HISTORIQUE
Du
6ème BATAILLON
ALPIN DE CHASSEURS A PIED
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Merci à Marie Paule pour la recopie
1914
Le 6ème bataillon de chasseurs, parti aux
manœuvres alpines dans la première quinzaine de juin, eut connaissance de la
tension politique dans les derniers jours de juillet.
Rappelé en toute hâte à Nice où il tenait garnison,
il y arrive le dimanche 2 août, vers
Dans l’après-midi, il occupe à l’extérieur de la
ville les cantonnements prévus, en attendant une décision en ce qui concerne
l’attitude de l’Italie.
Dès qu’il en reçoit l’ordre, le 6ème
bataillon de chasseurs, à l’effectif de 27 officiers et 1 690
sous-officiers, caporaux et chasseurs, formant six compagnies et une section de
mitrailleuses, sous les ordres du commandant Lançon, quitte Nice en chemin de
fer et débarque à Vézelise (Meurthe et Moselle), le
LORRAINE
Le 13 août, à Saint-Nicolas-du-Port, il
forme avec les 23ème, 24ème et 27ème
bataillons un groupe sous les ordres du lieutenant-colonel Papillon-Bonnot, à
la disposition du général commandant la 2ème armée.
Le 14, il se rend à Jarville-Nancy, où il
débarque le 15 à destination de Marainviller, par Lunéville ; puis
de là, il se dirige ver Hénaménil, à travers la forêt de Parroy, par Croismare
et le Puits ; par ordre du général commandant le 15ème corps,
les quatre bataillons de chasseurs sont arrêtés à Hénaménil ; le 6ème
bivouaque sur la rive gauche du Sanon.
Le 16, le groupe de bataillons reçoit
l’ordre de marcher sur Parroy et le bois du Haut-de-la-Croix, où sont établis
de forts retranchements ennemis. Le 6ème est en tête, à
l’extrême-droite du 15ème corps, il assure la liaison avec le 10ème.
Quittant Hénaménil à
A
Le 19, à
Les compagnies de tête se trouvent bientôt soumises
au feu de l’infanterie et des mitrailleuses ennemies dissimulées dans les
récoltes et aux abords du village, qui est fortement ému.
Les Allemands, bien cachés, tirent à coup sûr, mais
les pertes cependant sérieuses n’arrêtent pas les chasseurs, qui font preuve
d’un absolu mépris du danger et d’une ardeur remarquable.
Malgré le poids énorme du sac et de l’équipement,
ils courent, s’aplatissent, se relèvent, et repartent sans cesse; ils sont
bientôt trempés jusqu’aux os et couverts de boue; mais peu importe, ils
surmontent la fatigue, pour ne penser qu’au devoir.
Vers
Un moment après, il débouche dans la direction de
Bensdorf.
A ce moment, l’artillerie ennemie qui s’était à
peine révélée, ouvre un feu terrible à obus de gros calibre. Le bombardement
porte sur la partie nord du village et les débouchés, c’est-à-dire sur toute la
zone du bataillon.
Les batteries ennemies bien dissimulées, et ne
souffrant aucunement de notre tir, causent dans les rangs des chasseurs des
pertes sanglantes ; des fractions entières disparaissent dans les
explosions de 210. Toutes les tentatives faites pour continuer la marche en
avant sont arrêtées par les rafales de l’artillerie et des mitrailleuses dont
le feu dure jusqu’au soir.
Sous ce feu d’enfer, d’autant plus impressionnant
que les chasseurs se trouvent pour la première fois soumis à l’action de
l’artillerie et sans le moindre abri, personne ne bronche ; le 6ème,
fidèle à la consigne qui dit : « Plutôt se faire tuer sur place
que reculer ! » s’accroche au terrain et n’en cède pas un pouce.
Malgré les pertes extrêmement lourdes, les chasseurs ne bougent pas ;
l’avance est impossible ; mais tout le terrain conquis est conservé.
Dans cette première affaire tout le 6ème,
officiers et chasseurs montrèrent un esprit de devoir et de sacrifice au-dessus
de tout éloge. Des sections, perdant leur chef, se ralliaient immédiatement aux
gradés restant ; tout se passait avec ordre et méthode, comme à la
manœuvre.
Lorsque vers la fin du jour, le feu de l’ennemi
s’apaisa, le bataillon profita de cette accalmie pour faire un nouveau bond en
avant et placer des avant-postes.
Le lendemain, appuyé par les 23ème et 27ème
bataillons, il repart à l’attaque au nord de Verguaville. Mais les trois
bataillons sont encore arrêtés par un ennemi très supérieur en nombre, bien
retranché et muni d’une nombreuse artillerie.
Il reste sur place jusqu’au soir, malgré le
bombardement, en attendant le moment où il pourra progresser.
A
Le 6ème qui, en liaison avec le 27ème,
était en tête pour l’attaque, aura maintenant pour mission de couvrir et de
protéger la division en retraite ; tâche ingrate et pénible que tous,
gradés et chasseurs, accompliront de leur mieux.
Jusqu’à
Par Donnely, Montcourt, Parroy et Beuzemont, il se
retire en combattant sans cesse et le 21 août, il se porte sur Einville,
puis sur Lunéville, que le groupe des bataillons de chasseurs doit couvrir dans
la direction du nord.
Le matin, le 6ème occupe
Le lendemain matin, il repart sur la cote nord
d’Haussonville, où il se fortifie pendant la journée du 24, en
construisant des tranchées.
Le bataillon combattant et marchant jour et nuit,
montra la mesure de sa discipline et de son moral ; exténués, à bout de
forces, sans ravitaillement et manquant de sommeil, les hommes restaient
groupés autour de leurs chefs et n’attendaient que le signal pour repartir vers
l’est. Cette occasion leur est bientôt donnée.
L’offensive sur la Mortagne est décidée !...
Le 25 août, le 6ème B.C.A.
marchant ave la 29ème division occupe Landecourt ; le 26,
les quatre bataillons marchent sur Lamath qu’ils enlèvent ; le 6ème,
avant-garde de la division, sortant des bois de Clairlieu, franchit rapidement
le terrain découvert et s’empare du village du même nom. Continuant le combat
contre l’infanterie ennemie, il progresse vers
L’élan du bataillon est un instant arrêté par
l’obstacle que représente la rivière, sur laquelle n’existe qu’un seul point de
passage, un pont de bois détruit par les Français au cours de la retraite et
rétabli par les Allemands. Les chasseurs arrivèrent si rapidement que l’ennemi
n’eut pas le temps de le faire sauter, mais il le tenait sous le feu de ses
mitrailleuses et le rendait infranchissable. L’aide de l’artillerie fut
demandée et, après un court bombardement, dont le résultat fut une diminution
d’intensité du feu de l’ennemi, le commandant Lançon donne l’ordre d’attaquer à
Mettant baïonnette au canon, les chasseurs
s’élancent vers le pont qu’ils franchissent et pénètrent dans le village ;
la 2ème compagnie entre la première, suivie des 5ème et 6ème ;
un combat de rues s’engage pendant que d’autres éléments contournent
Dans la journée du 27, le 6ème
continue à progresser au nord de Xermaménil, sur la route de Lunéville.
Le 29 août, l’ennemi tenant encore
Fraimbois, le groupe de bataillons se porte en direction du Laxat, à travers le
bois de Bareth, et de Saint-Mansuy ; cette avance au débouché du bois est
rendue difficile par la résistance des Allemands, fortement retranchés dans la
région cote 278 – bois Le Fréhaut – ferme Le Fréhaut, d’où il dirige sur nos
éléments une vive fusillade.
Le 1er septembre, le bataillon
reçoit du général de division l’ordre de prendre pied sur la cote 278.
Dès que l’artillerie a cessé son feu, le 6ème
se porte à l’attaque et, à
BATAILLE DE
LA MARNE
Le 4 septembre,
le 6ème B.C.A. (avec le 15ème corps) est appelé à marches
forcées à la bataille de la Marne ; il est placé à l’extrême gauche de la
3ème armée, dont il fait partie.
Le 6 septembre, il se porte à l’ouest de
Bar-le-Duc, pour protéger
Le 7, vers
Le 8, l’ennemi tient toujours Vassincourt,
qui est attaqué à droite par le 5ème corps, au centre par le 3ème
R.I, à l’ouest par le 6ème B.C.A. Les 1ère et 6ème
compagnies gagnent la cote 187, la 4ème débouchant du bois de Soulames
franchit la Meuse et marche sur l’éperon boisé situé à 1 kilomètre au sud de
Vassincourt, s’avançant par la lisière du bois ; les 2ème et 3ème
compagnies marchent en soutien.
A
Le bataillon contre-attaque aussitôt avec ses deux
compagnies de soutien, pendant que le reste se replie lentement et en bon ordre
sur Véel ; puis, de là il repart en direction de Vassincourt, avec mission
de tenir jusqu’au sacrifice, et passe la nuit sur la position.
Le 9, une compagnie est prêtée comme soutien
d’artillerie à une batterie du 19ème régiment, laquelle, sur la
demande expresse du chef de bataillon, est amenée en première ligne, d’où elle
bombarde les tranchées ennemies de Vassincourt qu’elle prend d’enfilade. Un peu
plus tard, d’autres tranchées très fortement garnies sont découvertes au
sud-ouest du village et soumises, par le lieutenant Creutzer, à un feu
extrêmement meurtrier de la section de mitrailleuses. Cet officier n’hésite pas
à se porter aux points les plus dangereux pour vérifier les effets du tir de
ses mitrailleuses, il installe même une pièce dans un arbre, d’où il tire à
coups sûr dans les tranchées ennemies.
L’ennemi est obligé d’évacuer la position, laissant
des quantités de cadavres qui témoignent de ses pertes.
Vers
Pendant toute la nuit et la journée du 10,
le bataillon maintient intégralement ses positions en dépit des nombreux
retours offensifs de l’ennemi qui chaque fois, est repoussé avec des pertes
sanglantes. Dans la soirée, la situation de l’ennemi, pressé de toutes parts,
devient critique ; menacé d’enveloppement, il commence un mouvement de
retraite, talonné par nos troupes qui ne lui laissent aucun répit.
Le 6ème se lance à la poursuite ;
malheureusement, à
Le village et les abords présentent un spectacle
d’inoubliable horreur. Le tir de la batterie demandé par le commandant Lançon
et celui des mitrailleuses du lieutenant Creutzer on produit des effets
terribles ; les tranchées allemandes sont littéralement comblées de
cadavres.
A
La magnifique attitude du 6ème bataillon
au cours de ces combats lui vaut une première citation à l’Ordre de la
division.
Sont cités à l’Ordre de la 29ème
division :
Le 6ème BATAILLON DE CHASSEURS A PIED, le
commandant Lançon, les Officiers, Sous-Officiers et Chasseurs du
Bataillon :
« Pour la ténacité et le
dévouement dont ils ont fait preuve aux combats de Vassincourt, se conformant
ainsi à l’ordre du général commandant en chef : « Tenir jusqu’au
sacrifice complet ».
« Le
général commandant la 29ème division,
« Signé :
CARBILLET »
Le 13 septembre, l’ennemi battu par la 3ème
armée, battu également par la 6ème se replie, poursuivi, sur Revigny
par la 30ème division (15ème corps) et le 11ème
corps, pendant que la 29ème division, dont fait partie le groupe de
bataillons de chasseurs, organise la crête au sud du canal.
Le 6ème, retiré de la ligne pour se
reformer revient à Vassincourt, où il se ravitaille au moyen de vivres que les
Allemands n’ont pas eu le temps d’emporter, puis repart à la poursuite de
l’ennemi ; le 14 septembre il est à Rembercourt, le 15 à
Rampon, et le 16 à
ARGONNE
Le bataillon est ensuite porté plus à l’ouest de
Verdun, dans la forêt de Hesse et le bois de Cheppy, pour coopérer à la défense
de la région de Vauquois et arrêter l’offensive allemande de deux corps d’armée
qui, par la vallée de l’Aire, se portaient sur la voie ferrée de Paris à
Verdun.
Après avoir combattu dans les bois de Cheppy, de
Malancourt et à Vauquois même, il organise les lisières nord de la forêt de
Hesse, et arrête l’ennemi à 800 mètres au sud de Vauquois.
Il reste sur cette position du 24 septembre au
27 octobre, l’organise et la rend à ce point inexpugnable que, quelques
jours après son départ, une grosse attaque allemande vient y échouer et y subir
des pertes importantes.
Le bataillon reçoit à cette occasion des
félicitations pour le travail de défense très complet qu’il avait organisé sur
ce point.
Le 29 octobre, le bataillon est appelé au
nord de Verdun pour coopérer à une attaque ayant pour but de tourner par l’est
la position de Montfaucon. A
1 – Attaquer le bois de Forges ;
2 – Progresser sur Gercourt et le bois Sachet pour
couvrir la droite de la 29ème division, qui attaque dans la
direction de Septsarges ;
3 – S’établir solidement sur la position de Gercourt.
A
A
Le 6ème bataillon est en liaison à
gauche avec le 40ème R.I et à droite avec le 24ème B.C.A.
A
A
Le bataillon reçoit pour sa belle conduite au cours
de ce combat, sa deuxième citation à l’Ordre de la division.
Ordre n° 10 de la 29ème Division
« Le général commandant
la 29ème division cite à l’Ordre de la division les 6ème
et 24ème bataillons de chasseurs et plus particulièrement les
officiers, sous-officiers et chasseurs dont les noms suivent, pour le courage
et le dévouement dont ils ont fait preuve au cours du combat du
« Le
général commandant la 29ème division,
« Signé :
CARBILLET »
Relevé le 31 octobre,
le 6ème bataillon est mis au repos pendant quelques jours ;
mais la bataille de l’Yser est engagée, et bientôt il est appelé à donner son
concours pour barrer aux Allemands la route de Calais.
YSER
Le 12 novembre, le 6ème
est embarqué en chemin de fer à Mussey et dirigé sur
Le 15 novembre, à
Le bataillon, dans des conditions
très dures, sans le moindre abri, sous le bombardement et la pluie, dans des
tranchées impossibles à préserver de l’inondation, renforce cependant la
défense par la création de nouvelles lignes bien organisées et couvertes de
solides réseaux de fils de fer.
Les pieds constamment dans
l’eau, les chasseurs ont beaucoup à souffrir des rigueurs de la
température ; les évacuations pour pieds gelés sont nombreuses, cependant
le moral reste toujours excellent.
Le 18, des éléments du
6ème exécutent une opération de détail sur le bois Quarante (1500
mètres au sud de Voormezeele).
Dans la soirée, l’ennemi tente
une attaque; cloué sur place par la fusillade, il ne réussit même pas à aborder
notre ligne.
Le 28 novembre, en
exécution des ordres du général commandant le 16ème corps d’armée,
une forte reconnaissance est lancée sur la corne nord du bois Quarante ;
une heure après, elle rentre, n’ayant pu progresser au-delà de la tranchée
allemande, à cause des réseaux intacts et d’un violent feu d’infanterie.
Le lendemain, une section est
de nouveau envoyée pour compléter les renseignements de la veille, elle arrive
à 40 mètres de la tranchée allemande, et parvient à s’y maintenir.
Le caporal Rambert, de la 21ème
compagnie, doué d’un courage exceptionnel, parvient jusqu’aux fils de fer qui
forment un réseau de 10 mètres d’épaisseur ; à plat ventre dans la boue,
il commence à les cisailler, mais au bout de quelques instants, trouvant que le
travail n’avance pas assez vite, il décide de les enlever en arrachant les
piquets de soutien. Il parvient ainsi jusqu’à la tranchée et reconnaît
l’organisation de la position ; au moment où il essaie de revenir en
arrière, il est soumis au feu d’une mitrailleuse, reçoit quatorze balles et
parvient néanmoins à rejoindre la ligne française pour rendre compte de sa
mission.
Le lendemain, il est décoré de
la Médaille militaire par le général Grossetti, commandant le 16ème
CA.
Le 30 novembre, suivant
l’ordre reçu, le 6ème bataillon attaquera à
La préparation d’artillerie a
été pour ainsi dire inexistante.
Pour pratiquer des passages
dans les réseaux, des chasseurs et des sapeurs du génie munis de cisailles et
de pétards de mélinite, partent courageusement en avant, roulant devant eux des
matelas destinés à les protéger des balles ; protection dérisoire, au bout
de quelques instants ils sont tués dans les fils de fer qui ne seront pas
détruits.
Malgré ces préparatifs
défectueux, le moral est excellent et, quand à
Elles ont à peine débouché
qu’elles sont soumises à des feux de front et de flanc ; la 21ème est particulièrement éprouvée par le tir des
mitrailleuses installées dans le saillant qui se trouve au milieu de la lisière
nord du bois Quarante, leur nombre augmente à chaque instant, elles forment un
barrage de feu que les compagnies ne peuvent franchir sans de fortes pertes.
La 6ème, tout en
avançant, parvient à se défiler dans un pli de terrain, malheureusement, il
n’en est pas de même pour la 21ème compagnie qui, emportée par son
élan, se trouve en avant et plus exposée. Dans l’espace d’une minute, elle perd
trois de ses chefs de section, dont le sous-lieutenant Cotti, et 85 chasseurs.
L’adjudant Imbert, avec sa section, continue cependant à avancer et parvient à
10 mètres des fils de fer qu’il ne peut franchir faute de brèche. Il s’y
maintiendra jusqu’à
La 6ème compagnie
n’a pas réussi non plus à aborder la tranchée allemande, elle s’est heurtée
elle aussi aux réseaux infranchissables. A
Dès leur arrivée dan le bois,
les chasseurs de la 21ème compagnie, faisant preuve d’un esprit de
corps et de solidarité admirables, posent leurs sacs et conservant leurs
fusils, repartent malgré les balles pour ramasser leurs camarades blessés.
Ils en rapportent 34 avant
Pour les deux compagnies, les
pertes s’élèvent à 1 officier, 105 sous-officiers, caporaux et chasseurs tués
ou blessés, dont 85 pour la 21ème compagnie.
L’adjudant Imbert reçoit la
médaille militaire sur le champ de bataille.
Le 6ème bataillon restera
en ligne jusqu’au 7 décembre, dans des tranchées où le niveau de l’eau monte
sans cesse, malgré les efforts continuellement déployés pour lutter contre
l’inondation.
Les pluies incessantes, le
bombardement dans ce terrain peu solide, ont vite fait de causer des dégâts
irréparables, les tranchées fondent littéralement et, c’est dans l’eau et la
boue jusqu’à la ceinture que les chasseurs sont obligés de travailler et de
monter la faction.
Malgré tant de souffrances
endurées pendant trois semaines, le moral ne faiblit pas une minute, et quand
le bataillon fut relevé, seul l’état physique des chasseurs épuisés accusait
les fatigues de ces dures journées ;
Pour son héroïque conduite au
cours du combat du 30 novembre, la 21ème compagnie est citée
à l’Ordre du bataillon :
Ordre du 6ème
bataillon de Chasseurs Alpins
Est citée à l’Ordre du
bataillon :
La 21ème Compagnie
du 6ème Bataillon de Chasseurs, commandée par le lieutenant
BARTHELEMY :
« La
21ème compagnie, au combat du 30 novembre, ayant perdu en quelques
instants 86 tués ou blessés, a néanmoins progressé et s’est maintenue sur les
positions acquises, quoique ayant perdu trois chefs de section sur
quatre ; les chasseurs de cette compagnie, à peine relevés des tranchées,
ont tenu à aller eux-mêmes ramasser tous leurs blessés, au prix de nouvelles
pertes.
« Aux
armées, le 1er décembre 1914.
« Le
chef de bataillon,
« Signé :
Lançon »
En quittant le 16ème
corps d’armée, les bataillons de chasseurs reçoivent les adieux du général qui,
dans un Ordre, rend hommage à leur vaillance.
Ordre général du 16ème
Corps d’Armée
« Au
moment où les bataillons de chasseurs momentanément affectés au 16ème
CA vont quitter le d’armée, le général commandant leur adresse ses
félicitations pour l’entrain, l’endurance et la vaillance dont ils ont fait
preuve au cours des opérations qui se sont déroulées au sud d’Ypres, du 12
novembre au 5 décembre.
« Ils
leur souhaite bonne chance sur les champs de bataille nouveaux où leur
vaillance trouvera encore à se donner carrière pour la gloire de la France.
« Le
général commandant le 16ème CA
« Signé :
GROSSETTI »
ARTOIS
Depuis que la guerre de
tranchées est en cours, seules des affaires locales ont été tentées ; la première
offensive de quelques importance destinée à percer le front va avoir lieu en
Artois, menée par deux corps d’armée.
Le 6ème bataillon,
qui jusqu’à ce jour a été de toutes les opérations difficiles, aura encore une
place de choix au premier rang.
Le 7 décembre, le
bataillon commence les étapes qui, de Dickebuch (Belgique) l’amèneront le 14 à
Béthonsart (Pas-de-Calais). Là il prend quelques jours de repos et, le 27
décembre, à
A
Les 1ère et 2ème
compagnies vont occuper les premières lignes ; en plus des difficultés
qu’elles ont à se mouvoir dans ce bourbier, elles sont gênées dans leur mise en
place par la présence, à leur point de départ d’assaut, d’une compagnie d’un
corps voisin amenée là par erreur. A
Parties superbement, elles
sont, au bout de quelques instants, prises de front par des feux d’infanterie,
et de flanc par des mitrailleuses. Elle progressent néanmoins jusqu’à un chemin
creux situé à 250 mètres de la parallèle de départ ; mais là, elles sont
obligées de s’arrêter, les mitrailleuses d’un ouvrage situé en pointe et à
droite de la ligne allemande, et qui n’a pu être enlevé par les bataillons de
gauche, prennent de flanc et couvrent d’une nappe de balles les cent mètres de
glacis qui séparent le chemin creux de la tranchée ennemie.
Les pertes des compagnies
atteignent en ce moment 60 % de leur effectif et, rien que la 2ème,
2 officiers et 9 sous-officiers sont hors de combat ; cette unité est donc
d’un seul coup privée de ses cadres.
Les compagnies se retranchent
dans le chemin creux, un poste est poussé dans un boyau allemand jusqu’à la
première ligne, refoulant l’ennemi dans sa tranchée de soutien.
A
Le long du chemin creux, des
tranchées sont construites et renforcées à l’aide de réseaux Brun. A
Les chasseurs, dans l’eau et
la boue jusqu’à la ceinture, sous un bombardement continuel, travaillent avec
une ardeur digne d’admiration.
Pendant toute la journée du
28, les travaux continuent sous la pluie et le marmitage, le bataillon est
relevé le 29 ; les chasseurs, couverts de boue, épuisés, mais fiers sont
envoyés au repos à Hermin pendant une dizaine de jours.
La 2ème compagnie,
après ces glorieux combats, reçoit la citation suivante à l’Ordre de
l’armée :
Ordre de
Le général commandant la Xème
armée, cite à l’ordre de l’armée :
La 2ème compagnie
du 6ème Bataillon de Chasseurs à Pied :
« A
l’assaut des tranchées allemandes, le
« Le
général commandant la Xème armée,
« Signé :
DE MAUD’HUY »
Le capitaine MICHEL, tué à la
tête de sa compagnie, est cité à l’Ordre de l’armée, dans les termes
suivants :
« A
fait preuve, depuis le début de la guerre, du plus beau courage. A été tué le
27 décembre, en conduisant sa compagnie à l’assaut »
Le lieutenant MARC est
également cité à l’Ordre de l’armée ; cet officier était un modèle de
courage et d’abnégation, un véritable entraîneur d’hommes ; pendant
l’attaque du bois de Berthonval, au moment où ses chasseurs allaient sortir de
la tranchée, il monte seul sur le parapet pour mieux diriger le débouché de sa
compagnie ; c’est alors qu’il est atteint d’une balle au ventre qui le met
hors de combat. Au moment où il est blessé, ses chasseurs qui ont en lui une
confiance sans bornes, manifestent leur attachement à leur chef en
disant : « Qu’allons-nous devenir, le lieutenant MARC est
blessé ».
1915
Le 1er janvier,
le chef de bataillon fait paraître l’Ordre suivant :
« Au
seuil de l’année nouvelle, le commandant salue, au nom de tous, la mémoire des
braves camarades morts pour la patrie dans l’année qui finit. Ils sont
nombreux, car dans cette guerre, la plus grande qu’ait vue l’humanité, sur tous
les points où la bataille fut la plus rude, en Lorraine, aux glorieuses
journées de la Marne, devant Verdun, la grande forteresse française, en
Belgique, dans les luttes sur l’Yser, devant Arras, le 6ème
bataillon de chasseurs à pied a payé à la patrie un large tribut.
« Aujourd’hui,
face à l’ennemi, officiers, sous-officiers, caporaux et chasseurs, affermissons
nos âmes pour de nouveaux combats, jusqu’à la victoire définitive, peut-être
éloignée, mais certaine. Sachons que rien ne se crée de grand et de durable que
par la volonté et que la gloire ne s’acquiert qu’au prix du sacrifice.
« Sur
notre cher drapeau, que la Légion d’honneur et la Médaille militaire attachées
à sa hampe sacrent le plus glorieux des armées françaises, faisons tous le
serment de laisser plus grande et plus belle encore à nos enfants la chère
patrie que nous ont léguée nos ancêtres.
« Fait
à Hermin, le 1er janvier 1915.
« Le
chef de bataillon commandant le 6ème BCA
« Signé :
LANÇON »
Le 12 janvier, le 6ème
bataillon est retiré de l’Artois pour être envoyé en Alsace, où il prendra une
part glorieuse aux combats qui seront livrés dans les Vosges.
Il embarque à la gare de
Saint-Pol et arrive le 14 janvier ; il fait alors partie de la 4ème
brigade de chasseurs à pied, commandée par le colonel Roux (47ème
division), détachement de l’armée des Vosges.
ALSACE
Débarqué au Thillot, dans la
vallée de la Moselle, le 6ème bataillon fait des reconnaissances à
l’est de ce village, dans la région comprise entre Ramonchamp, le col de
Morbieux, le col du Ménil, la Tête des Corbeaux et Fresse-sur-Moselle.
Les quelques jours passés dans
la région du Thillot sont employés au réentraînement des chasseurs et à la
réorganisation du bataillon.
Le 25 janvier, le
bataillon quitte le Thillot, passe par Bussang, franchit l’ancienne frontière à
Pendant le séjour du bataillon
à Saint-Amarin, le commandant LANÇON est promu Officier de la Légion d’honneur
avec la citation suivante :
« Chef
de corps remarquable par son sang-froid et son calme sous le feu. A différents
combats, a conduit son bataillon sous le feu violent de l’artillerie et de
l’infanterie, avec une précision et une énergie dignes des plus grands
éloges. »
Pendant la même période, sont
nommés Chevaliers dans l’Ordre de la Légion d’honneur :
Lieutenant PLEUCHOT, du 6ème
B.C.A :
« A
été atteint de onze blessures ; a fait preuve du plus grand courage et
d’un stoïcisme parfait, entraînant d’abord sa section sous le feu, puis la
maintenant en place, sous le bombardement intense de l’artillerie, pendant
douze heures. »
Lieutenant BERTRAND :
« Belle
conduit au feu, à différents combats où il a entraîné sa section et a bousculé
l’ennemi qui lui était opposé. Blessé dans une affaire, s’est contenté d’un
pansement sommaire et, dès le lendemain, est retourné au combat »
Le chasseur CABALL (Jean),
reçoit la Médaille militaire pour le motif suivant :
« Ayant
reçu à l’assaut une balle qui lui a fracassé le poignet gauche, a néanmoins
continué à combattre et a tiré en appuyant son fusil jusqu’à ce qu’il ait reçu
une deuxième balle qui lui a traversé la poitrine. »
Le 12 février, le
bataillon quitte Saint-Amarin pour venir occuper à Altenbach les positions de
soutien.
Le 15 février, le 6ème,
par une marche de nuit, se porte sur Colbach et le Sudelkopf, où il relève le
24ème bataillon de chasseurs (la position du Sudelkopf comprend, de
l’ouest à l’est, les pitons appelés Sudel n° 1, n° 2, n° 3)
Le 16 février, les 1ère
et 6ème compagnies occupent les pentes sud du Sudel n° 2, les 3ème
et 4ème compagnies tiennent
les positions de soutien.
Le 17 février, l
bataillon reçoit l’ordre d’attaquer le Sudel n° 3, dénommé le Doigt, position
dominante et boisée, en même temps que fortement organisée, dont les pentes
couvertes de neige sont garnies de nombreux fils de fer.
Notre position de départ est
sur le Sudel n° 2, nouvellement conquis par le 24ème B.C.A. ;
entre les deux crêtes se trouve un col, prolongé vers le nord par le ravin de
Diefenbach. A
Les chasseurs gravissent la
pente très raide, jonchée d’abatis et de fils de fer et font irruption dans la
tranchée allemande, dont les occupants, malgré leur défense acharnée, sont pour
la plupart tués à coups de baïonnette.
Le temps d’explorer les abris
et ils repartent en avant, descendent la pente est du Doigt, en direction de
Rimbach ; quelques-uns même poussent jusqu’aux premières maisons.
La soudaineté de l’attaque a
surpris les unités ennemies de soutien, qui n’ont pu intervenir, et nous
empêcher de progresser au-delà de la crête ; elles ont cependant exécuté
une contre-attaque en revenant par le boyau, de manière à prendre à revers la 3ème
compagnie, qui avançait face à l’est. Mais cette compagnie ne se laissa pas
surprendre ; tout d abord elle contint l’ennemi et finalement parvint
à le chasser des positions qu’il tentait de réoccuper. Elle s’établit ensuite
au changement de pente qui se trouve à l’est de
De son côté, la 4ème
compagnie, en arrivant au piton, fait un à-droite complet, bouscule l’ennemi
qui remontait et se porte face au sud, à environ 600 mètres ; elle revient
finalement à s’établir à 300 mètres au sud du piton, face au sud-est, en
liaison à droite avec la 18ème compagnie du
334ème
R.I., qui n’a pas réussi à progresser.
La 2ème compagnie
reste en réserve sur les positions de départ. La 6ème, en liaison
avec la 3ème aux abords de
A
Le sergent-major Girod, de la
4ème compagnie, emporté par son élan, dépasse son objectif, descend
avec sa section jusqu’aux premières maisons de Rimbach, à 2 kilomètres au
nord-est du Piton. Contre-attaqué par des forces très supérieures, il est
obligé, pour ne pas être cerné, de revenir sur ses pas. Il le fait avec ordre
et méthode, en tenant l’ennemi à distance et en lui infligeant des pertes
sérieuses.
Aussitôt la position conquise,
les travaux d’organisation commencent et sont poussés activement.
Le Sudel n° 3, si l’on en juge
par la force des ouvrages, l’accumulation des matériaux, le nombre et
l’organisation des abris, semble avoir constitué pour les Allemands le réduit
de la défense de la région du Sudel.
Pendant l’organisation de la position,
dans la soirée qui suivit l’attaque, des patrouilles hardies sont exécutées,
l’une d’elles, sous la direction du sergent Cathala, s’infiltre dans
Rimbach ; elle rapporte des renseignements de première importance. Une
autre, commandée par le sergent Fillaul, part avec quatre volontaires, à
travers bois, reconnaître les fermes de Glasfutte et Graben, à 1 800 mètres au nord du col du Furstacker.
Pendant les journées qui
suivent, l’ennemi ne tente aucune action d’infanterie, mais son artillerie
lourde et de campagne bombarde sans relâche la cote 937,2, le col du Furstacker
et le collet entre les Sudel n° 2 et n° 3.
Jusqu’au 22, le
bataillon organise le secteur ; durant toute cette période, la température
a été extrêmement rigoureuse, la pluie et la
neige tombèrent sans discontinuer.
Le 22 février, le 6ème
B.C.A., relevé par le 24ème B.C.A., vient cantonner à Altenbach où
il reste la journée du 23.
Le 24, il est alerté à
Le 1er mars,
les 5ème et 6ème compagnies, sous les ordres du capitaine
Haas, sont alertées ; elles redescendent sur Saigmatt, Stoswir et sont
placées en soutien des 12ème et 52ème B.C.A. Au bout de
quelques heures, elle repartent au nord de Saigmatt, où elles bivouaquent une
nuit et un jour puis remontent vers Germania.
Dans le même temps, le bataillon
détache des compagnies à l’Almatt et au Klizerstein.
Le 5 mars, les 5ème
et 6ème compagnies, précédée de deux reconnaissances, s’emparent du
Sillacker, s’y établissent et poussent des patrouilles.
Le 6 mars, le 23ème
B.C.A. et deux compagnies du 6ème attaquent la crête au Petit et au
Grand Reichaker et s’en emparent après un combat acharné. L’attaque a eu lieu à
Dans ces combats, parmi ceux
qui se distinguèrent d’une façon particulière, il convient de citer le chasseur
Rougeault, de la 1ère compagnie, qui fit preuve d’un esprit de
discipline et de sacrifice admirable ; six sentinelles ayant été tuées
successivement dans le même petit poste, au moment où le capitaine demandait un
volontaire, pour assurer ce service, Rougeault se présenta le premier, prend
ses consignes et, quoique sachant le danger auquel il s’expose, sort du boyau
pour aller immédiatement occuper son poste. Quelques instants après, il tombe
glorieusement, lui aussi, près de ses camarades.
Après lui, le chasseur Didier
se présente également comme volontaire pour ramener les morts et, malgré tous
les périls qu’il doit affronter, il réussit à ramener les corps de ses
camarades, parmi lesquels celui de Rougeault.
La nuit du 6 au 7 mars
est relativement calme, elle est employée à construire les retranchements sur
les positions. Pour cela, les outils manquent complètement ; pour faire
les tranchées, les chasseurs utilisent tout ce qui est à leur portée, ils
creusent dans la neige et la terre avec leurs mains et se servent de leurs
bérets pour la transporter.
A la suite de ce combat, le
chef de bataillon fait paraître l’ordre suivant :
ORDRE DU BATAILLON N° 34
« Le
bataillon a pris pied dans le département du Haut-Rhin (Alsace), le 26 janvier.
« Le
1er février, il a emporté le formidable réduit de la défense allemande au
Sudelkopf, faisant des prisonniers et capturant un matériel considérable,
mitrailleuses, bombes, outils, canons lance-bombes.
« Le
5 mars, il a balayé les avant-postes allemands au Sillakerkopf.
« Le
6 mars, il a emporté, avec le 23ème bataillon, la position du
Reichakerkopf et résisté victorieusement aux contre-attaques des meilleures
troupes prussiennes actives qui, de leur côté, ont combattu avec la plus grande
bravoure.
« Le
commandant adresse ses félicitations aux officiers, sous-officiers, caporaux et
chasseurs, qui ont affirmé une fois de plus leur supériorité sur l’ennemi.
« Le
chef de bataillon commandant,
« Signé :
LANÇON »’
Le 7 mars, à
Le commandant Lançon prend le
commandement du sous-secteur Sattel-Reichaker.
A
Pendant la première partie de
la matinée, gros bombardement du Reichaker.
Vers
Les chasseurs rivalisent de
courage, les canons de fusils sont brûlants, toutes les munitions sont
employées et les cartouchières des morts et des blessés sont vidées par les
défenseurs encore debout.
Un moment, le Petit Reichaker
est pris par l’ennemi, ce qui a pour conséquence de couper les communications
arrières du Grand Reichaker, mettant ainsi en grand péril les défenseurs des
deux sommets.
Le capitaine commandant le 23ème
B.C.A. fait alors appel à la 6ème compagnie, du 6ème
bataillon, sous les ordres du capitaine Haas, qui lance une de ses pelotons à
l’attaque du Petit Reichaker, afin de prendre
Au moment où le peloton de
Au bout d’un moment, il
revient vers ses caisses de cartouches et la apporte à sa section. Quand son
chef lui demande le motif d’une si longues absence, il répond simplement :
« Quand j’ai vu partir le peloton de contre-attaque de la 6ème,
j’ai pensé que si les boches réussissaient à couper le chemin du Grand au Petit
Reichaker, vous tous cernés, et comme il n’y avait pas trop de monde, je suis
parti avec eux, sachant d’autre part, que vous ne manquiez pas de munitions »
Au cours de la cinquième
contre-attaque sur le Grand Reichaker, les Allemands encore une fois repoussés
pouvaient s’entendre narguer par le chasseur Boch, petit bonhomme à la voie
fluette, que l’on aurait pris pour une fille, mais qui se battait comme un lion
et criait de toutes ses forces : « Vous pouvez venir le Boches, ce
ne sont pas les bitous qui sont ici, ce sont des chasseurs !... On vous
recevra….Nous ne partirons pas !... »
Dans un petit poste avancé,
chargés de barrer un boyau, onze chasseurs gisent tués ou blessés ; le
dernier vient de tomber, ce que voyant, le chasseur Buera s’élance aussitôt et
prend
Plus loin, c’est l’adjudant
Mélandri, commandant une section de mitrailleuses. Au moment de l’attaque du
Grand Reichaker, par le 23ème et le 6ème, il est arrivé
au sommet avec ses pièces un des premiers ; après avoir rallié tous les
chasseurs dispersés du 23ème, il fait organiser
Dans cette lutte féroce,
certains trouvent encore le moyen de faire rire en exprimant leur satisfaction,
tel le chasseur mitrailleur Cresson, engagé volontaire (36 ans), qui demande à
diriger le tir d’une pièce ; pour cela, il monte sur le parapet, les obus
qui éclatent tout près ne lui enlèvent rien de son humeur railleuse ;
quand un arbre tombe, fauché par une explosion, on l’entend dire ; « Chic,
les voilà qui nous coupent du bois pour cette nuit !... »
Au moment où les ennemis
débouchent, voyant tomber les Boches devant sa mitrailleuse dont il commande le
feu, il dit à son officier ; « Ah !... mon lieutenant, c’est
un bath boulot que vous me donnez-là, je ne donnerais pas ma place pour un
louis !... » et s’adressant à ses camarades, il ajoute :
« Ne vous en faites pas les amis, à ce train-là nous danserons à Paris
le 15 juillet !... »
Tous luttent avec une énergie
farouche, à côté des mitrailleurs, d’autres chasseurs armés de fusils se
tiennent debout sur le parapet pou mieux viser et abattent leur Boche à chaque
coup.
Dans ce combat
disproportionné, où l’ennemi amène sans cesse des renforts pour de nouvelles
attaques, on voit des chasseurs dans la neige jusqu’aux genoux, pourchasser à
la baïonnette les Allemands, de sapins en sapins.
Tout le monde se dépense sans
compter ; à la première compagnie, le lieutenant Pattela, officier adoré
de ses hommes, quoique malade, avait tenu à rester avec ses chasseurs, malgré
les vives instances de son commandant de compagnie, le lieutenant Sauvageon,
qui l’engageait à aller se faire soigner, et lui disait, en désespoir de
cause : « Il est malheureux que je n’aie pas un galon de plus pour
vous donner l’ordre de partir. »
Dans la tranchée, il encourage
ses chasseurs aux moments les plus critiques, en leur disant : « ‘Pour
l’honneur du 6ème et de la 1ère compagnie, nous ne
bougerons pas !... Nous nous ferons plutôt tuer sur place !... »
Dans la nuit du 7 au 8 mars,
des travaux d’organisation se poursuivent sans relâche, malgré les fatigues
d’une journée de combat, dans des conditions exceptionnellement mauvaises. Les
Allemands n’ont pas réussi dans leurs attaques, ils en ont assez d’une leçon
aussi sévère et ne tentent pas de nouvelles actions d’infanterie durant toute
la nuit.
Après cette journée de
glorieux combats, le chef de bataillon, pour glorifier la vaillance de tous et
rendre hommage à la mémoire du capitaine Haas, fait paraître l’Ordre
suivant :
ORDRE DU BATAILLON N° 35
« Le
7 mars, à
« Au
moment où l’ennemi, trois fois supérieur en nombre, réussissait à prendre pied
dans une de nos tranchées, le capitaine Haas, commandant la 6ème compagnie,
jusqu’alors en réserve, s’élança à la tête de ses braves chasseurs et mit les
Prussiens en complète déroute. Le capitaine Haas a été tué d’une balle à la
tête, au moment où il assurait la victoire.
« Le
commandant salue, au nom de tous, la mémoire de ce vaillant officier, issu
d’une vieille famille d’Alsace et qui est tombé sur la dernière crête qui
domine la plaine du Rhin.
« Le
chef de bataillon,
« Signé :
LANÇON »
De plus, le capitaine Haas est
cité à l’Ordre de l’armée dans les termes suivants :
« Au moment où l’ennemi allait réussir, par une contre-attaque en masse,
à occuper une partie de la position qui venait d’être conquise, s’est élancé à
la tête de son peloton de réserve, a bousculé les assaillants ; a été tué
d’une balle à la tête en en assurant définitivement le succès. »
Du 8 au 11 mars,
l’organisation des sommets est poussée activement sur les deux Reichaker,
malgré les bombardements ennemis qui, le 12, augmentent d’intensité,
avec gros emploi de 210 et de mines ; les tranchées des deux Reichaker
sont bouleversées et le passage du col du Sattel est infranchissable. Le
bombardement continue pendant deux jours ; c’est dans ce secteur que les
mines sont utilisées pour la première fois contre le 6ème.
Le 14, dans l’après-midi,
une compagnie du bataillon voisin, après de grosses pertes, est obligée
d’évacuer une tranchée entièrement bouleversée par les 210 ; pendant la
nuit, les Allemands parviennent à l’occuper.
Le 15, à
Sans aucune préparation
d’artillerie, elle part, magnifiquement entraînée par son chef, le lieutenant
Macaire ; mais les mitrailleuses ennemies ouvrent le feu et empêchent tout
progression.
A
Dans cette affaire, le lieutenant
MARCORELLES, particulièrement aimé de ses chasseurs, trouve une mort glorieuse
à la tête de sa section. Son héroïque conduite est l’objet de la citation
suivante à l’Ordre de l’armée :
« A
fait preuve d’énergie et de dévouement depuis le début de la campagne ;
blessé en octobre, a rejoint son bataillon à peine guéri. Est tombé
glorieusement en enlevant d’assaut une tranchée ennemie. »
Le 16 mars, le
bombardement ennemi augmente d’intensité, les 210 et les mines bouleversent les
tranchées et les abris péniblement construits. Le 17, il continue,
redoublant de violence, ainsi que le 18 ; en même temps l’ennemi
s’approche en sape du Petit Reichaker.
Le 19, le 62ème
B.C.A. attaque sur la croupe qui descend du Grand Reichaker jusqu’à la cote
600, environ 800 mètres au nord.
Le 20, dans la matinée,
bombardement de la violence habituelle par pièces de tous calibres (les 210
tirent par deux).
Les tranchées sont
complètement bouleversées et les chasseurs sont à bout de forces. A
Entre les deux Reichaker, la 3ème
compagnie, qui fait face au ravin de Tiffenbach, perd deux sections, qui
sautent dans une explosion de mine.
L’ennemi attaque alors avec
plus de violence sur tout le front. Une compagnie du bataillon de gauche est
obligée de se replier quelque peu, par le col du Sattel.
La 6ème compagnie,
qui tenait le Petit Reichaker, est enveloppée. Les deux pelotons de cette
compagnie, sous le commandement du lieutenant Bamme, s’adossent l’un à l’autre
pour mieux résister et parviennent à se dégager et à se replier sur le col du
Sattel, où ils rejoignent les autres éléments du bataillon. La contre-attaque
est rendue impossible du fait des conditions défavorables dans lesquelles se
trouve notre artillerie, du violent barrage ennemi, interdisant tout
rassemblement et de l’état extrême de fatigue de tous.
La nuit est employée à la
relève des morts et des blessés restés entre les lignes.
Le 21 mars, la 1ère
compagnie du 6ème participe à une contre-attaque menée par les 62ème
et 24ème B.C.A. et réussit à reprendre le Petit Reichaker.
La journée du 22 se
passe sans incidents. Préparation d’une attaque.
Le 23, attaque de la
position du Grand Reichaker par le 62ème B.C.A., aidé de quatre
compagnies du 24ème et de deux du 6ème ; malgré le
feu de notre artillerie, dont le tir est bien réglé, cette attaque ne parvient
pas à progresser.
Le 24, journée
calme ; dans la nuit du 24 au 25, le 6ème bataillon est relevé
par le 67ème B.C.A.
Au moment où le lieutenant
Fontanille s’apprêtait à rejoindre le bataillon avec son peloton, l’ennemi,
attaquant les premières lignes, réussit à s’emparer d’un élément très délicat
de la position, par où les Allemands, supérieurs en nombre, menacent
d’encerclement la garnison du Reichaker.
N’écoutant que sont courage,
le lieutenant Fontanille contre-attaque immédiatement à la tête de ses chasseurs et s’empare de la
tranchée, qu’il organise aussitôt.
Un moment après, l’ennemi
revient en force ; il est de nouveau repoussé avec des pertes
énormes ; le lieutenant Fontanille tombe, frappé d’une balle, alors qu’il
dirigeait la résistance, mais ses chasseurs conservent intégralement le
terrain.
Le 25, le bataillon
bivouaque à Germania ; ce jour-là, le commandant Lançon est promu
lieutenant-colonel.
Pendant la période du 6 au
21 mars, le 6ème bataillon a perdu 3 officiers tués, 6 officiers
blessés et 784 sous-officiers, caporaux et chasseurs tués ou blessés.
Le bataillon vient cantonner
de Germania à Gérardmer, où il reste quatre jours, puis de là se rend à
Corcieux.
Le 18 avril, à
Ces éléments arrivent à
Gaschney à
Le 20 avril, retour à
Corcieux. Les 2ème et 3ème compagnies, qui avaient quitté
Corcieux le 19, étaient à la disposition du colonel Brissaud, commandant le
secteur des Lacs (Lac Blanc, lac Noir).
Le 21 avril, le
lieutenant-colonel Lançon nommé au commandement d’un groupe de chasseurs alpins
de la 47ème division, fait ses adieux au 6ème bataillon,
dans l’Ordre suivant :
ORDRE DU BATAILLON N° 64
« Nommé
au commandement d’un groupe de bataillons de chasseurs, je dois quitter
aujourd’hui le 6ème, dont j’avais pris le commandement le
« C’est
avec une peine profonde que je m’éloigne des officiers, sous-officiers et
chasseurs qu j’ai conduits au feu pendant neuf mois, pour le salut et la gloire
de la patrie.
« Ensemble,
nous avons ajouté une longues page de sacrifices et de succès à l’historique
glorieux des chasseurs à pied.
« J’ai
le droit d’être fier de vous. A ceux qui sont tombés, je donne un souvenir
ému ; à ceux qui restent, je garderai une amitié fidèle.
« Continuez,
mes chers amis, à combattre vaillamment avec la foi dans la justice de notre
cause, avec la certitude de la victoire complète de la France.
« Le
lieutenant-colonel commandant,
« Signé :
LANÇON »
Ce même jour, le capitaine
adjudant major prend provisoirement le commandement du bataillon. Les 2ème
et 3ème compagnies relèvent les unités du 52ème B.C.A.,
dans le secteur de Weiss-Wettstein.
Du 21 au 30 avril, le 6ème
bataillon occupe et organise les secteurs de Noirmont, Creux-d’Argent,
Jeune-Champs et du lac Noir.
Le 1er mai,
le 6ème relevé par le 52ème bataillon, fait étape sur
Corcieux, où il séjourne jusqu’au 6.
Le 7, il vient à
Granges, où il cantonne les8 et 9. Le 10, le commandant Melle-Desjardins,
arrivant au bataillon, en prend le commandement et fait paraître l’ordre
suivant :
ORDRE DU BATAILLON N° 72
« Par
décision du général commandant le groupe des armées de l’Est, je prends à la
date d’aujourd’hui le commandement du 6ème bataillon de chasseurs.
« Partout,
où il a été, en Lorraine, en Belgique, dans les Vosges, le 6ème
bataillon a fait brillamment son devoir.
« Sévèrement
éprouvé à plusieurs reprises, ses cadres et ses effectifs ont été presque
entièrement renouvelés.
« Il
faut que le 6ème maintienne sa réputation.
« Officiers,
sous-officiers, caporaux et chasseurs, je compte sur vous pour développer à l’extrême
les belles qualités de notre corps, l’ardeur au feu, l’endurance aux fatigues,
la gaieté et l’entrain.
« Joignez-y
une belle tenue, une attitude fière et décidée, une instruction parfaite, et je
vous promets que nous ferons de bonne besogne.
« Devant
vous, les Allemands ne tiendront pas.
« Granges,
le
« Le
chef de bataillon commandant le 6ème B.C.A.
« Signé :
MELLE-DESJARDINS »
Dans la soirée du 10 mai,
le bataillon va bivouaquer sur les pentes du Gaschneykopf.
Du 11 au 31 mai, le
bataillon construit des abris dans le camp de Gaschney ; exécute des
travaux d’approche sur les pentes de l’Altmathkopf, en prévision d’une attaque
du Braunkopf, plateau dominant et débordant le village de Metzeral.
Du 1er au 11
juin les travaux continuent, l’ennemi inquiet bombarde chaque nuit les
boyaux et tranchées en construction.
Pendant la période du 11
mai au 11 juin, le bataillon a fourni un effort considérable, construisant
plus de 1500 mètre de boyaux et tranchées, ce qui lui vaut les félicitations du
colonel La Capelle, commandant la 4ème brigade.
A cette occasion, le chef de
bataillon fait paraître l’Ordre suivant :
ORDRE DU BATAILLON N° 90
« Le
6ème bataillon de chasseurs vient d’exécuter un travail considérable
et périlleux en creusant, au nez de l’ennemi, une parallèle permettant de
l’attaquer avec un minimum de pertes.
« Chasseurs !
L’effort de ce travail est presque terminé, reste à enlever les positions
ennemies. Je sais que pour cela je puis compter sur vous, sur votre cœur de
Français, sur votre volonté de vaincre.
« Au
moment de l’assaut, pas de regards en arrière.
« Il
faut, d’une seul bond, franchir et dépasser les retranchements ennemis.
« Dans
cette circonstance, vous montrerez que vous êtes de vrais « diables
bleus ».
« Le
chef de bataillon commandant le 6ème B.C.A.
« Signé :
MELLE-DESJARDINS »
Pendant l’exécution des
travaux, le bataillon, bien que n’étant pas engagé, éprouva des pertes
cruelles : 3 officiers furent tués ainsi que plusieurs chasseurs.
Les 12 et 13 juin, le 6ème
est mis au repos au camp de Gaschney.
Le 14, conformément aux
ordres reçus, les 2ème et 6ème compagnies et le peloton
de mitrailleuses du bataillon relèvent des unités du 52ème B.C.A.
dans l’ensemble de la position et en assurent la garde en liaison à gauche avec
le 24ème B.C.A., à droite avec le 23ème. La nuit se passe
sans incidents, l’ennemi bombarde avec intermittence les tranchées et boyaux
conduisant aux parallèles de départ.
Le 15 juin à
A
La mission est extrêmement
périlleuse, tout le chemin à parcourir étant soumis au feu des deux
artilleries.
Cependant, à la première
demande, le caporal-fourrier Bréra se présent aussitôt, emporte le pli destiné au
commandant et revient une fois sa mission accomplie, reprendre sa place de
combattant, pour l’attaque qui se déclenchera tout à l’heure.
A
A 13 heures, l’artillerie
française commence son tir de préparation sur le Braunkopf ; il paraît
assez bien réglé, et les tranchées ennemies sont en partie détruites, mais une
maison, dénommée maison O., située au nord-est des positions de départ et
fortifiée par l’ennemi, ne reçoit aucun projectile.
Le tir de préparation continue
jusqu’à 16 h 30 ; l’artillerie allemande répond vigoureusement par un
pilonnage en règle de nos parallèles de départ. Malgré ce bombardement, les
compagnies d’attaque commencent leur mouvement pour aller occuper leurs
emplacements de départ.
Les 2ème et 6ème
compagnies, qui sont en lignes, se portent dans des places d’armes pour laisser
la place au 3ème et 5ème compagnies, dans les tranchées
de départ. Quand les 2ème et 6ème compagnies quittent les
tranchées de première ligne, elles ont déjà subi de fortes pertes, causées par
la contre-préparation allemande. Des boyaux sont totalement comblés, de même
que des parties de la tranchée de première ligne. Malgré ces difficultés, le
placement des deux compagnies d’attaque (3ème et 5ème)
s’opère rapidement.
La position du Braunkopf, qui
est à enlever, se présente sous la forme d’un gros mamelon avec, à son point
culminant, un grand rocher. Le sommet est dénudé, mais les pentes cultivées,
sont garnies d’arbres, et parsemées de petites fermes isolées. La maison, dite
maison O., est située par rapport à nos positions de départ en avant et à
gauche ; elle constitue donc pour l’ennemi une forteresse de flanquement,
puisque de cet endroit, il lui est possible de battre de ses feux de
mitrailleuses tout le front de débouché du bataillon.
L’attaque a lieu à 16 h
30 ; la 3ème compagnie à droite, sous les ordres du capitaine
Laplanche et la 5ème à gauche, sous les ordres du capitaine
Audibert, franchissent d’un seul bond le parapet de la tranchée. La 3ème
se porte sur le versant nord du Braunkopf et le Rocher, qu’elle enlève
rapidement, malgré la résistance opposée par l’ennemi ; ses chefs tombent
à la tête de leurs chasseurs. C’est d’abord le lieutenant Pattela, adoré de ses
hommes, qui les encourage quelques temps avant l’attaque, alors que le
bombardement de contre-préparation creusait de nombreux vides ; au moment
de l’assaut, il sort le premier, entraînant son peloton par son exemple, mais
il n’a pas la satisfaction d’arriver jusqu’à l’ennemi ; il tombe avant
d’avoir pu aborder la tranchée que ses chasseurs enlèvent de haute lutte.
Le capitaine Laplanche est
frappé, lui aussi, quelques instants après, sur le sommet du Rocher, où il est
arrivé le premier.
Dès le débouché, le capitaine
Audibert est blessé ; le sous-lieutenant Faure prend aussitôt le
commandement de la 5ème compagnie, en tête de laquelle il se trouve
déjà avec sa section, progresse rapidement et va même si vite, que ses hommes
ne peuvent le suivre ; il est un moment isolé et assailli par un groupe
d’Allemands, dont il se débarrasse à coups de revolver. Continuant toujours, il
arrive devant un abri occupé et, payant d’audace, il intime aux Allemands
l’ordre de se rendre, en les menaçant de son revolver vide, et les ramène vers
sa compagnie, qui arrive à la ligne des blockhaus ennemis, s’empare des centres
de résistance garnis de mitrailleuses et capture les servants. Une section
s’empare d’une maison organisée de la ligne d’arbres et y fait des prisonniers.
Le reste de la 5ème compagnie continue sa marche en avant, dépasse
le Rocher et descend les pentes sur du Braunkopf. Emportée par l’élan de son
chef, elle est un instant isolée et est obligée de prendre la liaison avec la 3ème
compagnie, avec laquelle elle opère des destructions et capture des
prisonniers.
Pendant ce temps, l’aspirant
Lacour, qui a reçu l’ordre d’aller jusqu’au cimetière de Metzeral, devance sa
compagnie, suivi de sept chasseurs, dépasse le barrage français, va jusqu’au
cimetière et ne se décide à revenir que sur le point de se voir coupé.
Les 3ème et 5ème
compagnies organisent les deux lignes de tranchées conquises, elles sont sur le
Braunkopf, sans aucune liaison. A gauche, le 24ème bataillon n’a pu
déboucher pour s’emparer du bois Noir, la maison O. n’ayant pas été touchée par
l’artillerie, balaye de ses mitrailleuses les pentes du Petit Almalt et le
Braunkopf ; à droite, le bois d’Eichwald, n’ayant pu être enlevé par le 23ème
bataillon, les deux compagnies reçoivent également de cette direction des feux
de mitrailleuses qui leur causent des pertes.
A 16 h 50, les 2ème
et 6ème compagnies viennent renforcer dans les tranchées conquises,
les 3ème et 5ème. Pour y arriver, elles traversent
rapidement le Braunkopf, mais le tir de barrage d’artillerie et les feux de
mitrailleuses du bois Noir et de la maison O., du bois d’Eichwald, sont de plus
en plus meurtriers et causent à ces unités de lourdes pertes ; elles
parviennent cependant jusqu’à la position et procèdent à son organisation sous
les ordres du capitaine Barthélemy.
A 1 heure, la 1ère
compagnie à droite et la 4ème à gauche, viennent à leur tour dans
les tranchées de première ligne ; la 1ère compagnie détache un
peloton pour flanquer à l’est nos positions du Braunkopf et les relier aux
tranchées de départ ; le 2ème peloton est porté sur le
Braunkopf, pour renforcer les compagnies d attaque.
Le sous-lieutenant Girod, de
la 4ème compagnie, s’élance avec un peloton, passe à la maison O.,
et l’attaque, pour tenter de faire tomber cette résistance qui empêche la
progression ; il est arrêté net par le feu des mitrailleuses. Voyant ses
chasseurs hésiter un instant, il les excite et repart de plus belle, en
disant : « il faut arriver coûte que coûte !... » Au
bout de quelques mètres, il tombe, frappé d’une balle à la tête ; ses
chasseurs s’accrochent au terrain et finissent par pénétrer en cet endroit dans
la première ligne allemande, qu’ils organisent au plus tôt.
Le 2ème peloton de
la 4ème compagnie établit la liaison avec le 24ème
bataillon.
Vers 20 heures, les Allemands
tentent une contre-attaque qui est repoussée. Quelques fractions, profitant de
ce que la liaison est encore mal assurée, essaient de s’infiltrer dans les
lignes en utilisant le boyau que viennent de dépasser les éléments de
tête ; ils se heurtent au sergent Granier, de la 1ère compagnie
qui, groupant autour de lui quelques chasseurs, leur oppose une résistance
énergique ; il est tué en criant ; « Mort aux
Boches !... Vive le 6ème !... »
Aussitôt, le chasseur Couval
prend le commandement du petit groupe, qui ne cédera pas, malgré la supériorité
numérique de l’assaillant. Couval tombe, lui aussi mortellement blessé ;
ses camarades le vengent, ainsi que le sergent Granier, en arrêtant les
Allemands, auxquels ils infligent des pertes sévères.
Devant l’échec de leur
tentative, les Allemands bombardent violemment les positions du Braunkopf et de
l’Altmatt. Pendant la nuit, vers 1 heure, le 6ème bataillon est
renforcé par deux compagnies du 46ème B.C.A.
Le 16 juin, à 2 h 30,
une petite contre-attaque allemande, déclenchée sur le Braunkopf, est arrêtée à
coups de grenades et de fusils par les 1ère et 5ème
compagnies.
Pendant toute la matinée, les
Allemands bombardent violemment les tranchées et boyaux de l’Altmatt. A 10heures,
une nouvelle contre-attaque est repoussée avec de grosses pertes.
A 10 h 30, l’artillerie
commence une préparation sur les tranchées allemandes situées à l’ouest et au sud-ouest
du Rocher. A 13 heures, une attaque menée par les 46ème et 24ème
bataillons, débouche de nos parallèles et réussit pleinement. Ces deux
bataillons occupent entièrement leurs objectifs. Le reste de la journée est marqué
par un bombardement violent de nos positions, mais l’ennemi ne tente plus
aucune action d’infanterie.
Pendant ces deux journées de
combats, les traits d’héroïsme furent nombreux. Chacun était à sa place,
accomplissant son devoir de son mieux. Le chasseur téléphoniste Clutier, sous
un bombardement formidable, répare sa ligne plus de dix fois, sans souci des
obus qui pleuvent ; les compagnies d’attaque ne sont pas plus tôt arrivées
sur leurs objectifs, qu’il déroule son fil et l’inspecte sans cesse, pour
rétablir les communications coupées par la mitraille.
Des Allemands, qui
s’apprêtaient à achever un officier blessé, en sont empêchés par le caporal
Deygache, qui se précipite au secours de son chef.
Le sous-lieutenant Lahalle,
trois fois blessé au cours de l’attaque, conserve le commandement de sa
section, qu’il vient d’entraîner à l’assaut de la position ennemie et refuse de
se laisser évacuer.
Pendant la nuit du 15 au 17,
le 11ème bataillon relève le 6ème sur la position du
Braunkopf. Les compagnies reviennent au camp de Gaschney, om elles bivouaquent.
Dans ces combats, le bataillon a perdu cinq officiers tués, quatre officiers
blessés et 489 sous-officiers, caporaux et chasseurs hors de combat.
Le 18 juin le général
de Maud’huy félicite le bataillon de la prise du Braunkopf. Il remet la Croix
d’officier de la Légion d’honneur au chef de bataillon MELLE-DESJARDINS, avec
la citation suivante :
« Officier
du plus haut mérite, le 15 juin 1915 a conduit son bataillon à l’attaque, sous
un feu terrible d’artillerie et d’infanterie et a enlevé la plus grande partie
des tranchées ennemies. A été blessé d’un éclat d’obus et a conservé le
commandement de son bataillon pendant tout la journée, donnant ainsi un exemple
de ténacité et de courage remarquable. »
Le capitaine Barthélemy est
nommé chevalier de la Légion d’honneur :
« Officier
énergique et parfaitement brave, a porté sa compagnie à l’assaut, malgré de
violents tirs de barrage et des flanquements de mitrailleuses sur ces deux
flancs ; a rapidement organisé la position conquise et l’a conservée,
malgré toutes les contre-attaques, pendant plusieurs heures, jusqu’à l’arrivée
des renforts. »
Le caporal Deygache reçoit la
Médaille militaire :
« Pendant
l’assaut, s’est élancé au secours d’un de ses officiers blessé ; a tué un
officier allemand au moment où ce dernier allait se servir de son revolver
contre un officier français. A ensuite tué à coups de crosse un Allemand qui
transmettait des renseignements au téléphone ; puis a détruit l’appareil
et coupé les fils. A fait preuve de beaucoup d’entrain et d’audace. »
La belle conduite du 6ème
bataillon, au cours de cette attaque, lui vaut sa première citation à l’Ordre
de l’armée.
ORDRE GÉNÉRAL N° 32 DE LA
VIIème ARMÉE
Est cité à l’Ordre de l’armée :
Le 6ème Bataillon
de Chasseurs à Pied :
« A
fait preuve d’une vaillance et d’une énergie au-dessus de tout éloge en
enlevant une position très solidement organisée, dans laquelle l’ennemi se considérait
comme inexpugnable, d’après les déclarations mêmes des officiers prisonniers.
Lui a fait des pertes considérables, malgré un bombardement des plus violents,
n’a cessé de progresser pendant plusieurs journées consécutives, pour élargir
sa conquête.
« Signé :
DE MAUD’HUY »
Le colonel La Capelle,
commandant la 4ème brigade de chasseurs, envoie aux bataillons qui
la composent, ses félicitations avec l’ordre suivant :
ORDRE DE LA BRIGADE
« Chasseurs !
« Après
huit jours de combats continuels et acharnées, vous avez rejeté l’ennemi sur
Mulbach et la rive droite de la Fecht.
« Malgré
la force de leur organisation défensive, malgré le feu de leur infanterie et de
leur artillerie, malgré un bombardement violent, qui trahissait leur inquiétude
et leur colère, vous avez enlevé à la baïonnette et occupé des positions
formidables, forçant l’ennemi à reculer partout, en lui infligeant des pertes
sensibles.
« Près
de 1 000 prisonniers, dont plusieurs officiers, un matériel considérable,
minenwerfer monstrueux, mitrailleuses, fusils, grenades et cartouches par
centaines de mille, sont restés entre vos mains.
« Vous
pouvez être fiers de ce succès remarquable, qui prouve votre courage et votre
vaillance. Vous êtes toujours l’élite de l’infanterie française, ardente à
l’attaque, faisant preuve dans le combat d’intelligence et d’initiative, de
ténacité et d’énergie. Dans les circonstances les plus critiques, sous le feu
le plus violent, alors que vos chefs sont tombés, vous savez puiser dans votre
amour de la patrie, dans votre sentiment du devoir, dans votre cœur de chasseur
le courage et la volonté d’avancer quand même et d’enfoncer vos baïonnettes
dans le dos de vos adversaires.
« Saluons
ceux d’entre vous qui sont tombés glorieusement pour la France. Leur mort a été
adoucie par la vision de la victoire et leur âme en s’envolant, a entendu la
voix de la patrie qui leur disait merci.
« Pour
elle, chasseurs, nous continuerons à combattre avec la volonté de vaincre,
coûte que coûte ; pour elle, nous serons toujours prêts au sacrifice. Nous
ne penserons au repos que lorsque le dernier de nos ennemis aura quitté le sol
de notre France.
« Officiers
et chasseurs, je vous remercie tous du concours absolu et dévoué que vous
m’avez prêté. Je suis, plus que jamais, fier de vous commander, car je sais que
je puis compter sur vous pour la tâche ardue et glorieuse qui nous incombe, la
libération de l’Alsace…
« Vivent
les chasseurs !...
« Vive
la France !…
« Signé :
DE LA CAPELLE »
Le 18 juin le 6ème
bataillon est embarqué en T.M. à destination de Fraize, où il restera jusqu’au 9
juillet.
Le 10 juillet, le 6ème
bataillon quitte Fraize vers 1 heure du matin et est amené en camions au camp
d’Haeslen, près de Sulzern, en direction de Munster.
Il séjourne dans le camp
jusqu’au 13 ; ce jour-là, les 1ère, 2ème et 3ème
compagnies quittent Haeslen pour le camp de Vida, pente sud du Sattel, où elles
s’installent et construisent des abris.
Le 14, l’état-major du
bataillon, le peloton de mitrailleuses, les 4ème, 5ème et
6ème compagnies rejoignent à Vida celles qui y sont déjà et, en 48
heures, tout le bataillon construit un camp en rondins, pour loger 1 500
hommes.
Du 15 au 19 juillet, le
bataillon exécute sur le Reichaker et les pentes du Sattel, des travaux
préparatoires à une attaque sur le Reichaker. Le 19 juillet, à 18 heures, deux
compagnies et une section de mitrailleuses du 6ème relèvent en
première ligne des fractions du 47ème B.C.A.
Le bataillon se rassemble ensuite
dans les tranchées du Petit Reichaker et le 20, à 11 h 30, le mouvement est
terminé.
Le bombardement français a
commencé à 8 heures du matin ; à 10 heures, le chef de bataillon rend
compte que le tir de l’artillerie lourde est défectueux (grande dispersion,
défauts d’éclatement) : à 11 h 30, compte rendu est fait que la
préparation est insuffisante, l’attaque est retardée et remise à 12 h 30.
Les communications
téléphoniques sont coupées à partir de 12 heures et ne pourront être rétablies
avant le lendemain matin. A 12 h 30, la destruction des fortins n’est pas plus
avancée, mais il est impossible de rendre compte, par suite de la rupture des
liaisons.
Pour vérifier le résultat du
bombardement, le commandant Melle-Desjardins demande au commandant Nicolas, du
24ème bataillon, de faire faire une reconnaissance, pendant que
lui-même en fera exécuter une par le 6ème. Ces reconnaissances,
d’une compagnie chacune, sont accueillies par des feux violents et ne peuvent
déboucher. A 13 heures, l’attaque est remise à 15 heures et une nouvelle
préparation est ordonnée.
A 15 heures, le commandant du
24ème indique à nouveau que la préparation est incomplète ; le
lieutenant-colonel Lançon, qui commande le secteur, fait savoir à ce moment que
des éléments du 67ème bataillon (à droite du 6ème), ont
pris pied dans la tranchée allemande, dans la partie basse de la crête du Petit
Reichaker, à 644,6. Le commandant du 6ème décide alors de lier son
mouvement à celui du 67ème et de pénétrer dans les tranchées
allemandes en remontant vers le Petit Reichaker ; il fait sortir la 2ème
compagnie, à droite, en liaison avec le 67ème. Cette compagnie est
prolongée à gauche, par les 4ème, 1ère et 6ème
compagnies ; une fraction de cette dernière sortira en liaison avec le 24ème
bataillon, sur le sommet du Petit Reichaker.
A 15 h 20, le Petit Reichaker
et les tranchées de la croupe sud sont brillamment enlevés ; les deux
bataillons font chacun une soixantaine de prisonniers.
Le 6ème progresse
rapidement dans la partie voisine du Petit Reichaker, mais il est arrêté par
des blockhaus et des réseaux de fil de fer intacts, qui le retiennent dans la
partie basse.
A 15 h 45, les Allemands
déclanchent sur le 24ème bataillon et la gauche du 6ème,
une forte contre-attaque, menée par quatre compagnies. Le 34ème n’a,
à cet endroit, que deux compagnies en lignes, malgré de nombreux signaux, il ne
peut obtenir de barrage et se trouve dans l’obligation de céder une partie du
terrain conquis ; la gauche du 6ème (deux sections) est obligée
de suivre en partie ce mouvement. La contre-attaque allemande est arrêtée au
bout de cinq minutes, et le 6ème bataillon reste entièrement sur ses
positions ; elles englobent en demi-cercle une partie d’environ 200 mètres
de tranchées allemandes, la gauche touche le bord du plateau du Petit
Reichaker, et la droite est en liaison avec les 3ème et 5ème
compagnies, qui sont restées en deçà des fils de fer allemands.
De 15 h 50 à 20 heures, le
combat continue à coups de grenades ; ce n’est que dans la soirée que l’on
peut commencer l’organisation de la positions conquise, qui sera reliée à
droite et à gauche à nos tranchées de départ.
La 5ème compagnie
est portés en lignes entre les 4ème et 3ème. Le bataillon
a donc ses six compagnies en lignes au début de la nuit.
Le 46ème bataillon
vient alors prendre la place dans les tranchées de départ.
Pendant cette première partie
de l’affaire, le bataillon a déjà douze officiers hors de combat et un nombre
considérable de chasseurs.
La nuit se passe sans
incidents. Le 21 juillet, à 4 heures, la situation semblait acceptable, quand
les contre-attaques allemandes commencèrent. Il y en aura cinq, de 4 heures à
midi, avec deux objectifs : d’abord la partie de notre nouvelle ligne
formant saillant et l’axe de la route de Fhronzell au Sattel.
Sur le premier objectif toutes
les contre-attaques sont arrêtées ; sur le deuxième, les trois premières
contre-attaques sont repoussées ; une quatrième, beaucoup plus violente,
nous oblige à une rectification de quelques mètres et nous cause des pertes
sérieuses.
Cette nouvelle position sera
maintenue jusqu’à l’annonce d’une nouvelle action d’artillerie ; à ce
moment, il y a nécessité de faire quelques mètres en arrière pour permettre le
bombardement ; ce mouvement délicat se fait avec ordre et presque sans
pertes. La ligne occupée forme alors un angle obtus, dont un côté est
l’ancienne tranchée et l’autre est parallèle et à 80 mètres de la ligne
allemande.
Dans l’après-midi, nouveau
bombardement non suivi d’attaque.
A 16 h 50, la sixième contre-attaque
allemande débouche dans le fond du ravin de Stocka. Elle est immédiatement
arrêtée.
A 20 heures, les 1ère
et 3ème compagnies reçoivent l’ordre de pousser des reconnaissances
vers la ligne ennemie pour connaître sa force : deux escouades exécutent
cet essai avec hardiesse. La fusillade qui se déclanche et les nombreuses
fusées lancées de plusieurs points, indiquent que la ligne allemande du Petit
Reichaker est sérieusement tenue.
A 20 h 30, le 6ème
bataillon est relevé par le 46ème et se porte à Vida.
Dans ces deux journées, le
bataillon a perdu 12 officiers et 439 hommes.
Les chasseurs du bataillon ont
montré une belle tenue au feu et une rare ténacité dans le combat à la grenade,
qui dura plus de trois heures.
Le 20 juillet, au
moment où le bataillon est sorti des tranchées pour se porter à l’attaque, la 1ère
section de la 1ère compagnie, suivant l’exemple de son chef, le
sous-lieutenant Guillon qui, bien que blessé mortellement, trouve encore le
courage d’entraîner ses chasseurs jusqu’à la tranchée allemande, dans laquelle
il tombe en criant : « En avant, les chasseurs, on les a !... »,
arrive dans la position ennemie dont elle s’empare, puis, sous la conduite des
sergents Sallendre et Behoccaray, dépasse les deux lignes de tranchées qui lui
étaient assignées comme objectifs, et ne s’arrête que beaucoup plus loin, quand
la progression est devenue impossible. Son élan l’a séparé du gros de sa
compagnie, elle se trouve complètement entourée ; les chasseurs
s’accrochent au terrain, bien décidés à ne pas revenir en arrière et
s’organisent sur place, pour mieux résister aux contre-attaques qui, pendant
deux jours, se succèderont avec seulement des interruptions de bombardement. La
section est coupée de toute communication avec le bataillon, mais la résistance
acharnée des chasseurs a raison de toutes les contre-attaques boches ;
quand les munitions sont épuisées, ils utilisent les approvisionnements de
grenades allemandes et de cartouches, et se maintiennent sur la position
jusqu’à ce que le bataillon ait réussi à progresser jusqu’à eux et à les
délivrer.
Le sous-lieutenant Guillon a
été tué à la tête de ses chasseurs, et nombre d’entre eux ont payé de leur vie
cet héroïque exploit, qui vaut à la section la citation suivante à l’Ordre de
l’armée.
Est citée à l’Ordre de
l’armée :
La 1ère section de
la 1ère compagnie du 6ème bataillon de chasseurs :
« Sous
le commandement du sous-lieutenant Guillon (Alexis), dans un élan admirable,
est partie à l’assaut d’une tranchée ennemie, l’a enlevée en faisant de
nombreux prisonniers et continuant sa progression, est arrivée à une deuxième
tranchée, où elle s’est maintenue avec opiniâtreté, sous un feu violent de
bombes, de grenades et d’obus. »
Le capitaine Veillon, blessé grièvement
dès le début de l’attaque du 20 juillet, reste à sa place et ne consent à se
laisser évacuer que lorsque sa compagnie a atteint ses objectifs.
Au cours d’une contre-attaque
ennemie, les Allemands essaient de progresser par un boyau, pendant que
d’autres avancent par le terre-plein ; le caporal Hubert, qui les
aperçoit, se précipite à leur rencontre et, avec deux chasseurs, il barre le
passage pendant plusieurs heures, se battant à la grenade sans arrêt, il reçoit
sur le champ de bataille la Médaille militaire, avec la citation
suivante ;
« Déjà
cité deux fois pour sa belle conduite, dans de récents combats, s’est
particulièrement distingué les 20 et 21 juillet 1915, en maintenant quelques
hommes avec lui à la tête d’un boyau, pour arrêter une violente contre-attaque
allemande à coups de grenades et de pétards. »
Le 22 juillet, le 6ème
bataillon bivouaque au camp de Vida.
Le 31 juillet, il vient
au camp de Gaschney, où il reste pendant six jours. Le 3 août, le drapeau des
chasseurs est confié à la garde du 6ème bataillon pour trois jours.
Le chef de bataillon fait paraître à cette occasion l’Ordre suivant, pour
rappeler les titres de gloire que se sont attribués les chasseurs à pied.
ORDRE DU BATAILLON N° 122
« Chasseurs
du 6ème bataillon,
« A
partir d’aujourd’hui, la garde du glorieux drapeau des chasseurs à pied vous
est confié.
« Les
noms des batailles inscrites dans ses plis rappellent l’héroïsme de vos aînés.
La Croix de la Légion d’honneur et la Médaille militaire que, seul de tous les
drapeaux des armées, il porte suspendues à sa cravate, sont la gloire des cent
mille chasseurs qui, de la mer du Nord aux frontières de la Suisse, combattent
pour la France.
« Déjà,
au cours de cette campagne, vous avez montré que vous étiez dignes d’appartenir
à cette arme d’élite et, grâce à vous, de nouveaux noms de victoires s’ajoutent
à ceux d’Isly, Sidi Brahim, Sébastopol, Solferino, Extrême-Orient, Madagascar,
Maroc où s’illustrèrent vos aînés.
« Ils
témoigneront, ces nouveaux noms, aux générations futures que vous avez aimé
votre patrie par-dessus tout, et jusqu’au sacrifice suprême.
« Chasseurs
du 6ème bataillon, pendant qu’il sera parmi vous, contemplons avec
émotion cet emblème sacré, témoin de tant d’héroïsme, et jurons tous de le
conduire à la victoire et de poursuivre sans lassitude nos efforts jusqu’au
jour prochain de la défaite définitive du sauvage envahisseur.
« 3
août 1915.
« Le
chef de bataillon commandant,
« MELLE
DESJARDINS »
Le 5 août, le drapeau
des chasseurs est remis solennellement au 46ème bataillon.
Le 6 août, le bataillon
fait mouvement pour aller relever dans le secteur du Braunkopf le 23ème
B.C.A. Il a quatre compagnies en lignes, une en réserve à Metzeral et une au
Bois Carré.
Jusqu’au 16 août, l’ennemi ne
montre aucune activité.
Le 17 août, le
bataillon est relevé par le 24ème et le 20, il va réoccuper le
secteur du Reichaker jusqu’au 30 août. Il vient ensuite aux camps
Nicolas et Vida, pendant six jours, pour remonter de nouveau au Reichaker.
Pendant quelques jours, quatre
compagnies sont en premières lignes et deux en réserve. Le bataillon occupe le
secteur du Reichaker jusqu’au 6 novembre, effectuant des relèves
intérieures par compagnies, sans que pour cela les chasseurs puissent profiter
d’un peu de repos.
Le 25 septembre, les
deux compagnies de réserve au camp Nicolas sont passées en revue par le général
de Puygradin, qui attache officiellement la Croix de guerre au fanion du
bataillon, pour les trois citations (une à l’armée et deux à la division) que
le 6ème a obtenues.
Les compagnies en ligne
organisent le secteur et consolident les tranchées et boyaux, constamment
démolis par le bombardement ennemi. Les Allemands font un gros emploi de leur
artillerie lourde de 210 et de minen, en même temps qu’ils creusent sous nos
tranchées des galeries de mines pour les faire sauter.
Le 31 octobre, les
unités en lignes constatent que l’ennemi électrise ses fils de fer, par un
courant à haute tension, afin de se mettre à l’abri des coups de mains de nos patrouilleurs,
souvent très hardis.
Le 6 novembre, le 6ème
B.C.A est relevé du secteur du Reichaker, dans lequel il vient de passer deux
mois.
Depuis le 10 juillet,
le bataillon n’a eu que quelques jours de repos passés dans des bivouacs, mais
il n’est jamais descendu dans la vallée.
Du 7 au 17 novembre, le
bataillon cantonne à Abdallah Le 19, il vient à la Chapelle-sous-Bruyères et
s’embarque en deux échelons à destination de Toulon, où il arrive le 21.
Aussitôt débarqué, le
bataillon reçoit l’ordre de se porter au quai Millot, où il est embarqué à bord
du croiseur auxiliaire La Provence.
La 46ème batterie,
du 1er régiment de montagne, est adjointe au 6ème
bataillon pour former le 6ème groupe alpin, sous le commandement du chef
de bataillon Melle-Desjardins.
Le 6ème groupe
alpin passe la nuit du 21 novembre à bord de La Provence, en rade de
Toulon ; par décision ministérielle, il est mis à disposition de l’amiral
commandant les forces navales de la Méditerranée.
A 15 heures, La Provence
quitte Toulon, à destination de Bizerte, où elle entre en rade le 23, à 15
heures, et va mouiller devant Sidi Abdallah. Le 24 novembre, le groupe alpin
débarque et va cantonner à la caserne Farré et au camp de l’ouest.