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UNE
TECHNOLOGIE NOUVELLE PENDANT LA GUERRE D'ALGÉRIE
LE
SYSTÈME RADARS-CANONS SUR LE BARRAGE ALGÉRO-TUNISIEN
(1957-1962)
Brigadier-chef
Philippe ALIX
Épisode de la désagrégation de
l'empire colonial français, la guerre d'Algérie marque une époque
douloureuse pour la France et pour l'Armée française en
particulier. Souvent occultés par la densité et la complexité
des événements politiques, de nombreux aspects des opérations
militaires en Algérie restent aujourd'hui encore relativement méconnus.
En effet, on peut remarquer que cette guerre n'est pas exempte de
paradoxes. Au moment même où elle se modemise pour satisfaire
aux exigences de la guerre froide, l'Armée française s'engage en
Algérie avec des moyens et des matériels anciens ; engagée dans
un conflit de type nouveau pour lequel elle n'est pas organisée,
elle l'aborde en armée classique, donc inadaptée. Pour la
majorité des Français, l'image de la guerre d'Algérie reste
celle des " paras " sautant d'un hélicoptère sur un
piton, des légionnaires quadrillant les " bleds ",
c'est une guerre de " lieutenants " qui a impliqué le
" Contingent ".
Néanmoins, cette armée a eu
l'occasion de démontrer ses capacités d'adaptation et
d'innovation grâce à l'emploi de doctrines et de matériels
nouveaux. La mise en oeuvre sur le barrage algéro-tunisien d'une
technologie nouvelle en apporte une preuve indéniable : les
radars de surveillance au sol et les radars d'acquisition des
trajectoires de mortier qui, utilisés en association avec les
feux de l'artillerie, vont constituer le système radarscanons. Il
semble donc qu'il y ait eu en Algérie une guerre menée par des
techniciens au service de matériels récents utilisés sur un théâtre
d'opérations et dans un contexte pour lesquels ils n'étaient pas
initialement conçus.
Après avoir défini les missions
dévolues au groupe radars-canons et son organisation sur le
terrain, et décrit les moyens qui lui permirent d'être opérationnel,
nous nous attacherons à présenter son emploi au travers de la
vision réduite des écrans-radars, pour finalement dresser le
bilan des résultats obtenus.
Afin de bien comprendre
l'originalité et l'importance de la mise en oeuvre du système
radars-canons pendant la guerre d'Algérie, il convient tout
d'abord de connaître le contexte dans lequel il a vu le jour, les
missions successives qu'il eut à remplir et dans quelles
conditions il fut engagé.
Il est apparu dès le début de
la guerre que le Maroc à l'ouest et la Tunisie à l'est allaient
constituer des refuges ou des bases arrières pour les " HLL
(1) ". La nécessité de remédier à cette situation conduit
à l'idée de construire un obstacle matériel continu sur les
frontières. Le barrage algérotunisien est construit à partir de
1957. Composé de barbelés, d'obstacles et d'une barrière électrifiée,
il surprend tout d'abord les rebelles qui éprouvent des pertes et
sont contraints de réduire le rythme et le volume des
franchissements. L'effet de surprise ne dure pas ; les rebelles
trouvent des parades, malgré la pose de champs de mines, qui
n'apporte qu'un éphémère soulagement à la défense. Néanmoins,
en franchissant le barrage, les HLL ne peuvent éviter de donner
souvent l'alarme, provoquée par la coupure de la barrière électrique
ou des différents systèmes. Cependant, la lenteur des fantassins
- due aux difficultés du terrain - ou le bruit des engins blindés
de l'ABC ne permettent pas toujours d'intercepter les petits
groupes qui franchissent le barrage. En arrière, les réserves
sur la zone frontalière ne sont pas assez importantes pour lancer
une poursuite efficace.
Confronté à ce problème, le
commandement, déterminé à contrer l'ALN, doit réagir. La décision
est alors prise de créer une ligne continue de postes fixes de
surveillance radar dans le sud du barrage, de Tébessa jusqu'aux chotts
sahariens (2). Il faut détecter les rebelles avant même qu'ils
n'atteignent le barrage, et être en mesure de les poursuivre
longtemps après qu'ils l'aient traversé. Implantés sur des
points de passage des groupes de l'ALN, des radars associés à
des canons peuvent permettre de détecter et de harceler les
groupes qui voudraient franchir la frontière. Dès le troisième
trimestre de 1957, les six premiers postes radars-canons sont opérationnels.
Au début de l'année 1958, leur nombre est porté à neuf et des
sections de radars mobiles leur sont adjointes en 1960. L'édification
de ces postes ne va pas sans problèmes : il faut d'abord tracer
des pistes et des routes dans une région mouvementée et
difficile d'accès, acheminer les matériaux nécessaires à leur
construction, permettre leur ravitaillement et assurer la
maintenance des radars. Il est également indispensable de mettre
en place des générateurs pour alimenter les postes en électricité.
Il faut enfin installer un réseau de transmissions sûr,
condition sine qua non de la bonne exécution des missions
confiées aux postes. La construction des postes a donc exigé du
Génie des travaux d'infrastructure importants. Jamais complètement
achevés, ils évoluèrent avec les missions successives que la
ligne radars-canons eut à remplir. L'expérience, les adaptations
tactiques nécessaires et les différentes réactions des rebelles
sur le barrage conduisirent en effet à modifier la destination
initiale du système, à en diversifier l'emploi. Sa complexité
ne fit que crditre avec le temps.
La mission prioritaire est
initialement de permettre le traitement par des feux de
l'artillerie, au plus loin vers la Tunisie, des éléments ennemis
détectés par les radars. Le tir "à vue" est autorisé
dans le no man's land où toute présence est prohibée,
hormis à titre exceptionnel pour le pacage des chameaux.
L'exploitation immédiate des échos recueillis, témoignages
d'une présence rebelle, est assurée par la mise en oeuvre de
sections d'artillerie àtrois pièces, dont la portée coïncide
approximativement avec celle des radars. Il s'agit, avant même
qu'il y ait contact avec les troupes chargées de la surveillance
du barrage, de disperser et de détruire les petits groupes qui
tentent de franchir la zone interdite entre l'Algérie et la
Tunisie. L'expérience met vite en évidence qu'il y a interdépendance
entre tous les éléments qui constituent le barrage et que
l'efficacité de ce dernier repose sur la cohérence et la
coordination parfaite de tous ses constituants.
La mission des postes
radars-canons revêt d'autres aspects. Au traitement des échos
radar par le tir s'ajoute une mission de renseignement au profit
des troupes de surveillance sur le terrain. Il s'avère en effet
difficile pour les postes d'estimer l'efficacité des tirs car les
rebelles ne laissent rien sur le terrain : ils emmènent les
cadavres, les blessés et emportent le matériel. Les troupes des
postes, lors de leurs reconnaissances sur le terrain, ne trouvent
que quelques traces (3). Afin d'exploiter ces renseignements, de vérifier
l'exactitude des échos radar et de mieux apprécier les résultats
obtenus par l'artillerie, les postes vont diriger les patrouilles
de surveillance vers les lieux supposés de l'accrochage des
groupes de HLL, permettant de mener la poursuite des éléments
hostiles dispersés par les tirs. Les réserves de troupes affectées
à la surveillance du barrage sont en conséquence étoffées
substantiellement.
La "herse mobile" est
une autre composante du barrage, agissant en liaison avec le système
radars-canons. Là encore, sur la base des renseignements donnés
par les radars, les blindés ont plus de chance
"d'accrocher" les fellaghas. En liaison avec les unités
d'infanterie, la " herse " est à même de monter des
embuscades dont les chances de succès sont plus grandes. Enfin,
les postes radars-canons sont en relation constante avec les
compagnies d'électromécaniciens qui assurent la maintenance du
barrage. Ces compagnies sont chargées de repérer et de réparer
les coupures de la barrière électrifiée dues aux tentatives de
franchissement. Elles peuvent mettre la ligne radars-canons en
alerte et profitent en retour des renseignements acquis par les
radars.
Il faut souligner que l'évolution
de l'action de l'ALN sur le barrage a renforcé la nécessité
d'une coopération accrue de toutes les composantes du barrage. A
l'automne 1959, le rôle de la " herse " est modifié
car de chasseur elle devient proie (4). Les coupures de la barrière
électrifiée permettent d'attirer les blindés sous le feu d'amies
antichars, les fellaghas espérant ainsi causer des pertes en
hommes et en matériel à l'armée française. La bataille s'est déplacée
sur le barrage lui-même. La " herse " est restructurée
et agit de plus en plus en liaison avec les postes radars-canons
dont les renseignements lui permettent de moins se déplacer, de
moins s'exposer et d'agir sur la foi d'éléments plus tangibles.
Les rebelles ayant compris le danger que représentent pour eux
les " grands miroirs sombres (5) ", les postes sont
harcelés de manière quasi systématique ; en revanche les
troupes qui leur sont affectées peuvent compter sur l'aide des
autres éléments du barrage.
Une nouvelle mission est par la
suite confiée à la combinaison radarscanons (6) : dès l'été
1960, l'ALN dispose de mortiers dont elle se sert depuis la
Tunisie pour tenter de détruire des infrastructures du barrage,
des postes frontière, des postes de surveillance radar ou des
baraquements. Contrebattre ces mortiers échoit au système
radars-canons, préalablement renforcé par des sections mobiles
de radars qui lui permettent d'accomplir cette nouvelle tâche et
de mieux assurer la surveillance du terrain.
L'organisation du système
radars-canons évolue au fil des missions et des enseignements tirés
par le commandement des premières expériences. Elle devient de
plus en plus complexe. Le barrage algéro-tunisien est placé sous
la haute autorité du général commandant la zone
Est-Constantinois (ZEC). Les troupes qui servent sur le barrage
sont subordonnées à la 2e DIM, et par la suite à la
7e DMR. En ce qui concerne la chaîne radars-canons, elle est placée
à l'origine sous le commandement du colonel commandant le
barrage. Ceci permet de donner une certaine cohérence à l'action
et àla doctrine d'emploi des postes radars-canons, ce qui n'a pas
été le cas sur le barrage algéro-marocain. Il est exact que des
problèmes sont apparus entre les commandants de secteur et les
unités des postes, leurs priorités tactiques n'étant pas
toujours les mêmes. Cela explique bien des incompréhensions, des
déceptions et des scepticismes affichés par les secteurs vis-à-vis
du système radars-canons (7). En effet, la première préoccupation
des postes reste le traitement des échos par le tir alors que les
commandants de secteur semblent plus préoccupés par les
possibilités d'appui et d'aide au renseignement que ces mêmes
postes représentent pour eux. Ces dissensions cessent par la
force des événements puisque l'évolution des actions de l'ALN
amène, dans la recherche d'une plus grande souplesse d'emploi et
d'une plus grande complémentarité, à subordonner les postes aux
commandants des secteurs de El Ma el Abiod, Bir el Ater et Négrine
(8). Les postes conservent leurs missions et caractéristiques
propres, mais il est désormais possible de travailler en
meilleure concertation lorsque les rebelles font pression sur la
herse ou sur le barrage.
Les postes sont servis par les
batteries du 1/59e RA, arrivé sur le barrage algéro-tunisien
dès 1957. La doctrine d'emploi qu'il a élaborée est appliquée
tout au long des hostilités. Devant l'ampleur de la tâche, on
renforce le 1/59e RA d'une batterie de l'Unité de Détection au
Sol de la Marine (UDSM) puis, en mai 1958, d'une autre du 421e
RAA. Ces deux unités sont rattachées administrativement et opérationnellement
au 1/59e RA, dont le poste de commandement et les services sont
basés à Bir el Ater.
On voit donc la complexité qui a
marqué l'organisation de la ligne radars-canons et l'ampleur des
diffcultés affrontées dans Il exécution des missions. Il est évident
que cette situation entrïcine l'obligation de recourir àd'importants
moyens.
Pour comprendre l'emploi qui en
est fait, il est indispensable de connaître les matériels
modernes dont l'An-née française a disposé et qui ont rendu
possible la conception et la réalisation du système
radars-canons sur le terrain (9).
Le radar est en effet un moyen
d'investigation récent qui, par exemple, possède une supériorité
sur la photographie aérienne dont les renseignements sont différés
car l'exploitation n'en est pas immédiate. Le radar permet de
disposer du renseignement en temps réel. Il présente l'avantage
de " voir "la nuit et de s'affranchir raisonnablement
des conditions atmosphériques. La localisation des objectifs est
rapide et on peut déterminer immédiatement leurs coordonnées.
L'artillerie peut exploiter ces informations en un temps extrêmement
court, deux à trois minutes environ.
La France peut mettre en oeuvre
en Algérie des radars de surveillance du champ de bataille. Ils
proviennent essentiellement des unités des Forces françaises en
Allemagne. Le radar AN/MPQIO américain et le COTAL français répondent
à des besoins engendrés par la guerre froide en cas de conflit
sur le théâtre européen. Ces deux radars ne sont pas conçus à
l'origine pour la détection au sol d'objectifs mobiles. En effet,
le COTAL est un radar d'artillerie antiaérienne et l'AN/MPQ10 un
radar d'acquisition des trajectoires des obus de mortiers Leur
carence principale est de ne pas éliminer les échos fixes. C'est
pourquoi, ils sont modifiés et des systèmes leur sont adjoints
qui vont en permettre l'utilisation satisfaisante.
Signalons ainsi le dispositif
sonore " DONALD " qui ajoute à l'écho enregistré sur
l'écran du radar un bruit caractéristique selon la nature de
l'objectif. Le principe d'investigation de ces radars est le
suivant : ils émettent un faisceau d'ondes sur une surface donnée
; quand un objectif mobile traverse ce faisceau, il produit sur l'écran
des échos, accompagnés par le signal sonore du
"DONALD". La forme de l'écho et la vitesse de son déplacement
renseignent l'opérateur du radar sur la nature et les coordonnées
précises de l'objectif.
Le COTAL et l'AN/MPQIO modifiés
se révèlent efficaces mais d'un emploi contraignant, lié à
leur masse et à leur encombrement (10). En 1960, les radars français
de surveillance du sol, SDS DRMT-IA et DRMT-2A, entrent en service
sur le barrage algéro-tunisien. Leur principe est fondé sur
l'utilisation de l'effet " Doppler-Fizeau " et sur l'élimination
des échos fixes. La surveillance s'effectue par exploration
automatique en distance et en gisement d'une zone donnée. Dès
que l'opérateur perçoit un écho sur l'écran, il cale le radar
sur l'objectif détecté et peut en définir la nature, la vitesse
et les coordonnées avec une grande précision. Les SDS DRMT-IA et
DRMT-2A peuvent être transportés sur camion et travailler à
l'intérieur d'un caisson (ou " shelter "). On peut les
démonter et les héliporter là où le besoin s'en fait sentir.
Cette mobilité nouvelle apporte une souplesse à la couverture
radar qui peut être adaptée en fonction des circonstances.
La mise en service de ces
nouveaux radars coïncide avec une phase particulière de la
mission du système radars-canons : la lutte contre les mortiers
de l'ALN qui harcèlent le barrage. L'arrivée des SDS DRMT-IA et
DRMT-2A permet de dégager plusieurs AN/MPQIO de la surveillance
du sol pour les rendre à leur emploi originel : l'acquisition des
trajectoires de mortier. Ces radars accomplissent leur mission de
concert avec les AN/MPQ4A, antimortiers de conception plus récente.
L'AN/MPQIO émet des ondes renvoyées en écho par l'objectif. Ces
échos sont visualisés sur un écran dont la lecture permet de déterminer
le gisement, le site et la distance du projectile à un moment
donné. Une fois l'objectif accroché, le radar est mis en
poursuite automatique et la trajectoire de l'obus reproduite sur
un enregistreur. On détermine graphiquement son origine par
extrapolation. Il est cependant nécessaire d'observer deux ou
trois coups avant de connaître l'emplacement du mortier, ce qui
augmente sensiblement les délais de déclenchement de la
contrebatterie. L'AN/MPQ4A émet deux faisceaux d'ondes superposés
qui balayent l'horizon sur un secteur pr cis. Lorsqu'un projectile
traverse ce secteur, il produit un écho dans chacun des faisceaux
: la droite qui joint ces deux échos peut être confondue avec la
trajectoire de l'obus. Un calculateur électronique
couplé au radar détermine tout de suite la position du mortier
ennemi. L'AN/MPQ4A suit les obus de sa propre artillerie et détermine
les points d'impact. Les nouvelles données foumies par le radar
permettent de régler les tirs suivants.
Les sections d'artillerie associées
aux radars tirent profit de leur action. Leur mission initiale étant
de traiter par le feu les objectifs détectés, il a fallu doter
les postes des pièces d'artillerie les plus adaptées à cette
combinaison d'un type nouveau. Le choix des canons se porte le
plus souvent sur du 105 TF 50, du 105 modèle 36, parfois du 155
Gun. Il faut souligner qu'il paraît logique d'associer des radars
et des canons dont les portées respectives sont approximativement
les mêmes.
Enfin, on ne peut oublier que la
mise en place du système radars-canons nécessite une formation
de spécialistes radars. Ces hommes doivent être capables de
servir efficacement leurs matériels en sachant interpréter les
échos sur l'écran, les bruits émis par le " DONALD ",
et savoir faire abstraction des échos occasionnés par les
conditions météorologiques. Les radaristes qui servent sur le
barrage algéro-tunisien sont formés au 25e RA de Thionville, au
403e RAA de Bordeaux ou au CIER (Centre d'instruction d'Élèves
Radaristes) de Hyères (11).
Pour en revenir aux postes, désignés
respectivement Sl, S2, S3.... ils s'échelonnent de Tébessa à Négrine.
On les installe tous les 15 km environ, ce qui correspond aux
contraintes techniques des radars et aux réalités topographiques
du terrain. Ils sont situés sur des lieux de passages habituels
des fellaghas ou sur des terrains peu propices au " guet
optique ". Tous les postes sont bâtis selon les memes
principes mais la diversité des paysages et des situations géographiques
donne à chacun d'eux un caractère particulier. S'ils diffèrent
peu des " chouf " classiques, leurs caractéristiques
propres apparaissent bien vite : les deux plates-formes radar aisément
reconnaissables grâce à leurs antennes paraboliques et les trois
alvéoles de pièces d'artillerie. On remarque enfin les générateurs
d'électricité et les bâtiments de transmissions. Le tout est
organisé autour du poste de commandement.
Les neuf postes sont servis par
les batteries du 1/59e RA (12), sauf S4 et S5, placés
sous la responsabilité des marins de l'Unité de Détection au
Sol de la Marine (13). Ils requièrent un nombre important de
personnels, une centaine chacun, du fait de la mission même et
des servitudes particulières qu'elle entraîne. En effet, la
mission est d'abord confiée aux radaristes et aux artilleurs,
mais ils sont soutenus par les personnels des services qui
assurent la maintenance des radars et l'entretien du poste. On
remarque le nombre élevé de conducteurs affectés aux postes. La
raison est simple : les servitudes logistiques étant très
lourdes les besoins en véhicules sont très importants. Il faut
assurer le ravitaillement en eau, en vivres, en munitions et pièces
de rechange. Enfin, on constate la présence des électromécaniciens
du Génie qui renseignent sur les incidents du barrage.
Il est utile de rappeler que la
veille "radar" des postes se déroule la nuit mais que
le jour, il faut assurer le guet optique. La raison majeure en est
que les risques d'infiltration sont moins grands pendant la journée,
ce qui permet " d'économiser " les matériels (14). On
peut en conclure que les postes radars-canons connaissent une
activité intense de jour comme de nuit. La moindre alerte fait naître
l'effervescence dans le poste, l'activité se concentre alors
autour des radars, des instruments optiques, des canons, du PC. Il
faut réagir vite et sûrement afin de donner le maximum
d'efficacité aux tirs et surprendre les groupes qui tentent de
s'infiltrer.
Ces postes sont complètement
isolés, ce qui, ajouté à la spécificité et à la monotonie de
la tâche, entraîne une vie communautaire assez repliée sur
elle-même. Régulièrement harcelés par les rebelles, les hommes
du poste vivent au rythme des échos des radars, des incidents sur
la barrière électrifiée et des alertes diverses suivies par les
tirs de l'artillerie.
Entrons maintenant dans l'action.
Voyons la méthode d'intervention des postes, la manière dont ils
cherchent le renseignement, comment ils l'exploitent pour enfin
traiter les objectifs par les feux de leur artillerie. On ne s'intéressera
ici qu'aux interventions liées à la mise en oeuvre de la
combinaison radars-canons.
La recherche du renseignement est
assurée par la " mise en veille " d'un radar du poste.
Ce radar balaye le secteur qui lui est alloué ; l'opérateur
scrute l'écran à la recherche d'un éventuel écho. Une
permanence est assurée au PC du poste par un officier et un
sous-officier de quart. Les opérateurs radar se relaient régulièrement
car l'observation soutenue de l'écran est vite pénible. Dès
qu'un écho est décelé, l'alerte retentit dans le poste. Les
artilleurs rejoignent leurs pièces et les préparent en vue d'un
tir éventuel. Le deuxième radar est mis en veille, la "
poursuite " radar peut commencer. Les échos sont suivis ;
les opérateurs déterminent les coordonnées de l'objectif ainsi
que sa position future sur laquelle un tir pourra être déclenché.
Préalablement, les pièces ont
été " parallaxées " par rapport au radar 15 .
Une fois les calculs effectués avec les tables de tir, les éléments
sont communiqués aux artilleurs. La liaison est assurée avec les
autres composantes du barrage afin de s'assurer que l'écho détecté
n'est pas le fait d'une troupe amie. L'autorisation de tir peut être
demandée au PC (poste de commandement) du 1/59e RA à Bir el
Ater, mais le tir à vue sur la zone interdite est la règle : le
traitement de l'objectif par l'artillerie du poste peut commencer.
On remarque au passage la nécessité de disposer de moyens de
transmissions adaptés et efficaces, condition première de la
bonne exploitation du renseignement.
Les trois pièces du poste tirent
une première salve sur l'objectif. L'arrivée des coups est
observée par le radar et pen-net le réglage. Deux nouvelles
salves sont déclenchées sur l'objectif. Les trois canons ne représentent
qu'une faible capacité de neutralisation, cet inconvénient est
compensé par une consommation élevée de munitions et un
panachage de projectiles explosifs et fusants. La précision
accrue des nouveaux radars SDS mis en service à partir de 1960 et
l'expérience grandissante des opérateurs permettent d'améliorer
les résultats tout en diminuant la consommation d'obus. Les tirs
s'étant déroulés de nuit, c'est pendant la journée que des
troupes du poste effectuent une reconnaissance pour évaluer les résultats
obtenus par l'artillerie.
L'autre volet de la mission de la
chaîne radars-canons, la lutte antimortier, a demandé plus d'expérimentations.
C'est la méthode mise au point par le 1/59e RA qui est retenue
(16). Il est bon de rappeler que les radars employés pour cette tâche
sont les AN/MPQ4A et les AN/MPQIO reconvertis dans leur
utilisation originale. On les remplace dans la surveillance au sol
par des COTAL supplémentaires et les SDS. Le coeur du problème
est de déterminer, pour préparer les contrebatteries, les
positions probables de mortiers de J'ALN adéquates pour frapper
des points sensibles du barrage (17). Il faut prévoir un déploiement
a priori des radars pour intervenir au mieux, tout en se réservant
la possibilité de les déplacer en fonction de la réalité des
menaces. Les emplacements des radars antimortiers sont choisis
selon les critères suivants : prise en compte de la portée des
mortiers ennemis (environ 7 km), définition des positions de
batteries les plus propices aux rebelles pour effectuer leurs
tirs, évaluation des objectifs probables des fellaghas du fait de
leur importance militaire ou de leur situation géographique. Ce
recensement effectué, il convient d'affecter les radars en
proportion de la sensibilité des différents sites.
Après ces mesures préliminaires,
le 1/59e RA a pu expérimenter ses méthodes d'intervention. La
lutte antimortier est basée sur un principe simple : intervenir
le plus vite possible. L'enjeu des nombreuses expérimentations
menées pour définir une méthode efficace est le gain de rapidité,
que ce soit au niveau de l'acquisition ou au niveau du traitement
de l'objectif par l'artillerie. Les premières expérimentations
de l'été 1960 ont conclu que huit minutes étaient nécessaires
entre l'acquisition de l'objectif ennemi et les premiers impacts
des obus de la contrebatterie. Ce laps de temps est vite ramené
à deux minutes environ, grâce aux résultats du 1/59e RA. Quel
est donc le procédé ?
Dès qu'un écho est repéré sur
l'écran, l'opérateur annonce le gisement et la distance à
l'officier de liaison au radar qui apporte les corrections àces
coordonnées. Celles-ci sont transmises au lieutenant de tir qui
donne les ordres correspondants à la pièce directrice. Un tir
fusant d'intimidation (18) est déclenché. Deux minutes se sont
écoulées. Une minute plus tard, l'officier de liaison transmet
les éléments définitifs gisement, distance et altitude). Le
lieutenant de tir effectue les corrections correspondantes et déclenche
un tir de neutralisation (par exemple moitié fusant, moitié
percutant). Le radar antimortier suit les projectiles de la
batterie. Il donne les coordonnées des impacts amis, ce qui
permet d'apporter éventuellement des corrections pour les tirs
ultérieurs ou d'envisager un tir de destruction. Il faut
souligner ici le rôle décisif joué par les transmissions entre
le radar et la batterie, assurées par une liaison prioritaire par
fil.
Connaissant maintenant les méthodes
employées par les postes radarscanons, il est possible de s'intéresser
de près à des cas concrets d'opérations, issus des JMO du 1/59e
RA, qui donnent un aperçu des résultats obtenus(19).
Détection du 25 juin 1958 au
poste S5.
A 22 h 1 0 au cours d'un balayage
entre le réseau électrifié et la montagne de Négrine, le
matelot opérateur d'un des radars découvre un écho
correspondant à un élément rebelle apparemment important à
environ 4 km au sud du réseau. Cet écho est suivi régulièrement
et les troupes du quartier de Négrine sont mises en alerte. A 22
h 40, l'écho est arrivé à 2 km du réseau : la section
d'artillerie du poste dotée de 105 Mle 36 est alertée et exécute
successivement trois tirs, soit 80 coups. L'écho se disperse et
se regroupe pendant que dans le lointain apparait un autre écho
qui se dirige vers la Tunisie en se rabattant au pied de la
montagne. L'écho initial, alors assez désordonné, se replie
vers le sud et fait l'objet de tirs destinés à le ralentir ; il
est suivi jusqu'à 0 h 30. Pendant ce temps, une manoeuvre de
bouclage des troupes de surveillance est montée : alors qu'une
compagnie du 44e RI est dirigée de Bir el Ater vers le passage de
la frontière à travers la montagne au sud de la palmeraie de
Bettita, le commandant du quartier de Négrine fait encercler la
montagne au sud et au nord de Négrine par une compagnie du 4e REI
et un escadron du 2e REC. L'élément Nord arrive à pied d'oeuvre
dans un terrain difficile, il est guidé par radar à partir de 0
h 50 et accroche les rebelles. Cette opération dure plusieurs
heures et se poursuit pendant une partie de la journée du 26 juin
pour aboutir au bilan suivant :
- 7 tués et 2 blessés par
les tirs de l'artillerie
|
|
- 41 tués et 64 prisonniers par les
troupes amies
- 79 fusils, 3 FM, 2 mitrailleuses, 2
PA.
Un prisonnier a raconté ce qui s'était
passé. Un bataillon à quatre compagnies lourdement chargé, après
avoir cheminé dans la montagne pendant un ou deux jours et réussi à
se camoufler au passage des avions de reconnaissance, sortit pour
franchir le barrage et gagner le djebel Abiod. Sous le premier tir, la
compagnie de tête subit de nombreux blessés dont son capitaine et fut
momentanément stoppée ; les deux compagnies suivantes cherchèrent
alors à la dépasser et furent également prises à partie par les tirs
; quant à la quatrième compagnie qui était à l'arrière, entendant
les impacts de l'artillerie, elle rebroussa chemin et repartit vers la
Tunisie, donnant lieu à l'écho lointain enregistré dans cette région.
La progression rebelle, repérée par radar dans ses différentes phases
et déjouée par J'action de l'artillerie, fut freinée également dans
sa retraite jusqu'à l'arrivée des troupes amies, facilitant à ces
dernières un accrochage et un bouclage réussis.
Enfin, le prisonnier ajouta que, quant
à lui, c'était sa huitième tentative de franchissement avec sa
compagnie pour retourner en Algérie et que, les sept fois précédentes,
pris inopinément sous les feux de l'artillerie, ils avaient dû faire
demi-tour.
Détection du 29 avril 1959 au poste
S9.
A 21 h 08, un écho qui semble
correspondre à une centaine d'hommes est découvert par le canonnier opérateur
du radar Nord du poste : il est suivi dans sa progression vers le réseau.
Dix minutes plus tard, l'écho se trouve à environ 1 200 ni du barrage
à proximité d'un thalweg qui donne aux fellaghas un accès bien défilé
aux vues du radar. Les 105 TF 50 du poste prennent alors à partie
l'objectif par un tir de 120 coups, sous l'effet desquels l'écho change
de direction puis amorce un repli. Suivi au radar, il subit un dernier
tir à son retour dans le massif boisé du Bou Chekba. Les troupes de
surveillance montent alors une opération de bouclage qui, en raison de
son retard, tombe dans le vide. Un HLL fait prisonnier déclare que les
feux de l'artillerie ont causé la mort de quatre des siens et en ont
blessé plusieurs. Sur les lieux des impacts, plusieurs matériels sont
récupérés.
La bande repérée tente à nouveau de
franchir le barrage plus au sud mais elle est détectée et repoussée
par une manoeuvre combinée de l'artillerie de S9 et des troupes du
secteur de El Ma el Abiod. Un nouveau prisonnier confirme alors que
l'effectif de la colonne rebelle était de 450 et que c'était la
centaine d'hommes de l'élément de tête qui avait essuyé les tirs
d'artillerie dans la nuit du 29 avril.
Détection du ler mai 1960 au
poste S5.
Un élément d'une trentaine de
rebelles se déplaçant d'Algérie vers la Tunisie parvient au barrage
sans avoir été repéré par les radars ou les patrouilles de
surveillance. Les HLL coupent la barrière électrifiée et donnent
l'alerte au poste électrique de S5 à 23 h 30. Aussitôt pris en chasse
par le radar orienté immédiatement sur la coupure, cet élément est
suivi puis est ralenti par des tirs d'artillerie, Une unité française
en embuscade àenviron 4 km plus au sud du réseau le surprend. Treize
rebelles sont capturés, les autres s'échappent avec difficulté. A
titre d'information, on peut noter que les cas concrets de lutte
antimortier présentent un intérêt moindre : en effet, la procédure
est invariablement la même, dès qu'un écho correspondant à un
projectile de mortier est détecté, le tir se déclenche immédiatement
avec une consommation de munitions qui avoisine souvent une centaine
d'obus. Les tirs ennemis étant effectués à partir de la Tunisie, les
résultats ne peuvent qu'être estimés, en fonction seulement de l'évolution
de l'activité mortier des rebelles, ou de photographies aériennes
prises ultérieurement.
Si les exemples concrets que l'on vient
d'évoquer ont démontré que les postes radars-canons ont su
s'acquitter de leur mission, l'expérience acquise au fur et à mesure
de l'évolution de la mission a mis en évidence quelques problèmes.
Le premier d'entre eux, qui a subsisté
jusqu'à la fin du conflit, est celui de la maintenance. Il est vrai que
le système radars-canons a eu à déplorer de nombreuses pannes radar
dues à leur utilisation intensive dans des conditions difficiles. Or le
manque de pièces, conjugué au manque de spécialistes dans la réparation
de ces matériels sensibles, est un facteur de fragilisation de la
surveillance radar du barrage. De nombreux incidents techniques sont à
signaler dans le domaine des postes électriques et des moyens de
transmissions. Il semble qu'il y ait eu un manque de moyens de soutien.
L'emploi des radars souffre des
conditions climatiques et topographiques rigoureuses. Le vent gêne
parfois considérablement les opérateurs et le terrain présente de
grandes difficultés que les rebelles savent exploiter pour se défiler
aux vues des radars. L'élimination des échos fixes a pu aussi poser
des problèmes, mais la valeur des équipes chargées de la surveillance
radar a largement pallié ces imperfections. Malgré tout, il faut noter
que les radaristes sont souvent des appelés. Les unités affectées
aux postes radars-canons sont soumises à un renouvellement constant des
équipes, entraînant besoin de fornlation constant pour que l'efficacité
du système ne pâtisse pas de cette instabilité des personnels (20).
L'activité " artillerie " des postes a connu aussi quelques
difficultés. La consommation très importante des munitions a imposé
de n'effectuer que des tirs de neutralisation sur des zones importantes
avec un nombre réduit de canons. Les lueurs du départ des coups et la
durée du trajet des obus ont parfois permis aux HLL de se protéger
utilement(21).
Malgré ces problèmes, il parocit
indiscutable que le système radars-canons a obtenu de réels succès
sur le barrage algéro-tunisien et que sa mise en oeuvre a démontré
son efficacité opérationnelle(22). Le bilan global fait clairement
apparocitre que les radars ont une bonne sensibilité et une bonne précision
qui ont pu être mises au service de l'artillerie grâce à des
transmissions efficaces dans l'ensemble. Les radars ont permis de détecter
et de soumettre aux feux de l'artillerie de nombreux convois rebelles.
Ils ont empêché le renforcement de la rébellion à l'intérieur de
l'Algérie en la privant de livraisons d'armes régulières et
importantes et' de renforts en hommes entraînés et formés en Tunisie.
Même si les reconnaissances sur le terrain après une intervention
nocturne de l'artillerie des postes n'ont apporté que peu de
renseignements, les traces laissées par les rebelles, les matériels
abandonnés, les témoignages de prisonniers sont éloquents : les tirs
ont causé des pertes ou des blessés dans les rangs de l'ALN. Ils ont
obligé de nombreuses colonnes de ravitaillement et de nombreux groupes
de combattants à rebrousser chemin. La mise en service des postes
radars-canons a eu pour effet une diminution notable des franchissements
du barrage par les combattants de l'ALN. Ce résultat a soulagé la tâche
des troupes chargées du " maintien de l'ordre " en Algérie même.
De plus, la chàine radarscanons a appuyé de ses feux et renseigné par
ses moyens de surveillance les unités de combat dans des opérations
d'envergure, dépassant par là le cadre strict de ses missions propres.
Par exemple, le système radars-canons a été un des artisans de l'anéantissement
d'un important convoi rebelle le 26 juin 1958 au djebel El Zézar (23).
Enfin, l'efficacité des postes a permis au général commandant la ZEC
(Zone Est-Constantinois) de dégager plus facilement les effectifs
affectés à la mise en oeuvre du plan Challe.
En ce qui concerne la lutte
contre les mortiers, on peut affirmer que l'objectif d'acquérir des
trajectoires de projectiles a été largement atteint. Le déclenchement
de la contrebatterie a presque toujours interrompu les tirs ennemis, la
neutralisation, voire la destruction de l'objectif ne faisant aucun
doute. Gênés par la menace qui pesait sur eux, les servants des
mortiers rebelles ne pouvaient que tirer de loin, et avec peu de précision,
un nombre limité d'obus. L'avantage acquis par l'ALN grâce à
l'augmentation de sa dotation en pièces lourdes (mortiers de 120) a été
réduit à néant par la réaction des postes radars-canons. Le harcèlement
du barrage par les HLL n'a donc que peu bénéficié de l'appui de feux
puissants. Tous ces éléments ont contribué au maintien du bon moral
des unités chargées de la surveillance du barrage, assurées
d'accomplir leur tâche sous la protection d'un outil de surveillance et
d'appui efficace.
Ainsi, malgré quelques inadaptations
techniques, le système radarscanons a constitué pour l'Armée française
un moyen d'action puissant, adapté aux conditions d'un conflit de type
nouveau, démontrant ainsi des facultés d'innovation par la mise en
oeuvre audacieuse de matériels modernes au profit de missions particulières.
On peut conclure que la mise en oeuvre
du système radars-canons a constitué un réel succès de l'Armée française,
limitant les actions de l'ALN et l'empêchant ainsi de se développer à
l'intérieur de l'Algérie. Rétrospectivement, on pense aux lourdes
conséquenses sur le déroulement des opérations militaires qu'aurait
pu avoir le ravitaillement régulier et massif des fellaghas. L'aspect défensif
du barrage et de la chaîne radars-canons dépasse le cadre "
attentiste " d'une nouvelle " ligne Maginot " et a
largement contribué aux succès des unités françaises engagées dans
les événements d'Algérie. On peut donc affin-ner qu'il faut
relativiser l'image " traditionnelle "de la guerre d'Algérie
: une guerre de " techniciens " a contribué aux succès
militaires d'une guerre de " baroudeurs ".
L'indépendance de l'Algérie n'a pas
signifié la mort du système radars canons. La doctrine d'emploi des
radars d'acquisition des objectifs sur le théâtre d'opérations européen
est largement tributaire des enseignements tirés de l'expérience
acquise en Algérie. Il faut considérer la mise en oeuvre de cette
combinaison d'un type nouveau comme une expérimentation grandeur
nature, annonciatrice de moyens modernes de recherche et d'exploitation
du renseignement dans les conflits à venir.
Les conflits postérieurs n'ont fait
que confirmer cette évolution en mettant en oeuvre des matériels radar
de plus en plus sophistiqués, dont l'artillerie moderne ne peut plus
faire l'économie.
BIBLIOGRAPHIE
Périodiques.
N° 17/1962, " Les moyens
modernes d'acquisition des objectifs ", général VFNNIN.
N° 19/1962, " Les radars de
surveillance du sol de l'armée de Terre ".
N° 23/1962, " Les radars
d'artillerie de campagne ".
Août 1960, " Aperçu sur le
barrage de l'Est-Constantinois ".
Les Cahiers de l'Artillerie :
|
4e semestre 1960, "
Barrage-frontière en Algérie", colonel DEVÉ.
3e semestre 1961, "
Au pays des radars ", sous-lieutenant LE FLEM.
Revue historique des Armées
:
|
Nos 1 et 2/1975, " Évolution
du radar de surveillance du sol ", général FAUGÈRF.
Notice technique du radar
AN/MPQ4A, édition 1968. Direction Technique des Armes et de
l'instruction.
Notice technique du radar
AN/MPQIO, édition 1963. Direction Technique des Armes et de
l'instruction.
Notice technique du radar SDS
DRMT-IA, édition 1963. Direction Technique des Armes et de
l'instruction.
SOURCES
Les sources utilisées pour la
rédaction de cet article sont issues des archives du Service
historique de l'armée de Terre concernant la guerre d'Algérie.
Archives de l'EMAT, 1945-1972.
6T 782, 15T 462, 16T 70,
16T 71.
|
Archives/ JMO du 1/59e RA.
Archives de la Xe Région
militaire.
2e bureau de
l'État-Major Interarmées IH 1605.
3e bureau de
l'État-Major Interarmées IH 1875, 1912, 1964, 2035 et
2045.
1er bureau
du Corps d'Armée de Constantine 1H 2806.
3e bureau du
Corps d'Armée de Constantine IH 2938, 2940, 2961.
pour le barrage Est :
IH 2968, 2969, 2970, 2971, 2976, 2979.
4e bureau du
Corps d'Armée de Constantine : IH 2987.
3e bureau
Zone de l'Est-Constantinois et 2e Division
d'infanterie Motorisée : IH 3754.
JMO de la 2e
Division d'infanterie Motorisée IH 4637.
JMO des secteurs
de Souk Aliras et Tébessa IH 4740.
|
REMERCIEMENTS
L'auteur tient à témoigner
sa reconnaissance au colonel Lesage qui lui a offert
de son temps pour lui donner un aperçu de la
mission d'un poste radars-canons sur le barrage algéro-tunisien.
Son témoignage a permis à l'auteur de mieux appréhender
la réalité de son sujet d'étude.
De même, l'auteur
remercie M. Michel Hardy, conseiller technique au
SHAT, pour son aide précieuse et sa grande
disponibilité. Les éléments fournis par M. Hardy
ont aidé l'auteur à mieux orienter ses recherches.
RÉSUMÉ
Pour surveiller les
vastes espaces du sud de la frontière algérotunisienne,
il a été décidé de créer une ligne continue de
postes fixes de surveillance radar, de Tébessa
jusqu'aux chotts sahariens. Ces radars associés à
des canons doivent permettre de détecter et de
harceler les groupes qui voudraient franchir la
frontière. L'auteur décrit le fonctionnement
technique de ce système, puis différents exemples
d'intervention Opérationnelle.
SUMMARY
In order to observe
the wide open spaces in the southem part of the
border separating Algeria from Tunisia, it was
decided that a continuons ligne of fixed radar
look-out posts should be set up, running from
Tebessa to the Saharian Chotts. These radars
combined with guns were designed to detect any
section wishing to cross the border and harass them.
The author gives us a description of the technical
working of this system and offers us varied exemples
of operational interventions.
(1) Hors-La-Loi.
(2) La barrière électrifiée
n'est alors construite que de Bône à Tébessa.
Elle est continuée au-delà de Tébessa en 1958
pour compléter efficacement la ligne radars-canons.
(3) Ce fait est
signalé de manière récurrente dans les rapports
du 1/59- RA, voir par exemple SHAT 15T 462.
(4) "Le
barrage de la frontière algéro-tunisienne -, SHAT
1H 3754.
(5) Nom donné aux
radars par les combattants de l'ALN.
(6) SHAT IH 1912,
dossiers 1 et 2.
(7) SHAT 15T 462.
(8) La ligne
radars-canons traverse ces trois secteurs et peut
donc leur foumir un appui grâce à l'artillerie des
postes et des renseignements grâce à leurs radars.
(9) A cet effet, on
peut consulter avec profit de nombreux numéros des Cahiers
de l'Artillerie et de l'Armée traitant
des moyens de surveillance du champ de bataille et
d'acquisition des trajectoires de projectiles de
mortier. Signalons particulièrement l'article du général
Vennin : " Les moyens modemes d'acquisition des
objectifs ", l'Armée n° 17/1962.
(10) Ces inconvénients
permettent aux rebelles de connaître les
emplacements des radars donc de trouver des passages
moins surveillés.
(11) Voir JMO du
1/59e RA, SHAT 7U 1124.
(12) Les capitaines
commandant les batteries du 1/59e RA ont
généralement la charge de deux postes.
(13) Aux neufs
postes déjà Existant se sont ajoutés des postes
itinérants (ou semi-nomades) et des postes ,
satellites " nommés respectivement S11, S12...
(14) Il faut noter
la fragilité des composants des radars. Assurer la
maintenance de tels matériels sur le terrain n'est
pas simple. De plus, il reste difficile de se
procurer rapidement des pi ces de rechanges. Voir
SHAT IH 2045 et JMO du 1/59e RA 7U 1128.
(15) C'est-à-dire
que les coordonnées fournies par le radar ont été
corrigées en fonction de son emplacement par
rapport aux canons.
(16) Voir SHAT 7U
1134, dossier 4 et IH 1912, dossier 3.
(17) Voir SHAT IH
1912, dossier 3.
(18) Ce tir est
destiné à empêcher les servants des mortiers de
l'ALN de régler leur tir correctement, en toute quiétude.
(19) Voir JMO du
1/59e RA, SHAT 7U 1124 à 7U 1134.
(20) Voir SHAT IH
1912.
(21) On retrouve
cette remarque dans de nombreux documents. Voir SHAT
IH 2045, IH 1912, 7U 1134.
(22) Dans l'état
actuel des recherches ou études menées sur
l'activité radar du barrage algéro-tunisien, on ne
peut avancer de bilan précis des détections et des
tirs effectués par les postes radars-canons Les
chiffres indiqués dans les archives du SHAT restent
très fragmentaires et incomplets, il n'existe pas
de rapport de synthèse qui permette de s'appuyer
sur des éléments précis.
(23) Voir "Le
barrage de la frontière algéro-tunisienne ",
SHAT IH 3754.
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