La guerre n'est pour l'historien qu'un synchronisme de mouvements et de dates; pour les chefs, elle représente un formidable labeur et pour le profane un intéressant spectacle. Mais pour le soldat qui combat dans le rang, la guerre n'est qu'un long tête à tête avec la mort. Pierre Chaine, Mémoire d'un Rat, Ed. A l'Oeuvre. |
A UN ASPIRANT TUE -
Poème de Henry de Montherlant
J'ai lavé
ton front, tête vide, Tu priais
que passât ce calice. Extrait de
"Chant funèbre pour les morts de Verdun", poème liminaire au
livre de prose Mors et Vita, 1932. Henry de Montherlant (1869-1972), à la mort de sa mère, en 1915, s'engage dans l'armée active et se bat courageusement sur le front de l'Est et en Belgique. Grièvement blessé en 1918, il est nommé secrétaire général de l'ossuaire de Douaumont, fonction qu'il occupe de 1920 à 1925. |
LE JOUR DE LA VICTOIRE - Poème de Blaise Cendrars A Paris Le jour de
la Victoire quand les soldats reviendront ... Paris
octobre 1916 (Du monde entier au coeur du monde) Engagé volontaire en 1914 dans la légion étrangère, Blaise Cendrars (1887-1961) est grièvement blessé en 1915, subissant l'amputation du bras. |
CAFARD
- Paul
Lintier
Dehors il
vente. Morne réveillon! Il semble que ces grands anniversaires nous
rendent plus tristes que de coutume. On songe aux Noëls passés, à
l'incertitude d'en connaître d'autres ... Paul Lintier est l'auteur de "Ma pièce", ses propres souvenirs comme maréchal des logis au 44ème d'artillerie. Il fût tué le 15 mars 1916. |
NUITS DE GUERRE - Maurice Genevoix Ils vont, ces hommes, à grands pas souples balançant leurs bras gauche d'un geste long, qui rythme puissamment leur allure. Leur main droite se noue, près de l'épaule, à la bretelle de leur fusil; et le poids des cartouches, avec celui du sac, fait saillir en cordes les muscles de leur cou. Bien armés, le corps durci, les yeux redevenus calmes pour avoir reflété trop d'horreurs, ils vont leur marche, sûrs d'eux désormais, que la fin de l'étape soit la grange tiède et pleine de foin, ou la tranchée boueuse que cherchent les obus ou le combat crépitant qui fauche les hommes par rangées. Extrait de Nuits de Guerre, Flammarion, 1916 "Nuits de Guerre" a été réuni en 1950 à "Sous Verdun" (1916), "La Boue" (1921) et "Les Eparges" (1923) pour former "Ceux de 14", oeuvre majeure jugée comme un des meilleur témoignage du conflit. Maurice Genevoix, éléve de l'Ecole Normale Supérieure, est mobilisé en 1914 comme sous-lieutenant au 106ème régiment d'infanterie. Il prend part à la bataille de la Marne et à de nombreuses opérations jusqu'en février 1915 où il est gravement blessé lors des attaques de la butte des Eparges. Il est réformé mais reprendra du service à la Fraternité franco-américaine jusqu'à l'armistice. |
SOUVENIRS
DU 11 NOVEMBRE - Souvenirs
de Roland Dorgelès
Je l'ai
encore dans l'oreille, le chant du Onze novembre. Ah!
Il n'fallait pas, il n'fallait pas Cela fusait
des rues comme un rire triomphant, un grand rire de délivrance. La
France soulagée l'a lancée jusqu'au ciel, cette boutade d'un passant
reprise par un million de voix: "Il ne fallait pas qu'y
aillent!" ces meurtriers vaincus, et l'on promenait sur les
boulevards leurs canons devenus des joujoux. Cependant, tandis que la
foule exultait, je me rappelais les boulevards, quatre ans plus tôt,
quand couraient vers les gares ces cohortes de jeunes gens qui ne
reviendraient plus, et au lieu de chanter, noyé dans cette mer humaine,
j'élevais ma pensée vers la funèbre armée qui emplissait la nuit. Entre deux guerres, extrait de Bleu Horizon, Albin Michel, 1949 Roland Dorgelès (1886-1973) est, bien sur, l'auteur du roman le plus populaire autour de la guerre de 14-18 : "Les croix de bois" (Prix Fémina, 1919). Il fût caporal au 39ème R.I. |
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En avant! La Peur,
Presses universitaires de France, 1930 |
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