Les
premiers habitants
Métis,
ou Mitis, vient d’un mot micmac « mitiwee »
qui signifie, « lieu de rencontre »,
et du mot « miti soo » qui signifie
« rivière aux peupliers » essence
abondamment retrouvée sur les rives de la Mitis. Les
Micmacs étaient donc le premier peuple à fréquenter
la rivière. Les fouilles archéologiques ont
montré que ces autochtones utilisent la rivière
Mitis depuis plus de 8 000 ans. Le saumon était une
de leur source principale de nourriture. On peut facilement
imaginer que, comme d’autres regroupements Micmacs de
la Gaspésie et du Nouveau Brunswick, les Micmacs de
la région de Métis construisaient des barrages
faits de branches tressées à travers les étroits
chenaux d’estuaires (rétrécissement à
l’embouchure de la rivière) pour attraper le
saumon en migration ou autre poissons.
La rivière
était source de nourriture et d’eau douce et
servait de voie de transport. On peut donc dire qu’elle
était directement responsable de la présence
des amérindiens jusqu’au 19ème siècle.
La
rivière au centre de l’économie et du
peuplement
Dès
l’arrivée des premiers colons français
et anglais, la rivière Mitis, , était le point
central du développement et du peuplement de la région
tout comme à l’époque de l’occupation
des rives par les Micmacs. Les premiers à peupler définitivement
ses rives ont été des Canadiens Français
et des immigrants écossais.
Déjà
au XVIIe
siècle, la rivière servait à diviser
deux seigneuries,
celle du fief Pachot et du fief Peiras. Les Seigneurs avaient
à la fois le privilège des richesses de rivière
Mitis et du fleuve; une façade sur le Saint-Laurent
facilitait l’exploitation de la pêche. Bien que
les terres étaient concédées en seigneuries
au XVIIe
siècle, le début du peuplement massif s’est
fait plutôt au XIXe
siècle.
C’est
à cette époque que les nouveaux arrivants ont
constaté le potentiel économique de la rivière
Mitis. Vers 1820, la famille Larrivée installe un moulin
à scie et achemine les billes de bois vers la baie
Mitis pour le transport maritime. La proximité de la
rivière, de la mer et de la forêt était
définitivement un atout.
William
Price acheta le moulin de M. Larrivée en 1830 et exploita
la forêt dans toute la région. La rivière
Mitis faisait couler les milliers de billes de bois par un
procédé appelé la drave
jusqu’à la baie Mitis lieu d’entreposage
avant le transport en mer. Encore aujourd’hui, il suffit
de creuser un peu sur la berge pour découvrir le brin
de scie qui étaient amenés par la drave.
La rivière
Mitis était aussi convoitée pour son débit
qui justifierait la construction de barrages hydroélectriques.
N’oublions pas qu’au début du XXe
siècle, l’électricité arrivait
petit à petit dans les campagnes et que les rivières
assez puissantes pour fournir de l’énergie hydroélectrique
se faisaient plutôt rares dans la région. Deux
barrages ont alors été construits en 1923 et
en 1947. Les progrès économiques et technologiques
faisaient de Grand-Métis et Price les villages clefs
d’une région qui prenait de plus en plus d’importance.
Les
charmes de la rivière Mitis
À
partir de la moitié du XIXe
siècle, nombreux étaient les vacanciers et estivants
attirés par les charmes du cours d’eau. Dès
1844, les géologues William Logan et, quelques années
plus tard, le géologue et paléontologue William
Dawson avaient été séduits par les charmes
de la rivière Mitis et par sa chute. Par la suite ils
ont été les premiers vacanciers à y établir
une résidence d’été. Avec la construction
du chemin de fer Intercolonial en 1876, les touristes affluaient
vers la destination vacances à la mode de l’époque.
La plupart s’adonnaient à la pêche au saumon.
Beaucoup d’entre eux étaient de riches Américains
ou Canadiens Anglais qui profitaient des installations de
villégiature pour passer quelques semaines ou l‘été
entier dans la région. En 1974, l’un d’eux,
Lord Mount Stephen, loua la rivière Mitis au coût
de 20 $ par année au propriétaire d’une
des seigneuries qui occupaient à l’époque
la région de la Mitis. Il fit ensuite construire Estevan
Lodge, un camp de pêche qu’il légua
ensuite à la désormais célèbre
Elsie Meighen Reford fondatrice de ce que nous connaissons
aujourd’hui comme étant les Jardins de Métis.
Une
richesse en danger
L’évolution
économique et touristique qui faisait la joie des habitants
des alentours de la rivière Mitis allaient toutefois
causer quelques conflits dans la population. Les vacanciers
qui espéraient voir le saumon en abondance avait une
dent contre les industriels et leurs projets qui menaçaient
la survie du saumon.
Elsie
Reford, ardente protectrice du milieu naturel, était
en désaccord avec le dragage et les projets de construction
hydroélectrique. Bien que madame Reford n’ait
pas réussi à contrer les projets de barrages,
elle a toutefois fait interdire l’installation de filets
servant à capturer le poisson en grande quantité
à l’embouchure de la rivière Mitis.
L’activité
de flottage de bois de la Compagnie Price et la construction
de deux barrages hydroélectriques en 1923 et 1947 nuisaient
sévèrement à la reproduction (frai) du
saumon qui avait beaucoup de difficulté , de 1880 à
1945, à remonter la rivière pour se reproduire.
Hydro-Québec décida en 1963 de restaurer la
rivière en y aménageant des trappes qui pouvaient
transporter le saumon au-delà du barrage. Depuis 1977,
la rivière Mitis est redevenue une rivière dite
« à saumon ». Elle est aujourd’hui
convoitée par les pêcheurs sportifs et surveillée
de très près par les écologistes et ceux
qui, comme Elsie Reford, ont le désir de préserver
l’intégrité écologique de la rivière
et du milieu.