et de toute façon, il en manque. Il faut de toute urgence trouver un stagiaire de chimie pour lui faire tuer plein de rats avec ces vingt sels et de façon systématique. (Par voie orale uniquement. Pour la voie intraveineuse, les États-Unis essaieront sans doute les autres sels sur des humains quand ils auront fini de jouer avec le chlorure de potassium.)
Ensuite, la question est de savoir si on peut approcher ces valeurs par une unique fonction simple f(x,y) où x ne dépendrait que du cation et y que de l'anion. A priori j'attendrais quelque chose du style 1/(1/x+1/y) où x serait en quelque sorte la toxicité du cation pur et y celle de l'anion pur. Mais ça ne marche pas si c'est vrai que le fluorure de potassium est moins toxique que le fluorure de sodium tandis que le chlorure de potassium est plus toxique que le chlorure de sodium. Ce qui ne me surprend pas, d'ailleurs : dans les fluorures, c'est le fluor qui pose problème (il a très envie de causer des dégâts avec le calcium dans le corps — et ce n'est pas joli), et mon pipotron de gros nul en chimie suggère que comme le potassium est plus réactif que le sodium, il aura moins facilement tendance à laisser partir le fluor ; de même, j'imagine que le fluorure de rubidium et le fluorure de césium sont encore légèrement moins toxiques que le fluorure de potassium. Le fluorure de calcium, d'ailleurs, est aussi peu toxique que les moins toxiques des sels listés ci-dessus.
Une fois que quelqu'un aura mesuré fiablement toutes ces LD50, quelqu'un de plus aventureux pourra tester tous ces sels (enfin, peut-être pas les fluorures, quand même) et faire un comparatif précis. Là aussi, on a des renseignements épars sur le Web (l'inimitable Theodore Gray nous apprend par exemple que le chlorure de césium a un goût métallique très désagréable, Wikipédia nous renseigne sur le goût faible et amer du chlorure de potassium, et cette page prétend que l'iodure de sodium est encore plus salé que le chlorure de sodium), mais rien de systématique.
Oui, d'accord, j'aurais pu commencer par faire un tableau des solubilités, ou quelque chose comme ça, qui sont certainement beaucoup mieux connues et comprises, mais ce n'est pas drôle.
2010-10-16 (samedi)
Comme j'étais déçu de ne pas avoir gagné la même célébrité et
fortune avec mes taquins de Mathieu
(244823040 = 210×33×5×7×11×23 combinaisons
possibles) qu'Ernő Rubik avec son fameux cube
(43252003274489856000 =
227×314×53×72×11
combinaisons), voici une nouvelle tentative de puzzle mathématique à
696729600 = 214×35×52×7 combinaisons,
sur cette page-ci (qui ne
marchera que sur un navigateur assez récent gérant
l'élément <canvas>
).
On peut voir ça comme un petit jeu (appuyer sur scramble
et
cliquer sur les points jusqu'à réussir à tout remettre à sa place) ou
comme un outil pour essayer de comprendre le groupe de Weyl de
E8 (à ne pas confondre avec le groupe de Weyl de
E6 dont je parlais
récemment). Les explications mathématiques et le mode d'emploi
sont au bout du lien. C'est plus simple que le Rubik's cube parce que
finalement on ne fait que bouger l'objet en bloc sans le déformer,
mais c'est plus compliqué parce que l'objet
en question vit en
huit dimensions.
Et c'est frustrant, décidément, quoi que je fasse, je n'arrive pas à visualiser huit dimensions (il faut dire que je n'arrive déjà pas à en visualiser trois, alors…). Le système de racines E8 est un de ces objets mathématiques exceptionnels et un peu mystérieux que je trouve complètement fascinants et qui devraient être d'une beauté insoutenable si on arrivait à les voir proprement à défaut de seulement les comprendre. En l'occurrence, celui-ci est un peu comme un solide régulier (même s'il n'est pas régulier avec la définition usuelle du terme, c'est-à-dire si on demande que le groupe de symétries soit transitif sur les drapeaux : il n'y a que trois solides réguliers en toute dimension à partir de 5), mais il a quantité d'autres propriétés remarquables.
Le système de racines E8 est le point de départ pour construire un autre objet remarquable qui en découle naturellement, et qui est E8 lui-même. Encore plus compliqué à visualiser, puisque lui a 248 dimensions (comme 8+240, où 8 est le nombre de dimensions dans lequel vit le système de racines E8 et 240 est le nombre de racines de ce dernier). Et un jour où je serai vraiment en forme, je ferai un puzzle basé sur E8(𝔽2), qui a, pour sa part, 337804753143634806261388190614085595079991692242467651576160959909068800000 = 2120×313×55×74×112×132×172×19×312×41×43×73×127×151×241×331 éléments[#].
[#] C'est beaucoup plus que les malheureux 808017424794512875886459904961710757005754368000000000 = 246×320×59×76×112×133×17×19×23×29×31×41×47×59×71 du Monstre, même si le Monstre est en fait beaucoup plus difficile à réaliser parce que pour E8(𝔽2) on peut utiliser des matrices de taille 248×248 alors que pour le Monstre il faut a priori des matrices de taille 196883×196883, ou peut-être 196882×196882 si on travaille sur 𝔽2 mais en tout cas c'est énorme. Par contre, c'est toujours moins que le nombre de protons de l'Univers, qui vaut notoirement exactement 15747724136275002577605653961181555468044717914527116709366231425076185631031296.
2010-10-12 (mardi)
Beaucoup connaissent sans doute déjà le célèbre film scientifique Powers of Ten de Ray et Charles Eames, qui présente la taille relative des choses dans l'Univers, et des puissances de dix, par un zoom à travers le cosmos, entre un panorama qui englobe de nombreuses galaxies et l'intérieur d'un proton dans la peau d'un homme qui dort après un pique-nique à Chicago (ce pique-nique constituant la scène initiale du film, et le milieu du zoom). Sinon, je vous encourage à le voir (cf. aussi ici).
Je l'ai vu pour la première fois en 1984 au Ontario Science Centre (quand mes parents et moi habitions Toronto) — ce même musée des sciences dont je me plaignais il y a trois ans qu'il était devenu juste une attraction ludique pour gamins. Il y avait une petite salle où il passait en boucle, et mon père et moi (mon père surtout, mais moi aussi) en étions fans et nous l'avons vu de nombreuses fois.
Sauf que c'est un peu plus subtil : il y a deux versions du film. Celle que j'ai vue et revue en 1984, c'est la version de 1968, qui est en noir et blanc si je me rappelle bien. Plus tard, le Science Centre a changé et a mis la version de 1977, en couleur (je crois que je l'ai vue en 1988 quand nous sommes retournés à Toronto pour un été), et c'est cette version-là qu'on voit maintenant partout (y compris sur le lien vers YouTube que je donne plus haut). La différence notable entre la version de 1968 et son remake, c'est que la version ancienne, dans la partie du voyage des puissances de dix qui zoome vers l'extérieur et vers le cosmos, affichait les effets relativistes (le temps qui s'écoule pour le voyageur et le temps qui s'écoule sur Terre, notamment, au fur et à mesure que la vitesse s'approche de celle de la lumière). Cela a probablement été jugé trop difficile à comprendre et un peu hors sujet, et éliminé de la version suivante. Mais mon père aimait beaucoup mieux cette première version, et a été déçu quand le film a changé.
Toujours est-il que la version de 1968 est apparemment introuvable sur le Web. C'est dommage. Il y a cependant un DVD, trouvable sur Amazon (mais uniquement d'occasion), qui contient apparemment les deux versions : du moins si j'en crois un commentaire qui confirme mon souvenir à ce sujet :
The primary difference between the two versions is that in the first version, there is a side window kept running throughout the movie, which shows the effect of relativity on the time-keeping of ten seconds per order of magnitude of meters travelled. Around the time the "camera" pulls back from 10-to-the-13th to 10-to-the-14th meters, the subjective time-sense of the camera operator would start to be strongly affected by relativity, because the "camera" would start to be travelling at a significant fraction of the speed of light. Gradually, subjective and Earthly time-sense gets so far out of whack that ten seconds for the cameraman would be 100,000,000 years on Earth. This might have the effect of prompting the philosophically-inclined viewer to get the screaming meemies, but it's better not to sweat the phiosophical details too much. Just ride with it, baby. Anyway, evidently, the producers decided that the additional feature of the relativistic clock was too distracting, and they pulled it from the final version. Here in this video, we get to see both versions of the film, which is a pretty tremendous experience.
J'hésite un peu à l'acheter, mais bon, c'est quand même un peu cher (et généralement acheter un article d'occasion chez Amazon.com quand on n'habite pas aux États-Unis signifie passer par plein d'étapes très compliquées pour finalement s'entendre dire que ce n'est pas possible de livrer là où on est).
2010-10-11 (lundi)
Mon cardiologue (que je suis allé voir pour des problèmes de tachycardie et de palpitations — apparemment je fais parfois des extrasystoles bigéminées, mais il n'a pas l'air de trouver ça grave, et il semble que ce soit dû au stress) a jugé qu'il serait peut-être bien de traiter un peu mon anxiété, et les manifestations physiologiques qui l'accompagnent. Non pas avec un anxiolytique mais plutôt avec un bêta-bloquant, en l'occurrence le propranolol à petites doses. On va faire un essai pendant un mois, pour voir comment je réagis, mais sur la description qu'il m'en a faite, ça a l'air d'être vraiment ce qu'il me faut.
2010-10-08 (vendredi)
Je suis allé voir Kaboom, parce que la bande-annonce m'avait bien plu. Ben le film n'a pas beaucoup de rapport avec ces extraits. Enfin, plus exactement, l'impression que j'ai eue est qu'il y avait deux ou trois scénaristes et qu'ils se sont amusés à ce que chacun écrive quelques scènes à tour de rôle[#], et qu'ils n'avaient pas du tout le même avis sur ce que devait être le film. Et en plus que l'un d'entre eux avait fait un peu trop usage de psychotropes et qu'un autre avait un sens de l'humour très particulier. Bref, il y a des scènes qui sont bonnes, mais dans l'ensemble, je ne recommande vraiment pas ce film inclassable. Sauf peut-être comme nanar à regarder après une teuf ou une partouze.
[#] C'est une blague classique sur Internet, je crois (et peut-être quelqu'un saura-t-il la retrouver), l'histoire, malheureusement inventée, où un garçon et une fille (au lycée ou à la fac, je ne sais plus) doivent écrire une histoire en écrivant chacun une phrase ou un paragraphe à son tour, et ils ne veulent vraiment pas la faire aller dans le même sens, et le résultat de la dispute est tout à fait cocasse.
2010-10-06 (mercredi)
Le fait inutile du jour : le polynôme
27·x27 + 21·x26 − 484·x25 − 3228·x24 − 16572·x23 − 68675·x22 − 222360·x21 − 572820·x20 − 1173331·x19 − 1869830·x18 − 2244571·x17 − 1849271·x16 − 462819·x15 + 1776007·x14 + 4159041·x13 + 5483063·x12 + 4692322·x11 + 1636621·x10 − 2304856·x9 − 4629308·x8 − 3932160·x7 − 1462752·x6 + 471744·x5 + 948800·x4 + 591872·x3 + 205056·x2 + 38912·x + 3072
a pour groupe de Galois sur ℚ le groupe de Weyl de E6, d'ordre 51840 qui peut être décrit comme SO6−(𝔽2) ou SO5(𝔽3) ou encore comme groupe des automorphismes de l'unique groupe simple d'ordre 25920 (qui peut lui-même être décrit comme n'importe lequel de : SU4(𝔽2), SΩ6−(𝔽2), PSp4(𝔽3) ou SΩ5(𝔽3).
Ci-contre, la figure de ses racines dans le plan complexe (j'ai cadré pour qu'on les voie toutes sauf une, la racine réelle valant environ 7.2113675276, qui déborde). Le graphe que j'ai représenté en reliant chacune des racines à 10 autres, et qui est isomorphe au graphe du polytope 221 de Gosset, est préservé par le groupe de Galois : ce dernier est justement l'ensemble des permutations des racines qui laissent connectées les racines qui l'étaient.
Le polynôme est scindé modulo 1564741, 2506421, 2842537, 2848051, 3116447, 3331217, 3728393…
Les mathématiques expérimentales, c'est rigolo ! (Mais non, je n'ai pas pêché ce polynôme en essayant au hasard jusqu'à en trouver un qui marche.)
2010-10-05 (mardi)
Plein d'appareils électroniques (du magnétoscope au four à micro-ondes en passant par le téléphone sans fil, la station météo et que sais-je encore) viennent avec une horloge interne, et affichent l'heure de façon bien visible. Ça part d'une bonne intention, mais c'est plutôt une source d'emmerdes. Non seulement ça veut dire que deux fois par an il faut passer par tous ces appareils et se rappeler comment on est censé les régler (et c'est parfois extrêmement peu intuitif, comme pour mon autotensiomètre), mais en plus, même en-dehors des changements d'heure, ces maudits trucs ne sont jamais foutus de rester à l'heure : le pire chez moi est le four à micro-ondes qui prend quelque chose comme dix minutes d'avance par mois, mais même les trucs censés se mettre à l'heure automatiquement ne le font pas toujours correctement (ma station météo censément radio-contrôlée ne capte pas bien le signal car mon appartement est au fond d'une cour, et parfois elle se décale d'une ou deux heures ; et mon poussinet et moi nous sommes tout juste débarrassé d'un décodeur TNT qui trouvait inexplicablement le moyen de se régler chaque nuit à une heure de retard en été et deux en hiver — non, ce n'est pas le temps universel, c'est exactement le contraire, je ne sais vraiment pas comment c'est possible — plus quelques minutes un peu aléatoirement). La seule chose qui soit vraiment et fiablement à l'heure, chez moi, c'est mon ordinateur (lui il obtient l'heure par réseau), mais même s'il affiche l'heure en haut de mon bureau, je ne suis pas dessus 24h sur 24 (contrairement aux rumeurs à ce sujet), et l'écran s'éteint au bout d'un certain temps.
On a beau savoir que les choses ne sont pas à l'heure, on finit
toujours pas se laisser piéger et par les croire, ou au moins par
s'énerver en se demandant quelle heure est-il au juste ? où y
a-t-il une vraie pendule qui donne la bonne heure, dans cette foutue
maison ?
Un jour j'assumerai la geekitude ultime et je m'achèterai une horloge atomique. (J'ai entendu des rumeurs selon lesquelles on peut trouver des horloges à rubidium pour moins d'un demi-millier d'euros, mais je ne sais pas où.)
2010-09-16 (jeudi)
Les six langues officielles des Nations Unies sont l'arabe, le chinois, l'anglais, le français, le russe et l'espagnol. Même si on peut discuter dans le détail (par exemple pour arguër que le hindi+ourdou devrait y figurer si on ne compte qu'en nombre de locuteurs ; ou que le chinois ne devrait pas y figurer si on mesure l'usage limité qu'il en est fait comme lingua franca en-dehors d'un pays ; etc.), il n'en demeure pas moins que, globalement, c'est une bonne approximation des langues importantes au niveau planétaire. Disons que si on devait choisir six langues à connaître pour se débrouiller sur Terre, pour être citoyen du monde, il s'agit d'un choix plus que raisonnable. Malheureusement, ce sont aussi six langues globalement plutôt merdiques au niveau de la difficulté à les apprendre (je n'ai pas énormément de points de comparaison, mais l'allemand, par exemple, est probablement nettement plus facile à apprendre qu'aucune des six[#] — je parle pour quelqu'un dont la langue maternelle serait extrêmement éloignée des sept langues en question).
Voilà ce qui me donne l'idée suivante : j'aimerais apprendre un texte unique dans ces six langues. Apprendre, c'est-à-dire apprendre à lire et à prononcer (fût-ce avec un accent pourri), tout en comprenant ce que je lis ou prononce ; voire apprendre par cœur, selon la patience que j'ai à réaliser ce défi. Le texte, choisi pour son universalité et pour le fait d'être naturellement disponible dans les six langues des Nations Unies (mais éventuellement dans beaucoup d'autres si je veux continuer le défi), s'impose de lui-même : la Déclaration universelle des Droits de l'Homme. Comme il est assez long et qu'il faut un début à tout, il s'agit au moins de commencer par savoir lire :
يولد جميع الناس أحراراً متساوين في الكرامة والحقوق، وقد وهبوا عقلاً وضميراً وعليهم أن يعامل بعضهم بعضاً بروح الإخاء.
人人生而自由,在尊严和权利上一律平等。他们赋有理性和良心,并应以兄弟关系的精神相对待。
All human beings are born free and equal in dignity and rights. They are endowed with reason and conscience and should act towards one another in a spirit of brotherhood.
Tous les êtres humains naissent libres et égaux en dignité et en droits. Ils sont doués de raison et de conscience et doivent agir les uns envers les autres dans un esprit de fraternité.
Все люди рождаются свободными и равными в своем достоинстве и правах. Они наделены разумом и совестью и должны поступать в отношении друг друга в духе братства.
Todos los seres humanos nacen libres e iguales en dignidad y derechos y, dotados como están de razón y conciencia, deben comportarse fraternalmente los unos con los otros.
Bon, ce n'est pas tout de savoir comment ça s'écrit, il faut aussi savoir comment ça se prononce. Je n'ai pas de problème pour le français ou l'anglais, et je peux certainement trouver assez facilement comment l'espagnol se prononce. Pour les trois autres langues, il me manque (au moins) un complétement très important pour que la tâche devienne vaguement algorithmique : pour l'arabe la vocalisation complète, pour le chinois mandarin la transcription en pinyin (tons compris) ou en bopomofo, et pour le russe la place de l'accent tonique. Voire, directement, une transcription précise en alphabet phonétique. Cela est beaucoup plus difficile à trouver.
S'agissant de l'article 1 (ci-dessus), on trouve assez facilement ce qui me manque :
يُولَدُ جَمِيعُ النَّاسِ أَحْرَاراً مُتَسَاوِينَ فِي الكَرَامَةِ وَالحُقُوق، وقَد وُهِبُوا عَقْلاً وَضَمِيراً وَعَلَيهِم أَن يُعَامِلَ بَعَضُهُم بَعْضاً بِرُوحِ الإِخَاء.
Rénrén shēng ér zìyóu, zài zūnyán hé quánlì shàng yīlù píngděng. Tāmen fùyǒu lǐxìng hé liángxīn, bìng yīng yǐ xiōngdì guānxì de jīngshén xiāng duìdài.
Все́ лю́ди рожда́ются свобо́дными и ра́вными в своём досто́инстве и права́х. Они́ наде́лены ра́зумом и со́вестью и должны́ поступа́ть в отноше́нии дру́г дру́га в ду́хе бра́тства.
On trouve même des enregistrements de gens lisant ça dans chacune des langues en question, ce qui permet de savoir exactement comment il faut prononcer. Pour les articles suivants, ce sera plus dur !
Par ailleurs, conformément à ce que
j'avais déjà souligné, il est
amusant et intéressant de faire des rercherches dans Google images des
différents mots. Par exemple, s'agissant du mot qui
signifie dignité
(dans égaux en dignité et en droits
),
voici ce qu'on obtient quand on le
recherche : en
arabe, en
chinois, en
anglais, en
français, en
russe
et en
espagnol : les êtres humains sont peut-être égaux en dignité, mais
manifestement ils ne se la représentent vraiment pas de la même
façon ! (Et sur ces images, je préfère clairement la version
espagnole.)
[#] Esquisse d'argument : l'allemand a une prononciation passablement régulière par rapport à son écriture (en tout cas par rapport à l'anglais ou au français) et l'écriture donne toute l'information pour lire le mot (contrairement à l'arabe, au chinois et dans une certaine mesure au russe), sa grammaire est d'une difficulté modérée dans l'absolu (nettement plus que l'arabe ou le russe), sa morphologie est limitée (contrairement au français, au russe et à l'espagnol), et son vocabulaire est productif à partir d'un nombre de formes de base nettement plus limitées que la plupart des autres langues. Je pense donc que quelqu'un qui ne parlerait, disons, que le tamoul (pour qu'il soit un peu neutre dans le jugement), et qui disposerait de méthodes ou de professeurs d'un niveau égal, aurait plus de facilité à apprendre l'allemand que l'arabe, le chinois, l'anglais, le français, le russe ou l'espagnol.
2010-09-14 (mardi)
J'avoue avoir un certain intérêt pour l'observation de ce qu'il est
convenu d'appeler la politique politicienne
, c'est-à-dire tout
ce qui n'est pas questions de fond mais questions de pouvoir,
d'alliances et d'hommes. On est censé mépriser ça, ou, en tout cas,
tous les hommes politiques ne manquent pas de rappeler régulièrement,
dès qu'un journaliste leur pose une question sur ce terrain, que ce
n'est pas ce qui intéresse les électeurs (sous-entendu, moi je ne fais
pas de la politique politicienne, je fais de la politique de fond,
celle que les électeurs apprécient) — jugement qui est
clairement mensonger s'agissant d'eux-mêmes (évidemment qu'ils font
tous de la politique politicienne ! ce serait idiot de penser qu'on
peut s'en passer) et dont je me demande dans quel mesure il est vrai
s'agissant des électeurs (s'il y a tant d'éditoriaux, d'articles de
journaux, d'émissions de télé, et alia, concernant les jeux de
pouvoir, c'est probablement que ça doit intéresser d'autres que ceux
qui les font). Bref, je ne trouve pas ça, pour ma part, spécialement
méprisable, vu qu'il est aussi naïf de penser qu'on peut faire sans
qu'il le serait de s'imaginer qu'on peut gagner une bataille sans
généraux ou qu'on peut accéder au pouvoir et garder tous ses idéaux
— et en tout cas c'est (intellectuellement, humainement,
sociologiquement) intéressant à observer.
Mais à côté des hommes politiques qui la font, cette politique politicienne, il y a aussi des sortes de commentateurs sportifs qui la dissèquent. Avoir un commentaire un peu éclairé est certainement souhaitable, mais ces gens-là en arrivent à vouloir tellement briller par la profondeur, la subtilité, ou la portée de leur analyse qu'ils en viennent vraiment à incarner eux-mêmes tout ce qu'on trouve d'irritant au contenu qu'ils sont censés analyser.
Car tout devient prétexte à déceler un nouveau mouvement de fond.
N'importe quelle déclaration marque un tournant
, n'importe
quelle phrase prononcée sans réfléchir est lourde de sens et de
calcul, tout n'est que sophistication byzantine (que seuls ces mêmes
analystes, bien sûr, savent décoder). Le Premier ministre a-t-il
prononcé une phrase dans laquelle on pouvait éventuellement imaginer
une nuance différente de celle que le Président avait utilisée ? Tout
de suite, Matignon marque sa différence
avec l'Élysée. La
première secrétaire du Parti socialiste attaque-t-elle telle position
du chef de l'État ? C'est forcément un calcul très précis concernant
la façon dont le Front national se positionnera au premier tour de la
présidentielle de 2012. Ouhlà. L'opinion publique telle que mesurée
par je ne sais quel sondage de marge d'incertitude gigantesque
a-t-elle varié de 1% ? C'est un vaste retournement qui se dessine sur
le sujet. Et d'en tirer des leçons à donner à tout le gotha
politique.
Ces gens sont bien heureux que leurs prévisions, leurs analyses et leurs commentaires sont aussitôt entendus qu'ils sont déjà oubliés. Il serait intéressant de les faire enregistrer, avant chaque sondage et surtout avant chaque élection, les résultats qu'ils prévoient, pour confronter ces prévisions à la réalité et mesurer un peu précisément la qualité de leur oracle.
2010-09-11 (samedi)
A priori, le site marchand spartoo.com (ils vendent des chaussures, et quelques vêtements) est bien conçu, leur catalogue est intéressant (à mes yeux au moins), et leurs prix sont compétitifs. Ils livrent rapidement, et il est très simple et gratuit de faire un retour si on s'est par exemple trompé de pointure (on imprime une étiquette qu'on colle sur le colis, et on le dépose dans un relais Kiala, c'est-à-dire un réseau de commerçants qui font du dépôt et de la livraison de colis). Tout cela est fort attractif.
Quand ça marche. Parce que le problème avec les
mécaniques bien huilées, c'est que quand il y a un problème, il
devient impossible de faire quelque chose. J'avais commandé, le
30 août, une paire de
chaussure Nike
(Air Force 1 Mid, 315123-003) de
couleur noire.
Le 2 septembre (quand je vous dis que c'est rapide !), la commande
m'est livrée. Problème : elle m'est
arrivée bleue.
La couleur bleue n'étant pas dans le catalogue de spartoo.com, je
soupçonne une erreur dans les stocks. De fait, la boîte est
correctement étiquetée par Nike (ces andouilles ne disent
pas blue
, ils disent varsity
royal
, ce qui est quand même le nom de couleur le plus
grotesquement pompeux qui soit, mais bon, au moins le numéro de
référence est clair, c'est 315123-400 alors que sur ma facture c'est
315123-003).
Pas de problème, il suffit de retourner la chose et de demander un
nouvel article. Le formulaire de retour a même une case le produit
m'est bien arrivé, mais ce n'était pas la couleur commandée
, que
je coche, et il y a un champ pour entrer plus d'explications. Je
dépose donc (toujours le 2 septembre) mon colis correctement étiqueté
chez une imprimerie pas loin de chez moi qui fait relais Kiala, et
j'attends des nouvelles. Le lendemain je reçois un mail m'annonçant
que mon retour est accepté.
Le 8 septembre (mercredi dernier), nouvelle livraison, en
remplacement. Très bien, mais c'est toujours exactement la même
chose : la chaussure est obstinément bleue, et porte obstinément le
numéro 315123-400. Cette fois, en plus de faire un retour, j'écris au
service clientèle (enfin, j'écris à une de ces adresses associées à un
prénom féminin évocateur par lesquelles spartoo.com écrit à ses
clients, et qui sont, probablement, toutes exactement la même chose)
un mail détaillé expliquant la situation, avec toutes les références :
je reçois un mail automatisé m'informant qu'un ticket de demande de
renseignement est ouvert. Bon, ce n'est pas une demande de
renseignement, mais on peut au moins espérer qu'ils les lisent. Pour
plus de précaution, je colle sur la boîte des chaussures que je
retourne un post-it sur lequel j'attire de façon très visible
l'attention sur le problème (Vous avez une erreur dans vos
stocks : ceci est la référence Nike 315123-400 (bleue),
j'avais commandé la 315123-003 (noire)
).
Aucune réaction du service client, bien sûr, sauf les mails
complètement automatisés me signalant que mon retour est accepté,
qu'une nouvelle commande est en préparation (c'est Amélie
qui
signe les mails relatifs aux colis, et Adriana
qui signe ceux
concernant les commandes : pourquoi ai-je l'impression que ces
personnes n'existent pas ?). Et ce matin (11 septembre, donc),
nouvelle livraison. La chaussure persiste à être bleue. Je me
demande si je n'ai pas reçu exactement la même, d'ailleurs (j'aurais
peut-être dû mettre un lapin blanc invisible dans la boîte que je
retournais, pour le savoir) ; après tout, ils ne doivent pas avoir
tant de paires que ça, pour un modèle précis et une pointure
précise.
J'ai hésité à être taquin et obstiné, et à continuer les retours avec demande d'échange pour voir combien de temps ça pourrait durer avant que quelqu'un se rende compte de la situation. Après tout, même si visiblement les frais de personnel doivent être très réduits puisque tout a l'air totalement automatisé, il faut au moins qu'ils paient à chaque fois une livraison par Colissimo, qui aurait fini par représenter plus que le prix de la chaussure, et en tout cas certainement plus que leur marge dessus. Mais bon, je veux quand même revoir mon argent, à défaut de chaussures de la bonne couleur : je fais donc un retour contre remboursement. (En ayant quand même la conscience de décrire, de nouveau, sur un post-it sur la boîte, quel est le problème, et en le signalant de nouveau au service clientèle.) J'irai acheter cette paire de chaussures dans une vraie boutique[#] dans la vraie vie.
Reste que j'ai perdu du temps, vraiment inutilement, avec cette connerie, ne serait-ce qu'à fermer des boîtes, à coller des étiquettes, à déposer des colis dans des relais, et à rédiger des mails au service clientèle qui ne les lira apparemment jamais. Et eux ont perdu de l'argent aussi. Ça laisse surtout un goût amer à cause de l'impossibilité de contacter un humain : il y a probablement quelqu'un chez spartoo.com qui serait content d'entendre mon histoire[#2], mais je n'ai aucune façon de le contacter (mes mails partent directement à la poubelle, et mes post-its sur les boîtes certainement aussi vu que le magasinier qui les reçoit n'y est pour rien et ne peut rien y faire). Et il y a probablement quelqu'un qui chausse aussi du 44 qui aura envie d'acheter la même paire de chaussures que moi et qui subira la même surprise.
Mise à jour (2010-09-13) : Ils m'ont téléphoné pour s'excuser, expliquer un peu ce qui s'est passé (il y a eu une erreur entre la référence qu'ils ont photographiée et enregistrée sur le catalogue et celle qu'ils ont commandée à Nike), et m'offrir un bon de réduction pour mes prochains achats chez eux.
[#] C'est ce que j'aurais dû faire dès le début, me dites-vous ? Pas clair : si j'ai commandé chez spartoo.com, c'est justement suite à l'agacement du service chez une boutique Foot Locker : j'ai montré un modèle exposé (et en promotion) en demandant à l'essayer en 43 (selon les marques, je chausse entre 42 et 46), j'attends cinq minutes qu'on me l'apporte, je l'essaie, il est trop petit, et je me rends compte que par ailleurs ce n'est pas exactement le modèle que j'avais demandé. J'attire l'attention sur ce fait (la différence entre les modèles n'était vraiment pas évidente, et la vendeuse n'en avait apparemment pas du tout pris conscience), et je demande à voir l'autre, et en 44 : de nouveau cinq minutes passent, et on m'apporte bien du 44, mais toujours du mauvais modèle. Cette fois, je n'essaie pas les chaussures, j'insiste pour voir le modèle que j'avais montré et pas celui d'à-côté, et on me répond, avec le ton de la plus parfaite évidence, qu'il n'y en a plus. Je suis parti un peu furieux et en oubliant que comme le modèle exposé (celui que je voulais) était à ma pointure, je pouvais au moins exiger d'avoir la paire de démonstration.
[#2] Bien sûr que le risque de faire ce genre d'erreurs est un coût parfaitement assumé par le marchand, eu égard aux économies de personnel qu'il permet de faire. Mais là l'absurdité est poussée jusqu'à un point vraiment extrême.
2010-09-07 (mardi)
Une tradition idiote (dont je ne sais pas si elle est
franco-française ou si d'autres pays font pareil) veut qu'à chaque
manifestation les journalistes donnent le nombre de
manifestants selon la police — et selon les
organisateurs
. Je sais que ça devient une manie chez moi de taper
sur les journalistes, mais, quand même, en disant ça, ils sont en
train de dire qu'ils ne font pas leur boulot : parce que, dans mon
esprit, c'est justement la presse qui serait censée enquêter de façon
impartiale pour établir un chiffre correct. Par exemple, en cherchant
à savoir comment, au juste, les uns et les autres arrivent à leurs
nombres, ou, plus exactement, qui ils comptent au juste, et en
déterminant par quel rapport ces méthodes de dénombrement/sélection
sous- ou sur-estiment la population de manifestants par rapport à ceux
qui répondraient oui
à la question êtes-vous en train de
manifester pour ‹truc› ?
(ce qui est, à mon avis, la
bonne façon de caractériser un manifestant, et à le distinguer d'un
badaud). Ça n'a pas l'air excessivement
difficile[#], et ça permettrait
de mettre un terme à ce pipo récurrent.
[#] Exemple de protocole expérimental : se renseigner sur la façon dont la police compte, et sur la façon dont les organisateurs comptent, appliquer ces deux méthodes à un échantillon d'entre une grosse centaine et un petit millier de personnes, vérifier que le rapport entre les deux chiffres est bien le rapport entre les chiffres (ou les chiffres partiels à l'heure considérée) donnés par la police et les organisateurs, puis, ce contrôle passé, déterminer de façon fiable qui est au juste manifestant dans l'échantillon en posant la question à chacune de ces personnes, et conclure.
2010-09-06 (lundi)
J'ai vu mon dentiste cet après-midi pour ma dent cassée : il m'a recommandé de poser un onlay en céramique (pour 380€, ce qui, en matière de soins dentaires, est une bouchée de pain). Il a pris l'empreinte pour la transmettre à son prothésiste, et il a posé un pansement temporaire (je ne sais pas ce que c'était exactement, une sorte de composite j'imagine ; en tout cas, c'est dur et grisâtre) pour éviter que la dent se casse encore plus.
Ça c'était à 15h. À 21h le pansement était déjà tombé : j'ai mangé un petit peu de chocolat (même pas particulièrement dur ni sorti du frigo) et je n'ai pas fait suffisamment attention, ou pas réussi, à ne manger que du côté droit.
Pfff… C'est ce que je déteste avec la chirurgie dentaire : à
chaque fois, je vais de complication en complication. (Pareil quand
on me préparait la seule couronne que j'aie : la dent temporaire
qu'avait mise la dentiste — quelqu'un d'autre que celui que je
vais voir maintenant — était tombée en à peu près 24h. Je sais
que c'est temporaire
, mais c'était quand même censé durer un
peu plus longtemps que ça.)
Je suis censé ne manger que des bouillons pendant dix jours, ou quoi ?
2010-09-03 (vendredi)
En français, en principe, un milliard
désigne le nombre
109 (ou 1e9 dans la version informatique de la notation
scientifique), c'est-à-dire 1000000000 (un un suivi de neuf zéros), ou
mille millions ; un billion
désigne 1012 (=1e12),
c'est-à-dire 1000000000000, soit mille milliards ou un million de
millions ; et un trillion
désigne 1018 (=1e18),
c'est-à-dire 1000000000000000000, soit un million de
billions, ou un milliard de milliards. Il n'y a pas de mots pour
désigner 1015 (=1e15), on doit juste dire mille billions
(quand j'étais petit, je m'imaginais fort logiquement que c'était
un billiard
, qui a même
une entrée sur
Wikipédia en français, mais ce n'est pas très sérieux). De façon
générale, un N-llion, c'est 106N (par
exemple, un septillion, c'est 1042), ou, si on préfère
parler en puissances de 1000, c'est 10002N : on
dit donc que le français utilise la convention 2N. Les
puissances de mille sont appelées, dans cette convention : mille,
million, millard, billion, « billiard », trillion, « trilliard »,
quadrillion, « quadrilliard », quintillion, etc.
En anglais, le mot million
a le même sens que
son homologue français ; le mot milliard
n'existe
pas trop ; et un billion
désigne le nombre
109 (ou 1e9 dans la version informatique de la notation
scientifique), c'est-à-dire 1000000000 (un un suivi de neuf zéros), ou
mille millions, ce qu'en français on nomme un milliard.
Un trillion
désigne 1012 (=1e12),
c'est-à-dire 1000000000000, ce qu'en français on nomme un billion ; et
un quadrillion
désigne 1015 (=1e15),
c'est-à-dire 1000000000000000, ce qui se nomme en français mille
billions, ou un billiard
si on consent à utiliser ce mot.
Quant à 1018 (=1e18), le trillion
du français, en
anglais il se dit quintillion
. De façon
générale, un N-llion
, c'est
103(N+1) (par exemple,
un septillion
, c'est 1024, ce qu'en
français on appellerait quadrillion
), ou, si on préfère parler
en puissances de 1000, c'est 1000N+1 : on dit
donc que l'anglais utilise la convention N+1. Les
puissances de mille sont appelées, dans cette
convention : thousand, million, billion, trillion,
quadrillion, quintillion, sextillion, etc.
Pour que ce soit bien clair :
Notation scientifique | 103 | 106 | 109 | 1012 | 1015 | 1018 | 1021 | 1024 |
---|---|---|---|---|---|---|---|---|
Notation informatique | 1e3 | 1e6 | 1e9 | 1e12 | 1e15 | 1e18 | 1e21 | 1e24 |
Convention 2N (français) | mille | million | milliard | billion | « billiard » | trillion | « trilliard » | quadrillion |
Convention N+1 (anglais) | thousand | million | billion | trillion | quadrillion | quintillion | sextillion | septillion |
Préfixe SI | kilo | méga | giga | téra | péta | exa | zetta | yotta |
Périphrase | mille | un million | un milliard | mille milliards ou : un million de millions | un million de milliards | un milliard de milliards | mille milliards de milliards | un million de milliards de milliards |
La convention 2N (celle du français) a l'avantage pour elle d'être un peu plus simple pour les calculs : un trillion de trillions est un sextillion comme trois et trois font six, et un quadrillion de quadrillions est un octillion comme quatre et quatre font huit.
Bon, ça c'est la théorie.
La pratique, c'est que c'est le bordel complet. D'abord, parce que
le français eut utilisé (au moins partiellement) la
convention N+1 : le Littré définit
le billion
comme : Terme d'arithmétique. Dix fois cent
millions ou mille millions, un milliard, qui [le mot
Et milliard
]
est plus particulièrement usité dans le langage de la finance et dans
le langage ordinaire.trillion
: Terme
d'arithmétique. Mille billions, ou mille fois mille billions.
(le
Club Contexte vous remercie, Monsieur Littré ! Dans la première
définition, ou
veut dire c'est-à-dire
, et dans la
seconde il veut dire ou bien au contraire
.) Je pense qu'il y a
toujours eu confusion.
A contrario, l'anglais eut utilisé la convention 2N : voici ce que dit l'OED à ce sujet :
billion
(ˈbɪljən). [a. F. billion,
purposely formed in 16th c. to denote the second power of
a million (by
substituting bi- pref. for the initial
letters), trillion
and quadrillion being similarly formed to denote
its 3rd and 4th powers. The name appears not to have been adopted in
Eng. before the end of the 17th c.: see quot. from Locke.
Subsequently the application of the word was changed by French
arithmeticians, figures being divided in numeration into groups of
threes, instead of sixes, so that
F. billion, trillion,
denoted not the second and third powers of a million, but a thousand
millions and a thousand thousand millions. In the 19th century, the
U.S. adopted the French convention, but Britain retained the original
and etymological use (to which France reverted in 1948).]
Je ne sais pas ce qui a pu être décidé en
1948[#0] ou comment ça a pu se
passer, mais au moins ça a le mérite d'être clair : d'après
l'OED, la convention initiale
est la convention 2N, et elle date du 16e siècle
en France, puis a été adoptée en anglais au 17e siècle ; au
19e siècle la France est passée à la
convention N+1 (d'où les définitions données par Littré),
les États-Unis ont suivi, puis au 20e siècle la France est
revenue à la convention d'origine 2N. Bon, en fait, mon
édition de l'OED date des
années '80 (c'est la dernière édition imprimée), et j'imagine qu'une
édition plus récente signalerait que les Britanniques se sont
maintenant plus ou moins pliés à l'impérialisme américain
(donc N+1) et que billion
désigne
maintenant vraiment un milliard même en Angleterre.
La confusion était déjà bien grande, et l'inventeur de la
convention N+1 (un Français, donc, si j'en crois la petite
remarque de l'OED) mériterait
d'être pendu haut et court s'il n'était pas déjà mort depuis bien
longtemps. Mais voilà qu'elle est rendue encore pire par l'apparition
d'une engeance qui tente sans cesse de nous faire sombrer plus bas
dans la nullité intellectuelle : les
journalistes. Les journalistes français reçoivent quantité
d'informations en anglais et, dès qu'ils voient un mot
comme trillion
figurer dans l'original, ils ne se
font pas chier, ils traduisent par trillion
. De toute façon,
ils ne savent pas compter, pour eux un trillion est quelque chose de
complètement incompréhensible, alors peu importe. On les entend donc
régulièrement dire, par exemple, que la dette des États-Unis est
de treize trillions
de dollars (pour
traduire thirteen trillion
), sans se rendre
compte de l'énormité du chiffre qu'ils
avancent[#]. Non, elle est de
treize billions de dollars, ça suffit largement, merci.
Certains ajoutent l'insulte à l'injure, pardon, ajoutent l'injure à la
blessure, en précisant qu'un trillion
c'est un milliard de
milliards
, ce qui est juste, mais ce qui n'est pas l'usage qu'ils
ont fait de ce mot. Tiens, je parie qu'il y a au moins un journaliste
français qui a été assez con pour prétendre qu'on
aurait calculé
pi à cinq trillions de chiffres (remarquez que déjà l'article que
je cite est en anglais censément britannique et utilise la
convention N+1).
Bref, c'est vraiment la confusion la plus complète.
Bon, eh bien j'ai une proposition simple pour éviter toute cette confusion : ne plus utiliser ces mots.
Pour utiliser quoi à la place ? Une idée serait la notation
scientifique. Mais celle-ci souffre de ses propres problèmes :
d'abord, j'ai souligné que 1012 s'écrit aussi 1e12, donc il
y aura toujours des journalistes assez cons pour dire que
1012 c'est 10 suivi de douze zéros
ou a contrario
pour lire 1e12 comme 1 puissance 12
ou ce genre de choses ;
ensuite, il y a quelque chose dans la façon dont fonctionne la mémoire
humaine qui fait qu'on retient plus facilement la mantisse que
l'exposant, alors que c'est l'exposant qui est le plus important, et
parfois il n'est pas si facile que ça de retrouver l'ordre de grandeur
à un facteur 10 près ; enfin, c'est pénible à lire de toute façon, et
c'est peu littéraire.
J'ai donc une autre solution : utilisons
les préfixes SI
comme si c'étaient des noms de nombres. On peut évidemment garder
mille et le million, et éventuellement en français le milliard, mais à
partir de là, disons sans hésiter : un téra (=1e12), un péta (=1e15),
un exa (=1e18) et un zetta (=1e21) ; voire, un yotta (=1e24), mais
cela prête à confusion pour d'autres raisons et de toute façon on a
rarement besoin de nombres aussi grands. Le téra (=1e12, un million
de millions) est de toute façon le plus important dans cette
histoire : c'est lui qui se dit en principe billion
en français
et trillion
en anglais, et qui cause le plus de
confusion parmi les choses qu'on rencontre vaguement. La dette des
États-Unis est de treize téra [de] dollars (ou treize
téradollars
), un japonais vient de calculer cinq téra [de]
décimales de pi, le corps humain compte environ dix téra [de] cellules
humaines (et cent téra [de] cellules dans la flore intestinale), et ça
se dira exactement de la même façon en anglais. Et n'importe quelle
personne ayant un minimum de culture scientifique comprendra tout de
suite ce que cette convention signifie, sans avoir besoin d'être
informée à l'avance (quant aux autres, ils ne savent de toute façon
pas ce que billion
veut dire, donc ils ne seront pas plus
embêtés).
Faites circuler le mème ! (Après tout, la façon dont les journalistes utilisent ce genre de mots, c'est en reprenant ce que des scientifiques leur disent. Donc s'il faut inséminer l'idée, c'est bien chez des scientifiques — et j'imagine qu'il y en a qui lisent mon blog.)
(Il faudra que je traduise cette entrée en anglais, puisque c'est notamment par là que la confusion vient.)
[#0] Ajout : Il s'agirait apparemment de la 9e Conférence générale des Poids et Mesures, mais je ne trouve rien à ce sujet dans les résolutions de cette dernière. Par ailleurs, cette page en dit un peu plus sur la façon dont le bordel est apparu. Mais elle prétend que l'usage de la convention 2N est (re?)devenu légal en France par le décret 61-501 du 3 mai 1961 (relatif aux unites de mesure et au controle des instruments de mesure), et je ne vois rien dans ce décret qui mentionne le nommage des grands nombres pas plus que dans les résolutions de la 9e CGPM.
[#] Faut-il une preuve
de ce que j'avance ?
Chercher "trillions
de dollars"
sur Google : toutes les réponses (sauf celles qui
dénoncent justement le phénomène dont je parle)
sont forcément des erreurs, parce qu'un vrai trillions de
dollars (1018, un milliard de milliards, un exa de dollars,
quoi) c'est tellement gigantesque que ça ne peut rien
désigner de correct.
2010-09-01 (mercredi)
Ce n'est peut-être pas une nouvelle dent qui vient de casser, en fait, mais peut-être déjà la même que la dernière fois (la 26 ou la 27, je ne suis pas très sûr) : en tout cas, elle était déjà réparée avec du composite, et c'est plus le composite que la dent elle-même qui a cassé. (La dent était très mal en point, il faut croire : sa situation n'a peut-être pas du tout empiré, en fait.)
Mais ça se produit toujours au pire moment possible. Mon dentiste ne peut pas me prendre avant lundi, à cause du rush de la rentrée. Je ne sais pas si je dois craindre que la dent parte en mille morceaux d'ici là. D'un autre côté, elle ne me fait pas mal, donc mon poussinet me suggère d'attendre lundi.
Il existait autrefois un service d'urgences dentaires et stomatologiques boulevard de Port-Royal : il semble qu'ils aient disparu. (Leur répondeur suggère de s'adresser à un cabinet de stomatologues dans le 9e.) Sinon, il y a les urgences dentaires de la Pitié, mais je pense que c'est pour les gens qui ont vraiment mal.
Je ne sais pas si ça vaut la peine de chercher quelque chose en urgence d'ici là : si de toute façon la dent a de fortes chances de se faire arracher, dévitaliser, couronner, ou tronçonner d'une autre manière barbare, ça ne sert pas forcément à grand-chose de la colmater avant. Soupir…
2010-08-31 (mardi)
Chaque pays a sa façon de nommer les rues. En France, on aime bien rendre hommage à des gens, ou à des choses (alors que ce n'est pas du tout le genre, par exemple, en Angleterre). J'aimerais bien avoir des statistiques sur les noms des voies des communes françaises : quelles sont, par exemple, les personnes les plus souvent mises à l'honneur ? (Si on ne met pas de qualification à cette question, c'est trop facile de deviner, d'ailleurs cf. ci-dessous pour la réponse sans surprise ; mais on peut chercher les étrangers les plus souvent honorés, ou les personnes les plus populaires dans chaque siècle, ou selon la catégorie/profession. On pourrait aussi chercher les hapax remarquables.)
Malheureusement, il est quasiment impossible d'avoir de telles
statistiques. Ce que je peux faire, cependant, c'est prendre les
données d'OpenStreetMap et
tâcher de voir ce qu'on peut en extraire. Ce sont des données assez
moisies, même en tentant compte de leur caractère lacunaire, vu que
les noms sont écrits sans aucune cohérence ni logique, souvent de
façon erronée, qu'il n'y a pas de moyen fiable de savoir quand deux
noms sont la même rue ou deux rues nommées de façon semblable, etc.
J'ai donc dû les mouliner à grands renforts de scripts Perl et autres
outils heuristiques qui produisent certainement des artefacts bizarres
(il est donc possible que des noms aient complètement disparu ou aient
été scindés en deux, que d'autres aient été surreprésentés pour des
raisons mal comprises, ou encore que certains ne soient pas des noms
mais des descriptions comme rue principale
). Mais c'est mieux
que rien. Voici, si j'en crois mes programmes, les noms les plus
souvent donnés aux voies françaises :
Et une tentative spécifiquement pour les rues nommées d'après un individu (en regroupant les différentes appellations d'une même personne) : c'est encore plus difficile et sujet à caution. Par exemple, une rue Corneille honore certainement Pierre Corneille et pas Thomas Corneille, mais comment savoir quel Carnot a donné son nom à une rue Carnot ? j'ai juste divisé en Carnot (probablement Lazare Carnot) et en Sadi Carnot (probablement le président) ; et je ne parle pas des confusions possibles entre une rue de la Fontaine et une rue [Jean de] La Fontaine. Bref, il est fort probable qu'il y ait des doublons là-dedans que je n'ai pas correctement filtrés, et il est certain que tout ceci est à prendre avec des pincettes :
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Seules les 20 plus récentes entrées ont été incluses ici. Pour les entrées plus anciennes, voyez l'index de toutes les entrées.
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