L'heure était au soulagement dans le vestiaire de l'équipe de France après la victoire contre Chypre. A la seule satisfaction du devoir accompli. Bien que victorieux par quatre buts à zéro, les Bleus avaient conscience qu'une victoire et non un nul des Suisses en Irlande les aurait contraints à passer par les barrages pour obtenir leur visa pour l'Allemagne. Les Bleus savaient tout autant que leur parcours chaotique n'avait cessé de semer le doute et l'inquiétude dans les rangs de leurs supporteurs. En d'autres temps et circonstances, jamais le stade de France n'aurait affiché complet pour un match contre la modeste formation chypriote. Mais il y avait un enjeu de taille, celui de la qualification.
Une qualification qui, si on s'en souvient, paraissait une formalité à l'époque du tirage au sort des groupes. La France s'était retrouvée avec des équipes largement à sa portée, dans l'ordre où elles finissent, la Suisse, Israël, l'Eire, Chypre et les Iles Féroé. La mine des dirigeants et des joueurs était celle de gens sûrs de leur affaire, même si publiquement ils se gardaient bien de l'avouer de peur d'être traités de prétentieux. A l'époque l'équipe de France n'était pas au mieux, restant sur une sortie bien peu convaincante à l'Euro 2004 qui sonnait, plus grave encore, le départ à la retraite de Zinedine Zidane, Claude Makelele et Lilian Thuram. Accompagnée d'un changement d'entraîneur, cette amputation d'éléments moteurs notamment de son inspirateur n'était pas faite pour rassurer. De là à imaginer que la France ne s'en sortirait pas dans un groupe «facile», il y avait un pas que personne de raisonnable ne s'engageait à franchir. En dépit de ses changements, de ses hésitations, de sa restructuration, l'équipe de France continuait et continue toujours de faire rêver les nostalgiques du sacre de 1998. Les éliminatoires ont confirmé la prudence pour ne pas dire le scepticisme des plus lucides : si la France comme la Suisse et Israël d'ailleurs est demeurée invaincue à l'issue de la dixième journée de compétition, on notera que onze des trente rencontres se sont terminées sur un score de parité. L'équipe de France lors des sept premières journées n'avaient remporté que deux succès pour cinq nuls. L'affaire était devenue compliquée et inquiétante. La qualification, sans cesse retardée, était sérieusement menacée.
C'est alors que, coup de théâtre, le retraité de Madrid, Zinedine Zidane, décide de reprendre le maillot bleu - blanc - rouge, entraînant dans son sillage le milieu de terrain de Chelsea, Claude Makelele, et le défenseur de la Juventus de Turin, Lilian Thuram. La France du football respire à nouveau. Et, comme attendu, les trois dernières rencontres sont autant de victoires. Pas de quoi pavoiser, la qualité du jeu n'étant pas de très haut niveau, mais l'essentiel était ailleurs : décrocher sa place pour la Coupe du monde, ce que la France n'était plus parvenue à faire depuis vingt ans (1985), éliminée en 1990 et 1994, qualifiée d'office pour 1998 (organisateur) et pour 2002 (champion sortant). Les Tricolores du retraité plus retraité, Zinedine Zidane, ont rejoint ceux de Michel Platini. Reste que l'avenir est pour le moment indéfinissable. Il y a tant de brouillard autour de l'équipe qu'on ne sait pas encore si Raymond Domenech en sera encore l'entraîneur en Allemagne (des rumeurs font état de l'arrivée de Didier Deschamps) en dépit de la volonté affirmée par le président de la fédération de le maintenir à son poste. On ne sait pas davantage si Lilian Thuram qui disait ces derniers jours sa lassitude, poursuivra en bleu jusqu'à l'échéance du mois de juin. Et Zidane ?
Les seuls aujourd'hui à faire preuve de sérénité et à afficher un large sourire sont ceux qui ont investi beaucoup d'argent autour de cette équipe et du football, plus généralement. Jusqu'au bout ils ont redouté une élimination qui leur aurait occasionné des pertes financières considérables. Les argentiers du football ont donc sabré largement le champagne après la victoire contre Chypre. Demain est un autre jour.
Qualifiés et barragistes
Europe (14 places):
Allemagne (pays organisateur), Angleterre, Croatie, France, Italie, Pays-Bas, Pologne, Portugal, Serbie-Monténégro, Suède, Ukraine
Amérique du Sud (4 ou 5 places):
Argentine, Brésil, Equateur, Paraguay
Asie (4 ou 5 places):
Arabie Saoudite, Corée du Sud, Iran, Japon
Océanie (0 ou 1 place):
néant
CONCACAF (Amérique du nord, centrale et Caraïbes/3 ou 4 places):
Costa Rica, Etats-Unis, Mexique
Afrique (5 places):
Angola, Côte d'Ivoire, Ghana, Togo, Tunisie
Barrages de la zone Europe (12 et 16 novembre): Espagne - Slovaquie, Norvège - République tchèque, Suisse - Turquie
Barrage zones Asie et Concacaf: Bahreïn - Trinité et Tobago
Barrage zones Océanie et Amsud: Australie - Uruguay
La France et la Coupe du monde
Participations: 11 (1930, 1934, 1938, 1954, 1958, 1966, 1978, 1982, 1986, 1998, 2002)
Palmarès: vainqueur (1998), 3e (1958, 1986), 4e (1982)