Mouvements sociaux aux USA : "Le racisme existait avant Biden, ça continuera avec lui"

Les manifestations Black Lives Matter ont été au cœur de la campagne électorale
Les manifestations Black Lives Matter ont été au cœur de la campagne électorale - © © JOSH EDELSON - AFP

A quoi ressemblera l’Amérique de Joe Biden ? Particulièrement pour les minorités. La mort de George Floyd, les bavures policières et le racisme structurel aux Etats-Unis ont particulièrement animé la campagne électorale. Quelle sera à présent la réponse de Joe Biden, le nouveau président élu. La question, avec d'autres sur le programme de Joe Biden, était sur la table de CQFD. Pour en parler : Yannicke de Stexhe, chercheuse en sociologie à l’UCLouvain et spécialiste du mouvement Black Lives Matter.

Trump incarnait le racisme mais ne l’a pas créé

Pour la sociologue, il faut distinguer les discriminations dont ont été victimes les minorités sous la présidence de Donald Trump et qu'il a encouragé ou légitimé et les problèmes structurels de la société américaines qui existaient bien avant l’arrivée au pouvoir du président sortant. "Donald Trump incarne le racisme, la misogynie, le validisme. Il a contribué à libérer des discours jugés acceptables dans l’espace public alors qu’ils étaient mortifères. Par contre, Trump n’a pas inventé cela. Il a exacerbé ces idéologies tout au long de son mandat mais il n’a pas amené cela aux Etats-Unis. Sa défaite aux élections ne va donc pas faire disparaître cette tendance d’un coup".

Ce constat, risque de décevoir certains espoirs. Pour la sociologue, cette lame de fond ne disparaîtra pas de sitôt, du racisme ordinaire et décomplexé en rue, aux attentats suprémacistes. "Certains se demandent si l’arrivée de Biden provoquera un retour à la normale. Mais pour les activistes américains, la "normale" d’avant Trump, c’est une Amérique où ils devaient manifester contre la mort de Trevon Martin, c’est un pays où des gens trouvaient tout à fait normal de traiter la femme du président de singe parce qu’elle est noire. Est-ce que c’est ça qu’on veut ?"

Yannicke de Stexhe rappelle d’ailleurs que si les problèmes existaient avant Trump, les militants qui luttent pour y faire face aussi. Le mouvement Black Lives Matter est né durant le mandat de Barack Obama. Les révoltes de Ferguson, c’était durant la même période.

Une lueur d’espoir quand même

L’arrivée de Kamala Harris, première femme au poste de Vice-président et elle-même issu des minorités, le premier discours de Joe Biden après son élection, très rassembleur, sont malgré tout des motifs d’espoir. "L’arrivée d’une femme racisée à cette fonction de pouvoir, c’est très important. (...) Par ailleurs, Joe Biden, va pouvoir détricoter une partie de ce qu’a fait Donald Trump. On pense à l’enfermement des enfants migrants, à l’accès à l’armée pour les personnes transgenre, ça Joe Biden a en ligne de mire de le défaire. C’est donc une avancée, mais de nouveau c’est un retour à une "normale" qui n’était pas parfaite, il ne faut pas le perdre de vue".

La "normale" d’avant Trump, c’est une Amérique où des gens trouvaient tout à fait normal de traiter la femme du président de singe parce qu’elle est noire. Est-ce que c’est ça qu’on veut ?"

Il ne faut pas s’attendre à un virage à 180° donc, sur ces questions mais l’arrivée du nouveau président et sa vice-présidente feront quand même assurément bouger les lignes. Comme pour tout le reste de leur politique, leur marge de manœuvre politique dépendra aussi de la composition du Congrès. Enfin, dans ces matières, les Etats et les villes ont aussi des compétences, tout ne dépend pas donc de la nouvelle équipe à la Maison Blanche.

Ce Qui Fait Débat, chaque jour à 18h20 sur La Première et à 20h35 sur La Trois. La question des minorité était un des volets de l'émission de ce soir. L'intégralité du programme est à revoir ci-dessous:

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