Depuis le 31 mars, date à laquelle Ramallah a été déclarée "zone militaire fermée" et son accès interdit à la presse, une première depuis la seconde Intifada, au moins onze journalistes ont essuyé des tirs, et trois ont été blessés. Trois autres ont été expulsés de la ville par l’armée israélienne. Au total, depuis l’entrée de Tsahal à Ramallah, une trentaine de journalistes ont été visés par des tirs de soldats israéliens ou expulsés ou interpellés par ces derniers.
"La décision israélienne d’interdire Ramallah à la presse marque une nouvelle atteinte grave à la liberté de la presse dans les Territoires occupés alors que la situation n’a cessé de se dégrader au cours des derniers mois. Nous appelons les autorités civiles israéliennes à revenir immédiatement sur cette décision", a déclaré Robert Ménard, secrétaire général de Reporters sans frontières. L’organisation rappelle que l’article 19 du Pacte international relatif aux droits civils et politiques ratifié par Israël garantit la "liberté de rechercher, de recevoir et de répandre des informations". "Laisser l’occupation israélienne de Ramallah sans témoins, c’est faire le lit de la rumeur et de la désinformation", a ajouté M. Ménard. L’organisation est d’autant plus inquiète que, selon l’AFP, l’interdiction faite aux journalistes de se rendre sur le terrain a été étendue à Bethléem, le 2 avril, par Tsahal.
Depuis le début de la seconde Intifada, Reporters sans frontières a recensé cinquante-deux cas de journalistes blessés par balles dans les Territoires occupés. Selon une enquête menée par l’organisation, l’armée israélienne était l’auteur des tirs dans la majorité des cas. A plusieurs reprises, l’organisation a dénoncé le manque d’enquêtes sérieuses de l’armée sur ces événements. Le 13 mars dernier, le journaliste italien Raffaele Ciriello a été tué par des balles tirées d’un char israélien à Ramallah. RSF demande une nouvelle fois aux autorités de mener des enquêtes approfondies sur l’ensemble des cas de journalistes blessés ou tué depuis septembre 2000.
Le 29 mars, à Ramallah, Carlos Handal, cameraman pour la chaîne égyptienne Nile TV, a été blessé, alors qu’ils se rendait en voiture vers la place des Lions avec son collègue.
Le 30 mars, une équipe de la chaîne de télévision française, France 2, a essuyé le feu de soldats israéliens alors qu’elle souhaitait passer un barrage situé sur la route reliant Jérusalem-Est à Ramallah. Le même jour, des soldats israéliens ont pénétré dans le bâtiment de la radio-télévision palestinienne, La Voix de la Palestine, qui a dû mettre fin à ses émissions. Les soldats ont exigé l’évacuation des bureaux des quatre journalistes qui se trouvaient à l’intérieur. L’édifice du ministère de la Culture qui abritait une radio et une télévision locales a également été occupé. Toujours le 30 mars, les forces israéliennes ont pénétré dans un bâtiment, siège de plusieurs médias palestiniens et étrangers dont l’agence britannique Reuters. Les soldats ont forcé les journalistes à quitter les lieux. Le même jour, quatre journalistes turcs ont été retenus plusieurs heures dans le centre de presse de Ramallah par des soldats israéliens qui les ont fouillés et leur ont confisqué leur passeport, les empêchant de quitter le bâtiment.
Le 31 mars, le véhicule de deux journalistes suédois, Bengt Norborg et Rickard Collsioeoe, envoyés spéciaux de la télévision publique suédoise SVT, a essuyé des tirs de sommation de l’armée israélienne à un barrage situé à la périphérie de Ramallah. Le même jour, Anthony Shahid, journaliste américain du quotidien Boston Globe, a été blessé par balle à l’épaule alors qu’il portait un gilet pare-balles sur lequel était inscrit "Press". Anthony Shahid a déclaré ne pas avoir vu qui lui avait tiré dessus mais que l’endroit était alors entouré de tanks et de soldats israéliens.
Le 1er avril, des soldats israéliens ont expulsé de Ramallah une équipe de la chaîne de télévision américaine CBS News. Au même moment, selon l’AFP, le véhicule de six journalistes et photographes occidentaux a été pris pour cible par des soldats israéliens, non loin du centre-ville. "Je crois que les soldats se sont énervés et ont tiré une rafale dans notre direction", a expliqué l’un des six journalistes qui ont tous refusé d’être nommés. Toujours le 1er avril, un journaliste palestinien travaillant pour APTN a été blessé à la jambe à Beit Jala alors qu’il couvrait une manifestation de pacifistes.
Le 2 avril, à Bethléem,
Madjadi Banoura, cameraman de la chaîne Al-Jazira, a été blessé d’une balle à la tête. Il se trouvait alors au 5è étage de l’hôtel Star où
s’étaient installés une vingtaine de journalistes.
Le même jour, Atta Iweisat, photographe travaillant pour le 5e quotidien israélien Yediot Aharonot et l’agence Gamma, a été arrêté par des soldats israéliens après qu’ils eurent constaté qu’il n’était pas accrédité en bon et due forme.