LE BARRAGE DE VILLEREST.
La Loire
franchit alors le seuil granitique de Neulise avant Roanne dans une gorge noyée
par le lac du barrage de Villerest.
Le projet de
barrage de Villerest date d’avant 1914, la ville de Paris était alors
l’instigatrice elle souhaitait alimenter la capitale en eau potable. Jusqu'à
1957, des options furent prises, de vastes surfaces achetées. Mais dès 1928
les populations locales et les villes ligériennes en aval de Villerest, se liguèrent
contre cette proposition de barrage et la main mise de Paris. Ce projet fut donc
abandonné, mais d’autres allaient suivre tout aussi important.
Dès 1966,
la commission d’eau du 5è plan lance l’idée d’un programme de
construction de deux ou trois barrages. Sept années plus tard le comité de
bassin Loire Bretagne donne son aval pour la
réalisation de Naussac 1, Serre de la Farre, Villerest et Chambonchard.
Il s’agit
de faire face à quelques problèmes, le premier est le refroidissement des
centrales nucléaires. E.D.F. se propose de mettre en chantier les centrales de
Dampierre en Burly, et d’accroître la capacité de St Laurent des Eaux, ces
deux unités sont situées sur la Loire en aval de Nevers. Les maires de Blois
Tours et Orléans insistent pour que le barrage de Villerest soit construit
avant la réalisation des centrales thermonucléaires. Pierre Sudreau déclare : nous
avons voté pour le principe des centrales nucléaires au nom de la solidarité
Nationale, nous demandons aujourd’hui qu’au nom de la même solidarité
Nationale les barrages de Villerest et Naussac soient construits.
Il faut dire
qu’un deuxième problème est venu se rajouter, la sécheresse de 1976. On
commence en effet à prendre conscience que les besoins en eau vont être de
plus en plus importants d’ici l’an 2000. Sans encore toutefois bien cerner
tous les besoins, l’irrigation, les centrales,
la consommation d’eau potable en forte augmentation, l’industrie, le
recyclage des eaux usées, tout
cela devient une nouvelle problématique
en constante évolution, et qui met en évidence les passions engendrées dès
qu’un projet important concerne le fleuve.
Le dernier
problème, est l’écrêtement des crues en Loire moyenne.
En juin
1979, l’A.N.E.C.L.A. (Association Nationale pour l’Etude de la Loire et de
ses Affluents) se saborde, pour limiter la dispersion des forces elle fait place
à L.I.G.E.R., un nouveau rassemblement crée par Jean Royer maire de Tours.
Celui-ci annonce qu’il va aller lui même à Villerest régler les derniers
contentieux avec les riverains.
Un an plus
tard, Jean Chappon ingénieur des Ponts et Chaussées, sort son fameux rapport
sur l’aménagement intégré de la vallée de la Loire qui va servir de référence.
Son projet
propose deux directions : un volet hydraulique certes, mais surtout un
second concernant l’environnement c’est lui qui édite la règle selon
laquelle tout ouvrage fixe doit laisser un passage pour les poissons migrateurs.
Il propose également de créer des frayères sur graviers dans la partie haute
de la Loire, et des vasières dans l’estuaire et en basse Loire. Dans les vals
des réserves naturelles seront crées.
Mais en
1980, les esprits se tournent vers Brives Charensac huit morts et 430 MF de
francs de dégâts. Un événement qui réveille le spectre de la catastrophe
toujours possible, et conforte les défenseurs du barrage de Villerest.
Commencé en
1978, le barrage de Villerest sera achevé 4 ans plus tard. C’est un barrage
multifonctions d’une contenance de 230 millions de m3 pour répondre
aux problèmes énoncés ci-avant. Il doit contribuer à assurer un débit
minimal de 60 m3/s à Gien pour le fonctionnement et la sécurité
des centrales graphites-gaz refroidies par circuit ouvert. A partir de 50 m3/s
le seuil d’alerte minimum défini par le schéma directeur de gestion et
d’aménagement des eaux du bassin Loire-Bretagne est atteint.
Villerest
est géré depuis Orléans par un calculateur, les lâchures mettent six jours
pour y parvenir, onze pour rallier Tours. C’est également un barrage écrêteur
de crues à partir de 1000 m3/s. Occasionnellement il fournit de l’électricité.
Selon la république
du centre du mardi 22 septembre 1998, la situation se présente ainsi : «
à Villerest avec 130 millions de mètres cubes la retenue sur la Loire était
pleine en début de campagne. Le soutien de l’objectif de Gien a commencé
pour l’année 1998 le 21 juillet. Le temps sec et chaud a, notamment en août,
fait baisser le débit naturel du fleuve. Villerest a dû pour compenser, lâcher
beaucoup d’eau, jusqu'à 34 m3/s
le 30 août, alors que le barrage ne recevait que 2 m3/s. Au total le
barrage a lâché, 14 millions de m3 en juillet, 52 millions de m3
en août, et 9 millions de m3 entre le premier et le 6
septembre 1998. Du coup le barrage se trouve moins rempli qu’à
l’accoutumée à pareille époque. Mais le déstockage, 75 millions de
m3 a quand même correspondu lui aussi à une année moyenne ».
Cet exemple montre bien la nécessité des barrages.
Imposé, par
les pouvoirs publics Villerest a été financé à 70 pour cent par l’état
et 30 pour cent par l’agence de bassin, sous évalué comme la plupart
des grands travaux il aura coûté au final beaucoup plus cher que prévu.
Le petit
village de Villerest a vu sa population croître, et même pratiquement doubler,
sur un dépliant récent on peut y lire :
« Le long des chemins, au fil de l’eau, au détour d’une route,
le lac de Villerest propose à ses visiteurs une étonnante palette de
richesses. Amoureux de la nature, passionnés de sports, découvrez à pied, à
cheval, à V.T.T. , la faune, la flore, au long des sentiers balisés,
hissez les voiles sur notre plan d’eau ». Le même dépliant indique les
différentes activités qui existent et qui expliquent, le maintien sur place de
la population.
Un problème
imprévu, l’eutrophisation. Dépôt d’algues planctoniques qui rend les eaux
du lac pauvres en oxygène dissous. Cette asphyxie, provoquée par l’apport de
nitrates et de phosphates s’accentue quand la lumière est forte. Des études
sont entreprises comme au barrage de Grangent pour essayer de remédier à ces
inconvénients, des solutions sont envisagées. Un nouvel écosystème se
constitue très lentement, nous sommes actuellement d’après les experts dans
une phase de cicatrisation. De nouvelles espèces apparaissent peu à peu,
plantes flottantes mais aussi anatidés (canards) ont élu domicile.