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B | S. m. (Gramm.) c'est la seconde lettre de l'alphabet dans la plûpart des langues, & la premiere des consonnes.
Dans l'alphabet de l'ancien Irlandois, le b est la premiere lettre, & l'a en est la dix-septieme.
Les Ethiopiens ont un plus grand nombre de lettres que nous, & n'observent pas le même ordre dans leur alphabet.
Aujourd'hui les maîtres des petites écoles, en apprenant à lire, font prononcer be, comme on le prononce dans la derniere syllabe de tom-be, il tombe : ils font dire aussi, avec un e muet, de, fe, me, pe ; ce qui donne bien plus de facilité pour assembler ces lettres avec celles qui les suivent. C'est une pratique que l'auteur de la Grammaire générale du P. R. avoit conseillée il y a cent ans, & dont il parle comme de la voie la plus naturelle pour montrer à lire facilement en toutes sortes de langues ; parce qu'on ne s'arrête point au nom particulier que l'on a donné à la lettre dans l'alphabet, mais on n'a égard qu'au son naturel de la lettre, lorsqu'elle entre en composition avec quelqu'autre.
Le b étant une consonne, il n'a de son qu'avec une voyelle ; ainsi quand le b termine un mot, tels que Achab, Joab, Moab, Oreb, Job, Jacob, après avoir formé le b par l'approche des deux levres l'une contre l'autre, on ouvre la bouche & on pousse autant d'air qu'il en faut pour faire entendre un e muet, & ce n'est qu'alors qu'on entend le b. Cet e muet est beaucoup plus foible que celui qu'on entend dans syllabe, Arabe, Eusebe, globe, robbe. V. CONSONNE.
Les Grecs modernes, au lieu de dire alpha, beta, disent alpha, vita : mais il paroît que la prononciation qui étoit autrefois la plus autorisée & la plus générale, étoit de prononcer beta.
Il est peut-être arrivé en Grece à l'égard de cette lettre, ce qui arrive parmi nous au b : la prononciation autorisée est de dire be ; cependant nous avons des provinces où l'on dit ve. Voici les principales raisons qui font voir qu'on doit prononcer beta.
Eusebe, au livre X. de la préparation évangélique, ch. vj. dit que l'alpha des Grecs vient de l'aleph des Hébreux, & que beta vient de beth : or il est évident qu'on ne pourroit pas dire que vita vient de beth, sur-tout étant certain que les Hébreux ont toûjours prononcé beth.
Eustathe dit que , est un son semblable au bêlement des moutons, & des agneaux, & cite ce vers d'un ancien :
Is fatuus perinde ac ovis be, be dicens incedit.
Saint Augustin, au liv. II. de Doct. christ. dit que ce mot & ce son beta est le nom d'une lettre parmi les Grecs, & que parmi les Latins beta est le nom d'une herbe ; & nous l'appellons encore aujourd'hui bete ou bette-rave.
Juvenal a aussi donné le même nom à cette lettre :
Hoc discunt omnes ante alpha & beta puellae.
Belus, pere de Ninus, roi des Assyriens, qui fut adoré comme un dieu par les Babyloniens, est appellé , l'on dit encore la statue de Beel.
Enfin le mot alphabetum dont l'usage s'est conservé jusqu'à nous, fait bien voir que beta est la véritable prononciation de la lettre dont nous parlons.
On divise les lettres en certaines classes, selon les parties des organes de la parole qui servent le plus à les exprimer ; ainsi le b est une des cinq lettres qu'on appelle labiales, parce que les levres sont principalement employées dans la prononciation de ces cinq lettres, qui sont b, p, m, f, v.
Le b est la foible du p : en serrant un peu plus les levres, on fait p de b, & fe de ve ; ainsi il n'y a pas lieu de s'étonner si l'on trouve ces lettres l'une pour l'autre. Quintilien dit que quoique l'on écrive obtinuit, les oreilles n'entendent qu'un p dans la prononciation, optinuit : c'est ainsi que de scribo on fait scripsi.
Dans les anciennes inscriptions on trouve apsens pour absens, pleps pour plebs, poplicus pour publicus, &c.
Cujas fait venir aubaine ou aubene d'advena, étranger, par le changement de v en b : d'autres disent aubains quasi alibi nati. On trouve berna au lieu de verna.
Le changement de ces deux lettres labiales v, b, a donné lieu à quelques jeux de mots, entr'autres à ce mot d'Aurélien, au sujet de Bonose qui passoit sa vie à boire : Natus est non ut vivat, sed ut bibat. Ce Bonose étoit un capitaine originaire d'Espagne ; il se fit proclamer empereur dans les Gaules sur la fin du iij. siecle. L'empereur Probus le fit pendre, & l'on disoit, c'est une bouteille de vin qui est pendue.
Outre le changement de b en p ou en v, on trouve aussi le b changé en f ou en , parce que ce sont des lettres labiales ; ainsi de est venu fremo ; & au lieu de sibilare, on a dit sifilare : d'où est venu notre mot siffler. C'est par ce changement réciproque que du grec les Latins ont fait ambo.
Plutarque remarque que les Lacédémoniens changeoient le en b ; qu'ainsi ils prononçoient Bilippe au lieu de Philippe.
On pourroit rapporter un grand nombre d'exemples pareils de ces permutations de lettres ; ce que nous venons d'en dire nous paroît suffisant pour faire voir que les réflexions que l'on fait sur l'étymologie, ont pour la plûpart un fondement plus solide qu'on ne le croit communément.
Parmi nous les villes où l'on bat monnoie, sont distinguées les unes des autres par une lettre qui est marquée au bas de l'écu de France. Le B fait connoître que la piece de monnoie a été frappée à Roüen.
On dit d'un ignorant, d'un homme sans lettres, qu'il ne sait ni a ni b. Nous pouvons rapporter ici à cette occasion, l'épitaphe que M. Menage fit d'un certain abbé :
Ci-dessous git monsieur l'abbé
Qui ne savoit ni a ni b ;
Dieu nous en doint bientôt un autre
Qui sache au moins sa patenôtre. (F)
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B | chez les Grecs & chez les Romains, étoit une lettre numérale qui signifioit le nombre deux, quand elle étoit figurée simplement ; & avec un accent dessous b, elle marquoit deux mille chez les Grecs.
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B | dans les inscriptions, signifie quelquefois binus. On y trouve bixit pour vixit, berna pour verna ; parce que les anciens, comme on l'a dit plus haut, employoient souvent le b pour l'v consonne.
Les Egyptiens dans leurs hiéroglyphes, exprimoient le b par la figure d'une brebis, à cause de la ressemblance qu'il y a entre le bêlement de cet animal & le son de la lettre b. (G)
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B | en écriture ; cette lettre considérée dans sa forme italienne, est composée de deux i l'un sur l'autre, & conjoints avec l'o ; dans sa forme coulée, c'est la tête de la seconde partie de l'x, l'i, & l'o : dans la ronde, c'est la quatrieme & huitieme partie de l'o, l'i, & le second demi-cercle de l'o.
La premiere partie des deux premiers b, se forme par le mouvement mixte des doigts, du plié & de l'allongé ; la seconde partie du même b, & le dernier b en entier, se forment par un mouvement mixte des doigts & du poignet.
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B MO | ou BEMOL, caractere de Musique qui a à-peu-près la figure d'un b, & fait abaisser d'un semi-ton mineur la note à laquelle il est joint.
Guy d'Arezzo ayant autrefois donné des noms à six des notes de l'octave, laissa la septieme sans autre nom que celui de la lettre b, qui lui est propre, comme le c à l'ut, le d au ré, &c. Or ce b se chantoit de deux manieres ; savoir, à un ton au-dessus du la selon l'ordre naturel de la gamme, ou seulement à un semi-ton du même la lorsqu'on vouloit conjoindre les deux tétracordes. Dans le premier cas, le si sonnant assez durement à cause des trois tons consécutifs, on jugea qu'il faisoit à l'oreille un effet semblable à celui que les corps durs & anguleux font à la main ; c'est pourquoi on l'appella b dur, ou b quarre, b quadro : dans le second cas au contraire, on trouva que le si étoit extrèmement doux à l'oreille ; c'est pourquoi on l'appella b mol, & par la même analogie on l'auroit encore pû appeller b rond.
Il y a deux manieres d'employer le b mol, l'une accidentelle, quand dans le cours du chant on le place à la gauche d'une note ; cette note est presque toûjours la note sensible dans les tons majeurs, & quelquefois la sixieme note dans les tons mineurs, quand il n'y a pas à la clé le nombre de bémols qui doit y être. Le b mol accidentel n'altere que la note qu'il touche, ou tout au plus, celles qui dans la même mesure se trouvent sur le même degré, sans aucun signe contraire.
L'autre maniere est d'employer le b mol à la clé, & alors il agit dans toute la suite de l'air, & sur toutes les notes qui sont placées parallelement à lui sur la même ligne ou dans le même espace, à moins qu'il ne soit contrarié accidentellement par quelque dièse ou b quarre, ou que la clé ne change.
La position des b mols à la clé n'est pas arbitraire : en voici la raison. Ils sont destinés à changer le lieu des semi-tons de l'échelle : or ces deux semi-tons doivent toûjours garder entr'eux un intervalle prescrit, c'est-à-dire il faut que leurs notes homologues soient entr'elles à la distance d'une quarte d'un côté, & d'une quinte de l'autre ; ainsi la note mi inférieure de son semi-ton, fait au grave la quinte du si : qui est son homologue dans l'autre semi-ton, & à l'aigu la quarte du même si & la note si fait au grave la quarte du mi, & l'aigu la quinte du même mi.
Si par exemple, on donnoit un b mol au mi, le semi-ton changeroit de lieu, & se trouveroit descendu d'un degré entre le ré & le mi b mol. Or dans cette position il est évident que les deux semi-tons ne garderoient plus entr'eux la distance prescrite ; car le ré qui seroit la note inférieure de l'un, feroit au grave la sixte du si, son homologue dans l'autre, & à l'aigu la tierce du même si ; & ce si feroit au grave la tierce du ré, & à l'aigu la sixte du même ré : ainsi les deux semi-tons seroient trop près d'un côté & trop éloignés de l'autre.
L'ordre des b mols ne doit donc pas commencer par mi, ni par aucune autre note de l'octave que par si, la seule qui n'a pas le même inconvénient ; car bien que le semi-ton y change de place, & cessant d'être entre le si & l'ut, descende entre le si b mol & le la, toutefois l'ordre prescrit n'est point détruit ; car le la dans ce nouvel arrangement se trouve d'un côté à la quarte, & de l'autre à la quinte de mi son homologue, & réciproquement.
La même raison qui fait placer le premier b mol sur le si, fait mettre le second sur le mi, & ainsi de suite, en montant de quarte, ou en descendant de quinte jusqu'au sol, auquel on s'arrête ; parce que le b mol de l'ut qu'on trouveroit ensuite, ne differe point du si dans la pratique. Cela fait donc une suite de cinq b mols dans cet ordre :
Toûjours par la même raison, on ne sauroit employer les derniers b mols à la clé, sans employer aussi ceux qui les précédent ; ainsi le b mol du mi ne se pose qu'avec celui du si, celui du la qu'avec les deux précédens, &c.
Nous donnerons au mot CLE une formule pour trouver tout d'un coup si un ton ou un mode donné doit porter des b mols à la clé & combien.
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B QUARR | ou BéQUARRE, signe de Musique qui s'écrit ainsi , & qui placé à la gauche d'une note, marque que cette note ayant précédemment été baissée par un b mol, ou haussée par un diese, doit être remise à son élévation naturelle ou diatonique.
Le b quarre fut inventé par Guy d'Arezzo. Cet auteur qui donna des noms aux six premieres notes de l'octave, n'en laissa point d'autre que la lettre b pour exprimer le si naturel ; car chaque note avoit dès-lors sa lettre correspondante : & comme le chant diatonique de ce si est assez dur quand il monte depuis le fa, il l'appella simplement b dur ou b quarre, par une allusion dont j'ai déjà parlé au mot B MOL.
Le b quarre servit dans la suite à détruire l'effet du b mol antérieur sur une note quelconque ; il suffisoit pour cela de placer le b quarre à la gauche de cette note : c'est que le b mol se plaçant plus ordinairement sur le si, le b quarre qui venoit ensuite ne produisoit en le détruisant que son effet naturel, qui étoit de représenter la note si sans altération. A la fin on s'en servit par extension & faute d'autre signe, à détruire aussi l'effet du diese ; & c'est ainsi qu'il s'employe encore aujourd'hui. Le b quarre efface également le diese ou le b mol qui l'ont précédé.
Il y a cependant une distinction à faire. Si le diese ou le b mol sont accidentels, ils sont détruits sans retour par le b quarre dans toutes les notes qui suivent sur le même degré, jusqu'à ce qu'il s'y présente un nouveau b mol ou un nouveau diese. Mais si le b mol ou le diese sont à la clé, le b quarre ne les efface que pour la note qu'il précede, ou tout au plus pour la mesure où il se trouve ; & à chaque degré altéré à la clé, il faut sans-cesse un nouveau b quarre. Tout cela est assez mal imaginé : mais tel est l'usage.
Quelques-uns donnoient un autre sens au b quarre, & lui accordant seulement le droit de rétablir les dieses ou b mols accidentels, lui ôtoient celui de rien changer à la disposition de la clé ; desorte qu'en ce sens le b quarre sur un fa diésé, ou sur un si bémolisé à la clé, ne serviroit que pour détruire un diese accidentel sur ce si, ou un b mol sur ce fa, & signifieroit toûjours un fa diese, ou un si b mol.
D'autres enfin se servoient bien du b quarre pour effacer le b mol, même celui de la clé, mais jamais pour effacer le diese. C'est le b mol seulement qu'ils employoient dans ce dernier cas.
Le premier usage prévaut à la vérité : ceux-ci sont plus rares & s'abolissent tous les jours : mais il est bon d'y faire attention en lissant d'anciennes musiques. (S)
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B | FA ; SI, ou B FA, B, MI, ou simplement B, est le nom d'un des sept sons de la gamme de l'Aretin, dans lequel les Italiens & les autres peuples de l'Europe répetent le b, parce qu'ils n'ont point d'autre nom pour exprimer la note que les François appellent si. Voyez GAMME.
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BA | (Géog. mod.) ville d'Afrique dans la Guinée, au royaume d'Arder.
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BAA | ou BEL, (Hist. anc.) nom qui signifie seigneur en langue Babylonienne, & que les Assyriens donnerent à Nemrod, lorsqu'après sa mort ils l'adorerent comme un dieu. Baal étoit le dieu de quelques peuples du pays de Chanaan. Les Grecs disent que c'étoit Mars, & d'autres que c'étoit ou Saturne ou le Soleil. L'historien Josephe appelle le dieu des Phéniciens Baal ou Bel, dont Virgile parle dans l'énéide, comme d'un roi de Tyr :
Implevitque mero pateram, quam Belus & omnes A Belo soliti.
Godwin, fondé sur la ressemblance des noms, croit que le Baal des Phéniciens est le même que Moloch : le premier signifie seigneur, & le second, prince ou roi. Cependant d'autres pensent que ces peuples adoroient Saturne sous le nom de Moloch, & Jupiter sous celui de Baal ; car ils appelloient ce dernier dieu, Baal semen, le seigneur du ciel. Quoi qu'il en soit de ces différentes opinions, le culte de Baal se répandit chez les Juifs, & fut porté à Carthage par les Tyriens ses fondateurs. On lui sacrifioit des victimes humaines & des enfans, en mémoire de ce que se trouvant engagé dans une guerre dangereuse, il para son fils des ornemens royaux, & l'immola sur un autel qu'il avoit dressé lui-même. Jérémie reproche aux Juifs qu'ils brûloient leurs enfans en holocauste devant l'autel de Baal ; & dans un autre endroit, que dans la vallée d'Ennon ils faisoient passer leurs enfans par le feu en l'honneur de Moloch. Les Rabbins pour diminuer l'horreur de cette idolatrie, s'en sont tenus à cette seconde cérémonie. Non comburebant illos, disent-ils de leurs ancêtres, sed tantum traducebant illos per ignem. Mais si dans le culte de Baal il n'en coûtoit pas toûjours la vie à quelqu'un, ses autels au moins étoient souvent teints du sang de ses propres prêtres, comme il paroît par le fameux sacrifice où Elie les défia. Incidebant se juxta ritum suum cultris & lanceolis, donec profunderentur sanguine. Lib. III. Reg. Voyez BELUS. (G)
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BAAL-BERITH | (Myth.) Ce mot est composé de baal, seigneur, & de berith, alliance, dieu de l'alliance. C'est sous ce nom que les Carthaginois, & avant eux les Phéniciens prenoient à témoins les dieux dans leurs alliances.
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BAAL-GA | ou BAGAD, ou BEGAD, (Hist. anc. & Myth.) idole des Syriens ; leur nom est composé de baal, seigneur, & de gad, hasard ou fortune, dieux de la fortune ou du hasard. Le dieu du hasard est, après le dieu du tonnerre, un de ceux qui a dû avoir le premier des autels parmi les hommes.
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BAAL-HASOR | (Géog. sainte) lieu voisin de la tribu d'Ephraïm, où Absalon vangea le viol de sa soeur Thamar.
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BAAL-HERMON | (Géog. sainte) montagne & ville au-delà du Jourdain, au nord de la tribu de Manassès.
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BAAL-PEOR | (Myth.) de baal, seigneur, & de Peor, nom d'une montagne ; dieu que les Arabes adoroient sur la montagne de Peor : on croit que c'est le Priape des Grecs. On l'appelle encore
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BAAL-PHARASIM | (Géog. sainte) ville des Philistins dans la tribu de Juda.
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BAAL-PHEGO | ou BEELPHEGOR, ou BELPHEGOR. Voyez BELPHEGOR.
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BAAL-THAMAR | (Géog. sainte) plaine dans la tribu de Benjamin, où toutes les tribus s'assemblerent pour vanger l'outrage fait à la femme d'un Lévite de la tribu d'Ephraïm.
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BAAL-TSEPHON | Voyez BEELZEPHON.
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BAALA | (Géog. sainte) ville de la Palestine dans la tribu de Juda, où l'arche fut en dépôt pendant vingt ans. Il y eut dans la tribu de Juda une autre ville de même nom, qui passa ensuite dans celle de Siméon.
BAALA, montagne de la Palestine, qui bornoit la tribu de Juda du côté du Nord.
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BAALAM | ville de la Palestine dans la demi-tribu de Manassès.
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BAALITES | S. m. pl. (Hist. anc.) secte d'impies, parmi le peuple d'Israël. Ils adoroient Baal, ou l'idole de Bel. Nous lisons dans le troisieme livre des Rois, qu'Achab & Jesabel sacrifioient tous les jours à cette idole, & qu'Elie ayant convaincu de superstition les prêtres de ce faux dieu par un miracle qu'il fit à la vûe d'Achab & du peuple, ces sacrificateurs au nombre de quatre cent cinquante furent tous mis à mort. Ancien Testament, III. liv. des Rois, ch. xviij. Voyez BAAL. (G)
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BAALMEON | (Géog. sainte) ville de la Palestine, bâtie par la tribu de Ruben.
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BAALTIS | S. f. (Myth.) déesse adorée des Phéniciens : on la fait soeur d'Astarté, & femme de Saturne, dont elle n'eut que des filles. On croit que ce fut la Diane des Grecs, révérée particulierement à Biblos sous le nom de Baaltis.
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BAANITES | S. m. pl. (Hist. ecclés.) hérétiques, sectateurs d'un certain Baanès, qui se disoit disciple d'Epaphrodite, & semoit les erreurs des Manichéens dans le IX. siecle, vers l'an 810. Pierre de Sicile, Hist. du Manich. renaissant. Baronius, A. C. 810. (G)
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BAAR | (Géog.) comté d'Allemagne en Souabe, dans la principauté de Furstenberg, vers la source du Danube & du Neckre, proche la forêt Noire & les frontieres de Brisgaw. On appelle quelquefois les montagnes d'Abennow de son nom, montagnes de Baar.
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BAARAS | (Géog. & Hist. nat.) nom d'un lieu & d'une plante qu'on trouve sur le mont Liban en Syrie, au-dessus du chemin qui conduit à Damas. Josephe dit qu'elle ne paroît qu'en Mai, après que la neige est fondue ; qu'elle luit pendant la nuit comme un petit flambeau ; que sa lumiere s'éteint au jour ; que ses feuilles enveloppées dans un mouchoir s'échappent & disparoissent ; que ce phénomene autorise l'opinion qu'elle est obsédée des démons, qu'elle a la vertu de changer les métaux en or, & que c'est par cette raison que les Arabes l'appellent l'herbe d'or ; qu'elle tue ceux qui la cueillent sans les précautions nécessaires ; que ces précautions sont malheureusement inconnues ; qu'elle se nourrit, selon quelques Naturalistes, de bitume ; que l'odeur bitumineuse que rend sa racine, quand on l'arrache, suffoque ; que c'est ce bitume enflammé qui produit sa lumiere pendant la nuit ; que ce qu'elle perd en éclairant n'étant que le superflu de sa nourriture, il n'est pas étonnant qu'elle ne se consume point ; que sa lumiere cesse quand ce superflu est consumé ; & qu'il faut la chercher dans des endroits plantés de cedres. Combien de rêveries ! & c'est un des historiens les plus sages & les plus respectés qui nous les débite.
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BAAT | S. m. (Com.) monnoie d'argent du royaume de Siam. Le baat sert aussi de poids ; sa forme est un quarré sur lequel sont empreints des caracteres assez ressemblans à ceux des Chinois ; mais ils sont mal frappés. Comme on altere souvent le baat par ses angles ou côtés, il ne faut le prendre ni comme poids, ni en payement, sans en avoir fait l'examen. Son poids est de trois gros deux deniers & vingt grains, poids de marc de France ; son titre neuf deniers douze grains : il vaut deux livres neuf sols sept deniers, argent de France. Cette monnoie a cours à la Chine ; on l'appelle tical. Voyez TICAL.
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BABA | (Géog.) ville de la Turquie en Europe, dans la basse Bulgarie sur la mer Noire, vers les bouches du Danube, entre Prostoviza & Catu.
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BABEL | (Hist. sacr. anc.) en hébreu confusion, nom d'une ville & d'une tour dont il est fait mention dans la Genese, chap. ij. situées dans la terre de Sennaar, depuis la Chaldée, proche l'Euphrate, que les descendans de Noé entreprirent de construire avant que de se disperser sur la surface de la terre, & qu'ils méditoient d'élever jusqu'aux cieux : mais Dieu réprima l'orgueil puérile de cette tentative que les hommes auroient bien abandonnée d'eux-mêmes. On en attribue le projet à Nemrod, petit-fils de Cham : il se proposoit d'éterniser ainsi sa mémoire, & de se préparer un asyle contre un nouveau déluge. On bâtissoit la tour de Babel l'an du monde 1802. Phaleg, le dernier des patriarches de la famille de Sem, avoit alors 14 ans ; & cette date s'accorde avec les observations célestes que Callisthene envoya de Babylone à Aristote. Ces observations étoient de 1903 ans ; & c'est précisément l'intervalle de tems qui s'étoit écoulé depuis la fondation de la tour de Babel jusqu'à l'entrée d'Alexandre dans Babylone. Le corps de la tour étoit de brique liée avec le bitume. A peine fut-elle conduite à une certaine hauteur, que les ouvriers cessant de s'entendre, furent obligés d'abandonner l'ouvrage. Quelques auteurs font remonter à cet évenement l'origine des différentes langues : d'autres ajoûtent que les payens qui en entendirent parler confusément par la suite, en imaginerent la guerre des géans contre les dieux. Casaubon croit que la diversité des langues fut l'effet & non la cause de la division des peuples ; que les ouvriers de la tour de Babel se trouvant, après avoir bâti long-tems, toûjours à la même distance des cieux, s'arrêterent comme se seroient enfin arrêtés des enfans qui croyant prendre le ciel avec la main, auroient marché vers l'horison ; qu'ils se disperserent, & que leur langue se corrompit. On trouve à un quart de lieue de l'Euphrate, vers l'orient, des ruines qu'on imagine, sur assez peu de fondement, être celles de cette fameuse tour.
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BABEL-MANDEL | (Géog. mod.) détroit ainsi appellé de l'arabe bab-al-mandab, porte de deuil, parce que les Arabes prenoient le deuil pour ceux qui le passoient. Il est à 12. 40. de lat. entre une île & une montagne de même nom, & joint la mer Rouge à l'Océan.
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BABEURRE | S. f. (Oeconom. rust.) espece de liqueur séreuse que laisse le lait quand il est battu, & que sa partie grasse est convertie en beurre. La babeurre prise en boisson rafraîchit & humecte.
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BABIA | S. f. (Myth.) déesse révérée en Syrie, & sur-tout à Damas. On y donnoit le nom de babia aux enfans ; ce qui a fait conjecturer que la babia étoit déesse de l'enfance.
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BABILLER | v. n. se dit en Venerie d'un limier qui donne de la voix : ce limier babille trop il faut lui ôter le babil, ou le rendre secret.
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BABOLZA | (Géog. anc. & mod.) ville de la basse Hongrie dans l'Esclavonie, entre Passega & Zigeth, vers la Drave. Baudrand croit que ç'a été l'ancien Mansuetinium, ou pons Mansuetinus.
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BABORD | Voyez BASBORD.
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BABOUIN | S. m. papio, (Hist. nat. Zoolog.) c'est ainsi que l'on appelle de gros singes qui ont des queues, & qui sont différens des cynocéphales : on distingue les babouins à longue queue, & les babouins à courte queue. Voyez SINGE. (I)
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BABUL | (Géog.) ville des Indes orientales, dans une île du fleuve Indus. Quelques-uns croyent que c'est Cambaya, & d'autres Patan.
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BABYCA | (Géog. & Hist. anc.) lieu entre lequel & le Cnacion les Lacédémoniens tenoient leurs assemblées. Aristote dit que le Cnacion est la riviere, & que le Babyca est le pont ; ce qui rend ce que l'on vient de dire des Lacédémoniens entierement inintelligible ; car entre un pont & une riviere quel espace y a-t-il où un peuple puisse s'assembler ?
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BABYLON | ou BABEL, (Géog. anc. & mod.) capitale ancienne de la Chaldée, dont il reste à peine quelques ruines. Voyez dans les historiens anciens & modernes les merveilles qu'on en raconte : ce détail est hors de notre objet. On croit que Bagdat est au lieu où étoit l'ancienne Babylone : mais ce fait n'est pas constant ; il y a sur les autres endroits où on la suppose les mêmes incertitudes ; les uns en font Felouge sur l'Euphrate, à cause de ses grandes ruines ; d'autres Il ou Elle, à cause d'un amas de décombres qu'on appelle encore la tour de Babel.
* BABYLONE, (Géog. anc. & mod.) ville de l'Egypte près du Nil ; le grand Caire s'est formé de ses ruines.
BAC à naviger, c'est en Marine, un petit bâtiment dont on se sert sur les canaux & les rivieres pour porter le brai & le goudron. (Z)
BAC est encore sur les rivieres un bateau, grand, large & plat, dont on se sert pour passer hommes, bêtes & voitures.
Il y a aux environs de Paris plusieurs bacs, dans les endroits éloignés des ponts.
BAC, en Jardinage ; on appelle ainsi un petit bassin, soit quarré, soit rond, placé d'espace en espace dans les quarrés d'un potager, avec un robinet pour arroser. A Versailles, à Sceaux, il y en a dans chaque petit jardin. (K)
BAC A JET TREMPE, en terme de Brasseur, est celui qui est posé sur les chaudieres & qui a trois trous, un de chaque côté, pour pouvoir jetter d'une chaudiere dans l'autre ; celui de devant est pour jetter les eaux chaudes des chaudieres dans la cuve matiere, par le moyen de la gouttiere à jet trempe. Voyez BRASSERIE & CUVE MATIERE.
BAC A LA DECHARGE, dans les Brasseries, est un bac qui est sur un des bords d'une des chaudieres, dans lequel on jette les métiers lorsqu'ils sont cuits pour les laisser refroidir. Voyez BRASSERIE & METIERS.
BAC A FORMES, en terme de Raffinerie de sucre, c'est une grande auge de bois très-sain, en planches de quatre pouces d'épaisseur, longues de 8 à 9, & larges de 4 à 5, dans laquelle on met les formes en trempe. Voyez TREMPE & FORMES.
BAC A CHAUX, en terme de Raffinerie de sucre, c'est un grand bassin en massif de brique & de ciment, portant 9 à 10 piés de long sur 4 à 5 de large, & 6 de profondeur, dans lequel on éteint la chaux dont on a besoin dans les clarifications. Voyez CLARIFIER.
BAC A SUCRE, en terme de Raffinerie de sucre, n'est autre chose que plusieurs espaces séparés par des cloisons de planches, dans lesquelles on jette les matieres triées & sorties des barrils.
BAC A TERRE, en terme de Raffineur de sucre, c'est une auge de bois de même que le bac à formes (Voyez BAC A FORMES), séparé en plusieurs chambrettes où l'on délaye la terre. Voyez TERRE. A chaque extrémité & au-dessus de ce bac, on voit une planche percée au milieu, & qui sert de traverses à deux bouts de chevrons qui sont attachés au plancher. C'est dans le trou de cette planche que s'emmanche un ballet dont on se sert pour passer la terre par la couleresse. Voyez COULERESSE.
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BACA | (Géog. sainte) ville de la tribu d'Aser, au pié du mont Liban.
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BAçA-SERAY | ou BACHA-SERAI, (Géog.) ville de la presqu'île de Crimée, dans la petite Tartarie. Long. 52. 30. lat. 45. 30.
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BAçAIM | (Géog.) ville d'Asie, avec port, au royaume de Visapour, sur la côte de Malabar. Long. 90. 40. lat. 19.
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BACALA | (Géog. ville de la presqu'île de Jucatan, dans l'Amérique septentrionale, près du golfe d'Honduras, entre Valladolid & Salamanque.
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BACALAOS | (Géog.) terre de l'Amérique méridionale, dont on ne nous dit rien de plus.
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BACAR | (Géog. anc. & mod.) nom d'une vallée située dans la partie septentrionale du mont Liban, que les Latins appelloient Iturea Thraconitis.
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BACAY | (Géog.) ville de l'Inde, delà le Gange, capitale du pays de même nom, sur la riviere de Pegu.
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BACCALAUREAT | S. m. le premier des degrés qu'on acquiert dans les facultés de Théologie, de Droit, & de Médecine. Voyez BACHELIER.
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BACCARACH | (Géog.) ville d'Allemagne, dans le bas Palatinat, sur le Rhin. Long. 25. 15. lat. 49. 57.
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BACCARAT | (Géog.) ville de France, en Lorraine, sur la Meurte, entre Nanci & Estival.
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BACCHANALES | adj. pris subst. (Hist. anc.) fêtes religieuses en l'honneur de Bacchus, qu'on célébroit avec beaucoup de solennité chez les Athéniens, où l'on en distinguoit de diverses sortes ; d'anciennes, de nouvelles, de grandes, de petites, de printanieres, d'automnales, de nocturnes, &c. Avant les Olympiades, les Athéniens marquoient le nombre des années par celui des bacchanales, autrement nommées orgies, du mot Grec , fureur, à cause de l'enthousiasme ou de l'ivresse qui en accompagnoit la célébration : elles tiroient leur origine d'Egypte, & furent introduites en Grece par Melampe.
A Athenes l'Archonte régloit la forme & l'ordonnance des bacchanales, qui dans les premiers tems se passoient fort simplement : mais peu à peu on les accompagna de cérémonies ou ridicules ou infames. Les prêtresses ou bacchantes couroient de nuit, à demi-nues, couvertes seulement de peaux de tigres ou de pantheres passées en écharpe, avec une ceinture de pampre ou de lierre ; les unes échevelées & tenant en main des flambeaux allumés, les autres portant des thyrses ou bâtons entourés de lierre & de feuilles de vigne, criant & poussant des hurlemens affreux. Elles prononçoient sur-tout ces mots, , ou , ou . A leurs cris se mêloit le son des cymbales, des tambours, & des clairons. Les hommes en habits de satyres suivoient les bacchantes, les uns à pié, d'autres montés sur des ânes, traînant après eux des boucs ornés de guirlandes pour les immoler. On pouvoit appeller ces fêtes du Paganisme le triomphe du libertinage & de la dissolution ; mais sur-tout les bacchanales nocturnes où il se passoit des choses si infames, que l'an 568 de Rome, le sénat informé qu'elles s'étoient introduites dans cette ville, défendit sous les peines les plus grieves de les célébrer. C'est avec raison que les peres de l'église ont reproché aux payens ces desordres & ces abominations. (G)
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BACCHANTES | prêtresses de Bacchus, nom que l'on donna d'abord à des femmes guerrieres qui suivirent Bacchus à la conquête des Indes, portant des thyrses ou bâtons entortillés de pampres de lierre & de raisins, & faisant des acclamations pour publier les victoires de ce conquérant. Après l'apothéose de ce prince, elles célébrerent en son honneur les bacchanales. De-là les mysteres de Bacchus furent principalement confiés aux femmes ; & dans les anciennes bacchanales de l'Attique, ces prêtresses étoient au nombre de quatorze. Il est pourtant fait mention dans l'antiquité d'un grand prêtre de Bacchus, si respecté de tout le peuple, qu'on lui donnoit la premiere place dans les spectacles. Platon bannit de sa république la danse des bacchantes, & leur cortege composé de nymphes, d'égipans, de silenes, & de satyres, qui tous ensemble imitoient les ivrognes, & presque toûjours d'après nature, sous prétexte d'accomplir certaines expiations ou purifications religieuses. Ce philosophe pense que ce genre de danse n'étant convenable ni à la guerre, ni à la paix ; & ne pouvant servir qu'à la corruption des moeurs, il doit être exclus d'un état bien policé. Tacite racontant les débauches de Messaline & de ses femmes, en fait ce portrait tout semblable aux extravagances des bacchantes. Feminae pellibus accinctae assultabant, ut sacrificantes vel insanientes bacchae. Ipsa crine fluxo, thyrsum quatiens, juxtaque Silius hedera cinctus, gerere cothurnos, jacere caput, strepente circum procaci choro. " Les femmes de Messaline revêtues de peaux bondissoient & folâtroient comme les bacchantes dans leurs sacrifices ; elle-même les Cheveux épars agitoit un thyrse ; Silius (son amant) étoit à ses côtés, couronné de lierre, chaussé d'un cothurne, jettant la tête deçà & delà, tandis que cette troupe lascive dansoit autour de lui ". (G)
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BACCHE | S. m. dans la Poësie Greque & Latine, espece de pié composé de trois syllabes ; la premiere breve, & les deux autres longues, comme dans ces mots, gsts, vr.
Le bacche a pris son nom de ce qu'il entroit souvent dans les hymnes composées à l'honneur de Bacchus. Les Romains le nommoient encore oenotrius, tripodius, saltans, & les Grecs . Diom. 111. pag. 475. Le bacche peut terminer un vers hexametre. Voyez PIE, &c. (G)
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BACCHIONITES | S. m. plur. (Hist. anc.) c'étoient, à ce qu'on dit, des philosophes qui avoient un mépris si universel pour les choses de ce bas monde, qu'ils ne se reservoient qu'un vaisseau pour boire ; encore ajoûte-t-on qu'un d'entr'eux ayant apperçu dans les champs un berger qui puisoit dans un ruisseau de l'eau avec le creux de sa main, il jetta loin de lui sa tasse, comme un meuble incommode & superflu. C'est ce qu'on raconte aussi de Diogene. S'il y a eu jamais des hommes aussi desintéressés, il faut avoüer que leur métaphysique & leur morale mériteroient bien d'être un peu plus connues. Après avoir banni d'entr'eux les distinctions funestes du tien & du mien, il leur restoit peu de choses à faire pour n'avoir plus aucun sujet de querelles, & se rendre aussi heureux qu'il est permis à l'homme de l'être.
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BACCHUS | (Myth.) dieu du Paganisme. On distingue particulierement deux Bacchus : celui d'Egypte, fils d'Ammon, est le même qu'Osiris ; celui de Thebes, fils de Jupiter & de Semelé, auquel on a fait honneur de toutes les actions des autres. L'Egyptien fut nourri à Nisa, ville de l'Arabie heureuse, & ce fut lui qui fit la conquête des Indes. Orphée apporta son culte dans la Grece, & attribua par adulation les merveilles qu'il en racontoit à un Prince de la famille de Cadmus. Voyez OSIRIS.
Le Thébain acheva dans la cuisse de son pere le reste du tems de la grossesse de sa mere qui mourut sur son septieme mois. Euripide dans ses Bacchantes, dit que Jupiter déposa cet enfant dans un nuage pour le dérober à la jalousie de sa femme ; & Eustathe, qu'il fut nourri sur le mont Meros, qui signifie cuisse, équivoque qui aura vraisemblablement donné lieu à la premiere fable. Bacchus à la conquête des Indes à la tête d'une troupe de femmes & d'hommes armés de thyrses & de tambours. Les peuples effrayés de la multitude & du bruit, le reçurent comme un dieu ; & pourquoi se seroient-ils défendus contre lui ? il n'alloit point les charger de chaînes, mais leur apprendre la culture de la vigne. On dit qu'il fit des prodiges dans l'affaire des Géans. On le représente sous la figure d'un jeune homme, sans barbe, joufflu, couronné de lierre ou de pampre, le thyrse dans une main, & des grappes de raisin ou une coupe dans l'autre. On lui immoloit le bouc & la pie ; le bouc qui mange les bourgeons, la pie que le vin fait parler. La panthere lui étoit consacrée, parce qu'il se couvroit de sa peau. Voyez SEMELE, BIMATER, DIONYSIUS, LIBER, BROMIUS, &c.
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BACH | (Géog.) ville de la basse Hongrie, au comté de Toln, sur le Danube.
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BACHA | PASCHA, ou PACHA, subst. m. (Hist. mod.) officier en Turquie. C'est le gouverneur d'une province, d'une ville, ou d'un autre département ; nous disons le bacha de Babylone, le bacha de Natolie, le bacha de Bender, &c.
Dans les bachas sont compris les beglerbegs, & quelquefois les sangiacbegs, quoiqu'ils en soient quelquefois distingués, & que le nom de bacha se donne proprement à ceux du second ordre ; c'est-à-dire à ceux devant qui l'on porte deux ou trois queues de cheval, qui sont les enseignes des Turcs ; d'où vient le titre de bacha à trois queues. Ceux-ci sont appellés beglerbegs, & les sangiacbegs ne font porter devant eux qu'une queue de cheval attachée au bout d'une lance. Voyez BEGLERBEG & SANGIAC.
Le titre de bacha se donne aussi par politesse aux courtisans qui environnent le grand-seigneur à Constantinople, aux officiers qui servent à l'armée, & pour ainsi-dire, à tous ceux qui font quelque figure à la cour ou dans l'état.
Le grand seigneur confie aux bachas la conduite des armées ; & pour lors on leur donne quelquefois le titre de seraskier ou de bach-bog, c'est-à-dire général, parce qu'ils ont sous leurs ordres d'autres bachas. Comme on ne parvient communément au titre de bacha que par des intrigues, par la faveur du grand visir ou des sultanes, qu'on achete par des présens considérables, il n'est point d'exactions que ces officiers ne commettent dans leurs gouvernemens, soit pour rembourser aux Juifs les sommes qu'ils en ont empruntées, soit pour amasser des trésors dont souvent ils ne joüissent pas long-tems, & qu'ils ne transmettent point à leur famille. Sur un léger mécontentement, un soupçon, ou pour s'approprier leurs biens, le grand-seigneur leur envoye demander leur tête, & leur unique réponse est d'accepter la mort. Leur titre n'étant pas plus héréditaire que leurs richesses, les enfans d'un bacha traînent quelquefois leur vie dans l'indigence & dans l'obscurité. On croit que ce nom de pascha vient du Persan pait schats, qui signifie pié de roi, comme pour marquer que le grand-seigneur a le pié dans les provinces où ses bachas le représentent. Cependant ce titre n'est en usage qu'en Turquie ; car en Perse on nomme émirs ou kams les grands-seigneurs & les gouverneurs de province. (G)
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BACHARA | (Géog.) ville de la grande Tartarie en Asie, dans l'Usbech, sur une riviere qui va se jetter dans la mer Caspienne.
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BACH | ou BACHOT, s. m. ce sont de petits bateaux dont on se sert sur les rivieres ; on nomme ainsi ceux dont on se sert à Lyon pour passer la Saone. (Z)
BACHE, (Jardin. & Hydraul.) c'est un coffre ou une cuvette de bois qui reçoit l'eau d'une pompe aspirante à une certaine hauteur, où elle est reprise par d'autres corps de pompe foulante qui l'élevent davantage. (K)
* BACHE, s. f. (Comm. & Roul.) grande couverture de grosse toile que les rouliers & voituriers étendent sur leurs voitures, pour garantir de la pluie & des autres intempéries de l'air les marchandises dont elles sont chargées. Cette couverture est bandée par des cordes qui partent de son milieu & de ses angles, & qui se rendent à différentes parties latérales de la voiture. Il y a entr'elle & les marchandises un lit de paille fort épais.
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BACHELIER | S. m. (Hist. mod.) dans les écrivains du moyen âge, étoit un titre qui se donnoit, ou à ceux d'entre les chevaliers qui n'avoient pas assez de bien ou assez de vassaux pour faire porter devant eux leurs bannieres à une bataille, ou à ceux même de l'ordre des Bannerets, qui, n'ayant pas encore l'âge qu'il falloit pour déployer leur propre banniere, étoient obligés de marcher à la guerre sous la banniere d'un autre ; voyez BANNERET. Cambdem & d'autres définissent le bachelier, une personne d'un rang moyen entre un chevalier & un écuyer, moins âgé & plus récent que celui-là, mais supérieur à celui-ci, voyez CHEVALIER, &c D'autres veulent que le nom de bachelier ait été commun à tous les degrés compris entre le simple gentilhomme & le baron.
Quand l'amiral n'étoit ni comte ni baron, il étoit nommé bachelier ; & il est à noter que quand " l'amiral va par le pays pour assembler vaisseaux de guerre, ou pour autre affaire du royaume, s'il est bachelier, il recevra par jour quatre chelins sterlins ; s'il est comte ou baron, ses gages seront à proportion de son état & rang ".
Le titre de bachelier se donnoit plus particulierement à tout jeune homme de condition qui faisoit sa premiere campagne, & qui recevoit en conséquence la ceinture militaire.
BACHELIER, signifioit encore celui qui dans le premier tournois où il eût jamais combattu, avoit vaincu quelqu'un.
On disoit anciennement bacheliers au lieu de bas chevaliers, parce que les bacheliers formoient le plus bas ordre de chevaliers ; ils étoient au-dessus des bannerets, &c. Voyez CHEVALIER.
On appelle maintenant ceux-ci equites aurati, à cause des éperons qu'on leur met lors de leur réception.
D'abord cette dignité ne se donnoit qu'aux gens d'épée : mais dans la suite on la conféra aussi aux gens de robbe longue. La cérémonie en est extrèmement simple. L'aspirant s'étant mis à genoux, le roi le touche doucement d'une épée nue, & dit, sois chevalier au nom de Dieu ; & après, avance, chevalier. Voyez CHEVALIER & NOBLESSE.
BACHELIER, est encore un terme dont on se sert dans les universités pour désigner une personne qui a atteint le baccalauréat, ou le premier degré dans les Arts libéraux & dans les Sciences. Voyez DEGRE.
C'est dans le treizieme siecle que le degré de bachelier a commencé à être introduit par le pape Grégoire IX. mais il est encore inconnu en Italie. A Oxford, pour être reçu bachelier ès Arts, il faut y avoir étudié quatre ans ; trois ans de plus pour devenir maître ès Arts, & sept ans encore pour être bachelier en Théologie.
A Cambridge, il faut avoir étudié près de quatre ans pour être fait bachelier ès Arts, & plus de trois ans encore avant que d'être reçû maître, & encore sept ans de plus pour devenir bachelier en Théologie. Il ne faut avoir étudié que six ans en Droit pour être reçû bachelier de cette faculté.
A Paris, pour passer bachelier en Théologie, il faut avoir étudié deux ans en Philosophie, trois ans en Théologie, & avoir soûtenu deux examens, l'un sur la Philosophie, & l'autre sur la premiere partie de la somme de S. Thomas, qui comprend les traités de Dieu, & des divins attributs de la Trinité & des anges. Ces deux examens doivent se faire à un mois l'un de l'autre, devant quatre docteurs de la faculté de Théologie, tirés au sort, avec droit de suffrage. Un seul mauvais billet ne laisse au candidat que la voie de l'examen public qu'il peut demander à la faculté. S'il se trouve deux suffrages défavorables, il est refusé sans retour. Lorsque les examinateurs sont unanimement contens de sa capacité, il choisit un président à qui il fait signer ses theses ; & quand le syndic les a visées & lui a donné jour, il doit les soûtenir dans l'année à compter du jour de son second examen. Dans quelqu'une des écoles de la faculté, c'est-à-dire, des colléges ou des communautés qui sont de son corps, cette these roule sur les mêmes traités théologiques, qui ont servi de matiere à ce second examen, & on la nomme tentative. Le président, quatre bacheliers en licence, & deux bacheliers amis, y disputent contre le répondant ; dix docteurs qu'on nomme censeurs y assistent avec droit de suffrage ; les bacheliers de licence l'ont aussi, mais pour la forme, leurs voix n'étant comptées pour rien. Chaque censeur a deux billets, l'un qui porte sufficiens & l'autre incapax. Un seul suffrage contraire suffit pour être refusé. Si le candidat répond d'une maniere satisfaisante, il va à l'assemblée du premier du mois, qu'on nomme prima mensis, se présenter à la faculté devant laquelle il prête serment. Ensuite le bedeau lui délivre ses lettres de baccalauréat, & il peut se préparer à la licence.
On distingue dans la faculté de Théologie de Paris deux sortes de bacheliers : savoir bacheliers du premier ordre, baccalaurei primi ordinis, ce sont ceux qui font leur cours de licence ; & ceux du second ordre, baccalaurei secundi ordinis ; c'est-à-dire les simples bacheliers qui aspirent à faire leur licence, ou qui demeurent simplement bacheliers. L'habit des uns & des autres est la soutane, le manteau long, & la fourrure d'hermine doublée de soie noire.
Pour passer bachelier en Droit à Paris ; il faut l'avoir étudié deux ans, & avoir soûtenu un acte dans les formes. Pour être bachelier en Médecine, il faut, après avoir été quatre ans maître ès Arts dans l'université, faire deux ans d'étude en Médecine & subir un examen après quoi on est revêtu de la fourrure pour entrer en licence. Dans l'université de Paris, avant la fondation des chaires de Théologie, ceux qui avoient étudié six ans en Théologie étoient admis à faire leurs cours, d'où ils étoient nommés baccalarii cursores : & comme il y avoit deux cours, le premier pour expliquer la bible pendant trois années consécutives ; le second, pour expliquer le maître des sentences pendant une année ; ceux qui faisoient leur cours de la bible étoient appellés baccalarii biblici ; & ceux qui étoient arrivés aux sentences ; baccalarii sententiarii. Ceux enfin qui avoient achevé l'un & l'autre étoient qualifiés baccalarii formati ou bacheliers formés.
Il est fait mention encore de BACHELIERS D'éGLISE, baccalarii ecclesiae, l'évêque avec ses chanoines & bacheliers, cum consilio & consensu omnium canonicorum suorum & baccalariorum. Il n'y a guere de mot dont l'origine soit plus disputée parmi les critiques que celui de bachelier, baccalarius ou baccalaureus : Martinius prétend qu'on dit en latin baccalaureus, pour dire baccâ laureâ donatus, & cela par allusion à l'ancienne coûtume de couronner de laurier les poëtes, baccis lauri, comme le fut Pétrarque à Rome en 1341. Alciat & Vivès sont encore de ce sentiment : Rhenanus aime mieux le tirer de baculus ou baccillus, un bâton, parce qu'à leur promotion, dit-il, on leur mettoit en main un bâton, pour marquer l'autorité qu'ils recevoient, qu'ils avoient achevé leurs études, & qu'ils étoient remis en liberté ; à peu près comme les anciens gladiateurs, à qui l'on mettoit à la main un bâton pour marque de leur congé ; c'est ce qu'Horace appelle rude donatus. Mais Spelman rejette cette opinion, d'autant qu'il n'y a point de preuve qu'on ait jamais pratiqué cette cérémonie de mettre un bâton à la main de ceux que l'on créoit bacheliers ; & d'ailleurs cette étymologie conviendroit plûtôt aux licentiés qu'aux bacheliers, qui sont moins censés avoir combattu qu'avoir fait un premier essai de leurs forces, comme l'insinue le nom de tentative que porte leur these.
Parmi ceux qui soûtiennent que les bacheliers militaires sont les plus anciens, on compte Cujas, qui les fait venir de buccellarii, sorte de cavalerie fort estimée autrefois ; Ducange qui les tire de baccalaria, sorte de fiefs ou de fermes qui contenoient plusieurs pieces de terre de douze acres chacune, ou de ce que deux boeufs pouvoient labourer. Selon lui les possesseurs de ces baccalaria étoient appellés bacheliers. Enfin Caseneuve & Hauteserre font venir bachelier de baculus, ou bacillus, un bâton, à cause que les jeunes cavaliers s'exerçoient au combat avec des bâtons, ainsi que les bacheliers dans les universités s'exercent par des disputes. De toutes ces étymologies la premiere est la plus vraisemblable, puisqu'il n'y a pas encore long-tems que dans l'université de Paris la these que les aspirans à la maîtrise ès Arts étoient obligés de soûtenir, s'appelloit l'acte pro laurea artium. Ainsi de bacca lauri, qui signifie proprement le fruit ou la graine de laurier, arbre consacré de tout tems à être le symbole des récompenses accordées aux savans, on a fait dans notre langue bachelier pour exprimer un étudiant qui a déjà mérité d'être couronné. (G)
BACHELIER, (Commerce) c'est un nom qu'on donne dans quelques-uns des six corps de marchands de Paris, aux anciens & à ceux qui ont passé par les charges, & qui ont droit d'être appellés par les maîtres & gardes pour être présens avec eux & les assister en quelques-unes de leurs fonctions, particulierement en ce qui regarde le chef-d'oeuvre des aspirans à la maîtrise. Ainsi dans le corps des marchands Pelletiers le chef-d'oeuvre doit être fait en présence des gardes, qui sont obligés d'appeller avec eux quatre bacheliers dudit état.
Le terme de bachelier est aussi en usage dans le même sens dans la plûpart des communautés des Arts & Métiers de la ville de Paris. Voyez COMMUNAUTE. (G)
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BACHER | BACHER
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BACHIAN | (Géog. mod.) île des Indes orientales, une des Moluques, proche la ligne.
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BACHOT | subst. m. sur les rivieres, c'est un petit bateau qui prend, en payant, les passans au bord d'une riviere, & les met à l'autre bord ; il y en a sur la Seine en plusieurs endroits. Voyez BACHOTEURS & BACHOTAGE.
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BACHOTAGE | S. m. (Police) c'est l'emploi de ceux qui ont droit de voiturer sur la riviere dans des bachots, au-dessus & au-dessous de la ville. Voyez BACHOTEURS.
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BACHOTEURS | sub. m. (Police) ce sont des bateliers occupés sur les ports de Paris & en autres endroits des rives de la Seine, à voiturer le public sur l'eau & dans des bachots au-dessus & au-dessous de la ville. Ils sont obligés de se faire recevoir à la ville : ils ne peuvent commettre des garçons à leur place : leurs bachots doivent être bien conditionnés. Il leur est défendu de recevoir plus de seize personnes à la fois ; leurs salaires sont réglés ; ils doivent charger par rang ; cependant le particulier choisi tel bachoteur qu'il lui plaît. Ils sont obligés d'avoir des numeros à leurs bachots. Un officier de ville fait de quinze en quinze jours la visite des bachots ; & il est défendu aux femmes & aux enfans des bachoteurs de se trouver sur les ports. On paye par chaque personne quatre sous pour Seve & S. Cloud ; deux sous pour Chaillot & Passy ; deux sols six deniers pour Auteuil ; & ainsi à proportion de la distance, & à raison de deux sols pour chaque lieue, tant en descendant qu'en remontant. Le bachoteur convaincu d'avoir commis à sa place quelqu'homme sans expérience, ou d'avoir reçu plus de seize personnes, est condamné pour la premiere fois à cinquante livres d'amende, confiscation des bachots, trois mois de prison ; il y a punition corporelle en cas de récidive & exclusion du bachotage. C'est au lieutenant de police à veiller que les bachoteurs ne se prêtent à aucun mauvais commerce. Il leur est enjoint par ce tribunal de fermer leurs bachots avec une chaîne & un cadenat pendant la nuit.
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BACHOU | S. m. (terme de Boyaudier) c'est ainsi que ces ouvriers appellent des especes de hottes dans lesquelles les boyaux de moutons ou d'agneaux sont portés de la boucherie dans leurs atteliers.
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BACILE | crithmum, (Hist. natur. botan.) genre de plante à fleurs en rose disposée en ombelles ; ces fleurs sont composées de plusieurs pétales arrangés sur un calice, qui devient dans la suite un fruit à deux semences plates légerement cannelées, qui se dépouillent ordinairement d'une enveloppe. Ajoûtez aux caracteres de ce genre, que les feuilles sont charnues, étroites, & subdivisées trois à trois. Tournefort, inst. rei herb. Voyez PLANTE. (I)
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BACKON | (Géog.) ville de la Moldavie, sur la riviere d'Arari, proche les frontieres de la Valachie.
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BACLAGE | S. m. (terme de Comm. & de Riviere) c'est l'arrangement sur les ports de Paris des bateaux qui arrivent les uns après les autres pour y faire la vente des marchandises dont ils sont chargés. Baclage se dit aussi du droit qu'on paye aux officiers de ville chargés de cet arrangement. Ils se nomment débacleurs. Voyez DEBACLEURS, DEBACLER, DEBACLAGE.
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BACLAN | (Géographie) pays de la Perse dans le Chorasan près de Balche, & vers la riviere de Gihon.
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BACLER | BACLER
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BACONISM | ou PHILOSOPHIE DE BACON, Bacon,baron de Verulam, & vicomte de S. Alban, naquit en Angleterre l'an 1560. Il donna dans son enfance des marques de ce qu'il devoit être un jour ; & la reine Elizabeth eut occasion plusieurs fois d'admirer la sagacité de son esprit. Il étudia la philosophie d'Aristote dans l'université de Cambridge, & quoiqu'il n'eût pas encore seize ans, il apperçut le vuide & les absurdités de ce jargon. Il s'appliqua ensuite à l'étude de la politique & de la jurisprudence, & son mérite l'éleva à la dignité de chancelier sous le roi Jacques premier. Il fut accusé de s'être laissé corrompre par argent ; & le roi l'ayant abandonné, il fut condamné par la chambre des pairs à une amende d'environ quatre cent milles livre de notre monnoie ; il perdit sa dignité de chancelier, & fut mis en prison. Peu de tems après, le roi le rétablit dans tous ses biens & dans tous les honneurs qu'il avoit perdus : mais ses malheurs le dégoûterent des affaires, & augmenterent sa passion pour l'étude. Enfin il mourut âgé de 66 ans, & si pauvre, qu'on dit que quelques mois avant sa mort il avoit prié le roi Jacques de lui envoyer quelques secours, pour lui épargner la honte de demander l'aumône dans sa vieillesse. Il falloit qu'il eût été ou bien desintéressé ou bien prodigue, pour être tombé dans une si grande indigence.
Le Chancelier Bacon est un de ceux qui ont le plus contribué à l'avancement des Sciences. Il connut très-bien l'imperfection de la Philosophie scholastique, & il enseigna les seuls moyens qu'il y eût pour y remédier. "Il ne connoissoit pas encore la nature, dit un grand homme, mais il savoit & indiquoit tous les chemins qui menent à elle. Il avoit méprisé de bonne heure tout ce que les universités appelloient la Philosophie, & il faisoit tout ce qui dépendoit de lui, afin que les compagnies instituées pour la perfection de la raison humaine, ne continuassent pas de la gâter par leurs quiddités, leurs horreurs du vuide, leurs formes substancielles, & tous ces mots impertinens, que non-seulement l'ignorance rendoit respectables, mais qu'un mêlange ridicule avec la religion avoit rendu sacrés".
Il composa deux ouvrages pour perfectionner les Sciences. Le premier est intitulé de l'accroissement & de la dignité des Sciences : il y montre l'état où elles se trouvoient alors, & indique ce qui restoit à découvrir pour les rendre parfaites. Mais il ajoûte qu'il ne faut pas espérer qu'on avance beaucoup dans cette découverte, si on ne se sert d'autres moyens que de ceux dont on s'étoit servi jusqu'alors. Il fait voir que la Logique qu'on enseignoit dans les écoles étoit plus propre à entretenir les disputes qu'à éclaircir la vérité, & qu'elle enseignoit plûtôt à chicaner sur les mots qu'à pénétrer dans le fond des choses. Il dit qu'Aristote, de qui nous tenons cet art, a accommodé sa physique à sa logique, au lieu de faire sa logique pour sa physique ; & que renversant l'ordre naturel, il a assujetti la fin aux moyens. C'est aussi dans ce premier ouvrage qu'il propose cette célebre division des Sciences qu'on a suivie en partie dans ce Dictionnaire. Voyez le Discours préliminaire.
C'est pour remédier aux défauts de la Logique ordinaire, que Bacon composa son second ouvrage intitulé Nouvel organe des Sciences : il y enseigne une Logique nouvelle, dont le principal but est de montrer la maniere de faire une bonne induction, comme la fin principale de la logique d'Aristote est de faire un bon syllogisme. Bacon a toûjours regardé cet ouvrage comme son chef-d'oeuvre, & il fut dix-huit ans à le composer. Voici quelques-uns de ses axiomes qui feront connoître l'étendue des vûes de ce grand génie.
" 1. La cause du peu de progrès qu'on a faits jusqu'ici dans les Sciences, vient de ce que les hommes se sont contentés d'admirer les prétendues forces de leur esprit, au lieu de chercher les moyens de remédier à sa foiblesse.
2. La logique scholastique n'est pas plus propre à guider notre esprit dans les Sciences, que les sciences, dans l'état où elles sont, ne sont propres à nous faire produire de bons ouvrages.
3. La logique scholastique n'est bonne qu'à entretenir les erreurs qui sont fondées sur les notions qu'on nous donne ordinairement : mais elle est absolument inutile pour nous faire trouver la vérité.
4. Le syllogisme est composé de propositions. Les propositions sont composées de termes, & les termes sont les signes des idées. Or si les idées, qui sont le fondement de tout, sont confuses, il n'y a rien de solide dans ce qu'on bâtit dessus. Nous n'avons donc d'espérance que dans de bonnes inductions.
5. Toutes les notions que donnent la Logique & la Physique, sont ridicules. Telles sont les notions de substance, de qualité, de pesanteur, de légereté, &c.
6. Il n'y a pas moins d'erreur dans les axiomes qu'on a formés jusqu'ici que dans les notions ; desorte que pour faire des progrés dans les Sciences, il est nécessaire de refaire tant les notions que les principes : en un mot, il faut, pour ainsi dire, refondre l'entendement.
7. Il y a deux chemins qui peuvent conduire à la vérité. Par l'un on s'éleve de l'expérience à des axiomes très-généraux ; ce chemin est déjà connu : par l'autre on s'éleve de l'expérience à des axiomes qui deviennent généraux par degrés, jusqu'à ce qu'on parvienne à des choses très-générales. Ce chemin est encore en friche, parce que les hommes se dégoûtent de l'expérience, & veulent aller tout d'un coup aux axiomes généraux, pour se reposer.
8. Ces deux chemins commencent tous les deux à l'expérience & aux choses particulieres ; mais ils sont d'ailleurs bien différens : par l'un on ne fait qu'effleurer l'expérience ; par l'autre on s'y arrête : par le premier on établit dès le second pas des principes généraux & abstraits ; par le second, on s'éleve par degrés aux choses universelles, &c.
9. Il ne s'est encore trouvé personne qui ait eu assez de force & de constance, pour s'imposer la loi d'effacer entierement de son esprit les théories & les notions communes qui y étoient entrées avec le tems ; de faire de son ame une table rase, s'il est permis de parler ainsi ; & de revenir sur ses pas pour examiner de nouveau toutes les connoissances particulieres qu'on croit avoir acquises. On peut dire de notre raison, qu'elle est obscurcie & comme accablée par un amas confus & indigeste de notions, que nous devons en partie à notre crédulité pour bien des choses qu'on nous a dites, au hasard qui nous en a beaucoup appris, & aux préjugés dont nous avons été imbus dans notre enfance.... Il faut se flater qu'on réussira dans la découverte de la vérité, & qu'on hâtera les progrès de l'esprit, pourvû que, quittant les notions abstraites, les spéculations métaphysiques, on ait recours à l'analyse, qu'on décompose les idées particulieres, qu'on s'aide de l'expérience, & qu'on apporte à l'étude un jugement mûr, un esprit droit & libre de tout préjugé.... On ne doit espérer de voir renaître les Arts & les Sciences, qu'autant qu'on refondra entierement ses premieres idées, & que l'expérience sera le flambeau qui nous guidera dans les routes obscures de la vérité. Personne jusqu'ici, que nous sachions, n'a dit que cette réforme de nos idées eût été entreprise, ou même qu'on y eût pensé ".
On voit par ces aphorismes, que Bacon croyoit que toutes nos connoissances viennent des sens. Les Péripatéticiens avoient pris cette vérité pour fondement de leur philosophie : mais ils étoient si éloignés de la connoître, qu'aucun d'eux n'a sû la développer ; & qu'après plusieurs siecles, c'étoit encore une découverte à faire. Personne n'a donc mieux connu que Bacon la cause de nos erreurs : car il a vû que les idées qui sont l'ouvrage de l'esprit, avoient été mal faites ; & que par conséquent, pour avancer dans la recherche de la vérité, il falloit les refaire. C'est un conseil qu'il répete souvent dans son nouvel organe. " Mais pouvoit-on l'écouter, dit l'auteur de l'Essai sur l'origine des connoissances humaines ? Prévenu, comme on l'étoit, pour le jargon de l'école & pour les idées innées, ne devoit-on pas traiter de chimérique le projet de renouveller l'entendement humain ? Bacon proposoit une méthode trop parfaite pour être l'auteur d'une révolution ; & celle de Descartes devoit réussir, parce qu'elle laissoit subsister une partie des erreurs. Ajoûtez à cela que le philosophe anglois avoit des occupations qui ne lui permettoient pas d'exécuter entierement lui-même ce qu'il conseilloit aux autres. Il étoit donc obligé de se borner à donner des avis qui ne pouvoient faire qu'une légere impression sur des esprits incapables d'en sentir la solidité. Descartes au contraire livré entierement à la Philosophie, & ayant une imagination plus vive & plus féconde, n'a quelquefois substitué aux erreurs des autres que des erreurs plus séduisantes, qui peut-être n'ont pas peu contribué à sa réputation "
Le soin que Bacon prenoit de toutes les Sciences en général, ne l'empêcha pas de s'appliquer à quelques-unes en particulier ; & comme il croyoit que la Philosophie naturelle est le fondement de toutes les autres Sciences, il travailla principalement à la perfectionner. Mais il fit comme ces grands Architectes, qui ne pouvant se résoudre à travailler d'après les autres, commencent par tout abattre, & élevent ensuite leur édifice sur un dessein tout nouveau. De même, il ne s'amusa point à embellir ou à réparer ce qui avoit déjà été commencé par les autres : mais il se proposa d'établir une Physique nouvelle, sans se servir de ce qui avoit été trouvé par les anciens, dont les principes lui étoient suspects. Pour venir à bout de ce grand dessein, il avoit résolu de faire tous les mois un traité de Physique, il commença par celui des vents. Il fit ensuite celui de la chaleur, puis celui du mouvement, & enfin celui de la vie & de la mort. Mais comme il étoit impossible qu'un homme seul fit toute la Physique avec la même exactitude, après avoir donné ces échantillons pour servir de modele à ceux qui voudroient travailler sur ses principes, il se contenta de tracer grossierement & en peu de mots le dessein de quatre autres traités, & d'en fournir les matériaux dans le livre qu'il intitula Sylva sylvarum, où il a ramassé une infinité d'expériences, pour servir de fondement à sa nouvelle physique. En un mot personne, avant le chancelier Bacon,n'avoit connu la Philosophie expérimentale ; & de toutes les expériences physiques qu'on a faites depuis lui, il n'y en a presque pas une qui ne soit indiquée dans ses ouvrages.
Ce précurseur de la Philosophie a été aussi un écrivain élégant, un historien, un bel esprit.
Ses Essais de morale sont très-estimés, mais ils sont faits pour instruire plutôt que pour plaire. Un esprit facile, un jugement sain, le philosophe sensé, l'homme qui réfléchit, y brillent tour-à-tour. C'étoit un des fruits de la retraite d'un homme qui avoit quitté le monde, après en avoir soûtenu long-tems les prospérités & les disgraces. Il y a aussi de très-belles choses dans le livre qu'il a fait de la Sagesse des anciens, dans lequel il a moralisé les fables qui faisoient toute la théologie des Grecs & des Romains.
Il a fait encore l'Histoire de Henri VII. roi d'Angleterre, où il y a quelquefois des traits du mauvais goût de son siecle, mais qui d'ailleurs est pleine d'esprit, & qui fait voir qu'il n'étoit pas moins grand politique que grand philosophe. (C)
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BACOTI | S. f. (Histoire moderne) nom que les peuples du Tonquin donnent à la grande Magicienne, pour laquelle ils ont une extrème vénération, & qu'ils consultent outre les deux fameux devins, le Taybou & le Tay-phouthouy. Lorsqu'une mere, après la mort de son enfant, veut savoir en quel état est l'ame du défunt, elle va trouver cette espece de Sibylle, qui se met aussi-tôt à battre son tambour, pour évoquer l'ame du mort ; elle feint que cette ame lui apparoît, & lui fait connoître si elle est bien ou mal : mais pour l'ordinaire elle annonce, à cet égard, des nouvelles consolantes. Tavernier, voyage des Indes. (G)
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BACQUET | S. m. (Arts méchaniques) on donne ordinairement le nom de bacquet à un vaisseau de bois rond, oval, ou quarré, d'un pié & demi ou même davantage de diametre, plus ou moins profond, fait de plusieurs pieces ou douves serrées par des cerceaux de fer ou de bois, & destiné à contenir de l'eau ou des matieres fluides. Le bacquet est à l'usage des Verriers, ils y rafraîchissent leurs cannes ; des Cordonniers, ils y font tremper leurs cuirs ; des Brasseurs, ils y mettent de la biere ou y reçoivent la levure au sortir des tonneaux ; des Marchands de vin, ils y retiennent le vin qui s'échappe de la canelle des pieces en perce ; des Marchands de poisson, ils y conservent leur marchandise ; des Maçons, ils y transportent le mortier au pié de l'engin, pour être élevé de-là au haut des échaffaux ; des Carriers, ils s'en servent pour tirer le moellon & les autres pierres qu'ils ne peuvent brider avec le cable ; & d'un grand nombre d'autres ouvriers : nous allons faire mention de quelques-uns.
BACQUET, ustensile d'Imprimerie ; c'est une pierre de trois piés de long sur deux & demi de large, creusée à trois pouces de profondeur, garnie sur ses bords de bandes de fer, & percée au milieu d'une de ses extrémités ; l'imprimeur qui veut laver sa forme, bouche le trou avec un tampon de linge, la couche au fond du bacquet, & verse dessus une quantité suffisante de lessive pour la couvrir ; là il la brosse jusqu'à ce que l'oeil de la lettre soit net, après quoi il débouche le trou pour laisser écouler la lessive, retire sa forme, & la rinse avec de l'eau claire : ce bacquet doit être posé ou supporté sur une table de chêne à quatre piés bien solides.
BACQUET, chez les Marbreurs de papier, est une espece de boîte ou caisse de bois, plate, sans couvercle, quarrée, longue de la grandeur d'une feuille de papier à l'écu, & de l'épaisseur d'environ quatre doigts : elle se pose sur la table ou l'établi du Marbreur, qui y verse de l'eau gommée jusqu'à un doigt du bord ; c'est sur cette eau que l'on répand les couleurs que doit prendre le papier pour être marbré. Voyez Pl. du Marbreur, en F. fig. 1.
BACQUET, chez les Relieurs & Doreurs ; c'est un demi-muid scié par le milieu, où l'on met de la cendre jusqu'à un certain degré, & par-dessus de la poussiere de charbon, pour faire une chaleur douce, capable de sécher la dorure.
BACQUET, en terme de Chauderonnier, se dit en général de tous vaisseaux de cuivre imparfaits, & tels qu'ils sortent de la manufacture & de la premiere main.
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BACQUETER | verb. act. en bâtiment, c'est ôter l'eau d'une tranchée avec une pelle ou une écope. (P)
BACQUETER, l'eau, en Jardinage, c'est la répandre avec une pelle de bois sur le gason d'un bassin, pour arroser le dessus des glaises. (K)
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BACQUETURES | S. f. pl. terme de Marchand de vin, c'est ainsi qu'ils appellent ce qui tombe des canelles des tonneaux en perce, & des mesures quand ils vendent & versent le vin dans les bouteilles. Ils disent qu'ils en voyent ce vin au Vinaigrier, & ils le devroient faire.
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BACTRE | (Géog. anc. & mod.) riviere que les modernes nomment Buschian ou Bachora ; elle se joint à notre Gehon, ou à l'Oxus des anciens.
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BACTREOLE | S. f. chez les Batteurs d'or, rognures de feuilles d'or ; on les employe à faire l'or en coquille. Voyez OR.
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BACTRES | (Géog. anc. & mod.) capitale de la Bactriane, sur le fleuve Bactre ; c'est aujourd'hui Bag-dasan ou Termend ; elle est voisine du mont Caucase.
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BACTRIANE | S. f. (Géog. anc. & mod.) ancienne province de Perse entre la Margiane, la Scythie, l'Inde & le pays des Messagetes ; c'est aujourd'hui une contrée de la Perse, formée en partie du Chorasan, & en partie du Mawaralnahar, ou plus communément Usbeck en Tartarie.
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BACTRIEN | S. m. peuples de la Bactriane.
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BACU | BACHIE, BACHU, BARVIE, (Géog.) ville de Perse sur la mer Caspienne, & dans la province de Servan. Il y a près de la ville une source qui jette une liqueur noire dont on se sert par toute la Perse, au lieu d'huile à brûler. Elle donne son nom à la mer qu'on connoît sous celui de mer de Bacu ou mer de Sala.
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BACULOMETRIE | S. f. c'est l'art de mesurer avec des bâtons ou des verges, les lignes tant accessibles qu'inaccessibles. Voyez ACCESSIBLE, ARPENTAGE, MESURE, LEVER un plan, &c. (E)
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BADACHXAN | ou BADASCHIAN, ou BUSDASKAN, (Géographie anc. & mod.) ville d'Asie, dans le Mawaralnahar, dont elle est la capitale : quelques Géographes prétendent que c'est l'ancienne Bactres.
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BADAI | (Géog. & Hist.) peuples de la Tartarie déserte, qui adoroient le soleil, ou un morceau de drap rouge élevé en l'air, qui en étoit apparemment la banniere ou le symbole.
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BADAJOZ | (Géog.) ville d'Espagne, capitale de l'Estramadure, sur la Guadiana. Long. 11. 27. lat. 38. 35.
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BADARA | (Géographie) petite ville des Indes capitale de la contrée du même nom, dans la presqu'île de l'Inde, deçà le Gange, au Malabar, proche Calicut.
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BAD | ou BADEN, (Géographie) ville d'Allemagne, dans le cercle de Suabe. Long. 26. 54. lat. 48. 50.
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BADE | Le marggraviat de Bade est divisé en deux parties, le haut & le bas marggraviat ; il est borné au septentrion par le Palatinat & l'évêché de Spire ; à l'orient par le duché de Wirtemberg & la principauté de Furstemberg ; au midi, par le Brisgaw ; à l'occident, par le Rhin.
* BADE ou BADEN, (Géog.) ville de Suisse, dans le canton de même nom, sur le Limat. Long. 25. 55. lat. 47. 27.
* BADE ou BADEN, (Géog.) ville d'Allemagne, dans l'archiduché d'Autriche, sur le Suechat. Long. 34. 20. lat. 48.
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BADEBOU | (Géog.) petit pays d'Afrique, sur la côte de l'Océan, dans le pays des Negres, au nord de la riviere de Gambie.
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BADELAIRE | S. f. vieux mot qu'on a conservé dans le blason, & qui signifie une épée faite en sabre, c'est-à-dire courte, large & recourbée : on croit que ce mot vient de baltearis, à cause qu'un baudrier étoit autrefois appellé baudel ; d'où vient que quelques-uns disent baudelaire. (V)
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BADENOCH | (Géog.) petit pays de l'Ecosse septentrionale, dans la province de Murray, vers les montagnes & la petite province d'Athol.
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BADENWEILER | (Géog.) ville d'Allemagne, dans le Brisgaw, proche du Rhin. Long. 25. 20. lat. 47. 55.
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BADIANE | (SEMENCE DE), ou ANIS DE LA CHINE, (Histoire natur. & Mat. med.) c'est un fruit qui représente la figure d'une étoile ; il est composé de six, sept ou d'un plus grand nombre de capsules qui se réunissent en un centre comme des rayons ; elles sont triangulaires, longues de cinq, huit & dix lignes, larges de trois, un peu applaties & unies par la base. Ces capsules ont deux écorces, une extérieure, dure, rude, raboteuse, jaunâtre, ou de couleur de rouille de fer ; l'autre, intérieure, presqu'osseuse, lisse & luisante. Elles s'ouvrent en deux panneaux par le dos, lorsqu'elles sont seches & vieilles, & ne donnent chacune qu'un seul noyau lisse, luisant, applati, de la couleur de la graine de lin ; lequel, sous une coque mince & fragile, renferme une amende blanchâtre, grasse, douce, agréable au goût, & d'une saveur qui tient de celle de l'anis & du fenouil ; mais qui est plus douce. La capsule a le goût du fenouil, un peu d'acidité, & une odeur seulement un peu plus pénétrante. Ce fruit vient des Philippines, de la Tartarie & de la Chine ; l'arbre qui le porte s'appelle pansipansi ; son tronc est gros & branchu ; il s'éleve à la hauteur de deux brasses & plus. De ses branches sortent quinze feuilles alternes, rarement crénelées, pointues, longues d'une palme, & larges d'un pouce & demi. Les fleurs sont, à ce qu'on dit, en grappes, grandes comme celles du poivre, & paroissent comme un amas de plusieurs chatons.
La semence de badiane donne de l'huile essentielle, limpide, subtile & plus pénétrante que celle d'anis, elle en a les propriétés. Les Orientaux lui donnent la préférence, elle fortifie l'estomac, chasse les vents & excite les urines. Les Chinois la mâchent après le repas ; ils l'infusent aussi, avec la racine de ninzin, dans l'eau chaude & en boivent en forme de thé. Les Indiens en tirent aujourd'hui un esprit ardent anisé, que les Hollandois appellent anis arak, & dont on fait grand cas.
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BADIGEON | S. m. en Architecture, est un enduit jaunâtre qui se fait de poudre de pierre de Saint-Leu, détrempée avec de l'eau : les Maçons s'en servent pour distinguer les naissances d'avec les panneaux, sur les induits & ravalemens. Les Sculpteurs l'employent aussi pour cacher les défauts des pierres coquillieres, & les faire paroître d'une même couleur.
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BADIGEONNER | c'est colorer avec du badigeon un ravalement en plâtre, fait sur un pan de bois, ou sur un mur de moellon, de brique, &c. La plûpart des ouvriers mettent au badigeon de l'ocre pour le rendre plus jaune, mais il n'y en faut point, cette teinte devant plûtôt imiter la pierre dure d'Arcueil, qui est presque blanche, que celle de Saint Leu, qui est plus colorée. (P)
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BADINANT | adj. (Manége) on appelle ainsi un cheval qu'on mene après un carosse attelé de six chevaux, pour le mettre à la place de quelqu'un des autres qui pourroit devenir hors d'état de servir. On l'appelle aussi le volontaire. (V)
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BADONVILLERS | (Géog.) ville de Lorraine, dans la principauté de Salmes.
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BADOULA | (Géog.) petite ville du royaume de Candie, dans l'île de Ceylan, à douze lieues du Pic d'Adam. Voyez ADAM'S PIC.
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BADUKKA | (Hist. nat. bot.) nom propre du Capparis, arborescens, indica, flore tetrapetalo. Le suc de sa feuille mêlé avec la graisse de sanglier, forme un liniment pour la goutte ; la décoction des fleurs & de la feuille purge & déterge les ulceres de la bouche ; & le fruit pris dans du lait nuit à la faculté d'engendrer dans l'un & l'autre sexe.
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BADWEISS | ou BADENWEISS, ville de Bohême, cercle de Bethyn, près Muldaw.
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BAEçA | (Géog.) ville d'Espagne, dans l'Andalousie, sur le Guadalquivir. Long. 14. 58. latit. 37. 45.
* BAEçA, (Géog. mod.) ville du Pérou, dans la province de Los Quixos, proche la ligne.
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BAETIQUE | (Géog. anc. & mod.) une des parties dans lesquelles les Romains avoient divisé l'Espagne. La Taraconoise, & la Lusitanie étoient les deux autres : la Baetique fut ainsi appellée du Boetis aujourd'hui le Guadalquivir, & comprenoit l'Andalousie avec la plus grande partie du royaume de Grenade.
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BAFF | (Géog. anc. & mod.) ville de l'île de Chypre, bâtie sur les ruines de Paphos la nouvelle, Long. 50. lat. 34. 50.
Il y a dans la même île un cap & une petite île qui ne sont pas éloignés de Baffa ; & qui portent le même nom. Le cap s'appelle aussi Capo bianco, & s'appelloit jadis Drepanum promontorium.
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BAFFETAS | S. m. (Commerce) toile grosse de coton blanc, qui vient des Indes orientales. La meilleure est de Surate ; la piece a 13 aunes 3/4 de long, sur 7/8 de large, il y en a de moins large. On distingue les baffetas par les endroits d'où ils viennent, & par l'aunage qu'ils ont, il y a des baffetas Orgaris, Nossaris, Gaudivis, Nerindes & Daboüis ; ils sont étroits ; ils n'ont que 5/6 de large, & 1/2 aune de long ; il y a des baffetas Narrow-With de 13 aunes 1/2 de long, sur 1/2 aune de large, Broad-With de 14 aunes de long ; sur 3/4 de large ; Broad-Brow, & Narrow-Brow, qui ne sont que des toiles écrues, les unes de 14 aunes de long, sur 1/2 aune de large, & les autres de la même longueur, sur 3/4 de large. Il y a un autre baffetas qui vient aussi des Indes orientales, & qu'on nomme Shaub Voyez SHAUB.
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BAFFIN'S-BAIE | ou BAIE DE BAFFIN, (Géog.) baie dans les terres arctiques : elle s'étend depuis le 70 jusqu'au 80 degré de latitude. Voyez BAIE.
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BAGACE s | f. (Sucrerie) c'est ainsi qu'on nomme les cannes, après qu'elles ont passé au moulin. On les conserve dans des hangars qu'on appelle casés, pour être brûlées sous les poeles à sucre, quand elles seront seches. C'est l'ouvrage des négresses d'en faire des paquets au sortir des cylindres du moulin : on nourrit les chevaux, les boeufs, les cochons, avec celles qui trop brisées & réduites en trop petits fragmens ne peuvent entrer en paquets ; trois jours de soleil suffisent pour les sécher ; au lieu de paille & de feuilles de cannes, on les met sous les premieres chaudieres dans les endroits où le bois est commun, & sous les dernieres chaudieres lorsque le bois est rare. Voyez SUCRE, SUCRERIE.
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BAGAGE | S. m. on donne ce nom en général à tout équipage de voyage ; & il s'applique particulierement à celui d'une armée. Voyez ARMEE.
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BAGAIA | BAGI, VAGAI, (Géog.) ville de Numidie en Afrique ; elle s'appelloit aussi jadis Théodorie, de Théodore épouse de l'empereur Justinien.
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BAGAMEDER | BAGAMEDRI, BAGAMIDRI, haute Ethiopie, ou partie de l'Abyssinie, compris le Nil jusqu'à la source de la Tacaze. Cette contrée est divisée en treize petites provinces, & le Bashlo la sépare du royaume d'Amahara.
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BAGAUDE | (Hist. anc.) c'est ainsi que les anciens Gaulois, sur-tout depuis le tems de Diocletien, appelloient un larron ; & de-là est venu le mot de bagauda, ou bagaudia, qui, selon Prosper en sa chronique, & Salvien, liv. V. signifie un brigandage, une émotion de peuple, une sédition, un soulevement d e paysans. (G)
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BAGDAD | (Géog.) ville d'Asie, sur la rive orientale du Tigre. Long. 63. 15. lat. 37. 15.
C'est aussi une partie de la Turquie en Asie, & un de ses gouvernemens généraux.
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BAGE-LE-CHATEAU | (Géog.) ville de Bresse, du diocèse de Lyon. L'archiprêtré de Bage-le-Château est composé de la paroisse de cette ville & de Pont-de-Vaux, de S. Trivier, & d'autres paroisses moins considérables.
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BAGHARGAR | (Géog.) grand pays de la grande Tartarie ; il s'étend d'occident en orient ; il est borné au septentrion par les Kaimachites, au levant par le royaume de Tendu, au midi par la Chine & au couchant par le Thibet.
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BAGIAT | (Géog.) petit pays à l'occident de la mer Rouge, compris entre l'Ethiopie & la Nubie.
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BAGNA-BEBUSSO | ou BILIBUSSA, (Géog. anc. & mod.) ville de la Turquie en Europe, sur la Stromona, dans la Macédoine, aux confins de la Romanie & de la Bulgarie : c'étoit autrefois Heraclea Sintica.
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BAGNAGAR | ou EDERABAD, ou GOLCONDE, (Géog.) ville d'Asie, au Mogol, capitale du royaume de Golconde, proche la riviere de Nerva. Long. 96. lat. 15. 30.
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BAGNARA | (Géog.) ville maritime d'Italie, au royaume de Naples, dans la Calabre ultérieure. Long. 33. 48. lat. 38. 15.
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BAGNAREA | (Géog.) ville d'Italie, dans le patrimoine de S. Pierre, dans la terre d'Orviette. Long. 29. 40. lat. 42. 36.
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BAGNE | sub. m. c'est ainsi qu'on nomme dans quelques verreries en bouteilles, le poinçon dans lequel on passe au tamis la terre à pot au sortir du moulin, & la terre grasse bien moulue & bien épluchée, pour faire de l'une & de l'autre la matiere des pots. Voyez VERRERIE, & POT.
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BAGNERES | (Géog.) ville de France, au comté de Bigorre, en Gascogne, sur l'Adour. Long. 17. 42. lat. 43. 30.
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BAGNI | BAGNI
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BAGNOLOI | ou BAGNOLIENS, s. m. pl. (Hist. ecclés.) sectes d'hérétiques qui parurent dans le viij. siecle, & furent ainsi nommés de Bagnols, ville du Languedoc au diocèse d'Usès, où ils étoient en assez grand nombre. On les nomma aussi Concordois ou Gozocois, termes dont on ne connoît pas bien la véritable origine.
Ces Bagnolois étoient des Manichéens. Ils rejettoient l'ancien Testament & une partie du nouveau. Leurs principales erreurs étoient, que Dieu ne crée point les ames quand il les unit au corps : qu'il n'y avoit point en lui de prescience ; que le monde est éternel, &c. On donna encore le même nom à une secte de Cathares dans le xiij. siecle. Voyez CATHARES. (G)
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BAGNOLS | (Géog.) petite ville de France dans le bas Languedoc, proche de la Cese. Long. 22. 13. lat. 44. 10.
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BAGOE | (Myth.) nymphe qui enseigna, dit-on, aux Toscans à deviner par les foudres. Quelques-uns croyent que c'est la sibylle Erythrée, connue sous le nom d'Hérophile : d'autres prétendent que Bagoe est postérieure à Hérophile, la premiere d'entre les femmes qui ait rendu des oracles.
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BAGRADE | (Géog. anc. & mod.) fleuve de l'ancienne Caramanie, connu maintenant sous le nom de Tisindon. Il a sa source dans les montagnes de cette province, passe à Pasagarde, & se jette dans l'Océan Persique.
Il y a en Afrique un fleuve du même nom ; les savans le nomment Bagrada, Bragada, Macar, Macra, Bucara, Pagrarda. Il couloit près d'Utique ; & ce fut sur ses bords qu'un serpent, dont la dépouille étoit de cent vingt piés de long, arrêta, dit-on, l'armée d'Attilius Régulus.
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BAGUE | S. f. (Hist. anc. & mod.) c'est un petit ornement circulaire d'or, d'argent, & de quelques autres matieres, qu'on porte à un des doigts. L'usage ne paroît pas en avoir été fort commun en Grece du tems d'Homere. Ce poëte, qui a mis en oeuvre presque tous les objets connus de son tems, ne parle des bagues ni dans l'Iliade, ni dans l'Odyssée : mais les Egyptiens s'en servoient déjà ; car nous lisons que Pharaon donna à Joseph sa bague à cacheter. Les plus anciens Romains appelloient la bague, ungulum ; & les Grecs & les Romains, symbolum. La Mythologie nous explique à sa maniere l'origine des bagues à pierre : elle dit que Jupiter instruit par Prométhée que l'enfant qu'il auroit de Thétis le déthroneroit, permit à Hercule de le détacher du Caucase, mais à condition que Prométhée porteroit toûjours au doigt une bague avec un petit morceau de rocher, afin qu'il fût vrai qu'il y étoit toûjours resté attaché, ainsi que Jupiter l'avoit juré.
On faisoit des bagues de fer, d'acier, d'or, d'argent, de bronze, &c. & on les portoit au petit doigt de la main gauche, ou au doigt que nous nommons l'annulaire. Il y en avoit de creuses & de solides. On les chargeoit de pierres précieuses. Elles servoient de sceaux, & leur figure ne varioit pas moins que leur matiere. Nous en avons représenté quelques-unes dans nos planches d'antiquités. Voy. Pl. VII. fig. 12.
L'usage des bagues s'est transmis jusqu'à nous. Nous en portons de fort riches. Voyez sur leur usage, tant ancien que moderne, l'article ANNEAU.
BAGUES & JOYAUX, terme de Droit, se dit des ornemens précieux des femmes, ou de l'argent même qui leur est accordé par contrat de mariage pour leur en tenir lieu.
La stipulation des bagues & joyaux est sur-tout usitée en pays de Droit écrit, où elle tient lieu de la stipulation de préciput, & fait partie des gains de survie, aussi-bien que l'augment de dot. V. PRECIPUT, AUGMENT DE DOT, & GAIN DE SURVIE. (H)
BAGUE, c'est en Marine une petite corde mise en rond, dont on se sert pour faire la bordure d'un oeil de pié ou oeillet de voile. Voyez OEIL DE PIE, & OEILLET DE VOILE. (Z)
BAGUE, s. f. (Manége) c'est un anneau de cuivre qui pend au bout d'une espece de potence, & qui s'en détache assez facilement quand on est assez adroit pour l'enfiler avec une lance en courant à cheval de toute sa vîtesse ; c'est un exercice d'académie. Courir la bague, voyez COURIR. Avoir deux dedans, voyez DEDANS. (V)
BAGUES ; on appelle ainsi, dans les jeux d'anches de l'Orgue, une frette ou un anneau de plomb D, (fig. 44. Pl. d'Orgue) soudé sur le corps du tuyau. Cette bague a un trou pour passer la rasette a b, au moyen de laquelle on accorde les jeux d'anches. Voyez TROMPETTE. Lorsque le tuyau est placé dans sa boîte A B, la bague D doit porter sur la partie supérieure de cette boîte, dans laquelle elle entre en partie, & doit y être ajustée de façon que l'air contenu dans cette boîte, ne puisse trouver d'issue pour sortir que par l'anche du tuyau. Voyez ORGUE.
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BAGUENAUDIER | S. m. colutea (Hist. nat.) genre de plante à fleur papilionacée. Il sort du calice un pistil qui devient dans la suite une capsule membraneuse, enflée comme une vessie, dans laquelle il y a des semences qui ont la forme d'un rein. Tournefort, Inst. rei herb. Voyez PLANTE. (I)
Son bois est clair, ses feuilles rondes, petites, d'un verd blanchâtre, avec des fleurs jaunes. Cet arbre se dépouille l'hyver, & se marcotte ordinairement, quoiqu'il donne de la graine. Sa graine étant mûre, devient jaune. (K)
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BAGUER | v. act. terme de Tailleur, de Couturiere, &c. c'est arranger les plis d'un habit, & les arrêter ensemble avec de la soie ou du fil.
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BAGUETTE | S. f. On donne communément ce nom à un petit morceau de bois de quelques lignes d'épaisseur, plus ou moins long, rond & flexible. On employe la baguette à une infinité d'usages. Le bois dont on la fait, varie selon ses usages. On en fait même de fer forgé.
BAGUETTE DIVINE ou DIVINATOIRE. On donne ce beau nom à un rameau fourchu de coudrier, d'aune, de hêtre ou de pommier. Il n'est fait aucune mention de cette baguette dans les auteurs qui ont vécu avant l'onzieme siecle. Depuis le tems qu'elle est connue on lui a donné différens noms, comme caducée, verge d'Aaron, &c. Voici la maniere dont on prétend qu'on s'en doit servir. On tient d'une main l'extrémité d'une branche, sans la serrer beaucoup, ensorte que le dedans de la main regarde le ciel. On tient de l'autre main l'extrémité de l'autre branche, la tige commune étant parallele à l'horison, ou un peu plus élevée. L'on avance ainsi doucement vers l'endroit où l'on soupconnne qu'il y a de l'eau. Dès que l'on y est arrivé, la baguette tourne & s'incline vers la terre, comme une aiguille qu'on vient d'aimanter.
Supposé ce fait vrai, voici comment M. Formey croit pouvoir l'expliquer par une comparaison entre l'aiguille aimantée & la baguette. La matiere magnétique sortie du sein de la terre s'éleve, se réunit dans une extrémité de l'aiguille, où trouvant un accès facile, elle chasse l'air ou la matiere du milieu ; la matiere chassée revient sur l'extrémité de l'aiguille, & la fait pancher, lui donnant la direction de la matiere magnétique. De même à peu-près, les particules aqueuses, les vapeurs qui s'exhalent de la terre, & qui s'élevent, trouvant un accès facile dans la tige de la branche fourchue, s'y réunissent, l'appesantissent, chassent l'air ou la matiere du milieu. La matiere chassée revient sur la tige appesantie, lui donne la direction des vapeurs, & la fait pancher vers la terre, pour vous avertir qu'il y a sous vos piés une source d'eau vive.
Cet effet, continue M. Formey, vient peut-être de la même cause qui fait pancher en bas les branches des arbres plantés le long des eaux. L'eau leur envoye des parties aqueuses qui chassent l'air, pénetrent les branches, les chargent, les affaissent, joignent leur excès de pesanteur au poids de l'air supérieur, & les rendent enfin autant qu'il se peut, paralleles aux petites colonnes de vapeurs qui s'élevent. Ces mêmes vapeurs pénetrent la baguette & la font pancher. Tout cela est purement conjectural.
Une transpiration de corpuscules abondans, grossiers, sortis des mains & du corps, & poussés rapidement, peut rompre, écarter le volume, ou la colonne des vapeurs qui s'élevent de la source, ou tellement boucher les pores & les fibres de la baguette, qu'elle soit inaccessible aux vapeurs ; & sans l'action des vapeurs, la baguette ne dira rien : d'où il semble que l'épreuve de la baguette doit se faire sur-tout le matin, parce qu'alors la vapeur n'ayant point été enlevée, elle est plus abondante. C'est peut-être aussi pour cette raison que la baguette n'a pas le même effet dans toutes les mains, ni toûjours dans la même main. Mais cette circonstance rend fort douteux tout ce qu'on raconte des vertus de la baguette.
On a attribué à la baguette la propriété de découvrir les minieres, les thrésors cachés, & qui plus est les voleurs & les meurtriers fugitifs. Pour cette derniere vertu, on peut bien dire credat Judaeus Apella. Personne n'ignore la fameuse histoire de Jacques Aymar, paysan du Lyonnois, qui guidé par la baguette divinatoire, poursuivit en 1692 un meurtrier durant plus de quarante-cinq lieues sur terre, & plus de trente lieues sur mer. On sait aujourd'hui à n'en pouvoir douter, & on le croira sans peine, que ce Jacques Aymar étoit un fourbe. On peut voir le détail de son histoire dans le dictionnaire de Bayle, article Abaris. A l'égard des autres effets de la baguette, la plus grande partie des Physiciens les révoquent en doute. (O)
BAGUETTE DE NEPER. Voyez NEPER.
BAGUETTE NOIRE, (Hist. mod.) L'huissier de la baguette noire, c'est le premier huissier de la chambre du roi d'Angleterre, appellé dans le livre noir, lator virgae nigrae & hastiarius ; & ailleurs, virgi bajulus. Voyez HUISSIER. Sa charge est de porter la baguette devant le roi à la fête de S. George à Windsor. Il a aussi la garde de la porte de la chambre du chapitre, quand l'ordre de la Jarretiere est assemblé ; & dans le tems que le parlement tient, il garde la chambre des pairs. Sa marque est une baguette noire, qui a un lion d'or à l'extrémité. Cette baguette est en Angleterre une marque d'autorité, comme les masses le sont en d'autres pays. (G)
BAGUETTE, en Architecture, est une petite moulure composée d'un demi-cercle, que la plûpart des ouvriers appellent astragale. Voyez ASTRAGALE. (P)
BAGUETTE, chez les Arquebusiers, c'est un morceau de baleine ou de bois de chêne de la longueur d'un canon de fusil : il a par en-haut le diametre du canon ; il est ferré par le bout. Son autre extrémité est menue & fort déliée ; du reste il est rond dans toute sa longueur, & sert à bourrer un fusil quand on le charge.
BAGUETTE, chez les Artificiers. Il y en a de plusieurs sortes : les unes qu'on devroit appeller des fouloirs ou refouloirs, sont courtes, eu égard à leur grosseur, & tantôt massives, tantôt percées suivant leur axe ; elles sont destinées à charger les cartouches des fusées de toutes especes de matieres combustibles. Les autres longues & minces, servent à diriger la course des fusées volantes, & à les tenir dans une situation verticale, & la gorge d'où sort le feu tournée en-bas. Voyez FUSEE VOLANTE, & Planche I. de l'Artificier, fig. 1. R, une baguette égale dans toute sa longueur, pour rouler les cartouches. Voyez CARTOUCHE. Fig. 2. M, une baguette avec un manche plus gros pour les petites fusées ; & fig. 3. une baguette avec un manche plus petit pour les grosses fusées. Voyez Artific. Pl. II. fig. 23 une baguette à charger, percée par le bout d'un trou A I, égal en largeur & profondeur à la grosseur & à la longueur de la broche qu'il doit recevoir entierement : figure 24. une baguette à charger plus courte d'un quart, percée dans sa longueur d'un trou 26, dont l'ouverture est égale au diametre de la broche, pris au tiers de sa longueur, & profonde de la longueur du reste de la broche : fig. 25. baguette à charger, diminuée de la longueur d'un tiers plus que la précédente, & percée d'un trou 3 c, dont l'ouverture est égale au diametre de la broche, pris aux deux tiers, & profonde du tiers de sa longueur : figure 26. baguette appellée le massif, longue de deux diametres du calibre, & massive, parce qu'elle ne sert qu'à charger la partie de la fusée qui est au-dessus de la broche. Le manche de ces baguettes doit être garni d'une virole de cuivre, & non de fer, de peur d'accident.
BAGUETTE, chez les Ciriers. Les Ciriers ont deux sortes de baguettes : les baguettes à meches, & les baguettes à bougies ou chandelles. Ils enfilent dans les premieres leurs meches, lorsqu'elles sont coupées de longueur : ils enfilent dans les secondes leurs bougies, quand elles sont achevées. Outre ces deux sortes de baguettes, les Chandeliers en ont une troisieme, c'est une baguette à tremper : c'est celle sur laquelle les meches sont enfilées, lorsqu'ils font de la chandelle à la main, en trempant à plusieurs reprises les meches dans l'abysme. Voyez ABYSME. Les baguettes à bougies & à tremper sont longues, legeres & flexibles. Celles à meches sont beaucoup plus fortes.
BAGUETTE, terme de Courroyeur : c'est un bâton ou perche sur laquelle ces ouvriers étendent leurs cuirs, toutes les fois qu'ils ont été foulés à l'eau, afin de les y faire sécher. Voyez COURROYER.
BAGUETTE, outil d'Hongrieur ; c'est un morceau de bois assez long & rond, mais qui diminue de grosseur en allant du milieu aux extrémités comme un fuseau. Il sert à ces artisans pour unir & applanir leurs cuirs ; en les roulant dessus avec le pié. Voyez HONGRIEUR, & la figure E, planche de l'Hongrieur.
Pour cet effet, les Hongrieurs ont dans une chambre une espece d'élévation de planche fig. 5. Planche de l'Hongrieur. a a g, sur le plancher ou le pavé, qui va un peu plus en montant du côté du mur qu'à l'extrémité opposée : deux morceaux de bois, a f, d e, dressés depuis le pavé jusqu'au plancher, à la distance d'environ trois piés l'un de l'autre, sont joints à la hauteur de quatre piés par un autre morceau de bois b c, qui les traverse. L'ouvrier étend son cuir F sur cette espece de parquet ; il y place sa baguette entre les plis du cuir : alors il monte dessus, & en s'appuyant avec les mains sur la traverse de bois b c, il foule le cuir en reculant, & répete la même opération jusqu'à ce que ce cuir soit rendu maniable.
BAGUETTES DE TAMBOUR, (Luth.) ce sont deux morceaux de bois qui ont chacun un pié ou quinze pouces de longueur, sur neuf lignes ou environ de diametre par le bout qu'on tient à la main, d'où ils vont toûjours en diminuant jusqu'à l'autre bout, qui a la forme & les dimensions d'une grosse olive, ils sont tournés au tour, d'un bois dur & pesant comme l'ébene ; & l'on s'en sert pour battre la caisse ou le tambour. Voyez TAMBOUR. Voyez figures 16 & 17, Planche II. de Lutherie.
BAGUETTES DE TYMBALES ; ce sont deux morceaux de bois de bouis qui sont garnis par un bout de petites courroies capables de recevoir les deux doigts du milieu, & destinées à les manier commodément, dont le fût est partout à peu près de la même grosseur, & n'a pas plus de sept à huit pouces de longueur, & qui sont terminés chacun par une espece de tête de l'épaisseur de trois à quatre lignes, du diametre de sept à huit, & de la forme d'un champignon plat & arrondi par les bords. Voyez la même Planche de Lutherie que nous venons de citer.
BAGUETTE DE TYMPANON, PSALTERION, &c. ce sont deux petits morceaux de bois, de bouis, de cornouiller, d'ébene, &c. recourbés par un bout, & quelquefois terminés de l'autre par un anneau ; d'une ligne & demie ou deux au plus d'épaisseur par le bout qu'on tient à la main ; d'où ils vont toûjours en diminuant. Ils sont recourbés par un bout, afin que ce bout s'applique facilement sur les cordes qu'on veut, sans toucher à d'autres : ils ont un anneau pour les tenir plus commodément, en y plaçant le doigt. On prend entre les doigts celles qui n'ont point d'anneaux.
BAGUETTES DE TAMBOURIN, soit à cordes, soit à caisse. Ces baguettes ne different guere de celles du tambour que par les dimensions. Celle du tambourin à cordes est plus courte & plus menue que celle du tambour ; celle du tambourin à caisse ou de Provence est plus menue, mais plus longue.
BAGUETTE, bâton dont le fauconnier se sert pour faire partir la perdrix des buissons, & pour tenir les chiens en crainte.
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BAHAMA | (Géog. mod.) île de l'Amérique septentrionale, l'une des Lucayes, qui donne le nom au canal de Bahama.
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BAHANA | (Géog.) ville d'Egypte située dans la Thébaïde inférieure, près de Fium, sur un lac formé de la décharge des eaux du Nil, & qu'on appelle mer de Joseph.
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BAHAR | BAHAIRE, ou BAIRE, s. m. (Comm.) poids dont on sert à Ternata, à Malaca, à Achem, & en plusieurs autres lieux des Indes orientales, aussi-bien qu'à la Chine.
Il y en a de deux sortes ; l'une qu'on appelle grand bahar, & l'autre que l'on nomme petit bahar. Le premier revient à 481 livres 4 onces de Paris, de Strasbourg, d'Amsterdam, & de Besançon ; & le second à 401 livres 7 onces de Paris.
Le bahar de la Chine est de 300 catis, mais qui n'en font que 200 de Malaca, chaque catis de la Chine ne contenant que 16 taëls. Le taël pesant une réale & demie de huit, est de dix mas ou mases, & chaque mas dix condorins. Voyez CONDORIN, MAS, TAEL.
Le bahar de Moka, ville d'Arabie, est de 420 livres. (G)
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BAHEL SCHULLI | (Hist. nat. & bot.) arbrisseau épineux qu'on appelle aussi genista spinosa indica verticillata, flore purpureo-caeruleo, qui étoit aux Indes dans les lieux aquatiques. Il y en a une espece qui vient dans les sables, dont les tiges & les feuilles sont d'un verd gai, & les fleurs sont blanches, avec une teinte d'azur.
Ray attribue à la décoction de sa racine, & à ses feuilles cuites & confites dans du vinaigre, la vertu d'exciter les urines, & de remédier à leur suppression, surtout si la décoction s'est faite dans l'huile du ficus infernalis : il ajoûte que ses feuilles réduites en poudre & prises dans de l'huile tirée par expression des fleurs du ficus infernalis, résolvent les tumeurs des parties naturelles.
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BAHEM | Dans le I. liv. des Macchabées, il est dit que le roi Demetrius écrivit au grand prêtre Simon, en ces termes : coronam auream & bahem quam misistis, suscepimus. Les uns croyent que ce nom bahem signifie des perles ; d'autres un habit. Le Grec, au lieu de bahem, lit baïnam, que Grotius dérive de baïs, une branche de palmier. Ce sentiment paroît le meilleur. Il étoit assez ordinaire d'envoyer ainsi des couronnes & des palmes d'or aux rois vainqueurs en forme de présens. Macchab. I. ch. xiij. v. 37. Syr. ad 1. Macch. xiij. 37. (G)
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BAHIR | c'est-à-dire illustre. Buxtorf a remarqué dans sa bibliotheque des Rabbins, que les Juifs ont un livre de ce nom. Il ajoûte que c'est le plus ancien de tous les livres des Rabbins ; qu'il y est traité des plus profonds mysteres de la cabale ; que ce livre n'a point été imprimé ; qu'on en voit seulement plusieurs passages dans les ouvrages des Rabbins ; que l'auteur se nommoit Rabbi Nechonia Ben Hakkana, & qu'il vivoit, selon les Juifs, en même tems que Jonathan, auteur de la paraphrase Chaldaïque, c'est-à-dire environ quarante ans avant Jesus-Christ. Le même Buxtorf s'est servi du témoignage de ce livre pour prouver l'antiquité des points voyelles, qui sont écrits au texte Hébreu de la Bible : mais cette preuve est mauvaise, le bahir n'étant point un ouvrage aussi ancien qu'il a prétendu. M. Simon a mis dans le catalogue des auteurs Juifs, que l'on a depuis peu imprimé en Hollande, un petit livre intitulé Bahir : mais il dit qu'il n'y a pas d'apparence que ce soit l'ancien bahir des Juifs, qui est beaucoup plus étendu. (G)
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BAHREI | ou BAHRAIN, (Géog.) province de l'Arabie heureuse, sur le golfe Persique, avec île de même nom.
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BAHU | S. m. en Architecture ; c'est le profil bombé du chaperon d'un mur, de l'appui d'un quai, d'un parapet, d'une terrasse ou d'un fossé, & d'une balustrade.
BAHU. On dit, en termes de Jardinage, qu'une plate-bande, qu'une planche ou qu'une couche de terre est en bahu, lorsqu'elle est bombée sur sa largeur pour faciliter l'écoulement des eaux, & mieux élever les fleurs. Les plates-bandes se font aujourd'hui en dos d'âne ou de carpe, c'est-à-dire en glacis à deux égoûts. (P)
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BAHURIN | (Géog. anc. & mod.) ville de la Palestine, de la tribu de Benjamin, sur une haute montagne, aux confins de la tribu de Juda : on l'appelle aujourd'hui Bachori.
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BAHUS | (Géog.) ville de Suede, capitale du gouvernement de même nom, sur un rocher, dans une île formée par la Gothelbe. Long. 29. 20. lat. 57. 52.
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BAHUTIER | S. m. ouvrier dont le métier est de faire des bahus, coffres, valises, malles, &c. & autres ouvrages de cette nature, couverts de peau de veau, de vache, d'ours, &c. mais non de chagrin. Les ouvrages en chagrin sont réservés aux Gaîniers. Les Bahutiers sont de la communauté des Coffretiers.
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BAI | adj. (Manége) poil de cheval tirant sur le rouge. Ce poil a plusieurs nuances, savoir, bai clair, bai doré, bai brun, bai châtain, bai cerise, bai miroité ou à miroir, lorsqu'on distingue des taches rondes semées par tout le corps, & d'un bai plus clair que le reste du corps. (V)
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BAIANISME | voyez BAYANISME.
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BAIE | BéE, s. f. ou JOUR, terme d'Architecture : on nomme ainsi toutes sortes d'ouvertures percées dans les murs pour éclairer les lieux, comme croisées, portes &c. On dit baie ou bée de croisée, & baie ou bée de porte, &c. (P)
BAIE, s. f. en Géographie, petit golfe ou bras de mer qui s'avance dans la terre, & dont le milieu en-dedans a plus d'étendue que l'entrée, ou ce qu'on nomme l'embouchure de la baie. Telle est la baie d'Hudson dans l'Amérique septentrionale. Voyez GOLFE. (O)
BAIE, s. f. bacca, (Hist. nat. bot.) fruit mou, charnu, succulent, qui renferme des pepins ou des noyaux : tels sont les fruits du laurier, du troêne ; du myrte, &c. Lorsque de pareils fruits sont disposés en grappe, on leur donne le nom de grains au lieu de celui de baie : par exemple, on dit un grain de raisin, un grain de sureau, &c. Tournefort. (I)
BAIE, (Géog. anc.) ville d'Italie dans ce que nous appellons aujourd'hui la terre de Labour, proche de Naples, à l'occident. Il n'en reste rien qu'un soûterrein appellé le Cento Camarelle, les cent petites chambres, & quelques ruines du pont que Caligula voulut construire sur le golfe qui séparoit Baie de Pouzzol. On présume que les Cento Camarelle servoient de casernes à la chiourme Romaine.
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BAIGNER | v. act. (Gramm.) c'est plonger un corps nud dans l'eau, ou plus généralement dans un fluide, afin que ses parties en soient appliquées immédiatement à la peau. Voyez BAIN.
BAIGNER, se dit en Fauconnerie de l'oiseau de proie, lorsque de lui-même il se jette dans l'eau ou qu'il se mouille à la pluie, ou qu'on le plonge dans l'eau quand on le poivre.
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BAIGNEUR | S. m. (Hist. anc.) valet des bains chez les anciens. Athenée dit que ces sortes de domestiques avoient une chanson particuliere : mais s'il étoit permis aux personnes qui servoient aux bains de chanter, il n'étoit point honnête à ceux qui se baignoient d'en faire autant ; car Théophraste, ch. jv. des Caract. faisant la peinture de l'homme grossier, le représente chantant dans le bain. (G)
BAIGNEUR, s. m. c'est celui qui tient des bains chez lui pour la commodité du public. Les Baigneurs sont appellés Etuvistes, & font corps avec les Perruquiers-Barbiers.
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BAIGNEUX | (Géog.) ville de France en Bourgogne, diocèse de Dijon.
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BAIGNOIRE | S. f. est une cuve de cuivre rouge de quatre piés & demi de longueur, sur deux & demi de largeur, arrondie par ses angles, & qui a environ 26 pouces de hauteur, servant à prendre le bain. Ces baignoires sont étamées en-dedans pour empêcher le verd-de-gris, & sont souvent décorées en-dehors de peintures à l'huile relatives à leur usage. Pour plus de propreté & de commodité, l'on pose dans le dedans des linges piqués, des oreillers, &c. aux deux côtés de ces baignoires, dans lesquelles on se tient assis : à leurs extrémités supérieures sont placés deux robinets à droite & à gauche, l'un pour distribuer de l'eau chaude amenée de l'étuve, l'autre de l'eau froide amenée du réservoir. Au fond de la baignoire est pratiquée une bonde que l'on leve pour faire écouler l'eau à mesure que l'on a besoin d'en remettre de la chaude, ou de la renouveller, selon le tems qu'on veut rester au bain. Cette bonde fermée contient l'eau, & lorsqu'elle est levée elle la précipite dans un tuyau de décharge, qui l'expulse dans les basses cours ou dans les puisards pratiqués exprès.
Ces baignoires sont ordinairement placées dans des niches qui prennent le plus souvent la forme d'un de leurs grands côtés, & sont couvertes d'un baldaquin ou impérial décoré de mousseline, toile de coton, toile peinte ou perse, comme il s'en voit au château de S. Cloud, de Sceaux ; &c.
Par oeconomie ces baignoires se font quelquefois de bois, & se portent en ville chez les particuliers, lorsqu'ils sont obligés pendant l'hiver de prendre les bains, par indisposition ou autrement. (P)
M. Burette dans les Mém. de l'Acad. des Belles Lettres, remarque que dans les thermes des anciens il y avoit deux sortes de baignoires ; les unes fixes, & les autres mobiles ; & que parmi ces dernieres on en trouvoit de faites exprès pour être suspendues en l'air, & dans lesquelles on joignoit le plaisir de se baigner à celui d'être balancé, & comme bercé par le mouvement qu'on imprimoit à la baignoire. (G)
Les baignoires de cuivre sont l'ouvrage des Chauderonniers ; les Tonneliers font & relient celles de bois.
BAIGNOIRE, chez les Hongrieurs ; c'est ainsi qu'ils appellent la poële dans laquelle ils font chauffer l'eau d'alun & le suif qu'ils emploient dans l'apprêt de leurs cuirs. Voyez la vignette Pl. de l'Hongrieur.
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BAIGORRI | (LE) Géog. petit pays de France dans la basse Navarre, entre les confins de la haute Navarre à l'occident, & le pays de Cise à l'orient.
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BAIKAL | lac de Sibérie d'où sort la riviere d'Angara. Long. 125. 130.
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BAIL | S. m. terme de Droit, est une convention par laquelle on transfere à quelqu'un la joüissance ou l'usage d'un héritage, d'une maison, ou autre sorte de bien, ordinairement pour un tems déterminé, moyennant une rente payable à certains tems de l'année que le bailleur stipule à son profit, pour lui tenir lieu de la joüissance ou de l'usage dont il se dépouille. Il y a aussi des baux par lesquels on promet de faire certains ouvrages pour un certain prix. Voy. LOUAGE, LOCATION.
Le bail des choses qui produisent des fruits est ce qu'on appelle bail à ferme. Voyez FERME.
Le bail des choses qui ne rapportent point de fruits est ce qu'on appelle bail à loyer. Voyez LOYER.
Chez les Romains les baux ne se faisoient pas pour un tems plus long que cinq années. Parmi nous ils ne passent jamais neuf ans, à moins qu'ils ne soient à vie ou emphytéotiques. Voyez EMPHYTEOTIQUE.
Les baux se font pardevant notaire ou sous seing privé. Ils sont également obligatoires d'une & d'autre maniere : seulement s'ils ne sont faits que sous signature privée, ils n'emportent point hypotheque sur les biens du bailleur ni du preneur. Les Anglois font aussi des baux de vive voix.
Tous ceux qui ont la libre administration de leur bien en peuvent faire des baux ; ceux même qui n'en ont que l'usufruit le peuvent aussi ? tel qu'un mari, une femme doüairiere, un tuteur, un bénéficier ; & dans l'usage commun, ceux qui entrent en joüissance après eux doivent entretenir les baux qu'ils ont faits.
L'obligation de celui qui fait le bail est de faire joüir le fermier ou locataire de la chose donnée à ferme ou à loyer, ou de lui payer des dommages & intérêts qui l'indemnisent de la perte qu'il souffre par l'inexécution du bail.
Mais il peut en demander la résiliation, pour défaut de payement ; si le locataire ou fermier dégrade l'héritage qu'il tient à bail ; si la maison tenue à bail menace ruine, & qu'il y ait nécessité de la rebâtir ; si le propriétaire d'une maison de ville veut occuper sa maison en personne ; & dans tous ces cas le propriétaire ne doit pas des dommages & intérêts au fermier ou locataire.
Celui qui succede au propriétaire n'est engagé à entretenir le bail par lui fait, que quand il lui succede à titre universel ; c'est-à-dire, titre d'héritier, de donataire ou légataire universel ; mais non pas s'il lui succede à titre singulier, soit lucratif ou onéreux.
Le fermier ou locataire de son côté est obligé à trois choses : 1°. à joüir en bon pere de famille, à ne point faire de dégradations dans les lieux dont il a la joüissance, & même à y faire les réparations locatives ou viageres auxquelles il s'est obligé par son bail : 2°. à payer le prix du bail si ce n'est que le fermier ait souffert des pertes considérables dans l'exploitage de sa ferme par des cas fortuits ; ce qu'on appelle en Droit vimaires, du Latin vis major, comme grêle, feu du ciel, inondations, guerre, &c. auquel cas l'équité naturelle exige qu'il soit fait diminution au fermier : 3°. à entretenir le bail, c'est-à-dire, à continuer l'habitation ou l'exploitage jusqu'à l'expiration du bail.
Lorsque le terme du bail est expiré, si le locataire continue à occuper la maison, ou le fermier à exploiter la ferme quoiqu'il n'y ait point de convention entre les parties, le silence du propriétaire fait présumer un consentement de sa part, & cela forme un contrat entre les parties qu'on appelle tacite réconduction. Voyez RECONDUCTION.
Le bail à rente, suivant la définition que nous avons donnée du mot bail au commencement de cet article, est moins proprement un bail qu'une veritable aliénation, par laquelle on transfere la propriété d'un immeuble à la charge d'une certaine somme ou d'une certaine quantité de fruits que le possesseur doit payer à perpétuité tous les ans.
Le bail à rente differe de l'emphytéose en plusieurs choses mais singulierement en ce que de sa nature il doit durer à perpétuité, moyennant la prestation de la rente par le tenancier ; au lieu que l'emphytéose finit souvent après un tems déterminé, comme de 99 ans, ou de deux ou trois générations. Voyez EMPHYTEOSE.
BAIL EMPHYTEOTIQUE, voyez EMPHYTEOSE.
BAIL A CHEPTEL, voyez CHEPTEL.
BAIL JUDICIAIRE, voyez JUDICIAIRE.
On appelle aussi bail l'expédition même du traité appellé bail, qu'on leve chez le notaire devant lequel il a été passé.
Bail est encore synonyme à ce qu'on appelle autrement baillie, ou garde-noble, ou bourgeoisie. Voyez GARDE.
Bail, dans les anciennes coûtumes, signifie aussi la tradition d'une chose ou d'une personne à quelqu'un : en ce sens on dit qu'il y a bail quand une fille se marie, parce qu'elle entre en la puissance de son mari ; & quand son mari meurt, il y a desbail, parce qu'elle est affranchie par sa mort de la puissance maritale. Voyez DESBAIL & PUISSANCE MARITALE.
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BAILE | S. m. terme de Palais usité particulierement en Béarn, où il se dit de certains huissiers subalternes qui ne peuvent exploiter que contre les roturiers à la différence des veguers qui exploitent contre les gentilhommes. Voyez VEGUER. (H)
BAILE, s. m. (Polit. & Comm.) nom qu'on donne à Constantinople à l'ambassadeur de la république de Venise résident à la Porte.
Outre les affaires de politique & d'état dont ce ministre est chargé, il fait aussi les fonctions de consul de la nation auprès du grand-seigneur ; & c'est proprement de lui que dépendent les autres consuls établis dans les échelles du levant, qui ne sont pour la plûpart que des vice-consuls. Voyez CONSUL. (G)
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BAILLE-BOUTE | S. f. c'est parmi les Marins une moitié de tonneau en forme de baquet. Les vaisseaux de guerre ont une baille amarrée à chaque hune, pour y enfermer des grenades & autres artifices que l'on couvre de peaux fraîches, s'il est possible, pour les garantir du feu.
On met dans des bailles le breuvage que l'on distribue tous les jours aux gens de l'équipage. Il y a aussi des bailles à tremper les écouvillons dont on se sert pour rafraîchir le canon. Il y a des bailles pour mettre tremper le poisson & la viande salée.
On se sert quelquefois des bailles pour puiser l'eau qui entre dans le rum ou fond de cale. (Z)
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BAILLEMENT | S. m. (Physiolog.) ouverture involontaire de la bouche, occasionnée par quelque vapeur ou ventuosité qui cherche à s'échapper, & témoignant ordinairement la fatigue, l'ennui, ou l'envie de dormir.
Le remede qu'Hippocrate prescrit contre le bâillement, est de garder long-tems sa respiration. Il recommande la même chose contre le hocquet. Voyez HOCQUET. Suivant l'ancien systême, le bâillement n'est jamais produit sans quelque irritation qui détermine les esprits animaux à couler en trop grande abondance dans la membrane nerveuse de l'oesophage, qu'on a regardée comme le siége du bâillement. Quant à cette irritation, on la suppose occasionnée par une humeur importune qui humecte la membrane de l'oesophage, & qui vient ou des glandes répandues dans toute cette membrane, ou des vapeurs acides de l'estomac rassemblées sur les parois de l'oesophage. Par ce moyen les fibres nerveuses de la membrane du gosier étant irritées ; elles dilatent le gosier, & contraignent la bouche à suivre le même mouvement.
Mais cette explication du bâillement a depuis peu donné lieu à une nouvelle plus méchanique & plus satisfaisante.
Le bâillement est produit par une expansion de la plûpart des muscles du mouvement volontaire, mais sur-tout par ceux de la respiration. Il se forme en inspirant doucement une grande quantité d'air, qu'on retient & qu'on raréfie pendant quelque tems dans les poumons, après quoi on le laisse échapper peu-à-peu, ce qui remet les muscles dans leur état naturel.
De-là, l'effet du bâillement est de mouvoir, d'accélérer & de distribuer toutes les humeurs du corps également dans tous les vaisseaux, & de disposer par conséquent les organes de la sensation & tous les muscles du corps, à s'acquiter chacun de leur côté de leurs fonctions respectives. Voy. Boerhaave, Inst. méd. § 638. (L)
BAILLEMENT, s. m. ce mot est aussi un terme de Grammaire, on dit également hiatus : mais ce dernier est latin. Il y a bâillement toutes les fois qu'un mot terminé par une voyelle, est suivi d'un autre qui commence par une voyelle, comme dans il m'obligea à y aller ; alors la bouche demeure ouverte entre les deux voyelles, par la nécessité de donner passage à l'air qui forme l'une, puis l'autre sans aucune consonne intermédiaire ; ce concours de voyelles est plus pénible à exécuter pour celui qui parle, & par conséquent moins agréable à entendre pour celui qui écoute ; au lieu qu'une consonne faciliteroit le passage d'une voyelle à l'autre. C'est ce qui a fait que dans toutes les langues, le méchanisme de la parole a introduit ou l'élision de la voyelle du mot précédent, ou une consonne euphonique entre les deux voyelles.
L'élision se pratiquoit même en prose chez les Romains. " Il n'y a personne parmi nous, quelque grossier qu'il soit, dit Cicéron, qui ne cherche à éviter le concours des voyelles, & qui ne les réunisse dans l'occasion. Quod quidem latina lingua sic observat, nemo ut tam rusticus sit, quin vocales nolit conjungere. Cic. Orator. n°. 150. Pour nous, excepté avec quelques monosyllabes, nous ne faisons usage de l'élision que lorsque le mot suivi d'une voyelle est terminé par un e muet ; par exemple, une sincere amitié, on prononce sincer-amitié. On élide aussi l'i de si en si il, qu'on prononce s'il ; on dit aussi m'amie dans le style familier, au lieu de ma amie ou mon amie : nos peres disoient m'amour.
Pour éviter de tenir la bouche ouverte entre deux voyelles, & pour se procurer plus de facilité dans la prononciation, le méchanisme de la parole a introduit dans toutes les langues, outre l'élision, l'usage des lettres euphoniques, & comme dit Cicéron, on a sacrifié les regles de la Grammaire à la facilité de la prononciation : Consuetudini auribus indulgenti libenter obsequor.... Impetratum est à consuetudine ut peccare suavitatis causâ liceret. Cicer. Orator. n. 158. Ainsi nous disons mon ame, mon épée, plûtôt que ma ame, ma épée. Nous mettons un t euphonique dans y a-t-il, dira-t-on ; & ceux qui au lieu de tiret ou trait d'union mettent une apostrophe après le t, font une faute : l'apostrophe n'est destinée qu'à marquer la suppression d'une voyelle, or il n'y a point ici de voyelle élidée ou supprimée.
Quand nous disons si l'on au lieu de si on, l' n'est point alors une lettre euphonique, quoi qu'en dise M. l'abbé Girard, tom. I. p. 344. On est un abrégé de homme ; on dit l'on comme on dit l'homme. On m'a dit, c'est-à-dire, un homme, quelqu'un m'a dit. On, marque une proposition indéfinie, individuum vagum. Il est vrai que quoiqu'il soit indifférent pour le sens de dire on dit ou l'on dit, l'un doit être quelquefois préféré à l'autre, selon ce qui précede ou ce qui suit, c'est à l'oreille à le décider ; & quand elle préfere l'on au simple on, c'est souvent par la raison de l'euphonie, c'est-à-dire, par la douceur qui résulte à l'oreille de la rencontre de certaines syllabes. Au reste ce mot euphonie est tout grec, , bien, & , son.
En grec le , qui répond à notre n, étoit une lettre euphonique, sur-tout après l' & l' : ainsi au lieu de dire , viginti viri, ils disent , sans mettre ce entre les deux mots.
Nos voyelles sont quelquefois suivies d'un son nasal, qui fait qu'on les appelle alors voyelles nasales. Ce son nasal est un son qui peut être continué, ce qui est le caractere distinctif de toute voyelle : ce son nasal laisse donc la bouche ouverte ; & quoiqu'il soit marqué dans l'écriture par un n, il est une véritable voyelle : & les poëtes doivent éviter de le faire suivre par un mot qui commence par une voyelle, à moins que ce ne soit dans les occasions où l'usage a introduit un n euphonique entre la voyelle nasale & celle du mot qui suit.
Lorsque l'adjectif qui finit par un son nasal est suivi d'un substantif qui commence par une voyelle, alors on met l'n euphonique entre les deux, du moins dans la prononciation ; par exemple, un-n-enfant, bon-n-homme, commun-n-accord, mon-n-ami. La particule on est aussi suivie de l'n euphonique, on-n-a. Mais si le substantif précede, il y a ordinairement un bâillement ; un écran illuminé, un tyran odieux, un entretien honnête, une citation équivoque, un parfum incommode ; on ne dira pas un tyran-n-odieux, un entretien-n-honnête, &c. On dit aussi un bassin à barbe, & non un bassin-n-à barbe. Je sai bien que ceux qui déclament des vers où le poëte n'a pas connu ces voyelles nasales, ajoûtent l'n euphonique, croyant que cette n est la consonne du mot précédent : un peu d'attention les détromperoit : car, prenez-y-garde, quand vous dites il est bon-n-homme, bon-n-ami, vous prononcez bon & ensuite -n-homme, -n-ami. Cette prononciation est encore plus desagréable avec les diphthongues nasales, comme dans ce vers d'un de nos plus beaux opera :
Ah ! j'attendrai long-tems, la nuit est loin encore ;
où l'acteur pour éviter le bâillement prononce loin-n-encore, ce qui est une prononciation normande.
Le b & le d sont aussi des lettres euphoniques. En latin ambire est composé de l'ancienne préposition am, dont on se servoit au lieu de circum, & de ire ; or comme am étoit en latin une voyelle nasale, qui étoit même élidée dans les vers, le b a été ajoûté entre am & ire, euphoniae causâ.
On dit en latin prosum, prosumus, profui ; ce verbe est composé de la préposition pro, & de sum : mais si après pro, le verbe commence par une voyelle, alors le méchanisme de la parole ajoûte un d, prosum, pro-d-es, pro-d-est, pro-d-eram, &c. On peut faire de pareilles observations en d'autres langues ; car il ne faut jamais perdre de vûe que les hommes sont par-tout des hommes, & qu'il y a dans la nature uniformité & variété. (F)
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BAILLER | v. neut. respirer en ouvrant la bouche extraordinairement & involontairement. Bâiller d'ennui, bâiller de sommeil. V. BAILLEMENT ci-dessus. (L)
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BAILLET | adj. (Manége) cheval baillet, est celui qui a le poil roux tirant sur le blanc. (V)
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BAILLEU | ou BELLE, ville de France, au comté de Flandres. Long. 20. 25. lat. 50. 45.
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BAILLEUR | S. m. terme de Pratique, est celui des deux parties contractantes dans un bail, qui loue ou afferme sa propre chose. Il est opposé à preneur, Voy. PRENEUR. (H)
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BAILLI | S. m. (Hist. mod. & Jurisprud.) on entend en général par ce mot, un officier chargé de rendre la justice dans un certain district appellé bailliage. Voyez BAILLIAGE.
Ce mot est formé de baile, vieux terme qui signifie gouverneur, du latin bajulus qui a la même signification.
Pasquier assûre que les baillis étoient originairement une sorte de subdélégués, que l'on envoyoit dans les provinces pour examiner si les comtes, qui étoient alors les juges ordinaires, rendoient exactement la justice. Loiseau rapporte plus vraisemblablement l'origine des baillis, à l'usurpation & à la négligence des grands seigneurs, qui s'étant emparés de l'administration de la justice, & étant trop foibles pour ce fardeau, s'en déchargerent sur des députés qu'on appella baillis. Ces baillis eurent d'abord l'inspection des armes & l'administration de la justice & des finances : mais comme ils abuserent de leur pouvoir, ils en furent insensiblement dépouillés, & la plus grande partie de leur autorité fut transferée à leurs lieutenans, qui étoient gens de robe : en France les baillis ont encore une ombre de leurs anciennes prérogatives, & sont considérés comme les chefs de leurs districts : c'est en leur nom que la justice s'administre ; c'est devant eux que se passent les contrats & les autres actes, & ce sont eux qui ont le commandement des milices.
C'est de-là que les baillis d'Angleterre ont pris leur nom & leur office : comme il y a en France huit parlemens qui sont des cours suprèmes, des arrêts desquels il n'y a point d'appel ; & que dans le ressort de plusieurs parlemens ou de différentes provinces, la justice est rendue par des baillis ou du moins par leurs lieutenans : de même il y a en Angleterre différens comtés, dans lesquels la justice est administrée par un vicomte ou sherif, qui paroît vraisemblablement avoir été appellé bailli, & son district bailliage.
Le bailli dans l'origine étoit donc un seigneur, qui avoit dans l'étendue de son bailliage, l'administration de la justice, le commandement des armes & le maniement des finances. De ces trois prérogatives, il ne leur reste plus que le commandement du ban & de l'arriere-ban. Quant à l'administration de la justice, ce ne sont plus que des juges titulaires. Les sentences & les commissions s'expédient bien en leur nom : mais ce sont leurs lieutenans de robe qui rendent la justice. Les baillis des siéges particuliers ressortissans au bailliage général, ne sont proprement que les lieutenans de ceux-là.
On distingue de ces baillis royaux, les baillis seigneuriaux par la dénomination de hauts-justiciers. Quelques-uns de ceux-ci ressortissent aux bailliages royaux, lesquels ressortissent au parlement ; mais il y a des baillis hauts-justiciers qui ressortissent nuement au parlement, tels sont les baillis des duchés-pairies. (H)
* BAILLI, (Hist. mod.) nom d'un grade ou dignité dans l'ordre de Malte. On en distingue de deux sortes, les baillis conventuels & les baillis capitulaires. Les premiers sont les huit chefs ou piliers de chaque langue. Voyez PILIER & LANGUE. On les appelle conventuels, parce qu'ordinairement ils résident dans le couvent de la religion à Malte.
Les baillis capitulaires, ainsi nommés, parce que dans les chapitres provinciaux, ils ont séance immédiatement après les grands-prieurs, sont des chevaliers qui possedent des bailliages de l'Ordre. La langue de France a deux bailliages, dont les titulaires sont le bailli de la Morée ou commandeur de S. Jean de Latran à Paris, & le grand trésorier ou commandeur de S. Jean en l'île proche de Corbeil. La langue de Provence a le bailliage de Manosque ; & celle d'Auvergne, le bailliage de Lyon. Il y a de même des bailliages & des baillis capitulaires dans les autres langues. Voyez MALTE. (G)
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BAILLIAGE | S. m. (Jurisp.) est tout le territoire où s'étend la jurisdiction d'un bailli. Un bailliage principal en contient pour l'ordinaire plusieurs autres ; lesquels connoissent des mêmes matieres, & ressortissent à ce bailliage principal, lequel connoît exclusivement aux autres en dernier ressort des cas présidiaux : car ces bailliages supérieurs équivalent pour l'autorité aux présidiaux & aux sénéchaussées, dont ils ne different que par le nom. Voyez PRESIDIAL & BAILLI.
On appelle aussi bailliage l'office même du bailli. On donne aussi le même nom au lieu où il tient sa séance. (H)
BAILLIE, s. f. (Jurisprudence) terme de coûtumes, est synonyme à garde-noble ou bourgeoisie. Voyez GARDE.
BAILLISTRE, s. m. (Jurisprudence) vieux terme encore usité dans quelques coûtumes, qui est synonyme à tuteur ou gardien ; & est dérivé de baillie qui dans les mêmes coûtumes signifie tutele ou garde. Voyez BAILLIE.
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BAILLIMORE | (Géog.) ville de la province de Leinster, en Irlande ; elle est entierement environnée d'un marais.
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BAILLIVAGE | ou Balivage, s. m. (Jurisprudence) terme d'eaux & forêts, est l'étiquette ou la marque des baliveaux qui doivent rester sur pié dans les bois coupés ou à couper. Voyez BALIVEAU. (H)
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BAILLOGUES | S. f. c'est ainsi que les Plumassiers nomment des plumes de couleurs mêlées, blanches & noires, par exemple.
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BAILLONNÉ | adj. terme de Blason, il se dit des animaux qui ont un bâton entre les dents, comme les lions, les ours, les chiens, &c.
ourneus au pays de Vaux, d'argent au lion de sable baillonné de gueules à la bordure componnée d'argent & de sable. (V)
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BAILLOTTE | (en terme de Marine) c'est un seau.
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BAINS | S. m. (terme d'Architecture) grands & somptueux bâtimens, élevés par les anciens pour l'ornement & la commodité. Il faut distinguer les bains en naturels ou en artificiels. Les bains naturels sont ou froids comme l'eau des rivieres, ou chauds comme ceux des eaux minérales, propres à la guérison de plusieurs maux. Voyez EAUX MINERALES, & plus bas BAIN en Médecine.
Les bains artificiels, qui étoient plûtôt pour la propreté du corps que pour la santé, étoient chez les anciens des édifices ou publics ou particuliers. Les bains publics ont été en usage en Grece & à Rome : mais les Orientaux s'en servirent auparavant. La Grece connoissoit les bains chauds dès le tems d'Homere, comme il paroît par divers endroits de l'Odyssée ; & ils étoient ordinairement joints aux gymnases ou palestres, parce qu'en sortant des exercices on prenoit le bain. Vitruve a donné une description fort détaillée de ces bains, par laquelle il paroît qu'ils étoient composés de sept pieces différentes, la plûpart détachées les unes des autres, & entremêlées de quelques pieces destinées aux exercices. Ces sept pieces étoient 1°. le bain froid, frigida lavatio, en Grec : 2°. l'elaeothesium, c'est-à-dire la chambre où l'on se frottoit d'huile ; 3°. le lieu de rafraîchissement, frigidarium, 4°. le propnigeum, c'est-à-dire l'entrée ou le vestibule de l'hypocaustum ou du poële ; 5°. l'étuve voûtée pour faire suer, ou le bain de vapeur, appellé tepidarium ; 6°. le bain d'eau chaude, calida lavatio : auxquelles il faudroit joindre l'apodyterion ou garde-robe, si toutefois ce n'est pas la même chose que le tepidarium.
Quant aux bains détachés des palestres, il résulte de la description qu'en fait Vitruve : 1°. que ces bains étoient ordinairement doubles, les uns pour les hommes, les autres pour les femmes ; du moins chez les Romains, qui en ce point avoient plus consulté les bienséances que les Lacédémoniens, chez qui les deux sexes se baignoient pêle-mêle : 2°. que les deux bains chauds se joignoient de fort près, afin qu'on pût échauffer par un même fourneau, les vases de l'un & de l'autre bain : 3°. que le milieu de ces bains étoit occupé par un grand bassin, qui recevoit l'eau par divers tuyaux, & dans lequel on descendoit par le moyen de quelques degrés ; 4°. ce bassin étoit environné d'une balustrade, derriere laquelle régnoit une espece de corridor, schola, assez large, pour contenir ceux qui attendoient que les premiers venus sortissent du bain : 5°. que les deux étuves, appellées laconicum & tepidarium, étoient jointes ensemble : 6°. que ces lieux étoient arrondis au compas, afin qu'ils reçussent également à leur centre la force de la vapeur chaude, qui tournoit & se répandoit dans toute leur cavité : 7°. qu'ils avoient autant de largeur que de hauteur jusqu'au commencement de la voûte, au milieu de laquelle on laissoit une ouverture pour donner du jour, & on y suspendoit avec des chaînes un bouclier d'airain, qu'on haussoit ou baissoit à volonté, pour augmenter ou diminuer la chaleur ; 8°. que le plancher de ces étuves étoit creux & suspendu pour recevoir la chaleur de l'hypocauste, qui étoit un grand fourneau maçonné dessous, que l'on avoit soin de remplir de bois & d'autres matieres combustibles, & dont l'ardeur se communiquoit aux étuves à la faveur du vuide qu'on laissoit sous leurs planchers : 9°. que ce fourneau servoit non-seulement à échauffer les deux étuves, mais aussi une autre chambre appellée vasarium, située proche de ces mêmes étuves & des bains chauds, & dans laquelle étoient trois grands vases d'airain, appellés miliaria à cause de leur capacité ; l'un pour l'eau chaude, l'autre pour la tiede, & le troisieme pour la froide. De ces vases partoient des tuyaux qui correspondant aux bains, y portoient par le moyen d'un robinet l'eau, suivant les besoins de ceux qui se baignoient.
A l'égard de l'arrangement ou disposition de ces divers appartemens des bains, voici ce qu'on en sait : on y voyoit d'abord un grand bassin ou vivier appellé en grec , en latin natatio & piscina, qui occupoit le côté du nord, & où l'on pouvoit non-seulement se baigner, mais même nager très-commodément. Les bains des particuliers avoient quelquefois de ces piscines, comme il paroît par ceux de Pline & de Ciceron. L'édifice des bains étoit ordinairement exposé au midi, & avoit une face très-étendue, dont le milieu étoit occupé par l'hypocauste, qui avoit à droite & à gauche une suite de quatre pieces semblables des deux côtés, & disposées de maniere qu'on pouvoit passer facilement des unes dans les autres. Ces pieces nommées en général balnearia, étoient celles que nous avons décrites ci-dessus. La salle du bain chaud étoit une fois plus grande que les autres, à cause du grand concours du peuple qui y abordoit, & du long séjour qu'on y faisoit d'ordinaire.
Les anciens prenoient ordinairement le bain avant souper, & il n'y avoit que les voluptueux qui se baignassent à la suite de ce repas. Au sortir du bain, ils se faisoient frotter d'huiles ou d'onguens parfumés par des valets nommés alyptae ou unctuarii. Les bains, si on en croit Pline, ne furent en usage à Rome que du tems de Pompée, dès lors les édiles eurent soin d'en faire construire plusieurs. Dion, dans la vie d'Auguste, rapporte que Mecene fit bâtir le premier bain public : mais Agrippa, dans l'année de son édilité, en fit construire cent soixante & dix. A son exemple, Neron, Vespasien, Tite, Domitien, Severe, Gordien, Aurelien, Diocletien, & presque tous les empereurs, qui chercherent à se rendre agréables au peuple, firent bâtir des étuves & des bains avec le marbre le plus précieux, & dans les regles de la plus belle architecture, où ils prenoient plaisir à se baigner avec le peuple : on prétend qu'il y avoit jusqu'à 800 de ces édifices répandus dans tous les quartiers de Rome.
La principale regle des bains étoit d'abord de ne les ouvrir jamais avant deux ou trois heures après midi, ensuite ni avant le soleil levé, ni après le soleil couché. Alexandre Severe permit pourtant qu'on les tînt ouverts la nuit dans les grandes chaleurs de l'été, & ajoûta même la libéralité à la complaisance, en fournissant l'huile qui brûloit dans les lampes. L'heure de l'ouverture des bains étoit annoncée au son d'une espece de cloche : le prix qu'il falloit payer pour entrer aux bains étoit très-modique, ne montant qu'à la quatrieme partie d'un as, nommée quadrans, ce qui valoit à peu près un liard de notre monnoie. Le bain gratuit étoit au nombre des largesses que les empereurs faisoient au peuple à l'occasion de quelque réjoüissance publique : mais aussi dans les calamités on avoit soin de lui retrancher cette commodité, ainsi que le plaisir des spectacles. (G)
* Tout se passoit dans les bains avec modestie : les bains des femmes étoient entierement séparés de ceux des hommes ; & c'auroit été un crime, si l'un des sexes avoit passé dans le bain de l'autre. La pudeur y étoit gardée jusqu'à ce scrupule, que même les enfans puberes ne se baignoient jamais avec leurs peres, ni les gendres avec leurs beaux-peres. Les gens qui servoient dans chaque bain, étoient du sexe auquel le bain étoit destiné. Mais quand le luxe & la vie voluptueuse eurent banni la modestie, & que la débauche se fut glissée dans toute la ville, les bains n'en furent pas exempts. Les femmes s'y mêlerent avec les hommes, & il n'y eut plus de distinction ; plusieurs personnes de l'un & l'autre sexe n'y alloient même que pour satisfaire leur vûe, ou cacher leurs intrigues : ils y menoient les esclaves ou servantes pour garder les habits. Les maîtres des bains affectoient même d'en avoir de plus belles les unes que les autres, pour s'attirer un plus grand nombre de chalans.
Tout ce que les magistrats purent faire d'abord, ce fut de défendre à toutes personnes de se servir de femmes ou de filles pour garder les habits, ou pour rendre les autres services aux bains, à peine d'être notées d'infamie. Mais l'empereur Adrien défendit absolument ce mêlange d'hommes & de femmes sous de rigoureuses peines. Marc Aurele & Alexandre Severe confirmerent cette même loi ; & sous leur regne, les bains des hommes & ceux des femmes furent encore une fois séparés, & la modestie y fut rétablie.
Les ustensiles ou instrumens des bains, outre les vases propres à faire chauffer & à verser l'eau, étoient les baignoires, les étrilles. Voyez BAIGNOIRE, ETRILLE.
Les bains particuliers, quoique moins vastes que les bains publics, étoient de la même force, mais souvent plus magnifiques & plus commodes, ornés de meubles précieux, de glaces, de marbres, d'or & d'argent. On pouvoit s'y baigner à toute heure ; & l'on rapporte des empereurs Commode & Galien qu'ils prenoient le bain cinq ou six fois le jour. Mém. de l'Acad. des Belles Lettres, tome I. & III. (G)
* Parmi nous, les bains publics sur la riviere, ne sont autre chose que de grands bateaux appellés toue, faits de sapin, & couverts d'une grosse toile, autour desquels il y a de petites échelles attachées par des cordes, pour descendre dans un endroit de la riviere où l'on trouve des pieux enfoncés d'espace en espace, qui soûtiennent ceux qui prennent le bain.
Nous appellons bains domestiques ceux que l'on pratique dans la maison des grands ou des particuliers : ils se prennent dans des baignoires de métal ; dans lesquelles l'eau est amenée par des conduits de plomb qui descendent d'un réservoir un peu élevé, rempli de l'eau du ciel, ou par le secours d'une pompe. Ces tuyaux garnis de robinets, viennent avant d'entrer dans la baignoire, se distribuer dans une cuve placée sur un fourneau, qui la tient dans un degré de chaleur convenable.
Ces bains sont composés d'un appartement distribué en plusieurs pieces : savoir d'une anti-chambre pour tenir les domestiques pendant que le maître est au bain, d'une chambre à lit pour s'y coucher au sortir du bain, d'une salle où est placée la baignoire, d'un cabinet à soûpape ou d'une garde-robe, d'un cabinet de toilette, d'une étuve pour sécher les linges & chauffer l'eau, d'un dégagement, &c. Il est assez d'usage de placer deux baignoires & deux lits dans ces appartemens, ces bains se prenant ordinairement de compagnie lorsqu'on est en santé.
Ces bains doivent avoir un petit jardin particulier pour faire prendre de l'exercice, sans être vû, aux personnes qui prennent ces bains plûtôt par indisposition que par propreté.
Ces appartemens sont ordinairement décorés de lambris, de peintures, de dorure, & de glaces. C'est dans cette occasion qu'un Architecte qui a du génie, peut donner carriere à son imagination, ces sortes de pieces n'étant pas susceptibles de la sévérité des regles de l'art. Au contraire j'estime que c'est dans ces sortes de pieces seulement qu'il convient de répandre de l'élegance & de l'enjouement : dans l'ordonnance de la décoration de ces petits appartemens, les Vateaux, les Lancrets, peuvent y donner le ton, aussi-bien que les ornemens arabesques, les plans de Chinois, les magots, &c. Tout est de leur ressort, pourvû qu'il y soit ajusté avec goût & discernement. (P)
BAIN de santé ou de propreté (en Medecine). Les Medecins toûjours attentifs à chercher des secours contre les maladies, remarquerent les bons effets qu'il produisoit, & le mirent au nombre de leurs remedes.
On ordonna le bain de différentes façons, c'est-à-dire, qu'il y en eût de chauds & de froids, de généraux & de particuliers.
Dans les bains généraux, soit chauds ou froids, le corps est plongé jusqu'au-dessus des épaules ; dans les particuliers, on ne trempe que la moitié du corps, ce qui s'appelle demi-bain. Celui où on ne trempe que les piés & une partie des jambes, s'appelle pédiluve. On peut aussi rapporter aux bains particuliers les diverses especes de fomentations, & les douches, Voyez FOMENTATION & DOUCHE.
Les différentes qualités de l'eau, que l'on employe pour le bain, en changent la propriété. Dans les cas où on a intention de ramollir les fibres, & de procurer quelque relâchement dans toute l'habitude du corps, le bain chaud d'eau douce simple, ou mêlée avec des médicamens émolliens, satisfera à cette indication.
Quand il est question de resserrer la texture des fibres, de leur rendre le ressort qu'elles auront perdu, rien de plus convenable que le bain d'eau froide ; je déduirai par la suite les raisons de cette diversité.
On a encore divisé les bains en domestiques, qui sont ceux que l'on prend chez soi ou chez les Baigneurs, & que l'on compose de plusieurs façons ; il y en a de lait, de décoctions de plantes émollientes, d'eau de son, &c. en bains d'eaux minérales, qui sont ou thermales ou acidules, dont les effets sont différens, selon les principes que ces eaux contiennent : en bains d'eau de riviere, de fleuve ou de mer ; & en bains secs, tels que ceux d'esprit de vin ; ceux de vapeurs du cinabre, que l'on nomme fumigation, Voyez FUMIGATION : ceux de marc de raisin, de cendres, de sels, de sable, &c. auxquels on peut encore joindre l'application des boues ou bourbes sur tout le corps, qui se pratique en quelques endroits.
Pour expliquer l'action des bains, il faut d'abord poser pour principe que l'eau qui en fait la base, penetre par sa fluidité presque tous les corps, & surtout ceux dont la texture est assez lâche, pour que l'eau puisse trouver entre les fibres dont ils sont composés, des interstices que l'on appelle pores. Voyez PORE.
Le corps humain est un de ceux dans lesquels on en remarque en plus grand nombre ; la déperdition de substance à laquelle il est sujet par la transpiration, prouve assez ce que j'avance. Lorsque le corps se trouve exposé à un certain volume d'eau capable de le presser de tous les côtés, & dont chaque goutte a une pesanteur naturelle, elle s'insinue dans chacun de ses interstices, dont elle augmente la capacité par le relâchement que procure son humidité : parvenue après un certain tems jusqu'à l'intérieur du corps, elle se mêle avec le sang ; aidée d'ailleurs par les contractions réitérées du coeur, qui augmentent à proportion de la pression, elle détruit la cohésion trop fortes des molécules du sang, le fait circuler avec plus de facilité, & le rend plus propre aux secrétions ; augmente celle des esprits animaux, si nécessaire pour l'entretien des forces & l'exécution de toutes les fonctions, en même tems qu'elle met le sang en état de se dépouiller des parties nuisibles que son trop grand épaississement, ou sa trop grande lenteur à circuler, y avoient amassées.
Ces principes posés, il ne sera pas difficile de déduire les raisons des phénomenes qu'on observe, selon le degré de chaleur ou de froid des eaux qu'on employe, & la différence des matieres dont elles sont imprégnées. En augmentant la chaleur de l'eau simple, on lui donne un degré d'élasticité dont elle est redevable aux parties ignées qu'elle contient, & qui la rendent plus pénétrante. Lorsqu'elle se trouve chargée de parties ferrugineuses, & chaudes en même tems, son ressort & son poids sont augmentés en raison réciproque de sa chaleur, & de la quantité de fer dont elle est chargée, & qui la rend propre à guérir plusieurs maladies qui ont pour cause l'embarras du sang dans ses couloirs. Si, au contraire, on employe l'eau froide, les effets en seront différens ; car quoique la fluidité & l'humidité soient la même, le froid loin de dilater les pores de la peau, les resserre en quelque sorte, empêche une trop grande évacuation par la transpiration, porte le calme dans la circulation du sang, lorsqu'elle est déréglée, & détruit par ce moyen les causes des maladies occasionnées par ce dérangement. Willis nous en donne un exemple dans son traité de la Phrénésie, à l'occasion d'une fille qui fut guérie de cette maladie par un seul bain froid que l'on lui fit prendre : cette malade étoit dans cet état depuis plusieurs jours ; les saignées, les délayans, les amples boissons émulsionnées, &c. n'avoient pas pû diminuer la fievre violente dont elle étoit attaquée, & la soif qui la dévoroit. Le bain d'eau simple pris dans la riviere pendant un quart-d'heure, calma tous les accidens, lui procura un sommeil tranquille, & elle fut guérie sans avoir besoin d'autres remedes. On trouve dans la pratique plusieurs exemples de ces guérisons miraculeuses arrivées par hasard ; car souvent des gens attaqués de phrénésie se sont jettés d'eux-mêmes dans des fontaines ou bassins, & ont été guéris.
Ce que l'on peut encore assûrer, c'est que l'usage des bains de riviere, pendant les chaleurs de l'été, est un sûr préservatif contre les maladies qui regnent ordinairement dans cette saison.
Il reste à présent à chercher la raison des effets du bain de mer, que l'on regarde comme le remede le plus salutaire contre la rage, & que je tâcherai de déduire des mêmes principes : ce qui ne sera pas impossible, en faisant attention d'abord, que la fluidité & l'humidité que nous trouvons dans l'eau commune, se rencontre dans l'eau de mer ; que sa pesanteur est augmentée par le sel qu'elle contient, & qui lui donne une qualité beaucoup plus pénétrante ; enfin, que la terreur du malade, née de l'appareil & du danger où il se trouve lorsqu'on le plonge, fait un contraste capable de rétablir le déreglement de l'imagination, qui est aussi dérangée dans ce cas que dans la phrénésie la plus violente : d'ailleurs, on prend la précaution d'aller à la mer pour y être plongé, lorsque l'on a le soupçon d'être attaqué de la rage, sans en avoir de certitude. Voyez RAGE.
On conçoit aisément que les bains de vapeurs pénetrent la texture de la peau, & parviennent par les pores jusqu'à l'intérieur, où elles occasionnent à peu près les mêmes effets que si l'on avoit appliqué les médicamens dont on les tire ; c'est ce que l'on éprouve de la part de l'esprit de vin, de celui de vapeurs de cinabre, qui excitent même quelquefois la salivation, effet que produisent les frictions mercurielles ; enfin celui de marc de raisin, en pénétrant soit par sa chaleur, soit par les parties spiritueuses qu'il contient, donne de nouveau aux fibres le ressort qu'elles avoient perdu, & les rétablit dans leur état naturel.
On doit prendre les précautions suivantes pour tirer quelque fruit de l'usage du bain, de quelque espece que ce soit : il faut se faire saigner & purger, le prendre le matin à jeun, ou si c'est le soir, quatre heures après le repas, afin que la digestion des alimens soit entierement finie ; se reposer, ou ne faire qu'un exercice très-modéré après que l'on est sorti du bain ; enfin ne se livrer à aucun excès pendant tout le tems que l'on le prendra, & dans quelque saison que ce soit, ne point se baigner lorsque l'on est fatigué par quelque exercice violent. Voy. EAUX, EAUX THERMALES, EAUX ACIDULES ou FROIDES. (N)
BAIN, en Chimie, se dit d'une chaleur modérée par un intermede mis entre le feu & la matiere sur laquelle on opere, & ce bain est différemment nommé, selon les différens intermedes qu'on y employe.
C'est pourquoi on dit bain de mer, ou par corruption bain-marie, lorsque le vase qui contient la matiere sur laquelle on opere, est posé dans un autre vaisseau plein d'eau, desorte que le vase soit entouré d'eau, & que le vaisseau qui contient l'eau, soit immédiatement posé sur le feu. Voyez nos figures de chimie. On pourroit aussi employer d'autres fluides que l'eau, comme l'huile, le mercure même, pour transmettre différentes chaleurs, ce qui feroit différentes especes de bain-marie.
On dit bain de vapeur, lorsque le vase qui contient la matiere est seulement exposé à la vapeur de l'eau qui est sur le feu. Voyez nos figures. Le bain de vapeur dans un vaisseau ouvert, ou qui laisse échapper la vapeur qui s'exhale de l'eau, est moins fort, c'est-à-dire donne une chaleur plus douce que ne la donne le bain-marie de l'eau bouillante : mais si le vaisseau est fermé exactement, & qu'on pousse le feu dessous, il devient plus fort que le bain-marie ; il tient alors de la force de la machine de Papin, ce qui fait voir qu'on peut faire un bain de vapeur très-fort, au lieu que le bain-marie ne peut avoir que les différens degrés de chaleur de l'eau tiede, de l'eau chaude, de l'eau frémissante, & de l'eau bouillante. Il est vrai que la chaleur de l'eau bouillante n'est point une chaleur invariable ; elle est différente selon que l'eau est différente, & suivant la différente pesanteur de l'air. L'eau bouillante qui tient en dissolution des sels, est plus chaude qu'une eau bouillante qui seroit simple & pure. Voyez DIGESTOIRE.
La chaleur de l'eau bouillante est plus grande quand le barometre est plus élevé, c'est-à-dire quand l'air est plus pesant ; & elle est moindre quand le barometre est plus bas, c'est-à-dire quand l'air est plus leger. L'eau bouillante, sur le sommet d'une haute montagne, a moins de chaleur que l'eau bouillante dans un fond, parce que plus l'air est pesant, & plus il presse sur la surface de l'eau, & par conséquent plus il s'oppose à l'échappement des parties de feu qui sont en mouvement dans l'eau, & qui la traversent. C'est pourquoi la plus grande chaleur que puisse avoir l'eau, n'est pas dans le tems qu'elle bout le plus fort, c'est dans le premier instant qu'elle commence à bouillir. Ces connoissances ne sont pas inutiles : il faut y faire attention pour certaines expériences.
On dit bain de sable ou de cendre, lorsqu'au lieu d'eau on met du sable ou de la cendre. Voyez nos figures de Chimie.
Bains vaporeux, sont termes de Medecine qui ne signifient autre chose que ce qu'on entend en Chimie par bain de vapeur. Le bain vaporeux est une espece d'étuve qui se fait en exposant le malade à la vapeur chaude d'une eau médicinale, ou de décoctions d'herbes appropriées à la maladie qu'on veut guérir. (M)
BAIN, en Chimie & à la Monnoie ; on dit qu'un métal est en bain, lorsque le feu l'a mis en état de fluidité : c'est alors qu'on le remue ou qu'on le brasse avec des cuillieres de fer, si c'est argent ou cuivre : pour l'or, il ne se brasse point avec le fer, mais avec une espece de quille faite de terre à creuset, & cuite. Voyez BRASSER, BRASSOIR, QUILLE.
BAIN, est un terme générique ; il se prend chez un grand nombre d'Artistes, & pour les liqueurs, & pour les vaisseaux dans lesquels ils donnent quelques préparations à leurs ouvrages.
BAIN ou BOUIN, terme d'Architecture ; on dit maçonner à bain ou à bouin de mortier, lorsqu'on pose les pierres, qu'on jette les moëllons, & qu'on assied les pavés en plein mortier. (P)
BAIN, mettre à bain, en Maçonnerie, c'est employer à la liaison des parties d'un ouvrage, la plus grande quantité de plâtre qu'il est possible ; on se sert du mot bain, parce qu'alors les pierres ou moëllons sont entierement couverts & enduits de tous côtés.
BAIN, c'est ainsi que les Plumassiers appellent une poele de cuivre battu dans laquelle ils plongent ou jettent les plumes qu'ils veulent mettre en couleur. Ils donnent aussi ce nom à la matiere colorante contenue dans la poele.
BAIN, se dit chez les Teinturiers, ou de la cuve qui contient les ingrédiens dans lesquels on met les étoffes pour les colorer, ou des ingrédiens même contenus dans la cuve ; ainsi l'on dit mettre au bain, & l'on dit aussi bain d'alun, bain de cochenille, &c.
BAIN, (chevaliers du) Hist. mod. ordre militaire institué par Richard II. roi d'Angleterre, qui en fixa le nombre à quatre, ce qui n'empêcha pas Henri IV. son successeur de l'augmenter de quarante-deux ; leur devise étoit, tres in uno, trois en un seul, pour signifier les trois vertus théologales. Leur coûtume étoit de se baigner avant que de recevoir les éperons d'or : mais cela ne s'observa que dans le commencement, & s'abolit ensuite peu à peu, quoique le bain fût l'origine du nom de ces chevaliers, & que leurs statuts portassent que c'étoit pour acquérir une pureté de coeur & avoir l'ame monde, c'est-à-dire pure. L'ordre de chevalier du bain ne se confere presque jamais, si ce n'est au couronnement des rois, ou bien à l'installation d'un prince de Galles ou d'un duc d'Yorck. Ils portent un ruban rouge en baudrier. Cambden & d'autres écrivains disent que Henri IV. en fut l'instituteur en 1399, à cette occasion : ce prince étant dans le bain, un chevalier lui dit que deux veuves étoient venues lui demander justice ; & dans ce moment il sauta hors du bain, en s'écriant, que la justice envers ses sujets étoit un devoir préférable au plaisir de se baigner, & ensuite il créa un ordre des chevaliers du bain : cependant quelques auteurs soûtiennent que cet ordre existoit long-tems avant Henri IV. & le font remonter jusqu'au tems des Saxons. Ce qu'il y a de certain, c'est que le bain, dans la création des chevaliers, avoit été long-tems auparavant en usage dans le royaume de France, quoiqu'il n'y eût point d'ordre de chevaliers du bain.
L'ordre des chevaliers du bain, après avoir été comme enseveli pendant bien des années, commença de renaître sous le regne de Georges premier, qui en créa solennellement un grand nombre. (G)
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BAIONE | Voyez BAYONE.
BAIONE, dite Baïona de Galizia, (Géog. anc. & mod.) ville maritime d'Espagne dans la Galice, à l'embouchure du Minho. Quelques Géographes la prennent pour les Aquae Celinae de Ptolomée ; d'autres veulent que ce soit Orense, sur la même riviere que Baïone : sa long. est 9. & sa lat. 41. 54.
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BAIRAM | S. m. (Hist. mod.) nom donné à la grande fête annuelle des Mahométans. Voyez FETE, &c. Quelques auteurs écrivent ce mot plus conformément à l'ortographe orientale beiram ; c'est originairement un mot turc, qui signifie à la lettre un jour de fête, ou une solennité. C'est la pâque des Turcs.
Les Mahométans ont deux bairams, le grand & le petit, que Scaliger, Erpenius, Ricaut, Hyde, Chardin, Bobovius, & d'autres écrivains Européens, prennent ordinairement l'un pour l'autre, donnant à ce que les Turcs appellent le petit bairam, le nom de grand ; & au contraire. Le petit bairam dure trois jours, pendant lesquels tout travail cesse, & l'on s'envoye des présens l'un à l'autre avec beaucoup de marques de joie. Si le lendemain du ramadhan se trouve si nébuleux & couvert qu'on ne puisse pas voir la nouvelle lune, on remet le bairam au lendemain : il commence ce jour-là, quand même la lune seroit encore cachée, & il est annoncé par des décharges de canon au serrail, & au son des tambours & des trompettes dans les places publiques. En célébrant cette fête, les Turcs font dans leurs mosquées quantité de cérémonies, ou plûtôt de simagrées bisarres, & finissent par une priere solemnelle contre les infideles, dans laquelle ils demandent que les princes Chrétiens soient extirpés ; qu'ils s'arment les uns contre les autres, & qu'ils donnent ainsi occasion à la loi Mahométane de s'étendre. On se pardonne mutuellement les injures, & l'on s'embrasse en disant, Dieu te donne la bonne pâque.
Autant la rigueur du ramadhan a été extrème, autant la débauche & l'intempérance regnent pendant les jours du bairam : ce ne sont que festins & réjoüissances, tant dans le serrail où le Sultan admet les grands de l'empire à lui baiser la main, & marche avec eux en pompe jusqu'à la grande mosquée, que dans la ville, où tous les Turcs jusqu'aux plus pauvres, tuent des moutons, auxquels ils donnent le nom d'agneau paschal, non sur le même fondement que les Juifs, mais en mémoire du sacrifice d'Abraham, dans lequel, disent-ils, l'ange Gabriel apporta du ciel un mouton noir, qui depuis très-long-tems avoit été nourri en paradis, & qu'il mit en la place d'Isaac. Voyez RAMADHAN. (G)
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BAISÉ | bout baisé. On donne, dans les manufactures où l'on tire la soie, le nom de bout baisé à une portion de fils de soie, composée de deux fils ou davantage, qui se sont appliqués l'un sur l'autre, selon leur longueur pendant le tirage, & se sont collés ensemble en se sechant. Il est très important d'éviter ce défaut. Une soie où les baisemens de fils auroient été fréquens, se devideroit avec peine. Voyez l'article TIRAGE DE SOIE.
BAISE, adj. (Passement.) se dit du tissu d'un ouvrage qui a été peu frappé par le battant, & où la trame n'est pas serrée. Le baisé est positivement le contraire de frappé. Voyez FRAPPE.
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BAISE-MAIN | S. m. (Hist. anc. & mod.) marque d'honneur ou de respect presqu'universellement répandue par toute la terre, & qui a été également partagée entre la religion & la société. Dès les tems les plus reculés, on saluoit le soleil, la lune, & les étoiles, en baisant la main. Job se défend de cette superstition : si vidi solem.... aut lunam.... & osculatus sum manum meam ore meo. On rendoit le même honneur à Baal. Lucien, après avoir parlé des différentes sortes de sacrifices que les personnes riches offroient aux dieux, ajoûte que les pauvres les adoroient par de simples baise-mains. Pline de son tems mettoit cette même coûtume au nombre des usages dont on ignoroit l'origine : In adorando, dit-il, dexteram ad osculum referimus. Dans l'Eglise même, les évêques & les officians donnent leur main à baiser aux autres ministres qui les servent à l'autel.
Dans la société, l'action de baiser la main a toûjours été regardée comme un formulaire muet, pour assûrer les réconciliations, demander des graces, remercier de celles qu'on a reçues, marquer sa vénération à ses supérieurs. Dans Homere, le vieux Priam baise les mains d'Achille, lorsqu'il le conjure de lui rendre le corps de son fils Hector. Chez les Romains, les tribuns, les consuls, les dictateurs donnoient leur main à baiser à leurs inférieurs, ce que ceux-ci appelloient accedere ad manum. Sous les empereurs cette conduite devint un devoir essentiel, même pour les grands ; car les courtisans d'un rang inférieur étoient obligés de se contenter d'adorer la pourpre en se mettant à genoux, pour toucher la robe du prince avec la main droite, qu'ils portoient ensuite à leur bouche : honneur qui ne fut ensuite accordé qu'aux consuls & aux premiers officiers de l'empire, les autres se contentant de saluer le prince de loin en portant la main à la bouche, comme on le pratiquoit en adorant les dieux.
La coûtume de baiser la main du prince est en usage dans presque toutes les cours de l'Europe, & sur-tout en Espagne, où dans les grandes cérémonies les grands sont admis à baiser la main du roi. Dapper, dans son Afrique, assûre que les Negres sont en possession de témoigner leurs respects pour leurs princes ou chefs par des baise-mains. Et Fernand Cortez trouva cette pratique établie au Mexique, où plus de mille Seigneurs vinrent le saluer en touchant d'abord la terre avec leurs mains, & les portant ensuite à leur bouche. (G)
BAISE-MAIN, en Droit, signifie l'offrande qu'on donne aux curés. Les curés de Paris, dit-on en ce sens, n'ont point la dixme ; ils n'ont que le baise-main. Cette expression vient de ce qu'autrefois en se présentant à l'offrande, on baisoit la main du célébrant. (H)
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BAISER | terme de Géométrie. On dit que deux courbes ou deux branches de courbes se baisent, lorsqu'elles se touchent en tournant leurs concavités vers le même côté ; c'est-à-dire de maniere que la concavité de l'une regarde la convexité de l'autre ; mais si l'une tourne sa concavité d'un côté, & l'autre d'un autre côté, ou ce qui revient au même, si les deux convexités se regardent, alors on dit simplement qu'elles se touchent. Ainsi le point baisant & le point touchant sont différens.
On employe plus particulierement le terme de baiser, pour exprimer le contact de deux courbes qui ont la même courbure au point de contact, c'est-à-dire le même rayon de développée. Le baisement s'appelle encore alors osculation. V. OSCULATION, DEVELOPPEE, COURBURE, &c. (O)
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BAISSAN | (Géog.) ville d'Afrique dans la Barbarie, à seize milles de Tripoli.
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BAISSER | abaisser, (Gramm.) Baisser se dit des objets qu'on veut placer plus bas, dont on a diminué la hauteur, & de certains mouvemens du corps. On baisse une poutre, on baisse les yeux. Abaisser se dit des choses faites pour en couvrir d'autres ; abaisser le dessus d'une cassette ; abaisser les paupieres. Exhausser, élever, sont les opposés de baisser ; lever, relever, sont les opposés d'abaisser. Baisser est quelquefois neutre, abaisser ne l'est jamais. On baisse en diminuant ; on se baisse en se courbant : on s'abaisse en s'humiliant. Les rivieres baissent ; les grandes personnes sont obligées de se baisser pour passer par des endroits moins élevés qu'eux ; il est quelquefois dangereux de s'abaisser. Synon. Franç.
BAISSER les hanches, se dit, en Manege, du cheval. Voyez HANCHES.
BAISSER la lance, voyez LANCE. (V)
* BAISSER la vigne, (Agriculture) c'est lier les branches taillées à l'échalas.
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BAISSIERE | S. f. (Vinaigrier) c'est ainsi qu'on appelle cette liqueur trouble & chargée qui couvre la lie de l'épaisseur de quelques lignes, plus ou moins, lorsqu'un tonneau d'huile ou de liqueur fermentée, quelle qu'elle soit, tire à sa fin. On dit baissiere de vin, de cidre, de biere.
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BAISSOIRS | S. m. pl. c'est le nom qu'on donne dans les Salines aux réservoirs ou magasins d'eau. Le bâti en est de bois de chêne & de madriers fort épais, contenus par de pareilles pieces de chêne qui leur sont adossées par le milieu. La superficie de ces magasins est garnie & liée de poutres aussi de chêne, d'un pié d'épaisseur, & placées à un pié de distance les unes des autres. Les planches & madriers qui les composent, sont garnis dans leurs joints de chantouilles de fer, de mousse & d'étoupe, poussées à force avec le ciseau, & goudronnées. Le bâti est élevé au-dessus du niveau des poeles. Ce magasin d'eau est divisé en deux baissoirs, ou parties inégales, qui abreuvent à Moyenvic cinq poeles par dix conduits. Voy. la quantité d'eau & le toisé de ces baissoirs, à l'article SALINE. Elles sont élevées au-dessus du niveau des poeles, & supportées par des murs d'appui distans les uns des autres de trois piés ou environ ; ce qui en assûre la solidité. Voyez Pl. I. des Salines ; 8, 8, les auges qui conduisent les eaux aux baissoirs.
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BAIVE | S. m. (Hist. mod.) faux dieu des Lapons idolâtres, qu'ils adorent comme l'auteur de la lumiere & de la chaleur. On dit communément que c'est le soleil ; d'autres croyent que c'est le feu ; & quelques-uns rapportent qu'autrefois parmi ces peuples, le grand dieu Thor étoit appellé Thiermes ou Aijke, quand ils l'invoquoient pour la conservation de leur vie, & pour être défendus contre les insultes des démons, mais qu'il étoit nommé Baive lorsqu'ils lui demandoient de la lumiere & de la chaleur. Ces idolâtres n'ont aucune figure particuliere de ce dieu, soit parce qu'il est visible de lui-même, ou plûtôt parce que selon les plus intelligens dans les mysteres de cette superstition, Thor & Baive, ne sont qu'une même divinité, adorée sous différens aspects. Scheffer, hist. de Laponie. (G)
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BAJAMO | (LE) Géog. petite contrée de l'île de Cuba, une des Antilles. Voyez ANTILLES.
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BAJARIA | (Géog. anc. & mod.) riviere de Sicile, qu'on appelle encore Amirati : elle se jette dans la mer de Toscane à côté de Palerme. C'est l'Eleuthertus des anciens.
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BAJOIRE | S. f. à la Monnoie, c'est une piece ou médaille qui a pour effigie deux têtes de profil, qui semblent être appuyées l'une sur l'autre, telle que l'on en voit de Louis & de Carloman, de Henri IV. & de Marie de Medicis.
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BAJON | S. m. on appelle ainsi sur les rivieres la plus haute des planches ou des barres du gouvernail d'un bateau foncet. (Z)
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BAJOUE | ou COUSSINETS, s. f. plur. (Arts méchaniques) ce sont des éminences ou bossages, qui tiennent aux jumelles d'une machine, telle que le tire-plomb dont les Vitriers se servent pour fondre le plomb qu'ils employent pour les vitres. Voyez TIRE-PLOMB.
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BAJOYER | ou JOUILLIERES, s. f. pl. (Hydraul.) sont les aîles de maçonnerie qui revêtissent l'espace ou la chambre d'une écluse fermée aux deux bouts par des portes ou des vannes que l'on leve à l'aide de cables qui filent sur un treuil, que plusieurs hommes manoeuvrent.
On pratique le long des bajoyers, des contreforts, des enclaves pour loger les portes quand on les ouvre, & des pertuis pour communiquer l'eau d'une écluse des deux côtés, sans être obligé d'ouvrir ses portes. (K)
* On donne aussi, sur les rivieres, le nom de bajoyers aux bords d'une riviere, près les culées d'un pont.
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BAJULE | bajulus, (Hist. anc.) nom d'un magistrat du bas Empire. On croit que c'étoit le nom qu'on donnoit aux personnes chargées de l'éducation du présomptif héritier de la couronne dans l'empire de Constantinople ; & l'on tire ce mot du Latin bajulare, porter ; comme pour signifier que les instituteurs de ce prince l'avoient porté entre leurs bras, & on en distinguoit de plusieurs degrés. Le précepteur portoit le titre de grand bajule, & celui de bajule simplement étoit donné aux sous-précepteurs. Si l'expression n'étoit pas noble, elle étoit du moins énergique pour insinuer que l'éducation d'un prince est un fardeau bien redoutable.
BAJULE, (Hist. mod.) ministre d'état chargé du poids des affaires. Notre histoire remarque que Charlemagne donna Arnoul pour bajule, c'est-à-dire pour ministre à son fils Louis d'Aquitaine ; & les Italiens entendent par bajule d'un royaume, ce que les Anglois nomment protecteur, & ce que nous appellons régent du royaume dans une minorité.
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BAKAN | (Géog.) ville de Perse dans le Chirvan, à l'extrémité du golfe de Guillan, sur la mer Caspienne. Long. 89. lat. 40. 20.
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BAKINGLE | (Géog.) l'une des Philippines, dans l'océan de la Chine ; elle a douze ou quinze lieues de tour.
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BAKISCH | voyez BACAR.
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BALAATH | ou BAALATH, (Géog. sainte) ville de Palestine, dans la tribu de Dan.
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BALADIN | S. m. danseur, farceur, bouffon, qui en dansant, en parlant ou en agissant, fait des postures de bas comique. Le bon goût sembloit avoir banni des spectacles de France ces sortes de caracteres, qui y étoient autrefois si en usage. L'opera comique les y avoit fait revivre. La sagesse du gouvernement en abolissant ce spectacle, aussi dangereux pour les moeurs que préjudiciable au progrès & à la perfection du goût, les a sans-doute bannis pour jamais. Voyez OPERA COMIQUE.
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BALADOIRE | adj. danse baladoire, il se décline : ce sont les danses contre lesquelles les saints canons, les peres de l'Eglise & la discipline ecclésiastique se sont élevés avec tant de force : les Payens mêmes réprouvoient ces danses licencieuses. Les danseurs & les danseuses les exécutoient avec les pas & les gestes les plus indécens. Elles étoient en usage les premiers jours de l'an & le premier jour de mai. Voy. DANSE.
Le pape Zacharie en 744 fit un décret pour les abolir, ainsi que toutes les danses qui se faisoient sous prétexte de la danse sacrée.
Il y a plusieurs ordonnances de nos rois qui les défendent, comme tendantes à la corruption totale des moeurs. Recueil d'édits, ordonnances & déclarations des rois de France. (B)
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BALAGANSKOI | (Géog.) ville des Moscovites dans la Sibérie, partie de la grande Tartarie ; elle est sur la riviere d'Angara, au 114. degré de longit. & au 59. de lat.
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BALAGNE | (LA) Géog. petite contrée septentrionale de l'île de Corse : Calvi en est la capitale.
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BALAGUAT | ou BALAGATE, province d'Asie au Mogol : Aurengabad en est la capitale.
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BALAGUER | (Géog.) ville d'Espagne dans la Catalogne, sur la Segre. Long. 18. 28. lat. 41. 38.
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BALAI | S. m. en général, instrument destiné principalement à ramasser des ordures éparses, & à en nettoyer les corps ou les lieux. Les balais domestiques sont faits, ou de petites branches de bouleau & de genêt attachées avec trois liens d'osier ou de châtaigner, à l'extrémité d'un gros manche de bois long & rond, ou de joncs ficellés & fixés sur le manche avec un clou ; on les poisse sur la ficelle quand ils doivent servir aux cochers & palfreniers ; ou de barbes de roseaux, ou de plumes, ou de crins ou poils de sanglier collés avec de la poix de Bourgogne dans une large patte de bois percée de plusieurs trous, & emmanchée d'un long bâton placé perpendiculairement au milieu de la patte. Ce sont des Bucherons qui font les premiers, & les Vergettiers qui font les seconds. Les balais de bouleau servent à nettoyer les cours, les cuisines, les rues, & tous les endroits où il s'amasse de grosses ordures. Les balais de crin ou de poil ne s'employent que dans les appartemens frottés, où il se fait plus de poussiere que d'ordure. Les balais de plumes, selon que le manche en est court ou long, retiennent le nom de balai, ou s'appellent houssoirs. Les balais de plumes servent pour les glaces & les meubles, & ce sont aussi les Vergettiers qui les font.
Les Orfevres grossiers donnent le nom de balai à un vieux linge attaché au bout d'un bâton qui leur sert à nettoyer l'enclume.
Il y a encore d'autres sortes de balais : mais l'usage & la forme en sont si connus, qu'il seroit inutile d'en faire mention plus au long.
BALAI DU CIEL, en Marine, c'est le vent de nord-est, qu'on appelle ainsi à cause qu'il nettoye le ciel de nuages. (Z)
BALAI, (Chirurgie) brosses ou vergettes de l'estomac, instrument dont on peut se servir fort utilement pour repousser quelques corps étrangers arrêtés dans l'oesophage, les retirer s'il est possible, ou changer leur mauvaise détermination en une meilleure.
Cet instrument est composé d'un petit faisceau de soies de cochon, les plus molles & les plus souples, attachées à une tige de fil de fer ou de léton flexible. Voyez Pl. XXVIII. fig. 2. il a été inventé pour balayer l'estomac, & provoquer le vomissement.
Pour en faire usage, on fait avaler au malade un verre d'eau chaude, afin de délayer les mucosités glaireuses qui séjournent dans l'estomac ; on trempe le petit balai dans quelque liqueur convenable, on l'introduit dans l'oesophage, & on le conduit doucement & avec précaution jusque dans l'estomac ; on lui fait faire des mouvemens en divers sens de haut en bas & de bas en haut, comme on fait au piston d'une seringue ; puis on retire tout-à-fait l'instrument : le malade rejette la liqueur qu'il a bûe, & les humeurs que le balai a détachées des parois de l'estomac.
Les Medecins étrangers qui se servent de cet instrument, recommandent de réitérer cette opération de tems en tems : ils prétendent que ce remede, qu'ils regardent comme excellent & supérieur à tous les purgatifs, est capable seul de conduire les hommes à une extrème vieillesse, si on le répete d'abord toutes les semaines, puis tous les quinze jours, & enfin régulierement tous les mois. Ces belles promesses n'ont encore surpris la bonne foi de personne en France.
M. Houstet, membre de l'académie royale de Chirurgie, a vû en Allemagne un homme qui se servoit de cet instrument pour gagner de quoi vivre : il se l'introduisoit dans l'estomac ; il le tournoit en diverses manieres, comme font les cabaretiers lorsqu'ils rincent leurs bouteilles avec leur goupillon : cet homme le retiroit ensuite, & rejettoit par le vomissement la liqueur qu'il buvoit auparavant. (Y)
BALAI, s. m. c'est ainsi qu'on nomme en Fauconnerie la queue de l'oiseau.
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BALAIEURS | BALAIEURS
BALAIEUR d'un navire, terme de Marine ; c'est celui qui est chargé de le tenir net.
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BALAIS | (Hist. nat.) rubis balais, rubinus balassius, pierre précieuse mêlée de rouge & d'orangé. On a donné à ce rubis le nom de balais, pour le distinguer des autres rubis. Voyez RUBIS.
On a prétendu dériver le mot balais du nom d'un royaume où il se trouve de ces rubis, & qui est situé en Terre-ferme, entre ceux de Pégu & de Bengale. Il y a eu encore d'autres opinions sur cette étymologie. (I)
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BALAMBUAN | ou PALAMBUAN, (Géog. mod.) ville d'Asie dans les Indes, sur la côte orientale de l'île de Java, dans le pays de même nom, dont elle est capitale. Longit. 133. lat. méridion. 7. 50.
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BALANCE | S. f. est l'une des six puissances simples en Méchanique, servant principalement à faire connoître l'égalité ou la différence de poids dans les corps pesans, & par conséquent leur masse ou leur quantité de matiere.
Il y a deux sortes de balances, l'ancienne & la moderne.
L'ancienne ou la romaine, appellée aussi peson, consiste en un levier qui se meut sur un centre, & qui est suspendu près d'un des bouts. D'un côté du centre on applique le corps qu'on veut peser ; de l'autre côté l'on suspend un poids qui peut glisser le long du levier, & qui tient la balance en équilibre ; & la valeur du poids à peser s'estime par les divisions qui sont marquées aux différens endroits où le poids glissant est arrêté.
La balance moderne, qui est celle dont on se sert communément aujourd'hui, consiste en un levier suspendu précisément par le milieu : il y a un plat ou bassin suspendu par une corde à chacun des deux bouts du levier, dans l'un & l'autre cas le levier est appellé jugum, traversant, ou fleau, dont les deux moitiés qui sont de l'un & de l'autre côté de l'axe se nomment brachia, ou les bras ; la partie par où l'on tient trutina, anse ou chasse ; la ligne sur laquelle le levier tourne, ou qui en divise les bras, s'appelle l'axe ou essieu ; & quand on la considere relativement à la longueur des bras, on ne la regarde que comme un point, & on l'appelle le centre de la balance ; les endroits où se placent les poids se nomment points de suspension ou d'application.
Le petit style perpendiculaire au fléau, & qui fait connoître, ou que les corps sont en équilibre, ou qu'ils pesent plus l'un que l'autre, s'appelle l'aiguille, en latin examen.
Ainsi dans la balance romaine, le poids qui sert à contrebalancer ceux qu'on veut connoître, est le même, mais s'applique à différens points ; au lieu que dans la balance ordinaire le contrepoids varie, & le point d'application est toûjours le même.
Le principe sur lequel la construction de l'une & l'autre balance est fondée, est le même, & se peut comprendre par ce qui suit.
Théorie de la balance. Le levier A B (voyez Planche de Méchan. fig. 9.) est la principale partie de la balance : c'est un levier du premier genre, & qui au lieu d'être posé sur un appui en C, centre de son mouvement, est suspendu par une verge qui est attachée au point C ; desorte que le méchanisme de la balance dépend du même théorème que celui du levier. Voy. LEVIER.
Donc comme le poids connu est à l'inconnu, ainsi la distance depuis le poids inconnu jusqu'au centre du mouvement est à la distance où doit être le poids connu, pour que les deux poids se tiennent l'un l'autre en équilibre ; & par conséquent le poids connu fait connoître la valeur du poids inconnu.
Car comme la balance est un vrai levier, sa propriété est la même que celle du levier ; savoir, que les poids qui y sont suspendus, doivent être en raison inverse de leurs distances à l'appui, pour être en équilibre. Mais cette propriété du levier que l'expérience nous manifeste, n'est peut-être pas une chose facile à démontrer en toute rigueur. Il en est à-peu-près de ce principe comme de celui de l'équilibre ; on ne voit l'équilibre de deux corps avec toute la clarté possible que lorsque les deux corps sont égaux, & qu'ils tendent à se mouvoir en sens contraire avec des vîtesses égales. Car alors il n'y a point de raison pour que l'un se meuve plûtôt que l'autre ; & si l'on veut démontrer rigoureusement l'équilibre lorsque les deux corps sont inégaux, & tendent à se mouvoir en sens contraire avec des vîtesses qui soient en raison inverse de leurs masses, on est obligé de rappeller ce cas au premier, où les masses & les vîtesses sont égales. De même on ne voit bien clairement l'équilibre dans la balance, que quand les bras en sont égaux & chargés de poids égaux. La meilleure maniere de démontrer l'équilibre dans les autres cas, est peut-être de les ramener à ce premier, simple & évident par lui-même. C'est ce qu'a fait M. Newton dans le premier livre de ses Principes, section premiere.
Soient, dit-il (fig. 3. n°. 4. Méch.) O K, O L, des bras de levier inégaux, auxquels soient suspendus les poids A, P ; soit fait O D = à O L, le plus grand des bras, la difficulté se réduit à démontrer que les poids A, P, attachés au levier L O D, sont en équilibre. Il faut pour cela que le poids P soit égal à la partie du poids A qui agit suivant la ligne D C perpendiculaire à O D ; car les bras O L, O D, étant égaux, il faut que les forces qui tendent à les mouvoir, soient égales, pour qu'il y ait équilibre. Or l'action du poids A, suivant D C, est au poids A, comme D C à D A, c'est-à-dire comme O K à O D. Donc la force du poids A suivant DC = (A x O K)/(O D). Et comme cette force est égale au poids P, & que O L = O D, on aura (A x O K)/(O L) = P, c'est-à-dire que les poids A, P, doivent être en raison des bras de levier O L, O K, pour être en équilibre.
Mais en démontrant ainsi les propriétés du levier, on tombe dans un inconvénient : c'est qu'on est obligé alors de changer le levier droit en un levier recourbé & brisé en son point d'appui, comme on le peut voir dans la démonstration précédente ; desorte qu'on ne démontre les propriétés du levier droit à bras inégaux que par celles du levier courbe, ce qui ne paroît pas être dans l'analogie naturelle. Cependant il faut avoüer que cette maniere de démontrer les propriétés du levier est peut-être la plus exacte & la plus rigoureuse de toutes celles qu'on a jamais données.
Quoi qu'il en soit, c'est une chose assez singuliere que les propriétés du levier courbe, c'est-à-dire dont les bras ne sont pas en ligne droite, soient plus faciles à démontrer rigoureusement que celles du levier droit. L'auteur du traité de Dynamique, imprimé à Paris en 1743, a réduit l'équilibre dans le levier courbe à l'équilibre de deux puissances égales & directement opposées : mais comme ces puissances égales & opposées s'évanoüissent dans le cas du levier droit, la démonstration pour ce dernier cas ne peut être tirée qu'indirectement du cas général.
On pourroit démontrer les propriétés du levier droit dont les puissances sont paralleles, en imaginant toutes ces puissances réduites à une seule, dont la direction passe par le point d'appui. C'est ainsi que M. Varignon en a usé dans sa Méchanique. Cette méthode entre plusieurs avantages a celui de l'élégance & de l'uniformité : mais n'a-t-elle pas aussi, comme les autres, le défaut d'être indirecte, & de n'être pas tirée des vrais principes de l'équilibre ? Il faut imaginer que les directions des puissances prolongées concourent à l'infini ; les réduire ensuite à une seule par la décomposition, & démontrer que la direction de cette derniere passe par le point d'appui. Doit-on s'y prendre de cette maniere pour prouver l'équilibre de deux puissances égales appliquées suivant des directions paralleles à des bras égaux de levier ? Il semble que cet équilibre est aussi simple & aussi facile à concevoir, que celui de deux puissances opposées en ligne droite, & que nous n'avons aucun moyen direct de réduire l'un à l'autre. Or, si la méthode de M. Varignon, pour démontrer l'équilibre du levier, est indirecte dans un cas, elle doit aussi l'être nécessairement dans l'application au cas général.
Si l'on divise les bras d'une balance en parties égales, une once appliquée à la neuvieme division depuis le centre, tiendra en équilibre trois onces qui seront à la troisieme de l'autre côté du centre ; & deux onces à la sixieme division agissent aussi fortement que trois à la quatrieme, &c. L'action d'une puissance qui fait mouvoir une balance, est donc en raison composée de cette même puissance, & de sa distance du centre.
Il est bon de remarquer ici que le poids presse également le point de suspension, à quelque distance qu'il en soit suspendu, & tout comme s'il étoit attaché immédiatement à ce point ; car la corde qui suspend ce poids en est également tendue à quelque endroit que le poids y soit placé.
On sent bien au reste que nous faisons ici abstraction du poids de la corde, & que nous ne la regardons que comme une ligne sans épaisseur ; car le poids de la corde s'ajoûte à celui du corps qui y est attaché, & peut faire un effet très-sensible, si la corde est d'une longueur considérable.
Une balance est dite être en équilibre, quand les actions des poids sur les bras de la balance pour la mouvoir, sont égales, de maniere qu'elles se détruisent l'une l'autre. Quand une balance est en équilibre, les poids qui sont de part & d'autre sont dits équipondérans, c'est-à-dire qui se contrebalancent. Des poids inégaux peuvent se contrebalancer aussi ; mais il faut pour cela que leurs distances du centre soient en raison réciproque de ces poids ; ensorte que si l'on multiplie chaque poids par sa distance, les produits soient égaux : c'est sur quoi est fondée la construction de la balance romaine ou peson. Voyez ROMAINE ou PESON.
Par exemple, dans une balance dont les bras sont fort inégaux, un bassin étant suspendu au bras le plus court, & un autre au plus long bras divisé en parties égales : si l'on met un poids dans le bassin attaché au plus petit bras, & qu'en même tems on place un poids connu, par exemple une once, dans le bassin attaché au plus long bras, & qu'on fasse glisser ce bassin sur le plus long bras jusqu'à ce que les deux poids soient en équilibre ; le nombre des divisions entre le point d'appui & le poids d'une once, indiquera le nombre d'onces que pese le corps, & les sous-divisions marqueront le nombre de parties de l'once. C'est encore sur le même principe qu'est fondée la balance trompeuse, laquelle trompe par l'inégalité des bras ou des bassins : par exemple, prenez deux bassins de balance dont les poids soient inégaux dans la proportion de 10 à 9, & suspendez l'un & l'autre à des distances égales ; alors si vous prenez des poids qui soient l'un à l'autre comme 9 à 10, & que vous mettiez le premier dans le premier bassin, & l'autre dans le second, ils pourront être en équilibre.
Plusieurs poids suspendus à différentes distances d'un côté, peuvent se tenir en équilibre avec un poids seul qui sera de l'autre côté ; pour cet effet, il faudra que le produit de ce poids par sa distance du centre, soit égal à la somme des produits de tous les autres poids multipliés chacun par sa distance du centre.
Par exemple, si on suspend trois poids d'une once chacun à la deuxieme, troisieme, & cinquieme division, ils feront équilibre avec le poids d'une once appliqué de l'autre côté du point d'appui à la distance de la dixieme division. En effet, le poids d'une once appliqué à la deuxieme division, fait équilibre avec le poids d'un cinquieme d'once appliqué à la dixieme division. De même le poids d'une once appliqué à la troisieme division, fait équilibre à 3/10 d'once appliqués à la dixieme division, & le poids d'une once à la cinquieme division fait équilibre au poids d'une demi-once à la dixieme division ; or un cinquieme d'once avec 3/10 d'once & une demi-once, font une once entiere. Donc une once entiere appliquée à la dixieme division, fait seule équilibre à 3 onces appliquées aux divisions 2, 3, & 5, de l'autre côté du point d'appui.
Donc aussi plusieurs poids appliqués des deux côtés en nombre inégal, seront en équilibre, si étant multipliés chacun par sa distance du centre, les sommes des produits de part & d'autre sont égales ; & si ces sommes sont égales, il y aura équilibre.
Pour prouver cela par l'expérience, suspendez un poids de deux onces à la cinquieme division, & deux autres chacun d'une once à la deuxieme & à la septieme ; de l'autre côté suspendez deux poids d'une once aussi chacun à la neuvieme & dixieme division. Ces deux tiendront en équilibre les trois autres ; la démonstration en est à-peu-près la même que de la proposition précédente.
Pour qu'une balance soit juste, il faut que les points de suspension soient exactement dans la même ligne que le centre de la balance, & qu'ils en soient également distans ; il faut aussi que les bras soient de longueur convenable, afin qu'on s'apperçoive plus aisément s'ils sont égaux, & que l'erreur qui peut résulter de leur inégalité, soit au moins fort petite ; qu'il y ait le moins de frottement qu'il est possible autour du point fixe ou centre de la balance. Quand une balance est trompeuse, soit par l'inégalité de ses bras, soit par celle de ses bassins, il est bien aisé de s'en assûrer : il n'y a qu'à changer les poids qui sont dans chaque bassin, & les mettre l'un à la place de l'autre ; ces poids qui étoient auparavant en équilibre, cesseront alors d'y être si la balance est trompeuse. Voyez APPUI.
BALANCE de M. de Roberval, est une sorte de levier, où des poids égaux sont en équilibre, quoiqu'ils paroissent situés à des extrémités de bras de leviers inégaux. Voyez LEVIER.
BALANCE HYDROSTATIQUE, est une espece de balance qu'on a imaginée, pour trouver la pesanteur spécifique des corps liquides & solides. Voyez GRAVITE ou PESANTEUR SPECIFIQUE.
Cet instrument est d'un usage considérable pour connoître les degrés d'alliage des corps de toute espece, la qualité & la richesse des métaux, mines, minéraux, &c. les proportions de quelque mêlange que ce soit, &c. la pesanteur spécifique étant le seul moyen de juger parfaitement de toutes ces choses. Voyez POIDS, METAL, OR, ALLIAGE, &c.
L'usage de la balance hydrostatique est fondé sur ce théorème d'Archimede, qu'un corps plus pesant que l'eau, pese moins dans l'eau que dans l'air, du poids d'une masse d'eau de même volume que lui. D'où il suit que si l'on retranche le poids du corps dans l'eau, de son poids dans l'air, la différence donnera le poids d'une masse d'eau égale à celle du solide proposé.
Cet instrument est représenté dans les Planches d'Hydrostatique, fig. 34. & n'a pas besoin d'une description fort ample. On pese d'abord dans l'air le poids E, qui n'est autre chose qu'un plateau garni ou couvert de différens poids, & le poids qu'on veut mesurer, lequel est suspendu à l'extrémité du bras F ; ensuite on met ce dernier poids dans un fluide, & on voit par la quantité de poids qu'il faut ôter de dessus le plateau E, combien le poids dont il s'agit a perdu, & par conséquent combien pese un volume de fluide égal à celui du corps.
Pour peser un corps dans l'eau, on le met quelquefois dans le petit seau de verre I K, & alors on ne doit pas oublier de couler le plateau R sur le petit plateau quarré H, afin que le poids de ce plateau, qui est égal à celui du volume d'eau, dont le seau occupe la place, puisse rétablir l'équilibre.
A l'égard des gravités spécifiques des fluides, on se sert pour cela d'une petite boule de verre G, de la maniere suivante.
Pour trouver la pesanteur spécifique d'un fluide, suspendez à l'extrémité d'un des bras F un petit bassin, & mettez dedans la boule G ; remplissez ensuite les deux tiers d'un vaisseau cylindrique O P, avec de l'eau commune : lorsque vous aurez mis la boule dedans, il faudra mettre sur le plateau E de petits poids, jusqu'à ce que les bras E, F, demeurent dans une position horisontale.
Ainsi l'excès du poids de la boule sur celui d'un égal volume d'eau, se trouvera contrebalancé par les poids ajoûtés au plateau E, ce qui la fera demeurer en équilibre au milieu de l'eau. Or concevons à présent cette boule ainsi en équilibre, comme si elle étoit réellement une quantité d'eau congelée dans la même forme : si à la place de l'eau qui environne cette partie congelée, nous substituons quelqu'autre liqueur de différente pesanteur, l'équilibre ne doit plus subsister ; il faudra donc pour le rétablir, mettre des poids sur celui des plateaux B, F, de la balance qui sera le plus foible.
Ces poids qu'il aura fallu ajoûter dans la balance, seront la différence en gravité de deux quantités, l'une d'eau, l'autre de la liqueur qu'on a voulu examiner, & dont le volume est égal à celui de la boule de verre. Supposons donc que le poids du volume d'eau dont la boule occupe la place, soit de 803 grains ; si nous ajoûtons à ce nombre celui des grains qu'il aura fallu ajouter sur le plateau auquel la boule est attachée, ou si nous ôtons de 803 grains le nombre de ceux qu'il auroit fallu mettre sur le plateau opposé, le reste sera le poids du volume du fluide égal à celui de la boule, & la gravité spécifique de l'eau sera à celle de ce fluide comme 803 est à ce reste, enfin si on divise ce même reste par 803, le quotient exprimera la gravité spécifique du fluide, l'unité exprimant celle de l'eau.
Pour rendre ceci plus sensible par un exemple, supposons qu'on veuille savoir la gravité du lait : plongeant dans cette liqueur la boule telle qu'elle est attachée à la balance, on trouve qu'il faut mettre 28 grains sur le plateau auquel elle est suspendue, pour rétablir l'équilibre : ajoûtant donc 28 grains à 803, la somme sera 831 ; & ainsi la gravité spécifique du lait sera à celle de l'eau, comme 803 à 831. On peut donc, par le moyen de la balance hydrostatique, 1°. connoître la pesanteur spécifique d'une liqueur : 2°. comparer les pesanteurs spécifiques de deux liqueurs : 3°. comparer les gravités spécifiques de deux corps solides ; car si deux corps solides pesent autant l'un que l'autre dans l'air, celui qui a le plus de pesanteur spécifique pesera davantage dans l'eau : 4°. comparer la gravité spécifique d'un corps solide avec celle d'une liqueur ; car la gravité spécifique du corps est à celle de la liqueur comme le poids du corps dans l'air est à ce qu'il perd de son poids dans la liqueur. Voyez aussi AREOMETRE.
Le docteur Hook a imaginé une balance hydrostatique qui peut être d'une grande utilité pour examiner la pureté de l'eau, &c. Elle consiste en un ballon de verre d'environ trois pouces de diametre, lequel a un col étroit d'une demi-ligne de diametre : on charge ce ballon de minium, afin de le rendre tant soit peu plus pesant qu'un pareil volume d'eau ; on le trempe ensuite dans l'eau après l'avoir attaché au bras d'une exacte balance, qui a un contrepoids à l'autre bras. Cela fait, on ne sauroit ajoûter à l'eau la plus petite quantité de sel, que le col du ballon ne s'éleve au-dessus de l'eau d'un demi pouce plus qu'il n'étoit d'abord. En effet l'eau devenant plus pesante par l'addition du sel, le ballon qui y étoit auparavant en équilibre, doit s'élever. Transact. philosoph. n°. 197.
Plusieurs savans se sont donné la peine de rédiger en table les pesanteurs d'un grand nombre de matieres tant solides que fluides : on doit assûrément leur savoir gré de ce travail, & l'on en sent toute la difficulté, quand on pense aux attentions scrupuleuses & au tems qu'on est obligé de donner à ces sortes de recherches : mais leurs expériences, quelqu'exactes qu'elles ayent été, ne peuvent nous servir de regle que comme des à-peu-près ; car les individus de chaque espece varient entr'eux quant à la densité, & l'on ne peut pas dire que deux diamans, deux morceaux de cuivre, deux gouttes de pluie, soient parfaitement semblables. Ainsi quand il est question de savoir au juste la pesanteur spécifique de quelque corps, il faut le mettre lui-même à l'épreuve ; c'est le seul moyen d'en bien juger. Au reste on sera sans-doute bien-aise de trouver ici une table dressée sur des expériences fort exactes. Il suffit de dire qu'elles sont de M. Musschenbroeck. Les pesanteurs spécifiques de toutes les matieres énoncées en cette table, sont comparées à celle de l'eau commune, & l'on prend pour eau commune celle de la pluie dans une température moyenne ; ainsi quand on voit dans la table, eau de pluie 1, 000. or de coupelle 19, 640. air 1, 001 1/4, c'est-à-dire que la pesanteur spécifique de l'or le plus fin est à celle de l'eau, comme 19 1/2 à-peu-près à 1, & que la pesanteur de l'air n'est presque que la millieme partie de celle de l'eau.
Table alphabétique des matieres les plus connues, tant solides que fluides, dont on a éprouvé la pesanteur spécifique.
Cet article est en partie de M. Formey. (O)
* BALANCE, voyez ROMAINE, FLEAU, PESON, PORTE-BALANCE. La balance commune n'est autre chose qu'un fléau suspendu parle milieu, & soûtenant par ses extrémités des plateaux ou bassins attachés avec des cordes. Voyez fig. 5. du balancier, une balance qui ne differe de la commune que parce qu'elle est plus petite, & qu'elle a un porte-balance ; f, f, le fléau ou traversin ; l, la languette ; p, un des pivots : il a son correspondant ; b, le braié ; c, la chasse ; q, q, les deux bassins ou plateaux ; s, s, s, les cordes qui les soutiennent ; r, r, les crochets au anneaux qui embrassent les cordes.
La balance fine ou le trebuchet ne differe de la balance commune, que parce qu'étant destinée à peser des matieres précieuses, ou la moindre quantité de trop ou de trop peu, fait une différence considérable pour le prix ; elle est fort petite, & travaillée avec la derniere précision.
Balance sourde : celle-ci a les bouts de son fléau plus bas que son clou, & sa chape soûtenue en l'air par un guindole ou guignol ; elle est d'usage dans les monnoies.
Balance d'essai, c'est la balance de la figure 5 enfermée dans une lanterne de verre avec son porte-balance ; comme on voit figure 7 ; comme on y pese l'or & l'argent, on a pris la précaution de la lanterne, contre l'agitation que l'air pourroit causer à ses bassins.
Balance du chandelier : celle-ci, quand elle est petite, a les bassins en forme de seaux ; on y met la chandelle debout ; & quand elle est grande, ses bassins sont presqu'entierement plats, afin qu'on y puisse coucher la chandelle. C'est du reste la même chose que la balance commune.
En général, il y a autant de différentes sortes de balances possibles que de moyens différens possibles d'établir & de rompre l'équilibre établi entre les différentes parties d'un levier, ou d'un corps qui en fait la fonction.
BALANCE, libra, (Astron.) est aussi un des douze signes du zodiaque, précisément opposé au bélier : on l'appelle balance, parce que les jours & les nuits sont d'égale longueur, lorsque le soleil entre dans ce signe, ce qui arrive à l'équinoxe d'automne.
Le catalogue britannique met les étoiles de la constellation de la balance au nombre de 46. (O)
BALANCE, s. f. (Mythologie) est le symbole de l'équité. La Justice la tient à sa main. Celle que représente le septieme signe du zodiaque fut à l'usage d'Astrée ; ce fut-là qu'elle déposa cette juste balance, lorsqu'elle se retira de la terre au ciel, à l'approche du siecle de fer.
BALANCE DE COMMERCE, signifie une égalité entre la valeur des marchandises achetées des étrangers, & la valeur des productions d'un pays transportées chez d'autres nations.
Il est nécessaire que cette balance soit gardée parmi les nations commerçantes ; & si elle ne peut l'être en marchandises, elle le doit être en especes.
C'est par ce moyen qu'on connoît si une nation gagne ou perd par son commerce étranger ou par quelque branche de ce commerce, & par conséquent si cette nation s'enrichit ou s'appauvrit en le continuant.
Il y a diverses méthodes pour arriver à cette connoissance.
1°. La plus reçûe est de prendre une exacte notion du produit que rapportent à proportion les marchandises exportées ou envoyées à l'étranger, & les marchandises importées, c'est-à-dire celles qu'on a tirées de lui. Si les premieres excedent les dernieres, il s'ensuit que la nation qui a fait les exportations est en chemin de gagner, dans l'hypothese que l'excédent est rapporté en argent monnoyé ou non monnoyé ; & ainsi augmente le thrésor de cette nation. Mais cette méthode est incertaine, parce qu'il est difficile d'avoir un compte véritable des marchandises, soit importées, soit exportées ; les registres des douannes ne pouvant pas les fournir à causes des contrebandes qui se font particulierement de marchandises belles & rares, comme points, dentelles, joyaux, rubans, soies, toiles fines, &c. qu'on peut cacher en un petit volume ; & même des vins, eaux-de-vie, thé, &c. à quoi il faut ajouter les divers accidens qui affectent la valeur du fonds soit sorti soit rentré, comme pertes faites sur mer, par marchés, banqueroutes, saisies, &c. D'ailleurs, pour ce qui concerne les négoces particuliers, il y a divers pays où les ouvrages de nos manufactures que nous y envoyons ne sont pas en grande considération : cependant ce que nous en rapportons est nécessaire pour pousser notre commerce en général, comme le trafic en Norvege pour du mairein & des provisions navales. D'un autre côté, le commerce de la compagnie des Indes orientales est beaucoup plus avantageux, parce que les marchandises importées excedent de beaucoup les marchandises exportées, que nous vendons beaucoup des premieres aux étrangers, & que nous en consumons beaucoup dans le royaume, par exemple des indiennes & des soies au lieu des toiles & soies des autres pays, qui nous coûteroient plus cher.
2°. La deuxieme méthode est d'observer le cours du change, car s'il est ordinairement au-dessus de la valeur intrinseque ou de l'égalité des especes étrangeres, nous perdons non-seulement par le change, mais encore par le cours général de notre commerce. Mais cette méthode est encore imparfaite, puisque nous trafiquons dans plusieurs pays où le cours du change n'est point établi.
3°. La troisieme méthode, qui est du chevalier Jos. Child, se prend de l'accroissement ou de la diminution de notre commerce & de nos navires en général ; car si ces deux points viennent à diminuer, quelque profit que puissent faire des particuliers, la nation perd, & elle gagne dans l'hypothese contraire. Cet auteur établit comme une regle infaillible, que dans toutes les parties du monde où le commerce est grand, continue sur ce pié, & augmente de jour en jour, aussi-bien que le nombre des navires, par succession de tems ce commerce doit être avantageux à la nation, même dans le cas où un gros commerçant se ruine ; car quoi qu'il puisse perdre, quelle multitude de gens qui gagnent par son moyen ! le roi, les officiers des doüannes, les charpentiers de vaisseau, brasseurs, boulangers, cordiers-manufacturiers, cordiers, porteurs, charretiers, mariniers, &c.
4°. Une derniere maniere est d'observer l'augmentation & la diminution de notre argent, soit monnoyé soit en lingots : mais celle-ci est la moins sensible & la moins palpable de toutes ; car l'argent paroît aux yeux du vulgaire plus abondant lorsqu'il en a moins affaire, & plus rare selon que les occasions de l'employer sont plus fréquentes & plus avantageuses ; par ce moyen il semble que nous ayons plus d'argent lorsque nous avons moins de commerce ; par exemple, quand la compagnie des Indes orientales a un grand débit à faire, l'argent se trouve pour l'ordinaire plus rare à Londres, parce que l'occasion engage les particuliers à en employer quantité qu'ils avoient amassé à cette intention. Ainsi un haut prix d'intérêt fera que l'argent paroîtra plus rare, parce que chacun, aussi-tôt qu'il en peut rassembler quelque somme, cherche à la placer. Child, Disc. sur le Comm. ch. jx. Chambers, Dictionn. (G)
BALANCE, en termes de teneurs de livres à parties doubles, signifie l'état final ou la solde du grand livre ou livre de raison, ou d'un compte particulier.
Balance se dit encore de la clôture de l'inventaire d'un marchand, qui se fait en crédit & en débit dans lequel il met d'un côté, qui est la gauche, l'argent qu'il a en caisse, ses marchandises, dettes actives, meubles & immeubles ; & en crédit du côté de la droite, ses dettes passives & ce qu'il doit payer en argent ; & quand il a défalqué ce qu'il doit d'un côté de ce qu'il a d'effets d'un autre, il connoît, tout étant compensé & balancé ce qui doit lui rester de net & clair, ou ce qu'il a perdu ou gagné.
On se sert quelquefois du mot de bilan au lieu de balance, mais improprement. Bilan a une autre signification plus précise. Voyez BILAN.
Balance signifie aussi la déclaration que font les maîtres des vaisseaux, des effets & autres marchandises dont ils sont chargés. Ce terme est en usage en ce sens parmi les marchands qui trafiquent en Hollande par les rivieres du Rhin & de la Meuse. (G)
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BALANCÉ | adj. terme de Danse. Le balancé est un pas qui se fait en place comme le pirouetté, mais ordinairement en présence, quoiqu'on puisse aussi le faire en tournant. Comme ce n'est que le corps qui tourne, & que cela ne change aucun mouvement, je vais décrire la maniere de le faire en présence.
Il est composé de deux demi-coupés, dont l'un se fait en-avant, & l'autre en-arriere ; savoir, en commençant vous pliez à la premiere position, & vous portez le pié à la quatrieme, en vous élevant dessus la pointe ; ensuite de quoi vous posez le talon à terre ; & la jambe qui est en l'air s'étant approchée de celle qui est devant, & sur laquelle vous vous êtes élevé, vous pliez sur celle qui a fait ce premier pas, & l'autre étant pliée se porte en-arriere à la quatrieme position, & vous vous élevez dessus ; ce qui finit ce pas.
Le balancé est un pas fort gracieux que l'on place dans toutes sortes d'airs, quoique les deux pas dont il est composé soient relevés également l'un & l'autre ; & de-là vient qu'il s'accommode à toutes sortes de mesures, parce que ce n'est que l'oreille qui avertit de pousser les mouvemens ou de les ralentir. Voyez POSITION.
Il est fort usité dans les menuets figurés aussi-bien que dans les menuets ordinaires, de même qu'au passe-pié. On le fait à la place d'un pas de menuet, dont il occupe la même valeur ; c'est pourquoi il doit être plus lent, puisque ces deux pas se font dont l'étendue des quatre que le pas de menuet contient. Voyez MENUET.
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BALANCEMENT | S. m. Voyez OSCILLATION.
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BALANCER la | oupe au pas ou au trot, se dit, en termes de Manege, du cheval dont la croupe dandine à ses allures ; c'est une marque de foiblesse de reins. (V)
BALANCER, se balancer dans l'air, se dit, en Fauconnerie, d'un oiseau qui reste toûjours en une place en observant la proie.
BALANCER se dit aussi en Vénerie, d'une bête qui chassée des chiens courans, est lassée & vacille en fuyant : on dit, ce chevreuil balance.
Un levrier balance quand il ne tient pas la voie juste, ou qu'il va & vient à d'autres voies.
BALANCER. On dit dans les manufactures de soie qu'une lisse balance, quand elle leve ou baisse plus d'un côté que d'un autre ; ce qui est de conséquence dans le travail des étoffes riches.
La lisse balancée ou qui ne baisse pas juste à un accompagnage, fait que la dorure est séparée ou barrée. Voyez ACCOMPAGNAGE, DORURE, éTOFFES OR ET ARGENT.
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BALANCIER | S. m. ouvrier qui fait les différens instrumens dont on se sert dans le commerce pour peser toutes sortes de marchandises.
On se doute bien que la communauté des Balanciers doit être fort ancienne. Elle est soûmise à la jurisdiction de la cour des monnoies ; c'est-là que les Balanciers sont admis à la maîtrise ; qu'ils prêtent serment ; qu'ils font étalonner leurs poids, & qu'ils prennent les matrices de ces petites feuilles de léton à l'usage des Joailliers & autres marchands de matieres, dont il importe de connoître exactement le poids. Chaque Balancier a son poinçon ; l'empreinte s'en conserve sur une table de cuivre au bureau de la communauté & à la cour des monnoies. Ce poinçon composé de la premiere lettre du nom du maître, surmontée d'une couronne fleurdelisée, sert à marquer l'ouvrage. La marque des balances est au fond des bassins : des romaines, au fléau ; & des poids, au-dessous. L'étalonnage de la cour des monnoies se connoît à une fleur-de-lis seule qui s'imprime aussi avec un poinçon. D'autres poinçons de chiffres romains marquent de combien est le poids. Les feuilles de léton ne s'étalonnent point ; le Balancier les forme sur la matrice, & les marque de son poinçon. Deux jurés sont chargés des affaires, des visites, & de la discipline de ce corps. Ils restent chacun deux ans en charge ; un ancien se trouve toûjours avec un nouveau. Un maître ne peut avoir qu'un apprenti ; on fait cinq ans d'apprentissage, & deux ans de service chez les maîtres. Il faut avoir fait son apprentissage chez un maître de Paris, pour travailler en compagnon dans cette ville. Les aspirans doivent chef-d'oeuvre ; les fils de maître expérience. Les veuves joüissent de tous les droits de la maîtrise, excepté de celui de faire des apprentis. Les deux jurés Balanciers ont été autorisés par des arrêts à accompagner les maîtres & gardes des six corps des marchands dans leurs visites pour poids & mesures ; & il seroit très-à-propos pour le bien public qu'ils fissent valoir leur privilége. Ils ont pour patron S. Michel.
BALANCIER, s. m. en Méchanique ; ce nom est donné communément à toute partie d'une machine qui a un mouvement d'oscillation, & qui sert ou à ralentir ou à régler le mouvement des autres parties. Voyez les articles suivans.
BALANCIER : on donne ce nom dans les grosses forges, à la partie ou anse de fer F recourbée en arc, passée dans un crochet attaché à la perche élastique G F, à l'aide de laquelle les soufflets sont baissés & relevés alternativement par le moyen des chaînes K F, K F, qui se rendent deux à deux à des anses plus petites, ou à de petits crochets arqués & suspendus aux extrémités du balancier F. V. GROSSES FORGES, vignette de la planc. III. On voit dans la Planc. III. la même machine : F est la perche, E le balancier de la perche ; D D, les balanciers plus petits des soufflets, c c c c, chaîne des petits balanciers ou des bascules.
BALANCIER, terme d'Horloger ; c'est un cercle d'acier ou de léton (fig. 45-7 l. Pl. 10. d'Horlogerie) qui dans une montre sert à régler & modérer le mouvement des roues. Voyez ECHAPPEMENT.
Il est composé de la zone A B C que les Horlogers appellent le cercle des barettes B D, & du petit cercle qu'ils appellent le centre.
On ignore l'auteur de cette invention, dont on s'est servi pour la mesure du tems jusqu'au dernier siecle, où la découverte du pendule en a fait abandonner l'usage dans les horloges.
On donne au balancier la forme qu'on lui voit (fig. 49-7 l.) afin que le mouvement qu'il acquiert ne se consume point à surmonter de trop grands frottemens sur les pivots. La force d'inertie dans les corps en mouvement, étant toûjours la masse multipliée par la vîtesse, (Voyez INERTIE.) la zone A B C fort distante du centre de mouvement équivaut à une masse beaucoup plus pesante. Il suit de cette considération qu'on doit, autant qu'il est possible, disposer le calibre d'une montre, de façon que le balancier soit grand, afin que par-là il ait beaucoup d'inertie. Voyez CALIBRE.
Voici à peu près l'histoire des différentes méthodes dont on a fait usage dans l'application du balancier aux horloges, avant que l'addition du ressort spiral l'eût porté au degré de perfection où il est parvenu sur la fin du dernier siecle. Toute la régularité des horloges à balancier vint d'abord de la force d'inertie de ce modérateur, & de la proportion constante qui regne entre l'action d'une force sur un corps, & la réaction de ce corps sur elle. Cet effet résultoit nécessairement de la disposition de l'échappement. (Voyez ECHAPPEMENT. Voyez ACTION & REACTION. Voyez INERTIE.) On attribue cette découverte à Pacificus de Vérone. Voyez HORLOGE.
Tous les avantages que les mesures du tems faites sur ces principes avoient sur celles qui étoient connues lorsqu'elles parurent, telles que les clepsydres, sabliers, & autres, n'empêchoient pas que leurs irrégularités ne fussent encore fort considérables ; elles venoient principalement de ce qu'une grande partie de la force motrice se consumant à surmonter le poids de toutes les roues, & la résistance causée par leurs frottemens, la réaction se trouvoit toûjours inférieure à l'action, & le régulateur suivoit trop les différentes impressions qui lui étoient communiquées par le roüage qui lui opposoit toûjours des obstacles supérieurs à la force qu'il en recevoit.
Voulant obvier à cet inconvénient, dans les horloges destinées à rester constamment dans une même situation, les anciens horlogers s'aviserent d'un artifice des plus ingénieux ; ils disposerent le régulateur de façon qu'il pût faire des vibrations indépendamment de la force motrice ; ils mirent en usage l'inertie du corps & sa pesanteur.
Ils poserent l'axe du balancier (Voyez la fig. 27. Pl. V. d'Horlog.) perpendiculairement à l'horison, laisserent beaucoup de jeu à ses pivots en hauteur ; passerent ensuite un fil dans une petite fente pratiquée dans le pivot supérieur au-dessus du trou dans lequel il rouloit ; ensuite de quoi ils attacherent les deux bouts de ce fil à un point fixe, tellement que le balancier suspendu ne portoit plus sur l'extremité de son pivot inférieur. Si l'on tournoit alors le régulateur, les fils s'entortillant l'un sur l'autre, faisoient élever le balancier tant-soit-peu ; abandonné ensuite à lui-même, il descendoit par son poids & les détortilloit : or cela ne se pouvoit faire sans qu'il acquit un mouvement circulaire. Poursuivant donc sa route de l'autre côté, il entortilloit de nouveau les fils, retomboit ensuite, & auroit toûjours continué de se mouvoir ainsi alternativement des deux côtés, si la résistance de l'air, le frottement des fils & des pivots, n'eussent épuisé peu-à-peu tout son mouvement.
Cette méthode d'appliquer deux puissances de façon qu'elles fassent faire des vibrations au régulateur, donne à ce dernier de grands avantages. Voyez RESSORT SPIRAL.
La construction précédente auroit été bien plus avantageuse, si ces fils toûjours un peu élastiques n'eussent pas perdu peu-à-peu de cette élasticité, de plus les vibrations de ce régulateur ne s'achevoient point en des tems égaux ; & les petits poids ou autrement dits régules P P qu'on mettoit à différens éloignemens du centre du régulateur, pour fixer la durée des vibrations, ne pouvoient procurer une exactitude assez grande. En cherchant donc à perfectionner encore le balancier, on parvint enfin à lui associer un ressort.
Remarque sur la matiere du balancier. Quelques Horlogers prétendent que le balancier des montres doit être de léton afin de prévenir les influences que le magnétisme pourroit avoir sur lui ; ils ne font pas attention que pour éviter un inconvénient auquel leur montre ne sera peut être jamais exposée, ils lui donnent des défauts très-réels ; parce que 1°. le léton étant spécifiquement plus pesant que l'acier, & n'ayant point autant de corps, les balanciers de ce métal ne peuvent être aussi grands ; & comme par-là ils perdent de la force d'inertie, on est obligé de les faire plus pesans, pour que la masse comprenne la vîtesse ; d'où il résulte une augmentation considérable de frottement sur leurs pivots ; 2°. l'allongement du cuivre jaune par sa chaleur, étant à celui de l'acier dans le rapport de 17 à 10, les montres où l'on employe des balanciers de léton, doivent, toutes choses d'ailleurs égales, être plus susceptibles d'erreur, par les différens degrés de froid ou de chaud auxquels elles sont exposées.
Remarque sur la forme du balancier. Comme par leur figure les balanciers présentent une grande étendue, & qu'ils ont une vîtesse beaucoup plus grande que le pendule, leur mouvement doit être par conséquent plus susceptible des différences qui arrivent au milieu dans lequel ils vibrent ; ainsi après avoir disposé leurs barettes de façon que l'air leur oppose peu d'obstacles, il seroit bon encore, dans les ouvrages dont la hauteur n'est pas limitée, de leur donner la forme par laquelle ils peuvent présenter la moindre surface. Par exemple, le cercle du balancier au lieu d'être plat, comme on le fait ordinairement, devroit au contraire être une espece d'anneau cylindrique, parce que le cylindre présente moins de surface qu'un parallelépipede de même masse que lui ; & d'une hauteur égale à son diametre. (T)
BALANCIER, en Hydraulique, est un morceau de bois freté par les deux bouts, qui sert de mouvement dans une pompe pour faire monter les tringles des corps. (K)
BALANCIER, (Monnoyage) c'est une machine avec laquelle on fait sur les flancs les empreintes qu'ils doivent porter, selon la volonté du prince.
Cette machine représentée Pl. I. du Monnoyage, fig. 2. est composée du corps S R R S : il est ordinairement de bronze, & toûjours d'une seule piece. Les deux montans S S s'appellent jumelles. La partie supérieure T T qui ferme la baie ou ouverture A H, s'appelle le sommier ; elle doit avoir environ un pié d'épaisseur. La partie inférieure de la baie est de même fermée par un socle fondu avec le reste, ensorte que les jumelles, le sommier & le socle ne forment qu'un tout ; ce qui donne au corps plus de solidité & de force que si les pieces étoient assemblées,
Le socle a vers ses extrémités latérales deux éminences qui servent à l'affermir dans le plancher de l'attelier, au moyen d'un chassis de charpente qui l'entoure. Ce chassis de charpente, dont les côtés sont prolongés comme on voit en A, fig. 2. n°. 2. est fortement scellé dans le plancher, sous lequel est un massif de maçonnerie qui soûtient toute la machine.
La baie est traversée horisontalement par deux moises ou planchers H, I, ordinairement fondus de la même piece que le corps. Ces deux moises sont percées chacune d'un trou quarré, dans lequel passe la boîte E E. Les trous des moises doivent répondre à celui qui est fait au sommier, qui est fait en écrou à deux ou trois filets ; cet écrou se fait en fondant le corps sur la vis qui doit y entrer, & qu'on enfume dans la fonte, pour que le métal ne s'y attache point.
Cette vis a une partie cylindrique qui passe dans le corps de la boîte E E, & y est retenue par une clavette qui traverse la boîte, & dont l'extrémité est reçûe dans une rainure pratiquée sur la surface de la partie cylindrique. C'est le même méchanisme qu'à la presse d'Imprimerie. Voy. PRESSE D'IMPRIMERIE.
Si la boîte n'est point traversée par une clavette qui la retienne au cylindre qu'elle reçoit, elle est repoussée par quatre ressorts fixés sur la moise supérieure d'un bout, & appuyant de l'autre contre des éminences réservées à la partie supérieure de chaque côté de la boîte ; ensorte qu'elle est toûjours repoussée en-haut, & obligée de suivre la vis à mesure qu'elle s'éloigne.
Ce second méchanisme est défectueux, parce que l'action du balancier, quand il presse, est diminuée de la quantité de l'action des petits ressorts employés pour relever la boîte. La partie supérieure de la vis est quarrée en A, & reçoit le grand levier ou la barre B C, qui est de fer ainsi que la vis. Cette barre a à ses extrémités des boules de plomb dont le diametre est d'environ un pié, plus ou moins, selon les especes à monnoyer ; car on a ordinairement autant de balanciers que de différentes monnoies, quoiqu'on pût les monnoyer toutes avec le même. Les extrémités du levier, après avoir traversé les boules de plomb, sont terminées par des anneaux D, semblables à ceux qui terminent le pendant d'une montre, mais mobiles autour d'un boulon vertical. On attache à ces anneaux autant de cordes ou courroies de cuir nattées en rond, qu'il y a d'ouvriers qui doivent servir la machine.
La partie inférieure E E de la boîte est creuse ; elle reçoit une des matrices ou coins qui porte l'empreinte d'un des côtés de la piece de monnoie. Cette matrice est retenue dans la boîte avec des vis : l'autre matrice est assujettie dans une autre boîte H avec des vis. On pose cette boîte sur le socle ou pas de la baie : & qu'on ne soit pas étonné qu'elle ne soit que posée ; l'action de la vis étant toûjours perpendiculaire, & le poids de la matrice assemblée avec la boîte, très-considérable, il n'y a aucune raison pour que cet assemblage se déplace.
Devant le balancier est une profondeur dans laquelle le monnoyeur place ses jambes, afin d'être assis au niveau du socle, & placer commodément le flanc sur la matrice.
Tout étant dans cet état, ensorte que l'axe de la vis, celui des boîtes E E H, soient dans une même ligne perpendiculaire au plan du socle ; si on conçoit que des hommes soient appliqués aux cordons dont les extrémités du levier sont garnies, & qu'ils tirent, ensorte que la vis tourne du même sens dont elle entre dans son écrou ; la matrice dont la boîte supérieure est armée s'approchera de l'autre ; & si l'on place un flanc sur celle-ci, comme on voit en H, il se trouvera pris & pressé entre les deux matrices d'une force considérable : puisqu'elle équivaudra à l'action de dix à douze hommes appliqués à l'extrémité d'un levier très-long, & chargé par ses bouts de deux poids très-lourds. Après que le flanc est marqué, deux hommes tirent à eux des cordons dans un sens opposé, & font remonter la vis : le monnoyeur saisit cet instant pour chasser le flanc marqué de dessus la matrice H, & y en remettre un autre. Il doit faire cette manoeuvre avec adresse & promtitude ; s'il lui arrivoit de n'être pas à tems, il laisseroit le flanc sur la matrice, & ce flanc recevroit un second coup de balancier. Les flancs ont été graissés d'huile avant que d'être mis sur la matrice.
BALANCIER, terme de Papetier ; c'est un instrument de fer à l'usage de quelques manufactures de papier dans lesquelles il tient lieu de la derniere pile, appellée pile à l'ouvrier. Cet instrument est composé de trois barres de fer, qui forment comme les trois côtés d'un quarré ; savoir, deux montans & une traverse. La traverse est attachée au plancher par deux anneaux de fer, & les deux côtés paralleles descendent jusqu'à la hauteur de l'arbre de la roue. L'une des deux est terminée par une espece de crochet qui s'attache à une manivelle de fer qui est au bout de l'arbre du moulin ; l'autre branche est fort large par en bas, & forme une espece de grille à jour. Le mouvement que la roue communique à un des montans, se communique aussi à la branche terminée en quille ; & cette branche va & vient continuellement dans une espece d'auge remplie d'eau & de pâte fine : ce qui acheve de la délayer & de la mettre en état d'aller en sortant de-là dans la chaudiere.
BALANCIER, s. m. partie du Métier à bas, fixée par deux vis sur chaque extrémité des épaulieres. Il étoit composé dans les anciens métiers de deux barres paralleles 14, 14, 15, 15, assemblées, comme on voit Planc. III. fig. 1. où celle d'en-bas est terminée par deux petits crochets. On a corrigé le balancier dans les métiers nouveaux, en supprimant la barre 15, 15, avec son tenon, & en lui substituant sur la barre 14, 14, à égale distance des épaulieres, deux vis dont la tête percée & placée sous la barre 14, 14, peut recevoir deux petits crochets qui ont les mêmes fonctions que ceux de la piece qu'on a supprimée, & qui donnent encore la facilité de hausser & de baisser les crochets à discrétion. Voyez à l'article BAS AU METIER, à la seconde opération de la main d'oeuvre, qu'on appelle le foncement de pié, l'usage du balancier. Mais observez que si cette facilité de baisser & de hausser les crochets à discrétion perfectionne la machine, en donnant lieu à un tâtonnement à l'aide duquel on obtient le point de précision qu'on cherche, on n'eût pas eu besoin de tâtonner, s'il eût été possible aux ouvriers qui construisent les métiers à bas, de se conformer avec exactitude aux proportions du modele idéal qui existoit dans la tête de l'inventeur.
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BALANCINE | ou VALANCINES, s. f. (Mar.) ce sont des manoeuvres ou cordes qui descendent des barres de hunes & des chouquets, & qui viennent former des branches sur les deux bouts de la vergue, où elles passent dans des poulies. On s'en sert pour tenir la vergue en balance, lorsqu'elle est dans sa situation naturelle, ou pour la tenir haute & basse, selon qu'il est à propos. Voyez, Planc. I. la situation & la forme des balancines.
Balancines de la grande vergue, Planc. I. n°. 48. Balancines de la vergue de misene, Planc. I. n°. 49. Balancines de la civadiere, Pl. I. n°. 50. Les balancines de la civadiere sont amarrées au bout du beaupré, & servent aussi pour border le perroquet. Il y a deux poulies courantes dont les cordes viennent se terminer au château d'avant, & outre cela aux deux tiers de la vergue de civadiere il y a deux poulies doubles, & de grands cordages pour tenir la vergue ferme ; le tout se rendant au château d'avant, elles servent à appliquer la vergue de civadiere lorsque l'on va à la bouline. Voyez Planc. I. le beaupré en Z, & la civadiere, n°. 10.
Balancines de la vergue de perroquet de misene, Pl. I. n°. 86.
Balancines de grand perroquet, Pl. I. n°. 85.
Balancines du grand hunier, voyez Pl. I. vergue du grand hunier, cot. 5.
Balancines de la vergue de perroquet de foule, Pl. I. n°. 84.
Balancines de la vergue de foule, voyez Pl. I. la vergue de foule cotée 2.
Balancines de la vergue du perroquet de beaupré, voyez Pl. I. la vergue du perroquet de beaupré cotée 11. (Z)
BALANCINE de chaloupe, (Marine) c'est la manoeuvre ou corde qui soûtient le gui. Voyez GUI.
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BALANçONS | S. m. pl. (Oeconom. rust.) c'est ainsi qu'on appelle en Languedoc de petites pieces de bois de sapin débitées : on les y estime à 3 liv. la douzaine.
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BALANÉOTE | (Géog. anc.) ville de la Cilicie sur les confins de cette province : Josephe qui en fait mention ne dit rien de plus de sa situation.
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BALANGIAR | (Géog.) ville capitale de Tartarie, au nord de la mer Caspienne.
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BALANT | S. m. (Marine) Le balant d'une manoeuvre est la partie qui n'est point halée : il se dit aussi de la manoeuvre même lorsqu'elle n'est point employée. On dit tenir le balant d'une manoeuvre, pour dire l'amarrer de telle sorte qu'elle ne balance pas. (Z)
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BALANTES | S. m. pl. (Géog.) peuples d'Afrique au pays des Negres, sur la côte de l'Océan, vers les Bissaux.
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BALANUS | BALANUS
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BALAOU | S. m. (Hist. nat.) poisson fort commun à la Martinique ; il se prend à la lueur des flambeaux : il est de la grandeur de la sardine ; excellent au goût, & mal décrit par les auteurs.
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BALARES | S. m. pl. (Hist. anc.) nom que les habitans de l'île de Corse donnoient aux exilés, & les habitans de Carthage à ceux de leur ville ou de leur territoire, qui l'abandonnoient pour habiter les montagnes de la Sardaigne.
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BALARUC | (EAUX DE) voyez EAU.
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BALASSOR | S. m. (Commerce) étoffe faite d'écorce d'arbre que les Anglois apportent des Indes orientales : on ne nous dit point ni de quel arbre on prend l'écorce, ni comment on la travaille.
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BALATS | S. m. (Marine) c'est un amas de cailloux & de sable que l'on met à fond de cale, pour que le vaisseau entrant dans l'eau par ce poids demeure en assiette ; c'est ce qu'on appelle autrement lest. Voyez LEST. (Z)
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BALAUSTES | S. f. (Mat. med.) Les balaustes sont les fleurs du grenadier sauvage ; on en extrait le suc de la même maniere que de l'hypociste.
Elles sont astringentes comme les cytines, d'une nature terreuse, épaississantes, rafraîchissantes, & dessicatives : on les employe dans les flux de toute espece, comme dans la diarrhée, la dyssenterie, & pour arrêter les hémorrhagies des plaies.
On doit les choisir nouvelles, bien fleuries & d'un rouge vif : elles donnent de l'huile avec du sel essentiel, & assez de terre. (N)
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BALAUSTIER | S. m. (Jardinage) c'est ainsi qu'on nomme le grenadier sauvage. Voyez GRENADIER.
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BALBASTRO | (Géog.) ville d'Espagne au royaume d'Aragon sur le Vero. Long. 17. 50. lat. 41. 50.
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BALBEC | (Géog. anc. & mod.) ville d'Asie dans la Syrie ; il y a de beaux restes d'antiquités. Long. 55. lat. 33. 25.
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BALCH | (Géog. anc. & mod.) ville de Perse située dans le milieu du Chorasan, sur la riviere de Dehash. Quelques Géographes la prennent pour l'ancienne Chariaspa, ou Zariaspa, ou Bactres.
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BALCON | S. m. terme d'Architect. saillie pratiquée sur la façade extérieure d'un bâtiment, portée par des colonnes ou des consoles ; on y fait un appui de pierre ou de fer, qui lorsqu'il est de maçonnerie, s'appelle balustrade ; & quand il est de serrurerie, s'appelle aussi balcon : il en est de grands, de moyens & de petits, selon l'ouverture des croisées ou avant-corps qui les reçoit. Voyez BANQUETTE, terme de Serrurerie.
Ce mot vient de l'Italien balcone, formé du latin palcus, ou de l'Allemand palk, une poutre. Covarruvias le fait venir de , jacere, lancer, fondé sur l'opinion que les balcons étoient de petites tourelles élevées sur les principales portes des forteresses, de dessus lesquelles on lançoit des dards, &c. sur les ennemis. (P)
BALCONS, en Marine ; ce sont des galeries couvertes ou découvertes, qu'on fait aux grands vaisseaux, pour l'agrément ou la commodité. Voyez GALERIE. (Z)
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BALDIVIA | (Géog.) port & place considérable du Chili, entre les rivieres de Callacalla & del Potrero, à leur embouchure dans la mer du Sud, Long. 306. 52. lat. mérid. 39. 58.
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BALE | (Géog.) ville de Suisse, capitale du canton de même nom. Long. 25. 15. lat. 47, 40.
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BALEARES | S. m. pl. (Géog. anc. & mod.) îles de la Méditerranée, près les côtes de Valence en Espagne, connues aujourd'hui sous le nom de Mayorque & Minorque. On donne le nom de Baleares aux habitans de ces îles, à cause de leur habileté à se servir de la fronde ; puis celui de Gymnetes, & aux îles celui de Gymnesies, par la même raison.
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BALEINE | S. f. balaena, (Hist. nat.) poisson du genre des cétacées, le plus grand de tous les animaux : c'est pourquoi on a donné le nom de baleine aux plus gros poissons, quoique de différens genres.
Les baleines que l'on prend sur la côte de Bayonne & dans les Indes, ont environ trente-six coudées de longueur sur huit de hauteur ; l'ouverture de la bouche est de dix-huit piés : il n'y a point de dents ; mais il se trouve à la place, des lames d'une sorte de corne noire, terminées par des poils assez semblables à des soies de cochon, qui sont plus courts en-devant qu'en arriere. On a donné le nom de fanons aux lames qui sont dans la bouche. On les fend pour les employer à différens usages ; c'est ce qu'on appelle la baleine dont on se sert pour faire des corps pour les femmes, les busques, &c. La langue est d'une substance si molle, que lorsqu'on l'a tirée hors de la bouche de l'animal, on ne peut plus l'y faire rentrer. Les yeux sont à quatre aunes de distance l'un de l'autre ; ils paroissent petits à l'extérieur : mais au-dedans ils sont plus grands que la tête d'un homme. La baleine a deux grandes nageoires aux côtés, il n'y en a point sur le dos. La queue est si grande & si forte, que lorsque l'animal l'agite, il pourroit, dit-on, renverser un petit vaisseau. Le cuir de la baleine est fort dur, & de couleur noire ; il n'y a point de poils ; il s'y attache quelquefois des coquillages, tels que des lépas & des huîtres. Le membre génital est proportionné à la grosseur du corps. Rondelet.
On trouva près de l'île de Corse, en 1620, une baleine qui avoit cent piés de longueur. Son lard pesoit cent trente cinq mille livres. Il fallut employer les forces de dix-sept hommes pour tirer du corps de l'animal le gros intestin, dont la capacité étoit si grande, qu'un homme à cheval auroit pû y entrer. L'épine du dos étoit composée de trente-deux vertebres. Cette baleine étoit femelle & pleine. On retira de la matrice un foetus qui avoit trente piés de longueur, & qui pesoit quinze cent livres.
On dit qu'on a vû des baleines qui avoient jusqu'à deux cent piés de longueur. Quelqu'énorme que cet animal soit par lui-même, je crois qu'on auroit voulu l'aggrandir encore davantage par l'amour du merveilleux. On prétend à la Chine qu'on y a vû des baleines longues de neuf cent soixante piés ; d'autres ont comparé ces grands poissons à des écueils, à des îles flottantes, &c. Quoi qu'il en soit de ces relations ou assûre que les premieres baleines qu'on a pêchées dans le Nord, étoient beaucoup plus grandes que celles qu'on y trouve à présent ; sans-doute parce qu'elles étoient plus vieilles. On ne sait pas quelle est la durée de la vie de ces animaux ; il y a apparence qu'ils vivent très-long-tems.
L'estomac de la baleine est d'une grande étendue ; cependant on n'y a pas vû des choses d'un grand volume. Rondelet dit qu'on n'y trouve que de la boue de l'eau, de l'algue puante, & qu'en en a tiré quelquefois des morceaux d'ambre. Il soupçonnoit que la baleine n'avaloit point de poissons, parce qu'on n'en avoit pas vû dans son estomac : mais Willugby fait mention d'une baleine qui avoit avalé plus de quarante merlus, dont quelques-uns étoient encore tous frais dans son estomac ; d'autres disent que ces grands poissons vivent en partie d'insectes de mer, qui sont en assez grand nombre dans les mers du Nord pour les nourrir, & qu'on a trouvé dans leur estomac dix ou douze poignées d'araignées noires, des anchois, & d'autres petits poissons blancs, mais jamais de gros. Les baleines mangent une très-grande quantité de harengs.
On dit que ces poissons s'élevent perpendiculairement sur leur queue pour s'accoupler ; que le male & la femelle s'approchent l'un de l'autre dans cette situation ; qu'ils s'embrassent avec leurs nageoires, & qu'ils restent accouplés pendant une demi-heure ou une heure. On prétend qu'ils vivent en société dans la suite, & qu'ils ne se quittent jamais. La femelle met bas dans l'autonne. On assure qu'il n'y a qu'un baleinon par chaque portée ; mais il est aussi gros qu'un taureau ; d'autres disent qu'il y en a quelquefois deux ; la mere l'alaite en le tenant avec ses nageoires, dont elle se sert aussi pour le conduire & pour le défendre.
M. Anderson est entré dans un détail très-satisfaisant sur les différentes especes de baleines, dans son Histoire naturelle d'Islande & du Groenland, &c. Selon cet auteur, la véritable baleine du Groenland pour laquelle se font les expéditions de la pêche, a des barbes & le dos uni. C'est celle que Ray distingue par cette phrase : balaena vulgaris edentula, dorso non pinnato. La grosseur énorme de ce poisson fait qu'il n'approche guere des côtes d'Islande, & le retient dans des abysmes inaccessibles vers Spitzberg, & sous le pole du Nord Il a jusqu'à soixante ou soixante & dix piés de longueur. La tête seule fait un tiers de cette masse. Les nageoires des côtes ont depuis cinq jusqu'à huit piés de long ; sa queue est horisontale, un peu recourbée vers le haut aux deux extrémités : elle forme à peu-près deux demi-lunes ; elle a trois ou quatre brasses de largeur ; ses coups sont très-violens, sur-tout lorsque ce poisson est couché sur le côté : c'est par le moyen de sa queue que la baleine se porte en avant ; & on est étonné de voir avec quelle vîtesse cette masse énorme se meut dans la mer. Les nageoires ne lui servent que pour aller de côté. L'épiderme de ce poisson n'est pas plus épais que du gros papier ou du parchemin. La peau est de l'épaisseur du doigt, & couvre immédiatement la graisse ; qui est épaisse de huit pouces ou d'un pié ; elle est d'un beau jaune, lorsque le poisson se porte bien. La chair qui se trouve au-dessous est maigre & rouge. La mâchoire supérieure est garnie des deux côtés de barbes qui s'ajustent obliquement dans la mâchoire inférieure comme dans un fourreau, & qui embrassent, pour ainsi dire, la langue des deux côtés. Ces barbes sont garnies du côté de leur tranchant de plusieurs appendices, & sont rangées dans la mâchoire comme des tuyaux d'orgue, les plus petites devant & derriere, & les plus grandes dans le milieu : celles-ci ont six ou huit piés & plus de longueur. La langue est adhérente presqu'en entier ; ce n'est pour ainsi dire, qu'un morceau de graisse : mais il est si gros, qu'il suffit pour remplir plusieurs tonneaux. Les yeux ne sont pas plus grands que ceux d'un boeuf, & leur crystallin desséché n'excede pas la grosseur d'un gros pois ; ils sont placés sur le derriere de la tête, à l'endroit où elle est le plus large. Les baleines ont des paupieres & des sourcils. On ne voit dans ces poissons aucune apparence d'oreilles au dehors, cependant ils ont l'ouie très-bonne ; & si on enleve l'épiderme, on apperçoit derriere l'oeil, & un peu plus bas, une tache noire, & dans ce même endroit un conduit, qui est sans-doute celui de l'oreille. Les excrémens de la baleine ressemblent assez au vermillon un peu humecté ; ils n'ont aucune mauvaise odeur. Il y a des gens qui les recherchent, parce qu'ils teignent d'un joli rouge, & cette couleur est assez durable sur la toile. La baleine mâle a une verge d'environ six piés de longueur ; son diametre est de sept à huit pouces à sa racine, & l'extrémité n'a qu'environ un pouce d'épaisseur : cette verge est ordinairement renfermée dans un fourreau. Les parties naturelles de la femelle ressemblent à celles des quadrupedes : l'orifice extérieur paroît fermé pour l'ordinaire ; il y a de chaque côté une mammelle qui s'allonge de la longueur de six ou huit pouces, & qui a dix ou douze pouces de diametre, lorsque la baleine alaite ses petits. Tous les pêcheurs du Groenland assûrent que l'accouplement de ces poissons se fait comme il a été dit plus haut. M. Dudley rapporte dans les Transactions philosophiques, n°. 387, article 2. que la femelle se jette sur le dos & replie sa queue, & que le mâle se pose sur elle & l'embrasse avec ses nageoires. Ce sont peut-être, dit M. Anderson, des baleines d'une autre espece que celle du Groenland, qui s'accouplent ainsi. Selon M. Dudley, l'accouplement ne se fait que tous les deux ans ; la femelle porte pendant neuf ou dix mois, & pendant ce tems elle est plus grosse, sur-tout lorsqu'elle est près de son terme. On prétend qu'un embryon de dix-sept pouces est déjà tout-à-fait formé & blanc : mais étant parvenu au terme, il est noir & a environ vingt piés de longueur. La baleine ne porte ordinairement qu'un foetus, & rarement deux. Lorsqu'elle donne à teter à son petit, elle se jette de côté sur la surface de la mer, & le petit s'attache à la mammelle. Son lait est comme le lait de vache. Lorsqu'elle craint pour son petit, elle l'emporte entre ses nageoires.
M. Anderson décrit plusieurs autres especes de baleines, qu'il appelle le nord-caper, le gibbar, le poisson de Jupiter, le pslock-fisch, & le knoten ou knobbelfisch ; & il rapporte aussi au genre des baleines la licorne de mer ou nerwal, le cachalot, le marsouin-sous-fleur ou tunin, le dauphin, & l'épée de mer. Voyez CETACEE, POISSON. (I)
* Pêche de la baleine. De toutes les pêches qui se font dans l'Océan & dans la Méditerranée, la plus difficile sans contredit & la plus périlleuse est la pêche des baleines. Les Basques, & sur-tout ceux qui habitent le pays de Labour, sont les premiers qui l'ayent entreprise, malgré l'âpreté des mers du Nord & les montagnes de glace, au-travers desquelles il falloit passer. Les Basques sont encore les premiers qui ayent enhardi aux différens détails de cette pêche, les peuples maritimes de l'Europe, & principalement les Hollandois qui en font un des plus importans objets de leur commerce, & y employent trois à quatre cent navires, & environ deux à trois mille matelots : ce qui leur produit des sommes très considérables ; car ils fournissent seuls ou presque seuls d'huile & de fanons de baleines. L'huile sert à brûler à la lampe, à faire le savon, à la préparation des laines des Drapiers, aux Courroyeurs pour adoucir les cuirs, aux Peintres pour délayer certaines couleurs, aux gens de mer pour engraisser le brai qui sert à enduire & spalmer les vaisseaux, aux Architectes & aux Sculpteurs pour une espece de détrempe avec céruse, ou chaux qui durcit, fait croute sur la pierre, & la garantit des injures du tems. A l'égard des fanons, leur usage s'étend à une infinité de choses utiles : on en fait des busques, des piquûres, des parasols, des corps & autres ouvrages.
Les Basques qui ont encouragé les autres peuples à la pêche des baleines, l'ont comme abandonnée, elle leur étoit devenue presque dommageable, parce qu'ayant préféré le détroit de Davis aux côtes du Groenland, ils ont trouvé le détroit, les trois dernieres années qu'ils y ont été, très-dépourvû de baleines.
Les Basques auparavant envoyoient à la pêche dans les tems favorables, environ trente navires de deux cent cinquante tonneaux, armés de cinquante hommes tous d'élite, avec quelques mousses ou demi-hommes. On mettoit dans chacun de ces bâtimens, des vivres pour six mois, consistans en biscuit, vin, cidre, eau, légumes & sardines salées. On y embarquoit encore cinq à six chaloupes, qui ne devoient prendre la mer que dans le lieu de la pêche, avec trois funins de cent vingt brasses chacun : au bout desquels étoit saisie & liée par une bonne épissure, la harpoire faite de fin brin de chanvre, & plus mince que le funin. A la harpoire tient le harpon de fer dont le bout est triangulaire & de la figure d'une fleche, & qui a trois piés de long, avec un manche de bois de six piés, lequel se sépare du harpon quand on a percé la baleine, afin qu'il ne puisse ressortir d'aucune maniere. Celui qui le lance se met à l'avant de la chaloupe, & court de grands risques, parce que la baleine, après avoir été blessée, donne de furieux coups de queue & de nageoires, qui tuent souvent le harponneur, & renversent la chaloupe.
On embarquoit enfin dans chaque bâtiment destiné à la pêche, trente lances ou dards de fer de quatre piés, avec des manches de bois d'environ le double de longueur ; quatre cent barriques tant vuides que pleines de vivres ; deux cent autres en bottes ; une chaudiere de cuivre contenant douze barriques & pesant huit quintaux ; dix mille briques de toutes especes pour construire le fourneau, & vingt-cinq barriques d'une terre grasse & préparée pour le même usage.
Quand le bâtiment est arrivé dans le lieu où se fait le passage des baleines, on commence par y bâtir le fourneau destiné à fondre la graisse & à la convertir en huile ; ce qui demande de l'attention. Le bâtiment se tient toûjours à la voile, & on suspend à ses côtés les chaloupes armées de leurs avirons. Un matelot attentif est en vedette au-haut du mât de hune ; & dès qu'il apperçoit une baleine, il crie en langue basque balia, balia ; l'équipage se disperse aussi-tôt dans les chaloupes, & court la rame à la main après la baleine apperçue. Quand on l'a harponnée (l'adresse consiste à le faire dans l'endroit le plus sensible) elle prend la fuite & plonge dans la mer. On file alors les funins mis bout à bout, & la chaloupe suit. D'ordinaire la baleine revient sur l'eau pour respirer & rejetter une partie de son sang. La chaloupe s'en approche au plus vîte, & on tâche de la tuer à coups de lance ou de dard, avec la précaution d'éviter sa queue & ses nageoires, qui feroient des blessures mortelles. Les autres chaloupes suivent celle qui est attachée à la baleine pour la remorquer. Le bâtiment toûjours à la voile, la suit aussi, tant afin de ne point perdre ses chaloupes de vûe, qu'afin d'être à portée de mettre à bord la baleine harponnée.
Quand elle est morte & qu'elle va par malheur au fond avant que d'être amarrée au côté du bâtiment, on coupe les funins pour empêcher qu'elle n'entraîne les chaloupes avec elle. Cette manoeuvre est absolument nécessaire, quoiqu'on perde sans retour la baleine avec tout ce qui y est attaché. Pour prévenir de pareils accidens, on la suspend par des funins dès qu'on s'apperçoit qu'elle est morte, & on la conduit à un des côtés du bâtiment auquel on l'attache avec de grosses chaînes de fer pour la tenir sur l'eau. Aussitôt les charpentiers se mettent dessus avec des bottes qui ont des crampons de fer aux semelles, crainte de glisser ; & de plus ils tiennent au bâtiment par une corde qui les lie par le milieu du corps. Ils tirent leurs couteaux qui sont à manche de bois & faits exprès ; & à mesure qu'ils enlevent le lard de la baleine suspendue, on le porte dans le bâtiment, & on le réduit en petits morceaux qu'on met dans la chaudiere, afin qu'ils soient plus promtement fondus. Deux hommes les remuent sans-cesse avec de longues pelles de fer qui hâtent leur dissolution. Le premier feu est de bois ; on se sert ensuite du lard même qui a rendu la plus grande partie de son huile, & qui fait un feu très-ardent. Après qu'on a tourné & retourné la baleine pour en ôter tout le lard, on en retire les barbes ou fanons cachés dans la gueule, & qui ne sont point au-dehors comme plusieurs Naturalistes se l'imaginent.
L'équipage de chaque bâtiment a la moitié du produit de l'huile ; & le capitaine, le pilote & les charpentiers ont encore par-dessus les autres une gratification sur le produit des barbes ou fanons. Les Hollandois ne se sont pas encore hasardés à fondre dans leurs navires le lard des baleines qu'ils prennent, & cela à cause des accidens du feu, qu'ils appréhendent avec juste raison. Ils le transportent avec eux en barriques pour le fondre dans leur pays, en quoi les Basques se montrent beaucoup plus hardis : mais cette hardiesse est récompensée par le profit qu'ils font, & qui est communément triple de celui des Hollandois, trois barriques ne produisant au plus fondues, qu'une barrique d'huile. Voyez le recueil de différens traités de Physique, par M. Deslandes.
C'est à un bourgeois de Cibourre, nommé François Soupite, que l'on doit la maniere de fondre & de cuire les graisses dans les vaisseaux, même à flot & en pleine mer. Il donna le dessein d'un fourneau de brique qui se bâtit sur le second pont : on met sur ce fourneau la chaudiere, & l'on tient auprès des tonneaux d'eau pour garantir du feu.
Voici maintenant la maniere dont les Hollandois fondent le lard de baleine, qu'ils apportent par petits morceaux dans des barriques. Une baleine donne aujourd'hui quarante barriques : celles qu'on prenoit autrefois en donnoient jusqu'à soixante à quatre-vingt.
On voit, fig. premiere des planches qui suivent celles de notre histoire naturelle, une coupe verticale des bacs, de la chaudiere & du fourneau à fondre le lard. On place les tonneaux A A pleins de lard qui a fermenté, sur le bord du bac B ; on vuide ces tonneaux dans ce bac ; on y remue le lard afin de le délayer, & de le disposer à se fondre. On met le feu au fourneau C, dont on voit le cendrier en E, & la grille en F ; on jette le lard du bac B dans la chaudiere G, placée dans un massif de brique & de maçonnerie, sur le fourneau C. Les bacs 1, 2, 3, qui sont tous moins élevés les uns que les autres, communiquent entr'eux par les gouttieres H ; ils sont pleins d'eau fraîche. Lorsque le lard est délayé, on le jette du bac B dans la chaudiere G, comme on vient de dire. On l'y laisse fondre ; à mesure qu'il se fond l'huile se forme & s'éleve à la surface. On la ramasse avec des cuillieres, & on la jette dans le bac 1 : à mesure qu'elle s'amasse dans le bac 1, elle descend dans le bac 2, & du bac 2 dans le bac 3. Au sortir du bac 3, on l'entonne dans des barriques pour être vendue.
On la fait passer successivement par ces bacs pleins d'eau, afin qu'elle se refroidisse plus promtement. Après qu'on a enlevé l'huile, il reste dans la poele un marc, des grillons, ou, pour parler la langue de l'art, des crotons. On prend ces crotons, & on les jette sur un grillage de bois, dont un des bouts porte sur le massif de la chaudiere, & l'autre bout à l'extrémité d'un long bac qui correspond à toute la longueur du grillage, & qui reçoit l'huile qui tombe des crotons qui s'égouttent sur le grillage. Voyez fig. 2. A, bac où l'on met le lard au sortir des barriques. B, fourneau. C, cendrier. D, grille. E, chaudiere. G H, grillage à égoutter le croton. I K, bac qui reçoit les égouttures. Fig. 3. plan des mêmes choses. A, bac à lard. C, chaudiere. D E, grillage. F G, bac à égouttures.
Les Basques, dans le commencement, faisoient la pêche dans la mer Glaciale, & le long des côtes du Groenland, où les baleines, qu'on appelle de grande baie, sont plus longues & plus grasses que dans les autres mers : l'huile en est aussi plus pure, & les fanons de meilleure qualité, sur-tout plus polis, mais les navires y courent de très-grands dangers, à cause des glaces qui viennent souvent s'y attacher, & les font périr sans ressource. Les Hollandois l'éprouvent tous les ans de la maniere du monde la plus triste.
Les côtes du Groenland ayant insensiblement rebuté les Basques, ils allerent faire leur pêche en pleine mer, vers l'île de Finlande, dans l'endroit nommé Sarde, & au milieu de plusieurs bas-fonds. Les baleines y sont plus petites qu'en Groenland, plus adroites, s'il est permis de parler ainsi d'un pareil animal, & plus difficiles à harponner, parce qu'elles plongent alternativement, & reviennent sur l'eau. Les Basques encore rebutés, ont quitté ce parage, & ont établi leur pêche dans le détroit de Davis, vers l'île d'Inseo, souvent environnée de glaces, mais peu épaisses. Ils y ont trouvé les deux especes de baleines, connues sous le nom de grandes baies, & de sarde. Voyez la pêche des baleines, dans l'ouvrage de M. Deslandes, que nous avons déjà cité.
La pêche des baleines, que nous avons apprise aux Hollandois, est devenue si considérable pour eux, qu'ils envoyent tous les ans sur nos ports sept à huit mille barrils d'huile, & du savon à proportion.
Quelqu'utile que soit cette pêche, il s'est passé des siecles sans que les hommes ayent osé la tenter. C'étoit, au tems de Job, une entreprise qu'on regardoit comme si fort au-dessus de leurs forces, que Job même se sert de cet exemple pour leur faire sentir leur foiblesse, en comparaison de la toute-puissance divine. An extrahere poteris leviathan hamo, & fune ligabis linguam ejus ? Numquid pones circulum in naribus ejus, aut armillâ perforabis maxillam ejus ? Numquid multiplicabit ad te preces, aut loquetur tibi mollia ? Numquid faciet tecum pactum, & accipies eum servum sempiternum ? Numquid illudes ei quasi avi, aut ligabis eum ancillis tuis ? Concident eum amici ? Divident illum negociatores ? Numquid implebis sagenas pelle ejus, & gurgustium piscium capite illius ? Pone super eum manum tuam, memento belli ; nec ultra addas loqui. " Homme, enleveras-tu la baleine avec l'hameçon, & lui lieras-tu la langue avec une corde ? Lui passeras-tu un anneau dans le nez, & lui perceras-tu la mâchoire avec le fer ? La réduiras-tu à la supplication & à la priere ? Fera-t-elle un pacte avec toi, & sera-t-elle ton esclave éternel ? Te joüeras-tu d'elle comme de l'oiseau, & servira-t-elle d'amusement à ta servante ? Tes amis la couperont-ils par pieces, & tes négocians la trafiqueront-ils par morceaux ? Rempliras-tu ton filet de sa peau, & de sa tête, le réservoir des poissons ? Mets ta main sur elle ; souviens-toi de la guerre, & ne parle plus. "
En vain les incrédules voudroient-ils mettre en contradiction le discours de Job avec l'expérience d'aujourd'hui : il est évident que l'écriture parle ici d'après les notions populaires de ces tems-là, comme Josué quand il dit, arrête-toi, Soleil. L'exemple du livre de Job est bien choisi : montre parfaitement la hardiesse de la tentative des Basques, & prouve qu'une exactitude scrupuleuse & peu nécessaire dans des raisonnemens physiques, nuiroit souvent au sublime.
Les anciens ne disent autre chose des baleines, sinon qu'elles se jettent quelquefois d'elles-mêmes à terre pour y joüir de la chaleur du soleil qu'elles aiment, & que d'autres échouent ou sont poussées sur les bords de la mer, par la violence de ses vagues. Si Pline rapporte que l'empereur Claude a donné le plaisir au peuple Romain, d'une espece de pêche où l'on prit une baleine, il observe en même tems que ce monstre marin avoit échoüé au port d'Ostie ; qu'aussi-tôt qu'on l'apperçut dans le détroit, l'empereur en fit fermer l'entrée avec des cordes & des filets, & que ce prince accompagné des archers de la garde prétorienne, en fit monter un certain nombre dans des esquifs & des brigantins, qui lancerent plusieurs dards à cet animal, dont il fut blessé à mort ; que dans le combat, il jetta une si grande quantité d'eau par son évent ou tuyaux, qu'il en mit à fond l'un des esquifs : mais cette histoire est rapportée comme un fait rare & singulier ; ainsi il demeure toûjours pour constant que l'usage de cette pêche n'étoit pas commun.
Et pourquoi l'auroit-il été ? on ne connoissoit presque pas, dans ces premiers tems, le profit qu'on en pouvoit tirer, Juba, roi de Mauritanie, écrivant au jeune prince Caïus César fils d'Auguste, lui manda qu'on avoit vû en Arabie des baleines de six cent piés de long & de trois cent soixante piés de large, qui avoient remonté de la mer dans un fleuve d'Arcadie, où elles avoient échoüé. Il ajoute que les marchands Asiatiques recherchoient avec grand soin la graisse de ce poisson, & des autres poissons de mer ; qu'ils en frottoient leurs chameaux pour les garantir des grosses mouches appellées taons, qui craignent fort cette odeur. Voilà, selon Pline, tout l'avantage que l'on tiroit alors des baleines. Cet auteur fait ensuite mention de quarante-deux sortes d'huile, & l'on n'y trouve point celle de ce poisson : on savoit encore si peu profiter de ce poisson, sous les regnes de Vespasien, de Tite, de Domitien, & de Nerva, que Plutarque rapporte que plusieurs baleines avoient échoüé en donnant de travers aux côtes de la mer, comme un vaisseau qui n'a point de gouvernail ; que lui-même en avoit vû dans l'île d'Ancire ; qu'une entre les autres, que les flots avoient jettée sur le rivage proche la ville de Bunes, avoit tellement infecté l'air par sa putréfaction, qu'elle avoit mis la peste dans la ville & dans les environs.
Voici comment on prétend que nos Biscayens du cap-Breton, près de Bayonne, & quelques autres pêcheurs, ont été engagés à la pêche des baleines. Il paroît tous les ans sur leurs côtes, vers l'hyver, de ces baleines qui n'ont point d'évent, & qui sont fort grasses : l'occasion de pêcher de ces poissons se présenta donc dans leur propre pays, & ils en profiterent. Ils se contenterent de ces baleines pendant fort long-tems : mais l'observation qu'ils firent ensuite, que ces monstrueux poissons ne paroissoient dans les mers de ces pays-là qu'en certaines saisons, & qu'en d'autres tems ils s'en éloignoient, leur fit naître le dessein de tenter la découverte de leur retraite. Quelques pêcheurs du cap-Breton s'embarquerent & firent voile vers les mers de l'Amérique, & l'on prétend que ce fut eux qui découvrirent les premiers les îles de Terre-Neuve, & la terre-ferme du Canada, environ cent ans avant les voyages de Christophle Colomb, & qu'ils donnerent le nom de cap-Breton, leur patrie, à une de ces îles, nom qu'elle porte encore. Voyez Corneil. Witfl. Ant. Mang. Ceux qui sont de ce sentiment ajoûtent que ce fût l'un de la nation de ces Biscayens qui donna avis de cette découverte à Colomb, l'an 1492, & que celui-ci s'en fit honneur : d'autres croyent que ce ne fut que l'an 1504 que ce premier voyage fut entrepris par les Basques, auquel cas il seroit postérieur à celui de Colomb. Quoi qu'il en soit, il est certain qu'ils découvrirent, dans les mers qui sont au nord de l'Amérique, un grand nombre de baleines, mais en même tems, qu'ayant aussi reconnu qu'elles sont encore plus abondantes en morues, ils préférerent la pêche de ce dernier poisson à la pêche de l'autre.
Lorsque le tems approche où les navires baleiniers doivent revenir, il y a toûjours des matelots en sentinelle dans le port de Succoa. Les premiers qui découvrent un bâtiment prêt à arriver, se hâtent d'aller à sa rencontre, & se font payer un droit de 30 sous par homme. Quelque tems qu'il fasse, ils s'embarquent sans rien appréhender, & se chargent de mouiller le bâtiment à un des endroits connus de la bonne rade. " Il est, dit M. Deslandes, aisé de voir que l'intérêt seul ne les guide point : rien, en effet, n'est plus modique, sur-tout dans les mauvais tems, & lorsque la mer brise contre une côte toute de fer, que la rétribution qu'on leur donne : mais ils seroient infiniment affligés de voir périr leurs compatriotes, & c'est un service d'humanité qu'ils se rendent mutuellement ".
* BALEINE, (le blanc de) n'est autre chose qu'une préparation de cervelle de cachalots, qui se fait à Bayonne & à Saint Jean de Luz. Prenez la cervelle de cet animal ; fondez-la à petit feu ; jettez-la ensuite dans des moules comme ceux des sucreries, laissez-la égoutter son huile & se refroidir ; refondez-la ensuite, & continuez de la faire égoutter & fondre jusqu'à ce qu'elle soit bien purifiée & bien blanche : coupez-la ensuite & la remettez en écaille de la forme de celles qu'on nous vend. Il faut choisir ces écailles belles, blanches, claires, & transparentes, d'une odeur sauvagine, & sans aucun mêlange de cire blanche, & les tenir dans des barrils ou des vaisseaux de verre bien fermés.
Je ne prétens point contredire M. Pomet sur la nature & la maniere de faire le blanc de baleine, dit M. James dans son Dictionnaire de Medecine ; j'ai pourtant vû, ajoûte-t-il, du blanc de baleine qui n'avoit essuyé aucune préparation, & qu'on s'étoit contenté de mettre dans des sacs de papier pour en absorber l'huile ; & je puis assûrer que ce n'est ni l'huile ni le sperme de la baleine, mais une substance particuliere qu'on trouve dans la tête de ce poisson. On le trouve aussi dans d'autres endroits que la tête ; mais il y est moins bon. Voyez à l'article CACHALOT, ce qu'il y a de vrai ou de faux dans ce sentiment de M. James.
BALEINE, (le blanc de) Mat. med. est un remede dans plusieurs cas ; on l'employe d'ordinaire pour les meurtrissures, les contusions internes, & après l'accouchement ; c'est un balsamique dans plusieurs maladies de la poitrine ; il déterge & consolide : il est très-sûr & très-efficace dans les toux qui viennent d'un catarrhe opiniâtre, d'érosion, d'ulcération, aussi-bien que dans les pleurésies & les abcès internes ; c'est un consolidant, lorsque la mucosité des intestins a été emportée par l'acrimonie de la bile, comme dans les diarrhées & les dyssenteries. Il convient aussi dans les ulceres des reins & pour l'épaississement du sang ; il ramollit & relâche les fibres ; il contribue souvent à l'expulsion de la gravelle, en élargissant les passages : on l'emploie en forme d'électuaire & de bol, avec des conserves convenables & autres choses de cette espece ; & lorsqu'on a eu le soin de le mêler comme il faut, il est difficile que le malade le découvre sous cette forme ; on le dissout aussi par le moyen d'un jaune d'oeuf, ou bien on le réduit en émulsion ; la dose ordinaire est d'environ demi-gros.
Employé à l'extérieur il est émollient, consolidant ; il sert sur-tout dans la petite vérole, & l'on en oint les pustules lorsqu'elles commencent à se durcir, après l'avoir mêlé avec de l'huile d'amendes douces. Il n'y a pas long-tems qu'on s'en sert dans cette maladie, quoiqu'il ait été en usage du tems de Schroder, pour dissiper les crevasses que laissent la galle & les pustules.
On l'employe souvent comme un cosmétique dans le fard, & dans les pâtes avec lesquelles on se lave les mains. (N)
BALEINE, (en Astronomie) est une grande constellation de l'hémisphère méridional sous les Poissons, & proche de l'eau du Verseau. V. CONSTELLATION.
Il y a dans la baleine 22 étoiles selon le catalogue de Ptolomée ; 21, selon le catalogue de Tycho ; 22, selon Hevelius, & 78, dans le catalogue Britannique. (O)
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BALEVRES | S. f. pl. (terme d'Architecture) du latin bislabra, qui a deux levres ; c'est l'excédent d'une pierre sur une autre près d'un joint, dans la douille d'une voute, ou dans le parement d'un mur ; & on retaille les balevres en ragréant : c'est aussi un éclat près d'un joint occasionné dans la pierre, parce que le premier joint étoit trop serré. (P)
BALEVRES, (en Fonderie en grand) on donne ce nom à ces inégalités qu'on apperçoit sur la surface des pieces fondues, & qu'il faut réparer ensuite : elles sont occasionnées dans la fonte en grand par les cires, & les jointures des assises, on a soin par cette raison que les jointures des assises tombent aux endroits de la figure les moins remarquables, afin que les balevres en soient plus faciles à réparer ; dans la fonte en petit, les balevres viennent des défauts de l'assemblage des pieces qui composent le moule & les cires. On a, ainsi que dans la fonte en grand, l'attention de les écarter des parties principales, & la même peine à les réparer.
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BALI | (Géog.) ville d'Asie, capitale de l'île & du royaume de même nom, aux Indes. Long. de l'île, 133-135. lat. 9.
* BALI, (Géog.) royaume d'Afrique, dans l'Abyssinie : le fleuve Havasch le traverse.
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BALISCORNE | ou BASSECONDE, s. f. on donne dans les grosses forges ce nom à une piece de fer M X, fixée sur le dessus de la caisse des soufflets par des attaches de fer N N, qui l'embrassent : le bout M en est arrondi, & c'est sur cette partie que portent les cammes de l'arbre qui fait baisser la caisse. Voyez Planche VII. fig. 1. des grosses forges.
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BALISER | BALISER
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BALISES | S. f. (terme de mer & de rivieres) c'est une marque que l'on met sur un banc dangereux pour avertir les vaisseaux de l'éviter. Ces marques sont différentes ; quelquefois c'est un mât ou une piece de bois qu'on éleve dessus, ou aux extrémités ; d'autres fois c'est un tonneau flottant amarré avec des chaînes & des ancres sur le fond du banc : on met des balises pour indiquer un chenal ou une passe dangereuse : on se sert également du mot de bouée pour exprimer ces marques.
BALISE, se dit aussi de l'espace qu'on est obligé de laisser le long des rivages des rivieres pour le halage des bateaux.
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BALISEUR | S. m. en terme d'Eau & Forêts, est un officier chargé de veiller aux terres des riverains ; à l'effet d'en reculer les limites du côté du bord de la riviere, à la distance prescrite. V. RIVERAIN. (H)
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BALISIER | subst. m. cannacorus, (Hist. nat. bot.) genre de plante à fleur liliacée monopétale en forme de tuyau, divisée en six parties, dont l'une forme une sorte de languette qui semble tenir lieu de pistil, & qui a au sommet comme une étamine ; le calice est en forme de tuyau ; il embrasse la fleur, & devient dans la suite un fruit oblong ou arrondi, membraneux, divisé en trois loges, & rempli de semences presque sphériques. Tournefort, Inst. rei herb. Voyez PLANTE. (I)
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BALISTE | S. f. (Art milit.) est une machine de guerre dont se servoient les anciens pour lancer des traits d'une longueur & d'un poids surprenant ; elle chassoit aussi des balles ou boulets de plomb égaux au poids des gros traits qu'elle lançoit.
Les écrivains de l'antiquité, au moins le plus grand nombre, sont opposés les uns & les autres à l'égard de la baliste & de la catapulte. Voyez CATAPULTE. Ils confondent souvent ces deux machines, qui suivant M. le chevalier de Folard different beaucoup entr'elles dans leur usage comme dans leur construction.
Ammien Marcellin exprime la catapulte par le terme de tormentum, & quelquefois d'onagre. Voy. ONAGRE. Froissart se sert de celui d'engin : celui-ci est trop général ; car on peut entendre par ce terme la baliste & la catapulte. Il y a aussi des auteurs qui lui ont donné le nom de scorpion : mais le scorpion chez ceux qui paroissent les mieux instruits, n'est autre chose que la baliste. Voyez SCORPION.
" La baliste, dit M. le chevalier de Folard, dont nous tirons la description suivante, formoit comme un arc brisé ; elle avoit deux bras, mais droits, & non pas courbes comme l'arc d'une arbalête, dont les forces agissantes sont dans les ressorts de l'arc même dans sa courbure : celles de la baliste sont dans les cercles comme celle de la catapulte : cela nous dispensera d'entrer dans une description trop détaillée de ses différentes parties. La figure en fera infiniment mieux comprendre la structure & la puissance qui la fait agir, que l'explication ne pourroit faire ". Voyez cette figure, Planche XII. de Fortification : elle a pour titre Baliste de siége. Voici le détail de ses principales parties.
Une baliste de cette espece lançoit des traits de soixante livres, longs de trois piés neuf pouces & neuf lignes : cela-veut dire, s'il faut s'en fier à Vitruve, dit le chevalier de Folard, " que les trous des chapiteaux étoient de huit pouces neuf lignes de diametre, c'est-à-dire le cinquieme de la longueur du trait. Elle est composée d'une base 2, des dix montans 3, 4, de quinze diametres & dix lignes de hauteur sans les tenons des deux traversans 5, 6 : leur longueur est de dix-sept diametres dix lignes ; 7, sont les deux chapiteaux du traversant ; 5, 8, les chapiteaux de celui d'en-bas 6 ; ces deux traversant sont soûtenus & fortifiés des deux poteaux équarris 9 ; de cinq diametres de hauteur sans les tenons, & de deux piés de grosseur comme les montans. L'intervalle d'entre les deux poteaux 9, & les deux montans 3, 4, où sont placés les chapiteaux, est de sept diametres environ ; 10 sont les deux écheveaux de cordes de droit & de gauche ; 11 les deux bras engagés dans le centre des écheveaux : leur longueur est de dix diametres, compris les deux crochets qui sont l'extrémité de chaque bras, où la corde, ou pour mieux dire, le gros cable est attaché comme la corde d'une arbalête. Ce cable doit être composé de plusieurs cordes de boyaux extrèmement tendues : il faut qu'il soit d'abord un peu court, parce qu'il s'allonge & se lâche dans le bandage : on l'accourcit en le tordant.
Les bouts des bras n'ont point de cuilleron comme celui de la catapulte ; à cela près ils doivent être semblables, parfaitement égaux dans leur grosseur, dans leur longueur, dans leur poids, & il faut qu'ils ne plient point dans le plus violent effort de leur tension. Les traits 13 ne doivent pas moins être égaux en tous sens que les bras, qui seront placés sur une même ligne parallele, à même hauteur par conséquent, & au centre des deux écheveaux dans lesquels ils sont engagés.
Les deux montans 3, 4, doivent être courbes à l'endroit 14 où ils frappent dans la détente. Dans cette courbure on y pratiquera les coussinets 15, cet enfoncement fait que les bras se trouvent paralleles à l'écheveau, & qu'ils décrivent chacun un angle droit dans leur bandage, c'est-à-dire dans leur plus grande courbure. Il importe peu, à l'égard des balistes, que les deux bras frappent de leurs bouts ou de leur milieu contre les deux coussinets ; ainsi on peut, autant qu'on le juge à-propos, diminuer de la largeur des deux chassis où sont placés les deux écheveaux de cordes, sans retrancher de leur hauteur.
L'intervalle d'entre les deux poteaux 9, qui doit être au milieu des deux traversans, où l'on introduit l'arbrier 16, doit être un peu plus étroit que l'arbrier, afin de pratiquer une entaille dans l'intérieur des poteaux 9 de deux ou trois pouces des deux côtés, afin de le tenir ferme. C'est sur cet arbrier que l'on place le gros trait & que l'on pratique un canal parfaitement droit ; sa longueur se prend sur la courbure des deux bras avec la corde 12 : ainsi on connoît la longueur qu'il faut donner au canal & jusqu'à l'endroit où la noix 17 de la détente se trouve placée pour recevoir la corde de l'arc à son centre. Cette noix sert d'arrêt, & la détente est semblable à celle des arbalêtes. Il y a une chose à observer à l'égard de l'arbrier : il faut qu'il soit placé juste à la hauteur de la corde qui doit friser dessus ; car si elle étoit plus haute, elle ne prendroit pas le trait ; & si elle appuyoit trop fortement dessus, il y auroit du frottement sur le canal où le trait est étendu, ce qui diminueroit la puissance qui le chasse.
A deux piés en-deçà de la détente est le travail 18, autour duquel se devide la corde ; & lorsqu'on veut bander la machine, on accroche la corde de l'arc à son centre par le moyen d'une main de fer 19. Cette main a deux crochets qui saisissent la corde en deux endroits pour l'amener. La distance d'un crochet à l'autre doit être plus grande que la largeur de la noix, qui doit avoir une ouverture au milieu comme celle des arbalêtes, dans laquelle on introduit le talon du trait contre la corde qui prend à la noix.
J'ai dit que les deux montans, 3, 4, étoient appuyés sur leur base à tenons & à mortoises ; ils devoient être appuyés & retenus encore par de puissantes contrefiches. Heron & Vitruve lui-même mettent une espece de table ou d'échafaudage 20, sur lequel l'arbrier est en partie soûtenu, dont la hauteur jointe à l'épaisseur de l'arbrier devoit arriver juste à la hauteur de la corde 12. Je crois, dit toûjours M. de Folard, que cette table n'étoit faite que pour aider à soutenir l'arbrier, qui devoit être composé d'une grosse poutre de seize diametres & de deux piés de longueur, d'une de largeur & d'une d'épaisseur, conforme au trait qu'elle lançoit. Ajoûtez la force extraordinaire du bandage, capable de faire plier la plus forte poutre ; si son épaisseur ne surpasse sa largeur. J'imagine toutes ces raisons, pour prouver la nécessité de cette table, parce que je n'en vois aucune autre ; car à parler franchement, cette charpente paroît un peu superflue : mais comme il faut respecter l'antiquité & l'expérience de ces sortes de machines que nous n'avons point, nous hasardons cette structure dans ce qui nous a paru inutile, qui ne l'est peut-être pas ".
Cette réflexion de M. de Folard est d'autant plus juste, que les anciens s'étant expliqués d'une maniere fort obscure sur les différentes machines de guerre qui étoient en usage de leur tems, il est bien difficile de se flater d'avoir deviné juste tout ce qui concerne ces machines : aussi si M. de Folard dit un habile journaliste, n'a pas toûjours donné dans le vrai à cet égard, toûjours peut-on dire qu'on lui a de grandes obligations, & qu'il en a peut-être approché plus que tous ceux qui ont travaillé avant lui sur le même sujet. Bibliotheque raisonnée des savans de l'Europe : tome V.
Au reste les anciens historiens rapportent des effets de ces machines qui nous paroissent presqu'incroyables. M. de Folard a eu soin de les rapporter dans son traité de l'attaque des places des anciens. Voy. CATAPULTE. (Q)
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BALISTIQUE | S. f. (Ordre encyclopédique, Entendement, Raison, Philosophie ou Science. Science de la nature. Mathématiques. Mathématiques mixtes. Méchanique. Dynamique. Dynamique proprement dite. Balistique) c'est la science du mouvement des corps pesans jettés en l'air suivant une direction quelconque. Ce mot vient du grec, jacio ; je jette.
On trouvera à l'article PROJECTILE les lois de la Balistique. La théorie du jet des bombes est une partie considérable de cette science, & c'est principalement cette théorie qu'on y traite. Nous avons là-dessus plusieurs ouvrages, l'art de jetter les bombes de M. Blondel, de l'académie des Sciences, un des premiers qui ayent paru sur cette matiere ; le Bombardier françois par M. Belidor, &c. Mais personne n'a traité cette science d'une maniere plus élegante & plus courte que M. de Maupertuis, dans un excellent mémoire imprimé parmi ceux de l'académie des Sciences de Paris de 1732 ; ce mémoire est intitulé Balistique arithmétique, & on peut dire qu'il contient en deux pages plus de choses que les plus gros traités que nous ayons sur cette matiere. M. de Maupertuis cherche d'abord l'équation analytique de la courbe A M B (fig. 47. Méch.), que décrit un projectile A jetté suivant une direction quelconque A R ; il trouve l'équation de cette courbe entre les deux coordonnées A T, x, & T M, y, & il n'a pas de peine à faire voir que cette équation est celle d'un parabole. En faisant y = 0, dans cette équation, la valeur correspondante de x lui donne la partie A B du jet ; pour avoir le cas où la portée A B du jet est la plus grande qu'il est possible, il prend la différence de la valeur de A B, en ne faisant varier que la tangente de l'angle de projection RAB ; & il fait ensuite cette différence = 0, suivant la regle de maximis & minimis, ce qui lui donne la valeur de la tangente de l'angle de projection, pour que A B soit la plus grande qu'il est possible, & il trouve que cette tangente doit être égale au rayon, c'est-à-dire que l'angle B A R doit être de 45 degrés. Pour avoir la hauteur t m du jet, il n'y a qu'à faire la différence de y = 0, parce que t m est la plus grande de toutes les ordonnées. Pour frapper un point donné n avec une charge donnée de poudre, il substitue dans l'équation de la parabole, à la place de x, la donnée A I, & à la place de y, la donnée In, & il a une équation dans laquelle il n'y a d'inconnue que la tangente de l'angle de projection R A B, qu'il détermine par cette équation, &c. & ainsi des autres.
Au reste, la plûpart des auteurs qui ont traité jusqu'à présent de la Balistique, ou ce qui est presque la même chose, du jet des bombes, ne l'ont fait que dans la supposition que les corps se meuvent dans un milieu non résistant ; supposition qui est assez éloignée du vrai. M. Newton a démontré dans ses principes, que la courbe décrite par un projectile dans un milieu fort résistant, s'éloigne beaucoup de la parabole ; & la résistance de l'air est assez grande pour que la différence de la courbe de projection des graves avec une parabole ne soit pas insensible. C'est au moins le sentiment de M. Robins, de la Société royale de Londres ; ce savant a donné depuis peu d'années un ouvrage anglois, intitulé A new principles of gunnery, nouveaux principes d'Artillerie ; dans lequel il traite du jet des bombes, & en général du mouvement des projectiles, en ayant égard à la résistance de l'air qu'il détermine en joignant les expériences à la théorie, il n'y a point de doute que la Balistique ne se perfectionnât considérablement, si on s'appliquoit dans la suite à envisager sous ce point de vûe le mouvement des projectiles. Voyez RESISTANCE.
Selon d'autres auteurs, qui prétendent avoir aussi l'expérience pour eux, la courbe décrite dans l'air par les projectiles est à-peu-près une parabole, d'où il s'ensuit que la résistance de l'air au mouvement des projectiles est peu considérable. Cette diversité d'opinions prouve la nécessité dont il seroit de constater ce fait de nouveau par des expériences sûres & bien constatées. (O)
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BALIVEAU | S. m. en terme d'Eaux & Forêts, signifie un jeune chêne, hêtre ou châtaigner au-dessous de quarante ans, reservé lors de la coupe d'un taillis. Les ordonnances enjoignent d'en laisser croître en haute futaie seize par chaque arpent, afin de repeupler les ventes. (H)
* On peut considérer les baliveaux par rapport aux bois de haute-futaie, & par rapport aux taillis. Par rapport au premier point, M. de Reaumur prétend dans un mémoire sur l'état des bois du royaume, imprimé dans le recueil de l'académie, année 1721, que les baliveaux sont une mauvaise ressource pour repeupler le royaume de bois de haute-futaie, parce qu'une très-grande partie périt ; car n'ayant pas pris dans les taillis qui les couvroient toute la force nécessaire pour résister aux injures de l'air, on ne peut leur ôter cet abri sans inconvénient. Des lisieres entieres de jeunes futaies ont péri dans un hyver froid, mais non excessivement rude, après qu'on eut coupé pendant l'été d'autres lisieres qui les couvroient. Il en arrive autant aux arbres réservés au milieu de forêts abattues. Des baliveaux qui ont échappé aux injures de l'air, peu échappent à la coignée du bucheron ; il en abat au moins une partie dans la coupe suivante du taillis : les morts lui donnent occasion d'attaquer les vifs ; & il est de notoriété que dans la plûpart des taillis, on ne trouve que des baliveaux de deux à trois coupes. Mais indépendamment de cela, dit M. de Reaumur, ces baliveaux ne seront pas des arbres d'une grande ressource ; ils ont peu de vigueur & sont tous rabougris, s'ils n'ont pas péri, ils sont restés malades ; & quelque bon qu'ait été le terrein, jamais baliveau ne parviendra peut-être & n'est parvenu à devenir un arbre propre à fournir une longue poutre, un arbre de pressoir, ni quelqu'autre semblable piece de bois. Cela est sûr au moins par rapport aux baliveaux réservés dans les taillis qu'on coupe de dix ans en dix ans au plûtôt. Ils ne sont jamais hauts de tige, & croissent toûjours en pommiers.
Ces inconvéniens des baliveaux seront d'autant moindres, que le taillis sera coupé dans un âge plus avancé, mais à quelqu'âge qu'on le coupe, on ne peut pas espérer que les baliveaux réparent les futaies qui s'abattent journellement.
Quant au second point, la conservation des taillis par les baliveaux ; il ne faut, dit le même auteur, que parcourir les taillis où les baliveaux ont été le mieux conservés ; on trouvera qu'au-dessous & tout autour du baliveau, sur-tout quand il est parvenu à âge d'arbre, la place est nette, & que les souches sont péries, parce qu'elles se sont trouvées trop à l'ombre : aussi, bien des particuliers qui souhaitent abattre leurs baliveaux, ne le souhaitent que pour conserver leurs taillis. Si les baliveaux donnent quelques glands aux taillis, ils les leur font donc payer cher ; d'ailleurs ces glands tombant au hasard sur la surface de la terre, & la plûpart sous l'arbre même, ne réussissent guere.
M. de Buffon s'accorde en ceci avec M. de Reaumur. " On sait, dit cet académicien, dans un mémoire sur la conservation & le rétablissement des forêts, année 1739, que le bois des baliveaux n'est pas de bonne qualité, & que d'ailleurs ces baliveaux font tort aux taillis. J'ai observé fort souvent les effets de la gelée du printems dans deux cantons voisins des bois taillis. On avoit conservé dans l'un tous les baliveaux de quatre coupes successives ; dans l'autre on n'avoit réservé que les baliveaux de la coupe actuelle. J'ai reconnu que la gelée avoit fait un si grand tort au taillis surchargé de baliveaux, que l'autre taillis l'a devancé de près de cinq ans sur douze. L'exposition étoit la même : j'ai sondé le terrein en différens endroits, il étoit semblable. Ainsi, continue M. de Buffon, j'attribue cette différence à l'ombre & à l'humidité que les baliveaux jettoient sur les taillis ; & à l'obstacle qu'ils formoient au desséchement de cette humidité en interrompant l'action du vent & du soleil. Ils seroit donc à propos de recourir à des moyens plus efficaces que les baliveaux, pour la restauration de nos forêts de haute-futaie, & celle de nos bois taillis ". Voyez FORETS, TAILLIS.
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BALK | ou BALKHE, (Géog.) ville d'Asie, au pays des Usbecs, dans la province du même nom, sur la riviere de Dilhas. Long. 85. lat. 36. 40.
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BALLADE | S. f. (Belles-Lettres) piece de vers distribuée ordinairement en trois couplets, tous les trois de même mesure & sur les mêmes rimes masculines & féminines, assujettie à un refrein qui sert de dernier vers à chaque couplet, & terminée par un envoi ou adresse qui doit aussi finir par le refrein. Le nombre des vers du couplet n'est point limité. Ce sont ou des quatrains, ou des sixains, ou des huitains, ou des dixains, ou des douzains ; l'envoi est ordinairement de quatre ou de cinq vers, mais quelquefois tous féminins. Voilà du moins les lois auxquelles Jean Marot s'est conformé dans ses trois ballades d'amour, dont les deux dernieres sont excellentes ; elles sont de vers de dix syllabes ; c'est la mesure affectée à cette sorte d'ouvrage : il y a cependant des ballades en vers de huit syllabes. On ne fait plus guere de ballades, & je n'en suis pas trop surpris ; la ballade demande une grande naïveté dans le tour, l'esprit, le style, & la pensée, avec une extrème facilité de rimer. Il n'y a presque que la Fontaine qui, réunissant toutes ces qualités, ait su faire des ballades & des rondeaux depuis Clément Marot.
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BALLE | S. f. se dit en général de tout corps à qui l'on a donné artistement la figure sphérique ! ainsi on dit, une balle de paume, une balle de coton, &c.
* BALLE, s. f. (Hist. anc. & gymnast.) instrument dont les anciens se servoient dans la danse appellée sphéristique. Voyez SPHERISTIQUE.
Les différens jeux de balle produisoient parmi les anciens différens effets relatifs à la conservation de la santé. Les grands mouvemens que ces jeux occasionnent, les rendent utiles lorsque l'exercice est nécessaire, & que les personnes sont en état de le supporter. Ils donnent de la vigueur, & font allonger les fibres musculeuses & nerveuses ; aussi voit-on qu'entre les jeunes gens, ceux qui y sont exercés, sont communément plus grands, plus forts, & plus alertes que les autres. Voyez EXERCICE, GYMNASTIQUE, JEU.
BALLE, dans l'Art milit. comprend toutes sortes de petites boules ou boulets pour les armes à feu, depuis le canon jusqu'au pistolet. Voyez BOULET, ARME A FEU, CANON, &c.
Celles qui servent pour les canons sont de fer ; celles des mousquets, carabines, & pistolets, sont de plomb. On a voulu se servir de balles de fer pour ces armes : mais on a reconnu qu'outre leur légereté qui ne permet pas de tirer juste, elles ont encore le défaut de rayer le canon du fusil.
Il faut remarquer que quoiqu'on dise ordinairement un boulet de canon, on dit aussi qu'une piece de batterie porte 36, 33, ou 24 livres de balle. On dit encore charger le canon à balle, pour dire charger à boulet. (Q)
* Les balles dont on charge les petites armes à feu, se fabriquent de la même maniere que les dragées moulées, mais dans des moules plus grands. Voyez l'article FONTE de la dragée au moule. Il y en a de 26 sortes différentes, numérotées selon la quantité ou le nombre qu'il faut pour faire une livre pesant. La sorte la plus grosse est des huit à la livre ; la sorte suivante est de seize à la livre, & chaque balle pese une once. La plus petite, qui approche beaucoup de la dixieme sorte de dragée, est des 120 à la livre. Voyez la table à l'article cité.
On appelle balles ramées, deux balles attachées ensemble par un fil de fer ; & balle de calibre, celle qui est de même grosseur que le calibre du fusil.
* Comme il importe aux chasseurs qui ont quelquefois occasion de tirer du poisson dans l'eau, de savoir si les balles y souffrent ou non de la réfraction, je vais rapporter quelques expériences que M. Carré, de l'académie royale des Sciences, a fait faire, & qu'on peut voir dans le recueil de cette académie année 1705. On tira un fusil chargé à balle deux coups dans un bassin de pierre plein d'eau, de deux piés & demi de diametre, profond de seize pouces, sous un angle de 20 degrés & sous celui de 80 ; mais le grand effort de l'eau contre les parois du bassin où l'on avoit mis les ais, le dérangerent tellement qu'on ne put savoir si les balles souffroient quelque dérangement dans la direction de leur mouvement. Les expériences réitérées dans des bennes pleines d'eau ont été accompagnées du même inconvénient : elles ont été brisées sur le champ, & ce furent les cerceaux d'en-bas que l'eau fit casser.
On seroit tenté de croire que c'étoit la balle qui faisoit briser les vaisseaux en passant à-travers les ais, & non le mouvement de l'eau : mais l'expérience qui suit ne laisse aucun doute que ce ne soit la derniere de ces causes. Un coup fut tiré dans une caisse quarrée d'un pié de haut, & de six pouces d'épaisseur, dont les quatre ais qui faisoient la longueur avoient chacun un pouce d'épaisseur, & les deux bouts en avoient chacun deux, afin d'y bien attacher les autres avec force clous : on avoit rempli ce vaisseau par une petite ouverture, les ais furent percés par la balle sans en être brisés : mais l'eau s'en tourmenta de maniere qu'elle fit écarter ces ais les uns des autres, & que la caisse fut rompue.
Il fallut donc pour obtenir un résultat exact sur la réfraction, recommencer les expériences dans un bassin de pierre : on en prit un dont la longueur intérieure étoit de trois piés trois pouces, la largeur d'un pié huit pouces, & la profondeur d'un pié & un pouce ; on fit placer à son côté le plus éloigné un ais pour recevoir les balles ; un autre ais vertical & pareil à celui-là occupoit le milieu du bassin, & au-dessus du côté le plus voisin du tireur, un carton : l'arquebuse étoit arrêtée fixe à huit piés du bassin. La balle a percé le carton : mais elle est tombée applatie, à-peu-près comme une piece de douze sols, entre le carton & le premier ais. Au second coup, la balle s'est divisée en trois morceaux applatis, sans avoir atteint le premier ais. On a tiré deux autres coups avec une forte charge, sans trouver de balles dans le fond du bassin ni contre les ais : ces balles avoient près de quatre lignes de diametre ; elles étoient faites exprès pour l'arquebuse, & ne pouvoient entrer dans le canon qu'en les poussant avec une baguette de fer.
On a mis dans un reservoir de 10 piés en quarré deux ais paralleles entr'eux & à l'horison, & à un pié de distance l'un de l'autre : celui de dessus ne faisant qu'un même plan avec la surface de l'eau, on a tiré deux coups sur cet ais, sous un angle de 30 degrés, avec une égale charge de poudre ; le premier avec une arquebuse dont le canon avoit trois piés deux pouces six lignes de long, & la balle trois lignes 3/4 de diametre ; le second avec un fusil dont le canon avoit trois piés dix pouces trois lignes de long ; & la balle sept lignes de diametre : la grosse balle a percé les deux ais, & traversé par conséquent toute l'étendue de l'eau qui étoit entr'eux ; au lieu que la petite n'a percé que l'ais supérieur, & s'est arrêtée applatie sur l'ais inférieur : d'où l'on a conclu que le fusil étoit plus propre pour l'expérience de la réfraction que l'arquebuse.
On a attaché au-dessus du bassin de pierre qu'on a décrit plus haut, un fusil sur deux appuis fixes, dont l'un étoit à cinq & l'autre à sept piés de distance du bassin : on l'a assûré & rendu immobile sur ces appuis : il faisoit avec l'horison, ou la surface de l'eau ou du bassin, un angle de vingt degrés ; il étoit chargé du poids de trois deniers vingt grains de poudre, avec une balle de sept lignes de diametre, qui pesoit dix-sept deniers six grains. La balle a percé le carton, le premier ais, & s'est arrêtée dans le second : on a vuidé l'eau, & les centres des trois trous se sont trouvés exactement dans la même direction.
La même expérience réitérée a donné la même chose : en augmentant la charge, on a remarqué que la balle entroit moins ; & chassée par sept deniers six grains de poudre, elle s'est applatie d'un côté, & a peu frappé l'ais du milieu.
Chassée de l'arquebuse avec la même charge, elle s'est divisée en deux parties, chacune inégalement applatie, sans avoir touché l'ais du milieu. Chassée de la même arme avec la moitié de la charge, elle n'a point atteint l'ais du milieu, & n'a perdu que peu de sa sphéricité.
Une balle de sept lignes poussée avec une forte charge dans un réservoir de 40 piés de diametre, profond de six piés, contre un linge parallelement étendu à la surface de l'eau, à deux piés de profondeur, est restée sur ce linge applatie, mais fort inégalement.
La balle de même calibre, chassée de la même arme avec un tiers de poudre de plus, s'est divisée en plusieurs petits morceaux de la grosseur d'une lentille, & diversement figurés.
La balle tirée perpendiculairement à la surface de l'eau, s'est applatie assez régulierement.
Quand on tire dans l'eau, il s'en éleve une quantité plus ou moins grande, & plus ou moins haut, selon la charge : quand la charge est forte, l'eau s'éleve jusqu'à vingt piés.
La balle de sept lignes chassée par quatre deniers de poudre ou environ, entre assez avant dans l'eau sans perdre de sa sphéricité ; chassée par huit deniers de poudre, elle en perd la moitié ; par douze deniers elle la perd entierement ; & par seize, elle se divise en plusieurs parties.
D'où il s'ensuit 1°. que la commotion communiquée à l'eau par la balle est très-considérable ; en effet si l'on tire sur une riviere, on en sentira le rivage ébranlé sous ses piés : 2°. que plus la charge est forte, moins la balle fait de progrès dans l'eau : 3°. qu'il n'y a point de réfraction sensible : 4°. par conséquent qu'il ne faut tirer dans l'eau, ni au-dessous ni au-dessus de l'objet qu'on veut atteindre : 5°. qu'il ne faut employer qu'une petite charge.
Mais on sait qu'une balle qui passe à-travers un morceau de bois mobile sur des gonds, & fort épais, ne se défigure presque pas, & ne lui communique aucune impulsion ; tandis qu'il est constant par les expériences qui précedent, qu'elle s'applatit sur l'eau, & occasionne une grande commotion à tout le rivage. D'où vient, peut-on demander, la différence de ces phénomenes ? l'eau seroit-elle plus difficile à diviser que le bois.
Voici comment je pense qu'on pourroit répondre à cette objection : qu'un corps mû ne communique du mouvement, au moins de translation, à un autre, qu'autant que cet autre lui résiste ou s'oppose à son mouvement. Ayez un corps, même mou, rendez-le résistant, & aussi-tôt vous lui communiquerez beaucoup de mouvement, & à tout ce qui l'environnera. Si vous enfoncez doucement un bâton dans l'eau, vous la diviserez sans peine, & presque sans l'agiter ; si vous la frappez avec impétuosité, vous donnez lieu à son élasticité, & en même tems à sa résistance ; vous lui communiquez beaucoup de mouvement, mais vous ne la divisez pas : voilà pour le corps fluide. Quant au corps solide, ce corps solide ne peut résister à la balle qui vient le frapper, que par l'adhésion de ses parties : si l'adhésion de ces parties n'est rien relativement à la vîtesse de la balle qui le vient frapper, il est évident qu'il ne peut être mû d'un mouvement de translation, parce que rien ne résiste à la balle. Qu'on suppose une porte ouverte percée d'un trou couvert d'une toile d'araignée ; si j'applique mon doigt contre les endroits solides de la porte, ces endroits résistant à son impulsion, la porte tournera sur les gonds & se fermera : mais elle restera immobile avec quelque vîtesse que je porte mon doigt contr'elle, si je l'applique contre la toile d'araignée : or tout le tissu de la porte devient toile d'araignée, relativement à la vîtesse d'une balle chassée par un fusil ; & l'adhésion des parties n'est pas assez grande pour donner lieu à l'élasticité.
Mais on pourra demander encore pourquoi l'élasticité de l'eau frappée avec vîtesse a plûtôt lieu, quoique ses molécules n'ayent presqu'aucune adhérence entr'elles, que l'élasticité du bois dont les molécules tiennent les unes aux autres très-fortement. Il faut, je crois, recourir ici à la densité, à la constitution particuliere des corps ; & de ces deux causes, la derniere & la principale nous est malheureusement très-peu connue.
BALLE A FEU, est dans l'Artillerie un amas d'artifice de figure ronde ou ovale de différentes grosseurs, qui se jette à la main ou avec le mortier.
Maniere la plus usitée pour faire des balles à feu. L'on se sert pour faire des balles à feu d'une livre de salpetre, d'un quarteron de fleur de soufre, deux onces de poussier broyé passé par le tamis de soie ; & mêlé avec l'huile de pétrole ou huile de lin ; il faut en faire de petites boules de la grosseur d'une balle, les percer quand elles seront humides, y mettre de la corde d'amorce en-travers, les passer quatre à quatre ou deux à deux, & les rouler dans le poussier vif, après quoi cela prend feu.
Autre maniere pour faire les balles à feu, qui peuvent s'exécuter dans les mortiers. Il faut avoir un porte-feu d'un pié & demi ou de deux piés de longueur, suivant la grosseur dont on voudra faire la balle, sur un pouce ou un pouce & demi de diametre, lequel sera chargé d'une composition que l'on aura faite avec deux livres de salpetre, une livre de soufre, & demi-livre de poudre, le tout bien pilé séparément, le passer dans un tamis bien fin, & après mêler le tout ensemble autant qu'il se pourra.
En cas que le feu soit trop lent, on y ajoûtera un peu de poudre pilée ; & s'il brûle trop vîte, on y ajoûtera un peu de salpetre pour le faire durer davantage. Le milieu de la balle sera un petit sac rempli de même composition. Les porte-feux seront passés au-travers de ce sac ; & par-dessus, pour couvrir la balle, on mettra de gros copeaux avec de la filasse, que l'on fera tremper dans un grand chauderon ou chaudiere, dans laquelle on mettra six à sept livres d'huile de lin, & autant d'huile de térébenthine, avec huit ou neuf livres de goudron ou poix que l'on fera chauffer doucement, & qu'on remuera bien souvent ; & lorsque le tout sera bien lié, l'on fera tremper dans la chaudiere la filasse & les copeaux, que l'on mettra à part pour les faire sécher à demi ; & après on fera tremper aussi de la vieille toile bien grossiere, qui servira pour envelopper la balle. Il faut avoir du soufre pilé sans être passé au tamis, & du salpetre, & en jetter sur la toile, comme aussi sur la filasse & les coupeaux à part, pour que le feu soit plus clair. Il faut observer qu'il faut mettre de tems en tems du fil de fer autour de la matiere qu'on mettra dans la boule pour la faire tenir, & ne la pas trop presser, parce que le feu seroit trop lent. Quand la matiere est un peu mouvante, la flamme en est plus grande. Si l'on veut davantage presser le feu, il faut prendre trois livres de poudre pilée, une livre de charbon pilé, mêler le tout ensemble, & après l'étendre sur une table, & faire rouler la balle sur cette matiere lorsqu'elle sera garnie de copeaux & de filasse, & après l'on mettra la toile par-dessus ; ou si l'on ne veut pas se servir de toile pour la derniere enveloppe, l'on peut y faire une petite caisse de bois d'enveloppe léger ; le tout dépend de la conduite de l'officier qui s'en doit servir ; il peut se corriger à la premiere ou seconde balle qu'il fera joüer.
Autre maniere de composition de balles à feu qui se jettent avec le mortier, rapportée dans le Bombardier François de M. Belidor. Pour composer ces sortes de balles il faut 30 livres de poudre, 5 livres de poix blanche ou résine, 10 livres de poix noire, 2 livres de suif de mouton, 2 livres d'étoupes, 4 grenades chargées, 4 cordes pour les montans, grosses environ comme le doigt, longues chacune de 6 piés & demi ; 6 brasses de corde de la grosseur du petit doigt, & de la toile pour un sac de 11 pouces de diametre, sur 22 pouces de hauteur.
Il faut faire fondre la poix dans une chaudiere ou marmite de fer ; & lorsqu'elle sera fondue, y jetter les deux livres de suif de mouton, que l'on aura eu soin de faire bien hacher : le tout bien incorporé ensemble, on le remuera de tems en tems avec la spatule de fer, & l'on en ôtera avec l'écumoire les corps étrangers. On retire cette chaudiere de dessus le feu pour la porter la plus chaude qu'il se peut, auprès d'une autre chaudiere de fer, que l'on aura fait enterrer de façon qu'il y ait un glacis autour d'environ six pouces, pour que la composition que l'on verse doucement dans cette autre chaudiere, ne s'écarte pas. Il faudra échauffer la chaudiere enterrée avec un peu de braise, de façon qu'on la puisse toucher de la main, & la bien nettoyer avec un sac à terre pour qu'il ne reste point de feu. Ensuite on y verse la composition, sur laquelle on répand peu à peu les trente livres de poudre, en faisant remuer toûjours avec deux spatules ou pelles de fer rondes. Cette poudre bien mêlée avec la composition, on y met l'étoupe par petits morceaux, faisant toûjours remuer à force de bras pour qu'elle s'imbibe parfaitement ; après quoi on formera la balle à feu. Pour cela on noue les quatre cordes ensemble dans leur milieu, ce qui forme huit montans ; on pose le culot du sac sur le noeud ; on met dans le fond environ un tiers de la composition ; sur laquelle on met encore deux grenades, que l'on couvrira d'un autre tiers de composition. On lie ensuite le sac avec une ficelle par le haut à dix-huit pouces ou environ de longueur, puis on rassemble les huit montans, qu'on lie au-dessus du sac avec une autre ficelle, observant que le sac soit toûjours bien droit & bien à-plomb sur son culot, que les montans soient également distans les uns des autres le long du sac. Ces précautions prises, on cordelle la balle à feu, fermant le culot comme celui d'un panier ; on continue jusqu'à la moitié de la hauteur de la balle, observant de bien tirer les montans à mesure que l'on monte les travers, qui doivent être distans de deux pouces les uns des autres. On lie les montans à demeure avec de la ficelle, & on continue de cordeler, jusqu'en-haut, serrant les montans également, afin qu'ils restent droits autant qu'il se pourra, & bien partagés.
Cette balle à feu qui doit avoir la forme d'un oeuf étant faite, on fait un anneau avec le reste des montans ; on les lie avec de la ficelle pour pouvoir y passer un levier, pour la tremper dans une chaudiere où est pareille composition que celle des tourteaux, pour la goudronner de tous côtés ; après quoi on la met dans de l'eau pour la refroidir : on perce ensuite deux trous auprès de l'anneau avec une cheville de bois d'environ un pouce de diametre & de cinq à six pouces de profondeur, observant que ces deux chevilles puissent se joindre en un point. On a soin de bien graisser les chevilles qui doivent rester dans la balle jusqu'à ce que l'on veuille l'exécuter, afin qu'alors on puisse les retirer aisément. On remplit les trous qu'elles laissent, avec de la composition pareille à celle des fusées de bombe, observant de la battre avec une machine de cuivre ou de bois, crainte d'accident : mais lorsque l'on ne veut pas garder longtems la balle à feu, on charge les fusées de suite au moment qu'elle est froide, de la façon qu'il est dit ; on les coeffe avec de la cire préparée, y mettant à chacun un petit bout de ficelle pour les reconnoître au besoin. La balle à feu s'exécute dans le mortier comme la bombe. Les bombardiers mettent le feu en même tems aux fusées ; & lorsqu'on les voit bien allumées, on met le feu au mortier.
Quand on se sert de balle à feu pour découvrir les travailleurs de l'ennemi, il faut faire ensorte de pointer le canon de maniere qu'elles ne montent point fort haut, de crainte qu'elles ne s'enterrent. Elles servent aussi pour mettre le feu dans les magasins à fourrage, de même que dans les maisons ; & en ce cas, on donne au mortier le degré d'élevation nécessaire pour que la balle tombe sur les toîts comme la bombe, & qu'elle les perce. On peut mettre dans la balle à feu avec les grenades, des bouts de canon de fusils, de pistolets, remplis de poudre & de balles. Les grenades y sont mises pour écarter ceux qui voudroient l'éteindre.
On peut encore mettre dans la balle à feu une bombe de six pouces au lieu de grenades. On place pour cet effet environ un tiers de composition au fond du sac, sur laquelle on pose un tourteau goudronné, ensuite la bombe la fusée en-bas. On peut mettre aussi dans la balle à feu quatre lits de tourteaux & de grenades avec fusées.
omposition de balles à feu qu'on jette avec la main. Il faut prendre six livres de soufre tamisé, autant de poulverin, autant de salpetre, & autant de crystal minéral, une livre & demie de camfre, trois quarterons de vif-argent, une livre & demie de colophane, trois livres d'huile de pétrole, six onces de gomme arabique, une livre & demie de sel ammoniac, & une demi-pinte d'esprit-de-vin. On fait dissoudre le camfre dans l'esprit-de-vin, la gomme dans un peu d'eau ; après quoi on met de l'esprit-de-vin, on mêle bien ensemble le soufre, le poulverin, le salpetre, le crystal minéral, & la colophane, humectant de tems en tems cette composition avec le camfre dissous, la gomme & l'huile de pétrole.
Après que tout a été mis en pâte & bien mêlé à force de bras, on en fait des pelotes qui pesent environ quatre livres. On partage le vif-argent en autant de parties égales qu'on a fait de pelotes. On perce chacune de ces pelotes de plusieurs petits trous avec une cheville de bois graissée ; on y met cette partie de vif-argent, puis on resserre les trous ; on enveloppe la pelote avec un peu de filasse & de l'étoupe, & du papier gris que l'on entortille avec du gros fil : on la trempe dans le goudron, ensuite on la couvre d'une grosse toile, que l'on trempe une seconde fois dans le goudron ; après quoi on la trempe dans l'eau ; on y fait un trou avec une cheville de bois graissée qui ne passe pas le centre de la pelote, & on le remplit de la composition des fusées à bombes. On se sert de ces sortes de balles à feu pour éclairer un terrein occupé par l'ennemi. S. Remy. (Q)
BALLE LUISANTE, chez les Artificiers ; on appelle ainsi une espece d'artifice semblable aux étoiles, & qui n'en differe que par la composition, la grosseur, & la couleur du feu. Voici la maniere de le faire.
Prenez six onces de soufre, deux onces d'antimoine crud ; de salpetre, de colophane, & de charbon, de chacun quatre onces : ou bien de salpetre, de colophane, de charbon, de chacun deux onces, & d'antimoine, de soufre & de poix noire, de chacun une once.
Après avoir bien pilé ces matieres, on les fera fondre dans un vaisseau de cuivre ou de terre vernissée, dans lequel on jettera des étoupes de chanvre ou de lin autant qu'il en faudra pour absorber toute la matiere fondue ; pendant qu'elle se refroidira on en fera des pelotons de la grosseur qu'on voudra, & on les amorcera de pâte de poudre écrasée, dans laquelle on les roulera, ou on les enveloppera de coton d'étoupille : il faut cependant prendre garde de ne pas faire ces balles si grosses qu'elles ne puissent être totalement consommées en retombant du pot d'une fusée volante, crainte qu'elles ne retombent en feu sur les spectateurs, ou sur des maisons où elles pourroient mettre le feu.
BALLES d'Imprimerie ; ce sont deux morceaux de bois creusés, surmontés d'un manche aussi de bois, parfaitement ressemblant à un entonnoir. Le creux de cet instrument se remplit de laine bien nette & bien cardée, laquelle y est maintenue par deux cuirs apprêtés & attachés avec de petits clous tout autour de la bouche de l'entonnoir ; c'est avec ces deux ustensiles que l'on empreint d'encre la forme. Voyez Planche IV. A. qui représente les deux balles posées l'une sur l'autre sur les chevilles de la presse.
BALLES TEIGNEUSES, terme d'Imprimerie. Lorsque les cuirs neufs refusent l'encre, faute de n'avoir pas été assez corroyés, ce qui fait paroître sur les balles des taches noires & blanches, on dit que ces balles sont teigneuses. Pour remédier à ce défaut, l'on est contraint de démonter & corroyer de nouveau les cuirs & de les saupoudrer même de cendre pour imbiber le trop d'humidité dont ils se trouvent surchargés en quelques endroits. Les balles peuvent encore devenir teigneuses si la laine de dedans sort par les bords ; car alors il se forme une espece de duvet, qui se mêle avec l'encre, & introduit sur la forme nombre d'ordures qui emplissent l'oeil de la lettre.
BALLE, chez les Paumiers ; c'est un corps sphérique fait de chiffons de laine couverts de drap blanc d'environ deux pouces & demi, ou trois pouces au plus de diametre, dont on se sert pour jouer à la paume : il doit être bien rond & bien ficelé. Les statuts des paumiers ordonnent qu'il soit couvert de drap neuf, & qu'il pese en tout dix-neuf estelins. L'estelin vaut la vingtieme partie d'une once. Pour faire la balle, il faut avoir du chiffon, une masse de bois & l'instrument appellé bilboquet. On prend du chiffon, on en forme un peloton que l'on ficelle, on le bat dans le bilboquet, afin de noyer la corde dans l'étoffe dont il est fait. Quand il a la grosseur convenable, on le revêt de drap blanc : on le finit ensuite sur le bilboquet, où on le remet pour abattre la couture de son vêtement, & la balle est faite. Voyez PAUMIER, BILBOQUET, & la figure de cet instrument dans la Planche du Paumier.
BALLE, terme de Commerce ; on appelle ainsi certaine quantité de marchandises enveloppées ou empaquetées dans de la toile avec plusieurs tours de corde bien serrés par-dessus, après les avoir bien garnies de paille pour empêcher qu'elles ne se brisent ou ne se gâtent par l'injure du tems.
On dit une balle d'épicerie, de livres, de papier, de fil, &c. & l'on met sur les balles des marques & numeros, afin que les marchands à qui elles sont envoyées puissent les reconnoître.
Une balle de coton filé est ordinairement de trois, ou quatre cent pesant. Une balle de soie crue pese quatre cent. Une balle de grosse toile est de trois, trois & demie ou quatre pieces.
Selon M. Chambers, une balle de laine en Angleterre est la valeur de la charge d'un cheval, & contient deux cent quarante livres de poids.
Vendre des marchandises sous cordes en balles ou en balles sous cordes, c'est les vendre en gros sans échantillon & sans les déballer.
On appelle marchandises de balle certaines quincailleries & autres ouvrages qui viennent de certains pays, particulierement de Forès, & qui sont ordinairement fabriqués par de mauvais ouvriers.
Une balle de dez est un petit paquet en papier, qui contient une ou plusieurs douzaines de dez à joüer.
On nomme porte-balles les petits merciers qui vont par la campagne, & qui portent sur leur dos des balles de menue mercerie. (G)
* BALLET, (Oeconomie rustiq.) c'est la pellicule qui enveloppe le grain, & que les fléaux, le van & le crible en détachent. Les laboureurs l'appellent menue paille. On la mêle avec l'avoine des chevaux : on la donne en bûvée aux vaches ; elle peut nourrir toutes sortes de bestiaux ; elle fait mûrir les fruits & les conserve, & l'on en couvre la glace & la neige que l'on réserve pour l'été.
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BALLET | S. m. danse figurée exécutée par plusieurs personnes qui représentent par leurs pas & leurs gestes une action naturelle ou merveilleuse, au son des instrumens ou de la voix.
Tout ballet suppose la danse, & le concours de deux ou de plusieurs personnes pour l'exécuter. Une personne seule, qui en dansant représenteroit une action, ne formeroit pas proprement un ballet ; ce ne seroit alors qu'une sorte de pantomime. Voyez PANTOMIME. Et plusieurs personnes qui représenteroient quelque action sans danse, formeroient une comédie & jamais un ballet.
La danse, le concours de plusieurs personnes, & la représentation d'une action par les gestes, les pas, & les mouvemens du corps, sont donc ce qui constitue le ballet. Il est une espece de poësie muette qui parle, selon l'expression de Plutarque, parce que sans rien dire, elle s'exprime par les gestes, les mouvemens & les pas. Clausis faucibus, dit Sidoine Apollinaire, & loquente gestu, nutu, crure, genu, manu, rotatu, toto in schemate, vel semel latebit. Sans danse il ne peut point exister de ballet : mais sans ballet il peut y avoir des danses. Voyez DANSE.
Le ballet est un amusement très ancien. Son origine se perd dans l'antiquité la plus reculée. On dansa dans les commencemens pour exprimer la joie ; & ces mouvemens reglés du corps firent imaginer bien-tôt après un divertissement plus compliqué. Les Egyptiens firent les premiers de leurs danses des hiérogliphes d'action, comme ils en avoient de figurés en peinture, pour exprimer tous les mysteres de leur culte. Sur une musique de caractere, ils composerent des danses sublimes, qui exprimoient & qui peignoient le mouvement reglé des astres, l'ordre immuable, & l'harmonie constante de l'univers.
Les Grecs dans leurs tragédies introduisirent des danses, & suivirent les notions des Egyptiens. Les choeurs qui servoient d'intermedes, dansoient d'abord en rond de droite à gauche, & exprimoient ainsi les mouvemens du ciel qui se font du levant au couchant. Ils appelloient cette danse strophes ou tours.
Ils se tournoient ensuite de gauche à droite pour représenter le cours des planetes, & ils nommoient ces mouvemens antistrophes ou retours ; après ces deux danses, ils s'arrêtoient pour chanter : ils nommoient ces chants épodes. Par-là ils représentoient l'immobilité de la terre qu'ils croyoient fixe. Voyez CHOEUR.
Thésée changea ce premier objet de la danse des Grecs ; leurs choeurs ne furent plus que l'image des évolutions & des détours du fameux labyrinthe de Crete. Cette danse inventée & exécutée par le vainqueur du Minotaure & la jeunesse de Delos, étoit composée de strophes & d'antistrophes, comme la premiere, & on la nomma la danse de la grue, parce qu'on s'y suivoit à la file, en faisant les diverses évolutions dont elle étoit composée, comme font les grues lorsqu'elles volent en troupe. Voyez GRUE.
Les ballets furent constamment attachés aux tragédies & aux comédies des Grecs ; Athenée les appelle danses philosophiques ; parce que tout y étoit reglé, & qu'elles étoient des allégories ingénieuses, & des représentations d'actions, ou des choses naturelles qui renfermoient un sens moral.
Le mot ballet vient de ce qu'originairement on dansoit en joüant à la paume. Les anciens, attentifs à tout ce qui pouvoit former le corps, le rendre agile ou robuste, & donner des graces à ses mouvemens, avoient uni ces deux exercices ; ensorte que le mot ballet est venu de celui de balle : on en a fait bal, ballet, ballade, & baladin, le ballar & ballo des Italiens & le bailar des Espagnols, comme les Latins en avoient fait ceux de ballare & de ballator, &c.
Deux célebres danseurs furent à Rome les inventeurs véritables des ballets, & les unirent à la tragédie & à la comédie.
Batile d'Alexandrie inventa ceux qui représentoient les actions gaies, & Pilade introduisit ceux qui représentoient les actions graves, touchantes, & pathétiques.
Leurs danses étoient un tableau fidele de tous les mouvemens du corps, & une invention ingénieuse qui servoit à les regler, comme la tragédie en représentant les passions, servoit à rectifier les mouvemens de l'ame.
Les Grecs avoient d'abord quatre especes de danseurs qu'on nommoit hylarodes, simodes, magodes & lysiodes ; ils s'en servoient pour composer les danses de leurs intermedes. V. ces mots à leurs différ. articles.
Ces danseurs n'étoient proprement que des bouffons, & ce fut pour purger la scene de cette indécence, que les Grecs inventerent les ballets réglés, & les choeurs graves que la tragédie reçut à sa place.
Les anciens avoient une grande quantité de ballets, dont les sujets sont rapportés dans Athenée ; mais on ne trouve point qu'ils s'en soient servis autrement que comme de simples intermedes. Voyez INTERMEDE. Aristote, Platon, &c. en parlent avec éloge ; & le premier est entré, dans sa Poëtique, dans un très-grand détail au sujet de cette brillante partie des spectacles des Grecs.
Quelques auteurs ont prétendu que c'étoit à la cruauté d'Hyeron tyran de Syracuse, que les ballets devoient leur origine. Ils disent que ce prince soupçonneux ayant défendu aux Siciliens de se parler, de peur qu'ils ne conspirassent contre lui ; la haine & la nécessité, deux sources fertiles d'invention, leur suggérerent les gestes, les mouvemens du corps & les figures, pour se faire entendre les uns aux autres : mais nous trouvons des ballets, & en grand nombre, antérieurs à cette époque ; & l'opinion la plus certaine de l'origine des danses figurées, est celle que nous avons rapportée ci-dessus.
Le ballet passa des Grecs chez les Romains, & il y servit aux mêmes usages ; les Italiens & tous les peuples de l'Europe en embellirent successivement leurs théatres, & on l'employa enfin pour célebrer dans les cours les plus galantes & les plus magnifiques, les mariages des rois, les naissances des princes, & tous les évenemens heureux qui intéressoient la gloire & le repos des nations. Il forma seul alors un très-grand spectacle, & d'une dépense immense, que dans les deux derniers siecles on a porté au plus haut point de perfection & de grandeur.
Lucien qui a fait un traité de la danse, entre dans un détail fort grand des sujets qui sont propres à ce genre de spectacle : il semble que cet auteur ait prévû l'usage qu'on en feroit un jour dans les cours les plus polies de l'Europe.
On va donner une notion exacte de ces grands ballets, aujourd'hui tout-à-fait hors de mode, on a vû quelle a été leur origine & leur succès ; on verra dans la suite leurs changemens, leur décadence, & le genre nouveau qu'elle a produit : des yeux philosophes trouvent par-tout ces commencemens, ces progrès, ces diminutions, ces modifications différentes, en un mot, qui sont dans la nature ; mais elles se manifestent d'une maniere encore plus sensible dans l'histoire des Arts.
Comme dans son principe, le ballet est la représentation d'une chose naturelle ou merveilleuse, il n'est rien dans la nature, & l'imagination brillante des Poëtes n'a pû rien inventer, qui ne fût de son ressort.
On peut diviser ces grands ballets en historiques, fabuleux, & poëtiques.
Les sujets historiques sont les actions connues dans l'histoire, comme le siége de Troie, les victoires d'Alexandre, &c.
Les sujets fabuleux sont pris de la fable, comme le jugement de Paris, les noces de Thétis & Pelée, la naissance de Vénus, &c.
Les poétiques, qui sont les plus ingénieux, sont de plusieurs especes, & tiennent pour la plûpart de l'histoire & de la fable.
On exprime par les uns les choses naturelles, comme les ballets de la nuit, des saisons, des tems, des âges, &c. d'autres sont des allégories qui renferment un sens moral, comme le ballet des proverbes, celui des plaisirs troublés, celui de la mode, des aveugles, de la curiosité, &c.
Il y en a eu quelques-uns de pur caprice, comme le ballet des postures, & celui de bicêtre ; quelques autres n'ont été que des expressions naïves de certains évenemens communs, ou de certaines choses ordinaires. De ce nombre étoient les ballets des cris de Paris, de la foire S. Germain, des passe-tems, du carnaval, &c. Enfin l'histoire, la fable, l'allégorie, les romans, le caprice, l'imagination, sont les sources dans lesquelles on a puisé les sujets des grands ballets. On en a vû de tous ces genres différens réussir, & faire honneur à leurs différens inventeurs.
Ce spectacle avoit des regles particulieres, & des parties essentielles & intégrantes, comme le poëme épique & dramatique.
La premiere regle est l'unité de dessein. En faveur de la difficulté infinie qu'il y avoit à s'assujettir à une contrainte pareille, dans un ouvrage de ce genre, il fut toûjours dispensé de l'unité de tems & de l'unité de lieu. L'invention ou la forme du ballet est la premiere de ses parties essentielles : les figures sont la seconde : les mouvemens la troisieme : la Musique qui comprend les chants, les ritournelles, & les symphonies, est la quatrieme : la décoration & les machines sont la cinquieme : la Poësie est la derniere ; elle n'étoit chargée que de donner par quelques récits les premieres notions de l'action qu'on représentoit.
Leur division ordinaire étoit en cinq actes, & chaque acte étoit divisé en 3, 6, 9, & quelquefois 12 entrées.
On appelle entrée une ou plusieurs quadrilles de danseurs, qui par leur danse représentent la partie de l'action dont ils sont chargés. Voyez ENTREE.
On entend par quadrille ; 4, 6, 8, & jusqu'à 12 danseurs vêtus uniformément, ou de caracteres différens, suivant l'exigence des cas. Voyez QUADRILLE. Chaque entrée étoit composée d'un ou plusieurs quadrilles, selon que l'exigeoit le sujet.
Il n'est point de genre de danse, de sorte d'instrumens, ni de caractere de symphonie, qu'on n'ait fait entrer dans les ballets. Les anciens avoient une singuliere attention à employer des instrumens différens à mesure qu'ils introduisoient sur la scene de nouveaux caracteres, ils prenoient un soin extrème à peindre les âges, les moeurs, les passions des personnages qu'ils mettoient devant les yeux.
A leur exemple dans les grands ballets exécutés dans les différentes cours de l'Europe, on a eu l'attention de mêler dans les orchestres, les instrumens convenables aux divers caracteres qu'on a voulu peindre ; & on s'est attaché plus ou moins à cette partie, selon le plus ou le moins de goût de ceux qui en ont été les inventeurs, ou des souverains pour lesquels on les a exécutés.
On croit devoir rapporter ici en abrégé deux de ces grands ballets ; l'un pour faire connoître les fonds, l'autre pour faire appercevoir la marche théatrale de ces sortes de spectacles. C'est du savant traité du P. Ménétrier Jésuite, qu'on a extrait le peu de mots qu'on va lire.
Le gris de lin étoit le sujet du premier ; c'étoit la couleur de Madame Chrétienne de France, duchesse de Savoie, à laquelle la fête étoit donnée.
Au lever de la toile l'Amour déchire son bandeau ; il appelle la lumiere, & l'engage par ses chants à se répandre sur les astres, le ciel, l'air, la terre, & l'eau, afin qu'en leur donnant par la variété des couleurs milles beautés différentes, il puisse choisir la plus agréable.
Junon entend les voeux de l'amour, & les remplit, Iris vole par ses ordres dans les airs, elle y étale l'éclat des plus vives couleurs. L'amour frappé de ce brillant spectacle, après l'avoir consideré, se décide pour le gris de lin, comme la couleur la plus douce & la plus parfaite ; il veut qu'à l'avenir il soit le symbole de l'amour sans fin. Il ordonne que les campagnes en ornent les fleurs, qu'elle brille dans les pierres les plus précieuses, que les oiseaux les plus beaux en parent leur plumage, & qu'elle serve d'ornement aux habits les plus galans des mortels.
Toutes ces choses différentes animées par la danse, embellies par les plus éclatantes décorations, soûtenues d'un nombre fort considérable de machines surprenantes, formerent le fonds de ce ballet, un des plus ingénieux & des plus galans qui ayent été représentés en Europe.
On donna le second à la même cour en 1634, pour la naissance du cardinal de Savoie. Le sujet de ce ballet étoit la Verita nemica della apparenza sollevata dal tempo.
Au lever de la toile on voyoit un choeur de Faux Bruits & de Soupçons, qui précedoient l'Apparence & le Mensonge.
Le fond du théatre s'ouvrit. Sur un grand nuage porté par les vents, on vit l'Apparence vêtue d'un habit de couleurs changeantes, & parsemé de glaces de miroir, avec des aîles, & une queue de paon ; elle paroissoit comme dans une espece de nid d'où sortirent en foule les Mensonges pernicieux, les Fraudes, les Tromperies, les Mensonges agréables, les Flatteries, les Intrigues, les Mensonges bouffons, les Plaisanteries, les jolis petits Contes.
Ces personnages formerent les différentes entrées, après lesquelles le Tems parut. Il chassa l'Apparence, il fit ouvrir le nuage sur lequel elle s'étoit montrée. On vit alors une grande horloge à sable, de laquelle sortirent la Vérité & les Heures. Ces derniers personnages, après différens récits analogues au sujet, formerent les dernieres entrées, qu'on nomme le grand ballet.
Par ce court détail, on voit que ce genre de spectacle réunissoit toutes les parties qui peuvent faire éclater la magnificence & le goût d'un souverain ; il exigeoit beaucoup de richesse dans les habits, & un grand soin pour qu'ils fussent toûjours du caractere convenable. Il falloit des décorations en grand nombre, & des machines surprenantes. Voyez DECORATION & MACHINE.
Les personnages d'ailleurs du chant & de la danse en étoient presque toûjours remplis par les souverains eux-mêmes, les seigneurs & les dames les plus aimables de leur cour ; & souvent à tout ce qu'on vient d'expliquer, les princes qui donnoient ces sortes de fêtes ajoûtoient des présens magnifiques pour toutes les personnes qui y représentoient des rôles ; ces présens étoient donnés d'une maniere d'autant plus galante, qu'ils paroissoient faire partie de l'action du ballet. Voyez SAPATE.
En France, en Italie, en Angleterre, on a représenté une très-grande quantité de ballets de ce genre : mais la cour de Savoie semble l'avoir emporté dans ces grands spectacles sur toutes les cours de l'Europe. Elle avoit le fameux comte d'Aglié, le génie du monde le plus fécond en inventions théatrales & galantes. Le grand art des souverains en toutes choses est de savoir choisir, la gloire d'un regne dépend presque toûjours d'un homme mis à sa place, ou d'un homme oublié.
Les ballets représentés en France jusqu'en l'année 1671, furent tous de ce grand genre. Louis XIV. en fit exécuter plusieurs pendant sa jeunesse, dans lesquels il dansa lui même avec toute sa cour. Les plus célebres sont le ballet des Prospérités des armes de la France, dansé peu de tems après la majorité de Louis XIV. Ceux d'Hercule amoureux, exécuté pour son mariage, d'Alcidiane, dansé le 14 Février 1658 ; des Saisons, exécuté à Fontainebleau le 23 Juillet 1661 ; des Amours déguisés, en 1664, &c.
Les ballets de l'ancienne cour furent pour la plûpart imaginés par Benserade. Il faisoit des rondeaux pour les récits ; & il avoit un art singulier pour les rendre analogues au sujet général, à la personne qui en étoit chargée, au rôle qu'elle représentoit, & à ceux à qui les récits étoient adressés. Ce poëte avoit un talent particulier pour les petites parties de ces sortes d'ouvrages ; il s'en faut bien qu'il eût autant d'art pour leur invention & pour leur conduite.
Lors de l'établissement de l'opéra en France, on conserva le fond d'un grand ballet : mais on en changea la forme. Quinault imagina un genre mixte, dans lequel les récits firent la plus grande partie de l'action. La danse n'y fut plus qu'en sous-ordre. Ce fut en 1671, qu'on représenta à Paris les Fêtes de Bacchus & de l'Amour, cette nouveauté plut ; & en 1681, le Roi & toute sa cour exécuterent à Saint-Germain le Triomphe de l'Amour, fait par Quinault, & mis en musique par Lulli : de ce moment il ne fut plus question du grand ballet, dont on vient de parler. La danse figurée, ou la danse simple, reprirent en France la place qu'elles avoient occupée sur les théatres des Grecs & des Romains ; on ne les y fit plus servir que pour les intermedes ; comme dans Psiché ; le Mariage forcé, les Fâcheux, les Pygmées, le Bourgeois Gentilhomme, &c. Le grand ballet fut pour toûjours relégué dans les colléges. Voyez BALLETS DE COLLEGE. A l'opéra même le chant prit le dessus. Il y avoit plus de chanteurs que de danseurs passables ; ce ne fut qu'en 1681, lorsqu'on représenta à Paris le Triomphe de l'Amour, qu'on introduisit pour la premiere fois des danseurs sur ce théatre.
Quinault qui avoit créé en France l'opéra, qui en avoit apperçu les principales beautés, & qui par un trait de génie singulier avoit d'abord senti le vrai genre de ce spectacle (voyez OPERA), n'avoit pas eu des vûes aussi justes sur le ballet. Il fut imité depuis par tous ceux qui travaillerent pour le théatre lyrique. Le propre des talens médiocres est de suivre servilement à la piste la marche des grands talens.
Après sa mort on fit des opéra coupés comme les siens, mais qui n'étoient animés, ni du charme de son style, ni des graces du sentiment qui étoit sa partie sublime. On pouvoit l'atteindre plus aisément dans le ballet, où il avoit été fort au-dessous de lui-même ; ainsi on le copia dans sa partie la plus défectueuse jusqu'en 1697, que la Mothe, en créant un genre tout neuf, acquit l'avantage de se faire copier à son tour.
L'Europe Galante est le premier ballet dans la forme adoptée aujourd'hui sur le théatre lyrique. Ce genre appartient tout-à-fait à la France, & l'Italie n'a rien qui lui ressemble. On ne verra sans-doute jamais notre opéra passer chez les autres nations : mais il est vraisemblable qu'un jour, sans changer de musique (ce qui est impossible) on changera toute la constitution de l'opéra Italien, & qu'il prendra la forme nouvelle & piquante du ballet François.
Il consiste en trois ou quatre entrées précédées d'un prologue.
Le prologue & chacune des entrées forment des actions séparées avec un ou deux divertissemens mêlés de chants & de danses.
La tragédie lyrique doit avoir des divertissemens de danse & de chant, que le fond de l'action amene. Le ballet doit être un divertissement de chant & de danse, qui amene une action, & qui lui sert de fondement, & cette action doit être galante, intéressante, badine, ou noble suivant la nature des sujets.
Tous les ballets qui sont restés au théatre sont en cette forme, & vraisemblablement il n'y en aura point qui s'y soûtiennent, s'ils en ont une différente. Le Roi Louis XV. a dansé lui-même avec sa cour, dans les ballets de ce nouveau genre, qui furent représentés aux Tuileries pendant son éducation.
Danchet, en suivant le plan donné par la Mothe, imagina des entrées comiques ; c'est à lui qu'on doit ce genre, si c'en est un. Les Fêtes Vénitiennes ont ouvert une carriere nouvelle aux Poëtes & aux Musiciens, qui auront le courage de croire, que le théatre du merveilleux est propre à rendre le comique.
Les Italiens paroissent penser que la musique n'est faite que pour peindre tout ce qui est de plus noble ou de plus bas dans la nature. Ils n'admettent point de milieu.
Ils répandent avec profusion le sublime dans leurs tragédies, & la plus basse plaisanterie dans leurs opéra bouffons, & ceux-ci n'ont réussi que dans les mains de leurs musiciens les plus célebres. Peut-être dans dix ans pensera-t-on comme eux. Platée, opéra bouffon de M. Rameau, qui est celui de tous ses ouvrages le plus original & le plus fort de génie, décidera sans-doute la question au préjudice des Fêtes Vénitiennes & des Fêtes de Thalie, peu goûtées dans leurs dernieres reprises.
Peut-être la Mothe a-t-il fait une faute en créant le ballet. Quinault avoit senti que le merveilleux étoit le fond dominant de l'opéra. Voyez OPERA. Pourquoi ne seroit-il pas aussi le fond du ballet ? La Mothe ne l'a point exclu : mais il ne s'en est point servi. Il est d'ailleurs fort singulier qu'il n'ait pas donné un plus grand nombre d'ouvrages d'un genre si aimable. On n'a de lui que l'Europe galante qui soit restée au théatre ; il a cru modestement sans-doute que ce qu'on appelle grand opéra, étoit seul digne de quelque considération. Son esprit original l'eût mieux servi cependant dans un genre tout à lui. il n'est excellent à ce théatre que dans ceux qu'il a créés. Voyez PASTORALE & COMEDIE-BALLET.
Il y a peut-être encore un défaut dans la forme du ballet créé par la Mothe. Les danses n'y sont que des danses simples : nulle action relative au sujet ne les anime ; on danse dans l'Europe galante pour danser. Ce sont à la vérité des peuples différens qu'on y voit paroître : mais leurs habits plûtôt que leurs pas annoncent leurs divers caracteres ; aucune action particuliere ne lie la danse avec le reste de l'acte.
De nos jours on a hasardé le merveilleux dans le ballet, & on y a mis la danse en action : elle y est une partie nécessaire du sujet principal. Ce genre, qui a plû dans sa nouveauté, présente un plus grand nombre de ressources pour l'amusement du spectateur, des moyens plus fréquens à la poésie, à la peinture, à la musique, d'étaler leurs richesses ; & au théatre lyrique, des occasions de faire briller la grande machine, qui en est une des premieres beautés : mais il faut attendre la reprise des Fêtes de l'Hymen & de l'Amour, pour décider si ce genre est le véritable.
De tous les ouvrages du théatre lyrique, le ballet est celui qui paroît le plus agréable aux François. La variété qui y regne, le mélange aimable du chant & de la danse, des actions courtes qui ne sauroient fatiguer l'attention, des fêtes galantes qui se succedent avec rapidité, une foule d'objets piquans qui paroissent dans ces spectacles, forment un ensemble charmant, qui plaît également à la France & aux étrangers.
Cependant parmi le grand nombre d'auteurs célebres qui se sont exercés dans ce genre, il y en a fort peu qui l'ayent fait avec succès ; on a encore moins de bons ballets que de bons opéra, si on en excepte les ouvrages de Mr. Rameau, du sort desquels on n'ose décider, & qui conserveront, ou perdront leur supériorité, selon que le goût de la nation pour la musique se fortifiera, ou s'affoiblira par la suite. Le théatre lyrique qui peut compter à-peu-près sur huit ou dix tragédies dont la réussite est toûjours sûre, n'a pas plus de trois ou quatre ballets d'une ressource certaine ; l'Europe galante, les Elémens, les Amours des Dieux, & peut-être les Fêtes Greques & Romaines. D'où vient donc la rareté des talens dans un pareil genre ? Est-ce le génie ou l'encouragement qui manquent ? Plutarq. Sid. Apoll. Athén. Arist. Poetique. Platon. Hist. de la danse par Bonnet. Lucien. L. P. Menestrier J. Traité des Ballets, &c. (B)
BALLETS de chevaux. Dans presque tous les carrousels, il y avoit autrefois des ballets de chevaux qui faisoient partie de ces magnifiques spectacles. Pluvinel, un des écuyers du roi, en fit exécuter un fort beau dans le fameux carrousel de Louis XIII. Les deux qui passent pour avoir été les plus superbes, sont ceux qui furent donnés à Florence, le premier en 1608, le dernier en 1615.
On lit dans Pline, que c'est aux Sibarites que l'on doit l'invention de la danse des chevaux : le plaisir étoit le seul objet de ce peuple voluptueux ; il étoit l'ame de tous ses mouvemens & de tous ses exercices. Athénée, d'après Aristote, rapporte que les Crotoniates, qui faisoient la guerre à ce peuple, s'étant apperçûs du soin avec lequel on y élevoit les chevaux, firent secrettement apprendre à leurs trompettes les airs de ballet que les Sibarites faisoient danser à ces animaux dociles. Au moment de la charge, lorsque leur cavalerie s'ébranla, les Crotoniates firent sonner tous ces airs différens, & dès-lors les chevaux Sibarites, au lieu de suivre les mouvemens que vouloient leur donner les cavaliers qui les montoient, se mirent à danser leurs entrées de ballet ordinaires, & les Crotoniates les taillerent en pieces.
Les Bisaltes, peuples de Macédoine, se servirent du même artifice contre les Cardiens, au rapport de Charon de Lampsaque.
Les ballets des chevaux sont composés de quatre sortes de danse ; la danse de terre-à-terre, celle de courbettes, celle des caprioles, & celle d'un pas & un saut.
La danse de terre-à-terre est formée de pas, & de mouvemens égaux, en-avant, en-arriere, à volte sur la droite ou sur la gauche, & à demi-volte ; on la nomme terre-à-terre, parce que le cheval ne s'y éleve point.
La danse des courbettes est composée de mouvemens à demi élevés, mais doucement, en-avant, en-arriere, par voltes & demi-voltes sur les côtés, faisant son mouvement courbé, ce qui donne le nom à cette espece de danse.
La danse des caprioles n'est autre chose que le saut que fait le cheval en cadence à tems dans la main, & dans les talons, se laissant soutenir de l'un, & aider de l'autre, soit en-avant en une place, ou sur les voltes & de côté : on n'appelle point caprioles tous les sauts ; on nomme ainsi seulement ceux qui sont hauts & élevés tout d'un tems.
La danse d'un pas & d'un saut est composée d'une capriole & d'une courbette fort basse ; on commence par une courbette, & ensuite, raffermissant l'aide des deux talons, & soûtenant ferme de la main, on fait faire une capriole, & lâchant la main & chassant en-avant, on fait faire un pas : on recommence après si l'on veut, retenant la main & aidant des deux talons, pour faire une autre capriole.
On a donné le nom d'airs à ces différentes danses, ainsi on dit, air de terre-à-terre, &c.
Dans ces ballets, on doit observer, comme dans tous les autres, l'air, le tems de l'air & la figure.
L'air est le mouvement de la symphonie qu'on exécute, & qui doit être dansée. Le tems des airs sont les divers passages que l'on fait faire aux chevaux en avant, en-arriere, à droite, à gauche : de tous ces mouvemens se forment les figures, & quand d'un seul tems sans s'arrêter, on fait aller le cheval de ces quatre manieres, on appelle cette figure faire la croix.
Ces passages, en terme de l'art, s'appellent passades.
Les trompettes sont les instrumens les plus propres pour faire danser les chevaux, parce qu'ils ont le loisir de prendre haleine lorsque les trompettes la reprennent, & que le cheval, qui est naturellement fier & généreux, en aime le son ; ce bruit martial l'excite & l'anime. On dresse encore les chevaux à danser au son des cors de chasse, & quelquefois aux violons : mais il faut de ces derniers instrumens un fort grand nombre, que les symphonies soient des airs de trompettes, & que les basses marquent fortement les cadences.
Selon la nature des airs on manie les chevaux terre-à-terre, par courbettes, ou par sauts.
Il n'est pas étonnant qu'on dresse des chevaux à la danse, puisque ce sont les animaux les plus maniables, & les plus capables de discipline ; on a fait des ballets de chiens, d'ours, de singes, d'éléphans, ce qui est bien plus extraordinaire, Voyez DANSE. Elien, Martial, Athénée, Pline, Aristote, Charon de Lampsaque, &c.
BALLETS aux chansons ; ce sont les premiers ballets qui ayent été faits par les anciens. Eriphanis, jeune greque, qui aimoit passionnément un chasseur nommé Menalque, composa des chansons par lesquelles elle se plaignoit tendrement de la dureté de son amant. Elle le suivit, en les chantant, sur les montagnes & dans les bois : mais cette amante malheureuse mourut à la peine. On étoit peu galant, quoi qu'en disent les Poëtes, dans ces tems reculés. L'avanture d'Eriphanis fit du bruit dans la Grece, parce qu'on y avoit appris ses chansons ; on les chantoit, & on représentoit sur ces chants les avantures, les douleurs d'Eriphanis, par des mouvemens & des gestes qui ressembloient beaucoup à la danse.
Nos branles sont des especes de ballets aux chansons. Voyez BRANLE. A l'opéra on peut introduire des ballets de ce genre. Il y a une sorte de pantomime noble de cette espece dans la troisieme entrée des Talens Lyriques, qui a beaucoup réussi, & qui est d'une fort agréable invention. La danse de Terpsichore, du prologue des Fêtes Greques & Romaines, doit être rangée aussi dans cette classe. Le P. Ménétrier, traité des ballets.
BALLETS de collége ; ce sont ces spectacles qu'on voit dans les colléges lors de la distribution des prix. Dans celui de Louis-le-Grand, il y a tous les ans la tragédie & le grand ballet, qui tient beaucoup de l'ancien, tel qu'on le représentoit autrefois dans les différentes cours de l'Europe, mais il est plus chargé de récits, & moins rempli de danses figurées.
Il sert pour l'ordinaire d'intermede aux actes de la tragédie ; en cela il rend assez l'idée des intermedes des anciens.
Il y a plusieurs beaux ballets imprimés dans le second volume du P. le Jay Jésuite. On trouve le détail de beaucoup de ces ouvrages dans le pere Ménétrier, qui en a fait un savant traité, & qui étoit l'homme de l'Europe le plus profond sur cette matiere. (B)
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BALLIN | S. m. (Commerce) on nomme ainsi à Bourdeaux, à Bayonne & dans les autres villes de commerce de la Guyenne, ce qu'on appelle à Paris emballage. (G)
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BALLINASLOE | (Géog.) petite ville de la Connacie, en Irlande, sur la Sue, dans la province de Roscommon, à dix milles d'Athlane, sur le grand chemin de Gallowai.
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BALLINEKIL | (Géog.) ville d'Irlande, dans la province de Leinster, au comté de la Reine.
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BALLON | (Géog.) ville de France, au diocèse du Mans sur la rive droite de l'Orne. Long. 17. 50. lat. 48. 10.
* BALLON, s. f. on donne en général le nom de ballon à tout corps fait par art, dont la figure est sphérique ou à peu près, & qui est creux, de quelque matiere qu'il soit composé, & à quelque usage qu'on l'employe. Il ne faut pas croire que tout ce à quoi la description précédente pourra convenir s'appellera ballon, mais seulement que ce qu'on appelle ballon aura la plûpart de ces conditions.
BALLONS de grenades, bombes, & cailloux, sont dans l'Artillerie des especes de cylindres composés de chacune de ces différentes choses, lesquelles s'exécutent avec le mortier. (Q)
BALLON, terme d'Artificier, les Artificiers appellent ainsi une espece de bombe de carton qu'on jette en l'air comme une véritable bombe, par le moyen d'un mortier. L'effet de cet artifice est de monter avec une très-petite apparence de feu, & d'en jetter subitement une grande quantité après être parvenu au sommet de son élévation, à la différence des bombes, qui ne doivent crever qu'à la fin de leur chûte, voyez BOMBE. On les divise en ballons d'air, & ballons d'eau.
Comme cet artifice est fait pour être jetté en l'air, il est évident qu'il n'y a point de figure qui lui convienne mieux que la sphérique ; qui présente toûjours une surface & une résistance égale au fluide de l'air de quelque côté qu'elle se tourne ; c'est pour cette raison qu'on fait les balles, boulets & bombes d'Artillerie rondes en tout sens, plûtôt que cylindriques ; cependant les Artificiers semblent préférer, pour les ballons, la figure cylindrique à la sphérique, pour leur donner plus de capacité & plus de commodité à y ranger de certaines pieces d'artifice dont on doit les remplir.
Lorsqu'on fait les ballons sphériques, il y a deux manieres de préparer les cartouches pour les remplir : l'une est de former deux hémispheres qu'on remplit chacune à part, qu'on applique ensuite l'une contre l'autre, & qu'on lie par des bandes de carton & de toiles croisées & collées ; cette maniere a des inconvéniens pour la réunion qui devient difficile à cause des évasemens inégaux qui se forment en chargeant.
L'autre est de former le cartouche avec des fuseaux, & de ne les coller premierement qu'à moitié, ou aux deux tiers de leur longueur, ensorte qu'il y reste une ouverture suffisante pour y introduire la main, si elle est nécessaire pour l'arrangement, ou seulement un trou de grandeur convenable pour y introduire les artifices & la fusée de communication, qu'on appelle le porte-feu. Lorsque tout est en place, on replie les bouts des fuseaux à mesure que le ballon se remplit, en le collant par le moyen des doubles qui croisent sur les pieces de l'intérieur ; & enfin, pour le former tout-à-fait, on colle les pointes de ces fuseaux sur le bout du porte-feu, qui sort d'environ un pouce hors du ballon ; ce qui affermit très-bien toutes ces parties, & fournit le moyen d'arranger & de remplir commodément & exactement tout le vuide du ballon.
On commence par mettre au fond du ballon, une certaine quantité de relien, ou de poudre grenée, proportionnée à sa grandeur, comme une ou deux onces, mêlée d'un peu de poulverin pour servir de chasse, qui fait crever la bombe & pousse sa garniture au-dehors : comme il est à propos que cette chasse soit retenue où on l'a mise, & qu'elle ne se répande pas ailleurs lorsqu'on renverse ou qu'on remue la bombe chargée, on la couvre d'un lit de coton d'étoupille en feuille mince, c'est-à-dire, simplement étendue sans être filée ; d'autres la renferment dans un sac de papier plat & mince, qu'on arrange de maniere qu'il occupe le fond.
On met ensuite au milieu un cartouche vuide posant sur ce sac, pour y conserver le passage du porte-feu, & l'on arrange autour de ce cartouche, la garniture du ballon, qui peut être de différentes especes d'artifice.
La premiere est celle dont l'effet produit la chevelure ; laquelle est faite de cartouche de lardons, ou de tuyaux de roseaux coupés de la longueur du ballon, & remplis d'une composition lente faite de trois parties de poulverin, de deux de charbon, & d'une de soufre humecté d'un peu d'huile de pétrole, enfin amorcé par le bas de pâte de poudre écrasée dans de l'eau pure, ou de l'eau de vie, qu'on fera ensuite secher ; on arrange tous ces artifices dans le cartouche autour de celui qui fait le passage du porte-feu, après qu'il est plein, on y introduit le porte-feu tout chargé jusqu'à ce qu'il pose sur la chasse ; & comme il est lié au couvercle, on colle ce couvercle par les bords déchiquetés, sur celui du cartouche, & le ballon est fini.
La seconde espece de garniture est celle des serpenteaux, qu'on arrange comme les tuyaux de roseaux dont nous venons de parler, la gorge en bas sur la chasse.
La troisieme est composée de saucissons volans dont on peut faire tirer les coups successivement en faisant les gorges de matieres lentes, toutes inégalement longues, comme des tuyaux d'orgue ; & comme cet arrangement laisse du vuide sur les plus courts, on y peut mettre des étoiles ou des étincelles de feu.
La quatrieme espece de garniture est celle des étoiles, qu'on arrange par lits sur la poudre de la chasse, en les couvrant de poulverin mêlé d'un peu de charbon, & continuant ainsi jusqu'à ce que le ballon soit plein.
La cinquieme espece est celle des balles luisantes qu'on arrange de même par lits, comme les étoiles.
BALLON ; les artificiers appellent ainsi de gros cartouches, qu'on jette avec le mortier. On les remplit ordinairement de serpenteaux, qui sont gros comme des fusées par terre, mais non pas tout-à-fait si longs. On y met aussi deux petits saucissons de la même longueur & de la même grosseur, qui ayant pris feu par leur amorce font crever le cartouche. Celui-ci a par le bas un porte-feu, à l'embouchure duquel il y a une amorce faite avec du coton trempé dans de la poudre comme l'étoupille.
Ce cartouche se fait sur un gros rouleau de bois, autour duquel on roule des cartes fortes, que l'on colle avec de la colle forte pour les faire tenir ensemble. Après l'avoir étranglé par le bas, on y fait un trou pour le porte-feu, qui se fait comme pour les fusées par terre : sa composition est cependant plus lente, car elle est semblable à celle des fusées volantes. On remplit ensuite le cartouche de serpenteaux, & quelquefois d'étoiles, après quoi on l'étrangle pardessus. Voyez SAUCISSON, FUSEE, éTOILE, SERPENTEAU, &c.
Voyez Planche de l'Artificier, fig. 61 un ballon ou bombe d'artifice sphérique ; fig. 65 un mortier à ballon ; fig. 63. un ballon achevé & couvert, avec la fusée qui doit y porter le feu ; fig. 34. la coupe d'un ballon tout chargé, auquel le feu se communique par le porte-feu pratiqué au fond du ballon, qui pose sur la chasse dans le mortier ; & fig. 66. un ballon d'artifice qui en enferme un autre.
BALLON, en Chimie ; est un gros vaisseau de verre dans lequel on reçoit les esprits volatils qu'on distille, c'est une espece de récipient. Lorsque le vaisseau dans lequel on reçoit ce que l'on distille est petit ou médiocre, on l'appelle récipient ; si au contraire ce vaisseau est grand, pour que les esprits sulphureux ou volatils ayent la liberté de s'y mouvoir & de se condenser en goutte contre une surface plus étendue, on l'appelle ballon, parce qu'ayant le cou très-court & la figure ronde, il ressemble à celle d'un ballon. (M)
BALLON, en Marine, c'est une espece de brigantin, dont on se sert dans le royaume de Siam ; ce sont des bâtimens fort étroits & d'une extrème longueur, qui ont le devant & le derriere fort relevés & ornés de sculpture ; il y en a de tout dorés, où l'on met jusqu'à cent vingt & même cent cinquante rameurs. Au milieu est une espece de petit dôme que les Siamois appellent chirole, qui forme une chambre couverte de riches étoffes, avec des rideaux de la même étoffe. Quelquefois cette chirole est surmontée d'une pyramide ou d'un clocher fort haut. Les bords de ces bâtimens sont à fleur d'eau, & les extrémités qui sont recourbées s'élevent fort haut, la plûpart représentant des figures de dragons, de serpens, ou d'autres animaux. Ces ballons ont pour l'ordinaire cent ou cent vingt piés de long, & n'en ont guere que six de large ; ils vont avec beaucoup de vîtesse. (Z)
BALLONS, s. m. pl. c'est ainsi qu'on appelle chez les potiers de terre, les mottes de terre préparées & prêtes à être mises en oeuvre ; & dans les Verreries, les mottes de terre à pot, prêtes à faire des pots. Voyez VERRERIE & POT.
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BALLOT | S. m. (Comm.) petite balle ou paquet de marchandises. On le dit quelquefois des grosses balles. Voyez BALLE.
BALLOT ou BALLON, dans le commerce de verre de Lorraine, signifie une certaine quantité de tables de verre plus ou moins grande, selon sa qualité. Le ballot de verre blanc contient vingt-cinq liens, à raison de six tables au lien ; le ballot de verre de couleur, seulement douze liens & demi, & trois tables au lien. Voyez LIEN, TABLE, VERRE.
Ballot, s'entend aussi dans le commerce des viandes boucanées que font les boucaniers de S. Domingue, d'un certain poids que chaque paquet doit avoir. Ordinairement le paquet est de 60 livres de viande nette, non compris l'emballage. Voyez BOUCANIER. (G)
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BALLOTADE | S. f. (Manége) c'est un saut qu'on fait faire à un cheval entre deux piliers, ou par le droit, avec justesse, soûtenu de la main & aidé du gras des jambes, ensorte qu'ayant les quatre piés en l'air, il ne montre que les fers de ceux de derriere, sans détacher la ruade & s'éparer. A la capriole, il rue ou noue l'aiguillette ; à la croupade, il retire les piés de derriere sous lui, au lieu de montrer ses fers comme il fait en maniant à ballotade ; c'est ce qui fait leur différence. Quand un cheval est lassé d'aller à capriole, & que son grand feu est passé, il se met de lui-même à ballotades, puis à croupades à moins que le poinçon bien appuyé ne lui fasse noüer l'aiguillette & continuer l'air des caprioles. Faire la croix à ballotades, c'est faire ces sortes d'airs ou de sauts d'une haleine en-avant, en-arriere & sur les côtés, comme une figure de croix. La ballotade est un saut où le cheval semble vouloir ruer, mais ne le fait pourtant pas ; ce n'est qu'une demi-ruade faisant seulement voir les fers des jambes de derriere, comme s'il avoit envie de ruer. (V)
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BALLOTE | (Hist. nat. botaniq.) genre de plante à fleur monopétale labiée, dont la levre supérieure est creusée en forme de cuilliere, la levre inférieure est divisée en trois parties ; celle du milieu est la plus grande, sa figure approche de celle d'un coeur ; le pistil sort du calice, il est attaché comme un clou à la partie postérieure de la fleur ; & il est environné de quatre embryons, qui deviennent autant de semences oblongues renfermées dans une capsule qui a servi de calice à la fleur, & qui est en forme de tuyau à cinq faces. Tournefort, Inst. rei herb. Voyez PLANTE. (I)
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BALLOTER | v. neut. (Hist. mod.) maniere de donner son suffrage dans les élections, &c. par le moyen de certaines petites balles de diverses couleurs ; en France on les nomme des ballotes : l'usage est de les mettre secrettement dans une boîte. (G)
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BALOIRES | S. f. pl. ou principale lisse de gabari ; ce sont, en Marine, de longues pieces de bois, qui dans la construction d'un vaisseau, déterminent la forme qu'il doit avoir ; c'est pourquoi on les appelle aussi formes de vaisseau. (Z)
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BALOTIN | terme de Jardinage, espece de citronnier. Voyez CITRONNIER. (K)
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BALOWA | (Géogr.) ville d'Asie dans l'Indostan, au royaume de Decan.
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BALSAMINE | S. f. balsamina, (Hist. nat.) genre de plante à fleur polypétale irréguliere. Cette fleur est composée de quatre pétales ou de six : dans celle qui a quatre pétales, la supérieure forme une sorte de voûte ; l'inférieure est concave & terminée par un prolongement en forme de queue. Les deux pétales des côtés sont fort étendus & accompagnés d'une oreille : les fleurs à six pétales sont très-rares : le pétale inférieur n'a point de prolongement en forme de queue : le pistil se trouve au milieu de ces fleurs entre deux petites feuilles. Quand la fleur est passée, ce pistil devient un fruit arrondi des deux côtés dans quelques especes, & ressemblant à une silique dans quelques autres. Ce fruit a des sortes de muscles, qui le rendent élastique lorsqu'il s'ouvre. Il renferme des semences attachées à un axe ou placenta. Tournefort, Inst. rei herb. Voyez PLANTE. (I)
On peut repiquer la balsamine sur d'autres couches pour l'avancer. On la transporte au bout de six semaines dans les parterres : on la place parmi les fleurs basses, afin de ne lui point ôter le soleil : on la met aussi dans des pots : elle veut être souvent arrosée. (K)
* Le fruit de la balsamine est de toutes ses parties celle dont on fait le plus d'usage en Medecine : il passe pour vulnéraire, rafraîchissant, & un peu dessicatif ; il appaise les douleurs, sur-tout celles des hémorrhoïdes ; il est bon extérieurement pour les hernies, les brûlures, & les blessures des nerfs. Le baume tiré du fruit de cette plante trempé dans l'huile & seché au soleil, est excellent dans les blessures, les ulceres, les hémorrhoïdes, les ruptures, & les maladies de la matrice.
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BALSAMIQUES | adj. pris sub. en Medecine, on donne ce nom à des remedes d'une nature un peu acre & chaude : cette classe comprend les céphaliques, apoplectiques, anti-paralytiques, cordiaux, spiritueux, & autres. On met de ce nombre le bois d'aloès, sa résine, sa teinture, son aubier, le santal citrin, sa teinture concentrée en baume liquide ; l'ambre gris, le liquidambar, le baume blanc, le succin, le benjoin, le stirax calamite, sa résine ; le stirax blanc ; le laudanum, sa résine ; les baumes du Pérou, de Copahu, de Tolu ; l'écorce vraie de quinquina, le costus amer, la cascarille, la canelle, le girofle, la graine de paradis, les cubebes, le macis, la noix muscade, la sarriette, le thym, la rue, le serpolet, la lavande, le nard celtique, l'origan, le dictamne de Crete, la marjolaine, la mélisse, la molucque, la camomille romaine, le marum de Syrie, le basilic ; l'aurone, le stoechas, le spicanar, le jonc odorant, les feuilles de laurier & myrte, & toutes les huiles de ces simples obtenues par la distillation. Entre ces compositions, Hoffman compte les baumes apoplectiques de Crollius, de Sherzerus, de Zeller, son baume liquide de vie, l'esprit de baume du Pérou, les esprits de succin & de mastic, l'eau apoplectique de Sennert, l'eau d'Anhalt, l'essence d'ambre, les esprits volatils huileux, faits en aromatisant ces esprits avec les huiles de canelle, de macis & de cedre.
Ces remedes augmentent la chaleur dans les solides, & donnent de la volatilité aux fluides, conséquemment hâtent le mouvement progressif du sang, divisent les humeurs, résolvent les obstructions, & entretiennent la transpiration.
On peut les employer dans les maladies de la tête, des nerfs, de l'estomac, & du coeur, à condition que les corps ne seront pas pleins de sang & d'humeur, que le ventre sera libre, & qu'il n'y aura ni grande jeunesse, ni tempérament sensible & porté à la colere.
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BALSARA | Voyez BASSORA.
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BALTAGIS | S. m. (Hist. mod.) sorte d'azamoglans ou valets du serrail, occupés à fendre, scier & porter le bois dans les appartemens. Leur nom vient de balta, qui en langue turque signifie hache ou coignée. Les baltagis, portent le bois par tout le serrail, & jusqu'aux portes de l'appartement des femmes, où les eunuques noirs viennent le prendre, parce qu'ils ont seuls droit d'y entrer. Le visir Mehemet Kuperli sous Achmet III. avoit été baltagi ; & il en retint le nom même dans son élévation, selon la coûtume des Turcs, qui portent sans rougir le nom de leur premiere profession. Guer, moeurs & usages des Turcs, tome II. (G)
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BALTEI | S. m. pl. (Hist. anc.) c'est ainsi qu'on appelloit chez les anciens les précinctions des théatres & des amphithéatres. Voyez AMPHITHEATRES & THEATRES.
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BALTEUS | en Architecture, ceinture de la volute ionique. Vitruve, page 97.
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BALTIMORE | (Géogr.) ville d'Irlande dans la province de Munster, au comté de Corck, sur la baie de même nom.
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BALTIQUE | Géogr. (MER) grand golfe entre l'Allemagne & la Pologne, qui a au midi le Danemark, la Suede à l'occident, la Laponie au septentrion, la Bothnie, la Finlande, la Livonie, la Courlande, une partie de la Pologne à l'orient, qui communique à la mer de Danemark par le Sund, le grand & le petit Belt.
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BALTRACAN | (Hist. nat. bot.) plante qui croit dans la Tartarie, qui a, dit-on, la feuille de la rave, qui pousse une tige plus grosse que le doigt, qui s'éleve de la longueur du bras, & qui a la graine du fenouil, seulement plus grosse, & d'une odeur forte. Le baltracan s'ouvre dans la saison ; son écorce se sépare ; il répand alors l'odeur de l'oranger. Les Tartares le mangent pour se soûtenir en voyage, sans sel, ni autre assaisonnement ; sa tige est un peu creuse, & son écorce d'un verd jaune. Barbaro marchand vénitien, dont on a tiré cette description si mal arrangée, dit avoir trouvé du baltracan proche Croia, dans l'Albanie.
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BALUCLAV | ou JAMBOL, (Géogr. anc. & mod.) port de Crimée sur la mer Noire. Long. 52. 40. lat. 44. 50. Quelques géographes pensent que c'est l'ancienne Pallacium.
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BALUSTRADE | S. f. en Architecture : on entend par ce nom la continuité d'une ou plusieurs travées de balustres, séparées par les piédestaux construits de marbre, de pierre, de fer ou de bois, tenus de la hauteur des appuis. Voyez APPUI.
Les balustrades de pierre ou de marbre servent à deux usages dans le bâtiment : l'un pour servir d'appui aux terrasses qui séparent l'inégalité de hauteur de terrein, dans un parc, dans des cours, ou dans des jardins ; l'autre pour tenir lieu de balcon ou d'appui évuidé à chaque étage d'un édifice, ou pour lui servir de couronnement lorsque les combles ne sont pas apparens, comme au palais Bourbon à Paris, au château de Versailles, & ailleurs ; cette décoration ne devant pas avoir lieu lorsque la nécessité ou l'usage exige des combles, malgré l'exemple qu'on en voit au palais du Luxembourg.
La hauteur des premieres balustrades n'a d'autre sujetion que celle d'être proportionnée à celle du coude ou hauteur d'appui : celle des secondes doit avoir en général le quart plus un sixieme de l'ordre qui les soûtient, c'est-à-dire la hauteur de l'entablement, plus une sixieme partie. Elles sont composées ordinairement de trois parties principales ; savoir, d'un socle ou retraite, d'un dez & d'une tablette ; ces trois parties comprises ensemble doivent se diviser en neuf, dont on donnera quatre à la retraite ou socle, quatre au dez, & une à la tablette : mais comme cette hauteur de balustrade tenue extérieurement du quart plus un sixieme de l'ordre, seroit souvent trop haute pour servir d'appui du côté des appartemens ou terrasses supérieurs d'un bâtiment, alors le sol des étages intérieurs peut être élevé jusqu'à la hauteur de la retraite, à 2 ou 3 pouces près.
L'on fait souvent des balustrades qui tiennent lieu d'attique ou d'amortissement aux étages supérieurs d'un édifice, & dans lesquels on n'introduit point de balustres, ne devant les employer que lorsqu'il y a des vuides dans le bâtiment ; tels que sont les croisées, les portes, les entre-colonnes : or il est quelquefois des bâtimens qui n'ont point d'ouvertures remarquables ; alors il faut soustraire les balustres dans ces balustrades, pour leur donner un caractere de solidité qui réponde au reste de l'ordonnance : mais quand on en fait usage, il faut éviter d'en mettre plus de onze dans une même travée, ou moins de cinq, malgré l'exemple du château de Clagny, où l'on n'en voit dans quelques endroits que deux, & quelquefois une ; ce qui marque un trop petit espace vuide sur une grande face de bâtiment d'une ordonnance legere ; & celui du château d'eau du Palais-royal à Paris, d'un caractere rustique, où l'on voit au contraire des travées qui en ont jusqu'à 14 ; ce qui est un défaut de convenance, qui me fait avancer pour précepte que les balustrades doivent être plus ou moins ornées, selon le caractere du bâtiment qui les reçoit ou qu'elles accompagnent, c'est-à-dire que leurs profils doivent se ressentir du genre rustique, solide, moyen, délicat, & composé, ainsi que les balustres. Voyez ci-dessous BALUSTRE, & ses profils suivant les cinq ordres, dans nos Planches d'Architecture. (P)
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BALUSTRE | S. f. terme d'Architecture, du latin balostrum, fait du grec , fleur du grenadier sauvage à laquelle sa tige ressemble assez, est ordinairement une petite colonne composée de trois parties principales ; savoir le chapiteau, la tige, & le pié d'ouche. On a soin que les balustres, aussi-bien que les balustrades, se ressentent du caractere de l'édifice ; c'est pour cela qu'on représente dans nos Planches à-peu-près les cinq manieres de les mettre en usage. Les toscanes se font volontiers quarrées par leur plan, pour plus de rusticité ; quelquefois même les doriques : mais les autres se font toûjours rondes, à l'exception des plinthes, des piés d'ouches & des chapiteaux ; malgré l'exemple de ceux du château de Sceaux, où le tout est cylindrique ; ce qu'il faut éviter. Les membres principaux des balustres peuvent être ornés de moulures au choix de l'architecte : le genre simple, élégant & orné qui est répandu dans l'ordonnance du bâtiment, doit néanmoins lui servir de regle.
Pour trouver la proportion des principales parties des balustres en général ; il faut diviser toute leur hauteur en 5 ; une sera pour celle du pié d'ouche D ; les 4 parties restantes seront divisées de nouveau en 5, dont une sera pour la hauteur du chapiteau E : ensuite on divisera la distance depuis E jusqu'en F encore en 5, dont 3 seront pour la hauteur du cou F, & les deux autres pour la panse ou renflement G.
Le balustre toscan étant le plus massif, on doit donner à la largeur de sa panse les 2/3 de toute sa hauteur, pendant que le corinthien, qui est le plus svelte, n'en aura que le tiers ; la largeur des autres se trouvera entre ses deux extrèmes. Ces largeurs ainsi trouvées pour la grosseur de la panse, on les divisera chacune en 9, dont 4 formeront celle du cou, qui servira aussi pour la largeur la plus étroite du pié d'ouche, ainsi que l'exprime la ligne ponctuée N : la largeur du plinthe du pié d'ouche sera égale à celle de la panse, & celle du tailloir aura 1/4 ou 1/3 moins, selon le caractere du balustre ; & leur écartement d'une panse à l'autre sera tenu de la largeur d'un cou.
Il faut éviter les demi-balustres dans l'ordonnance des balustrades, ainsi que celles qui ne peuvent être que feintes : cette mutilation ou affectation est contraire au bon goût ; je leur préfere les acroteres H, qui en font l'office avec plus de vraisemblance. Voy. ACROTERES.
Ces balustres, ainsi que les balustrades, se font de différentes matieres ; ce qui les fait nommer balustres de pierre, de marbre, de bois, de fer, de bronze, &c. Celles qu'on employe à la décoration extérieure des bâtimens, different en général très-peu des exemples que l'on a donnés dans les Planches : mais celles des dedans varient à l'infini suivant les endroits où elles sont placées, la richesse de leur matiere, & le génie de l'architecte qui en donne les desseins.
Les balustres dans les rampes d'un escalier font un assez mauvais effet, à cause de l'obliquité qu'occasionnent ces rampes, aux moulures des piés d'ouches & aux chapiteaux des balustres ; ce qui fait que quelques architectes aiment mieux faire regner ces moulures horisontales, malgré l'inclinaison des socles & des tablettes, comme on l'a pratiqué au Palais-royal : d'autres, qui regardent l'un & l'autre comme vicieux, admettent l'usage des rampes de fer, ce genre de rampe n'exigeant pas tant de sévérité. Il est cependant vrai que cette derniere espece n'a pas à beaucoup près tant de dignité, & qu'elle ne paroît tolérable que dans les escaliers des maisons des particuliers ; ceux des maisons des grands étant ordinairement susceptibles de peinture, de sculpture, & d'architecture, semblent exiger des rampes qui s'assortissent à leur magnificence. (P)
BALUSTRE, en Serrurerie, est encore un ornement qui se pratique sous l'anneau d'une clé au haut de la tige, & qui est appellé balustre, parce qu'il en a la forme. Les clés de chef-d'oeuvre ont ordinairement leur tige en balustre.
BALUSTRE, en terme d'Orfévre, est une partie de la monture d'un chandelier qu'on voit ordinairement au milieu de cette monture. Elle est plus grosse en haut qu'en bas, & se termine à ses deux extrémités par un noeud d'une grosseur proportionnée à l'extrémité où il doit être. Voyez NOEUD.
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BALVE | (Géogr.) ville de l'Allemagne dans le duché de Westphalie.
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BALZANE | S. f. (Manége) c'est la marque de poil blanc qui vient aux piés de plusieurs chevaux, depuis le boulet jusqu'au sabot, devant & derriere. Ce mot vient de l'italien balzano. On appelle cheval balzan, celui qui a des balzanes à quelqu'un de ses piés, ou à tous les quatre. On juge de la bonté & de la nature des chevaux, selon les piés où les balzanes se rencontrent. Balzan s'applique à l'animal ; cheval balzan. Balzane, c'est la marque qui le distingue. Les termes de travat, transtravat, & chaussé trop haut, appartiennent aux balzanes. Voyez ces termes à leurs lettres. Quelques cavaliers sont assez superstitieux pour s'imaginer qu'il y a une fatalité sinistre attachée à la balzane du cheval arzel. (V)
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BAM | ville de la Caramanie persique. Long. 94. lat. sept. 28. 30.
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BAMBA | (Géog.) province d'Afrique au royaume de Congo.
BAMBA, (Géog. anc. & mod.) village de la vieille Castille, jadis Gueritum, ville de l'Espagne Tarraconoise.
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BAMBERG | (Géog.) ville d'Allemagne dans la Franconie, au confluent du Mein & du Rednitz. Long. 28. 40. lat. 50.
Il y a en Boheme une ville du même nom. Long. 34. 20. lat. 49. 53.
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BAMBIAIE | S. m. (Hist. nat. Ornyth.) oiseau qu'on trouve dans l'île de Cuba, qui ne s'éleve presque point de terre, qu'on prend à la course, & dont la chair a bon goût. On ne nous dit rien de son plumage, de son bec, de ses pattes, de ses aîles, de sa grosseur, &c. ni des autres caracteres, que les Naturalistes doivent faire entrer dans leurs descriptions.
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BAMBOCHADES | S. f. pl. en Peint. se dit de certains petits tableaux qui représentent des sujets champêtres & grotesques. L'étymologie de ce mot vient de Bamboche, peintre flamand, qui s'est particulierement adonné à ce genre. Son nom de famille étoit Pierre de Laur : mais les Italiens lui donnerent celui de Bamboche, à cause de la singularité de sa taille. (R)
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BAMBO | ou BAMBUCK, (Géogr.) royaume d'Afrique dans la Nigritie, borné au septentrion par les pays de Galam & de Kassan, à l'occident par la riviere de Feleme & les royaumes de Kantu & de Kombregudu, au midi par celui de Mankanna, & à l'orient par des terres inconnues.
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BAMBOUC | (Hist. nat. bot.) bois extrèmement noüeux qui croît dans plusieurs endroits des Indes orientales. On dit que c'est une espece de canne très-grosse & très-haute, dont les bamboches ou cannes legeres que vendent nos Tabletiers, ne sont que les plus petits jets. Voyez TABAXIFERA ARUNDO.
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BAMBOURG | PAMBOURG, PAINBOURG, (Géog. anc. & mod.) bourg du cercle de Baviere en Allemagne, dans le gouvernement de Buchausen sur l'Achza, vers le nord du lac de Chiemzée. Quelques géographes croyent que c'est l'ancienne Badacum ou Augusta Badacum.
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BAMBYCATIENS | S. m. pl. (Géog. anc.) peuples voisins du Tigre, peut-être les habitans de Bambyce ou Hiérapolis.
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BAMFE | (Géog.) petite ville de l'Ecosse septentrionale, dans la province de même nom, à l'embouchure de la Doverne. Long. 15. 25. lat. 57. 48.
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BAMIA | (Hist. nat. bot.) on l'appelle aussi alcea indica. Elle a la fleur large, pentapétale, avec un vaisseau séminal assez considérable, divisé en cinq cellules qui contiennent des semences en forme de reins. Sa feuille est découpée, dentelée, & attachée à la tige par des pédicules. Elle croît en Egypte. On se sert de sa semence : elle est d'un blanc sale ; elle répand une odeur qui tient de celle du musc. Les Egyptiens la font sécher, la broyent & en mêlent la poudre à leur caffé ; ils lui attribuent la vertu de fortifier la tête & l'estomac. On en use en fumigation.
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BAN | S. m. terme de Jurisprudence, est une proclamation solemnelle de quelque chose que ce soit. L'origine du mot est incertaine. Quelques-uns le tirent du Breton, ban, clameur, bruit : d'autres du Saxon, pan, une chose étendue : d'où ban, & bande, employée pour une banniere.
Bracton fait mention de bannus regis, ban du roi, pour une proclamation de silence faite par les juges de la cour avant le choc des champions dans un combat.
BANS de mariage, sont des avertissemens solemnels de promesses de futurs mariages, donnés dans l'église paroissiale avant la célébration des mariages, afin que s'il se trouve quelque opposition à faire contre l'une ou l'autre des parties, comme pour raison d'engagemens précédens, ou autre cause, il y ait lieu de les faire.
La publication des bans se fait à dessein de prévenir les mariages clandestins. Par les lois de l'Eglise, les bans doivent être publiés trois fois à trois jours différens aux lieux où les parties demeurent, à peine de nullité de mariage. Il y a peine d'excommunication contre ceux qui connoissant des empêchemens, ne les déclarent point.
Un curé ne sauroit être contraint à les publier, lorsqu'il connoît dans l'un ou l'autre de ceux qui se présentent au mariage quelque incapacité ou empêchement.
Si les contractans sont majeurs, le défaut de publication de bans n'emporte pas tout seul la nullité de mariage.
BAN, en terme de Palais, est synonyme à bannissement : c'est en ce sens qu'on dit, garder son ban, rompre son ban. (H)
* BAN de vendange, c'est la publication faite au prône par les curés des paroisses de village, de la permission accordée par le juge ou le seigneur à tous les particuliers de faire vendanger leurs vignes. Le ban établi pour l'ouverture des vendanges est fondé sur deux raisons : l'une d'empêcher des gens ignorans, ou pressés par la nécessité, de recueillir les raisins avant leur parfaite maturité, & d'en faire de mauvais vins ; l'autre, d'empêcher que ceux qui vendangeroient les premiers, ne découvrissent & n'exposassent au pillage les vignes de leurs voisins. Le ban de vendange se publie sur l'avis des principaux habitans des villages, & des vignerons les plus habiles. Il assujettit tous les habitans indistinctement, à moins qu'ils n'ayent acquis un titre exprès qui les en dispense. Le seigneur seul peut vendanger un jour avant l'ouverture portée par le ban. Il y a des coûtumes où les vignes enfermées de clos & de murailles sont exceptées de la loi du ban ; par-tout la contravention est punie par l'amende & la saisie des fruits.
BAN, (Hist. mod.) nom qu'on donnoit anciennement en Hongrie aux gouverneurs des provinces qui relevoient de ce royaume, telles que la Dalmatie, la Croatie, la Servie. Selon Leunclavius, on n'accordoit ce titre qu'aux princes du sang de la maison de Hongrie ; & encore aujourd'hui, la dignité de ban de Croatie est remplie par un seigneur de la premiere distinction. Le pays dans lequel est situé Temeswar, s'appelle encore aujourd'hui le bannat de Temeswar, auquel sens le terme de bannat équivaut à ceux de province ou de gouvernement. Le ban avoit sous lui un vice-gérent, lieutenant général, ou lieutenant de roi au gouvernement, qu'on nommoit vice-bannus. On croit que ces deux noms sont dérivés des mots ban, bando ou banno, dont on se servoit dans le bas Empire pour signifier une banniere ou un étendart ; parce que les habitans de ces provinces, en tems de guerre, étoient obligés de se ranger sous la banniere ou l'étendart de leur gouverneur. Quelques auteurs prétendent que les Turcs ont conservé ce nom de ban, & que les gouverneurs à qui ils le donnent, ont la même autorité que les beglerbegs. Voyez BEGLERBEG. (G)
BAN & ARRIERE-BAN, (Art milit. & Hist. mod.) mandement public adressé de la part d'un souverain à ses vassaux, de se trouver en armes à un rendez-vous pour servir dans l'armée, soit en personne, soit par un certain nombre de gens de pié ou de cheval qui les représentent, à proportion du revenu ou de la qualité de leurs fiefs.
Le ban se rapporte aux fiefs, & l'arriere-ban aux arriere-fiefs, selon quelques-uns : mais d'autres croyent que le ban est le service ordinaire que chaque vassal doit selon la nature de ses fiefs ; & que l'arriere-ban est un service extraordinaire que les vassaux rendent au roi ; d'autres qui font venir le mot d'arriere-ban, de heri-bannum, proclamation du maître ou seigneur, pensent qu'on ne doit mettre aucune distinction entre ban & arriere-ban.
Quoi qu'il en soit, ces assemblées de vassaux convoqués par leurs seigneurs sur les ordres ou à la réquisition du roi, ont commencé en France dès le tems des rois de la seconde race, & il en est fait mention dans les capitulaires de Charlemagne : mais elles ont été plus fréquentes sous les rois de la troisieme race. Car on trouve dans la chambre des comptes plusieurs rôles pour le ban & l'arriere-ban, datés des années 1216, 1236, 1242, 1253, & 1272. Il paroît par le dernier, que les seigneurs fieffés cités par Philippe-le-Hardi, devoient se trouver à jour préfix à Tours, avec un certain nombre de cavaliers & de fantassins, dont les uns alloient à leurs dépens, les autres étoient défrayés ; & ceux qu'on dispensoit du service, s'en rédimoient par une somme d'argent ou une certaine quantité de fourrage. Depuis ce prince jusqu'à François I. on trouve encore plusieurs convocations & rôles du ban & de l'arriere-ban ; dans lesquels, outre les seigneurs laïques, sont aussi compris les archevêques, évêques, abbés, prieurs, chapitres, les maires, consuls & échevins des villes. Les ecclésiastiques étoient obligés d'aller ou d'envoyer au ban & arriere-ban, à cause des fiefs qu'ils possédoient. Lorsqu'ils y alloient eux-mêmes, ils combattoient en personne ; témoin ce que Monstrelet raconte de Pierre de Montaigu archevêque de Sens, & Matthieu Paris, de Philippe de Dreux évêque de Beauvais, qui portoient la cuirasse & combattoient comme les seigneurs & barons.
Dans la suite, les ecclésiastiques ont été dispensés du ban & arriere-ban par plusieurs lettres patentes, & entr'autres par un acte du 29 Avril 1636, entre Louis XIII. & le clergé de France, moyennant certaines subventions que le clergé a promis de payer au roi dans les besoins de l'état. Les rois de France ont aussi exempté de ce service les bourgeois de plusieurs villes de leur royaume, les officiers du parlement de Paris, les secrétaires du roi, & autres personnes privilégiées.
Autrefois l'assemblée du ban & de l'arriere-ban se faisoit par des seigneurs de la premiere distinction appellés missi dominici, envoyés ou députés du souverain ; ensuite par les bannerets sur les ordres du roi ou du connétable. Depuis le roi a adressé ses lettres aux sénéchaux & aux gouverneurs de province. En 1674 & en 1689, Louis XIV. ordonna à tous les nobles, barons, chevaliers, écuyers, & autres non nobles, communautés & autres vassaux, de se trouver en armes au jour & au lieu qui leur seroient désignés par le gouverneur & lieutenant général de sa majesté en leur province, pour aller joindre le corps des troupes sous la conduite du chef qui seroit choisi d'entre eux, afin de les commander suivant la forme accoûtumée. De la Roque, traité du ban & arriere-ban. Voy. NOBLESSE. (G)
Cette milice étoit assez bonne du tems de Louis XI. parce qu'il s'en servoit souvent : elle commença à dégénérer du tems de Louis XII. & de François I. & elle tomba encore davantage sous Henri II.
On n'a point assemblé l'arriere-ban en France depuis 1674. M. de Turenne ne fut point content de cette milice, qui ne se conduisoit pas avec le même ordre & la même obéissance que les troupes reglées. (Q)
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BANAL | terme de coûtume, se dit d'un moulin, four, pressoir, ou autre chose semblable, que le seigneur entretient pour l'usage de ses censitaires, & dont il peut les contraindre d'user. Voyez ci-dessous BANALITE.
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BANALITÉ | est un droit qu'a le seigneur de contraindre les habitans de son territoire, d'aller moudre leur blé à son moulin, cuire à son four, ou porter la vendange à son pressoir.
Dans la coûtume de Paris, la banalité ne peut pas s'exiger sans titre ; & ces titres ne sont pas réputés valables s'ils ne sont avant vingt-cinq ans. (H)
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BANANIER | S. m. musa, (Hist. nat. bot.) Voici ses caracteres. Sa racine pousse des jets, sa tige meurt après avoir donné son fruit. Elle ressemble à un roseau ; elle n'a point de branches ; mais elle jette de grandes feuilles, d'abord roulées comme au cannacorus, mais se développant dans la suite, & formant une espece de couronne à son sommet. Les fleurs & les fruits sont en grappes, & enfermés dans une gaîne comme au palmier. Les fleurs ont plusieurs pétales irréguliers & portés sur le sommet de l'ovaire. L'ovaire ressemble à celui du concombre ; il est charnu, partagé en trois loges, bon à manger, rempli de semence, & garni d'un long tuyau dont l'extrémité est arrondie. Boerhaave en distingue deux especes.
Le fruit de cet arbre est délicat ; on dit qu'il ne fait jamais de mal en quelque quantité qu'on en mange. Alpin nous assûre cependant qu'il se digere difficilement ; c'est la nourriture journaliere des Indiens. Ses feuilles sont si grandes, qu'elles peuvent servir de vêtement. La racine écrasée & bouillie dans du lait, est bonne pour abattre les vertiges ; son eau mêlée avec du sucre appaise la chaleur brûlante des reins ; la décoction du fruit adoucit la toux causée par des humeurs chaudes & acres. On s'en sert dans les inflammations de la plevre, du poumon, & des reins ; enfin elle excite la semence, & provoque l'urine. (N)
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BANAR | ou BENARES, (Géog.) ville d'Asie, au Mogol, dans le royaume de Bengale. Long. 101. 30. lat. 26. 20.
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BANAUçON | S. m. en Architecture, nom du troisieme genre de machine des anciens, qui servoient à tirer des fardeaux. (P)
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BANBURY | (Géog.) ville d'Angleterre, sur la riviere de Chernel, dans la province d'Oxford. Long. 16. 10. lat. 52. 9.
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BANC | S. m. (Gramm.) ce mot se prend communément pour un long siége, à dos ou sans dos, soûtenu sur plusieurs piés ; & c'est du rapport que d'autres machines ont avec sa figure ou avec son usage, qu'elles ont pris le nom de banc.
BANC, terme de Jurisprudence, dans le choeur, est un des droits honorifiques qui appartiennent au patron d'une église, ou au seigneur haut-justicier dans la haute-justice duquel elle est située. Voyez HONORIFIQUES (droits).
On appelle au palais messieurs du grand banc, les présidens au mortier, parce qu'en effet le banc sur lequel ils sont assis est plus élevé que les siéges des autres conseillers.
On appelle aussi bancs, au palais, des especes de bureaux où se tiennent les avocats & procureurs pour parler à leurs parties. (H)
BANC DU ROI, (Hist. mod. & Jurisprud.) tribunal de justice ou cour souveraine en Angleterre. On l'appelle ainsi, parce qu'autrefois le roi y présidoit en personne sur un banc élevé, les juges étant assis à ses piés sur des bancs ou siéges plus bas. C'est dans cette cour que l'on plaide les causes de la couronne entre le roi & ses sujets. Elle connoît aussi des crimes de haute trahison & des complots contre le gouvernement. Ce tribunal est composé de quatre juges, dont le premier s'appelle le lord chef de justice de la cour du banc du roi. Sa jurisdiction est générale, & s'étend par toute l'Angleterre ; il n'y en a point dans ce royaume de plus indépendante, parce que la loi suppose que le roi y préside toûjours. Il y a encore un autre tribunal nommé le banc commun ou cour des communs plaidoyers, qui est la seconde cour de justice du royaume, où l'on porte les affaires communes & ordinaires, c'est-à-dire les procès de sujet à sujet. On y juge toutes les affaires civiles, réelles, & personnelles, à la rigueur de la loi. Le premier juge de cette cour se nomme chef de la justice des communs plaidoyers ou du banc commun. On y comptoit autrefois cinq, six, sept, & jusqu'à huit juges ; leur nombre est maintenant réduit à quatre, comme celui des juges du banc du roi. (G)
BANC, (Comm.) Les banquiers avoient autrefois des bancs dans les places publiques & dans les lieux où se tenoient les foires ; & c'étoit où ils faisoient leur commerce d'argent & de lettres de change. Quand un banquier faisoit faillite, on rompoit son banc, comme pour avertir le public que celui à qui avoit appartenu le banc rompu n'étoit plus en état de continuer son négoce ; & comme cet usage étoit très-ordinaire en Italie, on prétend que le terme de banqueroute dont on se sert en France, vient des mots italiens banco rotto, qui signifient banc rompu. Voyez BANQUEROUTE. Dict. du Comm. tom. I. (G)
BANC, en terme de Marine, est la hauteur du fond de la mer, qui s'éleve quelquefois jusqu'à sa surface, ou qui n'est couvert que de très-peu d'eau ; desorte que les vaisseaux ne peuvent passer dessus sans échoüer. Il y a des bancs qui restent entierement à sec, lorsque la mer est basse ; ce qui s'exprime en disant que ces bancs découvrent. Il y a des bancs sur lesquels il y a assez d'eau pour que les plus grands vaisseaux puissent y passer en tout tems, & même y mouiller, tels que le banc de Terre-neuve.
On appelle bancs de glaces, de gros glaçons flottans qu'on trouve quelquefois à la mer. (Z)
BANC de galere, de galéasse, de galiote, de brigantin, & de tout bâtiment à ramer. C'est le lieu pour asseoir ceux qui tirent à la rame, soit forçat, bonavoglie, ou matelot, voyez Planche II. le dessein d'une galere à la rame, & les forçats assis sur le banc.
Les galeres ordinaires sont à vingt-cinq bancs ; ce qui se doit entendre de vingt-cinq de chaque côté, faisant en tout cinquante bancs pour cinquante rames, & quatre ou cinq hommes sur chaque rame.
Les galéasses ont trente-deux bancs, & six à sept hommes pour chaque rame.
De tous les bâtimens à rame, il n'y a que les gondoles de Venise qui n'ayent point de banc ; car les rameurs nagent debout.
BANC de chaloupe ; ce sont les bancs qui sont joints autour de l'arriere de la chaloupe en-dedans pour asseoir ceux qui y sont. (Z)
Banc à s'asseoir dans la chambre du capitaine. On trouve un banc qui est placé contre l'arriere du vaisseau. Il y en a encore un autre à stribord ; c'est par l'endroit qu'occupe ce banc, & qu'on ôte alors, que l'on passe le gouvernail pour le monter ; on le leve aussi lorsqu'on veut culer de l'arriere ; les affuts entrent encore par-là. On y place quelquefois un tuyau d'aisement à six pouces du petit montant qui le soûtient, & à un pié du bord du vaisseau.
Banc à coucher. Il y en a aussi un dans la chambre du capitaine. (Z)
BANC D'HIPPOCRATE, (en Chirurgie) machine dont on se servoit autrefois pour réduire les luxations & les fractures. C'étoit une espece de bois de lit sur lequel on étendoit le malade. Il y avoit un essieu à chaque bout qui se tournoit avec une manivelle ; on attachoit des lacs aux parties luxées ou fracturées d'un côté, & aux essieux de l'autre. En tournant les essieux, les lacs qui s'entortilloient autour faisoient l'extension & la contre-extension pendant que le chirurgien réduisoit les os dans leur situation naturelle. La Chirurgie moderne a simplifié les méthodes de réduire les membres luxés ou fracturés, & ne se sert plus de cette machine dont on voit la description & la figure dans Oribase. Voyez EXTENSION & MACHINE pour la réduction des luxations. (Y)
BANC, (en Architect.) c'est la hauteur des pierres parfaites dans les carrieres.
BANC DE VOLEE ; c'est le banc qui tombe après avoir soûchevé.
BANC DE CIEL ; c'est le premier & le plus dur qui se trouve en fouillant une carriere, & qu'on laisse soûtenu sur des piliers pour lui servir de ciel ou de plafond. (P)
BANC, (Ardoise) On entend par un banc dans les carrieres d'ardoise & autres, le long parallelépipede formé par deux foncées. Les bancs s'élevent les uns au-dessus des autres, & forment à droite & à gauche une espece d'échelle ou plûtôt d'escalier. On ne peut fixer ni la hauteur ni la largeur du banc, ou de chaque degré de cet escalier ; elles varient l'une & l'autre selon la profondeur, l'étendue & la nature de la carriere. Les bancs ou parallélépipedes d'ardoise n'ont pas la même hauteur sur toute leur longueur. Ils vont un peu en s'inclinant vers le fond de la carriere, & forment une pente aux eaux vers la cuvette qui les reçoit. La hauteur du banc est de neuf piés dans nos figures d'ardoise, & sa largeur suit la même échelle. La surface supérieure du banc s'appelle nif. Voyez les articles FONCEE, CUVETTE, NIF, & ARDOISE.
BANC DE CUVE, ce sont dans les Brasseries, les planchers qui entourent les cuves. Voyez BRASSERIE.
BANC, en terme de Cardeur, c'est une planche d'environ un pié de large, allant en pente par un bout, & qui porte toutes les parties du roüet. Voyez CARDER.
BANC A TIRER, (terme & outil de Chaînetier) il sert aux Chaînetiers pour passer à la filiere le fil de fer, de cuivre ou de laiton, qu'ils veulent employer à des chaînes, & pour le diminuer de grosseur.
Ce banc à tirer est fait comme ceux des Orfevres & autres, & est composé d'un banc, d'une piece, du moulinet, du noyau & de la filiere. Voyez BANC D'ORFEVRE.
BANC A COUPER, c'est chez les Cloutiers d'épingles, un banc de figure presque quarrée, garni de rebords plus hauts sur le derriere que sur les côtés, & le devant qui est moins élevé que tout le reste. Les cisailles sont attachées au milieu par une de leurs branches. Voyez CISAILLES, & la figure 13 du banc, Pl. II. du Cloutier d'épingles.
BANC A TIRER, en terme d'Epinglier, est une espece d'établi adossé d'un bout sur un billot fendu à deux ou trois endroits pour y battre la filiere. Voyez FILIERE. Vers le même bout ou à l'autre, selon l'emplacement, est la bobille, voyez BOBILLE ; plus loin, la filiere arrêtée entre trois montans. Derriere elle on voit une piece de bois plus haute que ces montans, avec un coin ; c'est-là qu'on place la filiere pour en faire l'essai : enfin vers cette extrémité on voit le tourniquet d'où dévide le fil que l'on tire. Voyez la fig. Pl. des Trifileries & de l'Orfévrerie.
BANC, servant aux Fondeurs de caracteres d'Imprimerie, est une espece de table oblongue d'environ deux piés & demi, à hauteur d'appui, fermée à l'entour par un rebord, excepté vis-à-vis l'ouvrier où ce rebord finit ; ce banc sert à recevoir les lettres à mesure qu'on les fond, & de décharge pour plusieurs choses nécessaires à l'ouvrier. Voyez la vignette de la Planche I. du Fondeur de caracteres, & la figure 2. de la même Planche qui le représente en particulier.
BANC D'IMPRIMERIE, est une espece de table de bois, longue environ de trois piés sur dix pouces de large, soûtenue par deux treteaux garnis de planches tout-autour, en conservant cependant une ouverture pardevant qui forme un receptacle ou bas d'armoire ; ce banc est toûjours situé à la droite de l'Imprimeur ; sur le premier bout il place le papier trempé prêt à être imprimé ; à l'autre extrémité, il pose chaque feuille au sortir de la presse : les Imprimeurs se servent de la cavité de ce banc, pour serrer la laine, les cuirs, les clous de balles, les blanchets, & autres étoffes ou ustensiles de la presse.
BANC A RIVER, fig. 81. Pl. XVI de l'Horlogerie, est un instrument dont les Horlogers se servent pour river certaines roues sur leur pignon. On met la partie B B de cet outil entre les mâchoires de l'étau, & on fait entrer la tige du pignon sur lequel on veut river une roue dans un trou T convenable ; on prend ensuite un poinçon à river, & on rabat la rivure à petits coups de marteau sur la roue que l'on fait tourner avec le doigt, afin que les parties de la rivure soient également rabattues de toutes parts.
Comme il est important que les balanciers soient rivés bien droit sur leurs verges, & que ces verges, vû leurs palettes, ne pourroient point tourner dans un trou comme la tige d'un pignon, on fait ordinairement au milieu des bancs à river une creusure ronde L, dans laquelle on ajuste une petite plaque P à drageoir, de telle sorte qu'elle puisse y tourner sans beaucoup de jeu : on fait aussi au centre de cette plaque une ouverture O, propre à recevoir le corps d'une verge & une de ses palettes.
La petite plaque pouvant, comme il a été dit, tourner dans sa creusure L, lorsqu'on ajuste une verge dans sa fente pour river le balancier sur son assiette : en tournant ce balancier, on fait tourner la plaque, & on le rive sur sa verge, comme on feroit une roue sur son pignon. On a un outil de la même forme qui s'ouvre en deux pour embrasser la tige d'un pignon, sur laquelle est soudée une assiette ; cette assiette reçoit une roue que l'on y rive, en rabattant sur la roue ébiselée & entaillée, la partie de l'assiette qui l'excede. Comme la roue ou le pignon ne sauroient passer par les trous du banc, on est obligé d'en avoir un qui se sépare en deux, comme il a été dit ; ordinairement les deux pieces du banc sont assemblées ensemble à charniere, & peuvent s'ouvrir & se fermer comme un compas. (T)
BANC A CRIC, en terme d'Orfévre en grosserie, se dit d'un banc à tirer, qui ne differe du banc ordinaire, qu'en ce qu'au lieu de sangle, il est garni d'une espece de cremailliere, & d'une boîte qui renferme un arbre à chaque bout duquel on voit hors de la boîte une manivelle. Cet arbre fait tourner une roue de rencontre, qui s'engraine elle-même dans la cremailliere, qui se termine par un crochet qui retient la main. Voyez CREMAILLIERE & MAIN.
Voyez Planche derniere de l'Orfevre, un banc à tirer & un banc à cric, vignet. fig. 1. 2. ouvriers qui tirent de la moulure ; a tenaille à tirer ; b moulure. Vignet. fig. 3. 4. autres ouvriers au banc à cric ; f d g g banc, e e pitons qui soûtiennent la filiere, d le cric, f la filiere. Fig. 5. ouvrier qui dresse les lames à la lime avant que de les faire passer.
Développement du banc à cric, fig. a b c d e f g, mouvement hors de sa boîte ; b b arbre où l'on voit deux quarrés pour les manivelles ; c son pignon monté, qui fait mouvoir la roue à dent ou le hérisson d, dont le pignon ou la lanterne s'engrene dans le cric f, au bout duquel est un crochet qui tient un anneau g, où l'on met les branches de la tenaille à tirer ; m m la cage ou boîte : n n extrémités des vis qui fixent les jumelles ; m m, o o, les jumelles ; p étrier sur lequel glisse le cric ; q le hérisson ; r la lanterne ; h un des pitons qui soûtiennent la filiere ; i rondelle qui se met sous le banc & l'écrou.
Développement du banc à tirer, P P Q Q R R S boîte à filiere pour tirer des moulures ; p p le sommier ; Q Q le chapeau ; R, R, les vis qui appuient sur les filieres, & les tiennent serrées ; T clé pour serrer les vis ; V, V, les vis ; X, X, les filieres à moulures ; Y Z, autre boîte à filiere peu différente de la précédente ; 1. filieres de dessus ; 2. 3. 2. filieres de dessous ; 4. 4. autre filiere ; 5. morceau tiré en rond ; 6. morceau moulé. A banc à tirer ; B, B, pitons qui soûtiennent les filieres ; C, C, aîles du moulinet ; H H G G F, tambour sur lequel se roule la sangle du moulinet ; G, G, tourillons ; H, H, quarrés des moulinets ; F corps du tambour ; I, I, deux pieces quarrées qui s'ajustent aux quarrés du tambour, entre les clés & le moulinet ; s, t, deux tambours ; u la rondelle ; M, M, deux supports du tambour ; N, O, filieres.
L'assemblage & la fonction de ces deux machines se voit si clairement dans la vignette, que ce que nous en pourrions dire n'ajoûteroit rien à ce qu'elle représente.
BANC A TIRER, terme d'Orfévre, est une piece de bois sur laquelle les Orfévres tirent les fils d'or ou d'argent qu'ils employent. Elle peut avoir, cinq, six, sept, huit, & neuf piés de long, douze à quinze pouces de large, sur quatre d'épaisseur. L'on perce sur un bout de cette piece deux trous qui servent à mettre les poupées que tiennent l'arbre où est attachée la sangle, & où l'on met l'aîle. Voyez POUPEE, ARBRE, SANGLE, & AILE.
Les deux autres trous qui sont vis-à-vis l'un de l'autre, servent à mettre les poupées qui retiennent la filiere, & le troisieme est pour recevoir les gratures que la filiere fait à l'or ou l'argent en les tirant : elles tombent dans un tiroir qui est au-dessous. Il y a encore quatre autres trous outre ceux-ci, pour les piés qui soûtiennent le banc ; ces piés ont environ deux sur trois pouces d'équarrissage, & deux piés & demi, ou même trois piés & demi de long à deux pouces du bas : sous ces piés l'on met une planche avec un rebord de quatre ou cinq pouces de haut, pour serrer les outils qui servent au tirage. Voyez TIRAGE & l'article suivant.
BANC A DEGROSSIR, chez les Tireurs d'or, est un banc sur lequel le dégrosseur donne le troisieme tirage à l'or par le moyen d'une bobine sur laquelle il le devide, en le faisant passer à-travers une filiere appliquée contre un faux-ras retenu dans un ajoux. Voyez FAUX-RAS & AJOUX.
BANC A DORER ; chez les Tireurs d'or, est composé de deux parties, la tête & l'appui : la tête dans laquelle il y a un morceau de bois en forme de demi-cercle, tient dans un mur ; les tenailles entrent dans un trou pratiqué au milieu de ce cercle, par un bras, tandis que l'autre est retenu par des chevilles de fer fichées sur le cercle. Les tenailles sont appuyées dans une encoche à l'autre extrémité du banc, & le lingot qu'elles serrent est soûtenu par l'autre bout sur un chenet, tandis qu'on le brunit & qu'on le dore. Voyez TIREUR D'OR.
BANC ou SELLE A OURDIR, en Passementerie, c'est un siége destiné pour l'ourdisseur, & pour porter la manivelle qui fait tourner l'ourdissoir : cette manivelle a en bas une large poulie qui doit être parallele à celle du moulin ; sur cette poulie est passée une corde à boyau, qui après s'être croisée dans son milieu, va passer sur la poulie du moulin ; par le moyen du croisement de cette corde, le moulin tourne du même sens que la manivelle ; si la corde lâche par la secheresse du tems ou de quelqu'autre maniere, il n'y a qu'à reculer ce banc ; si le contraire arrive, on le rapproche ; il y a des ourdissoirs où l'on se passe de ce banc. Voyez OURDISSOIR ; voyez aussi Pl. de PASSEMENTERIE.
BANCS, dans les Manufactures de soie ce sont des parties de l'ourdissoir. Des bancs, les uns sont attachés au montant, les autres sont mobiles, il y a entr'eux une roue cavée sur la circonférence en deux endroits différens ; les cavités sont environ à un pouce de distance prise sur le diametre. Il passe dans ces cavités une corde de boyau qui va envelopper la cage de l'ourdissoir, & lui donner le mouvement que la roue cavée reçoit de l'ourdisseuse. Les bancs mobiles s'éloignent & s'approchent suivant que la corde a besoin d'être lâchée ou tendue. Voyez OURDISSOIR.
BANC ; on donne, dans les Verreries, ce nom à un siége sur lequel le maître s'assied pour faire l'embouchure, & poser la cordeline. Voyez Planche de Verrerie VI. fig. 17. un ouvrier au banc. Le banc n'a rien de particulier que ses deux bras qu'on fait plus longs qu'ils n'ont coûtume d'être aux autres siéges de cette nature, afin que l'ouvrier puisse y poser & mouvoir commodément sa canne, en faisant l'embouchure & la cordeline.
BANC, en Vénerie ; c'est ainsi qu'on appelle les lits des chiens.
BANC ; on entend par ce mot, dans les Salines, un endroit clos, couvert, pratiqué au côté de la poële, & dont la porte correspond à la pente de la chevre, qui descend par son propre poids, & se renverse sur le seuil du banc, lorsque se fait la brisée. Le sel demeure dix-huit jours dans les bancs, avant que d'être porté dans les magasins. Voyez BRISEE, CHEVRE, & SALINE ; & Planche II. des Salines. Dans la coupe de l'attelier I, I, sont deux bancs.
Bancs (contrôleurs des) ; officiers des Salines : il y en a deux. Leurs fonctions sont d'enregistrer par ordre de numero, & date par date, tous les billets de la délivrance journaliere ; les abattues en abregé, par colonnes & ordre de poëles ; les sels à l'entrée & à la sortie des bancs ; les bois de corde qui viennent à la saline ; & d'assister à toutes les livraisons de sels des bancs & des magasins ; se trouver à la brisée ; faire porter les sels des bancs dans les magasins ; assister aux réceptions de bois & de fers ; en un mot, veiller à tout ce qui concerne le service.
BANC DE JARDIN. Rien n'est si nécessaire dans les grands jardins que les bancs : on en souhaiteroit à chaque bout d'allée. Ils ont des places affectées, telles que sont les renfoncemens & les niches dans les charmilles, les extrémités des allées, les terrasses & les beaux points de vûe. Il y a des bancs simples, des bancs à dossiers, & des bancs dont le dos se renverse du côté que vous voulez. On en fait de marbre, de pierre, & de bois : ces derniers sont les plus communs ; on les peint à l'huile pour les conserver. (K)
* BANC (le grand), Géog. Banc de l'Amérique septentrionale, vers la côte orientale de Terre-neuve ; c'est le plus grand banc de sable qu'on connoisse ; il n'est pas dangereux. Les Européens y font la pêche des morues.
Banc aux baleines, aussi dans l'Amérique septentrionale, à l'occident du grand banc, & au midi du banc à vert.
Banc de l'île de sable, dans l'Amérique septentrionale, au midi de l'île & de l'Acadie, dans la mer de la nouvelle France.
Banc des îles, à l'Amérique septentrionale, dans le grand golfe de S. Laurent en Canada, au-devant de la baie des Chaleurs.
Banc à vert, en Amérique, près de la côte méridionale de Terre-neuve, vis-à-vis des baies de plaisance & des Trépassés.
Banc jacquet ou le petit banc, en l'Amérique méridionale, à l'orient du grand banc.
Banc des perles, en l'Amérique méridionale, sur la côte de Caracas, entre la ville de Rio de la Gacha & le cap de la Vela.
Banc des perles, en Amérique, vers la côte de Venezuela, en allant de l'île Marguerite à celle de la Tortue.
Banc de S. Georges, en l'Amérique septentrionale, vers la nouvelle Angleterre & le cap de sable, sur la côte de l'Acadie. On l'appelle aussi banc aux Anglois.
Banc de Bimini, en l'Amérique, près de l'île Bimini, une des Lucayes ; & de celle d'Abacoa, vers la Floride, sur la partie orientale de Bahama.
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BANCA | (Géog.) île d'Asie dans les Indes, entre celles de Sumatra & de Borneo, avec ville & détroit de même nom.
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BANCALIS | (Géog.) ville de l'île de Sumatra, au royaume d'Achem, vers le détroit de Malaca. Long. 118. lat. 1. 5.
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BANCHE | S. f. (Hist. nat.) pierre molle, mais dure, comparée à la glaise ; M. de Reaumur, Mém. de l'acad. année 1712, pag 128 ; prétend que ce n'est autre chose que de la glaise durcie & pétrifiée par ce qu'il y a de visqueux dans l'eau de la mer, & il le prouve par la disposition de ses feuilles & sa couleur. La banche à sa surface supérieure est assez dure ; un peu au-dessous elle est un peu plus molle ; plus on la prend bas, moins elle est dure, & moins elle est différente de la glaise ; en un mot, en s'approchant du lit de pure glaise, elle paroît aussi insensiblement s'approcher de la nature de cette terre, & cela par des degrés si insensibles, qu'il n'est pas possible de déterminer précisément où la banche finit, & où la glaise commence. La banche, de grise qu'elle est, devient blanche & dure lorsqu'elle n'est plus humectée par l'eau.
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BANC | ou BANQUO, (Comm.) mot italien qui signifie banque. On s'en sert ordinairement pour exprimer celle qui est établie à Venise.
Le banco de Venise, qu'on appelle vulgairement banco del giro, est proprement un bureau du dépôt public, ou une caisse générale & perpétuelle ouverte à tous marchands & négocians, & fondée par un édit solemnel de la république, que tous payemens pour marchandises en gros & de lettres de change ne se pourront faire qu'in banco ou en billets de banque ; & que tous débiteurs & créanciers seront obligés, les uns de porter leur argent à la banque, les autres d'y recevoir leur payement in banco ou en billets de banque ; desorte que tous les payemens se font par un simple transport des uns aux autres ; celui qui étoit créancier sur le livre du banquo, devenant débiteur dès qu'il cede son droit à un autre, qui est enregistré pour créancier à sa place ; desorte que les parties ne font que changer de nom, sans qu'il soit nécessaire pour cela de faire aucun payement réel & effectif.
Il est vrai qu'il se fait quelquefois des payemens en espece, sur-tout lorsqu'il s'agit du négoce en détail, ou que les étrangers veulent avoir de l'argent comptant pour emporter avec eux, ou que les négocians aiment mieux avoir leur fonds en monnoie courante, pour le négocier par lettres de change. La nécessité de ces payemens effectifs a donné lieu de pourvoir à un fond d'argent comptant, qui bien loin de diminuer le capital, l'augmente plûtôt par la liberté qu'il donne à chacun de retirer son argent quand il lui plaît.
Par le moyen de cette banque la république, sans gêner la liberté du commerce & sans payer aucun intérêt, se trouve maîtresse de cinq millions de ducats à quoi le capital de la banque est limité, ce qui monte à plus de trente millions de livres monnoie de France : elle répond du capital, & c'est pour elle en toute occasion une ressource sûre qui la dispense d'avoir recours à des impositions extraordinaires, même dans les plus pressantes nécessités. Le bon ordre qui regne dans l'administration du banco, prouve également l'utilité & la solidité de cet établissement.
Dans la banco les écritures se tiennent en livres, sous & deniers de gros. La livre vaut dix ducats de banco, ou 240 gros, parce que le ducat est composé de 24 gros. La monnoie de change s'entend toûjours ducat de banco, qui est imaginaire, 100 desquels font 120 ducats monnoie courante. Ainsi la différence des ducats de banco & des ducats courans, est de 20 pour cent, étant défendu aux courtiers de traiter à plus haut prix.
La banco se ferme quatre fois l'année ; savoir, le 20 Mars, le 20 Juin, le 20 Septembre, & le 20 Décembre, & chaque fois pour vingt jours : mais on n'en négocie pas moins sur la place. Il y a encore des clôtures extraordinaires qui sont de huit à dix jours, pour le carnaval, la semaine sainte, & on le ferme encore chaque vendredi de la semaine, quand il n'y a point de fête, & cela pour faire le bilan. Voyez BILAN.
M. Savary, dans son dictionnaire, explique la maniere dont se négocient ou se payent les lettres de change au banco. Voyez le dictionn. du Comm. tome I. pag. 817. (G)
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BANCOK | (Géog.) fort d'Asie, au royaume de Siam, dans les Indes. Long. 119. lat. 13. 25.
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BANDA | (Géog.) sept îles d'Asie, vers le quatrieme degré de latitude méridionale.
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BANDAGE | S. m. terme de Chirurgie, est l'application d'une ou de plusieurs bandes autour d'une partie malade. L'utilité des bandages est de contenir dans une situation naturelle les parties dérangées, de faire compression sur quelque vaisseau, de maintenir les médicamens, compresses, & autres pieces d'appareil. Un seul bandage produit quelquefois les trois effets en même tems.
Les bandages sont différens suivant les parties sur lesquelles on applique les bandes. Voyez BANDE. Par rapport à leurs usages, il y a des bandages contentifs, unissans, incarnatifs, divisifs, compressifs, expulsifs. Voyez ces mots.
La méthode de faire chaque bandage a des regles particulieres, dont le détail seroit trop long. Il ne faut pas en général que les bandages soient trop lâches ni trop serrés. Il faut avoir soin de garnir de linge mollet ou de charpie les cavités sur lesquelles on doit faire passer les bandes, afin que leur application soit plus exacte.
Pour bien appliquer une bande, on doit mettre la partie en situation, tenir le globe de la bande dans sa main, & n'en dérouler à mesure que ce qu'il en faut pour couvrir la partie.
Pour bien lever la bande, il faut mettre la partie en situation, décoller les endroits que le pus on le sang a collés, recevoir d'une main ce que l'autre aura défait, & ne point ébranler la partie par des secousses.
On divise les bandages en simples & en composés. Le simple se divise en égal & en inégal. L'égal est appellé circulaire, parce que les tours de bande ne doivent point se déborder. L'inégal est celui dont les circonvolutions sont inégales, & plus ou moins obliques. On en fait de quatre especes, connues sous le non de doloire, de mousse ou obtus, de renversé, & de rampant. Voyez ces mots.
Le bandage est dit composé, lorsque plusieurs bandes sont cousues les unes aux autres en différens sens, ou qu'elles sont fendues en plusieurs chefs ; telles sont le T pour le fondement, voyez T ; le suspensoir pour les bourses, voyez SUSPENSOIR ; la fronde pour les aisselles, le menton, &c. Voyez FRONDE.
Le bandage à dix-huit chefs est un des plus composés : on s'en sert pour les fractures compliquées des extrémités. Ce sont autant de bandes courtes qui ne font que se croiser sur la partie, & qui permettent les pansemens sans déranger la partie blessée. Voyez la fig. 10. Pl. XXI.
On donne aussi le nom de bandage à des instrumens faits de différentes matieres, comme fer, cuivre, cuir, &c. tels sont le bandage pour contenir les hernies ou descentes, voyez BRAYER ; le bandage pour la chûte ou descente de matrice, voyez CHUTE DE MATRICE ; le bandage pour les hémorrhoïdes, voyez HEMORRHOÏDES ; celui pour la réunion du tendon d'Achille, voyez PANTOUFLE.
BANDAGE DE CORPS, est une serviette ou piece de linge en deux ou trois doubles, capable d'entourer le corps ; voyez fig. 1. Planche XXX. les extrémités se croisent & s'attachent l'une sur l'autre avec des épingles. Ce bandage sert à la poitrine & au bas-ventre ; on le soûtient par le scapulaire. Voyez SCAPULAIRE.
Bandage pour la compression de l'urethre, dont M. Foubert se sert à l'instant qu'il doit faire l'opération de la taille à sa méthode. Pl. IX. fig. 5. (Y)
BANDAGE, (terme de Fonderie) les Fondeurs en grand donnent ce nom à un assemblage de plusieurs bandes de fer plat qu'on applique sur les moules des ouvrages qu'on veut jetter en fonte, pour empêcher qu'ils ne s'écrasent & ne s'éboulent par leur propre pesanteur. Voyez FONDERIE & les Planches des figures de bronze.
BANDAGE DU BATTANT, en Passementerie, est une grosse noix de bois plate, percée de plusieurs trous dans sa rondeur, & de quatre autres trous dans son épaisseur. Les trous de la rondeur servent à introduire, à choix & suivant le besoin, dans l'un d'eux un bâton ou bandoir, qui tient & tire à lui la corde attachée au battant. Lorsque le métier ne travaille plus, on détortille cette corde d'alentour de ce bâton, qui s'en va naturellement par sa propre force s'arrêter contre la barre d'en-haut du chassis. Les quatre trous de l'épaisseur de cette noix, sont pour passer les bouts des deux cordes qui tiennent de part & d'autre au chassis du métier. Ces cordes sont serrées fortement par les différens tours qu'on leur fait faire avec la noix, au moyen du bâton ou bandoir qu'on enfonce dans les divers trous de la rondeur, & qui mene la noix à discrétion. Deux cordes sont attachées à ce bâton, & d'autre part aux deux épées du battant, qui de cette maniere est toûjours amené du côté de la trame pour la frapper. Voyez les Planc. du Passementier & leur explication.
Il y a encore le bandage du métier à frange, lequel est attaché au derriere du métier, comme il se voit dans les Planches du Passementier ; il sert par la mobilité d'une petite poulie qui est à son extrémité, à faire lever & baisser alternativement les lissettes des luisans & chaînettes qui ornent la tête de franges.
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BANDE | troupe, compagnie, (Gramm.) termes synonymes, en ce qu'ils marquent tous multitude de personnes ou d'animaux. Plusieurs personnes jointes pour aller ensemble, font la troupe ; plusieurs personnes séparées de la troupe, font la bande ; plusieurs personnes que des occupations, un intérêt, un emploi, réunissent, forment la compagnie. Il ne faut pas se séparer de sa troupe pour faire bande à part. Il faut avoir l'esprit & prendre l'intérêt de sa compagnie. On dit une troupe de comédiens, une bande de violons, & la compagnie des Indes. On dit aussi une bande d'étourneaux, des loups en troupe, deux tourterelles de compagnie.
Bande est encore synonyme à troupe. On dit d'une troupe de soldats qui combattent sous le même étendart, que c'est une bande.
Romulus divisa les légions par cohortes, & les cohortes en manipules, du nom de l'enseigne sous laquelle elles combattoient, & qui étoit alors une poignée de foin au bout d'une pique, manipulus. Voyez ENSEIGNE & LEGION.
M. Beneton croit que le mot de ban a donné origine à celui de bande. D'abord que le ban étoit publié, dit-il, tous les militaires d'un gouvernement étant assemblés, on les partageoit en différentes bandes ou compagnies ; les unes de cavaliers ou d'hommes d'armes, les autres de soldats ou fantassins, chacune sous le commandement d'un senior, c'est-à-dire du plus élevé ou du plus considéré d'entre tous ceux qui composoient la bande.... Du terme de ban sont venus ceux de bande & de bannieres, pour exprimer des hommes attroupés & des enseignes. Une bande étoit un nombre de soldats unis sous un chef, & l'enseigne qui servoit à la conduite de ces soldats étoit aussi une bande ou une banniere. La bande enseigne donna son nom à chaque troupe assez considérable pour avoir une enseigne. Les bandes ou montres militaires d'autrefois, étoient ce que nous appellons présentement des compagnies.
Ainsi dans nos historiens, les vieilles bandes signifient les anciens régimens, les troupes aguerries. Il y est aussi parlé des bandes noires, soit que leurs enseignes fussent noires, soit qu'elles portassent des écharpes de cette couleur, comme c'étoit autrefois la mode dans les armées pour distinguer les divers partis.
BANDE, (Hist. mod.) ordre militaire en Espagne, institué par Alphonse XI. roi de Castille, l'an 1332. Il prend son nom de banda, bande ou ruban rouge, passé en croix au-dessus de l'épaule droite, & au-dessous au bras gauche du chevalier. Cet ordre n'étoit que pour les seuls cadets des maisons nobles. Les aînés des grands en sont exclus ; & avant que d'y être admis, il falloit nécessairement avoir servi dix ans au moins, soit à l'armée ou à la cour. Ils étoient tenus de prendre les armes pour la défense de la foi catholique contre les infideles. Le roi étoit grand maître de cet ordre, qui ne subsiste plus. (G)
BANDE, s. f. (Gram.) c'est en général un morceau de drap, de toile, de fer, de cuivre, & de toute autre matiere, dont la largeur & l'épaisseur sont peu considérables relativement à la longueur.
Le mot bande présente assez ordinairement à l'esprit l'idée d'attache & de lien ; cependant ce n'est pas-là toûjours la destination de la bande.
Les termes, bande, lisiere, barre, peuvent être considerés comme synonymes ; car ils désignent une idée générale qui leur est commune, beaucoup de longueur sur peu de largeur & d'épaisseur : mais ils sont différenciés par des idées accessoires. La lisiere indique longueur prise ou levée sur les extrémités d'une piece ou d'un tout ; bande, largeur prise dans la piece, avec un peu d'épaisseur ; barre, une piece ou un tout même, qui a beaucoup de longueur sur peu de largeur avec quelqu'épaisseur. Ainsi on dit la lisiere d'un drap ; une bande de toile ; une barre de fer.
BANDES de Jupiter, en Astronomie, sont deux bandes qu'on remarque sur le corps de Jupiter, & qui ressemblent à une ceinture ou baudrier. Voyez JUPITER.
Les bandes ou ceintures de Jupiter sont plus brillantes que le reste de son disque, & terminées par des lignes paralleles. Elles ne sont pas toûjours de la même grandeur, & elles n'occupent pas toûjours la même partie du disque.
Elles ne sont pas non plus toûjours à la même distance : il semble qu'elles augmentent & diminuent alternativement. Tantôt elles sont fort éloignées l'une de l'autre ; tantôt elles paroissent se rapprocher : mais c'est toûjours avec quelque nouveau changement. Elles sont sujettes à s'altérer de même que les taches du Soleil : une tache très-considérable que M. Cassini avoit apperçue sur Jupiter en 1665, ne s'y conserva que près de deux années. Elle parut pendant tout ce tems immobile au même endroit de la surface. On en détermina pour lors la figure, aussi-bien que la situation par rapport aux bandes. Elle disparut enfin en 1667, & ne reparut que vers l'an 1672, où l'on continua de l'appercevoir pendant trois années consécutives. Enfin elle s'est montrée & cachée alternativement ; de maniere qu'en 1708, on comptoit depuis 1665 huit apparitions complete s. C'est par les révolutions de cette tache observées un grand nombre de fois, qu'on a découvert le tems de la révolution de Jupiter autour de son axe.
Il est vraisemblable que la terre que nous habitons est dans un état plus tranquille & bien différent de celui de Jupiter ; puisque l'on observe dans la surface de cette planete des changemens, tels qu'il en arriveroit sur notre globe, si l'Océan, par exemple, changeant de lieu venoit à se répandre indifféremment sur toutes les terres, ensorte qu'il s'y formât de nouvelles mers, de nouvelles îles, & de nouveaux continens. Inst. astron. de M. le Monnier.
M. Huyghens a aussi découvert une espece de bande fort large dans la planete de Mars, qui est beaucoup plus foncée que le reste du disque, dont elle n'occupe que la moitié. (O)
BANDES, en Architecture, se dit des principaux membres des architraves, des chambranles, impostes, & archivoltes, qui pour l'ordinaire ont peu de saillie & de hauteur sur une grande étendue. On les nomme aussi fasce, du latin fascia, dont Vitruve se sert pour exprimer la même chose. Voyez PLATE-BANDE.
On donne encore, dans les édifices bâtis de brique, le nom de bande aux bandeaux de cette matiere qui sont aux pourtours, ou dans les trumeaux des croisées.
On dit aussi bande de colonne, lorsqu'on veut parler du bossage dont on orne quelquefois le nud des ordres rustiques, comme aux colonnes du Luxembourg pointillées ou vermiculées ; à celles du vieux Louvre ; aux colonnes taillées d'ornemens de peu de relief, comme aux galeries du même palais du côté de la riviere. Voyez BOSSAGES. (P)
BANDE, en terme de Marine, signifie côté.
Bande du nord, c'est-à-dire le côté du nord ou latitude septentrionale.
Bande du sud, ou latitude méridionale.
Bande se dit encore du côté ou flanc du vaisseau : avoir son vaisseau à la bande, mettre son vaisseau à la bande, c'est le faire pancher par un côté appuyé d'un ponton, afin qu'il présente l'autre flanc quand on veut le nettoyer, ou lui donner le radoub, le braier & étancher quelque voie d'eau.
Tomber à la bande, c'est tomber sur le côté.
BANDE de sabords, terme de Marine, c'est toute une rangée de sabords sur le côté du vaisseau.
BANDE ou litre de toile goudronnés, qu'on met quelquefois sur les coutures d'un vaisseau.
BANDE, en terme de Chirurgie, est une ligature beaucoup plus longue que large, qui sert à tenir quelque partie du corps enveloppée & serrée, pour la maintenir dans un état sain, ou le lui procurer.
La bande consiste en trois parties, le corps & les deux extrémités, que quelques-uns appellent têtes ou chefs : & d'autres, queues. Il y a des bandes à un seul chef, c'est-à-dire qui ne sont roulées qu'à un bout, fig. 21. Planc. II. & d'autres à double chef, fig. 22. Planc. II.
De plus, il y en a qui sont roulées également, comme celles pour les fractures & les dislocations ; d'autres qui sont divisées en plusieurs chefs, comme celles pour la tête, le menton ; d'autres sont composées de plusieurs bandelettes unies & cousues ensemble, comme celles pour les testicules. Quelques-unes sont fort larges, comme celles pour la poitrine, le ventre, &c. d'autres étroites, comme celles pour les levres, les doigts, &c. Guidon conseille de faire la bande pour l'épaule, de six doigts de large ; celle pour la cuisse, de cinq ; celle pour la jambe, de cinq ; celle pour le bras, de trois ; & celle pour le doigt, d'un.
Il y a deux sortes de bandes, les unes sont remedes par elles-mêmes ; telles sont celles qui servent aux fractures simples, à réunir les plaies, arrêter les hémorrhagies, &c. Les autres ne sont que contentives, c'est-à-dire qu'elles ne servent qu'à contenir les médicamens. La matiere des bandes est ordinairement du linge médiocrement fin, un peu élimé. Les bandes doivent être coupées à droit fil, & n'avoir ni ourlet ni lisiere. Voyez BANDAGE. (Y)
BANDE, (Commerce) petit poids d'environ deux onces, dont on se sert en quelques endroits de la côte de Guinée pour peser la poudre d'or. Diction. du Comm. tom. I. p. 818. (G)
BANDE, en terme de Blason, armoirie formée par deux lignes tirées diagonalement ou transversalement, c'est-à-dire depuis le champ de l'écusson à la droite, jusqu'au bas de la gauche, en représentation d'un baudrier ou d'une écharpe passée sur l'épaule.
La bande est une des dix pieces honorables ordinaires : elle occupe la troisieme partie du champ, lorsqu'il est chargé, & la cinquieme lorsqu'il est uni. Elle est quelquefois dentelée, engrelée, &c. les héraults d'armes parlent d'une bande dextre & d'une bande senestre : une bande se divise en bandelette, qui est la sixieme du champ ; en jarretiere, qui est la moitié d'une bande ; en valeur, qui est le quart de la bande ; & en ruban, qui est la moitié de la valeur. Bande dextre est celle qui se nomme en terme propre & absolu bande, comme elle est définie plus haut, le mot dextre lui est annexé par l'usage, pour obvier à des méprises & la distinguer de la bande senestre, qui est ce que les héraults d'armes françois appellent barre. Voyez BARRE.
BANDE d'une selle, se dit, en Manége, de deux pieces de fer plates, larges de trois doigts, clouées aux arçons pour la tenir en état. Mettre un arçon sur bande, c'est cloüer les deux bouts de chaque bande à chaque côté de l'arçon. Outre ces deux grandes bandes, l'arçon de devant en a une petite appellée bande de garrot, avec un croissant pour tenir en état l'arcade du garrot. L'arçon de derriere a aussi une petite bande pour le fortifier. (V)
BANDE DE DERRIERE, en Bourserie, c'est une bande de cuir attachée aux deux bouts de la cartouche en-dessous, par laquelle on passe une autre bande de cuir qui sert à porter la cartouche. Voyez CARTOUCHE.
BANDES, chez les Imprimeurs, sont deux grandes tringles de bois de quatre piés & demi de long, sur trois pouces de large, recouvertes de lames de fer poli, ou à arrête, placées dans le milieu du berceau de la presse, sur lesquelles roule le train. Voyez BERCEAU DE PRESSE.
BANDES DE TOISES, dans les Salines, & particulierement à Moyenvic, ce sont des cercles de fer par lesquels le haut des poëles est ceint & terminé.
BANDES DE TOUR, terme de Pâtisserie, long morceau de pâte que les Pâtissiers nomment ainsi parce qu'il se met autour d'une tourte ou d'une autre piece, pour en contenir les parties intérieures ou supérieures.
Bande se dit encore, en Pâtisserie, d'un petit cordon de pâte qu'on étend en croix sur une tourte, & dont on forme plusieurs petits quarreaux qui servent d'agrémens à la piece.
BANDES DE BILLARD, terme de Paumier ; ce sont quatre grandes tringles de bois rembourrées de lisieres de drap, & recouvertes de morceaux de drap vert qui y sont attachés avec des clous de cuivre : on fixe ces bandes sur les bords de la table du billard par-dessus le tapis, avec des vis qui entrent dans la table ; ces bandes sont rembourrées d'une maniere bien ferme, afin de renvoyer les billes qui viennent y frapper.
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BANDÉ | adj. en Blason, terme qui convient à l'écusson également partagé en bandes : si les partitions sont en nombre impair, il faut d'abord nommer le champ, ensuite le nombre des bandes. Voyez BANDE & PARTI BANDE. Miolans en Savoie, bandé d'or & de gueules. (V)
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BANDEAU | subst. f. (Architecture) plate-bande unie, qui se pratique autour des croisées ou arcades d'un bâtiment où l'on veut éviter la dépense, & qui differe des chambranles en ce que ceux-ci sont ornés de moulures, & que les bandeaux n'en ont point, à l'exception quelquefois d'un quart de rond, d'un talon, ou d'une feillure, que l'on introduit sur l'arrête du tableau de ces mêmes portes ou croisées. (P)
* BANDEAU, s. m. c'est, en Art militaire, le nom d'une des pieces de la ferrure de l'affut du canon, appliquée sur le flasque à l'endroit de la croce dont elle imite le ceintre. Elle sert à fortifier cette partie de l'affut. Voyez à l'article CANON le détail & les proportions des parties de l'affut. Dans celui d'une piece de huit livres de balles, le bandeau peut avoir 6 piés 9 pouces 6 lignes, de largeur 3 pouces 4 lignes, & d'épaisseur 3 lignes.
BANDEAU, s. m. les ouvriers qui exécutent des couronnes de souverains, de quelque maniere que ce soit, entendent par le bandeau la partie de la couronne qui la termine circulairement par en-bas, & qui ceint le front de celui qui la porte : ainsi, Planche derniere de la Serrurerie en ornemens, la partie de couronne q q qu'on voit chargée de diamans, est le bandeau de la couronne.
BANDEAU, en Menuiserie, est une planche mince & étroite qui est au pourtour des lambris par le haut, & qui tient lieu de corniche lorsqu'il n'y en a point.
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BANDELETTE | S. f. (en Architecture) moulure plate qui a ordinairement autant de saillie que de hauteur, comme celle qui couronne l'architrave toscan & dorique, & qui se nomme filet ou listeau, selon la place qu'elle occupe dans les corniches ou autres membres d'architecture. (P)
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BANDER un arc | terme d'Architecture, ou une plate-bande, c'est en assembler les voussoirs & claveaux sur les ceintres de charpente, & les fermer avec la clé.
On dit aussi bander un cable, en faisant tourner le treuil d'un gruau ou la roue d'une grue pour élever une pierre. (P)
BANDER une voile, c'est, en Marine, coudre à la voile des morceaux de toile de travers ou diagonalement, afin qu'elle dure plus long-tems. (Z)
BANDER, v. act. en terme de Bijoutier, c'est redresser une moulure, par exemple, en la bandant au banc sans la tirer avec violence. Voyez BANC.
BANDER, v. act. en terme de Pâtissier, c'est garnir une tourte de plusieurs petits cordons en croix.
BANDER le semple, dans les Manufactures en soie & boutiques de Passementiers, c'est donner aux cordes du semple une tension telle qu'on puisse prendre librement les cordes que le lacs amene.
BANDER, v. n. terme de Fauconnerie ; on dit de l'oiseau qui se tient sur les chiens faisant la cresserelle, cet oiseau bande au vent.
BANDER, une balle à la paume, c'est enlever une balle en mouvement ou arrêtée, & l'envoyer dans les filets.
BANDER les dames au trictrac, c'est les charger ou en trop mettre sur la même fleche. Voyez FLECHE.
* BANDER, (Géog.) ville du Mogolistan en Asie, dans le royaume & sur le golfe de Bengale, près de Chatignan, & à l'embouchure la plus orientale du Gange.
* BANDER-ABASSI ou GOMRON, (Géog.) ville maritime d'Asie dans la province de Kerman en Perse, sur le golfe d'Ormus. Long. 75. lat. 27.
* BANDER-CONGO, (Géog.) ville maritime d'Asie en Perse, sur le golfe Persique, dans la province de Farsistan.
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BANDIER | terme usité en quelques coûtumes, dans la même signification que banal. Voyez BANAL. (H)
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BANDINS | S. m. pl. (Marine) ce sont les lieux où l'on s'appuie quand on est debout dans la poupe, & qui sortent, outre la longueur du corps, d'environ une toise pour soûtenir avec les grandes consoles une espece de banc fermé par-dehors de petits balustres, qu'ils nomment jalousie de mestre de poupe, & d'une piece figurée à jour qu'ils nomment couronnement. Voyez dans la Planche III. fig. 2. la lettre C. qui marque les bandins. (Z)
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BAND | ou AZMER. Voyez AZMER.
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BANDOIR | S. m. c'est ainsi que les Passementiers appellent le bâton qui passe dans la noix du bandage du battant. Voyez BANDAGE.
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BANDOULIERE | S. f. (Art milit.) est un large baudrier de cuir passé par-dessus l'épaule droite, & pendant en-bas au-dessous du bras gauche, porté par les anciens mousquetaires, tant pour soutenir leurs armes à feu, que pour le port de leurs cartouches ; lesquelles étant mises dans de petits étuis de bois, couverts de cuir, étoient pendues au nombre de 12 à chaque bandouliere.
Ce mot est originairement françois, bandoullier, formé apparemment de bandoulier, une sorte de bandits infestans particulierement les Pyrenées, lesquels étoient autrefois distingués par cette piece de fourniture, & étoient eux-mêmes ainsi dénommés, quasi ban de voliers, une bande de voleurs.
Les cavaliers portent encore la bandouliere de même que les soldats. Ces bandoulieres sont de bufle : celles des premiers ont deux pouces de largeur, & celles des autres seulement un pouce & demi.
Les gardes du corps du Roi portent aussi la bandouliere ; & lorsqu'ils sont à cheval, ils y attachent leur mousqueton ou leur carabine. Cette bandouliere est toute unie & sans devise. Le fond est d'argent, parce que la couleur blanche a toûjours été la couleur Françoise, soit dans les drapeaux, soit dans les écharpes : c'est pourquoi la bandouliere de la compagnie Ecossoise, qui est la plus ancienne : est de blanc ou d'argent plein. Quand les autres compagnies furent instituées, on ajoûta une autre couleur à chacune pour les distinguer. La premiere & plus ancienne de ces compagnies, dont M. le duc de Villeroy est aujourd'hui capitaine, a le verd ajoûté à l'argent ; celle dont M. le duc de Luxembourg est capitaine, à le jaune avec l'argent ; & celle de M. le duc de Charost, a le bleu avec l'argent. Daniel, hist. de la milice Françoise. Ce sont les Ceinturiers qui font & vendent les bandoulieres. (Q)
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BANDURA | (Hist. nat. bot.) plante indienne qui ressemble à la gentiane par sa graine & par son fruit ; mais particulierement remarquable par une gaîne & follicule qui a la figure d'un penis, de plus d'un pié de long, & plus gros que le bras. Elle est attachée à l'arbre, & est à moitié pleine d'une liqueur agréable à boire. Sa racine est astringente ; ses feuilles rafraîchissent & humectent ; le suc qu'on en tire, pris intérieurement, peut soulager dans les fievres ardentes ; & appliqué extérieurement, guérir les érésipeles & les autres éruptions inflammatoires.
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BANÉE | (Géog. sainte) ville de la Palestine dans la tribu de Dan, sur les confins de celles de Juda & de Benjamin.
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BANGOR | (Géog.) ville d'Angleterre dans la principauté de Galles, au comté de Carnarvan, sur le détroit de Menay, vis-à-vis l'île d'Anglesey. Long. 13. 4. lat. 53. 14.
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BANGU | ou chanvre des Indes, (Hist. nat. bot.) Acosta dit que cette plante ressemble beaucoup à notre chanvre ; que sa tige est haute de cinq palmes, quarrée, d'un verd clair, difficile à rompre, & moins creuse que celle du chanvre ; qu'on peut tiller, préparer & filer son écorce, & qu'elle a la feuille du chanvre.
Il ajoûte que les Indiens en mangent la graine & les feuilles pour s'exciter à l'acte vénérien.
Prise en poudre avec l'areca, l'opium & le sucre, elle endort ; avec le camfre, le macis, le girofle & la muscade, elle fait rêver agréablement ; avec l'ambre gris, le musc & le sucre en électuaire, elle réveille.
Elle croît dans l'Indostan & autres contrées des Indes orientales.
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BANIALUC | ou BAGNALUC, ville de la Turquie en Europe, capitale de la Bosnie, sur les frontieres de la Dalmatie, proche la riviere de Setina. Long. 35. 20. lat. 44. 20.
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BANIAN | ou BANJANS, s. m. pl. (Hist. ecclés.) secte d'idolatres répandus dans l'Inde, mais principalement dans le Mogol & dans le royaume de Cambaye. Ils croyent qu'il y a un Dieu créateur de l'univers : mais ils ne laissent pas que d'adorer le diable qui est disent-ils, créé pour gouverner le monde & faire du mal aux hommes. Ils le représentent sous une figure effroyable dans leurs mosquées, où leur bramine ou prêtre se tient assis auprès de l'autel, & se leve de tems en tems pour faire quelques prieres, & marquer au front ceux qui ont adoré le diable. Il leur fait une marque jaune, en les frottant d'une composition faite d'eau & de bois de sandal, avec un peu de poudre de riz broyé.
Leur dogme principal est la métempsycose ; aussi ils ne mangent & même ils ne vendent point de chair des animaux, du poisson, en un mot de tout ce qui a eu vie, dans la crainte de vendre un corps dans lequel pourroit avoir passé l'ame de leur pere. Ils se font même un point de religion & un très-grand mérite de délivrer les animaux des mains de ceux qui veulent les tuer.
La purification du corps est leur cérémonie la plus essentielle : c'est pourquoi ils se lavent tous les jours jusqu'aux reins, tenant à la main un brin de paille que le bramine leur donne pour chasser le malin esprit, & pendant cette cérémonie, le bramine les prêche. Ils regardent tous les hommes d'une religion différente de la leur comme impurs, & craignent tellement d'avoir communication avec eux, que si ceux-ci viennent à boire dans leur tasse ou simplement à la toucher, les Banians la brisent ; & qu'ils tarriroient une fontaine ou tout autre réservoir dans lequel un Mahométan ou un Juif, &c. se seroient baignés : lors même qu'ils se touchent les uns les autres. il faut qu'ils se purifient avant que d'entrer chez eux, de manger, &c. Ils portent pendue à leur cou, une pierre nommée tamberan, percée par le milieu, & suspendue par trois cordons. Cette pierre qui est de la grosseur d'un oeuf, représente, disent-ils, leur grand Dieu ; ce qui les rend fort respectables à la plûpart des Indiens. Les Banians sont divisés en quatre-vingt-trois castes ou sectes principales, sans compter les autres moins considérables qui se multiplient presqu'à l'infini ; parce qu'il n'y a presque point de familles qui n'ait ses superstitions & ses cérémonies particulieres. Les quatre premieres sectes auxquelles toutes les autres se rapportent sont celles de Ceurawath, de Samarath, de Brinow & de Gocghi. Voyez CEURAWATH, BRINOW, &c. Mandeslo, tome II. d'Olearius. (G)
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BANISTERE | S. f. (Hist. nat. bot.) plante américaine dont la fleur est en papillon, & fait place à une semence unie semblable à celle de l'érable. Milet en distingue cinq especes : elles aiment les lieux chauds, les bois, & s'attachent aux arbres & aux autres plantes. Quelques-unes ont quatre à cinq piés de haut ; d'autres s'élevent à huit, dix, douze, quatorze. Si elles ne rencontrent point d'appui, elles se rompent. Les trois premieres especes sont communes dans les bois de la Jamaïque : les deux autres ont été trouvées aux Indes occidentales, proche Carthagene.
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BANLIEUE | terme de Jurisprudence, est une lieue à l'entour de la ville, au-dedans de laquelle se peut faire le ban, c'est-à-dire les proclamations de la ville, & jusqu'où s'étend l'échevinage & justice d'icelle. (H)
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BANNASSES | S. f. pl. c'est ainsi qu'on appelle dans les Salines, des civieres dont se servent les socqueurs pour porter les cendres du fourneau au cendrier. Voyez Pl. IV. fig. 28. une bannasse. Cette machine n'a pas besoin de description.
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BANNE | S. f. (Commerce) grande toile ou couverture qui sert à couvrir quelque chose, à la garantir du soleil, de la pluie, ou autres injures de l'air.
Les marchandes Lingeres appellent aussi banne une toile de cinq ou six aunes de long, & d'environ trois quarts de large, qu'elles attachent sous l'auvent de leur boutique, & qui leur sert comme de montre.
Banne, qu'on nomme aussi manne & mannette, est un grand panier d'osier fendu, plus long que large, & de peu de profondeur, qui sert à emballer certaines sortes de marchandises.
Banne se dit d'une grande toile dont on couvre les bateaux de grains ou de drogues, d'épiceries & d'autres marchandises, pour les préserver du mauvais tems.
Banne est encore la piece de toile que les rouliers & autres voituriers par terre mettent sur les balles, ballots, & caisses qu'ils voiturent, pour les conserver. (G)
BANNE, s. f. voiture dont on se sert pour transporter le charbon. Elle est à deux roues : la partie antérieure de son fond s'ouvre & se ferme ; se ferme tant qu'on veut conserver la voiture pleine ; s'ouvre quand on veut la vuider. Ses côtés sont revêtus de planches, vont en s'évasant, & forment une espece de boîte oblongue, plus ouverte par le haut que par le bas, de quatre à quatre piés & demi de long sur deux piés à deux piés & demi de large par le bas, & trois piés à trois piés & demi de large par le haut, & sur environ deux piés de hauteur perpendiculaire. Voyez Pl. de charbon, la banne A B C D, & le développement de son fond & de son derriere, E F G H I K L M.
BANNE. Voyez BACHE.
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BANNEAU | est quelquefois la même chose, ou un diminutif de la banne ; quelquefois c'est une mesure des liquides, & quelquefois un vaisseau propre à les transporter. On s'en sert de cette derniere espece pour porter la vendange ; & les Vinaigriers qui courent la campagne, ont aussi des banneaux, dont deux sont la charge d'un cheval : ceux-ci sont couverts par-dessus, & ont en-bas une canelle ou robinet pour tirer le vinaigre. Banneau est aussi le nom de tinettes de bois, qu'on met des deux côtés d'un cheval de bât ou autre bête de somme, pour transporter diverses sortes de marchandises : il contient environ un minot de Paris.
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BANNERET | S. m. (Hist. de la chevalerie) outre ce qu'on en dit dans le Dictionnaire, voyez sur le titre & la qualité de banneret, la neuvieme dissertation de du Cange à la suite de Joinville, les dissertations du pere Honoré de sainte-Marie, sur la chevalerie ; la milice françoise du pere Daniel, livre III. le traité de la noblesse, par de la Roque, chap. x. le Laboureur, de la pairie ; du Tillet, recueil des rois de France, Pasquier, le pere Ménetrier.
Le banneret avoit un rang supérieur au bachelier, ou simple chevalier ; car ces deux mots qu'on a voulu distinguer, sont absolument synonymes. En effet, les chevaliers bacheliers dans les anciennes montres des gens d'armes, sont compris sans aucune différence sur le même pié que les chevaliers ; ils reçoivent également le double de la paye des écuyers, & la moitié de celle des bannerets. Je crois qu'ils sont les mêmes que les chevaliers appellés chevalier d'un écu dans l'ordre de chevalerie, peut-être à cause qu'ils n'avoient pour leur défense que leur propre écu, & non comme les bannerets les écus de plusieurs autres chevaliers. Voyez encore dans le livre d'Antomé de la Sale, intitulé la Salade, comment un chevalier étoit fait banneret. Le même auteur rapporte les cérémonies usitées pour l'institution des barons, des vicomtes, des comtes, des marquis, & des ducs.
Si le chevalier étoit assez riche, assez puissant pour fournir à l'état un certain nombre de gens d'armes, & pour les entretenir à ses dépens, on lui accordoit la permission d'ajouter au simple titre de chevalier, ou chevalier bachelier, le titre plus noble & plus relevé de chevalier banneret. La distinction de ces bannerets consistoit à porter une banniere quarrée au-haut de leur lance ; au-lieu que celle des simples chevaliers étoit prolongée en deux cornettes ou pointes, telles que les banderolles qu'on voit dans les cérémonies des églises. D'autres honneurs étoient encore offerts à l'ambition des bannerets ; ils pouvoient prétendre aux qualités de comtes, de barons, de marquis, de ducs ; & ces titres leur assuroient à eux & même à leurs femmes, un rang fixe auquel on reconnoissoit du premier coup d'oeil, la grandeur & l'importance des services qu'ils avoient rendus à l'état : divers ornemens achevoient de caractériser leur mérite & leurs exploits. Mémoires sur la chevalerie, par M. de Sainte-Palaye.
(Le Chevalier DE JAUCOURT.)
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BANNETON | S. m. chez les Boulangers, est une espece de panier d'osier sans anses, rond, & revêtu en-dedans d'une toile. On y met lever le pain rond. Voyez Pl. du Boulanger, fig. 3.
BANNETON, est une espece de coffre fermant à clé, que les pêcheurs construisent sur les rivieres pour y pouvoir garder leur poisson. Il est percé dans l'eau & sert de réservoir. On dit aussi bascule ou boutique.
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BANNETTE | espece de panier, fait de menus brins de bois de châtaigner, fendus en deux & entrelacés les uns dans les autres, qui sert à mettre des marchandises pour les voiturer & transporter. Souvent on se sert de deux bannettes pour les marchandises qui sont un peu de conséquence : on en met une dessous, & l'autre dessus qu'on nomme la coeffe ; quelquefois on ne se sert que d'une bannette avec une toile par-dessus.
BANNETTE, est encore un terme usité parmi les Boucaniers françois, pour signifier un certain nombre de peaux de taureaux, bouvarts, vaches, &c. La bannette contient un ou deux taureaux, ou un taureau & deux vaches, ou quatre vaches, ou trois bouvarts, autrement trois jeunes taureaux. On appelle ces cuirs bannettes, à cause de la maniere dont ils sont pliés.
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BANNIE | subst. f. signifie en quelques Coûtumes, publication. On dit en Normandie banon dans le même sens.
Banni se dit aussi dans quelques Coûtumes adjectivement, & signifie publié ou crié en justice. C'est en ce sens qu'on dit, une terre bannie, une espave bannie. (H)
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BANNIERES | S. f. (Jurisprud.) registres distingués de ceux des audiences, pour l'enregistrement de toutes les ordonnances & lettres patentes adressées au châtelet, & pour tous les autres actes dont la mémoire doit être conservée à la postérité. Ils ont été commencés en 1461 par Robert d'Etouteville, prevôt de Paris : on les a continués ; on en étoit en 1722 au treizieme volume. C'est l'une des attributions du greffier des insinuations, qui a été créé depuis ce tems, d'en être le dépositaire & d'en délivrer des expéditions.
BANNIERE, sub. f. terme de Marine. Voyez PAVILLON. Le mot de banniere n'est en usage que dans quelques cantons de la Méditerranée, où l'on dit la banniere de France, la banniere de Venise, pour dire le pavillon de France, le pavillon de Venise. Mettre les perroquets en banniere. Voyez PERROQUET. (Z)
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BANNIMUS | (Hist. mod.) mot de la basse latinité, qui exprime dans l'université d'Oxford l'expulsion d'un membre qui a mérité cette peine. On affichoit dans un carrefour ou autre endroit public, la sentence d'expulsion, à ce que nul n'en prétendît cause d'ignorance. (G)
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BANNISSEMENT | S. m. (Jurisprud.) est un exil ordonné par un jugement en matiere criminelle, contre un accusé convaincu.
Le bannissement est ou perpétuel ou à tems.
Lorsqu'il est perpétuel, il équivaut à la déportation qui étoit en usage chez les Romains ; il emporte la mort civile : & conséquemment confiscation de biens.
Mais quand il n'est qu'à tems, il répond à-peu-près à la relégation des Romains ; il ne fait point perdre au banni les droits de citoyen, & n'emporte point la confiscation de ses biens.
La peine du banni, qui ne garde point son ban, est la condamnation aux galeres. (H)
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BANNOCHBUR | ou BANNOCHRON, (Géog.) petite ville d'Ecosse, à deux milles de Sterling, sur une riviere de même nom.
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BANQUE | S. f. (Commerce) nous réunirons sous ce titre plusieurs expressions & termes de commerce usités dans le trafic de la banque, comme avoir un compte en banque, avoir crédit en banque, ouvrir un compte en banque, donner crédit en banque, écrire une partie en banque, créditer quelqu'un en banque, écritures de banque.
Avoir un compte en banque, c'est y avoir des fonds & s'y faire créditer ou débiter, selon qu'on veut faire des payemens à ses créanciers en argent, ou en recevoir de ses débiteurs en argent de banque, c'est-à-dire en billets ou écritures de banque.
Avoir crédit en banque, c'est être écrit sur les livres de la banque, comme son créancier ; & y avoir débit, c'est en être débiteur.
Ouvrir un compte en banque, c'est la premiere opération que font les teneurs de livres d'une banque, lorsque les particuliers y portent des fonds pour la premiere fois.
Donner crédit en banque ; c'est charger les livres de la banque des sommes qu'on y apporte, ensorte qu'on fait débiter sa caisse, c'est-à-dire, qu'on la rend débitrice à ceux qui y déposent leurs fonds.
Ecrire une partie en banque ; c'est faire enregistrer dans les livres de la banque, le transport mutuel qui se fait par les créanciers & les débiteurs des sommes ou de portions des sommes qu'ils ont en banque, ce qu'on appelle virement de parties. Voyez VIREMENT.
Créditer quelqu'un en banque ; c'est le rendre créancier de la banque ; le débiter, c'est l'en rendre débiteur.
Ecritures en banque, ce sont les diverses sommes pour lesquelles les particuliers, marchands, négocians & autres, se sont fait écrire en banque.
BANQUE d'emprunt, en Hollandois bankvanleeninge, c'est une espece de mont de piété établi à Amsterdam, où l'on prête de l'argent aux particuliers qui en ont besoin, moyennant qu'ils y déposent des gages pour la sûreté des sommes prêtées, & qu'ils payent l'intérêt reglé à tant par mois par les bourguemestres ou échevins ; c'est ce qu'on appelle plus communément la maison des lombards, ou le lombard. Voyez LOMBARD.
BANQUE, (Commerce) se dit encore de certaines sociétés, villes ou communautés, qui se chargent de l'argent des particuliers pour le leur faire valoir à gros intérêts, ou pour le mettre en sûreté.
Il y a plusieurs especes de banques établies dans les plus grandes villes commerçantes de l'Europe, comme à Venise, Amsterdam, Rotterdam, Hambourg, Londres, Paris, &c.
On peut voir ce que nous avons dit sous le mot BANCO, de celle de Venise, sur le modele de laquelle les autres ont été formées, & dans le Dictionnaire du Commerce, de Savary, les détails dans lesquels il entre sur les banques d'Amsterdam & de Hambourg, aussi-bien que sur celle qui fut érigée en France en 1716, par le sieur Law & compagnie, sous le nom de banque générale, convertie en banque royale en 1718, & dont les billets, qui avoient monté à la somme de deux milliards six cent quatre-vingt-seize millions quatre cent mille livres, furent supprimés par arrêt du conseil du 10 Octobre 1720. Nous ne parlerons ici que de la banque royale d'Angleterre & de la banque royale de Paris, sur le pié qu'elles subsistent aujourd'hui, & ce que nous en dirons est emprunté du même auteur.
Banque royale d'Angleterre ; elle a les mêmes officiers que l'échiquier. Voyez ECHIQUIER. Le parlement en est garant ; c'est lui qui assigne les fonds nécessaires pour les emprunts qu'elle fait sur l'état.
Ceux qui veulent mettre leur argent à la banque en prennent des billets, dont les intérêts leur sont payés, jusqu'au jour du remboursement, à raison de six pour cent par an.
Les officiers de la banque royale font publier de tems en tems les payemens qu'ils doivent faire, & pour lors ceux qui ont besoin de leur argent le viennent recevoir. Il est cependant permis aux particuliers d'y laisser leurs fonds, s'ils le jugent à propos, & les intérêts leur en sont continués sur le même pié de six pour cent par an.
Comme il n'y a pas toûjours des fonds à la banque pour faire des payemens, ceux qui, dans le tems que la caisse de la banque est fermée, ont besoin de leur argent, négocient leurs billets à plus ou moins de perte, suivant le crédit que ces papiers ont dans le public, ce qui arrive ordinairement suivant les circonstances & le bon ou mauvais succès des affaires de l'état.
Banque royale de Paris, est celle qui fut établie en cette ville par arrêt du conseil du 4 Décembre 1718, dont le fonds ne pouvoit passer six cent millions. On appelloit en France bureau de la banque royale, les lieux où se faisoient les diverses opérations de cette banque, les payemens & les viremens de parties, soit en débit, soit en crédit, pour ceux qui y avoient des comptes ouverts. Les principaux de ces bureaux, après ceux de Paris, furent placés à Lyon, à la Rochelle, Tours, Orléans, & Amiens. Il y avoit deux caisses dans chaque bureau ; l'une en argent pour acquiter à vûe en billets, & l'autre en billets pour fournir de l'argent à ceux qui en demandoient.
" Dans les états qui font le commerce d'économie, dit l'auteur de l'esprit des Lois, on a heureusement établi des banques qui, par leur crédit, ont formé de nouveaux signes des valeurs : mais on auroit tort de les transporter dans les états qui font le commerce du luxe. Les mettre dans des pays gouvernés par un seul, c'est supposer l'argent d'un côté & de l'autre la puissance, c'est-à-dire, la faculté de tout avoir sans aucun pouvoir, & de l'autre le pouvoir sans aucune faculté ". Esprit des Lois, tome II. page 7.
Les compagnies & les banques achevent d'avilir l'or & l'argent dans leur qualité de signe, en multipliant par de nouvelles fictions, les représentations des denrées.
BANQUE, trafic, commerce d'argent qu'on fait remettre de place en place, d'une ville à une autre, par des correspondans & commissionnaires, par le moyen des lettres de change.
Le mot banque vient de l'Italien banca, formé de l'Espagnol banco, un banc sur lequel étoient assis les changeurs, ou banquiers, dans les marchés ou places publiques, ou d'une table sur laquelle ils comptoient leur argent, & qu'on nomme aussi en Espagnol banco. Guichard fait venir le nom de banque du Latin abacus, table, buffet. Voyez ABAQUE.
Il n'est pas nécessaire en France, d'être marchand pour faire la banque ; elle est permise à toutes sortes de personnes, même aux étrangers. En Italie, le commerce de la banque ne déroge point à la noblesse, particulierement dans les républiques.
Un négociant qui fait la banque, & qui veut avoir de l'ordre, doit tenir deux livres principaux ; l'un, appellé livre des traites, pour écrire toutes les lettres de change qu'il tire sur ses correspondans ; & l'autre, nommé livre des acceptations, sur lequel il doit écrire par ordre de date, les lettres de change qu'il est obligé d'acquiter, en marquant le nom du tireur, la somme, le tems de l'échéance, & les noms de ceux qui les lui ont présentées.
BANQUE, se dit aussi du lieu où les banquiers s'assemblent pour exercer leur trafic ou commerce ; on nomme ce lieu différemment, selon les pays : à Paris, c'est la place du change ; à Lyon, le change ; à Londres & à Rouen, la bourse ; à Marseille, la loge, &c. (G)
BANQUES à sel ; ce sont des greniers sur les frontieres de la Savoie, voisines de la France, où l'on débite du sel aux faux-sauniers François, à raison de quatre sous la livre, argent de France, poids de Geneve, qui est de dix-huit onces à la livre, pendant que les Savoyards le payent quatre sous de Piémont. La livre de piémont n'est que de douze onces, ce qui fait neuf deniers de plus sur l'argent, & un tiers sur le poids, qui vaut un sou sept deniers, c'est-à-dire, deux sous quatre deniers sur le tout ; ainsi la différence est de plus de moitié. C'est une des suites des traités par lesquels la France s'est obligée de fournir à la Savoie jusqu'à la concurrence de 45 à 50 mille minots conduits & rendus dans les différens endroits indiqués par les traités.
La France fournit encore 5000 quintaux de sel de Peccais à la ville de Geneve, 6000 au pays de Vallais, & 1522 à la ville de Sion : mais aucun de ces pays ne fait, du bienfait du roi, un usage contraire à sa destination, & les quantités se consomment dans le pays, soit par besoin, soit par bonne-foi.
BANQUE, se dit chez les Imprimeurs, du payement qu'on fait du travail aux ouvriers de l'Imprimerie ; le jour de la banque est le samedi, on entend aussi par banque, la somme entiere que chaque ouvrier reçoit.
BANQUE, chez les Passementiers, est l'instrument propre à porter les rochets, ou bobines, pour ourdir : il y a des banques de plusieurs sortes ; les unes, outre cet usage, ont encore celui de pouvoir servir de plioir ; d'autres ressemblent assez à ces porte-vaisselles appellés dressoirs, & ont, ou peuvent avoir, double rang de broches : les premiers auroient aussi cet avantage si on perçoit des trous paralleles dans la largeur des trois petites planchettes qui sont vûes droites dans nos planches de Passementerie, où sont représentées les deux sortes de banques dont nous venons de parler. En pratiquant ces trous paralleles, on auroit la facilité de mettre tant de rochets en banque que l'on voudroit. On a, dans les mêmes planches, une troisieme sorte de banque ; c'est une espece de poteau quarré dont la largeur n'est pas absolument déterminée, puisque si l'on vouloit y mettre deux rangs de broches, il faudroit qu'il fût plus épais que lorsqu'il n'y en auroit qu'un rang ; on fait entrer dans ce poteau le bout pointu de ces broches, de sorte qu'elles y demeurent invariables : on les place parallelement les unes aux autres ; on en peut mettre tant qu'il en pourra tenir, en laissant toutefois une distance telle que les bords des deux rochets ne se puissent toucher ; sans cette précaution ils s'empêcheroient mutuellement de se mouvoir, ou mettroient au moins les soies en danger de casser. Dans le cas où ces bords de crochets, ou bobines, se trouveroient trop hauts, & que ce frottement fût inévitable, il faudroit pour lors espacer davantage les broches les unes des autres, en laissant une place vuide entre deux, on trouveroit ainsi l'espace dont on avoit besoin : mais à quoi bon cette grande quantité de broches, dira-t-on ? lorsqu'on aura lû à l'article OURDIR, que l'on n'ourdissoit qu'avec seize rochets, il ne faut donc, continuera-t-on, que seize broches ; ou tout au plus trente-deux, ce qui n'exposera plus au frottement qu'on craignoit. Quoique la regle générale soit d'ourdir à seize rochets, ou tout au plus à trente-deux, comme le pratiquent plusieurs ouvriers qui par-là avancent plus vîte de moitié, façon de travailler qui doit être peu suivie, parce qu'il est bien plus difficile de veiller sur trente-deux rochets que sur seize, & par conséquent plus facile d'échapper un brin, ou même plusieurs qui viennent à casser : je n'en serai pas moins pour la quantité de broches à cette banque ; car au même article OURDIR, à l'endroit où il est question des rubans rayés, on voit qu'il faut, suivant le besoin, changer de couleur. En supposant qu'on eût quatre couleurs à employer, & qu'il y eût soixante-quatre broches à la banque, on auroit quatre couleurs sous la main toutes les fois qu'il faudroit qu'on en changeât d'abord deux sur la même face, ayant seize broches de chaque côté, puis en retournant la banque, encore deux autres. On voit que ces broches ne sont pas posées horisontalement, mais qu'au contraire le bout extérieur est plus élevé que l'autre, en voici la raison : si les broches étoient paralleles à l'horison, les rochets, par la vîtesse avec laquelle ils se meuvent, (car il faut qu'ils fassent bien des tours pendant que le moulin de l'ourdissoir n'en fait qu'un) seroient en danger de s'échapper des broches, inconvénient que l'on évite par l'inclinaison des broches : étant ainsi placées, il est bon d'ajuster à chacune un moule de bouton, qui, par sa convexité, empêchera que le rochet ne frotte en tant de parties contre la face plate du poteau ; la planche d'en-bas qui lui sert de base, est revêtue des quatre côtés de triangles, ce qui la rend propre à contenir les rochets, vuides ou pleins, qu'on y veut mettre.
BANQUE, partie du bois de métier d'étoffe de soie. C'est un plateau de noyer de deux pouces environ d'épaisseur, d'un pié de largeur, & deux piés de long ; dans lequel est enclavé le pié de devant le métier ; ce plateau sert à reposer les navettes pendant que l'ouvrier cesse de travailler, & il retient le tenant de l'ensuple de devant. Voyez à l'article VELOURS cizelé, l'explication détaillée des pieces du métier.
BANQUE, en termes de Tabletier-Cornetier, est une espece de banc triangulaire & à trois piés, sur lequel l'ouvrier en peignes travaille à califourchons, & qui a les mêmes parties & le même usage que l'âne. Voyez ANE, machine, description & figure.
BANQUE, (Commerce) c'est ainsi qu'on nomme à certains jeux, comme à celui du commerce, les cartes qui restent après qu'on en a donné à tous les joüeurs le nombre qu'exige le jeu. La banque s'appelle à d'autres jeux, talon ou fond. Voyez TALON & FOND.
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BANQUÉ | adj. en Marine : quelques-uns appellent ainsi un navire qui va pêcher la morue sur le grand banc.
On dit aussi qu'on est banqué, pour dire qu'on est sur le grand banc ; & débanqué, lorsqu'on a quitté le banc.
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BANQUEROUTE | S. f. (Commerce) est l'abandonnement qu'un débiteur fait de tous ses biens à ses créanciers pour cause d'insolvabilité vraie ou feinte ; car il y a deux sortes de banqueroutes, la banqueroute forcée, & la frauduleuse.
La banqueroute forcée, qu'on appelle plus proprement faillite, est celle que fait nécessairement un marchand pour raison des pertes qui l'ont rendu insolvable. Voyez FAILLITE.
La banqueroute volontaire ou frauduleuse, qu'on appelle aussi simplement banqueroute, est celle qui se fait avec fraude & malice ; l'insolvabilité du débiteur n'étant qu'apparente, & les effets qu'il abandonne à ses créanciers n'étant qu'une partie de son bien, dont il s'est reservé le reste.
La banqueroute frauduleuse est mise au rang des crimes : mais ce crime demeure souvent impuni, parce que les créanciers aiment mieux traiter avec le banqueroutier, & lui faire des remises, que de perdre toute leur dette ; & dès qu'ils sont d'accord, la justice ordinairement ne s'en mêle plus. Voyez la peine que les lois décernent pour la banqueroute frauduleuse au mot BANQUEROUTIER. (H)
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BANQUEROUTIER | S. m. (Commerce) est la qualification d'un marchand, banquier, ou autre particulier qui a fait banqueroute.
Toutes les ordonnances prononcent la peine de mort contre les banqueroutiers : mais dans l'usage elles ne sont point exécutées ; on se contente pour l'ordinaire de les attacher au pilori, & de les envoyer ensuite aux galeres.
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BANQUET | S. m. (en termes de Coûtumes) s'est dit autrefois du repas qu'un vassal étoit obligé de fournir à son seigneur une ou deux fois l'année. (H)
BANQUET, on appelle ainsi (en Manége & chez les Eperonniers) la petite partie de la branche de la bride qui est au-dessous de l'oeil : qui est arrondie comme une petite verge, assemble les extrémités de l'embouchure avec la branche, & est cachée sous le chaperon ou le fonceau. Voyez CHAPERON, FONCEAU, &c. Ligne du banquet, est une ligne imaginaire que les Eperonniers en forgeant un mors tirent le long du banquet, & qu'ils prolongent de part & d'autre de haut en bas, pour déterminer la force ou la foiblesse qu'ils veulent donner à la branche pour la rendre hardie ou flasque. La branche sera hardie, si le trou du touret est au-delà de la ligne du banquet, à l'égard de l'encolure ; & elle sera flasque ou foible, si le trou du touret est au-deçà de cette ligne à l'égard de l'encolure. Voyez B. fig. 22. Pl. de l'Eperonnier. Voyez BRANCHE, TOURET, &c. (V)
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BANQUETTE | S. f. (en Architecture) est un petit chemin relevé pour les gens de pié le long d'un quai ou d'un pont, & même d'une rue, à côté du chemin des chariots & voitures, comme les banquettes du cours à Rome, & celles du pont-neuf, du pont-royal, & d'autres à Paris. Les Romains appelloient decursoria toutes sortes de banquettes.
On appelle aussi banquettes, des appuis de pierre de 14 pouces de hauteur, pratiqués dans l'épaisseur des croisées & dans l'intérieur des appartemens ; on s'y assied, & ils reçoivent en-dehors des balcons de fer, dont la hauteur réunie avec la banquette de pierre, doit être celle du coude pour s'y appuyer commodément. Voyez APPUI.
Banquette est encore le balcon qui pose sur cet appui ; le nom de balcon ne se donnant qu'à ceux qui occupent toute la hauteur depuis le dessus du parquet jusqu'au sommet desdits balcons. (P)
BANQUETTE, (en terme de Fortifications) est une espece de petit degré de terre que l'on construit sur le rempart des ouvrages & sur le chemin couvert au pié du côté intérieur du parapet : il sert à élever le soldat pour qu'il puisse tirer par-dessus le parapet.
La banquette a ordinairement 3 ou 4 piés de largeur, avec un talud de même étendue ; elle est élevée de 2 piés sur le terre-plein du rempart. Lorsqu'on est obligé d'élever le parapet de plus de 6 piés & demi ou 7 piés pour se garantir de l'enfilade, on construit alors deux banquettes, qui font deux especes de degrés. Le parapet a toûjours 4 piés & demi de hauteur au-dessus du terre-plein de la banquette supérieure. (Q)
BANQUETTE, (en Hydraulique) est un sentier construit des deux côtés de la cuvette ou rigole d'un aqueduc pour y pouvoir marcher & examiner si l'eau s'arrête ou se perd en quelque endroit : on donne ordinairement 18 pouces de large à ces sortes de banquettes. (K)
BANQUETTE, (en Jardinage) se dit des palissades basses à hauteur d'appui, qui ne doivent point passer ordinairement 3 ou 4 piés de haut ; elles servent dans les côtés des allées doubles, où étant ainsi ravalées, elles n'interrompent point le coup-d'oeil entre la tige des arbres. On y laisse quelquefois d'espace en espace des boules échappées de la banquette même. (K)
BANQUETTE, partie du métier d'étoffes de soie ; la banquette est un morceau de bois de 6 pouces de large & d'un pouce d'épaisseur ; il sert à l'ouvrier pour s'asseoir quand il veut travailler ; il fait entrer chaque bout de sa banquette dans l'oreillon cloué à cet effet au pié de devant le métier. Il seroit mieux que l'oreillon ou porte-banquette ne fût point cloué, mais qu'il fût à coulisse, pour que l'ouvrier le haussât ou baissât suivant sa taille ; il seroit encore à-propos qu'il pût avancer ou reculer la banquette.
BANQUETTE, (en Menuiserie) est une boisure qu'on pratique aux croisées. La tablette de dessus se nomme dessus de banquette ; & la partie de devant, devant de banquette.
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BANQUIER | S. m. (Commerce) est celui qui fait la banque, c'est-à-dire négociant, commerçant, ou trafiquant en argent, qui fait des traites & remises d'argent, qui donne des lettres de change pour faire tenir de place en place ; c'est proprement un marchand d'argent. Les Anglois les appellent remitters, ceux qui font des remises. On les nommoit autrefois changeurs. Voyez CHANGEUR & REMISE.
Il y avoit autrefois des especes de banquiers chez les Romains, dont les fonctions étoient beaucoup plus étendues que celles de nos banquiers ; car ils étoient officiers publics, & tout à la fois agens de change, courtiers, commissionnaires, notaires, se mêlant d'achats & de ventes, & dressant tous les écrits & actes nécessaires pour tous ces divers objets.
La différence du profit qu'il y a à tirer par une place ou par une autre, fait l'art & l'habileté particuliere des nôtres. Voyez l'article CHANGE. " Les banquiers sont faits pour changer de l'argent, & non pour en prêter. Si le prince ne s'en sert que pour changer son argent, comme il ne fait que de grosses affaires, le moindre profit qu'il leur donne pour leurs remises devient un objet considérable ; & si on lui demande de gros profits, il peut être sûr que c'est un défaut de l'administration : quand au contraire ils sont employés à faire des avances, leur art consiste à se procurer de gros profits de leur argent sans qu'on puisse les accuser d'usure ". Esprit des lois, tom. II. p. 71.
Les BANQUIERS ou Expéditionnaires en Cour de Rome, (Hist. mod. & Droit canon.) sont des officiers qui font venir de Rome ou de la légation d'Avignon toutes les bulles, dispenses, provisions, & autres expéditions que le pape s'est réservé d'accorder seul. Voyez EXPEDITIONNAIRE. (H)
BANQUIER, (terme de Jeu) c'est celui qui taille au pharaon, à la bassette, &c. & qui dans ces jeux a toûjours de l'avantage : les autres joüeurs s'appellent pontes. Voyez PHARAON, BASSETTE, PONTE. (O)
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BANSE | S. m. (en Chauderonnerie) longue manne quarrée faite de branches d'osier ou de châtaignier à l'usage des Chauderonniers : c'est dans des banses qu'ils enferment & transportent leurs ouvrages.
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BANTAM | (Géog.) ville d'Asie aux Indes, dans l'île de Java, capitale du royaume de même nom, divisée en deux parties par une riviere. Long. 123. 3. lat. mérid. 6. 20.
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BANTON | (Géog.) île d'Asie dans l'Océan oriental : c'est une des Philippines, située vers la partie méridionale de l'île Manille.
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BANTR | ou BANTREI, ville maritime de la province de Mommonie en Irlande, au sud-oüest : elle donne son nom à la baie.
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BANVIN | S. m. terme de Coûtume ; c'est une sorte de droit de banalité qui donne pouvoir au seigneur de vendre le vin de son cru avant qu'aucun de ses vassaux commence à débiter le sien, pourvû qu'il le vende en sa maison seigneuriale, & non ailleurs. (H)
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BANZA | Voyez S. SALVADOR.
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BAOBA | ou HAHOBAB, (Hist. nat. bot.) fruit d'Afrique de la grosseur du limon, semblable à la courge, & renfermant des semences dures, noires & arquées par les bouts ; il a la pulpe de la courge, rouge, humide, & d'une acidité agréable, quand elle est récente. Il est bon à manger, & dans l'Ethiopie on en corrige l'acidité avec le sucre ; il rafraîchit & desaltere : les Ethiopiens le prennent dans toutes les maladies de chaleur, les fievres putrides, & les affections pestilentielles ; alors ou l'on mange sa pulpe avec du sucre, ou l'on boit le suc qu'on en tire par expression, tempéré par le sucre, ou l'on en fait un sirop dont on prend une dose convenable. Au grand Caire, où l'on ne peut l'avoir dans sa fraîcheur, on réduit sa pulpe en une poudre qui ressemble à de la terre rougeâtre, astringente, & d'un goût qui n'est pas éloigné de celui de la terre de Lemnos. On use de cette poudre dans les fievres pestilentielles, le crachement de sang, les lienteries, les dyssenteries, le flux hépatique, & l'excès des regles : on ordonne alors une dragme de cette terre dans l'eau de plantain ; d'autres la font prendre dans des décoctions ou des infusions appropriées. Prosper Alpin, qui fait mention du fruit, dit avoir vû l'arbre, & l'avoir trouvé assez ressemblant à l'oranger par la grosseur, les feuilles, & le reste de son aspect.
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BAPAUME | (Géog.) ville de France dans l'Artois. Long. 20. 30. 52. lat. 50. 6. 12.
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BAPTêME | S. m. (Théol.) sacrement par lequel on est fait enfant de Dieu & de l'Eglise, & qui a la vertu d'effacer le péché originel dans les enfans, & les péchés actuels dans les adultes.
Le mot baptême en général signifie lotion, immersion, du mot grec, ou , je lave, je plonge ; & c'est en ce sens que les Juifs appelloient baptême certaines purifications légales qu'ils pratiquoient sur leurs prosélytes après la circoncision. On donne le même nom à celle que pratiquoit S. Jean dans le desert à l'égard des Juifs, comme une disposition de pénitence pour les préparer, soit à la venue de Jesus-Christ, soit à la réception du baptême que le Messie devoit instituer, & dont le baptême de S. Jean étoit absolument différent par sa nature, sa forme, son efficace, & sa nécessité, comme le prouvent les Théologiens, contre la prétention des Luthériens & des Calvinistes.
Le baptême de l'Eglise chrétienne est appellé dans les peres de plusieurs noms relatifs à ses effets spirituels, comme adoption, renaissance, régénération, remission des péchés, renouvellement des esprits, vie éternelle, indulgence, absolution ; & par les Grecs, tantôt , régénération de l'ame, & tantôt , onction ; soit à cause de celles qu'on y pratique, soit parce qu'il nous consacre à J. C. quelquefois & , illumination, , signe ou marque ; & par les Latins, salut, mystere, sacrement. Cyprian. Augustin. Tertull. Cyrill. Justin. Chrysost. Clem. Alex. Euseb. Ambros. &c.
La définition que nous avons donnée au commencement de cet article ne convient donc au baptême, qu'entant qu'il est le premier des sacremens de la loi nouvelle : sa matiere éloignée est l'eau naturelle, comme de riviere, de fontaine, de pluie, &c. par conséquent toute autre liqueur, soit artificielle, soit même naturelle, telle que le vin, ne peut être employée comme matiere dans ce sacrement ; & les exemples qu'on cite au contraire, ou sont apocryphes, ou partoient d'une ignorance grossiere, justement condamnée par l'Eglise. Voyez MATIERE.
Sa forme dans l'église greque consiste en ces paroles : baptisatur servus vel serva Dei N. in nomine Patris, & Filii, & Spiritus sancti ; & dans l'église latine, le prêtre en versant de l'eau naturelle sur la tête de la personne qu'il baptise, la nomme d'abord par le nom que lui ont donné ses parrein & marreine, & prononce ces mots : ego te baptiso, in nomine Patris, & Filii, & Spiritus sancti, amen. Cette forme étant pleinement exprimée dans les Ecritures, Matth. ch. xxviij. vers. 19. & attestée par les écrits des plus anciens auteurs ecclésiastiques, il s'ensuit que tout baptême conféré sans une appellation ou invocation expresse des trois personnes de la sainte Trinité, est invalide. La doctrine des conciles y est formelle, surtout celle du premier concile d'Arles tenu en 314 ; & l'Eglise a mis une grande distinction entre les hérétiques, & ceux qui dans leur baptême conservoient ou corrompoient cette forme ; se contentant à l'égard des premiers, lorsqu'ils revenoient dans son sein, de les recevoir par la cérémonie de l'imposition des mains, & réitérant aux autres le baptême, ou plûtôt leur donnant le sacrement qu'ils n'avoient jamais reçu. Voyez REBAPTISANS.
Le baptême a été rejetté totalement par plusieurs anciens hérétiques des premiers siecles, tels que les Ascodrutes, les Marcosiens, les Valentiniens, les Quintilliens, qui pensoient tous que la grace qui est un don spirituel, ne pouvoit être communiquée ni exprimée par des signes sensibles. Les Archontiques le rejettoient comme une mauvaise invention du Dieu Sebahoth, c'est-à-dire du Dieu des Juifs, qu'ils regardoient comme un mauvais principe. Les Seleuciens & les Hermiens ne vouloient pas qu'on le donnât avec de l'eau : mais ils employoient le feu, sous prétexte que saint Jean-Baptiste avoit assûré que le Christ baptiseroit ses disciples dans le feu. Les Manichéens & les Pauliciens le rejettoient également, aussi-bien que les Massaliens. Le nombre des hérétiques qui ont altéré ou corrompu la forme du baptême, n'est pas moindre : Menandre baptisoit en son propre nom : les Eluséens y invoquoient les démons ; les Montanistes joignoient le nom de Montan leur chef, & de Priscille leur prophétesse, aux noms sacrés du Pere & du Fils. Les Sabelliens, les Marcosiens, les disciples de Paul de Samosate, les Eunomiens, & quelques autres hérétiques ennemis de la Trinité, ne baptisoient point au nom des trois Personnes divines ; c'est pourquoi l'Eglise rejettoit leur baptême : mais, comme nous l'avons dit, elle admettoit celui des autres hérétiques, pourvû qu'ils n'altérassent point la forme prescrite, quelles que fussent d'ailleurs leurs erreurs sur le fond des mysteres.
La discipline de l'Eglise sur la maniere d'administrer ce sacrement, n'a pas toûjours été la même : autrefois on le donnoit par une triple immersion : & cet usage a duré jusqu'au xij. siecle. Il est vrai que dans le vj. quelques catholiques d'Espagne s'en tenoient à une seule immersion, de peur, disoient-ils, que les Ariens n'imaginassent que par la triple immersion ils divisoient la Trinité à l'exemple de ces hérétiques : mais cette raison frivole ne changea généralement rien à l'ancien usage. Celui de baptiser par infusion, ou en versant l'eau sur la tête, commença, selon quelques-uns, dans les pays septentrionaux, & s'introduisit en Angleterre vers le jx. siecle. Le concile de Calchut ou de Celchyth, tenu en 816, ordonna que le prêtre ne se contenteroit pas de verser de l'eau sur la tête de l'enfant, mais qu'il la plongeroit dans les fonts baptismaux.
Les Ecrivains ecclésiastiques parlent de plusieurs cérémonies qu'on pratiquoit au baptême, qui sont aujourd'hui abolies, ou dont il ne reste que de legeres traces ; comme de donner aux nouveaux baptisés du lait & du miel dans l'église d'orient ; & dans celle d'occident, du miel & du vin, de les revêtir d'une robe blanche, &c. de ne baptiser qu'à jeûn, de donner immédiatement après le baptême la confirmation & l'eucharistie, &c.
Les Théologiens distinguent trois sortes de baptêmes ; le baptême d'eau, dont nous venons de parler ; le baptême de feu, c'est-à-dire la charité parfaite jointe à un ardent désir d'être baptisé, c'est ce qu'on appelle aussi le baptême du S. Esprit, qui supplée au baptême d'eau ; & le baptême de sang, c'est-à-dire le martyre. On ne baptisoit autrefois les catéchumenes qu'à pâque & à la pentecôte, excepté en cas de nécessité.
Le ministre ordinaire du baptême est l'évêque ou le prêtre ; mais en cas de nécessité, toutes personnes, même les femmes, peuvent baptiser.
Quelques-uns ont prétendu que dans la primitive Eglise on ne baptisoit que les adultes : mais c'est sans fondement. Car quoiqu'on n'ait point dans l'Ecriture de textes précis qui marquent que des enfans ont été baptisés, & que quelques anciens peres, comme Tertullien, fussent persuadés que de baptiser les enfans avant qu'ils eussent atteint l'âge de raison, c'étoit les exposer à violer les engagemens de leur baptême ; & qu'ainsi il étoit de la prudence & de la charité de n'admettre à ce sacrement que les adultes : il est néanmoins certain, 1°. que les apôtres ont baptisé des familles entieres, dans lesquelles il est très-probable qu'il se trouvoit des enfans : 2°. que la pratique actuelle de l'Eglise à cet égard est fondée sur la tradition des apôtres, comme l'assûre S. Augustin après S. Irénée & S. Cyprien. Ce dernier sur-tout consulté par l'évêque Fidus, s'il ne seroit pas à-propos de fixer le tems du baptême des enfans au huitieme jour après leur naissance, comme celui de la circoncision l'étoit chez les Juifs, en conféra avec soixante-cinq autres évêques assemblés en concile à Carthage en 253, & répondit à Fidus : Quod tu put abas esse faciendum, nemo consentit : sed universi potius judicavimus nulli hominum nato misericordiam Dei & gratiam esse denegandam. Quelqu'autorisée que fût cette pratique dans les premiers siecles de l'Eglise, il faut convenir qu'elle n'étoit pas généralement observée à l'égard de tous les enfans des fideles : les catéchumenes même différoient plusieurs années à recevoir le baptême. L'histoire ecclésiastique nous apprend que S. Ambroise ne fut baptisé qu'après avoir été élû évêque de Milan. On sait que l'empereur Constantin ne reçut ce sacrement qu'à l'article de la mort, & qu'il eut en cela bien des imitateurs d'un nom illustre dans l'Eglise. Plusieurs différoient ainsi leur baptême le plus long-tems qu'ils pouvoient, mais par des motifs très-différens ; les uns par un esprit d'humilité, dans la crainte de n'être pas assez bien disposés pour recevoir dignement ce premier sacrement ; les autres pour mener plus librement une vie déréglée, se flattant d'en obtenir le pardon à la mort par l'efficace du baptême. Les peres s'éleverent avec tant de force contre les fausses raisons & le danger des délais dont on usoit pour recevoir si tard le baptême, qu'ils réussirent peu-à-peu à établir l'usage qui subsiste aujourd'hui.
Quoique Jesus-Christ soit venu dans le monde pour ouvrir à tous les hommes la voie du salut, cependant il étoit d'usage & de regle dans la primitive Eglise, de refuser le baptême à certaines personnes engagées dans des conditions ou professions notoirement criminelles, comme incompatibles avec la sainteté du Christianisme ; à moins qu'elles ne renonçassent à cette profession ou à cet état. De ce nombre étoient les Sculpteurs, Fondeurs, ou autres ouvriers qui faisoient des idoles ; les femmes publiques, les comédiens, les cochers, gladiateurs, musiciens, ou autres qui gagnoient leur vie à amuser le public dans le cirque ou l'amphithéatre ; les astrologues, devins, magiciens, enchanteurs, ceux qui étoient adonnés aux crimes contre-nature, ceux mêmes qui étoient tellement passionnés pour les représentations des jeux & du théatre, qu'ils refusassent de s'en abstenir dès qu'ils auroient embrassé la religion ; les concubinaires, ceux qui tenoient des lieux de débauche ; quelques-uns même ont cru qu'on n'y admettoit pas les gens de guerre : mais l'histoire ecclésiastique ne laisse aucun doute que les Chrétiens n'ont pas confondu une profession utile & honorable par elle-même, avec des arts ou des conditions reprouvées par la raison même. Bingham, orig. ecclés. liv. XI. chap. v. §. 6. 7. 8. 9. 10.
On convient aujourd'hui qu'on ne doit pas baptiser les enfans des infideles, même soûmis à la domination des princes chrétiens, malgré leurs parens, à moins que ces enfans ne soient en danger évident de mort ; parce que cette violence est contraire au droit naturel qu'ont les peres & les meres sur leurs enfans ; & que d'ailleurs elle exposeroit le sacrement à une profanation certaine, par l'apostasie à laquelle ces peres & meres engageroient leurs enfans.
Quelques-uns ont cru qu'on devoit conférer le baptême aux morts, & même qu'on pouvoit le recevoir à leur place, fondés sur ce passage de S. Paul aux Corinthiens I. épît. ch. xv. vers. 30. alioquin quid facient qui baptisantur pro mortuis, si mortui non resurgunt : ut quid & baptisantur pro illis ? passage sans-doute mal entendu, & qui à la lettre ne signifie autre chose, sinon qu'on peut pratiquer en mémoire des morts des oeuvres de pénitence qui leur obtiennent la rémission des péchés qu'ils n'ont pas suffisamment expiés en cette vie ; car le mot de baptême, dans un sens général & usité dans l'Ecriture, signifie quelquefois la pénitence, les afflictions & les souffrances. Ainsi dans S. Luc, Jesus-Christ parlant de sa passion, l'appelle un baptême : ch. xiij. vers. 50. baptismo habeo baptisari ; & dans S. Marc, ch. x. vers. 38. potestis.... baptismo quo ego baptisor baptisari. (G)
APTEME du tropique ou de la ligne, en Marine ; c'est une cérémonie ridicule, mais d'un usage ancien & inviolable parmi les gens de mer, qui la pratiquent bien régulierement sur ceux qui passent pour la premiere fois le tropique ou la ligne équinoxiale.
Chaque nation s'y prend diversement, & même les équipages d'une même nation l'exercent en différentes manieres. Voici celle qui est la plus ordinaire parmi les équipages françois.
Pour préparatifs, on met une baille au pié du grand mât pleine d'eau de la mer ; le pilote pour l'ordinaire se met auprès, le visage barbouillé, le corps revêtu & tout entortillé de garcettes, dont quelques-unes lui pendent des bras. Il est accompagné de cinq ou six matelots habillés de même : il tient entre ses mains un livre de cartes marines tout ouvert ; aux environs il y a des matelots avec des seaux pleins d'eau ; il y en a sur les vergues & sur les hunes. On amene celui qui doit être baptisé en grande cérémonie ; on le fait asseoir sur une planche tenue aux deux bouts par deux matelots, & posée sur la baille pleine d'eau ; on lui fait jurer sur le livre que tient le pilote, de pratiquer sur les autres la même cérémonie, lorsque l'occasion s'en trouvera ; & dans l'instant les deux matelots renversent la planche, & font tomber l'homme dans la baille ; en même tems ceux qui sont à la hune & sur les vergues lui jettent plusieurs seaux d'eau sur le corps. Les officiers & les passagers se rachettent d'une si ridicule cérémonie, en donnant quelqu'argent aux équipages : mais on ne fait point de grace à ceux qui ne donnent rien. On demande cependant permission au capitaine pour faire le baptême.
Un vaisseau qui n'a point encore passé la ligne ou le tropique, y est soûmis : mais le capitaine le rachette par quelques rafraîchissemens qu'il donne aux gens de l'équipage, autrement ils couperoient l'éperon ou quelqu'autre partie du vaisseau : mais aujourd'hui beaucoup de capitaines abolissent cette ridicule cérémonie. (Z)
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BAPTEME | BAPTEME
L'auteur observe d'abord que la dispute entre les paedobaptistes & les anti-paedobaptistes anglois (qu'il nous soit permis d'employer ces deux mots expressifs), peut se réduire à deux chefs : 1°. la maniere d'administrer le baptême, savoir si on doit le faire seulement par immersion : & 2°. les personnes à qui l'on doit l'administrer, si c'est seulement aux adultes, ou si l'on doit le donner aussi aux enfans. Il soutient qu'en ce que les décisions de l'Ecriture-sainte ont de clair, la pratique des anti-paedobaptistes y est conforme, comme l'on en convient ; & que supposé qu'ils errent, ils prennent cependant le parti le plus sûr, en s'en tenant à ce qu'il y a de clairement décidé dans l'Ecriture. Il prétend que le mot grec baptiser, signifie toujours plonger une chose de quelque maniere que ce soit ; mais que dans l'usage le plus ordinaire il signifie plonger dans l'eau ; ce qu'il confirme par divers passages des anciens ; il remarque ensuite que les critiques assurent constamment que le vrai & propre sens du terme de , est immergo, je plonge ; & que supposé que ce mot fût équivoque d'ailleurs ; cependant en tant que relatif au baptême, il est déterminé à signifier nécessairement plonger ; & cela par la pratique de S. Jean, des apôtres, & de l'église, qui pendant plusieurs siecles, a fortement pressé la triple immersion.
Il soutient aussi que l'ancienne Eglise, dans les premiers siecles, n'a point pratiqué l'aspersion, que tous ceux qui ont été baptisés du tems des apôtres, l'ont été par immersion ; qu'il ne paroît point que le baptême des Cliniques, ait été en usage qu'environ 250 ans après Jesus-Christ ; que dans ce tems-là on doutoit fort de sa validité, & que tout le monde convient qu'anciennement on a insisté sur la nécessité de l'immersion, comme étant la seule maniere réguliere d'administrer le baptême dans tous les cas ordinaires ; il passe ensuite à l'autre point de la question entre les paedobaptistes & leurs adversaires : savoir, qui sont les personnes à qui l'on doit administrer le baptême ; si ce sont seulement les adultes, ou si l'on doit y admettre aussi les enfans.
Comme on ne peut point prouver par l'Ecriture, que les enfans doivent être baptisés, on a recours pour autoriser cet usage à la pratique de l'Eglise judaïque, & à celle des anciens chrétiens. Le docteur Gale répond, que dès que le baptême des petits enfans ne peut se prouver par l'Ecriture, il en résulte que ce n'est point une institution de Jesus-Christ ; & que supposer qu'elle soit comprise dans une ou plusieurs expressions générales, c'est supposer ce qui est en question.
Il prouve dans la lettre suivante, par le passage de S. Matthieu, chap. xxviij. vers. 19. que l'Ecriture ne laisse pas la question du baptême des petits enfans aussi indécise que quelques-uns l'imaginent, & que la commission oblige indispensablement d'instruire ceux qu'elle ordonne de baptiser ; d'où il s'ensuit que les petits enfans ne peuvent être compris dans cette commission. Le mot grec ne signifie constamment qu'enseigner, & le mot désigne uniquement des personnes du moins capables d'instruction ; ainsi que les plus judicieux interprêtes de l'Ecriture l'ont toujours reconnu. Quand il seroit vrai que les Juifs & les Chrétiens baptisoient les petits enfans, les anti-paedobaptistes ont cependant des raisons suffisantes pour ne point admettre cette pratique.
M. Gale va plus loin, il soutient que les raisons alleguées par les paedobaptistes, ne démontrent point que ce fût la coutume des Juifs, du tems de notre Sauveur, de baptiser les prosélytes & leurs enfans ; & il produit plusieurs argumens pour justifier le contraire. Enfin il ajoute qu'en supposant qu'on pût prouver démonstrativement la vérité du fait, il ne doit pas servir de regle pour l'administration du sacrement de la religion chrétienne, cette pratique des Juifs n'étant point fondée sur l'Ecriture, ne devant point son origine à Moïse, & n'étant appuyée que de la tradition des rabbins.
Il remarque dans l'onzieme lettre, que l'argument de M. Wall, tiré de l'autorité des peres, porte sur une supposition qu'on ne lui accordera pas aisément, je veux dire, que l'Eglise primitive n'a rien cru ni pratiqué, que ce qu'elle avoit reçu des apôtres ; mais, dit le docteur Gale, sans donner atteinte à l'honneur & à la probité des peres, leurs témoignages ne peuvent établir le baptême des petits enfans ; quand M. Wall multiplieroit encore davantage les citations tirées de leurs écrits : car si les peres ne prouvent que le fait, ou ce qui se pratiquoit dans l'Eglise & non le droit ; & si l'Eglise n'étoit pas entierement exempte d'innovations, comment leur témoignage prouve-t-il que le baptême des petits enfans n'étoit pas une innovation, mais une institution de Jesus-Christ ?
Il est fâcheux de rappeller la mémoire des exemples de la fragilité humaine, dont la primitive Eglise elle-même n'a point été exempte. C'étoient des hommes sujets aux mêmes passions que nous ; il n'est donc pas surprenant qu'ils se trompassent quelquefois, ni que leur zéle pour la gloire de Dieu ne fût pas toujours éclairé : & quoiqu'il pût les empêcher de perdre ce que notre Seigneur leur avoit laissé de considérable à garder, il pouvoit cependant les exposer à ajouter bien des choses, qu'il n'avoit jamais autorisées. Les apôtres, au-contraire, ont suivi ses directions sans s'en écarter le moins du monde, parce qu'ils étoient assistés extraordinairement de l'esprit de Dieu.
Mais les chrétiens du siecle qui a suivi immédiatement, ont fait plusieurs additions, de l'aveu de Tertullien, dans son livre de coronâ. Eusèbe, Hist. eccl. l. III. c. xxxij. rapporte, sur le témoignage d'Hégésippe, que l'Eglise se conserva tout le tems des apôtres comme une vierge chaste ;... mais, dit-il, depuis que les apôtres eurent été enlevés.... les faux docteurs eurent la hardiesse de publier plusieurs erreurs permanentes.
Enfin, M. Gale dans sa derniere lettre, remarque que du tems de S. Cyprien, le baptême des petits enfans étoit en usage en Afrique, & qu'il y a peut-être pris naissance ; que les Africains étoient généralement de petits esprits ; que selon les apparences, l'église grecque n'avoit point encore reçu cette erreur ; que le baptême des enfans commença d'abord, ainsi que toutes les autres innovations, par quelques légers changemens dans le dogme, ce qui passa peu-à-peu dans la pratique, & parvint à la longue à ce degré d'autorité dont il jouit depuis si long-tems ; qu'enfin il doit en quelque façon son origine au zèle, mais à un zèle peu éclairé, semblable à celui qui engagea les plus anciens paedobaptistes à donner la communion aux enfans.
(Le Chevalier DE JAUCOURT.)
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BAPTE | (LES), Hist. litt. nom d'une comédie composée par Cratinus où ce poëte railloit d'une façon sanglante les principaux personnages du gouvernement. Lorsque Cratinus composa ses baptes ou plongeurs, la liberté de l'ancienne comédie étoit restrainte à la censure des ridicules, & sur-tout des poëtes, que le gouvernement n'étoit point fâché qu'on décriât ; parce que de tout tems les hommes en place ont haï les satyriques & les plaisans. Cratinus fit un effort pour rendre à la scene comique les droits dont on l'avoit dépouillée : mais il fut la victime de sa hardiesse. Il éprouva le châtiment auquel on dit que M. de Montausier, l'homme de la cour qui avoit le moins à craindre de la satyre, condamnoit tous les satyriques. Il fut jetté dans la mer piés & mains liés.
BAPTES, s. m. pl. (Mythol.) prêtres de Cottytto, déesse de l'impudicité fort révérée à Athènes, où l'on célébroit sa fête pendant la nuit par des danses lascives, accompagnées de toutes sortes de débauches. Les baptes furent ainsi nommés du mot grec , qui signifie laver ou tremper, parce qu'ils se plongeoient dans de l'eau tiede, selon Suidas. Juvénal en parle comme d'une troupe d'hommes si infames, que leurs déréglemens déplaisoient à Cottytto, quoiqu'elle ne fût rien moins que la déesse de la pudeur. (G)
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BAPTISTE | voyez ANABAPTISTES, CATABAPTISTES, HEMERO-BAPTISTES.
Hermites de S. Jean-Baptiste, voyez HERMITES. (G)
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BAPTISTERE | S. m. (Théologie) c'est le lieu ou l'édifice dans lequel on conserve l'eau pour baptiser. voyez BAPTEME.
Les premiers Chrétiens, suivant S. Justin martyr & Tertullien, n'avoient d'autres baptisteres que les fontaines, les rivieres, les lacs, ou la mer, qui se trouvoient plus à portée de leur habitation : & comme souvent la persécution ne leur permettoit pas de baptiser en plein jour, ils y alloient de nuit, ou donnoient le baptême dans leurs maisons.
Dès que la religion Chrétienne fut devenue celle des empereurs, outre les églises, on bâtit des édifices particuliers uniquement destinés à l'administration du baptême, & que par cette raison on nomma baptisteres.
Quelques auteurs ont prétendu que ces baptisteres étoient anciennement placés dans le vestibule intérieur des églises, comme le sont aujourd'hui nos fonts baptismaux. C'est une erreur. Les baptisteres étoient des édifices entierement séparés des basiliques, & placés à quelque distance des murs extérieurs de celles-ci. Les témoignages de S. Paulin, de S. Cyrille de Jérusalem, de S. Augustin, &c. ne permettent pas d'en douter.
Ces baptisteres ainsi séparés ont subsisté jusqu'à la fin du VIe siecle, quoique dès-lors on en voye déjà quelques-uns placés dans le vestibule intérieur de l'eglise, tel que celui où Clovis reçu le baptême des mains de saint Remi. Cet usage est ensuite devenu général, si l'on en excepte un petit nombre d'églises qui ont retenu l'ancien, comme celle de Florence, & toutes les villes épiscopales de Toscane, la métropole de Ravenne, & l'église de saint Jean de Latran à Rome.
Ces édifices pour la plûpart étoient d'une grandeur considérable, eu égard à la discipline des premiers siecles, le baptême ne se donnant alors que par immersion, & (hors le cas de nécessité) seulement aux deux fêtes les plus solemnelles de l'année, pâque & la pentecôte. Le concours prodigieux de ceux qui se présentoient au baptême, la bienséance qui demandoit que les hommes fussent baptisés séparément des femmes, demandoient un emplacement d'autant plus vaste, qu'il falloit encore y ménager des autels où les néophytes reçussent la confirmation & l'eucharistie immédiatement après leur baptême. Aussi le baptistere de l'église de sainte Sophie à Constantinople étoit-il si spacieux, qu'il servit d'asyle à l'empereur Basilisque, & de salle d'assemblée à un concile fort nombreux.
Les baptisteres avoient plusieurs noms différens, tels que ceux de piscine, lieu d'illumination, &c. tous rélatifs aux différentes graces qu'on y recevoit par le sacrement.
On trouve peu de choses dans les anciens auteurs sur la forme & les ornemens des baptisteres, ou du moins ce qu'on y en lit est fort incertain. Voici ce qu'en dit M. Fleuri sur la foi d'Anastase, de Grégoire de Tours, & de Durand, dans ses notes sur le pontifical attribué au pape Damase. " Le baptistere étoit d'ordinaire bâti en rond, ayant un enfoncement où l'on descendoit par quelques marches pour entrer dans l'eau ; car c'étoit proprement un bain. Depuis on se contenta d'une grande cuve de marbre ou de porphyre comme une baignoire, & enfin on se réduisit à un bassin, comme sont aujourd'hui les fonts. Le baptistere étoit orné de peintures convenables à ce sacrement, & meublé de plusieurs vases d'or & d'argent pour garder les saintes huiles & pour verser l'eau. Ceux-ci étoient souvent en forme d'agneaux ou de cerfs, pour représenter l'agneau dont le sang nous lave, & pour marquer le desir des ames qui cherchent Dieu, comme un cerf altéré cherche une fontaine, suivant l'expression du pseaume 41. On y voyoit l'image de saint Jean-Baptiste & une colombe d'or ou d'argent suspendue, pour mieux représenter toute l'histoire du baptême de Jésus-Christ, & la vertu du S. Esprit qui descend sur l'eau baptismale. Quelques-uns même disoient le jourdain, pour dire les fonts ". Moeurs des Chrétiens, tit. xxxvj. Ce qu'ajoûte Durand, que les riches ornemens dont l'empereur Constantin avoit décoré le baptistere de l'église de Rome, étoient comme un mémorial de la grace qu'il avoit reçue par les mains du pape saint Sylvestre, est visiblement faux, puisqu'il est aujourd'hui démontré que ce prince fut baptisé à Nicodémie peu de tems avant sa mort.
Il n'y eut d'abord des baptisteres que dans les villes seules épiscopales : d'où vient qu'encore aujourd'hui le rit Ambroisien ne permet point qu'on fasse la bénédiction des fonts baptismaux les veilles de pâque & de pentecôte, ailleurs que dans l'église métropolitaine, d'où les églises paroissiales prennent l'eau qui a été bénite pour la mêler avec d'autre, depuis qu'on leur a permis d'avoir des baptisteres ou fonts particuliers. Dans l'église de Meaux les curés de la ville viennent baptiser les enfans depuis le samedi saint jusqu'au samedi suivant sur les fonts de l'église cathédrale. C'est un droit attaché à chaque paroisse en titre & à quelques succursales ; mais non pas à toutes celles-ci, non plus qu'aux chapelles & aux monasteres, qui, s'ils en ont, ne les possedent que par privilége & par concession des évêques.
On confond aujourd'hui le baptistere avec les fonts baptismaux. Anciennement on distinguoit exactement ces deux choses, comme le tout & la partie. Par baptistere, on entendoit tout l'édifice où l'on administroit le baptême ; & les fonts n'étoient autre chose que la fontaine ou le réservoir qui contenoit les eaux dont on se servoit pour le baptême. Voyez FONTS. (G)
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BAQUIER | S. m. (Commerce) c'est ainsi qu'on appelle à Smyrne du coton de basse qualité, dont la valeur n'est pas considérable, & qui ne s'y fabrique pas en grande quantité.
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BAR | en terme de Bâtiment, est une espece de civiere avec laquelle des hommes portent des pierres ordinairement de peu de grosseur.
Les ouvriers qui portent le bar se nomment bardeurs. Voyez BARDEUR.
L'action de mettre la pierre sur le bar se nomme barder. Voyez BARDER. (P)
* Le bar est composé de deux longues pieces de bois équarries & assemblées parallelement par quatre ou six traverses de deux piés de long ou environ.
Ces traverses n'occupent que le milieu des pieces équarries, où elles forment un fond ou une grille sur laquelle on pose les fardeaux ; le reste des pieces équarries qui demeure isolé va en diminuant, est arrondi, se termine par une tête formant une coche ou un arrêt en-dessous ; & sert de manche ou bras des deux côtés de la grille ou du fond. L'arrêt de la coche retient les bretelles des bardeurs, & les empêche de s'échapper des bras. Quand les poids sont lourds, deux ou quatre manoeuvres se mettent aux bras, & deux autres passent encore un levier sous la grille : ces derniers s'appellent arbalêtriers.
Pour garantir les arêtes & autres formes délicates des pierres taillées ou sculptées de l'impression des traverses, on couvre la grille de nattes. Ces nattes s'appellent torches.
* BAR, (Géog.) ville de Pologne, dans la Podolie, sur la riviere de Kow. Long. 46. lat. 49. 15.
* BAR, (duché de) Géog. contrée de France située des deux côtés de la Meuse, entre la Lorraine & la Champagne.
* BAR-LE-DUC, (Géog.) capitale du duché de Bar ; il y a haute & basse ville : celle-ci est sur la petite riviere d'Orney. Long. 23. lat. 48. 35.
* BAR-SUR-AUBE, (Géog.) ville de France en Champagne, capitale du Vallage. Longit. 22. 20. lat. 48. 14.
* BAR-SUR-SEINE, (Géog.) ville de France, au duché de Bourgogne. Long. 22. lat. 48. 5.
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BARABA | (Géog.) grand lac d'Asie, au royaume de Sibérie, rempli d'un sel solide, que les Moscovites coupent comme de la glace.
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BARABINS | ou BARABINSKOI, subst. m. pl. (Géog.) peuple de la Tartarie, dans la partie méridionale de la Sibérie, tributaires de la Moscovie.
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BARACAQUE | S. m. (Hist. mod.) nom de secte & de religieux Japonois, dont la priere & la méditation est l'occupation continuelle.
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BARACH | (Géog. sainte) ville de la Palestine, dans la tribu de Dan.
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BARACI | (Géog.) ville de l'île de Sardaigne, dont il ne reste que des ruines qu'on voit proche de Sassari.
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BARACOA | (Géog.) ville de l'Amérique, dans l'île de Cuba, avec un port, sur la côte septentrionale de l'île.
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BARAD | (Géog. sainte) ville de la Palestine, dans la tribu de Juda, proche la fontaine d'Agar.
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BARADAS | S. m. c'est, en terme de Fleuriste, un oeillet rouge-brun, à fleur large, grosse, feuillue, & en dôme ; ni blanc, ni carné ; à panaches gros & non détachés. On ne lui laisse que quatre à cinq boutons.
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BARAICU | ou BURAICUS, (Myth.) surnom qu'Hercule prit d'une ville d'Achaie, célebre par l'oracle de ce héros : la maniere dont se rendoit cet oracle, étoit singuliere. Après qu'on avoit fait sa priere dans le temple, on prenoit quatre dez ; on les jettoit au hasard ; les faces de ces dez étoient empreintes de figures hiéroglyfiques ; on remarquoit bien les figures amenées ; & l'on alloit ensuite en chercher l'interprétation sur un tableau où elles étoient expliquées. Cette interprétation passoit pour la réponse du dieu. Voyez l'article DE, en combien de façons quatre dez à six faces peuvent être combinés : vous trouverez 1296. L'oracle auroit dû avoir autant de réponses ; mais il en avoit bien moins, & il étoit facile que la question de celui qui s'adressoit à l'oracle, fût de celles dont la réponse n'étoit pas dans les dez, mais il falloit compter jusqu'à 1296, pour sentir l'impertinence de l'oracle, & le peuple ne sait pas compter si loin, & quand il le sauroit, il s'en feroit un scrupule.
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BARALIPTON | (Log.) nom par lequel on designe le premier mode indirect d'argument de la premiere figure. Le syllogisme en baralipton, a les deux premieres propositions universelles affirmatives, & la troisieme particuliere affirmative. Voyez SYLLOGISME.
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BARALLOTS | sub. m. plur. (Théol.) nom qu'on donna à certains hérétiques qui parurent à Bologne en Italie, & qui mettoient tous leurs biens en commun, même les femmes & les enfans. Leur extrème facilité à se livrer aux plus honteux excès de la débauche, leur fit encore donner, selon Ferdinand de Cordoue, dans son traité de Exiguis annonis, le nom d'obéissans, obedientes. (G)
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BARAMPOUR | Voyez BRAMPOUR.
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BARANCA | BARANCA
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BARANCIA | (LA) Géog. grande riviere de l'Amérique septentrionale, qui a sa source au Mexique, traverse le Méchoacan, le Gadalajara, la province de Xalisco, & se jette dans la mer Pacifique, à l'entrée de la mer Vermeille. Sanson l'appelle Esquitlan.
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BARANGE | S. f. c'est ainsi qu'on appelle dans les Salines, un mur d'environ trois piés de hauteur, placé en-dedans du fourneau, entre les murs sur lesquels la poele est posée : il sert à la séparation des bois & des braises.
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BARANGES | sub. m. pl. (Hist. anc.) officiers qui gardoient les clefs des portes de la ville où demeuroit l'empereur de Constantinople. On prétend que ce mot est originairement Anglois, parce que ces gardes des clefs étoient pour l'ordinaire tirés des îles Britanniques. (G)
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BARANGUELIS | (LE) Géog. anc. & mod. grand étang d'Egypte, que les Latins nomment stagnum magnum, Tenesae sinus, Sorbonis palus, sur les frontieres de la Terre-sainte, vers la côte de la Méditerranée ; on l'appelle le golfe de Tenese, le Grand étang, ou Stagnone. Il avoit autrefois cent vingt mille pas ; il est aujourd'hui beaucoup moindre, & l'on conjecture qu'il se remplira.
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BARANIWAR | (Geog.) petite ville de la basse Hongrie, au comté de même nom, entre Bude & Belgrade, sur le ruisseau de Crasso. Long. 36. 20. lat. 46.
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BARANOVA | (Géog.) petite ville de Pologne, dans la haute Wolhinie, sur la riviere de Slucks.
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BARAQUE | S. f. (Architecture) lieu construit de charpente, revêtue de planches de bateau, couverte de dosses, & pratiquée près d'un grand attelier, ou dans un grand chantier, pour servir aux ouvriers de magasin pendant l'hyver, & de retraite pendant l'été. (P)
BARAQUE, s. f. (en Art. milit.) est une hutte ou petite loge pour des soldats dans un camp. Voyez HUTTE.
Ce mot vient de barracas en Espagnol, petite cabane que les pêcheurs font sur le bord de la mer.
Celles pour la cavalerie étoient autrefois appellées baraques ; & celles pour l'infanterie, huttes : mais le terme baraque est à présent usité indifféremment pour les deux.
Pour faire les baraques, on fiche quatre perches fourchues en terre, & on en met quatre autres en travers ; ensuite on éleve les murailles avec des mottes de terre, des claies, ou tout ce que le lieu fournit de propre pour cela : le dessus est couvert de chaume ou de gason, selon la commodité qu'on en a. Quand l'armée est en quartier d'hyver, les soldats font ordinairement des baraques ; en été, ils se contentent de leurs tentes. (Q)
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BARASA | (Géog. sainte) ville de la Palestine, dans la tribu de Gad.
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BARAT | S. m. (Commerce) vieux mot François & hors d'usage, qui signifioit autrefois tromperie, fourbe, mensonge. C'est de barat que vient le terme de baratterie, dont il y a un titre dans les ordonnances de la Marine. (G)
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BARATHRE | S. m. (Hist. anc.) gouffre, lieu très-profond dans l'attique, où l'on avoit coûtume de précipiter les scélérats. Il étoit revêtu de pierre de taille, en forme de puits, & dans le mur de revêtissement, on avoit scellé d'espace en espace, des crampons de fer crochus, dont quelques-uns avoient la pointe en-haut, & d'autres de côté, pour accrocher & déchirer les criminels dans leur chûte. Ce nom chez les Grecs est encore commun à toute sorte de gouffres, d'abysmes, & de concavités de la terre. (G)
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BARATTE | S. f. (Economie rustiq.) vaisseau fait de douves, plus étroit par en-haut que par en-bas, & qui sert à battre la crême dont on fait le beurre.
L'ouverture de la baratte se couvre avec une sebille troüée qui s'y emboîte, & par le trou de laquelle passe un long bâton qui sert de manche au bat-beurre.
Le bat-beurre est un cylindre de bois épais d'environ deux pouces, percé de plusieurs trous, & emmanché de plat au bout d'un long bâton ; les trous du cylindre servent à donner passage au lait de beurre à mesure que le beurre s'avance.
Ce sont les Tonneliers qui fabriquent & vendent les barattes ; & elles sont à l'usage des habitans de la campagne.
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BARATTERIE | S. f. (Commerce) malversation, tromperie. Voyez BARAT.
BARATTERIE DE PATRON, (Commerce) en termes de commerce de mer, signifie les larcins, déguisemens, & altérations de marchandises que peuvent causer le maître & l'équipage d'un vaisseau, & généralement toutes les supercheries & malversations qu'ils mettent assez souvent en usage pour tromper le marchand chargeur & autres intéressés.
On trouve dans l'ordonnance de la Marine du mois d'Août 1681, liv. II. & III. les détails des différentes baratteries que peuvent commettre les patrons ou maitres de vaisseaux, & les peines décernées contr'eux dans ces occasions. (G)
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BARBA | (Géog.) petite ville du royaume d'Alger, en Barbarie.
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BARBACA | (Hist. nat. bot.) plante qui pousse plusieurs tiges à la hauteur d'un pié & demi, branchues, creuses, plus petites que celles de la rave, & ayant quelque ressemblance à celle du cresson ; vertes, noirâtres & luisantes ; ses fleurs sont petites, jaunes, à quatre feuilles disposées en croix. Il leur succede de petites gousses tendres, rondes & longues, qui contiennent des semences rougeâtres : sa racine est oblongue, médiocrement grosse, & d'un goût acre. Elle croît dans les champs, & on la cultive dans les potagers.
Elle contient du sel essentiel & de l'huile ; elle est détersive & vulnéraire ; elle excite l'urine ; elle est salutaire dans le scorbut, les maladies de la rate & la néphrétique.
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BARBACANNE | S. f. (en Architecture) c'est une ouverture étroite & longue en hauteur, qu'on laisse aux murs qui soutiennent des terres, pour y donner de l'air, ou pour en faciliter l'entrée & la sortie des eaux ; on la pratique sur-tout lorsque l'on bâtit en des lieux sujets à l'inondation ; elle se nomme aussi canonniere & ventouse, & en latin colluviarium. (P)
BARBACANNE, c'est ainsi qu'on appelle en Fortification, les ouvrages avancés d'une place ou d'une citadelle ; le principal usage de la barbacanne, est d'être le boulevard des portes ou des murailles. Voyez DEFENSE.
Ce nom rend le promurale, ante murale, murus exterior des Romains, & ce que les François nomment contre-mur. Il dénote aussi un fort à l'entrée d'un pont ou à la sortie d'une ville, avec une double muraille, comme celle que l'on voit à Roüen à l'un des bouts de son pont de bateaux. C'est pourquoi plusieurs lui donnent encore le nom de barbacanne. Il étoit d'usage aussi pour signifier une ouverture des murailles, par où l'on tire des coups de mousquet sur l'ennemi ; mais on ne s'en sert plus à présent. Voyez CRENEAU & EMBRASURE. (Q)
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BARBADE | (Géog.) île de l'Amérique, & l'une des Antilles. Long. 318. 40. lat. 13. 20.
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BARBANçON | (Géog.) principauté dans le Hainault.
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BARBANDA | (Géog. anc.) ville jadis considérable de la haute Egypte, il n'en reste plus que quelques ruines entre Girgio & Asna.
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BARBARA | (Log.) terme par lequel on designe le premier mode d'argument de la premiere figure : un syllogisme en barbara a ses trois propositions universelles affirmatives. Voyez SYLLOGISME.
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BARBARES | adj. (Philosophie) c'est le nom que les Grecs donnoient par mépris à toutes les nations qui ne parloient pas leur langue, ou du moins qui ne la parloient pas aussi-bien qu'eux. Ils n'en exceptoient pas même les Egyptiens, chez lesquels ils confessoient pourtant que tous leurs philosophes & tous leurs législateurs avoient voyagé pour s'instruire. Sans entrer ici avec Brucker, dans les différentes étymologies de ce terme, ni sans examiner s'il est composé du bar des Arabes, qui signifie desert, ou s'il est dérivé du terme par lequel les Chaldéens rendent le foris ou l'extra des Latins ; je remarquerai seulement que dans la suite des tems, les Grecs ne s'en servirent que pour marquer l'extrème opposition qui se trouvoit entr'eux & les autres nations, qui ne s'étoient point encore dépouillées de la rudesse des premiers siecles, tandis qu'eux-mêmes, plus modernes que la plupart d'entr'elles, avoient perfectionné leur goût, & contribué beaucoup aux progrès de l'esprit humain. Ainsi toutes les nations étoient réputées barbares, parce qu'elles n'avoient ni la politesse des Grecs, ni une langue aussi pure, aussi féconde, aussi harmonieuse que celle de ses peuples. En cela ils furent imités par les Romains, qui appelloient aussi barbares tous les autres peuples, à l'exception des Grecs, qu'ils reconnoissoient pour une nation savante & policée. C'est à-peu-près comme nous autres François, qui regardons comme grossier tout ce qui s'éloigne de nos usages. Les Grecs & les Romains étoient jaloux de dominer plus encore par l'esprit, que par la force des armes, ainsi que nous voulons le faire par nos modes.
Lorsque la religion Chrétienne parut, ils n'eurent pas pour elle plus de ménagement qu'ils en avoient eu pour la philosophie des autres nations. Ils la traiterent elle-même de barbare ; & sur ce pié ils oserent la mépriser. C'est ce qui engagea les premiers Chrétiens à prendre contre les Grecs & les Romains, la défense de la philosophie barbare. C'étoit un détour adroit dont ils se servoient pour les accoutumer peu-à-peu à respecter la religion Chrétienne, sous cette enveloppe grossiere qui leur en déroboit toute la beauté, & à lui soûmettre leur science & leur orgueil. Tatien de Syrie, & disciple de S. Justin, leur a prouvé qu'ils n'avoient rien inventé d'eux-mêmes, & qu'ils étoient redevables à ces mêmes hommes, qu'ils traitoient de barbares, de toutes les connoissances dont ils étoient si fort enorgueillis. " Quelle est, leur reprochoit-il malignement, la science parmi vous, qui ne tire son origine de quelqu'étranger, Vous n'ignorez pas que l'art d'expliquer les songes vient de l'Italie ; que les Cariens se sont les premiers avisés de prédire l'avenir par la diverse situation des astres ; que les Phrygiens & les Isauriens se sont servis pour cela du vol des oiseaux, & les Cypriotes des entrailles encore fumantes des animaux égorgés. Vous n'ignorez pas que les Chaldéens ont inventé l'Astronomie ; les Perses la Magie ; les Egyptiens la Géométrie, & les Phéniciens l'art des Lettres. Cessez donc, ô Grecs, de donner pour vos découvertes particulieres, ce que vous n'avez fait que suivre & qu'imiter ". Quoi qu'il en soit de ces reproches, il est certain qu'ils sont les premiers inventeurs de cette philosophie systématique, qui bravant toute autorité, ne veut se laisser conduire qu'à la lueur de l'évidence dans la recherche de la vérité. La Philosophie des autres peuples, & même des Egyptiens, n'étoit, ainsi que nous l'avons remarqué à l'article de l'ame, qu'un amas de maximes, qui se transmettoient par tradition, & qui prenoient sur les esprits le même ascendant que les oracles de leurs dieux. Ce n'est qu'en Grece qu'on osoit raisonner ; & c'est aussi là le seul pays où l'esprit subtil & raffiné enfantoit des systèmes. La Philosophie des autres peuples, n'étoit, à proprement parler, qu'une Théologie mystérieuse. Ainsi l'on peut dire que les Grecs ont été les premiers philosophes, dans le sens rigoureux que l'usage attache à ce terme. (X)
BARBARES (Lois) Jurisprudence ; ce sont celles qui furent faites lors de la décadence de l'empire Romain, par les différens peuples qui le démembrerent, tels que les Goths, les Visigoths, les Ripuariens, les Francs-Allemands, Anglo-Saxons, &c. Voyez au mot CODE.
On voit par ces lois la forme qui s'observoit dans les jugemens. Ils se rendoient dans de grandes assemblées où toutes les personnes de distinction se trouvoient. Pour les preuves, on se servoit plus de témoins que de titres, par la raison qu'on ne faisoit presqu'aucun usage de l'écriture, sur-tout dans les commencemens. Faute de preuves on employoit le combat, ou l'on faisoit des épreuves par les élémens. Voyez COMBAT & éPREUVE.
La principale matiere de ces lois étoient les crimes, & sur-tout ceux qui étoient les plus fréquens parmi ces peuples brutaux, tels que le vol, le meurtre, les injures, en un mot tout ce qui se commet par violence : ce qui regarde les successions & les contracts y étoit traité très-succinctement.
La qualité des peines qu'elles prononçoient est remarquable. Pour la plûpart des crimes elles n'ordonnoient que les amendes pécuniaires, ou pour ceux qui n'avoient pas de quoi payer, des coups de foüet. On ne punissoit point alors de mort les criminels, à moins qu'il ne fût question de crimes d'état. Aussi ces peines étoient-elles nommées compositions, comme n'étant qu'une taxe de dommages & intérêts, faite avec une exactitude surprenante : on y distinguoit la partie blessée ou mutilée, la profondeur, la largeur de la plaie, ou le nombre des plaies.
Ces lois sont écrites d'un style si simple & si court, qu'il seroit fort clair si tous les mots étoient latins : mais elles sont remplies de mots barbares, soit faute de mots latins qui fussent propres, soit pour leur servir de glose. (H)
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BARBARICAIRE | S. m. (Peinture & Tapisserie) Le barbaricaire est un peintre qui exécute des représentations d'hommes & d'animaux en tapisserie ou avec des soies de différentes couleurs. La tapisserie est un genre de peinture, & l'on ne doit pas être surpris que je donne le nom de peintre à ces excellens artistes, qui font avec l'aiguille des tableaux aussi beaux que tous ceux que les peintres font avec le pinceau. Voyez LISSE HAUTE & BASSE.
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BARBARICEN | (LES) s. m. pl. (Géog.) peuple de l'île de Sardaigne, dans les montagnes ; on appelle leur quartier les barbarias : il est divisé en trois parties ; la Barbaria-Bervi, au quartier de Valence ; la Barbaria-Lolai, au même quartier, mais l'un plus à l'orient, & l'autre plus au septentrion ; la Barbaria-Sevoli, dans les monts.
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BARBARIE | S. f. (Géog.) grande contrée d'Afrique, enfermée entre l'Océan Atlantique, la mer Méditerranée, l'Egypte, la Nigritie, & la Guinée. Sa longueur de l'orient à l'occident est considérable, mais sa largeur varie. Ses parties principales sont les royaumes de Tripoli, de Tunis, d'Alger, de Fez, de Maroc, de Tafilet, & le Zara ou Desert. Ces états ont un grand nombre de ports sur la Méditerranée, & les royaumes de Fez & de Maroc en ont même quelques-uns sur l'Océan : ce sont ceux de Tripoli, de la Goulette, de Tunis, d'Alger & de Salé, où l'on fait le plus de commerce. Il y a à Alger des marchands de toutes les nations ; les Juifs y ont un quartier. La marine des Algériens est très-forte. On peut tirer de-là des grains. Le commerce est le même à Couco : il se fait en grains, olives, huiles, figues, raisins secs, miel, & cire. On y trouve aussi du fer, de l'alun, & de petits bestiaux. Il y a peu de négoce à Tripoli. Il vient de Barbarie des plumes d'autruche, de l'indigo, de l'or en poudre, des dattes, des raisins de damas, des cuirs tannés & non tannés, du cuivre, de la cire, de l'étain, des laines, des peaux de chevre, du corail, qui se pêche au bastion de France ; des grains, comme blés, orges, féves, millet ; des chevaux. On charge pour ces côtes des draps, de l'écarlate, des velours, des taffetas, des mousselines, des soies apprêtées, des épiceries, des drogues, du coton, du tabac, du sucre, du bois de campeche ; du tartre, de l'alun, du soufre, de la cochenille, du papier, de l'acier ; du fer, du plomb, toutes sortes de quincaillerie. Il y a beaucoup d'avantage d'aller acheter de ces voleurs, tout ce qui n'est pas à leur usage, & qu'ils revendent de leurs prises. Il n'y a en Barbarie presque que des monnoies étrangeres. Ils ont pourtant leurs burbas, leurs doublas, leurs rubics, & quelques autres pieces. Le commerce est le même par-tout sur cette côte, excepté à Salé & au bastion de France. L'or & l'ivoire qui viennent de Salé en Europe, y sont apportés de Sudan & de Gago en Guinée par des cafillas Arabes. Les plumes d'autruches viennent de Sara. Le commerce de Tamboucton, capitale de Gago, se fait singulierement, c'est un échange d'or en sel. Le marchand met son sel à terre sur des nattes de jonc, & se retire : le Negre vient, il examine le tas de sel qui lui convient, il met à côté la poudre d'or qu'il en veut donner, & se retire à son tour : le marchand se rapproche ; si la quantité d'or lui convient, il prend une poignée de sel qu'il met à côté de l'or ; si elle ne lui convient pas il ne met rien ; il se retire ensuite : le Negre se rapproche & emporte son sel ou augmente la quantité d'or, ou retire son or, & tout cela se fait sans parler. Le silence est ordonné par la loi, comme le seul moyen de prévenir les querelles entre les marchands, & il s'observe rigoureusement.
Le bastion de France fait faire la pêche du corail, & en trafique particulierement. Voyez à l'article CORAIL cette pêche & ce commerce.
* BARBARIE (mer de), Géog. c'est ainsi qu'on appelle toute la partie de la Méditerranée, qui baigne les côtes des royaumes de Tunis, d'Alger, & de Fez, & qui s'étend jusqu'aux îles de Sicile & de Sardaigne. On ne comprend quelquefois sous ce nom, que ce qui baigne les côtes d'Alger & de Fez.
* BARBARIE (les seiches ou basses de) Géog. anc. & mod. ce sont les écueils du golfe de Sedra, que les anciens appelloient Syrtis magna ou major. On entend aussi par ce nom, quelquefois, le golfe de Sedra même.
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BARBARIN | S. m. (Hist. nat. Zoolog.) poisson de mer mieux connu sous le nom de surmulet. Voyez SURMULET.
BARBARIN, poisson de riviere, petit barbeau. Voyez BARBEAU. (I)
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BARBARISME | S. m. (terme de Gramm.) le barbarisme est un des principaux vices de l'élocution.
Ce mot vient de ce que les Grecs & les Romains appelloient les autres peuples barbares, c'est-à-dire étrangers ; par conséquent tout mot étranger mêlé dans la phrase greque ou latine étoit appellé barbarisme. Il en est de même de tout idiotisme ou façon de parler, & de toute prononciation qui a un air étranger ; par exemple, un Anglois qui diroit à Versailles, est pas le roi allé à la chasse, pour dire, le roi n'est-il pas allé à la chasse, ou je suis sec, pour dire, j'ai soif, feroit autant de barbarismes par rapport au françois.
Il y a aussi une autre espece de barbarisme ; c'est lorsqu'à la vérité le mot est bien de la langue, mais qu'il est pris dans un sens qui n'est pas autorisé par l'usage de cette langue, ensorte que les naturels du pays sont étonnés de l'emploi que l'étranger fait de ce mot : par exemple, nous nous servons au figuré du mot d'entrailles, pour marquer le sentiment tendre que nous avons pour autrui ; ainsi nous disons il a de bonnes entrailles, c'est-à-dire il est compatissant. Un étranger écrivant à M. de Fenelon, archevêque de Cambrai, lui dit : Mgr, vous avez pour moi des boyaux de pere. Boyaux ou intestins pris en ce sens, sont un barbarisme, parce que selon l'usage de notre langue, nous ne prenons jamais ces mots dans le sens figuré que nous donnons à entrailles.
Ainsi il ne faut pas confondre le barbarisme avec le solécisme ; le barbarisme est une élocution étrangere, au lieu que le solécisme est une faute contre la régularité de la construction d'une langue ; faute que les naturels du pays peuvent faire par ignorance ou par inadvertance, comme quand ils se trompent dans le genre des noms ou qu'ils font quelqu'autre faute contre la syntaxe de leur langue.
Ainsi on fait un barbarisme, 1°. en disant un mot qui n'est point du dictionnaire de la langue. 2°. En prenant un mot dans un sens différent de celui qu'il a dans l'usage ordinaire, comme quand on se sert d'un adverbe comme d'une proposition ; par exemple, il arrive auparavant midi, au lieu de dire avant midi. 3°. Enfin en usant de certaines façons de parler, qui ne sont en usage que dans une autre langue.
Au lieu que le solécisme regarde les déclinaisons, les conjugaisons, & la syntaxe d'une langue, 1°. les déclinaisons, par exemple, les émails au lieu de dire les émaux : 2°. les conjugaisons, comme si l'on disoit il allit pour il alla : 3°. la syntaxe, par exemple, je n'ai point de l'argent, pour je n'ai point d'argent.
J'ajoûterai ici un passage tiré du IV. livre ad Herennium, ouvrage attribué à Cicéron : La latinité, dit l'auteur, consiste à parler purement, sans aucun vice dans l'élocution. " Il y a deux vices qui empêchent qu'une phrase ne soit latine, le solécisme & le barbarisme ; le solécisme, c'est lorsqu'un mot n'est pas bien construit avec les autres mots de la phrase ; & le barbarisme, c'est quand on trouve dans une phrase un mot qui ne devoit pas y paroître, selon l'usage reçu ". Latinitas est quae sermonem purum conservat, ab omni vitio remotum. Vitia in sermone, quominus is latinus sit, duo possunt esse ; solecismus & barbarismus. Solecismus est, cum verbis pluribus consequens verbum superiori non accommodatur. Barbarismus est, cùm verbum aliquod vitiose effertur. Rhetoricorum ad Herenn. Lib. IV. cap. xij. (F)
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BARBAT | ou BARBUE, (Mytholog.) surnom qu'on donnoit à Venus ; en effet, on la représentoit quelquefois avec de la barbe & avec les deux sexes.
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BARBATO | (Géog.) riviere de l'Andalousie, en Espagne, qui coule dans l'évêché de Cadis, & se jette dans l'Océan Atlantique à Porto-Barbato.
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BARBAT | ou PORTO-BARBATO, (Géog. anc. & mod.) petite ville d'Espagne, dans l'Andalousie, sur l'Océan Atlantique, à l'embouchure de la riviere Barbato. C'est, selon quelques Géographes, la ville Belo ou Bello des anciens ; d'autres veulent que Belo ou Bello des anciens soit Conil ou Belona.
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BARBE | le poil qui croît au menton & autres parties du visage, sut-tout des mâles adultes. V. POIL.
La barbe est la premiere marque de puberté ; c'est un indice que la semence commence à se faire ; elle continue, si le sang produit la même humeur prolifique : elle cesse de pousser, ou tombe, si cette secrétion importante est empêchée. On connoît par-là pourquoi la barbe & les cheveux tombent souvent dans la vieillesse. La voix d'un garçon ressemble à celle d'une fille avant la secrétion de la semence, après quoi elle devient grave & rauque, & ce symptome paroît avant la barbe. (L)
La barbe a été assujettie à diverses coûtumes & cérémonies. Kingson nous assûre qu'une partie considérable de la religion des Tartares consiste dans le gouvernement de leur barbe ; qu'ils ont fait une longue & sanglante guerre aux Persans, & les ont déclarés infideles, quoique de leur communion à d'autres égards, précisément à cause que ceux-ci ne se faisoient point la moustache à la mode ou suivant le rite des Tartares.
Athenée remarque, d'après Chrysippe, que les Grecs avant Alexandre, avoient toûjours conservé leur barbe, & que le premier Athénien qui coupa la sienne, fut toûjours après cela dans les médailles surnommé le tondu, . Plutarque ajoûte qu'Alexandre ordonna aux Macédoniens de se faire raser, de peur que les ennemis ne les prissent par la barbe.
Quoi qu'il en soit, nous voyons que Philippe son pere, ainsi que ses prédécesseurs Amyntas & Archelaüs, sont représentés sans barbe sur les médailles.
Pline observe que les Romains ne commencerent à se raser que l'an de Rome 454, quand P. Ticinus leur amena de Sicile une provision de barbiers ; il ajoûte que Scipion l'Africain fut le premier qui fit venir la mode de se raser chaque jour.
Ce fut encore une coûtume parmi les Romains de se faire des visites de cérémonie, à l'occasion de la premiere coupe de la barbe. Les jeunes gens commençoient à se faire couper la barbe depuis l'âge de 21 ans, jusqu'à celui de 49 ; passé 49 ans, il n'étoit plus permis, selon Pline, de ne pas porter la barbe longue. Ils enfermoient leur premiere barbe dans une petite boîte d'or ou d'argent, qu'ils consacroient à quelque divinité, & sur-tout à Jupiter Capitolin, comme Suétone le remarque de Néron. Les 14 premiers empereurs se firent raser jusqu'au tems de l'empereur Adrien, qui rétablit l'usage de porter la barbe : Plutarque dit que le motif de ce prince fut de cacher les cicatrices qu'il avoit au visage.
Tous ses successeurs l'imiterent jusqu'à Constantin. Les barbes reparurent sous Héraclius, & tous les empereurs Grecs l'ont portée depuis. Les Goths & les Francs ne portoient qu'une moustache, jusqu'à Clodion, qui ordonna aux François de laisser croître leur barbe & leurs cheveux, pour les distinguer des Romains. Les anciens philosophes & les prêtres des Juifs portoient de longues barbes. On veut que ce soit aussi l'origine du nom des Lombards, Longobardi quasi Longo-barbati. Il y a un canon du concile de Carthage, qui défend aux clercs de porter de longs cheveux & de longues barbes : clericus nec comam nutriat, nec barbam ; ce qui se concilie difficilement avec cette leçon, nec barbam tundat. Grégoire VII. dit que le clergé d'Occident a toûjours été rasé. Aujourd'hui les Occidentaux se font raser, & les Grecs au contraire, les Turcs & presque tous les Orientaux ont conservé la mode de porter de longues barbes.
On usoit anciennement de grandes cérémonies en bénissant la barbe ; & l'on voit encore les prieres qui se disoient dans la solennité de sa consécration, lorsque l'on tonsuroit un clerc. Voyez TONSURE.
Les gens de qualité faisoient raser leurs enfans la premiere fois par des hommes aussi qualifiés qu'eux, ou plus même ; & ceux-ci devenoient par ce moyen les parreins ou les peres adoptifs des enfans. Voyez ADOPTION.
Il est vrai qu'anciennement on devenoit parrein du garçon précisément en lui touchant la barbe ; aussi voit-on dans l'Histoire qu'un des articles du traité entre Clovis & Alaric, fut que ce dernier lui toucheroit la barbe, afin de devenir le parrein de Clovis. Voyez PARREIN.
A l'égard des ecclésiastiques, la discipline a considérablement varié sur l'article de la barbe ; on leur a quelquefois enjoint de la porter, à cause qu'il y a quelque chose d'efféminé à se la faire, & qu'une barbe longue sied bien à la gravité du clergé ; d'autres fois on l'a défendue comme suspecte de cacher de l'orgueil sous un air vénérable. L'église greque & la romaine ont été long-tems aux prises à ce sujet depuis leur séparation. Ceux de l'église de Rome semblent avoir encore eu plus de goût pour se raser afin de contredire les Grecs ; ils ont même fait certaines constitutions expresses de radendis barbis.
Les Grecs, de leur côté défendent la cause des grandes barbes avec un zele ardent, & sont très-scandalisés de voir dans les églises romaines des images de saints qui n'ont point de barbe. On trouve que par les statuts de quelques monasteres, les moines laïques devoient laisser croître leur barbe, & les prêtres se raser, & que l'on bénissoit avec beaucoup de cérémonies les barbes de tous ceux qui étoient reçus dans les couvens.
En certains pays, c'est porter le deuil que de laisser croître sa barbe ; en d'autres c'en est un que de se raser. Le pere le Comte remarque l'extravagance des Chinois dans leur affectation de porter de grandes barbes, eux à qui la nature n'en a donné que de fort petites, qu'ils ont la folie de cultiver avec un grand soin, enviant beaucoup le bonheur des peuples de l'Europe à cet égard, & les considérant comme les premiers hommes du monde, à cause de leur barbe.
Les Russiens portoient encore leur barbe, il n'y a que très-peu d'années, quand le Czar Pierre I, leur ordonna de se raser ; mais nonobstant son ordre, il fut contraint de tenir sur pié un bon nombre d'officiers, pour la couper de haute lutte à ceux que l'on ne pouvoit réduire autrement à s'en défaire. C'est une remarque de saint Chrysostome, que les rois de Perse avoient leur barbe tissue, & nattée avec un fil d'or. Quelques-uns des premiers rois de France faisoient noüer & boutonner leur barbe avec de l'or. (G)
BARBE D'UNE COMETE, (Astron.) c'est le nom qu'on donne à ces especes de rayons qu'envoye une comete, vers la partie du ciel où son mouvement paroît la porter. Voyez COMETE.
C'est en quoi la barbe de la comete est distinguée de sa queue, qui se dit des rayons poussés vers la partie d'où il semble que son mouvement l'éloigne. Voyez QUEUE. En un mot la barbe de la comete est une espece de chevelure lumineuse & rayonnante qui la précede, & la queue est une chevelure lumineuse & rayonnante qui la suit. La cause de la queue des cometes & de leur barbe n'est pas trop bien connue. Voyez sur ce sujet les conjectures des Philosophes, au mot COMETE. (O)
BARBE ou plûtôt BARBETTE, (terme de l'Art militaire) tirer en barbe ou à barbette, c'est tirer le canon par-dessus le parapet, au lieu de le tirer par les embrasures, auquel cas le parapet ne doit avoir que trois piés & demi de hauteur ; au-dessus de l'endroit où le canon est placé. On fait ordinairement de petites élévations de terre aux angles flanqués des ouvrages, pour y placer du canon qu'on tire à barbette. Ces élévations sont aussi appellées barbettes. On donne ce même nom au canon qui est tiré de ces élévations ; parce qu'on prétend que le canon en tirant de-là, par-dessus ce parapet, lui fait pour ainsi dire la barbe, en brûlant l'herbe de sa partie supérieure. (Q)
BARBE d'un vaisseau, (Marine) les barbes d'un vaisseau sont les parties du bordage de l'avant, auprès du rinjot, c'est-à-dire vers l'endroit où l'étrave s'assemble avec la quille.
BARBE, sainte-barbe, gardiennerie, chambre des canonniers ; c'est ainsi que se nomme, en Marine, la chambre des canonniers, à cause qu'ils ont choisi sainte Barbe pour patrone. La sainte-barbe est un retranchement de l'arriere du vaisseau, au-dessus de la soute, & au-dessous de la chambre du capitaine. Le timon passe dans la sainte-barbe. Les vaisseaux de guerre y ont ordinairement deux sabords pratiqués dans l'arcasse ; on l'appelle aussi gardiennerie, à cause que le maître canonnier y met une partie de ce qui regarde les ustensiles de son artillerie. Voyez Planche IV. fig. 1. n°. 107. (Z)
BARBE, (Manége) on appelle ainsi un cheval de Barbarie, qui a la taille menue & les jambes déchargées, & qui est fort estimé pour sa vigueur & sa vitesse. Voyez CHEVAL.
Les barbes sont ordinairement d'une taille déliée, & ont les jambes bien écartées. C'est une maxime que les barbes meurent, mais ne vieillissent jamais, parce qu'ils conservent leur vigueur jusqu'à la fin : c'est pourquoi on en fait des étalons. Leur feu, selon le duc de Newcastle, dure autant que leur vie.
On dit que ces chevaux étoient autrefois sauvages, & qu'ils couroient çà & là dans les forêts de l'Arabie, & que ce ne fut qu'au tems du Cheque Ismaël qu'on commença à les dompter pour la premiere fois. On assûre qu'il y a des barbes en Afrique, qui devancent les autruches à la course, qu'on vend ordinairement dix mille livres, ou comme dit Dapper mille ducats, ou cent chameaux. On les entretient toûjours maigres ; & on les nourrit fort peu avec quelques grains & de la pâte, ou comme dit Dapper, avec du lait de chameau qu'on leur donne soir & matin. On conserve la généalogie des chevaux barbes, avec le même soin qu'on fait en Europe celle des grandes familles ; & on ne les vend jamais sans produire leurs titres de noblesse. Il y en a qu'on fait descendre en droite ligne de l'illustre cheval du grand Dalid.
La race des chevaux a fort dégénéré dans la Numidie, les Arabes ayant été découragés de la conserver par les officiers turcs, qui étoient assûrés de s'en rendre maîtres. Les Tingitaniens & les Egyptiens ont aujourd'hui la réputation de conserver la meilleure race, tant pour la taille que pour la beauté. Les plus petits de ces derniers ont ordinairement seize palmes, & tous sont formés, suivant leur maniere de s'exprimer, comme la gazelle.
Les bonnes qualités d'un cheval de Barbarie (outre celles qu'on lui suppose de ne jamais se coucher, & de ne point bouger lorsque le cavalier vient à laisser tomber sa bride) sont d'avoir une longue allure, & de s'arrêter court, s'il le faut, en pleine course.
Le barbe n'est pas si propre à être étalon pour avoir des chevaux de manége, que pour des coureurs ; car il engendre des chevaux longs & lâches : c'est pourquoi il ne faut point avoir de sa race pour le manége, s'il n'est court de la tête à la croupe ; fort, raccourci, & d'une grande vivacité, ce qui se trouve dans peu de barbes.
BARBE ou SOUS-BARBE, (Manége) est la partie de la tête du cheval qui porte la gourmette. C'est proprement le bout ou plûtôt la jonction des os de la ganache. Voyez GANACHE.
BARBES ou BARBILLONS, (Maréchallerie) ce sont de petites excroissances de chair longuettes, & finissant en pointe : qui sont attachées au palais sous la langue du cheval, qui l'empêchent de manger, & qu'on ôte pour cette raison. (V)
BARBE, en Serrurerie, est une partie du pêne, elle a la forme de dents qu'on voit ordinairement à sa partie inférieure, quelquefois à la supérieure, & à l'une & à l'autre. Voyez Planche III. de Serrurerie, en V & en T. La clé en tournant dans la serrure, les rencontre & fait avancer ou reculer le pêle ou pêne.
Il y a différentes sortes de barbes ; des barbes perdues ou volantes ; ce sont celles qui sont mobiles ; & qui peuvent descendre & monter. Elles ne font pas corps avec le pêne, elles y sont seulement ajustées ; & c'est par le méchanisme qu'employe l'ouvrier qu'elles paroissent ou disparoissent. On trouvera à l'article SERRURE, plusieurs exemples de ces barbes, Voyez SERRURE.
BARBE DE BOUC, tragopogon, (Hist. nat. botan.) genre de plante dont la fleur est à demi-fleurons portés chacun sur un embryon, & soûtenus par un calice fendu en plusieurs parties sans être écailleux.
Lorsque cette fleur est passée, chaque embryon devient une semence revêtue d'une membrane ou d'une enveloppe garnie d'une aigrette, & attachée sur la couche. Tournefort, Inst. rei herb. Voy. PLANTE. (I)
* Le tragopogon pratense, luteum, majus, aime les lieux champêtres, les prés, les pâturages & les terres grasses ; il fleurit en Mai & en Juin, & il ne tarde pas à répandre sa graine : il redonne des fleurs en Juillet & en Août.
Sa racine échauffe & humecte ; elle est salutaire dans les maladies de poitrine ; son suc lactée agglutine les ulceres récens, pousse par les urines, & excite les graviers à sortir. Il y en a qui mangent la racine cuite, quand elle est tendre : mais ils sont en petit nombre.
BARBE DE CHEVRE, barba caprae, (Hist. nat. bot.) genre de plante à fleur en rose, composée de plusieurs pétales disposés en rond : le pistil sort d'un calice d'une seule piece, & devient dans la suite un fruit composé de plusieurs petites gaînes rassemblées en forme de tête. Chaque gaîne renferme une semence ordinairement oblongue. Tournef. Inst. rei herb. Voyez PLANTE. (I)
* La barba caprae, floribus compactis, a la feuille d'un goût d'herbe salé & gluant, & rougissant un peu le papier bleu ; sa racine le rougit beaucoup ; elle est styptique & un peu amere. Il y a apparence que le sel de cette plante approche du sel ammoniac, mais uni avec beaucoup de soufre & assez de terre. Elle donne par l'analyse des liqueurs acides, du sel volatil concret, beaucoup de soufre, & assez de terre : aussi est-elle sudorifique, cordiale & vulnéraire ; la décoction de sa racine est bonne dans les fievres malignes. Le vin où on la fait bouillir est salutaire dans les cours de ventre, la dyssenterie, le crachement de sang, & les blessures internes. Un gros de son extrait est sudorifique : mais il en faut continuer l'usage pendant deux ou trois jours. Il en faut prendre un gros le matin, autant l'après-midi, & le soir la même dose, avec un grain de laudanum.
BARBE DE JUPITER, barba Jovis, (Hist. nat. bot.) genre de plante dont la fleur est légumineuse ; le pistil sort du calice, & devient dans la suite une silique fort courte & presqu'ovale, qui renferme une semence arrondie. Tournefort, Institut. rei herb. Voyez PLANTE. (I)
* On ne lui attribue aucune propriété medicinale.
BARBE RENARD, tragacantha, (Hist. nat. bot an.) genre de plante à fleur légumineuse, le pistil sort du calice, & devient dans la suite une silique divisée selon sa longueur en deux loges remplies de quelques semences qui ont ordinairement la figure d'un petit rein. Ajoûtez aux caracteres de ce genre, que les feuilles naissent par paires sur une côte terminée par un piquant. Tournefort, Institut. rei herb. Voyez PLANTE. (I)
* La tragacantha croît dans les provinces méridionales de la France & en Italie : mais elle ne donne sa gomme que dans les pays orientaux.
On tire de sa racine la gomme adragant des boutiques. Voyez ADRAGANT.
* BARBE a plusieurs autres acceptions : voici les principales. Il se dit des petites arêtes qu'on remarque aux poissons plats, & qui leur servent de nageoires (voyez POISSON, NAGEOIRES) : des franges mollettes dont les plumes sont garnies depuis le haut du tuyau jusqu'à l'extrémité (voyez PLUME) : des poils dont certains épis de blé sont hérissés (voyez BLE, éPI) : du poil de certaines étoffes ou usées, ou non ébarbées (voyez DRAPERIE) : de cette espece de duvet qui dénote la corruption & la moisissure des confitures gâtées : des petites molécules métalliques, ou grains de limaille, qui restent attachés aux arêtes de tous les corps métalliques limés, après qu'on les a limés, & qu'on enleve, ou avec le fraisoir, ou avec la lime même, ou avec la pierre, ou avec le brunissoir.
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BARBÉ | adj. en terme de Blason, se dit des coqs & des dauphins, dont la barbe est d'un autre émail que leur corps.
Boucherat, dont il y a eu un chancelier, d'azur au coq d'or bequé, membré, enté, & barbé de gueules. (V)
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BARBEAU | S. m. barbus, (Hist. nat. Zoolog.) poisson de riviere ainsi nommé, parce qu'il a quatre barbillons, deux aux coins de la bouche, & deux au bout du museau, qui est allongé & pointu. Le barbeau n'a point de dents ; ses yeux sont petits ; la prunelle est noire & environnée d'un cercle doré ; la fente des oüies est petite. On a remarqué que ce poisson vit assez long-tems hors de l'eau. La ligne qui s'étend sur les côtés, depuis les oüies jusqu'à la queue est peu sensible ; le dos est d'une couleur mêlée de verd & de jaune ; le ventre est blanc. Il a une nageoire sur le dos qui tient à un fort aiguillon ; deux au bas des oüies ; deux autres sous le ventre qui sont jaunes ; & au-delà de l'anus une autre nageoire qui est rougeâtre. La chair du barbeau est blanche & molle ; il y a beaucoup d'arêtes ; elle est d'assez bon goût, surtout lorsque le poisson est gros. Rondelet, voyez POISSON. (I)
* BARBEAU, (Matiere med.) il faut préférer les petits barbeaux aux grands : il faut pour être bons qu'on les ait pêchés dans des eaux pures & loin des rives. Le barbeau nourrit, mais il est difficile à digérer ; ses parties les plus estimées sont le soie & la tête.
LE BARBEAU, (Pêche) est fort avide à l'appât ; mais il est rusé, à moins que l'épouvante ne le prenne ; alors il se croit fort en sûreté s'il a la tête cachée : la pêche s'en fait de la même maniere que celle de l'anguille.
BARBEAU, plante. Voyez BLUET.
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BARBECINS | (Géog.) royaume d'Afrique, dans la Guinée, vis-à-vis le cap-Verd. On dit que les filles s'y font des cicatrices, & s'agrandissent la bouche en se séparant les levres pour se rendre plus jolies.
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BARBEIER | BARBOTER, FRISER, verbe neut. On dit en Marine, la voile barbeie, lorsque le vaisseau étant trop près du vent, le vent rase la voile, & lui étant presque parallele, la bat de côté & d'autre sans la remplir. Cette agitation continue jusqu'à ce qu'elle ait pris vent, & alors elle ne barbeie ou ne frise plus. Quand on a mis le vent sur les voiles, il faut qu'elles barbeient. Il ne faut pas confondre mettre le vent & prendre le vent. Voyez VENT. (Z)
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BARBELA | (Géog.) riviere d'Afrique, dans le Congo : elle passe à S. Salvador, & se jette dans le Zaire, un peu au-dessus de son embouchure dans l'Océan.
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BARBELIOTS | ou BARBORIENS, sub. m. pl. secte de Gnostiques, qui disoient qu'un Eon immortel avoit eu commerce avec un esprit vierge appellé Barbeloth, à qui il avoit accordé successivement la prescience, l'incorruptibilité, & la vie éternelle, que Barbeloth un jour plus gai qu'à l'ordinaire, avoit engendré la lumiere, qui perfectionnée par l'onction de l'esprit, s'appella Christ : que Christ desira l'intelligence & l'obtint ; que l'intelligence, la raison, l'incorruptibilité, & Christ s'unirent ; que la raison & l'intelligence engendrerent Autogene ; qu'Autogene engendra Adamas l'homme parfait, & sa femme la connoissance parfaite ; qu'Adamas & sa femme engendrerent le bois ; que le premier ange engendra le S. Esprit, la Sagesse, ou Prunic ; que Prunic ayant senti le besoin d'époux, engendra Protarchonte, ou premier prince, qui fut insolent & sot ; que Protarchonte engendra les créatures ; qu'il connut charnellement Arrogance, & qu'ils engendrerent les vices & toutes leurs branches. Pour relever encore toutes ces merveilles, les Gnostiques les débitoient en Hébreu, & leurs cérémonies n'étoient pas moins abominables, que leur doctrine étoit extravagante. Voyez Théodoret.
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BARBERIE | subst. f. terme qui se trouve employé dans les statuts des maîtres Perruquiers, & qui signifie l'art de raser & de faire la barbe & les cheveux. Voyez BARBIER.
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BARBERINO | (Géog.) ville d'Italie, dans la Toscane, dans le Florentin, au pié de l'Apennin, sur la riviere de Siere. Long. 28. 55. lat. 44. 5.
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BARBET | S. m. (Chasse) gros chien à poil frisé, qu'on instruit à rapporter, qui va à l'eau, & qu'on dresse à la chasse du renard. On tond les barbets, & leur poil entre dans la composition des chapeaux.
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BARBETS | S. m. pl. (Géog.) habitans des vallées du Piémont, de Lucerne, d'Angrone, de Pérouse, & de S. Martin.
BARBET, poisson de riviere, mieux connu sous le nom de barbeau. Voyez BARBEAU. (I)
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BARBEYRA | (Géog.) petite ville de France, dans le bas Languedoc, au diocese de Carcassonne.
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BARBEZIEUX | (Géog.) petite ville de France, en Saintonge, avec titre de Marquisat.
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BARBIER | S. m. artisan qui fait la barbe. Il y a à Paris deux communautés, qui, suivant leurs statuts, ont droit de tenir boutique ouverte pour faire la barbe, & d'y mettre des bassins pour enseigne.
La premiere est celle des maîtres Chirurgiens, dont les bassins de l'enseigne doivent être jaunes : la seconde est celle des Perruquiers, dont les bassins sont blancs. Voyez CHIRURGIE.
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BARBILLE | S. f. (à la Monnoie) ce sont des especes de petits filamens ou pointes qui sont aux flancs, & que l'on emporte en les agitant les uns contre les autres dans un crible de fer.
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BARBILLON | S. m. (Hist. nat. Zoolog.) petit barbeau, poisson de riviere. Voyez BARBEAU. (I)
BARBILLON, (Hist. nat. Zoolog.) barbe ou pendant charnu qui fait partie du corps de certains poissons. Le nombre & la position des barbillons varient dans les différentes especes ; ils sont le plus souvent autour de la bouche, comme dans le barbeau, le surmulet, la baudroie, &c. Voyez Rondelet, liv. III. ch. xxvj. (I)
BARBILLONS, s. m. pl. (Fauconn.) est une maladie qui survient à la langue des oiseaux de proie, & qui leur est causée, à ce qu'on croit, par un rhûme chaud qui tombe sur les glandes de la gorge, & les fait enfler.
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BARBITON | (Hist. ancienne) nom d'un instrument des anciens. On ne sait point ce que c'étoit. Les anciens & les modernes l'ont souvent confondu avec la lyre. M. Dacier conjecture qu'il étoit à corde ; & faisant venir barbiton de barumiton, qui signifie grosse corde de lin, il en conclut que c'étoit un instrument à grosses cordes : ce qu'il y a de certain, c'est que le lin étoit en usage pour les instrumens de musique, avant que l'on eût trouvé l'art d'employer au même usage les boyaux des bêtes. Horace l'appelle lesbien, lesboum barbiton, ode 1. liv. I. & ode XXXII. même livre, Lesbio primum modulate civi : " vous barbiton, qui avez été touché la premiere fois par au citoyen de Lesbos " ; c'étoit Alcée, à qui il attribue l'invention du barbiton.
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BARBONNE | (Géog.) petite ville de France en Champagne, généralité de Châlons.
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BARBORA | (Géog.) ville maritime d'Afrique au royaume d'Adel, sur le détroit de Babel-Mandel. Il y a une île de ce nom qu'on appelle aussi Alondi, dans la mer Rouge, à l'occident de la baie de Barbora. Lat. environ 10. 45. long. 64. 32.
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BARBOT | S. m. c'est ainsi qu'on appelle sur les galeres celui qui fait le poil aux forçats.
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BARBOTE | S. f. barbota, (Hist. nat. Zoolog.) poisson qui se trouve dans des rivieres & des lacs dont les eaux sont tranquilles. Il a un barbillon au bout de la mâchoire inférieure ; ses dents sont courtes & menues ; le corps est gluant & couvert de petites écailles ; sa couleur est mêlée de roux & de brun, avec des taches noires ondoyantes. Ce poisson a deux nageoires près des oüies, deux au-dessous, & au-delà de l'anus une autre nageoire qui s'étend jusqu'à la queue. Il a sur le dos une pareille nageoire qui se prolonge jusqu'à la queue, & devant cette nageoire une autre plus petite. La barbote ressemble beaucoup à la lote : cependant elle a le bec plus mince, la queue plus menue & plus pointue, & le ventre plus gros. Le foie de la barbote est fort grand à proportion du corps du poisson. Rondelet. Voyez POISSON. (I)
BARBOTE, (Mat. med.) Mustela offic. Schrod. 330. Le foie, le ventricule, & l'arrête de ce poisson, sont d'usage en Medecine. Le foie suspendu dans un vaisseau de verre, & exposé à un degré moderé de chaleur, se convertit en une liqueur jaune fort salutaire, pour dissiper les taies & éclaircir la vûe. On recommande son ventricule dans les maladies de l'uterus ; il chasse les vuidanges & appaise la colique ; son arrête pulvérisée, guérit l'épilepsie, selon Schroder. (N)
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BARBOTINE | S. f. (Hist. nat. bot & Mat. med.) semen contra, semen sanctum, ou semen sanctonicum, est une semence menue, amere, chaude & dessicative, propre à faire mourir les vers qui s'engendrent dans le corps humain, sur-tout dans celui des petits enfans. Voyez VER.
Cette semence est menue, brune, oblongue, amere, & d'une odeur forte & desagréable. Il faut la choisir récente, verdâtre, d'un goût amer, aromatique & desagréable. Elle croît dans la Perse, sur les frontieres de Moscovie. On nous l'apporte d'Alep. &c.
Les Naturalistes ne sont point d'accord sur la plante qui produit cette semence, sur laquelle J. Bauhin a donné une longue dissertation. Quelques auteurs veulent que le semen contra soit la graine d'une espece d'absinthe appellée santonicum ou marinum absinthium : d'autres disent qu'elle est la graine de la tanésie ; d'autres enfin, celle de l'aurone.
Voici ce qu'en dit M. Tavernier, dans le second tome de ses voyages. " Pour ce qui est de la semencine, ou poudre à vers, on ne peut pas la recueillir comme on fait les autres graines. C'est une herbe qui croît dans les prés, & qu'il faut laisser mûrir ; & le mal est que lorsqu'elle approche de sa maturité, le vent en fait tomber une grande partie entre les herbes, où elle se perd : c'est ce qui la rend chere.
Comme on n'ose la toucher de la main, parce qu'elle en seroit plûtôt gâtée, & que même quand on en fait usage, on la prend dans une écuelle ; lorsqu'on veut recueillir ce qui est resté dans l'épi, on a recours à cet expédient. On a deux paniers à anse ; & en marchant dans les prés, on fait aller un des paniers de la droite à la gauche, & l'autre de la gauche à la droite, comme si l'on fauchoit l'herbe, & toute la graine tombe ainsi dans ces paniers ". Voyez SEMEN CONTRA & VERMIFUGE. (N)
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BARBOUD | (Géog.) île de l'Amérique, l'une des Antilles, au nord d'Antigoa.
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BARBOUILLER | v. act. & neutre. Quand il est actif, il est synonyme à salir ; quand il est neutre, il est synonyme à mal parler, mal peindre, mal écrire.
BARBOUILLER, terme d'Imprimeur. Lorsqu'une feuille imprimée est atteinte de noir dans les marges, ce qui ne peut arriver que par l'inattention & la malpropreté de l'ouvrier de la presse, on dit que cet ouvrier barbouille, & que la feuille est barbouillée.
BARBOUILLER, en Peinture, se prend toûjours en mauvaise part : barbouiller un tableau ; il a barbouillé ce tableau, &c. à moins qu'on ne parle d'un homme dont le métier est de barbouiller une porte, des murailles, des treillages, &c. en ce cas on dit, un barbouilleur. Barbouiller un jeu de paume, un plancher, une menuiserie, &c. J'ai fait barbouiller ma maison depuis le haut jusqu'en-bas.
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BARBUE | S. f. rhombus laevis, (Hist. nat. Zoolog.) poisson de mer très ressemblant au turbot, tant à l'intérieur qu'à l'extérieur, à l'exception des aiguillons. La barbue n'en a aucun ni en-dessus, ni en-dessous : elle est plus large & plus mince que le turbot. Rondelet la nomme turbot sans piquans. Voyez TURBOT, POISSON. (I)
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BARBURES | S. f. se dit en grande Fonderie, de toutes ces inégalités qu'on apperçoit sur une piece fondue au sortir de la fosse ou du moule, & qu'il faut reparer au ciseau. Voyez GRANDE FONDERIE & BALEVRE.
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BARBUS | adj. pris subst. (Hist. ecclés.) c'est ainsi qu'on nommoit les freres convers de l'ordre de Grammont, parce qu'ils portoient la barbe grande. Comme ils avoient le maniement des biens temporels, ils vouloient aussi usurper le gouvernement de l'ordre, & réduire les prêtres sous leur obéissance : mais ils perdirent leur cause. Mezeray, au regne de Philippe-Auguste. (G)
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BARBUSINKOI | (Géog.) ville d'Asie, dans l'empire Russien, sur le bord oriental du lac Baikal, à l'endroit où la riviere de Barbusigga se jette dans le lac.
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BARBY | (Géog.) ville d'Allemagne dans la haute Saxe, capitale du comté de son nom, sur l'Elbe.
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BARBYTHAC | ou BARBYTACE, (Géog.) ancienne ville du royaume de Perse, dont Pline dit que les habitans travailloient à amasser de l'or pour l'enfoüir, non par avarice, mais par mépris, & dans le dessein de priver les hommes d'un métal si dangereux.
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BARCA | (Géog.) grande contrée d'Afrique, à l'orient du royaume de Tripoli.
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BARCADE | BARCADE
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BARCELONE | (Géog.) ville d'Espagne, capitale de la Catalogne, sur la Méditerranée. Long. 19. 50. lat. 41. 25.
BARCELONE, (Géog.) petite ville de France en Guienne, dans l'Armagnac.
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BARCELONETTE | (Géog.) petite ville de France, dans le Dauphiné, capitale de la vallée de son nom. Long. 24. 23. lat. 44. 26.
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BARCELOR | (Géog.) ville d'Asie, dans les Indes, sur la côte de Malabar, entre Goa & Mangalor. Long. 92. lat. 13. 45.
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BARCELOS | (Géog.) ville de Portugal, avec titre de duché, dans la province d'entre Douro & Mino, sur la Sourille. Long. 9. 20. lat. 41. 20.
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BARCENA | (Géog. anc. & mod.) lac de l'Abyssinie en Afrique, au royaume d'Amara, sur les confins du Zanguebar, sous la ligne. On croit que c'est le Caloë de Ptolomée.
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BARCKSHIRE | (Géog.) province d'Angleterre au midi d'Oxford : Reading en est la capitale.
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BARD | (Géog.) ville d'Allemagne, dans la Poméranie citérieure, & dans la seigneurie de même nom, avec château & port sur la mer Baltique.
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BARDANE | S. f. lappa ; (Hist. nat. bot.) genre de plante dont la fleur est à fleurons découpés, portés chacun sur un embryon, & soûtenus par le calice. Ce calice est composé de plusieurs écailles terminées chacune par un crochet, qui attache ordinairement les têtes de cette plante aux vêtemens. Lorsque la fleur est passée, ces embryons deviennent des semences garnies d'aigrettes fort courtes. Tournefort, Inst. rei. herb. Voyez PLANTE.
* BARDANE, (la) personata lappa major, (Mat. med.) a la feuille amere ; le papier bleu n'en est pas teint. Son pédicule est douçâtre ; sa racine a d'abord le même goût : mais ensuite on y découvre celui d'artichaut. Elle rougit un peu le papier bleu ; ce qui fait conjecturer que le sel ammoniac y est un peu plus développé que dans la feuille. On tire de cette plante par l'analyse, du sel volatil concret ; & l'on peut penser que son sel approche de l'ammoniac, & qu'il est nitreux, puisqu'il y a détonation quand on brûle la feuille.
La bardane est diurétique, sudorifique, pectorale, hystérique, vulnéraire, fébrifuge. Sa racine & sa feuille sont salutaires dans la pleurésie. On en fait prendre l'eau à grands verres, après avoir fait prendre les germes d'une douzaine d'oeufs frais, délayés dans un demi-verre de la même eau. Sa décoction purifie le sang, & soulage ceux qui ont des maux vénériens. Il faut la préférer dans la petite vérole, à la tisane de scorzonere.
Les auteurs lui attribuent beaucoup d'autres propriétés. Voyez l'hist. des Plantes des environs de Paris.
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BARDARIOTES | S. m. pl. (Hist. anc.) soldats de la garde de l'empereur de Constantinople. Ils étoient vêtus de rouge, couverts d'un bonnet à la Persane, appellé augurot, & bordé de drap couleur de citron, & armés de bâtons & de baguettes, pour éloigner le peuple du passage de l'empereur. Ils veilloient aux portes du palais. Ils étoient Persans d'origine. Ils avoient pris le nom de bardariotes, du fleuve Bardarius, sur lequel un des empereurs, qu'on ne nomme pas, les avoit transportés. Nicétas leur donne les noms de bardouques & de manclavites. Leur poste à l'armée étoit au septentrion de la tente impériale, où ils faisoient la garde. Ils obéissoient au primicerius ou comite de la cour. Macri pense que les bardariotes sont les mêmes que les barbutes.
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BARDE | S. f. (Hist. mod.) c'est, en vieux langage, l'armure des chevaux des anciens chevaliers & soldats qui étoient équipés de tout point ; elle étoit de fer ou de cuir, & couvroit le cou, le poitrail, & les épaules du cheval ; c'est ce qu'on appelloit equi cataphracti. (G)
BARDE ou PANNEAU, (Manege & Sellier) longue selle qui n'a ni fer, ni bois, ni arçons, & qui est faite de grosse toile piquée & bourrée. Grison & plusieurs autres auteurs Italiens veulent qu'on se serve au manege d'une bardelle pour les poulains, & d'un caveçon à mettre sous leur nez ; c'est une invention qui ne sert qu'à perdre le tems ; on appelle en Italie ceux qui trottent les poulains en bardelle, cavalcadours ou scozzoni. (V)
* BARDE, (île de) Géog. île d'Asie, sur la côte de Malabar, au nord & à peu de distance de Goa.
BARDE, adj. terme de Blason, il se dit d'un cheval caparaçonné.
Riperda, au pays de Groningue, de sable au cavalier d'or, le cheval bardé & caparaçonné d'argent. (V)
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BARDEAU | S. m. (Couvreurs) ces ouvriers appellent ainsi de petits morceaux de mairin débité en lattes de dix à douze pouces de long sur six à sept de large, dont ils se servent pour couvrir des bâtimens peu considérables. Si ces lattes sont faites de douves de vieilles futailles, on les appelle aussi des bardeaux.
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BARDENOCHE | S. f. (Commerce) étoffe dont il est fait mention dans le tarif de la douanne de Lyon, qui se fabrique dans le royaume, mais qu'on ne connoît point à Paris.
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BARDER | v. act. c'est, parmi les Cuisiniers, couvrir une piece de viande d'une bande de lard coupée fort mince, pour ralentir l'action du feu sur cette piece, qui se secheroit trop sans cette précaution, ou même brûleroit, & pour en relever le goût.
BARDER, c'est, en Architecture, l'action de charger une pierre sur un chariot, sur un bar (Voyez BAR & CHARIOT) pour la mener du chantier au pié du las. (P)
BARDER un cheval, (Manege) c'est lui mettre une barde. Voyez BARDE. Dans les carrousels, on voit des chevaux bardés & caparaçonnés. Voyez CARROUSEL. (V)
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BARDES | S. m. pl. (Hist. anc.) ministres de la religion chez les anciens Gaulois, qui habitoient dans l'Auvergne & dans la Bourgogne, où ils avoient un collége. Leur profession étoit d'écrire en vers les actions immortelles des héros de leur nation, & de les chanter au son d'un instrument qui ressembloit assez à la lyre. Voici comme en parle Lucain :
Vos quoque qui fortes animas, belloque peremptas,
Laudibus in longum vates dimittitis aevum,
Plurima securi fudistis carmina Bardi.
Les Bardes & les Druides différoient en ce que ceux-ci étoient les prêtres & les docteurs de la nation, & que les Bardes n'étoient que poëtes ou chantres. Cependant l'autorité de ceux-ci, quoiqu'inférieure à celle des Druides, étoit si respectée des peuples, qu'on raconte qu'ils avoient fait quitter les armes à des partis prêts à se charger. Larrey, Pasquier, & Bodin, leur donnent le titre de prêtres & de philosophes ; & Cluvier y ajoûte celui d'orateurs, mais sans fondement. Strabon, plus voisin du tems auquel ont vécu les Bardes, compte trois sectes parmi les Gaulois, les Druides, les Bardes, & les Evates. Les Bardes, ajoûte-t-il, sont chantres & poëtes ; les Evates, prêtres & philosophes ; & les Druides, à la philosophie naturelle, c'est-à-dire la Physique, ajoûtent la science des moeurs. Mais Hormius réduit ces sectes à deux classes, les Bardes & les Druides ; d'autres n'en font qu'un corps, sous le nom générique de Druides. Cluvier, fondé sur ce que Tacite traitant des moeurs des anciens Germains, fait mention de leurs chants & de leurs poëmes historiques, veut que ces peuples ayent eu aussi des poëtes nommés Bardes.
Bochart fait dériver ce nom de parat, chanter. Cambdem convient avec Festus que Barde signifie un chantre, en Celtique, Bard : d'autres tirent ce nom de Bardus, ancien Druide, fils de Drys, le cinquieme roi des Celtes. (G)
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BARDESANISTES | S. m. pl. (Hist. ecclés.) nom d'une secte d'hérétiques, ainsi appellés de Bardesanes Syrien, qui vivoit dans le second siecle & demeuroit à Edesse, ville de Mésopotamie. Si l'on en croit saint Epiphane, Bardesanes fut d'abord catholique, & se distingua autant par son savoir, que par sa piété, ayant écrit contre Marcion & d'autres hérétiques. Eusebe, au contraire, en parle comme d'un homme qui a toûjours été dans l'erreur. Il fut d'abord engagé dans celles de Valentin, en reconnut une partie, en retint une autre, & y en ajoûta de nouvelles de son propre fonds. Quoiqu'il admit l'ancien & le nouveau Testament, il adoptoit aussi quelques livres apocryphes ; & dans un de ses écrits, intitulé du Destin, il soûtenoit que les actions des hommes étoient nécessitées, & que Dieu lui-même étoit sujet au destin. Il imagina aussi plusieurs générations d'Eons, voyez EON, & nia la résurrection des morts. Ses sectateurs allerent plus loin, & nierent l'incarnation & la mort de Jesus-Christ, prétendant que c'étoit seulement un corps phantastique qui étoit né de la Vierge Marie, & que les Juifs avoient crucifié ; par où ils retomboient dans l'hérésie de Marcion, que leur maître même avoit combattue. Strumzius a écrit l'histoire des Bardesanistes. (G)
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BARDEURS | S. m. pl. terme de bâtiment : on nomme ainsi les ouvriers qui chargent les pierres sur un chariot, ou qui les portent sur une civiere ou sur un bar, du chantier au pié du tas. Voyez BAR. (P)
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BARDEWICK | (Géog.) ancienne & grande ville d'Allemagne, dans la basse Saxe, maintenant bourg, sur la riviere d'Ilmeneau.
Il y a aussi un bourg de ce nom dans le comté de Hollande.
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BARDIS | S. m. c'est, en Marine, un batardeau fait de planches sur le haut du bord d'un vaisseau, pour empêcher l'eau d'entrer sur le pont lorsqu'on couche ce vaisseau sur le côté pour le radouber.
BARDIS, ce sont encore des séparations de planches, qu'on fait à fond de cale, pour charger des blés & d'autres grains ; les unes se font en-travers, les autres en long. (Z)
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BARDIT | (Hist. anc.) c'est ainsi que le chant des anciens Germains est appellé dans les auteurs Latins qui ont écrit de ces peuples. Les Germains n'ayant encore ni annales ni histoires, débitoient toutes leurs rêveries en vers : entre ces vers, il y en avoit dont le chant s'appelloit bardit, par lequel ils s'encourageoient au combat, & dont ils tiroient des augures, ainsi que de la maniere dont il s'accordoit à celui de leurs voix.
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BARDOCUCULLU | ou BARDAICUS CUCULLUS, selon Casaubon, (Hist. anc.) partie du vêtement des Gaulois de Langres & de Saintes ; c'étoit une espece de cape qui avoit un capuchon commode pour ceux qui ne vouloient pas être connus dans les rues. Martial lui donne la forme d'un cornet d'épices. Il y en a, dit le savant P. Montfaucon, qui croyent, & non sans fondement, que ce capuchon avoit une appendice, & qu'il tenoit à une cape ou à la penula. Quoi qu'il en soit, on convient que le cucullus étoit la même chose que le bardocucullus ; que cet ajustement venoit des Gaulois ; qu'on s'en servoit particulierement dans la Saintonge, & que la débauche en fit passer l'usage à Rome où on le trouva très-propre pour courir la nuit, & incognito, des avantures amoureuses :
Si nocturnus adulter,
Tempora santonico velas adoperta cucullo.
Satyr. viij.
Je ne sais s'il reste encore en Saintonge quelque vestige de l'usage du cucullus & de la cape : mais les femmes du peuple portent encore aujourd'hui à Langres une espece de cape qui leur est particuliere, & dont elles n'ignorent pas l'avantage.
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BARDOT | (Maréch. & Manege) on appelle ainsi un petit mulet. (V)
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BARDT | (Géog.) ville d'Allemagne, dans le duché de Poméranie, proche la mer Baltique. Long. 31. lat. 54. 23.
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BAREITH | (Géog.) petite ville d'Allemagne en Franconie, dans le marggraviat de Culmbach. Long. 29. 20. lat. 50.
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BARENTON | (Géog.) petite ville de France, dans la basse Normandie, au diocese d'Avranches, vers la source de l'Ardée.
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BARFLEUR | (Géog.) ville de France en Normandie, dans le Cotentin. Long. 16. 23. 35. lat. 39. 40. 17.
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BARFOULS | S. m. pl. (Commerce) étoffe qui se fait à Cantor, qui sert de vêtemens aux Negres, & qu'ils échangent avec les Européens contre du fer.
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BARGA | (Géog.) petite ville de Toscane en Italie, sur la riviere de Scorchio, dans le Florentin.
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BARGE | oiseau. Voyez PETIT CORLIEU.
BARGE, s. f. (Marine) anciennement on se servoit de ce mot pour dire une barque ou esquif : à Londres, on dit encore la barge du maire.
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BARGELACH | S. m. (Hist. nat. Ornith.) oiseau de Tartarie, qui habite les lieux deserts, où il est la proie des faucons : il a la grosseur de la perdrix ; la forme de queue de l'hirondelle, & les piés du papeguai, avec le vol très-rapide : assemblage de caracteres, qui pouvant convenir à un grand nombre d'oiseaux, désignent assez mal le bargelach.
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BARGEMONT | (Géog.) ville de France, au diocese de Fréjus.
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BARGENY | (Géog.) ville de l'Ecosse méridionale, capitale de la province de Carriek. Long. 12. 38. lat. 55. 40.
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BARGUA DE REGOA | (Géog. anc. & mod.) ville des Callaïques Bracariens, appellée Tantobriga ; ce n'est plus qu'un petit village au quartier de Tra-los-montes, province de Portugal, à l'occident de Bragance.
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BARGUETTE | S. f. sur les rivieres, espece de bateau de quarante piés de long ou environ, qui sert à passer les chevaux, & à porter des cordages pour la manoeuvre de la riviere.
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BARI | (Géog.) ville d'Italie, au royaume de Naples, capitale de la terre de même nom. Long. 34. 32. lat. 41. 31.
* BARI, (Géog.) province d'Italie au royaume de Naples, bornée par le golfe de Venise, la Capitanate, la Basilicate, & la terre de Lecce. Bari en est la capitale.
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BARIGA DE MORE | S. f. (Commerce) soie que les Hollandois apportent des Indes orientales. Il y a la fine & la commune ; elles viennent l'une & l'autre sur les vaisseaux de la compagnie.
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BARIQUICEMETO | (Géog.) contrée de la Terre-ferme, dans l'Amérique méridionale & le midi de la province de Venezuela, le long de la riviere de Bariquicemeto, qu'on nomme aussi Baria, ou Rio de Saint-Pietro, qui se jette dans l'Orenoque.
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BARIS | (Géog.) ancienne ville de Pamphilie, dans la Pisidie, contrée de l'Asie mineure, aux environs du mont Taurus.
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BARJAC | (Géog.) petite ville de France en Languedoc, diocèse d'Usès.
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BARJOLS | (Géog.) ville de France en Provence. Long. 23. 50. lat. 43. 35.
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BARKAN | (Géog.) ville de Hongrie, proche le pont de Gran.
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BARKLEY | (Géog.) ville d'Angleterre dans la province de Glocester, sur la Saverne. Long. 15. 12. lat. 51. 43.
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BARLEMONT | (Géog.) ville de Hainault dans les Pays-Bas, sur la Sambre proche Mons.
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BARLENGA | (Géog. anc. & mod.) petite île de Portugal, vers la côte de l'Estramadure, vis-à-vis Santarin. Il y en a d'autres du même nom, entre lesquelles est Barlengote ; toutes s'appellent les îles de Barlenga. Barlenga étoit connu des anciens sous le nom de Londobris & d'Erythia.
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BARLETTE | (Géog.) ville d'Italie au royaume de Naples, dans la terre de Bari, sur le golfe de Venise. Long. 34. 2. lat. 41. 30.
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BARLINS | S. m. c'est, dans les manufactures en soie, le nom d'un noeud qu'on fait au commencement & à la fin des pieces pour les tordre, noüer ou remettre. Voyez TORDRE & REMETTRE.
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BARLONG | adj. usité, en Architecture, pour signifier un plan ou un corps dont la base a plus d'étendue à la face qu'au côté : oblong est le contraire. (P)
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BARLOVENTO | (LES ILES DE) Géog. partie septentrionale des Antilles ; on les appelle aussi insulae ad ventum, parce qu'elles sont exposées au vent. On compte entre ces îles, Anguila, S. Martin, S. Barthelemi, S. Eustache, S. Christophe, Nieves, ou l'île des Neiges, la Barbade, Antigoa, Mont-serrat, la Guadeloupe, la Desirade, la Marigalante, la Dominique, la Martinique, Ste. Lucie, S. Vincent, la Barboude, Bequia, Grenadille, Grenade, & Tabago.
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BARNABITES | S. m. pl. (Hist. ecclés.) congrégation des clercs réguliers ainsi nommés de l'église de S. Barnabé à Milan, où ils firent leurs premiers exercices. Ils reconnoissent pour instituteurs Jacques Antoine Morigia, Barthelemi Ferrera, & François Marie Zacharie de Cremone, gentilshommes Milanois, qui jetterent les premiers fondemens de leur ordre en 1533. Ils furent alors approuvés par Clément VII. & par Paul III. en 1553. Quoiqu'ils soient vulgairement connus sous le nom de Barnabites, leur véritable titre est celui de Clercs réguliers de la congrégation de S. Paul. Ils portent l'habit noir, à peu près semblable à celui des Jésuites. Cette congrégation a produit beaucoup d'hommes distingués par leur savoir & leur piété. Les catéchismes, les missions, & l'instruction de la jeunesse dans les sciences & les lettres, sont leurs emplois ordinaires. Ils ont plusieurs colléges en Italie, en Savoie, & quelques-uns en France ; sur-tout celui de Montargis, fondé par la libéralité des ducs d'Orléans. (G)
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BARNACLE | BARNAQUE, voyez BERNACLE.
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BARNACLES | (terme de Blason Anglois) Voyez BROYE.
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BARNAGASSE | (Géog.) royaume d'Afrique entre la haute Ethiopie, le Nil & la mer Rouge, le long de la côte d'Abex ; Barra en est la capitale.
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BARNEVELDT | (Géog.) île de l'Amérique dans le détroit de Magellan, au midi de la terre de Feu. Long. 340. lat. 56. 20.
Il y a une autre île de même nom proche du Japon, lat. 34. 10.
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BARNSTABLE | (Géog.) ville d'Angleterre dans le Devonshire, sur la riviere de Taw, avec port. Long. 13. 42. lat. 51. 10.
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BAROCHE | (Géog.) ville d'Afrique dans les états du Mogol, au royaume de Gusarate, sur la riviere de Nerdaba. Lat. 21. 55.
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BAROCHÉ | adj. terme de Peinture dont on se sert pour exprimer que le pinceau n'a pas tracé nettement un contour, & qu'il a éclaboussé de la couleur sur le fond ; on dit : vous barochez toûjours vos contours, Voyez RECHAMPIR. (R)
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BAROCO | (Log.) terme qui désigne le quatrieme mode d'argument de la seconde figure. Un syllogisme en baroco a la majeure universelle affirmative, & la mineure & la conclusion particulieres négatives. Voyez SYLLOGISME.
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BAROMETRE | S. m. (Phys.) Le barometre est un instrument qui sert à mesurer la pesanteur de l'atmosphere & ses variations, & qui marque les changemens du tems. Voyez ATMOSPHERE & TEMS.
Ce mot est composé de , poids, & de , mesure. On confond ordinairement, quoique mal-à-propos, le barometre avec le baroscope : celui-ci cependant ne fait, suivant la signification du mot, que marquer les altérations du poids de l'atmosphere : le barometre non-seulement marque ces altérations, mais encore les mesure. Voyez BAROSCOPE.
Le barometre & ses usages sont fondés sur l'expérience de Toricelli, ainsi nommée de Toricelli son inventeur. On prend un tuyau de verre rempli de mercure, dont un côté est fermé hermétiquement, & dont l'autre bout qui est ouvert est plongé dans une cuvette remplie de mercure : quand le poids de l'atmosphere diminue, la surface du mercure qui se trouve vers le bout inférieur, & sur laquelle l'air presse, se trouve moins comprimée : ainsi le mercure qui est dans le tuyau descend ; & au contraire si le poids de l'air augmente, le mercure monte ; car la colonne de mercure suspendue dans le tuyau est toûjours égale en pesanteur au poids de l'atmosphere qui pese dessus, comme il est démontré à l'article TORICELLI.
Dans cette explication nous supposons que la pression de l'air vienne uniquement de son poids, qui comprime les parties supérieures sur les inférieures. Cependant il est certain que plusieurs causes concourent à altérer la pression de l'air : en général la cause immédiate de la pression d'un fluide élastique tel que l'air, c'est la vertu élastique de ce fluide, & non son poids. On ne doit donc attribuer la suspension du mercure dans le barometre au poids de l'air, qu'autant que ce poids est la cause principale de la pression de l'air. En effet le mercure du barometre se soûtient aussi bien dans une chambre exactement fermée qu'en plein air ; parce que l'air de cette chambre, quoiqu'il ne porte pas le poids de l'atmosphere, est comprimé de la même maniere que s'il le portoit. Si l'air demeure de même poids, & que la compression de ses parties vienne à augmenter ou à diminuer par quelque cause accidentelle, alors le mercure descendra ou montera dans le barometre, quoique le poids de l'air ne soit pas augmenté. Traité des fluides, Paris, 1744. p. 61.
Il y a différentes especes de barometres, dont nous allons détailler ici les principales.
Barometre commun. La construction du barometre commun est telle. On remplit de mercure un tuyau de verre, fermé hermétiquement par sa partie supérieure, ayant son diametre d'environ 1/10 de pouce, & sa longueur au moins de 31 ; on remplit ce tuyau de maniere qu'il ne reste point d'air mêlé avec le mercure, & qu'aucun autre corpuscule ne s'attache aux parois du tuyau. Pour y réussir, on peut se servir d'un entonnoir de verre terminé par un tuyau capillaire, & remplir le tube par le moyen de cet entonnoir.
On peut encore chasser les bulles d'air par deux autres méthodes : la plus ordinaire est de remplir de vif-argent tout le tube, à la réserve d'un pouce environ qu'on laisse plein d'air ; on bouche avec le doigt l'orifice du tuyau, on le renverse, & en faisant promener la bulle, on lui fait entraîner avec elle toutes les petites bulles imperceptibles, après quoi on acheve de remplir le tube. Mussch. ess. de Phys.
L'autre méthode consiste à faire chauffer un tube presque plein sur un brasier couvert de cendres ; on le tourne continuellement ; & la chaleur raréfiant les petites bulles d'air, les fait sortir par l'orifice.
Quand on a ainsi rempli le tuyau jusqu'au bord, on bouche exactement avec le doigt son orifice, ensorte qu'il ne puisse s'introduire d'air entre le doigt & le mercure ; ensuite on plonge le tuyau dans un vaisseau plein de mercure, de façon cependant que le tuyau ne touche pas le fond du vase : à la distance de 28 pouces de la surface du mercure, sont attachées 2 bandes divisées en 3 pouces, & ces pouces sont subdivisés en un certain nombre de plus petites parties ; enfin on applique le tuyau sur une planche de bois, pour empêcher qu'il ne se brise : on laisse découvert le vaisseau où le tuyau est plongé, ou si l'on veut on le couvre, afin qu'il n'y entre point de poussiere, & le barometre est achevé.
Au lieu de plonger le tuyau dans un vaisseau, on se contente souvent d'en recourber l'extrémité, de sorte que le tuyau a deux branches verticales, dont l'une est beaucoup plus petite que l'autre, & se termine par une espece d'entonnoir fort large, qui se trouve rempli de mercure, sur la surface duquel l'atmosphere presse, & fait monter ou descendre le mercure du tuyau d'une maniere d'autant plus sensible, que la variation du poids de l'atmosphere est plus grande. C'est le barometre simple ou ordinaire. Voyez Pl. Pneumat. fig. 1.
On a essayé plusieurs fois s'il étoit possible de rendre les variations du barometre plus sensibles, afin de pouvoir mesurer la pression de l'atmosphere avec plus de justesse ; ce qui a donné lieu à un grand nombre de barometres de différentes structures, comme le barometre à roue, le barometre diagonal, le barometre horisontal, &c.
Descartes, & ensuite Huyghens, se sont servis d'un tube A B, (fig. 2.) fermé en A, & ayant une portion C D plus grosse que le reste : la moitié de la partie C D, de même que la partie supérieure du tube, est remplie d'eau ; & l'autre moitié de C D, de même que la partie inférieure du tube, est remplie de mercure. Il est vrai que dans cette sorte de barometre la colonne suspendue étant plus grande, rendoit la variation plus sensible : mais l'air renfermé dans l'eau s'évaporant par degrés, remplissoit l'espace vuide du haut du tube, & rendoit par-là la machine défectueuse. Huyghens imagina donc qu'il valoit mieux placer dans le barometre le mercure & l'eau, de la maniere suivante : A D G (fig. 3. est un tuyau recourbé fermé hermétiquement en A, & ouvert en G ; les vaisseaux cylindriques B C & F E, sont égaux, & distans d'environ 29 pouces l'un de l'autre ; le diametre du tuyau est d'environ une ligne ; celle de chaque vaisseau est de 15, & leur profondeur d'environ 10 : le tuyau est rempli de mercure, qui est suspendu entre le vaisseau F E & le vaisseau B C, l'espace qui reste jusqu'à A étant vuide d'air & de mercure : enfin on verse de l'eau commune mêlée avec une sixieme partie d'eau régale (pour que l'eau ne se gele pas) dans le tuyau E F G, de maniere qu'elle contrebalance en partie le mercure C D F. Or quand le mercure s'éleve le long du tuyau A D, au-dessus du niveau du mercure qui est contenu en F E, ce mercure en s'élevant fait équilibre avec l'atmosphere ; si la pression de l'atmosphere augmente, la colonne de mercure s'augmentera, conséquemment l'eau descendra ; si l'atmosphere presse moins, la colonne de mercure descendra, & l'eau montera. Par-là ce barometre indique beaucoup mieux les plus petites variations de l'air, que le barometre commun : car au lieu de deux pouces, le fluide pourra varier beaucoup davantage ; ce qui vient tant de la grosseur des cylindres par rapport aux tuyaux, que de la pesanteur de l'eau, qui est moindre que celle du mercure, & dont les variations doivent être par conséquent plus sensibles ; car 14 pouces d'eau équivalent à un pouce de mercure. En élargissant les diametres des cylindres, la variation sera encore plus sensible. Il y a pourtant encore cet inconvénient, que l'eau s'évaporera, & rendra les variations défectueuses ; quoiqu'on puisse en quelque façon prévenir l'évaporation en mettant une goutte d'huile d'amandes douces sur la surface de l'eau.
Mais cette goutte d'huile produit un autre inconvénient ; car elle s'attache aux parois du tuyau, & fait par conséquent que l'eau après l'avoir traversée, & quelquefois s'être débordée, rend le tuyau opaque.
Le plus grand défaut sur-tout est causé par le froid & le chaud, qui font que la liqueur du tuyau E F G est comme dans une boule, & un tuyau de thermometre. En effet, cette liqueur se raréfie par la chaleur, & se condense par le froid ; d'où il arrive que la hauteur de l'eau varie par la chaleur seule, & fait par conséquent varier le mercure ; desorte que les variations de cette espece de barometre sont presqu'autant l'effet de la chaleur que de la pression de l'air.
On a tâché depuis peu de rendre ces barometres plus simples, en substituant de l'esprit-de-vin à l'eau, & des boules aux cylindres : mais l'esprit-de-vin est très-sujet à s'évaporer & à se dilater par la chaleur ; & d'ailleurs le changement des cylindres en forme de poires, empêche de faire des échelles justes. Au reste il est visible que la marche de ce barometre est contraire à celle du barometre ordinaire ; tandis que le mercure baisse dans ce dernier, l'eau & l'esprit-de-vin s'élevent dans l'autre, & réciproquement. Mussch.
Ainsi les défauts auxquels ce barometre peut être sujet, ont obligé quelques autres à avoir recours au barometre horisontal ou rectangle A B C D (fig. 4.) Ce barometre est formé de maniere que la branche B C soit verticale, & la branche C D horisontale. Il est joint par l'extrémité de sa branche perpendiculaire à un vaisseau A B, & les variations sont marquées sur la branche horisontale C D : or l'intervalle ou l'espace de variation peut être aussi étendu que l'on veut ; car plus le tuyau B C D sera petit par rapport au vase A B, plus les variations du mercure dans le tuyau A B, feront varier le mercure qui est dans la partie C D ; & par conséquent les plus petites variations seront très-sensibles. Le diametre du tuyau C D étant donné, il sera aisé de trouver le diametre du vaisseau A B, tel que les parties de l'échelle horisontale dans le tuyau D C, correspondantes aux parties de l'échelle du vaisseau A B soient aussi grandes qu'on voudra, & ayent entr'elles la même proportion que les parties de l'échelle dans le vaisseau A B, puisque le diametre du vaisseau est à celui du tuyau en raison sous-doublée réciproque des parties de leurs échelles : de même les diametres de C D & A B étant donnés, aussi bien que la hauteur du mercure dans le vaisseau, la hauteur du mercure dans le tuyau est trouvée par cette proportion ; comme le quarré du diametre du vaisseau est au quarré du diametre du tuyau, ainsi les parties de l'échelle du mercure dans le tuyau, sont aux parties correspondantes à l'échelle du mercure dans le vaisseau.
La construction de ce barometre, de même que du barometre d'Huyghens, est établie sur un théorème d'Hydrostatique ; savoir, que les fluides qui ont la même base, pesent en raison de leur hauteur perpendiculaire, & non pas de la quantité de leur matiere : ainsi la même pesanteur de l'atmosphere soûtient le vif-argent dont le tuyau A C D & le vase A B sont remplis, comme elle auroit soûtenu le mercure dans le seul tuyau A B C. Voyez HYDROSTATIQUE. Ce barometre a aussi de grands défauts.
Car, en premier lieu, l'air s'introduit quelquefois entre les particules du mercure dans le tuyau C D, & les écarte par conséquent les unes des autres lorsque le tuyau est trop large. Pour remédier à cet inconvénient, on ne donne qu'une ligne de diametre, ou même moins, à la partie C D, on a soin que ce petit tuyau soit neuf & bien net, & on se sert de mercure qui soit bien purgé, à l'aide du feu, de tout l'air qu'il contient : malgré tout cela, le mercure se salit avec le tems en-dedans par l'air qui y entre, ce qui produit fort souvent quelque séparation entre les parties du mercure, lorsqu'il se meut de D vers C, ou du moins il s'en forme de petits globules, lesquels s'arrêtent çà & là dans la partie antérieure du tuyau qui se trouve vuide.
Il se présente encore un autre inconvénient bien plus considérable, qui vient du grand frottement du mercure contre le verre, & qui empêche ce barometre d'être à beaucoup près aussi sensible que le barometre ordinaire. En effet, d'habiles observateurs nous assûrent avoir remarqué souvent que si le mercure hausse ou baisse d'une demi-ligne ou d'une ligne entiere dans le barometre ordinaire, il demeure encore à sa même place dans le tuyau C D : mais si la variation augmente dans le barometre ordinaire, il se fait alors dans le tuyau C D un très-grand mouvement, ensorte que la marche de ce barometre est beaucoup moins réglée que celle du barometre ordinaire. Mussch.
Ces raisons font que plusieurs personnes préferent le barometre diagonal, dans lequel l'espace de variation est beaucoup plus grand que dans le barometre commun, & duquel ils croyent les variations plus régulieres que celles des autres. Le chevalier Morland a imaginé pour cet effet un tuyau incliné B E C (fig. 5.) car il est évident que le mercure s'élevant à la même hauteur dans un barometre droit, & dans un barometre recourbé, ses variations seront beaucoup plus sensibles dans le tuyau incliné B E C, que si ce tuyau étoit vertical, & d'autant plus sensibles, que le tuyau sera plus incliné, puisque le mercure pour s'élever, par exemple, d'une ligne en hauteur perpendiculaire, aura trois ou quatre lignes ou même davantage à parcourir dans la longueur du tuyau. Cette invention est pourtant sujette à plusieurs inconvéniens ; car la surface du mercure dans le tuyau B E, n'est pas parallele à l'horison, mais elle est convexe & inclinée ; or cela posé, il est difficile de savoir à quel point on doit fixer la hauteur du mercure. De plus le coude qui est en B, rend la surface du tuyau fort raboteuse en cet endroit-là, & les inégalités de la surface produisant une résistance à l'abaissement ou à l'élevation du mercure, les variations de ce barometre ne sont pas aussi promtes qu'elles le devroient être. Ce dernier inconvénient est d'autant plus grand, que le tuyau B E C fait un plus grand coude en B ; ainsi la sensibilité, pour ainsi dire, des variations de ce barometre, est alors compensée par leur lenteur. Mussch.
Barometre à roue : c'est une invention du docteur Hook, qui rend les altérations de l'air plus sensibles ; il est composé d'un barometre commun vertical, auquel on ajoûte deux poids A & B (fig. 5.) pendus à une poulie, dont l'un est en liberté à l'air, & l'autre restant sur la surface du mercure dans le tuyau, s'éleve & s'abaisse avec lui. Le poids A communique son mouvement à la poulie, & cette poulie a autour de son pivot une longue aiguille L K, qui montre sur un grand cercle gradué M N O P, les variations de la hauteur du mercure dans le barometre. De plus, le tuyau du barometre est surmonté d'un gros globe A B, & la petite boule B, qui est en liberté dans l'air, est à-peu-près égale en pesanteur à la boule A. Comme le globe A B a beaucoup de diametre par rapport à celui du tuyau, un abaissement peu considérable du mercure dans ce globe, peut faire monter le mercure dans le tuyau F A, jusqu'à la hauteur de trois pouces. Supposons maintenant que toute la circonférence de la poulie F D soit de trois pouces, elle fera donc un tour lorsque le mercure montera ou s'abaissera de trois pouces, desorte que l'aiguille L K fera alors un tour aussi ; & si le diametre du cercle M N O P est d'un pié, le mercure ne pourra s'abaisser ou s'élever de trois pouces, que l'aiguille ne parcoure environ trois piés. Ce barometre montre assez bien les variations considérables de la hauteur du mercure : mais aussi-tôt que le mercure vient à baisser ou à monter dans le tuyau A F, & qu'il ne fait par conséquent que commencer à devenir un peu convexe ou un peu concave, la petite boule A n'a pas assez de mouvement pour faire tourner un peu la poulie S D, parce que cette poulie est sujette à quelque frottement sur son axe : ce qui empêche d'appercevoir les variations peu considérables de la hauteur du mercure : mais lorsque la poulie commence à se mouvoir, son mouvement est plus grand qu'il ne devroit être alors. Voilà sans-doute un inconvénient auquel on ne peut remédier qu'avec beaucoup de peine. Ce barometre est encore sujet à d'autres inconvéniens qu'on a eu soin de marquer dans les Transactions Philosoph. n°. 185. page 241. aussi n'en fait-on aucun usage. Mussch.
Barometre conique. C'est une machine plûtôt curieuse qu'utile. Elle consiste en un tuyau conique verticalement placé, dont l'extrémité supérieure, & qui est la plus petite, est fermée hermétiquement. Ce barometre n'a point de vaisseau ou de bassin, sa figure conique y suppléant, pourvû que l'extrémité inférieure de ce tuyau ait un diametre fort petit : car alors le mercure se soûtient de lui-même dans ce tuyau, étant soûtenu par les particules de l'air, comme par un piston solide ou un fond. Quand ce tuyau est rempli, si le mercure s'y soûtient, son poids est équivalent au poids de l'atmosphere ; & si l'atmosphere varie, le mercure montera ou descendra. Ainsi quand le poids de l'atmosphere s'augmente, le mercure est chassé dans la partie du tuyau la plus étroite R ; par ce moyen la colonne est étendue, & son poids est augmenté. Au contraire quand l'atmosphere décroît, le mercure s'abaisse dans la partie la plus large du tuyau ; & par ce moyen sa colonne est plus courte & sa pression par conséquent est affoiblie.
Pour rendre ceci plus intelligible, supposons que ce barometre soit représenté par le tuyau A B (fig. 6.) qui est conique, & que ce tuyau étant renversé, se trouve rempli de trente pouces de mercure depuis A jusqu'à C ; & comme la variation du mercure dans le barometre est de trente à vingt-sept pouces, supposons que la même quantité de mercure A C dans la partie inférieure du tuyau D B, ait la hauteur D B de vingt sept pouces ; alors il est certain que lorsque le mercure se trouvera dans le barometre ordinaire à la hauteur de trente pouces, le mercure dans le tuyau A B occupera l'espace A C ; & quand le mercure sera dans le barometre à vingt-sept pouces, le mercure du tuyau occupera l'espace D B ; ainsi la variation du mercure dans le barometre sera depuis A jusqu'à D, qui est un espace de près de trente pouces, pendant que cette variation ne sera que de trois pouces dans le barometre ordinaire. Ce barometre est de l'invention de M. Amontons. Mussch.
L'inconvénient de ce barometre est que pour empêcher le mercure & l'air de changer de place, & de se mêler ensemble, il faut que le diametre intérieur du tuyau soit très-petit ; & cette petitesse rend le frottement de la liqueur si sensible, qu'elle peut l'empêcher d'agir librement : ainsi cet instrument n'est guere bon que pour les marins, qui n'y regardent pas de si près, & qui s'en servent depuis trente-cinq ans. parce qu'il est fort commode. En effet, il suffit de le renverser lorsqu'on le veut garder, & quand on veut connoître le poids de l'air, il suffit de prendre le tuyau à la main, & de le tenir dans une situation verticale. Pour empêcher que le mercure n'en sorte par en-bas, comme il pourroit arriver dans les mouvemens violens du vaisseau, on met au-dessous du tuyau, proche de B, un peu de coton à-travers lequel l'air passe librement ; & s'il arrive alors par quelque accident qu'il tombe un peu de mercure de la colonne A D, il suffit de retourner le tuyau ; & ce qui est tombé se rejoint d'abord à la colonne. Il y a encore un autre barometre à l'usage des marins. Ce barometre qui a été aussi inventé par le docteur Hook, pour pouvoir servir sur mer, où le roulis du vaisseau rendroit les autres impraticables, n'est autre chose qu'un thermometre double, ou deux tubes à demi remplis d'esprit-de-vin, dont l'un est fermé hermétiquement par les deux bouts, & renferme une certaine quantité d'air ; & l'autre est fermé par un bout, & ouvert par l'autre. Or l'air, comme l'on sait, agit sur l'esprit-de-vin, & le fait monter par deux raisons ; par sa propre gravité, comme dans le tube de Torricelli ; & par sa chaleur, comme dans le thermometre. Si donc les deux tubes sont divisés par degrés, ensorte qu'ils s'accordent l'un avec l'autre au tems où l'air y est renfermé, il s'ensuit que lorsqu'ils s'accorderont encore ensuite, la pression de l'atmosphere sera la même que dans le tems que l'air a été renfermé. Si dans le thermometre qui est ouvert à l'air, la liqueur est plus haute, en considérant en même tems combien l'autre s'éleve ou s'abaisse par l'opération de la chaleur ou du froid, on verra que l'air est plus pesant : au contraire, quand le thermometre ouvert est plus bas en comparaison de l'autre, l'air est plus leger que dans le tems que l'instrument a été divisé par degrés. Mais il faut se ressouvenir que la condensation & la raréfaction de l'air, sur quoi toute cette machine est établie, ne dépendent pas seulement du poids de l'atmosphere, mais qu'elles sont aussi causées par l'action de la chaleur & du froid. C'est pourquoi cette machine ne peut pas être nommée un barometre, mais plûtôt un instrument qui indique les altérations de l'air. Voyez MANOMETRE.
Cependant cet instrument est regardé comme étant fort bon pour faire connoître si le tems doit être mauvais, de même que les changemens de vents, & l'approche du froid. Transact. Philos. n°. 429. pag. 133.
Le barometre statique, dont se sont servis Boyle, Otto de Guericke, &c. est défectueux, tant par l'action du chaud, que parce qu'il est peu précis & peu commode : il consiste en une assez grande bouteille de verre, tenue en équilibre par un poids de cuivre, dans des bassins de balance fort legers : ces deux corps étant d'égale pesanteur, mais d'inégal volume, si le milieu ou fluide dans lequel ils pesent également est changé, le changement de leur poids s'en suivra ; desorte que si l'air devient plus pesant, le corps le plus grand deviendra plus leger en apparence, parce qu'il perdra plus de son poids que le plus petit, qui est le plus dense : mais si le milieu est plus leger, alors le corps le plus grand l'emportera sur le plus petit.
PHENOMENES du barometre. Ces phénomenes sont différens, & les auteurs ne sont pas plus d'accord sur leurs causes, que sur l'usage que l'on en peut faire pour prédire les changemens de tems. Sur le haut de la montagne de Snouden en Angleterre, qui a 1240 toises de hauteur, le docteur Halley trouva le mercure de trois pouces huit dixiemes plus bas qu'au pié ; d'où il paroît que le mercure baisse de 1/10 de pouce par trente toises. Derham a fait pareillement des expériences de la hauteur du mercure sur le haut & au pié de cette montagne, & croit qu'il faut 32 toises d'élévation perpendiculaire, pour que le mercure baisse de 1/10 d'un pouce : d'où cet auteur a cru qu'on pouvoit tirer non-seulement la hauteur de l'atmosphere, mais aussi une méthode pour mesurer la hauteur des montagnes. Suivant cet auteur, si le mercure ici bas est à 30 pouces, à 1000 piés de hauteur, il sera à 28 9/10 pouces ; à 2000 piés, à 27 86/100 ; à 3000, 26 85/100 ; à 4000, 25 85/100 ; à 5000, 24 93/100 ; à un mille, 24 67/100 ; à deux mille, 20 29/100 ; à cinq mille, 11 28/100 ; à dix mille, 4 24/100 ; à quinze mille, 1 60/100 ; à vingt mille, 0 95/100 ; à trente mille, 8/1000 ; à quarante mille, 12/1000. Mais on suppose dans ce calcul que l'atmosphere est par-tout d'une densité à-peu-près égale, & que si on la divise en portions d'égale hauteur, le poids de ces portions est presque le même, ce qui est bien éloigné d'être vrai ; car l'atmosphere devient continuellement moins dense à mesure qu'on s'éloigne de la terre, & ainsi une même quantité d'air occupe toûjours un volume de plus en plus grand. C'est pourquoi si on divise l'atmosphere en différentes couches toutes d'une hauteur égale, ces couches peseront d'autant moins qu'elles seront plus éloignées du centre de la terre. M. Mariotte, dans son Essai sur la nature de l'air, a donné un calcul de la hauteur de l'atmosphere, fondé sur les observations du barometre faites au sommet des montagnes. Ce calcul est fondé sur ce principe, que l'air se condense en raison des poids dont il est chargé ; l'auteur trouve 15 lieues environ pour la hauteur de l'atmosphere ; qui est aussi à-peu-près la quantité que M. de la Hire trouve par la théorie des crépuscules. M. Mariotte ajoûte aussi à son calcul un essai de méthode pour déterminer par les mêmes principes la hauteur des montagnes : mais on regarde aujourd'hui assez généralement toutes ces méthodes, comme plus curieuses que sûres & utiles. Voyez ATMOSPHERE.
On a trouvé que la plus grande hauteur du barometre à Londres, étoit à 30 pouces 3/8, & son plus grand abaissement à 28 pouces ; à l'observatoire de Paris, sa plus grande élevation est de 28 pouces 4/10, & sa moindre 26 4/10 sur la mesure du pié de Paris, qui est plus grand de 9/144 que celui de Londres : ces observations s'accordent à celles qui ont été faites par M. Wolf à Hall en Saxe. A Alger le mercure s'éleve à 30 pouces 2/10 ou 3/10 par le vent de nord, quoique ce vent soit souvent accompagné de pluie & d'orage. Il est vrai qu'il y a une expérience dans laquelle la hauteur du mercure surpasse de beaucoup ces nombres ; le mercure étant parfaitement purifié & suspendu dans un tube à la maniere de Torricelli, monte à la hauteur de 75 piés, quoiqu'à la moindre secousse il baisse à la hauteur ordinaire. Ce phénomene n'a pas causé peu d'embarras lorsqu'il a été question d'en découvrir la cause. Voici l'explication que M. Musschenbroeck en donne dans ses essais de Physique. Lorsqu'on a purgé le mercure de l'air qu'il contient, il devient un corps beaucoup plus dense que lorsque l'air se trouvoit placé entre ses parties : ce mercure peut aussi alors s'attacher fort étroitement à la surface du verre ; ce qui fait que ses particules y restent suspendues ; & comme ces particules s'attirent très-fortement, elles soûtiennent des particules voisines, & le mercure demeure suspendu par ce moyen à une très-grande hauteur : mais si on secoue le tuyau, alors les particules du mercure qui étoient contigues au verre en sont détachées, & tout retombe. On peut voir dans l'ouvrage cité l'explication plus détaillée de ce phénomene singulier, & la réfutation des toutes les autres hypothèses qu'on a imaginées pour en rendre raison.
M. Boyle remarque que les phénomenes du barometre sont si variables, qu'il est extrèmement difficile de donner des regles générales de son élevation ou de son abaissement. Il semble cependant que ce soit une regle assez générale, que quand les vents soufflent de bas en haut, le mercure est plus bas : mais cela n'est pas toûjours vrai. L'illustre M. Halley nous a donné les observations suivantes. Dans un tems calme, quand il doit pleuvoir, le mercure est communément bas, & il s'éleve quand le tems doit être serein. Quand il doit faire de grands vents accompagnés de pluie, le mercure descend plus ou moins bas, selon le vent qui souffle. Toutes choses égales, la grande élevation du mercure arrive quand les vents soufflent de l'est ou du nord-est. Après que le vent a soufflé violemment, le mercure, qui, pendant le tems que le vent souffloit étoit fort bas, s'éleve avec rapidité. Dans un tems calme, pendant lequel il gele, le mercure se tient haut. Dans les lieux les plus exposés au nord, le mercure souffre plus de variation que dans les lieux exposés au midi : à Naples il varie rarement de plus d'un pouce ; au lieu qu'à Upminster il varie de 2 5/10 pouces, & à Petersbourg de 3 31/100. Transact. Philos. n °. 434. p. 401. Entre & proche les tropiques, le mercure ne varie que peu ou point du tout.
Le docteur Beal remarque que, toutes choses égales, le mercure est plus haut dans l'hyver que dans l'été, & ordinairement le matin qu'à midi ; qu'il l'est encore dans un tems serein un peu plus que devant ou après, ou que quand il pleut ; & qu'il descend ordinairement plus bas après la pluie qu'auparavant : s'il arrive qu'il s'éleve après qu'il a plû, c'est ordinairement un indice de beau tems. Il arrive cependant des changemens considérables dans l'air, sans que le barometre varie sensiblement.
Par rapport à l'usage des barometres, un habile physicien remarque que par son secours nous recouvrons la connoissance qui est dans les animaux, & que nous avons perdue, parce que nos corps ne sont point exposés à l'air comme les leurs : & parce que nous nous livrons à l'intempérance, & que nous corrompons la sensibilité de nos organes. Par rapport aux prédictions des barometres, M. Halley déjà cité trouve que l'élévation du mercure présage le beau tems après la tempête, & que le vent soufflera de l'est ou du nord-est ; que son abaissement marque que ce seront les vents de sud ou d'oüest qui regneront avec la pluie, ou présage des vents de tempêtes, ou tous les deux ; que dans l'orage, si le mercure vient à s'élever c'est une marque que la tempête passera bien-tôt.
M. Patrick remarque qu'en été l'abaissement du mercure annonce le tonnerre ; & que quand l'orage arrive immédiatement après la chûte du mercure, il est rarement de longue durée : la même chose s'observe du beau tems, s'il arrive immédiatement après l'élévation du mercure. Enfin Derham comparant avec ses observations celles que Scheuczer a faites à Zurich, sur les barometres, remarque que dans le cours de l'année le mercure varie plus à Zurich, quelquefois d'un & même de deux pouces ; & il conclud de-là que la situation de Zurich est de près de 1/24 d'un mille d'Angleterre plus haute que celle d'Upminster. Il trouve d'ailleurs un accord remarquable entre les observations faites à Zurich & les siennes ; un des barometres suivant à peu près les mêmes variations que l'autre : cependant cet accord n'est pas si parfait que celui des barometres des endroits plus proches, comme ceux de Londres, de Paris, &c.
Causes des phénomenes du barometre. Les hypotheses par lesquelles on a voulu expliquer les phénomenes du barometre sont presque infinies. Il est vrai que le poids de l'atmosphere est généralement regardé comme la cause principale des mouvemens du barometre, & les altérations de l'air comme la cause accidentelle ; cependant cette opinion n'est pas suivie universellement. Un savant auteur, par exemple, regarde les changemens du barometre, comme étant causés par le froid & par la chaleur. Il dit avoir souvent remarqué que dans les orages, &c. quand le mercure est bas, il se divise & pousse en en haut des particules, qu'il appelle des especes de pellicules ou d'écorchures ; & il soûtient que toutes les fois que le mercure descend, il est plus ou moins dégagé de ces pellicules : que dans ce mouvement les parties du mercure sont resserrées ensemble, & que c'est par cette raison qu'il descend ; que de plus il s'échappe alors de petites particules d'air, qui étoient renfermées dans le mercure, & qui s'élevant dans la partie supérieure du tuyau, force le mercure à descendre, les colonnes en étant raccourcies par la sortie de ces particules, & par leur position dans la partie supérieure du tuyau : c'est pourquoi, ajoûte-t-il, le mercure s'éleve dans le tems très-froid à la même hauteur que dans le tems très-chaud, entre les deux tropiques, parce qu'il est dans son état naturel ; & il baisse dans les degrés intermédiaires de chaud & de froid, parce qu'il est resserré, & que ses parties sont comme refoulées & comprimées ensemble. Mais ce sentiment ne rend pas de raison fort vraisemblable des phénomenes.
Les variations de l'atmosphere doivent être regardées comme la cause de celles du barometre : mais il n'est pas aisé de déterminer d'où viennent ces variations dans l'atmosphere, puisqu'il est difficile de trouver un seul principe dans la nature auquel on puisse rapporter des variations si grandes & si irrégulieres. Il est probable que les vents qui soufflent de tel ou tel endroit les occasionnent, de même que les vapeurs & les exhalaisons de la terre : les changemens d'air dans les régions voisines, & même le flux & reflux que la lune occasionne dans l'air, peuvent y contribuer également.
Cette derniere cause doit certainement entrer parmi celles qui produisent les variations du barometre : mais son effet ne doit pas être fort considérable à cet égard, quoique l'action de la lune éleve à une hauteur très-grande les eaux de l'Océan. Voici la raison de cette différence : supposons que l'eau s'éleve en pleine mer à la hauteur de 60 piés par l'action de la lune : qu'on mette à la place de l'Océan l'atmosphere ou tel autre fluide qu'on voudra, il est certain qu'il devra s'élever à peu près à la même hauteur ; car l'atmosphere ayant moins de parties que l'Océan, il y aura, à la vérité, une moindre masse à mouvoir, mais aussi la force qui agite cette masse en attirant chacune de ces parties, sera aussi plus petite en même raison. L'air s'élevera donc à la hauteur de 60 piés en montant, & descendra au-dessous de sa hauteur naturelle de l'espace de 60 piés, c'est-à-dire qu'il variera en hauteur de 120 piés en tout. Or le mercure étant 11000 fois plus pesant que l'air, une variation de 120 piés dans une colonne d'air, ne doit faire varier le mercure que d'environ deux lignes. C'est à-peu-près la quantité dont on trouve qu'il doit hausser sous l'équateur, dans la supposition que le vent d'est y fasse 8 piés par seconde. Or comme il y a une infinité d'autres causes qui font varier le barometre, il n'est pas surprenant que l'on n'ait pas distingué la petite variation que l'action du soleil & de la lune y peuvent produire en élevant ou en abaissant les colonnes de l'atmosphere. Cependant il seroit à souhaiter que les observateurs s'y rendissent attentifs dans la suite. Rech. sur les vents. Paris 1746.
Le savant Halley croit que les vents & les exhalaisons suffisent pour produire les variations du barometre ; & d'après cette opinion il en a donné une explication probable : nous allons donner la substance de son discours sur ce sujet. 1°. Ce sont, dit-il, les vents qui alterent le poids de l'air dans un pays particulier, & cela, soit en apportant ensemble & en accumulant une grande quantité d'air, & en chargeant ainsi l'atmosphere dans un endroit plus que dans l'autre, ce qui arrive lorsque deux vents soufflent en même tems de deux points opposés ; soit en enlevant une partie de l'air, & en déchargeant par-là l'atmosphere d'une partie de son poids, & lui donnant le moyen de s'étendre davantage ; soit enfin en diminuant & soûtenant, pour ainsi dire, une partie de la pression perpendiculaire de l'atmosphere, ce qui arrive toutes les fois qu'un seul vent souffle avec violence vers un seul côté, puisqu'on a expérimenté qu'un souffle de vent violent, même artificiel, rend l'atmosphere plus legere, & conséquemment fait baisser le mercure dans le tube qui se trouve proche de l'endroit où se fait ce souffle, & même dans un tube qui en est à une certaine distance. Voyez Transactions Philosophiques, n°. 292.
2°. Les parties nitreuses & froides, & même l'air condensé dans les pays du Nord, & chassé dans un autre endroit, chargent l'atmosphere & augmentent sa pression.
3°. Les exhalaisons seches & pesantes de la terre augmentent le poids de l'atmosphere & sa force élastique, de même que nous voyons la pesanteur spécifique des menstrues être augmentée par la dissolution des sels & des métaux.
4°. L'air etant rendu plus pesant & plus fort par les causes que nous venons de rapporter, devient plus capable de supporter des vapeurs, qui étant mêlées intimement avec lui & y surnageant, rendent le tems beau & serein ; au contraire l'air étant rendu plus leger par les causes opposées à celles que nous venons de dire, devient hors d'état de soûtenir les vapeurs dont il est chargé, lesquelles venant à se précipiter en-bas, se ramassent en nuages, qui par la suite se réunissent en gouttes de pluie. Cela étant ainsi, il paroit assez évident que les mêmes causes qui augmentent le poids de l'air, & le rendent plus propre à soûtenir le mercure dans le barometre, occasionnent pareillement le beau tems & le chaud ; & que la même chose qui rend l'air plus leger & moins capable de soûtenir le mercure, produit les nuages & la pluie : ainsi, 1°. quand l'air est très-leger & que le mercure du barometre est le plus bas, les nuées sont basses & vont fort vîte ; & quand après la pluie les nuages se dissipent & que l'air devenant calme & serein s'est purgé de ses vapeurs, il paroît extrèmement net, & on y peut voir des objets à une distance considérable.
2°. Quand l'air est plus grossier & que le mercure est haut dans le tube, le tems est calme, quoiqu'il soit en même tems quelquefois un peu couvert, parce que les vapeurs sont dispersées également : s'il paroît alors quelques nuages, ces nuages sont hauts & se meuvent lentement ; & quand l'air est très-grossier & très-lourd, la terre est ordinairement environnée de petits nuages épais, qui paroissent y être formés par les exhalaisons les plus grossieres, que l'air inférieur est encore capable de soûtenir : ce que ne peuvent plus faire les parties supérieures de l'air, qui sont trop legeres pour cela.
3°. Ainsi, ce qui est cause qu'en Angleterre, par exemple, le mercure est au plus haut degré dans le tems le plus froid quand le vent est nord ou nord-est, c'est qu'alors il y a deux vents qui soufflent en même tems, & de deux points à peu près opposés ; car il y a un vent de sud-est constant, qui souffle dans l'Océan atlantique à la latitude qui répond à l'Angleterre ; à quoi on peut ajoûter que le vent de nord y amene l'air froid & condensé des régions du nord.
4°. Dans les régions du nord la variation du mercure est plus sensible que dans celles du midi, les vents étant plus fréquens, plus violens, plus variables & plus opposés l'un à l'autre dans les pays septentrionaux que dans les méridionaux.
Enfin, il s'ensuit de-là qu'entre les tropiques la variation du mercure est très-peu sensible, parce que les vents y sont très-modérés, & qu'ils soufflent ordinairement dans le même sens.
Cette hypothese, quoiqu'elle paroisse propre à expliquer plusieurs mouvemens du barometre, n'est pas cependant à l'abri de toute critique : car 1°. si le vent est le seul agent qui produise ces altérations, il ne se fera pas d'altération sensible si le vent ne l'est pas, & il n'y aura jamais de vent sensible sans variation du mercure, ce qui est contraire à l'expérience.
2°. Si le vent est le seul agent, les altérations de la hauteur du mercure doivent être en différens sens dans les différens lieux de la terre, selon que le vent y souffle ou n'y souffle pas ; ainsi, ce qu'un tube perdra à Londres, sera regagné sur un autre à Paris, ou à Zurich, &c. mais selon plusieurs Physiciens, on remarque le contraire : car dans toutes les observations faites jusqu'à présent, les barometres de différens lieux, disent-ils, s'élevent & baissent en même tems, des sorte qu'il faut qu'il y ait une égale altération dans le poids absolu de l'atmosphere, qui occasionne ces variations. Ce fait est-il bien vrai ?
Enfin en omettant toute autre objection, la chûte du mercure avant la pluie, & son élévation après la pluie, semblent être inexplicables dans cette hypothese ; car en supposant deux vents contraires qui chassent les colonnes d'air qui sont au-dessus de Londres, tout ce qu'ils pourront faire, sera de couper une certaine partie de l'air qui est au-dessus de Londres : en conséquence il pourra arriver que le mercure baisse, mais il n'y a pas de raison apparente pour que la pluie s'ensuive. Il est vrai que les vapeurs pourront s'abaisser, mais seulement jusqu'à ce qu'elles viennent dans un air de la même pesanteur spécifique qu'elles ; & arrivées-là, elles y resteront sans descendre plus bas. Leibnitz a tâché de suppléer au défaut de cette hypothese, & d'en donner une nouvelle. Il prétend donc qu'un corps plongé dans un fluide, ne pese avec ce fluide que pendant qu'il en est soûtenu ; desorte que quand il cesse de l'être, c'est-à-dire qu'il tombe, son poids cesse de faire partie de celui du fluide, qui par ce moyen devient plus léger. Ainsi, ajoûte-t-il, les vapeurs aqueuses, pendant qu'elles sont soûtenues dans l'air, augmentent son poids : mais quand elles tombent, elles cessent de peser avec lui, & le poids de l'air, est diminué ; le mercure baisse donc, & la pluie tombe. Mais le principe de Leibnitz est faux, comme il paroît par les expériences du docteur Desaguliers. D'ailleurs, en supposant que les vapeurs par leur condensation sont forcées de descendre, & cessent de peser avec l'atmosphere, elles baisseront jusqu'à ce qu'elles arrivent à la partie de l'atmosphere, qui est de la même pesanteur spécifique qu'elles, &, ainsi que nous l'avons déjà dit au sujet de M. Halley, y resteront suspendues comme auparavant. Si le mercure baisse, ce sera seulement durant le tems de cet abaissement des vapeurs ; car les vapeurs étant une fois fixées & en repos, la premiere pesanteur renaîtra, pour ainsi dire, ou si elle ne revient pas, au moins la pluie ne suivra pas la chûte du mercure.
Quelques auteurs, pour expliquer ces mêmes variations, ont imaginé l'hypothese suivante. Que l'on suppose un nombre de vésicules d'eau flottantes sur une partie de l'atmosphere, & sur une partie déterminée de la surface du globe terrestre ; par exemple, sur A B, fig. 21 ; si les vésicules supérieures sont condensées par le froid des régions supérieures, leur gravité spécifique s'augmentera & elles descendront ; la couche horisontale 1, par exemple, descendra à 2, 2 à 3, &c. là se rencontrant avec d'autres vésicules qui ne sont pas encore précipitées, elles s'amoncellent & se changent en vésicules plus grandes, comme il doit s'ensuivre des lois de l'attraction.
Si nous choisissons le vent pour agent, supposons qu'il souffle horisontalement ou obliquement : dans le premier cas les vésicules 8 seront chassées contre 9, celles-ci contre 10, &c. dans le second cas la vésicule 7 sera chassée contre 4, 8 contre 3, &c. par ce moyen les particules s'augmenteront & formeront de nouvelles & de plus grandes vésicules qu'auparavant ; desorte que leur nombre, qui auparavant étoit, si l'on veut un million, sera alors réduit, par exemple, à 100000.
Mais la même réunion par laquelle leur nombre est diminué, augmente en quelque maniere leur pesanteur spécifique ; c'est-à-dire qu'il y a plus de matiere sous d'égales surfaces : ce qui est aisément prouvé par les principes géométriques ; car dans l'augmentation de la masse des corps homogenes, celle de la surface n'est pas aussi grande que celle de la solidité : celle de la premiere est comme le quarré du diametre ; & celle de l'autre, comme son cube.
Or lorsque la même quantité de matiere se trouve sous une moindre surface, elle doit perdre moins de son poids par la résistance du milieu : car il est évident qu'un corps qui se meut dans un fluide, perd une partie de sa pesanteur par le frottement de ses parties contre celle du fluide. Or ce frottement est évidemment en raison de la surface ; c'est pourquoi la surface devenant moindre à proportion de la masse, la résistance l'est aussi : conséquemment les vésicules, dont la pesanteur, avant la jonction, étoit égale à la résistance du milieu, trouvant cette résistance diminuée, descendront avec une vîtesse proportionnelle à la diminution réelle de leur surface.
Quand elles descendent & qu'elles arrivent aux parties plus grossieres de l'atmosphere, par exemple, aux points 4, 5, &c. leur masse & leur surface sont augmentées par de nouvelles réunions ; & ainsi par de nouvelles & constantes augmentations, elles deviennent de plus en plus capables de surmonter la résistance du milieu, & de continuer leur chûte à-travers toutes les couches de l'air jusqu'à ce qu'elles atteignent la terre ; leur masse étant alors excessivement grossie, forme des gouttes de pluie.
Maintenant dans la descente des vapeurs, il faut considérer comment le barometre est affecté par cette descente. Avant qu'aucune des vésicules commence à baisser, soit par l'action du froid, ou par celle du vent, elles nagent toutes dans la partie de l'atmosphere A B D C, & pesent toutes vers le centre E. Or chacune d'elles demeurant respectivement dans une partie du milieu, qui est d'une pesanteur spécifique égale, perdra une partie de son poids égale à celle d'une partie du milieu qui auroit le même volume ; c'est-à-dire, que chacune d'elle perdra toute sa pesanteur : mais alors cette pesanteur qu'elles auront perdue, sera communiquée au milieu qui pressera sur la surface de la terre A B, avec son propre poids joint à celui de ces vésicules. Supposez alors que cette pression conjointe agisse sur le mercure élevé dans le barometre à trente pouces : par la réunion des vésicules, faite comme nous avons dit ci-dessus, leur surface, & conséquemment leur frottement sont diminués : c'est pourquoi elles communiqueront moins de leur pesanteur à l'air, c'est-à-dire une partie moindre que tout leur poids ; & conséquemment elles descendront avec une vîtesse proportionnelle à ce qui leur reste de pesanteur, ainsi que l'on vient de le dire. Or comme les vésicules ne peuvent agir sur la surface de la terre A B que par la médiation de l'air, leur action sur la terre sera diminuée en même proportion que leur action sur le milieu ; d'où il est évident que la surface de la terre A B sera alors moins pressée qu'auparavant : & plus les vésicules garderont de leur poids qu'elles n'auront point communiqué au milieu, plus elles accélereront leur propre descente ; c'est-à-dire, que la vîtesse de l'abaissement des vésicules ira toujours en augmentant : en effet, quand les vésicules descendent, la masse augmente continuellement, & au contraire la résistance du milieu & la pression sur la terre diminuent, & le mercure baissera par conséquent pendant tout le tems de leur chûte. De-là il est aisé de concevoir que les vésicules qui ont une fois commencé à tomber, continuent ; que le mercure commence à tomber en même tems, & qu'il continue & cesse en même tems qu'elles.
On peut faire une objection contre ce système ; sçavoir que les vésicules étant mises en mouvement, & heurtant contre les particules du milieu, rencontrent une résistance considérable dans la force d'inertie du milieu, par laquelle leur descente doit être retardée, & la pression de l'atmosphere rétablie. On peut ajoûter que la pression additionnelle sera plus grande à proportion de la vîtesse de la chûte des vésicules, une impulsion forte étant requise pour surmonter la force d'inertie des particules contiguës du milieu.
Mais les partisans de l'opinion que nous rapportons, croyent pouvoir renverser cette objection par la raison & l'expérience : car, disent-ils, outre que la force d'inertie de l'air peut être très-foible à cause de son peu de densité, nous voyons que dans l'eau, qui est un milieu fort dense & non élastique, un morceau de plomb, en descendant à-travers le fluide, pese considérablement moins que quand il y est soûtenu en repos. Cependant ce fait est nié par M. Musschenbroeck. Essays de Physique, §. 234.
Nous avons cru devoir rapporter assez au long cette explication qui, quoiqu'ingénieuse, n'a pas, à beaucoup près, toute la précision qu'on pourroit desirer. Mais dans une matiere si difficile, il ne nous reste presque autre chose à faire, que d'exposer ce que les philosophes ont pensé. Voyez une dissertation curieuse, de M. de Mairan, sur ce sujet, Bordeaux, 1715. Voyez aussi Musschenbroeck. Cet auteur regarde avec raison les prédictions du barometre, comme peu sûres.
Voici, selon M. Musschenbroeck, la meilleure maniere de faire un barometre ordinaire ou commun ; ces sortes de barometres étant les meilleurs de tous, à ce qu'il prétend. Premierement on doit prendre du mercure bien pur, & être bien assûre qu'il ne soit pas falsifié ; il faut le passer par un cuir bien net, & le verser dans un poëlon neuf & verni, que l'on couvre d'un couvercle qui s'y ajuste bien. On doit mettre ce poëlon couvert sur un feu de charbon bien pur, & faire bouillir le mercure : il devient alors volatil, mais on le retient à l'aide du couvercle qui est posé dessus. En faisant ainsi bouillir le mercure, on le purifie de l'eau & de l'air qui se tenoient entre ses parties. On doit avoir des tuyaux de verre, nouvellement faits, dont on se sert pour les barometres ; & afin qu'ils ne soient ni sales en-dedans, ni remplis d'air, il faut avoir soin de les faire sceller hermétiquement de chaque côté dans la Verrerie, avant que de les transporter. Lorsqu'on voudra les remplir, on peut les ouvrir par un bout avec une lime, & les tenir pendant ce tems-là près d'un feu oblong, pour les rendre également chauds, & même fort chauds, afin que l'humidité & l'air qui tient aux parois, se détache & se dissipe. Si on néglige de prendre cette précaution, l'air s'y attache avec tant de force, qu'il ne peut être chassé par le mercure qu'on verse dans le tuyau, mais il reste suspendu en plusieurs endroits. Pour réussir encore mieux à purger ce tuyau d'air, on ne fera pas mal d'attacher à un fil d'archal un morceau de chamois ou de cuir, & d'en former comme un piston de pompe, que l'on fera passer dans le tuyau de haut en bas & de bas en haut, à diverses reprises, pour détacher l'air qui y tient. Par ce moyen, le mercure qui est tout bouillant, pourra alors dissiper l'air, en le faisant sortir du tuyau chaud. On forme ensuite d'un tuyau large de barometre un petit entonnoir de verre, & en l'allongeant on le réduit en un tuyau capillaire, lequel doit être un peu plus long que le tuyau qu'on doit remplir. Il faut d'abord bien nettoyer la partie supérieure de ce petit entonnoir, & la rendre bien seche & bien chaude en l'exposant devant le feu : on l'introduit ensuite dans le tuyau du barometre, ensorte qu'il penetre jusqu'au fond, & on verse alors le mercure tout bouillant dans ce petit entonnoir, qui doit être bien chaud, afin que la chaleur du mercure ne le fasse pas sauter en pieces. Dès qu'on verse le mercure, il se précipite en bas, remplit le tuyau, & s'éleve ensuite lentement. On doit avoir soin de verser dans l'entonnoir sans aucune interruption, afin que le mercure continue toujours de tomber sans s'arrêter, & que l'air n'ait pas lieu de s'insinuer entre ses parties. Lorsque le tuyau se trouve plein, on retire doucement le petit entonnoir. Voilà de quelle maniere on peut remplir le tuyau aussi juste qu'il est possible ; & il paroît alors dans toute sa longueur de couleur brune, & sans la moindre petite bulle d'air. Si l'on n'a point de tuyaux scellés, il faut avant que de remplir celui dont on se sert, le bien nettoyer en dedans, en le lavant avec de l'esprit-de-vin bien rectifié, & en attachant au bas d'un fil de laiton une petite courroie en maniere de piston de pompe, que l'on pousse souvent dans le tuyau pour en détacher l'air, qui sans cela ne manqueroit pas d'y rester suspendu. Après avoir ainsi nettoyé ce tuyau, on doit le faire sécher devant le feu, & le chauffer.
BAROMETRE portatif, est un barometre construit de maniere qu'on puisse le transporter d'une place à une autre, sans le déranger.
Il n'y a pas long-tems que le barometre portatif étoit une chose peu commune ; à présent on en fait de portatifs de toutes les sortes ; ils sont tellement construits, que le mercure peut venir tout-à-fait jusqu'à l'extrémité du tube, qui est fermée hermétiquement : cet artifice empêche le mercure de balloter & de se répandre, & ne l'expose point au danger de casser le tube. Pour cela on attache sur le bord de la cuvette où plonge le tuyau, un cuir le plus fin que l'on peut, par le moyen duquel le mercure est contenu dans la cuvette, & on construit le barometre de maniere que sa partie supérieure se termine par un long cou étroit ; par ce moyen l'effort du mercure contre cette partie devient beaucoup moins considérable, & la partie supérieure du barometre est moins en danger de se briser. Mais un tel barometre est peu sûr.
Phosphore du barometre. M. Picard découvrit le premier en 1676 que le mercure de son barometre secoüé dans l'obscurité donnoit de la lumiere : mais quand on voulut faire l'expérience sur d'autres, il s'en trouva fort peu qui eussent ce privilege.
M. Bernoulli ayant fait l'expérience sur son barometre, trouva qu'étant secoüé fortement dans l'obscurité, il donnoit une foible lueur.
Comme l'on pouvoit soupçonner que la lumiere, ou du moins une grande lumiere, n'étoit si rare dans les barometres, que parce qu'il n'y avoit pas un vuide parfait dans le haut du tuyau, ou que le mercure n'étoit pas bien purgé d'air, il s'assûra par expérience qu'avec ces deux conditions, des barometres n'étoient encore que très-foiblement lumineux ; & par conséquent que ce n'étoit-là tout au plus que des conditions ; & qu'il falloit chercher ailleurs une véritable cause. De plus son barometre n'étoit en expérience que depuis quatre semaines ; lorsqu'il rendit de la lumiere ; & ainsi on ne peut pas dire que la raison pourquoi plusieurs n'en rendroient pas, est peut-être qu'il y avoit trop peu de tems qu'ils étoient en expérience.
M. Bernoulli avoit remarqué que quand on secoüoit le barometre, & que par conséquent on faisoit aller le mercure avec rapidité, tantôt au-dessus, tantôt au-dessous du point d'équilibre, la lumiere ne se montroit que dans la descente du mercure, & qu'elle paroissoit comme attachée à sa surface supérieure. De-là il conjectura que quand par cette descente il se forme dans un tuyau un plus grand vuide que celui qui y étoit naturellement, il peut sortir du mercure pour remplir ce vuide en partie, une matiere très-fine, qui étoit auparavant renfermée & dispersée dans les interstices très-étroits de ce minéral. D'ailleurs il peut entrer dans ce même moment par les pores du verre plus grands apparemment que ceux du mercure, une autre matiere moins déliée, quoique beaucoup plus déliée que l'air ; & la matiere sortie du mercure & toute rassemblée au-dessus de sa surface supérieure, venant à choquer impétueusement celle qui est entrée par les pores du verre, y fait le même effet que le premier élement de Descartes sur le second, c'est-à-dire produit la lumiere.
Mais pourquoi ce phénomene n'est-il pas commun à tous les barometres ? Pour l'expliquer, M. Bernoulli imagina que le mouvement de la matiere subtile qui sort du mercure avec impétuosité, lorsqu'il descend, pouvoit être détruit, affoibli, interrompu, par quelque matiere hétérogene au mercure qui se seroit amassée sur sa surface supérieure, & y auroit été poussée par ce minéral plus pesant qu'elle ; que cette espece de pellicule ne manquoit pas de se former sur le mercure, dès qu'il n'étoit pas extrèmement pur ; que même quelque pur qu'il fût de lui-même, il contractoit en peu de tems par le seul attouchement de l'air, les saletés qui composent cette pellicule ; qu'afin qu'il les contractât en un instant, il ne falloit que le verser en l'air de haut en bas, comme l'on fait ordinairement dans la construction des barometres ; que ce mouvement lui faisoit ramasser dans l'air plus de saletés qu'il n'auroit fait durant plusieurs jours étant en repos ; qu'enfin cela supposé, une méthode sûre pour avoir un barometre lumineux, étoit de le faire d'un mercure bien pur, & qui sur-tout, quand on le feroit entrer dans son tuyau, ne traversât point l'air & ne s'y soüillât point.
Le succès des expériences répondit à tout ce raisonnement de M. Bernoulli, qu'il avoit fait sans aucune expérience préalable, excepté peut-être ce qui regardoit la pellicule formée sur la surface du vif-argent.
En effet, si on expose du vif-argent dans quelque vase à l'air libre, on trouvera au bout de quelque tems sa superficie extérieure trouble & couverte d'une pellicule très-mince, laquelle étant ôtée par le moyen d'une plume nette, la surface redevient polie : mais si on le laisse encore exposé à l'air, une autre pellicule, d'abord semblable à une toile d'araignée qui s'épaissit avec le tems, s'étendra par-dessus. Cette pellicule paroît au microscope fort semblable à de l'argent battu en feuille : en effet ce n'est qu'un tissu très-fin d'une espece de mousse ou de poil très-fin, qui séparée du vif-argent par l'agitation de l'air, est repoussée à la surface ; & se mêlant là avec les corps hétérogenes que l'air y amene, forme cette espece de pellicule. Cette pellicule paroît plus ou moins dans toutes les liqueurs exposées à l'air ; elle est fermée par les corpuscules qui s'exhalent & retombent ensuite dessus. Si on laisse tomber de la hauteur d'un pié seulement une goutte de vif-argent le plus net qu'il soit possible, dans un vase, où il y en ait aussi de si net, que la superficie soit polie comme celle d'un miroir, la goutte tombant sur cette surface polie, la ternira à l'endroit où elle tombera ; preuve que toute nette qu'elle étoit, elle avoit été infectée de l'impureté de l'air : ainsi quand on fait tomber le vif-argent goutte-à-goutte dans le barometre, ces gouttes tombant les unes sur les autres, font crever les petites pellicules, qui bientôt après remontent à la surface, & se mettent entre la surface convexe du mercure & la surface concave du verre. En effet, si le tuyau étant ainsi rempli, on le renverse pour en faire un barometre en le fermant du bout du doigt, on verra que le mercure en descendant dans le tuyau, laissera en arriere des restes de cette pellicule attachés aux parois du verre.
En supposant que cette pellicule couvre exactement les pores de la surface du vif-argent, il sera aisé de concevoir qu'elle bouche le passage à la matiere renfermée dans le mercure, de même que le vif-argent qui passe par les peaux de presque tous les animaux, n'y sauroit passer quand on n'en ôte pas cette peau fine que les Medecins appellent épiderme ou cuticule.
Rien de si nuisible à l'apparition de cette lumiere que l'humidité ; car si l'on fait entrer de l'eau dans le tuyau, bien disposé d'ailleurs, avec le vif-argent, ou même de l'esprit-de-vin rectifié (quoique l'esprit-de-vin soit par lui-même inflammable), ces matieres se mettant dans le tuyau au haut du vif-argent, font l'effet de la petite pellicule, qui est d'empêcher la lumiere. Il faut donc que le tuyau soit bien dégraissé & net en-dedans. Cela posé, voici deux manieres pour empêcher que le mercure ne contracte d'impuretés en passant dans le tuyau.
Premiere maniere. Pour cela il faut plonger un tuyau d'environ trois piés de long dans un vase d'assez petite hauteur, plein de mercure, le faire tremper dans ce mercure assez profondément, & incliner ce tuyau à la surface du mercure contenu dans le vase, le plus obliquement que le puisse permettre la hauteur du vase (M. Bernoulli faisoit faire au sien un angle de 18 degrés à-peu-près avec l'horison) ; ensuite sucer fortement par le bout supérieur, de façon que le tuyau s'emplisse à la fin tout entier de vif-argent. Lorsqu'il en est ainsi rempli, il faut faire boucher avec le doigt par une autre personne, le bout du tuyau qui trempe dans le mercure, & fermer ensuite soi-même aussi avec son doigt le bout supérieur du tuyau (il faut sucer tout de suite, de peur qu'en reprenant haleine, on ne rende le dedans du tuyau humide). Il est évident qu'en ce cas le mercure n'a point été sali par l'air, si ce n'est peut-être la premiere goutte qui est montée, & qui a essuyé toutes ces saletés ; aussi faut-il laisser entrer un peu de mercure dans sa bouche ; auquel cas, cette premiere goutte étant ôtée, le mercure sera le plus net qu'il puisse être. Le tuyau étant ainsi fermé avec le doigt par les deux bouts, il faut le mettre tremper par son extrémité dans un autre vase plus étroit que le premier, & rempli de mercure à une hauteur plus grande que le vase dans lequel on avoit fait d'abord tremper le tuyau. Si on porte le tuyau en cet état avec le vase dans l'obscurité, le moindre balancement y produira une lueur capable d'éclairer à un pié de distance, assez pour pouvoir lire un caractere d'une grosseur médiocre.
IIe maniere. Il faut mettre perpendiculairement un tuyau fermé par un bout dans un vase plein de mercure où il trempe par le bout ouvert, le poser avec ce vase dans la même situation, sous un récipient fait exprès pour cela, ensuite en retirer l'air qui sortira du tuyau par le vase en faisant des bulles sur la surface du mercure qui y est contenu : lorsqu'on en aura retiré le plus qu'il sera possible, il faudra le laisser rentrer ; il n'en pourra monter dans le tuyau à cause du mercure où il trempe par son bout ouvert. Cet air donc pesant sur la surface du mercure contenu dans le vase, fera monter le mercure dans le tuyau à la hauteur de 25 à 26 pouces, parce qu'on ne peut jamais tirer tout l'air du récipient, & que l'air qui dans ce cas reste dans le tuyau se condense, & augmente de force à mesure que le mercure y monte. Cet air étant très-purifié à cause de sa dilatation, le vif-argent en y passant demeurera net, & l'expérience de la lumiere réussira aussi bien que dans la premiere maniere, quoiqu'il y ait de l'air au haut du tuyau.
Quelqu'ingénieuse & vraisemblable que paroisse cette explication, néanmoins l'académie des Sciences à qui M. Bernoulli la communiqua (voyez année 1701 & suiv.) remarqua pour lors que quelques barometres donnoient de la lumiere sans avoir été faits avec les précautions de M. Bernoulli, & que quelques-uns faits avec les précautions rapportées ci-dessus n'en donnoient point. C'en fut assez pour qu'elle suspendit son jugement.
Il faut, suivant le système de M. Bernoulli, 1° que le mercure soit extrèmement pur ; 2°, que le barometre soit construit de maniere que le mercure en y tombant ne traverse point l'air ; 3° que le vuide du haut du tuyau soit aussi parfait qu'il peut être ; car il faut que le choc des deux matieres subtiles dont parle M. Bernoulli, ne soit point affoibli par l'air, qui étant fort grossier en comparaison de ces deux matieres, feroit l'effet d'un sac de laine qui reçoit un coup de canon. La différence d'effet des expériences de Groningue & de Paris sur des barometres qui paroissoient avoir les mêmes conditions, aussi bien que le mercure qui y étoit enfermé, fit juger que le mercure de M. Bernoulli & celui des barometres lumineux de Paris, devoient avoir quelque chose de particulier, & ressembler par quelqu'accident à du mercure que l'on auroit rendu lumineux, en y mêlant, comme on fait quelquefois du phosphore liquide. M. Bernoulli, fondé sur le succès de ses expériences, conjecture qu'il y a eu quelque faute dans celles de l'Académie. La méthode, par exemple de remplir, le tuyau avec une bourse de cuir qu'on dit être équivalente à la sienne, a pourtant cela de différent, que c'est ici le mercure qui doit pousser l'air devant lui, lequel en faisant quelque petite résistance, peut laisser attachée aux côtés du verre quelques restes ou bulles d'air, qui suffiront pour engendrer la pellicule ; au lieu que dans la méthode de M. Bernoulli, pour remplir le tuyau, l'air extérieur pousse le vif-argent en-haut, & le vif argent ne fait que suivre le mouvement de l'air intérieur ; qui par sa raréfaction sort sans peine du tuyau ; peut-être aussi le tuyau de l'Académie n'étoit-il pas bien net. Les amples tuyaux sont suivant l'expérience les meilleurs, parce qu'outre que le mercure dans un tuyau plus large, se meut plus librement que dans un tuyau étroit, ou le frottement du mercure contre le verre diminue la vîtesse de la descente ; la pellicule, s'il s'en forme, doit être aussi plus épaisse dans un tuyau étroit que dans un autre, parce que ne pouvant s'étendre en large, elle s'épaissit en hauteur. Or le tuyau de l'Académie n'étoit pas assez large, selon M. Bernoulli, n'ayant qu'une ligne & demie de diametre.
Il est difficile de remplir le tuyau de mercure avec la bouche, sans y mêler un peu d'haleine ou de salive ; plusieurs n'y ont pû réussir. M. Bernoulli dit qu'il le faisoit aisément, pouvant d'ailleurs tirer avec la bouche, d'un petit recipient, 7/8 de l'air qu'il contient, sans se trop efforcer. Il vaut mieux faire ces expériences de nuit que de jour ; car quand on entre tout d'un coup dans l'obscurité, les yeux encore frappés de l'éclat d'une grande lumiere, ne peuvent appercevoir la foible lueur du barometre, qui paroît assez pendant la nuit obscure.
Quant aux barometres qu'on dit n'avoir pas été faits avec les mêmes précautions, & cependant donner de la lumiere, peut-être qu'en y jettant le vif-argent on a tenu le tuyau fort obliquement à l'horison, pour laisser couler doucement les gouttes de mercure comme dans un canal ; ce qui empêche l'air de l'infecter tant ; quoiqu'en ce cas il arrive souvent qu'il ne rend pas autant de lumiere que des barometres faits par la suction, ou dans la machine du vuide ; peut-être le mercure n'étoit-il pas bien purifié de toute matiere dont l'attouchement de l'air pût former une pellicule.
Cette lumiere paroît dans toute sorte de vif-argent préparé à la maniere de M. Bernoulli ; cela ne vient donc point de quelque chose de particulier dans le sien, qui enfermé dans le tuyau sans les conditions proposées, ne rend que peu ou point de lumiere.
Une des principales raisons qui fait que la pellicule du mercure empêche la lumiere, c'est peut-être qu'on secoue trop uniformément le mercure, se contentant de le balancer ; auquel cas cette pellicule, s'il y en a, ne sort point de la superficie du mercure, & y demeure toûjours attachée. Comme il est difficile d'éviter cette pellicule des barometres remplis même à la maniere de M. Bernoulli, il semble que si on pouvoit la crever, ce qui se feroit en remuant le mercure en tous sens, comme on fait l'eau d'une bouteille qu'on rinse, il pourroit paroître de la lumiere. En effet, si on tire l'air d'une petite phiole pleine de mercure, en la mettant sous la machine pneumatique, par le moyen d'un robinet cimenté à son cou, & qu'on agite en tout sens le mercure qui y est contenu, on voit une lumiere bien plus vive que celle du barometre, & cela arrive avec toute sorte de mercure, excepté lorsque l'air n'est pas assez exactement tiré de la phiole ; ou qu'on y en laisse entrer un peu ; alors la lumiere est plus foible, & diminue de plus en plus, nonobstant l'agitation réitérée de la phiole, même jusqu'à disparoître entierement : après quoi il faut tirer l'air de nouveau de la phiole, si on veut qu'elle paroisse. On voit au jour le mercure de cette phiole dont la lumiere est affoiblie, couvert d'une pellicule épaisse, & semblable à de la pâte mêlée de poussiere, d'où il paroît qu'un peu d'air agité salit fort le mercure, & le couvre d'une peau assez épaisse pour empêcher absolument la lumiere : car s'il n'y a point d'air, l'agitation ne fait que rendre le mercure plus pur ; qui par-là se délivre de tout ce qu'il pourroit contenir d'étranger, qu'il rejette à la surface du verre, qu'on voit aussi un peu trouble : ainsi le mercure est rendu de plus en plus lumineux.
Si le robinet de la phiole est d'airain, le vif-argent le corrompt : il faut donc, pour l'éviter, mettre un bouchon de liége qui bouche exactement la phiole, & de la cire par-dessus, puis percer la cire & le bouchon de liége pour faire sortir l'air de la phiole sous la machine pneumatique : ensuite laissant le récipient dessus sans rendre l'air, faire fondre avec un verre ardent la cire d'autour du trou, qui se répandant alors sur le trou, le fermera. Voilà donc un nouveau phosphore perpétuel, & qui outre cela a l'avantage de pouvoir se transporter dans une phiole bien bouchée ; pourvû que, 1°. cette phiole ait été bien nette ; 2°. qu'on n'ait pas beaucoup remué le mercure avant d'en tirer l'air, 3°. qu'on tire le plus d'air qu'il soit possible.
M. Homberg a donné une autre raison de la lumiere des barometres. Souvent pour nettoyer le mercure on se sert de la chaux vive préférablement à de la limaille de fer, alors le mercure qui s'élevant dans la distillation s'est criblé au-travers de cette matiere, peut en avoir emporté des parties capables par leur extrème délicatesse de se loger dans ses interstices ; & comme la chaux vive retient toûjours quelques particules ignées, il est possible que ces particules agitées dans un lieu vuide d'air, où elles nagent librement & sans être étouffées par aucune autre matiere, produisent un éclat de lumiere. En effet plusieurs barometres faits de mercure ainsi nettoyé étoient lumineux ; mais M. Homberg appuyoit davantage sur le peu de nécessité des conditions de M. Bernouilli.
1°. Un mercure bien net ne contracte jamais d'impuretés à l'air : l'expérience le prouve. Il y a donc lieu de croire que celui de M. Bernouilli n'étoit pas bien net.
2°. Dans les barometres lumineux anciens, le mercure étoit entré en traversant l'air.
3°. M. Homberg ayant vuidé par la seconde méthode de M. Bernouilli, un tuyau qui ne trempoit presque point dans le mercure, l'air en sortoit en soûlevant par son ressort le tuyau, & se glissant entre son bout & la surface du mercure. L'air étant raréfié jusqu'à un certain point, de façon cependant qu'on pouvoit encore en tirer assez, ne sortoit plus, parce qu'il n'avoit plus la force de soûlever le tuyau. Le vuide du barometre de M. Bernouilli n'étoit donc pas aussi parfait qu'il pouvoit l'être.
Mais M. Bernouilli, outre les réponses précédentes, ajoûte qu'il paroît que M. Homberg a trop enfoncé le tuyau dans le mercure pour en tirer l'air ; celui de M. Bernouilli étoit presqu'à fleur de mercure, qui en effet y est monté à 26 pouces ; ce qui est presque la hauteur ordinaire ; outre que ce peu d'air restant dans le tuyau a notablement affoibli la lumiere, comme M. Bernouilli l'a remarqué depuis ; ainsi moins il y a d'air, plus la lumiere est grande & durable.
Quand le mercure de M. Bernouilli ne seroit pas bien pur, l'air seroit toûjours la cause, sinon naturelle, du moins efficiente du défaut de lumiere, puisque ce même mercure en produit étant enfermé sans air dans le vuide. Mais M. Bernouilli a trouvé un secret de le rendre net en le lavant bien avec de l'eau : on met sur le mercure cette eau, environ la hauteur de deux pouces ; on agite fortement le mercure qui se mêle avec l'eau, puis on le laisse reposer ; & il rejette à la surface l'eau sale & noirâtre : on réitere la lotion jusqu'à ce que l'eau ne paroisse plus ou presque point noirâtre, & alors le mercure est net. L'esprit-de-vin le lave plus vîte & mieux que l'eau ; il s'est même trouvé un mercure fort épais, dans lequel il y avoit apparemment quelque matiere huileuse & sulphureuse mêlée avec ses parties ; ce mercure n'est devenu assez net pour rendre de la lumiere qu'à force de lotions d'esprit-de-vin. Le mercure devient si pur par ce lavement même d'eau seule, qu'il rend quelquefois de la lumiere, même dans une phiole pleine d'air : mais cette lumiere est foible.
Ce mercure ainsi bien purifié, laisse sortir de ses pores assez de matiere subtile pour vaincre la résistance de l'air.
Il faut bien sécher le mercure ainsi lavé, en le faisant passer par un linge net ; car la moindre humidité nuiroit à l'expérience.
Quelquefois le mercure même après l'agitation conserve en ses pores une matiere gluante cachée, qui en les fermant ou les rendant roides, empêche la matiere subtile de sortir, & par conséquent la lumiere de paroître. La roideur des pores peut faire cet effet ; car il faut que les pores se retrécissent souvent pour laisser passer cette matiere ; or s'ils ne sont pas flexibles ils ne pourront se retrécir. Cela étant, il paroît que le mercure qu'on dit être devenu lumineux par la distillation à-travers la chaux vive, avoit cette roideur de pores causée par quelque matiere gluante qu'il a laissée dans la chaux, en s'y filtrant & s'y purifiant par-là ; & c'est à cette seule purification que M. Bernouilli en attribue la lumiere, & non pas aux particules ignées de la chaux ; de plus ces corpuscules ignées ne lui paroissent guere vraisemblables.
Ces parcelles ignées deviendroient enfin inutiles par le fréquent usage, comme on voit arriver aux autres phosphores qui sont lumineux par le moyen de ces particules ignées ; ainsi ce phosphore perdroit enfin sa vertu.
2°. Ces parcelles ignées assez petites pour se loger dans les pores du mercure, s'échapperoient quand on secoueroit la phiole, par les pores du verre bien plus larges que ceux du mercure.
3°. Cela posé, la lumiere paroîtroit également dans la descente & l'ascension du mercure.
Dans l'explication, au contraire, de M. Bernouilli, le mercure ne fait que prêter ses pores étroits à la matiere subtile ; dès que cette matiere en est sortie par l'agitation, il en revient aussi-tôt d'autres par les pores du verre. Enfin M. Bernouilli gardoit depuis un an un de ces phosphores, qui n'avoit encore souffert aucune altération. Il croit même qu'une liqueur aussi pesante que le mercure, pourroit donner de la lumiere : & cela posé, si on pouvoit rendre l'or fluide, il seroit, selon lui, le plus propre à en donner, étant le plus pesant de tous les corps ; le plomb fondu même en pourroit donner s'il étoit bien pur.
Quant au mercure qu'on rend lumineux en le mêlant avec du phosphore artificiel, M. Bernouilli attribue cette lumiere au phosphore seul.
Toutes ces lumieres artificielles sont extrèmement délicates. Il n'est pas sûr qu'en maniant une phiole, la sueur de la main ne passe, quoiqu'en très-petite quantité, au-travers les jointures du bouchon, & ne nuise à la lumiere. Il faut être dans ces expériences scrupuleux, défiant, & en quelque sorte superstitieux. Voici un exemple remarquable de la délicatesse de ces phosphores. M. Bernoulli avoit une phiole qui luisoit parfaitement & également depuis six semaines ; une miette du liége qui la bouchoit s'étoit détachée & étoit tombée sur la surface du mercure où elle nageoit. M. Bernoulli brûla cette miette de liége au foyer d'un verre ardent ; & le peu de fumée qui en sortit, diminua considérablement & sans retour la vivacité du phosphore, où il n'étoit arrivé nul autre changement. Cette pureté dont la lumiere a besoin, fut souillée. M. Bernoulli a offert à l'Académie de purifier le mercure dont elle se sert, & de le lui renvoyer lumineux. La confiance apparemment qu'on avoit en sa parole, a empêché qu'on n'exécutât sa demande.
L'Académie en est restée là jusqu'en 1723, que M. Dufay donna son sentiment particulier, joint à l'histoire suivante des sentimens des savans sur cette matiere, & à une maniere simple & facile de rendre les barometres lumineux, qu'un Vitrier Allemand lui avoit apprise. En 1706, M. Dutal, medecin, fit insérer dans les Nouvelles de la république des Lettres un mémoire, où il confirme la réussite des opérations de M. Bernoulli, & croit que l'Académie ne les a pas faites assez exactement. En 1708, M. Hauksbée, après avoir décrit un phosphore construit avec un globe vuide d'air, qu'il faisoit tourner rapidement sur son centre, & qui par ce moyen rendoit beaucoup de lumiere lorsqu'on en approchoit la main, croit que la lumiere du barometre n'est causée que par les frictions du mercure contre les parois intérieurs du tube vuide d'air grossier.
En 1710, M. Hartsoëker combattit les expériences de M. Bernoulli, niant tout, & n'apportant d'autre raison que la pureté du mercure, & la netteté du tuyau ; ce qui, suivant l'expérience, ne suffit pas.
En 1715, Jean Fréderic Weidler combattit aussi M. Bernoulli, disant que la pellicule que contracte le mercure en passant par l'air, ne nuit en rien à la lumiere, qu'il croit ne venir d'autre chose que de la répercussion des rayons, qui quoique dans l'obscurité, conservent leur même tension & leur même effort.
En 1716, Michel Heusinger dit dans une dissertation publiée sur ce sujet, que quelques barometres où l'on remarquoit des bulles d'air étoient lumineux, quoique moins, à la vérité, que ceux qui n'avoient point d'air ; les bulles d'air même, à ce qu'il dit, donnent quelquefois de l'éclat. La pureté du mercure n'est pas encore nécessaire, puisque vingt-trois parties de mercure mêlées avec cinq de plomb, ont rendu de la lumiere. Selon lui, les particules du mercure sont sphériques, & les interstices de ces petits globes contiennent beaucoup de matiere subtile, qui s'en exprime lorsqu'on l'agite. Le mercure n'est lumineux que lorsqu'il descend, parce qu'alors il abandonne la matiere subtile contenue dans ses pores : mais en remontant il en absorbe une partie, & l'autre s'en va par les pores du verre.
En 1717, M. de Mairan attribua cette lumiere au soufre du mercure qui est en mouvement, & dit, qu'elle seroit beaucoup plus vive, s'il ne restoit dans les barometres, les plus exactement vuides d'air, une matiere différente de la matiere subtile & de l'air, qui arrête le mouvement de ce soufre & la lumiere qui en resulte, ce qui arrive sur-tout lorsque le mercure monte ; au lieu que quand il descend, il y a une partie du tuyau la plus proche de la surface du mercure qui reste, au moins pour un moment, libre de cette matiere qui ne peut pas suivre le mercure avec assez de rapidité, & qui par ce moyen donne lieu à son soufre de se développer. Disse. sur les Philosoph.
Il restoit encore quelque incertitude sur la maniere de rendre les barometres lumineux. Les conditions absolument nécessaires sont :
1°. Que le tuyau soit bien sec ; on le nettoye aisément avec du coton attaché au bout d'un fil de fer, la moindre humidité gâteroit tout : mais ce n'est, selon les observations de M. Dufay, qui a tourné de bien des sens ces expériences, que l'humidité qui seroit au haut & dans le vuide du tuyau, où la lumiere doit paroître ; hors de-là, le tuyau peut être humide sans inconvénient.
2°. Que le mercure soit bien net : il faut faire passer le mercure par un cornet de papier dont l'embouchure soit fort étroite, il y dépose suffisamment ses impuretés.
3°. que le mercure soit bien purgé d'air : versez d'abord dans le tuyau un tiers du mercure que vous devez employer, puis chauffez-le doucement & par degrés, en l'approchant petit-à-petit du feu ; en le remuant avec un fil de fer, vous aiderez la sortie des bulles d'air qui sont dans le mercure, & que la chaleur pousse dehors ; versez un second tiers auquel vous ferez de même, & enfin le troisieme auquel vous ne ferez rien. La purification des deux premiers tiers suffit pour le tout.
M. Dufay ne s'est point apperçû qu'un différent degré de chaleur donné au mercure, produisît de différence sensible dans la lumiere. Voyez, outre les ouvrages déjà cités, la these de M. Bernoulli, de Mercurio lucente in vacuo, soûtenue à Bâle en 1719, & imprimée dans le recueil de ses oeuvres. Genev. 1743. (O)
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BARON | S. m. (Hist. mod.) nom de dignité, homme qui a une baronie. Voyez BARONIE. Baron est un terme dont l'origine & la premiere signification est fort contestée. Quelques-uns veulent qu'il signifie originairement , homme ; d'autres un héros, un homme brave ; ceux-ci libertinus, un affranchi ; ceux-là, un grand homme, un homme riche ; d'autres, un vassal. Menage le fait venir de baro, que nous trouvons employé dans le tems de la pureté de la langue Latine, pour vir, homme brave, vaillant homme. Delà vint, suivant cet auteur, que ceux qui avoient leur place auprès du roi dans les batailles, furent appellés barones, ou les plus braves de l'armée. Comme les princes récompensent ordinairement la bravoure & la fidélité de ceux qui les environnent, par quelques fiefs, ce mot fut ensuite employé pour désigner quelques hommes nobles, qui tenoient un fief immédiatement du roi. Isidore, & après lui Cambden, regardent ce terme comme un mot qui a signifié dans son origine, un soldat mercenaire. MM. de P. R. le font venir de , poids ou autorité. Cicéron employe le mot de baro, pour marquer un homme stupide, brutal. Les anciens Allemands parlent d'un baron comme nous d'un vilain ; & les Italiens nomment barone, un gueux, un mendiant. M. de Marca fait venir baron du mot Allemand bar, homme, ou homme libre : d'autres en vont chercher l'étymologie dans les langues Hébraïque, Gauloise, Celtique : mais l'opinion la plus probable est qu'il vient de l'Espagnol varro, homme brave, noble. C'est de-là que les femmes appellent barons leurs maris ; de même que les princes, leurs fermiers. Dans les lois Saliques, comme elles viennent des Lombards, le mot baron signifie un homme en général ; & l'ancien glossaire de Philomenes traduit baron , homme.
BARON, est employé en Angleterre dans une signification plus particuliere, pour signifier un seigneur, un lord ou pair de la derniere classe, c'est-à-dire du degré de noblesse qui est immédiatement au-dessous des vicomtes, & au-dessus des chevaliers & des baronets. Voyez NOBLESSE, PAIR, &c.
Les barons sont seigneurs du parlement, pairs du royaume, & joüissent de leurs priviléges ; ils ne sont pas ceints de l'épée à leur création, & n'ont eu de couronne à leurs armes que sous le regne de Charles II. qui leur accorda un cercle d'or avec six perles placées au bord.
Dans les anciennes archives, le terme de baron comprenoit toute la noblesse d'Angleterre ; tous les nobles s'appelloient barons, de quelqu'autre dignité qu'ils fussent revêtus ; c'est pour cette raison que la charte du roi Edouard I. qui est une exposition de tout ce qui a rapport aux barons de la grande charte, finit par ces mots : Testibus archiepiscopis, episcopis, baronibus, &c. La grande assemblée même de la noblesse, qui est composée des ducs, des marquis, & en outre des comtes & des barons, est comprise sous le nom de l'assemblée du baronage.
On distingue les barons par leurs anciens titres, qui possédoient un territoire du roi, qui s'en réservoit toûjours le titre en chef ; & les barons, par leur titre temporel, qui tenoient les seigneuries, les châteaux & places, comme chefs de leur baronie, c'est-à-dire, par la grande sergenterie : en vertu de ces titres, ils étoient anciennement convoqués au parlement : mais à présent ils ne sont seigneurs lords du parlement, que quand on les y appelle par écrit.
Après la conquête, les barons furent distingués en grands barons & en petits barons, majores & minores, & il leur fut accordé d'être convoqués au parlement ; les grands par une lettre immédiate du roi, les petits par une lettre générale du grand sherif ou échevin, sur le commandement du roi.
Les anciens distinguoient les grands barons des petits, en accordant aux premiers haute & même souveraine jurisdiction ; & aux seconds une jurisdiction inférieure, & sur des matieres de peu d'importance.
Les barons de l'échiquier sont des juges au nombre de quatre, auxquels est commise l'administration de la justice dans les causes d'entre le roi & ses sujets, sur les matieres qui concernent l'échiquier & les revenus du roi. Ils sont appellés barons, parce que les barons du royaume étoient employés dans cet office.
Leur fonction est aussi de voir les comptes royaux ; ils ont pour cette fin des auditeurs sous eux, de même que pour décider des causes qui regardent les revenus du roi, ces causes appartenant en quelque façon à l'échiquier.
Les barons de l'échiquier ont été jusque dans ces derniers tems des gens savans ès lois, des anciens maires, des personnages importans & éclairés ou censés tels, soit dans le clergé, soit à la cour, majores & discretiores in regno, sive de clero essent, sive de curia.
Les barons des cinq ports sont maîtres de la chambre des communes, élûs par les cinq ports, deux pour chacun. Voyez CINQ PORTS. Ceux qui ont été maires du château de Corse dans le comté de Dorset, sont nommés barons. Les principaux bourgeois de Londres avoient autrefois ce titre.
En France on entendoit anciennement par barons, tous les vassaux qui relevoient immédiatement du roi ; ainsi ce mot comprenoit les ducs, les marquis, comtes, & autres seigneurs titrés & qualifiés, comme on le peut voir dans Aimoin & dans quelques-unes de nos vieilles chroniques, ou le roi haranguant les seigneurs de sa cour ou de son armée, les appelle mes barons. Mais maintenant on employe ce terme dans une acception beaucoup moins générale, puisqu'il ne signifie que le degré de la noblesse, qui est immédiatement au-dessous des ducs, des marquis, des comtes & des vicomtes, quoiqu'il y ait en France & en Allemagne d'anciens barons qui ne voudroient pas le céder à des nobles illustrés depuis peu de ces divers degrés de noblesse. Nos auteurs font aussi mention des barons de Bourges & d'Orléans, titres accordés à quelques-uns des principaux bourgeois de ces villes, comme à ceux de Londres, mais qui n'emportoient point avec eux de caractere de noblesse, & donnoient seulement à ces citoyens quelques prérogatives, comme de n'être pas tenus de répondre en justice sur certaines choses hors de l'enceinte des murs de leur ville. Les trois premiers barons de France dans la noblesse, étoient ceux de Bourbon, de Conty, de Beaujeu : mais ces baronies ont été depuis réunies à la couronne. Dans le clergé il y a des évêques, des abbés, & des prieurs barons ; soit qu'anciennement les rois leur ayent accordé ce titre, soit qu'ils possedent par leurs libéralités des baronies, ou qu'ils les tiennent en fief de la couronne. Voyez NOBLESSE. (G)
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BARONET | S. m. (Hist. mod.) dégré d'honneur en Angleterre, qui est immédiatement au-dessous de celui de baron, & au-dessus de celui de chevalier ; ils ont le pas sur tous les chevaliers, excepté sur ceux de la Jarretiere. Voyez CHEVALIER, &c.
La dignité de baronet se confere par patente ; c'est le moindre dégré d'honneur qui soit héréditaire. Cet ordre fut fondé par Jacques I. en 1611. Deux cent baronets furent créés par ce prince, & fixés pour toûjours à ce nombre ; cependant on dit qu'ils sont aujourd'hui plus de huit cent.
On leur accorda plusieurs priviléges, pour être possedés par eux & par les héritiers mâles. Il leur fut permis de charger leur écu des armes d'Ulster, qui sont une main de gueules dans un champ d'argent, à condition qu'ils défendroient la province d'Ulster en Irlande contre les rebelles qui l'incommodoient extrèmement. Pour cet effet ils furent obligés de lever & d'entretenir à leurs dépens chacun trente soldats pendant trois ans, ou de payer à la chambre l'équivalent en argent ; cette somme, à huit sols par jour pour chaque soldat, faisoit 1095 livres. Ils sont maintenant exempts de cette obligation.
Les baronets prennent place entr'eux suivant l'ancienneté. Selon les termes de leurs patentes, il ne peut y avoir de degrés d'honneur établis entr'eux ; il en est de même entre les barons.
Le titre de sir leur est accordé par une clause particuliere, cependant ils ne sont pas faits chevaliers : mais un baronet & son fils aîné ayant l'âge nécessaire, peuvent l'un & l'autre solliciter l'entrée dans l'ordre de chevalier. (G)
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BARONIE | S. f. (Hist. mod.) seigneurie ou fief de baron, soit temporel soit spirituel. Voyez BARON. Dans ce sens baronie est la même chose que ce que l'on appelle honour en Angleterre.
Une baronie peut être considérée comme une seigneurie possedée à condition de quelque service, mais en chef par le roi : elle est ce qu'on appelle autrement grande sergenterie.
Les baronies d'Angleterre dans l'origine, étoient mouvantes du roi même, chef & seigneur de tout le royaume, & elles n'étoient pas tenues immédiatement d'un autre seigneur. Par exemple, le roi donnoit à un homme l'investiture d'une grande seigneurie dans le pays, pour que celui qu'il en investissoit en joüît, lui & ses héritiers, comme la tenant du roi & de ses successeurs. Par le service de baron, il faut entendre le service de vingt chevaliers, de quarante, soixante, plus ou moins, suivant que le roi le déterminoit par l'investiture. Dans les tems qui suivirent de plus près la conquête, lorsqu'un grand seigneur, great lord, recevoit du roi l'investiture d'une grande seigneurie, cette seigneurie étoit appellée baronie, mais plus ordinairement un honneur, honour, comme l'honour de Glocester, l'honour de Wallingford, l'honour de Lancaster, l'honour de Richemond, & de même des autres. Il y avoit en Angleterre des honours désignés par des noms Normands ou par d'autres noms étrangers, c'est-à-dire que quelquefois ils avoient un nom Anglois, quelquefois un nom étranger ; cela arrivoit quand la même personne étoit seigneur d'un honour en Normandie ou dans quelqu'autre province étrangere, & en même tems seigneur d'un honour en Angleterre ; par exemple, Guillaume de Fortz, de Force ou de Fortibus, étoit seigneur de l'honour d'Albemarle en Normandie, il étoit aussi seigneur de deux honours en Angleterre, savoir l'honour de Holderness & l'honour de Skipton en Cravene. En Angleterre on nommoit quelquefois ces honours du nom Normand, l'honour d'Albemarle ou l'honour du comte d'Albemarle. De même le comte de Bretagne étoit seigneur de l'honour de Bretagne en France, & de celui de Richemond en Angleterre. On appelloit quelquefois l'honour de Richemond du nom étranger, l'honour de Bretagne ou l'honour du comte de Bretagne, non qu'Albemarle ou la Bretagne fussent en Angleterre, mais parce que la même personne étoit respectivement seigneur de chacun de ces honours en France, & de chacun de ces honours en Angleterre. Voyez Madox. Hist. des Baronies, &c.
Les Baronies qui appartiennent à des évêques, & qui sont par quelques-uns dénommées regalia, parce qu'elles dépendent absolument de la pure libéralité du prince, ne consistent point en une seule baronie, mais en plusieurs ; car, tot erant baroniae, quot majora praedia.
Suivant Bracton, une baronie est un droit indivisible ; c'est pourquoi s'il s'agit de partager un héritage entre co-héritiers, quoique l'on puisse diviser quelques maisons principales & les pieces de terres qui en dépendent, si néanmoins la maison principale est le chef-lieu d'un comté ou d'une baronie, on ne peut la morceler ; en voici la raison : le partage de ces sortes de biens anéantiroit insensiblement plusieurs droits privatifs des comtés & des baronies, ce qui tourneroit au préjudice de l'état, qui est composé de comtés & de baronies. (G)
* BARONIES (les) Géog. contrée de France ; dans le Dauphiné, ainsi appellé des deux baronies de Meuoillon & de Montauban, dont elle est composée.
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BAROSCOPE | S. m. (Physique) ce mot vient de , onus poids, & , video, je vois ; machine inventée pour faire connoître les changemens du poids de l'atmosphère, Voyez BAROMETRE.
Le baroscope ne fait qu'indiquer ou faire voir les changemens du poids de l'atmosphère ; le barometre les mesure par des degrés ou divisions qui sont placés le long du tuyau ; ainsi ces degrés ou divisions font toute la différence du barometre au baroscope. Au reste il n'y a plus aujourd'hui de baroscope qui ne soit barometre, & ces deux noms désignent absolument le même instrument. (O)
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BAROTINS | Voyez BARROTINS.
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BAROTS | Voyez BARROTS.
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BARQUEROLLE | BARQUETTE, s. f. (Marine) bâtiment médiocre de voiture sans aucun mât, qui ne va qu'à la rade & de beau tems, sans jamais se hasarder en haute mer.
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BARQUES | sub. f. (Hist. anc. & Navig.) petits bâtimens capables de porter sur les rivieres & même sur la mer le long des côtes & les premiers, selon toute apparence, que les hommes ayent construits. On navigea anciennement sur des radeaux ; dans la suite on borda les radeaux de claies faites d'osier ; telles étoient les barques d'Ulysse, & celles des habitans de la Grande Bretagne au tems de César : ils font, dit-il, des carenes de bois leger, le reste est de claies d'osier couvertes de cuir. Les anciens ont donc eu des barques de cuir cousues ; sans cela il n'est guere possible d'entendre le cymba sutilis de Virgile : mais ce qui doit paroître beaucoup plus incroyable, c'est qu'ils en ayent eu de terre cuite. Cependant Strabon, dont la bonne foi est reconnue, dit des Egyptiens, qu'ils navigent avec tant de facilité, que quelques-uns même se servent de bateaux de terre ; & il parloit d'un fait qui se passoit de son tems. Si l'on croit aux barques de terre cuite des Egyptiens sur le témoignage de Strabon on ne pourra guere rejetter les bateaux de terre cuite voguant à l'aide de rames peintes, sur lesquels Juvenal lance à l'eau les Agathyrses. Mais ce n'est pas tout : les Egyptiens en ont construit avec la feuille même de cet arbre sur laquelle ils écrivoient, & le philosophe Plutarque raconte des merveilles de ces petits bâtimens ; il nous assûre, dans son traité d'Isis & d'Osiris, que les crocodiles, qui nuisoient souvent à ceux qui alloient sur de petites barques, respectoient ceux qui montoient des barques de Papyrus, en mémoire d'Isis, qui avoit une fois navigé sur un bâtiment de cette espece. Les feuilles du papyrus étoient larges & fortes ; & sur la résistance qu'on leur trouve dans quelques livres anciens qui en sont faits, le P. Montfaucon a compris qu'on pouvoit, en les cousant ensemble & en les poissant, en former des barques. Plusieurs auteurs nous assûrent qu'aux Indes on en construit d'un seul roseau à noeuds & vuide en-dedans ; mais si gros, dit Héliodore, qu'en prenant la longueur d'un noeud à un autre, & le coupant en deux par le milieu des noeuds, on en formoit deux bateaux. Le témoignage d'Héliodore est un peu modifié par celui de Diodore & de Quinte-Curce, qui nous font entendre, non pas qu'on fît deux bateaux avec un morceau de canne, mais qu'on faisoit fort bien un bateau avec plusieurs morceaux de canne. Combien de faits dont le merveilleux s'évanoüiroit, si l'on étoit à portée de les vérifier ? Les Ethiopiens, à ce que dit Pline, avoient des barques pliables, qu'ils chargeoient sur leurs épaules & qu'ils portoient au bas des énormes chûtes d'eau du Nil, pour les remettre sur le fleuve & s'embarquer. Scheffer croit que c'étoient des peaux tendues par des ais circulaires, sans poupe ni proue. Les sauvages d'Amérique creusent des arbres d'une grandeur prodigieuse, sur lesquels ils s'embarquent au nombre de 30 à 40 hommes & s'en servent, sans autre préparation, pour faire par mer des voyages de 70 à 80 lieues : voilà les premiers pas de la Navigation. Bien-tôt on fit les barques de matériaux plus solides que la peau, la terre, & le jonc. Dans la suite on abattit les chênes, l'on assembla les planches & les poutres, & les mers furent couvertes de vaisseaux. Mais qu'étoient-ce encore que les vaisseaux des anciens en comparaison des nôtres ? Voyez NAVIGATION, VAISSEAU, BATIMENT, & CANOT.
BARQUE, (Marine) on donne particulierement ce nom à un petit bâtiment de mer, qui n'a qu'un pont & trois mâts ; le grand, celui de misene, &, celui d'artimon. Les plus grandes ne passent guere cent tonneaux : les barques de la Méditerranée sont appellées à voiles latines ou à tiers point. En général on donne le nom de barque à différens petits bâtimens qui n'ont point de hune, & qui servent à porter des munitions & à charger & décharger un navire.
Barque d'avis, c'est celle qu'on envoye pour porter des nouvelles d'un vaisseau à un autre.
Barque longue ; c'est un petit bâtiment qui n'est point ponté, & plus bas de bord que les barques ordinaires, aigu par son avant, & qui va à voiles & à rames ; il a le gabarit d'une chaloupe. On l'appelle en plusieurs endroits double chaloupe.
Barque droite ; c'est un commandement qu'on fait à ceux qui sont dans une chaloupe, de se placer également pour qu'elle aille droite sur l'eau sans pancher plus d'un côté que de l'autre.
Barque en fagot ; c'est tout le bois qu'il faut pour construire une barque, qu'on porte taillé dans un vaisseau, & qu'on peut assembler dans le lieu où l'on en a besoin.
Barque à eau, ce sont de petits bâtimens dont on se sert en Hollande pour transporter de l'eau douce aux lieux où l'on en manque, & de l'eau de mer pour faire du sel ; ils ont un pont, & on les remplit d'eau jusqu'au pont. Voyez BATEAU.
Barque de vivandier ; c'est celle qu'un vivandier promene sur l'eau le long des quais ou autour des vaisseaux, pour y vendre des vivres. (Z)
BARQUE, en terme de Brasserie, est une espece de bassin de bois de chêne fait avec des planches, de figure quarrée ; il sert aux Brasseurs à mettre leurs métiers lorsqu'ils les retirent des chaudieres ou des cuves.
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BARRA | (Commerce) que l'on appelle quelquefois barro ; mesure de longueur dont on se sert en Portugal pour mesurer les draps, serges, toiles &c. les six barras font dix cabidos ou cavidos, & chaque cabidos fait quatre septiemes d'aune de Paris. Voyez CABIDOS.
Barra est encore une mesure de longueur qui sert en quelques endroits d'Espagne à mesurer les étoffes ; c'est la même chose que la verge de Séville. Voyez VERGE. (G)
* BARRA, (Géog.) île de l'Océan à l'occident de l'Ecosse. Long. 10. lat. 56. 40.
Il y a un petit royaume de ce nom dans la Nigritie.
* BARRA, (Géog.) ville de l'Abyssinie en Afrique, sur le lac de Zaflan, au royaume de Gorgan, entre Zaflan & Gorgan.
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BARRACAN | subst. m. (Commerce) étoffe forte, dont la chaîne est de laine d'estame retorse, la trame à l'ordinaire, & qui se fabrique comme le drap : le nombre des fils est plus considérable, proportion gardée, que dans les autres étoffes, parce que celle-ci ne va point au foulon : il faut par la même raison qu'elle soit frappée extraordinairement fort. Voyez la manufacture de drap à l'article DRAPERIE. Elle est au sortir du métier telle qu'elle sera employée.
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BARRACANIERS | S. m. ouvriers qui font le barracan. Voyez BARRACAN.
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BARRAGE | (Commerce) droit établi pour la réfection des ponts & passages, & particulierement du pavé. Ce droit s'appelle ainsi à cause des barres ou barrieres qui traversent le chemin aux entrées des villes & autres lieux où ce droit est établi. Il n'y a guere que les voituriers qui le payent pour leurs chariots, charrettes, & chevaux de somme. Il y a cependant des lieux où toutes les voitures en général, & même les gens de pié, ont coûtume de le payer. Il est inégal, & plus ou moins fort selon les lieux.
Les barrages, & entr'autres celui de Paris, appartenant au Roi, formoient autrefois une ferme particuliere, qui maintenant est réunie à celle des aides. Le droit de barrage se paye à Paris sur tout ce qui y entre & arrive, soit par terre soit par eau. Voyez sur cette matiere les détails dans lesquels entre M. Savary, Dictionn. du Commerce, tom. I. pag. 862. & 863.
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BARRAGER | commis établi aux barrieres pour faire payer & recevoir les droits de barrage. Voyez BARRAGE. (G).
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BARRE | S. f. ce terme pris grammaticalement a plusieurs acceptions différentes, entre lesquelles les deux suivantes sont les plus générales. Il se prend ou pour un morceau de bois, de fer, ou d'autre matiere, rond, quarré, ou à pans, dont la largeur & l'épaisseur sont peu considérables par rapport à la longueur ; ou pour une ligne tracée soit sur la pierre soit sur le papier. Dans le premier cas il change quelquefois de nom, selon la matiere & la force ; & quoique l'on dise une barre de fer ou de bois, on dit un lingot d'or ou d'argent, une tringle de fer, un fil d'archal. Voyez plus bas d'autres acceptions du mot barre.
BARRE, en terme de Palais, dénote une enceinte de menuiserie, haute de trois ou quatre piés, derriere laquelle les avocats sont placés pour y plaider des causes. Voyez COUR.
On l'appelle en quelques endroits barre d'audience, & dans d'autres auditoire ; elle répond à ce qui étoit appellé parmi les Romains causidica. On l'appelle barre parce qu'elle est formée par une barriere, appellée aussi par des auteurs cancelli, barreaux, & caulae, parc, par une métaphore prise d'un lieu où parquent les moutons.
La dénomination de barre ou barreau est aussi donnée aux bancs où les gens de loi ou les avocats sont assis, à cause de la barre ou barriere qui sépare les conseillers, des plaideurs, procureurs & autres.
En Angleterre les gens de loi qui sont appellés à la barre, c'est-à-dire qui ont leur licence pour plaider, appellés licentiati, ou licentiés, sont nommés barristers. Voyez ADVOCAT.
Barre s'est dit aussi d'une exception contre une demande ou plainte. Voyez EXCEPTION.
L'auteur des termes de Pratique définit barre un moyen rapporté par le défendeur dans un procès, par lequel l'action du demandeur est détruite pour toûjours.
On distinguoit la barre en perpétuelle & temporelle.
Barre perpétuelle, est celle qui éteint l'action pour toûjours.
Barre temporelle, n'est qu'une exception dilatoire. Voyez DILATOIRE. (H)
* BARRE-SACREE. (Hist. anc. Myth.) instrument de bois en forme de cassette, partagé par deux sceptres posés en sautoir, dont les Egyptiens se servoient dans leurs sacrifices & pour leurs divinations. Kirker, Obel. pamph. & Oedip. Aegypt.
BARRES, (Hist. mod.) mot dont on s'est autrefois servi pour exprimer un exercice d'hommes armés & combattant ensemble avec des courtes épées, dans un espace fermé de barreaux ou barrieres qui les séparoient des spectateurs. Voyez LICE. (G)
BARRES, (Jeu) est encore le nom que les jeunes gens donnent à un jeu qui consiste à se séparer en deux troupes, à venir se provoquer réciproquement, à courir les uns contre les autres entre des limites marquées ; ensorte que si quelqu'un de l'un ou de l'autre parti est pris par ses adversaires, il demeure prisonnier jusqu'à ce que quelqu'un de son parti le délivre en l'emmenant malgré les poursuites du parti contraire. (G)
BARRES, en Musique, sont des traits tirés perpendiculairement à la fin de chaque mesure sur les lignes de la portée, pour séparer la mesure qui finit de celle qui recommence. Ainsi les notes contenues entre deux barres forment toûjours une mesure complete , égale en valeur & en durée à chacune des autres mesures comprises entre deux autres barres, tant que le mouvement ne change pas. Mais comme il y a plusieurs sortes de mesures qui different considérablement en durée, les mêmes différences se trouvent dans les valeurs contenues entre les deux barres de chacune de ces especes de mesures. Ainsi dans la mesure à 3 tems qui se marque par ce signe 3/2, & qui se bat lentement, la somme des notes comprises entre deux barres doit faire une ronde & demie : & dans cette autre mesure à trois tems 3/8, qui se bat vîte, la même somme ne fait que trois croches ; desorte que quatre fois la valeur contenue entre deux barres de cette derniere mesure, ne font qu'une fois la valeur contenue entre deux barres de l'autre.
Le principal usage des barres est de distinguer les mesures, & d'en indiquer le frappé qui se fait toûjours sur la note qui suit immédiatement la barre. Elles servent aussi dans les partitions à montrer les mesures correspondantes dans chaque portée. Voyez PARTITION.
Il n'y a guere que cent ans qu'on s'est avisé de tirer des barres de mesure en mesure : auparavant la musique étoit simple ; on n'y voyoit guere que des rondes, des blanches & des noires, peu de croches, presque jamais de doubles croches, avec des divisions moins inégales, la mesure en étoit plus aisée à suivre. Cependant j'ai vû nos meilleurs Musiciens se trouver embarrassés à bien exécuter l'ancienne musique d'Orlande & de Goudimel : ils se perdoient dans la mesure, faute des barres auxquelles ils étoient accoutumés, & ne suivoient qu'à peine des parties chantées autrefois couramment par les Musiciens d'Henri III. (S)
BARRE, en terme de Blason, dénote une piece honorable qui ressemble de près à la bande, dont elle ne differe qu'en ce qu'elle est plus étroite, & en ce que la barre peut être placée dans telle partie du champ qu'on veut ; au lieu que la fasce ou bande est confinée à un seul endroit. Voyez FASCE. (V)
BARRE, en Fauconnerie, se dit des bandes noires qui traversent la queue de l'épervier.
BARRE, (Commerce) mesure de longueur dont on se sert en Espagne pour mesurer les étoffes, ainsi qu'on fait de l'aune en France.
Il y a trois sortes de barres ; celle de Valence, celle de Castille, & celle d'Aragon.
La barre de Valence contient deux piés neuf pouces sept lignes, qui font dix treiziemes de l'aune de Paris ; de maniere que treize barres de Valence font dix aunes de Paris.
La barre de Castille contient deux piés sept pouces deux lignes & un peu plus, qui font cinq septiemes de l'aune de Paris : ainsi sept barres de Castille font cinq aunes de Paris.
La barre d'Aragon est à quelques lignes près semblable à celles de Valence & de Castille ; ensorte que trois barres d'Aragon font deux aunes de Paris. (G)
BARRE, (Marine) c'est un amas de sable ou de vase qui se forme à l'entrée des rivieres & des ports, & qui la bouchent de façon qu'on n'y peut arriver que de haute mer, ou quelquefois par des ouvertures & des intervalles qu'on y trouve, & qui forment des passes qu'on appelle chenal. Ces sortes d'endroits s'appellent havre de barre, riviere de barre. Voyez HAVRE. (Z)
BARRE ; ce mot dans la Marine, se joint à plusieurs autres, & a des significations particulieres dont on peut voir ci-dessous les principales.
Barres d'arcasse, c'est un terme commun à la grande barre d'arcasse, ou lisse de hourdi, & aux petites barres d'arcasse, ou barres de contr'arcasse ou contrelisses ; elles sont toutes à l'arcasse du vaisseau, & le soûtiennent. La grande barre d'arcasse est la plus haute, & pose par son milieu sur le haut de l'étambord, & par ses bouts sur les estains : c'est le dernier des bouts de l'arriere qui affermit la poupe. Voyez la position de la grande barre d'arcasse. Pl. IV. fig. 2. & la forme de cette piece, Planc. VI. fig. 39. Voyez LISSE DE HOURDI.
Barres d'arcasses, contrelisses, barres de contr'arcasse ; ce sont celles qui se posent au-dessous de la lisse de hourdi, elles sont assemblées à queue d'aronde dans les estains & avec l'étambord par une entaille qu'on leur fait. Voyez leur position, Planc. IV. fig. 1. n°. 11.
Barre de pont ; c'est une autre barre d'arcasse sur laquelle on pose le bout du pont du vaisseau ; elle est parallele & presque semblable à la lisse de hourdi. Voyez la Pl. IV. fig. 1. n°. 10.
Barre d'arcasse de couronnement, c'est une longue piece de bois qui lie le haut du vaisseau par son couronnement. Voy. Pl. III. fig. 1. le couronnement du vaisseau coté N N.
Barre de cabestan ; ce sont des pieces de bois quarrés qui servent à faire virer le cabestan. Voyez CABESTAN.
Barre de virevaux ; voyez VIREVAUX.
Barres d'écoutilles : ce sont des traverses de bois, ou des pieces de bois étroites qui traversent les panneaux des écoutilles par-dessous, pour en tenir les planches jointes ; quelques-uns les appellent taquets de panneaux.
BARRE DE GOUVERNAIL, (Marine) c'est une longue piece de bois qui d'un bout entre dans une mortaise qui est dans la tête du gouvernail pour le faire mouvoir, & l'autre bout est attaché avec une cheville de fer à une boucle de même métal à la barre nommée manuelle, que le timonier tient. Voyez Pl. IV. fig. 1. la barre du gouvernail cotée 177.
Ce terme de barre est équivoque ; on le prend quelquefois pour le timon, & quelquefois pour la manuelle ou la manivelle. Voy. TIMON & MANIVELLE.
Changer de barre du gouvernail, c'est la faire tourner d'un autre côté.
Barre à bord : barre de gouvernail toute à bord, c'est-à-dire poussée contre le côté du vaisseau, ou aussi loin qu'elle peut aller.
Pousse la barre à arriver ; c'est lorsqu'on veut ordonner au timonier de pousser la barre au vent ; ensorte que le vent donne à plein dans les voiles pour arriver.
Pousse la barre à venir au vent ou pousse la barre sous le vent ; c'est afin de faire venir le vaisseau au lof, c'est-à-dire mettre la barre sous le vent pour virer.
BARRES de hune, (Marine) barreaux, tesseaux ; ce sont quatre pieces de bois mises de travers l'une sur l'autre, qui font saillie autour de chaque mât, au-dessous de la hune, pour la soûtenir, & même pour servir de hune aux mâts qui n'en ont point. Elles sont posées en croix au-dessous du ton des mâts, & servent à soûtenir les haubans, les mâts de hune, les perroquets, les essais, & diverses manoeuvres & poulies. Elles sont un peu arquées, le concave en-dedans ; voyez à la Planche I. aux articles des MATS, les chiffres 12. 13 & 14. le ton, le chouquet, & la hune ; au-dessous sont placés les barres, barreaux, ou tesseaux. Leur croix traverse le vaisseau par le milieu & de bord à bord ; aux angles de ces barres, il y a de petits corps de mouton, par où sont amarrés de petits haubans qui traversent aux grands haubans pour les affermir. Voyez à la Planche I. le chiffre 14. ces petits haubans.
Les barres des perroquets servent à tenir le bâton du pavillon. On donne autant de longueur aux barres de hunes, que le fond de la hune a de largeur.
Les grandes barres de hune d'un vaisseau de cent trente-quatre piés de long de l'étrave à l'étambord, doivent avoir cinq pouces & demi d'épais & sept pouces & demi de large ; toutes les autres sont moins larges à proportion, & aussi plus plates & plus minces ; leur longueur doit être d'environ neuf piés & demi.
Celles du mât de misene doivent avoir huit piés & demi de long.
Celles du mât d'artimon, quatre piés & demi.
Celles de beaupré : quatre piés & demi, de même que celles du grand mât de hune.
Celles du mât de hune d'avant doivent avoir trois piés & demi.
Celles du perroquet de fougue, deux piés.
Celles du grand perroquet & du petit beaupré, deux piés.
Celles du perroquet de misene, un pié & demi au moins.
Ces mesures ne sont pas invariables ; il y a des constructeurs qui prétendent que la longueur des barres de hune, qui sont placées dans la longueur de poupe à proue, doit être du tiers de la largeur du vaisseau, que chaque six piés de leur longueur leur doit donner cinq pouces d'épaisseur de haut en bas, & que leur largeur doit être des quatre cinquiemes parties de leur épaisseur.
A l'égard de celles qui sont posées dans la largeur du vaisseau, ou qui le traversent d'un bout à l'autre, elles doivent être un peu plus courtes, quoiqu'égales en largeur ; mais en épaisseur de haut en-bas, elles doivent avoir aussi un quart moins que de largeur.
Les barres de hune du mât de misene doivent être d'une sixieme partie plus courtes que celles du grand mât. Les barres du mât d'artimon à-peu-près la moitié de celles du grand mât, tant en longueur, largeur, qu'épaisseur. Celles de beaupré, qui doivent être posées tout à fait de niveau, ont les mêmes proportions que celles de l'artimon, aussi bien que celles du grand mât de hune ; & celles du mât de hune d'avant doivent être d'une dixieme partie plus petites.
Les barres de hune du grand perroquet doivent être en toutes proportions de la moitié de celles du grand mât de hune ; il en doit être de même à l'égard des barres du mât de hune d'avant : celles du perroquet d'artimon doivent être un peu plus petites que celles du grand perroquet, & celles du perroquet de beaupré leur doivent être égales.
BARRES de cuisine ; ce sont des barres de fer qui servent à soûtenir les chaudieres qu'on met sur le feu ; elles sont posées de long & de travers dans les cuisines des vaisseaux.
BARRES ou BARRIERES des ports, (Marine) ce sont de longues poutres dont on ferme les entrées des ports ; mais plus souvent on se sert de chaines. (Z)
BARRE, terme de Riviere ; piece de bois dans une écluse, qui soûtient les aiguilles.
BARRE, terme de Riviere ; certain flot particulier à la riviere de Seine : ce flot est haut environ de deux piés, & vient fort impétueusement avec le flux de la mer, ce qui le rend dangereux pour les bateaux mal fermés.
La barre n'est sensible que jusqu'au Pont-de-l'Arche.
BARRES, (Manége) ce sont les parties les plus hautes de la gencive du cheval, où il n'y a jamais de dents ; elles sont situées entre les dents mâchelieres & les crochets de part & d'autre de la bouche ; c'est où se fait l'appui du mors de la bride, qui sert à conduire le cheval. C'est un défaut à cet animal d'avoir les barres rondes & peu sensibles ; car encore que le canon simple (voyez CANON) porte sur la langue, les barres ne laissent pas d'en ressentir l'effet au-travers, tant elles sont sensibles & délicates. Il faut aux chevaux qui ont les barres rondes & peu sensibles, un mors qui en réveille le sentiment, tel qu'un mors qui tient de l'entier, c'est-à-dire qui ne plie point dans le milieu de la liberté de la langue. Les barres tranchantes marquent une bouche extrèmement fine. On dit que la levre d'un cheval arme la barre, pour dire qu'elle la couvre.
BARRE, (Manége) c'est un morceau de bois gros comme la jambe, rond, & long de sept à huit piés, percé d'un trou à chaque bout, pour y arrêter deux cordes, dont l'une s'attache à la mangeoire, & l'autre au poteau. Voy. MANGEOIRE, POTEAU. Ce sont ces morceaux de bois qui séparent les chevaux l'un de l'autre dans une écurie : ils sont ordinairement suspendus à un pié & demi de terre. Les chevaux s'embarrent quelquefois. Voyez EMBARRER. (V)
BARRE d'appui, (Architect.) les ouvriers l'appellent plate-bande d'appui ou plaque bande quarderonnée, parce qu'il y a deux quarts de ronds aux deux côtés pour adoucir les arêtes : c'est, dans une rampe d'escalier ou un balcon de fer, la barre de fer applatie sur laquelle on s'appuye, & dont les arêtes sont rabattues. (P)
* BARRE de godet ; c'est une barre de fer plat en volute par sa partie saillante, & qui par l'autre bout qui porte sur les entablemens est à harpon ou à patte, & qui a, à un pié de sa partie saillante, une bride pour soûtenir les bords du godet de plomb, communément dit gouttiere.
* BARRE de languettes ; c'est une barre de fer plat toute droite, qui se pose aux manteaux de cheminée, & sert à soûtenir la languette de la cheminée, ou son devant ; elle est plus en usage pour les cheminées de brique, que dans les autres ; parce que la brique ne se soûtenant pas par elle-même, comme le plâtre, elle a besoin de cet appui.
BARRE de lintot ou LINTOT ; c'est une barre de fer plat ou quarré, qui se pose au lieu de lintots de bois aux portes & aux croisées ; on en met aussi aux croisées bandées en pierre, pour en empêcher l'écartement.
* BARRE de tremie ; c'est une barre de fer plat coudée à double équerre à chacune de ses extrémités, & dont l'usage est de soûtenir les plâtres des foyers des cheminées ; elle se place dans les trémies observées dans les planchers, où elle pose sur les solives d'enchevêtrure.
BARRE, chez les Fontainiers ; on appelle barre de soudure, une piece étendue en long, composée de plomb & d'étain, pesant environ 18 à 20 livres. Voyez SOUDURE. (K)
BARRE fendue ou fondue, verge de barre fondue ; petite barre de dessous, barre de derriere, barre à aiguilles, &c. parties du métier à faire des bas. Voyez l'article BAS.
BARRE, outil de Charron ; c'est une espece d'essieu de fer de la longueur de quatre piés, de trois pouces d'épaisseur, quarré au milieu, & arrondi par les deux bouts ; il sert aux Charrons à conduire deux grandes roues à la fois.
BARRE, (Menuiserie) s'entend des pieces de bois qu'on met aux contrevents, aux portes, &c. pour entretenir les planches ensemble, Voyez 1. 2. Pl. IV. de Menuiserie, fig. 3.
BARRES à queues, (Menuiserie) ce sont celles qui entrent dans les montans, comme celles des portes de granges qui sont à bâtis, & dont les barres sont emmanchées à queue d'aronde dans les montans.
BARRE, chez les Tonneliers, est une piece de bois que ces ouvriers appliquent en travers sur chacun des fonds d'une futaille, & qu'ils y assujettissent avec des chevilles qui appuient par un bout sur cette traverse, & de l'autre entrent dans des trous pratiqués avec le barroir, dans ce qu'on appelle le peigne du jable. La barre sert à maintenir les douves des fonds, & empêche qu'elles ne se déplacent de dedans le jable. Voyez PEIGNE de jable & BARROIR.
BARRE, terme de Tourneur, est un long morceau de bois qu'on appelle aussi appui & support, que l'ouvrier a devant lui en tournant, & sur lequel il appuye ses outils. Voyez TOUR.
BARRE à dégager, (Verrerie) il y a deux barres à dégager ; l'une grande, l'autre petite : elles ont l'une & l'autre le même usage. Les tiseurs s'en servent pour dégager la grille, & mettre le four en fonte. La grande a onze piés de longueur sur quatorze lignes d'épaisseur, dans la partie où elle est quarrée ; cette partie équarrie a vingt-deux pouces de long ; le reste est arrondi. La petite n'a que sept piés de long.
BARRE à porter ; c'est ainsi qu'on appelle, dans les Verreries, un instrument, ou barre, qui sert à transporter le pot de l'anse dans la tonnelle. Voyez VERRERIE, POT, TONNELLE.
BARRE à repasser (Verrerie) instrument de fer ou de bois, dont on se sert dans la préparation des briques, pour la construction des fourneaux de Verreries ou autres. Cette barre est quarrée ; elle a neuf à dix lignes d'épaisseur ; l'ouvrier la tient entre ses mains ; & quand il a placé les briques seches dans la boîte qui en détermine les dimensions, il applique la barre sur les bords de la boîte, il la tire fortement à lui en suivant toûjours les bords, & enleve dans ce mouvement l'excédant de brique.
* BARRE (Géog.) petite ville de France, dans le Gévaudan, au diocese de Mende.
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BARR | (OS) Voyez OS & HANCHE, & DENTS BARREES. Voyez DENT.
BARRES ; adject. (Hist. ecclés.) ancien nom des Carmes, que l'on appelloit freres Barrés, parce qu'ils avoient les habits barrés & bigarrés de blanc & de noir, ce que l'on voit encore dans les vieilles peintures du cloître de leur grand couvent de la place Maubert à Paris. Voici quelle fut l'occasion de ces sortes d'habits des religieux Carmes : les Sarrasins, après s'être rendus maîtres de la Terre-sainte, défendirent à ceux de cet ordre de porter capuches blancs, non plus qu'aucun autre habit blanc, parce que le blanc étoit parmi eux une marque de distinction & de noblesse. Les Carmes alors furent contraints de suivre la coûtume des Orientaux, & de prendre des manteaux bariolés : étant passés en occident avec cette sorte d'habit, ils y furent appellés les freres Barrés, nom qui est demeuré à une rue du quartier saint Paul, où ils eurent leur premiere maison, jusqu'à ce qu'ils furent transportés, sous le regne de Philippe-le-Bel, à la place Maubert. Ils étoient venus en France sous le pontificat d'Honoré IV. environ l'an 1285 : mais dans la suite ces religieux reprirent leurs premiers habits blancs, ainsi que Tritheme le remarque de Laudibus Carmelit. l. VI. Dominicus macer. Il y a eu autrefois des gens d'église qui portoient aussi des habits bigarrés. On a vû dans le cabinet de M. Conrad, un abbé habillé partie de noir & de rouge, jusqu'au bonnet, ainsi que les consuls de plusieurs villes. Le concile de Vienne a défendu aux ecclésiastiques de tels habits, qui étoient appellés vestes virgatae. (G)
BARRE (en terme de Blason) se dit lorsque l'écu est divisé en forme de barres, en un nombre pair de partitions, & qu'il est composé de deux ou de plusieurs couleurs, réciproquement mêlées. Il faut dire le nombre de pieces ; par exemple, barré de tant de pieces. Si les divisions sont en nombre impair, il faut d'abord nommer le champ, & exprimer le nombre des barres. Voyez BARRE.
BARRE-BANDE, terme d'usage, lorsque l'écusson est également divisé en barres & en bandes, par des lignes transversales, & des lignes diagonales, en variant mutuellement les couleurs dont il est formé. C'est ainsi que l'on dit : il porte barré-bandé, or & sable. CONTRE-BARRE. Voyez CONTRE. Urtieres en Savoie, maison éteinte, barré d'or & de gueules, à la bande de losanges accollées de l'un en l'autre. (V)
BARRE, adj. (terme de Palais) synonyme à partagé ; ainsi lorsqu'on dit que les juges ou les avis sont barrés, c'est-à-dire qu'il y a deux sentimens ouverts par la chambre, lesquels sont tous deux appuyés d'un égal nombre de suffrages. Voyez PARTAGE. Voyez aussi COMPARTITEUR. (H)
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BARREAU | sub. m. en terme de Palais, signifioit dans l'origine une barre de fer ou fermeture de bois à hauteur d'appui, qui séparoit l'enceinte où étoient assis les juges, d'avec les parties extérieures du tribunal où étoient les avocats, & autres praticiens : mais par extension ce terme a signifié dans la suite le corps même des praticiens, avocats, procureurs, &c. C'est dans ce dernier sens qu'on dit les maximes du barreau, l'éloquence du barreau. Quelquefois même ce mot est pris dans une plus grande étendue encore, comme synonyme au forum des Latins ; & alors il s'entend collectivement de tous les officiers de justice, magistrats & praticiens ; en un mot de tout ce qu'on appelle autrement gens de robe. (H)
BARREAU, s. m. (en Architecture) se dit de toute barre de fer ou de bois quarré, employée dans un bâtiment. Voyez BARRE.
BARREAU MONTANT DE COSTIERE, c'est à une grille de fer, dans l'endroit où porte le barreau, que la porte de fer est pendue ; & le barreau montant de battement est celui où la serrure est attachée.
Barreau, se dit en particulier des barres de fer, ou de bois, qui grillent les fenêtres ou dessous de porte, ou qui font le même office dans les grilles ou portes de fer.
Barreau à pique ; ce sont dans les grilles de fer des barreaux qui passent par la traverse du haut, qui l'excedent & qui se terminent en pointe.
Barreau à flamme, ce sont dans les grilles de fer des barreaux qui passent par la traverse du haut, qui l'excedent & dont l'extrémité est terminée en pointe, & repliée en ondes.
BARREAU, s. m. (partie d'une presse d'Imprimerie) c'est une barre de fer, de quatre pouces de circonférence, quarrée par le bout qui traverse la partie supérieure de l'arbre de la presse & la partie inférieure de la vis, où il est arrêté par des clavettes ; le barreau est coudé & arrondi dans le reste de sa longueur, qui est environ de trois piés ; son extrémité se termine en pointe, mais elle est garnie & revêtue d'un manche de bois tourné, poli, de la longueur d'un pié, sur six à sept pouces de circonférence, & plus gros dans sa partie supérieure. C'est de cet agent que dépend tout le jeu d'une presse, on ne peut sans lui faire mouvoir la vis dans son écrou, ni le pivot dans la grenouille. Voyez Pl. quatrieme de l'Imprimerie, fig. premiere & seconde B C D. D est la poignée du manche de bois.
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BARREAUX | (Géog.) ville de France, dans le Dauphiné, à l'entrée de la vallée de Grésivaudan, sur l'Iser.
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BARRELIERE | S. f. (Hist. nat. bot.) genre de plante, dont le nom a été dérivé de celui du P. Barrelier Jacobin, dont le nom est bien connu des Botanistes. La fleur de ce genre de plante est monopétale & faite en forme de masque ; la levre supérieure est relevée & l'inférieure divisée en trois parties. Il s'éleve du fond du calice un pistil qui est attaché comme un clou à la partie postérieure de la fleur, & qui devient dans la suite un fruit membraneux oblong à quatre angles, composé d'une seule capsule remplie de semences plates & arrondies. Plumier, nova plant. Amer. gen. Voyez PLANTE. (I)
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BARREME | (Géog.) petite ville de France, dans la haute Provence, sur la riviere d'Asse.
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BARRER | BARRER
On barre aussi tout autre crédit, billet, obligation, quand on veut l'annuller. On appelle cette opération barrer, parce qu'on nomme barres les lignes ou traits de plume dont on croise ce qu'on veut qui demeure inutile dans quelqu'acte ou registre. (G)
BARRER les veines d'un cheval (Maréchal & Manége) c'est une opération qui se fait sur elles pour arrêter le cours des mauvaises humeurs qui s'y jettent. On couvre le cuir, on dégage la veine, on la lie dessus & dessous, & on la coupe entre les deux ligatures.
Quoique je sois persuadé du peu d'effet de cette opération, je vais cependant la décrire, à cause qu'elle ne peut faire aucun mal, & qu'elle est par elle-même fort peu à craindre.
On barre les veines des cuisses pour les maux de jambes & de jarrets ; aux paturons pour les maux de sole ; aux larmiers & aux deux côtés du cou, pour ceux des yeux : on peut encore barrer en plusieurs endroits. Dans toutes ces parties, excepté aux larmiers, on barre les veines de la maniere que je vais enseigner, après quoi j'indiquerai la façon de pratiquer la même opération sur les larmiers.
Quand on veut barrer la veine de la cuisse, on abat le cheval (voyez ABATTRE), ensuite on frotte bien avec la main les endroits où l'on veut barrer, pour faire pousser la veine, c'est-à-dire, un peu au-dessus du jarret & vers le milieu de la jambe ; ce qui s'appelle barrer haut & bas : ensuite on fend la peau en long dans ces deux endroits avec le bistouri ; & ayant découvert la veine, on passe par-dessous la corne de chamois, avec laquelle on la détache doucement, en allant & venant, de toutes les petites fibres qui y sont attachées : on la lie ensuite aux deux endroits de deux noeuds, avec une soie en double, l'ayant fendue pour la faire saigner après la premiere ligature, qui est celle du jarret ; puis on la coupe en-haut & en-bas entre les deux ligatures : au moyen de quoi la portion de veine qui est entre deux ne recevant plus de sang par la suite, s'applatit & devient inutile. Cette opération seroit bonne si l'humeur qui incommode la partie, n'y communiquoit que par cette branche de veine, ce qu'on ne sauroit admettre lorsqu'on sait l'Anatomie & le cours du sang, puisqu'elle s'y rend par une infinité de rameaux.
On ne barre point lorsque la partie est enflée ; parce que l'enflure resteroit indépendamment de l'opération, & qu'on auroit quelquefois bien de la peine à trouver la veine.
Quand on barre les veines du cou, on le fait deux doigts au-dessus de l'endroit où l'on saigne : il n'y a qu'une circonstance à omettre, qui est de ne pas couper la veine entre les deux ligatures ; car s'il arrivoit que la ligature d'en-haut vînt à couler, ce qui peut aisément se faire par le mouvement de la mâchoire du cheval, celui-ci perdroit tout son sang. L'opération achevée, on remplit la plaie de sel.
On peut barrer les larmiers sans incision : mettez pour cet effet au cou la corde à saigner, les veines s'enfleront ; passez ensuite au-travers de la peau sous la veine, une aiguille courbe enfilée d'une soie en double ; faites-la sortir de l'autre côté : ôtez l'aiguille & noüez la soie ferme, puis graissez la partie, elle enfle beaucoup ; mais l'enflure disparoît au bout de neuf jours. L'endroit se pourrit, la veine se consolide, l'endroit où l'on a fait la ligature tombe, & la veine se trouve bouchée.
Soleysel enseigne à arracher la veine du jarret : mais comme il avertit en même tems qu'il y a du risque à courir, de la douleur & de l'enflure à essuyer, il engage plûtôt à n'y pas songer qu'à répeter l'opération.
Le barrement de la veine est très-bon pour ôter la difformité des varices ; car comme celles-ci ne sont occasionnées que par le gonflement de la veine qui passe par le jarret, on empêche le sang d'y couler, au moyen de quoi la varice s'applanit & ne paroît plus.
BARRER les chevaux (Manége) c'est les séparer les uns des autres dans l'écurie, en mettant des barres entr'eux. Voyez BARRE. (V)
Barrer se dit, en terme de Chasse, d'un chien qui balance sur les voies.
BARRER, c'est chez les Layetiers mettre des barres de bois le long des couvercles pour mieux tenir les planches dont ils sont composés.
BARRER une futaille, terme de Tonnelier ; c'est appliquer des barres en-travers sur les douves des fonds, & les y assujettir avec des chevilles. Ce mot se dit aussi des trous qu'on fait avec le barroir dans les peignes du jable. Voyez BARRE.
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BARRETTE | S. f. (Hist. mod. ecclés.) bonnet que le pape donne ou envoye aux cardinaux après leur nomination. En France, le Roi donne lui-même la barrette aux cardinaux qui ont été faits à sa nomination. A Venise, ce sont les nobles qui la leur portent. La barrette étoit originairement un bonnet de toile mince, & qui s'appliquoit exactement sur les oreilles ; une espece de beguin d'enfant, qui n'étoit qu'à l'usage des papes, & qui dans la suite a été accordé aux cardinaux.
BARRETTE, en général veut dire, parmi les Horlogers, une petite barre : mais on donne ce nom à des choses très-différentes. C'est ainsi que l'on appelle, par exemple, une très-petite barre que l'on met dans le barrillet pour empêcher que le ressort ne s'abandonne. Voyez la fig. 49 1 b, Pl. X. de l'Horlogerie.
BARRETTE d'une roue, signifie encore, parmi les Horlogers, ce que l'on appelle rayon dans une roue de carrosse. Voyez ROUE. Au moyen de ces barrettes on rend la roue beaucoup plus legere, en lui conservant cependant une certaine force.
BARRETTE, s'entend aussi, en Horlogerie, d'une petite plaque posée sur l'une ou l'autre platine, & dans laquelle roule le pivot d'une roue, au lieu de rouler dans le trou de la platine. Voyez la fig. 43. b, Planche X. de l'Horlogerie.
Elles sont en général fort utiles, en ce que 1°. elles allongent les tiges des roues, & par-là leur donnent beaucoup plus de liberté ; & 2°. qu'elles donnent moyen de faire des tigerons, chose très-essentielle pour conserver l'huile aux pivots des roues. Voyez PIVOT, TIGE, TIGERON, PLATINE, &c. Dans les montres simples bien faites, il y a ordinairement deux barrettes, l'une à la platine de dessus, & l'autre à la platine des piliers. La premiere sert pour le pivot de la roue de champ d'en-haut, & l'autre pour le pivot de cette roue & celui de la petite roue moyenne. (T)
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BARRICADE | terme de guerre, est une espece de retranchement fait à la hâte avec des tonneaux ou paniers chargés de terre, d'arbres, des palissades, ou choses semblables, pour mettre une place ou un poste en état de se défendre contre l'ennemi. On fait servir ordinairement à cet usage des pieux ou des poteaux traversés de bâtons, & ferrés par le bout : on a coûtume de les planter dans les passages ou breches, pour arrêter également la cavalerie & l'infanterie. Voyez PALISSADE. (Q)
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BARRIERE | S. f. (Gramm.) se prend pour un assemblage de planches destiné à fermer un passage à l'entrée d'une ville ou ailleurs ; c'est en ce sens qu'on dit, la barriere de Vaugirard, la barriere de Séve : ou pour les limites d'un état ; on dit les Alpes servent de barriere à l'Italie : ou en différens autres sens, qu'on peut voir ci-dessous.
BARRIERE VIRGINALE, virginale claustrum, en Anatomie ; c'est la même chose que l'hymen. Voyez HYMEN. (L)
BARRIERE, (Traité de la) en Politique, est celui qui fut conclu en 1716 entre l'empereur Charles VI. & les Hollandois ; il contient 29 articles : en vertu de ce traité, les Hollandois ont droit de mettre des garnisons de leurs troupes dans les villes de Namur, Tournai, Menin, Furnes, Warneton, Ypres, le fort de la Knoque, & dans les villes de Dendermonde & de Ruremonde. La garnison doit être moitié Hollandoise, & moitié Autrichienne. Ces troupes ou ceux qui les commandent en leur nom, sont obligés à prêter serment de fidélité à la maison d'Autriche avant que d'entrer dans ces garnisons.
BARRIERE, (Comm.) on appelle ainsi dans les principales villes de France, particulierement à Paris, les lieux où sont établis les bureaux des entrées, & où les commis en reçoivent les droits, suivant les tarifs ou pancartes reglées au conseil du roi.
On leur a donné le nom de barrieres, parce que les passages par lesquels arrivent les voitures & les marchandises sujettes aux droits, sont traversés par une barre de bois qui roule sur un pivot, & qui s'ouvre ou se ferme à la volonté du commis.
Il y a à Paris soixante barrieres, qui sont toutes placées à la tête des faubourgs, & dans vingt-deux desquelles, outre les commis du barrage, il y a des commis pour la douanne qui examinent les lettres de voiture, reçoivent les principaux droits, & veillent aux intérêts des fermiers généraux. Les autres barrieres ne sont, pour ainsi dire, que des barrieres succursales, pour tenir plus libres les premieres, qui ne manqueroient pas d'être embarrassées s'il n'y avoit qu'elles qui fussent ouvertes.
C'est à ces soixante barrieres que toutes les voitures, & ceux qui sont chargés des denrées comprises dans les tarifs, doivent s'arrêter, souffrir la visite, & payer les entrées. Les commis ont même la permission de visiter les carrosses, berlines, chaises &c. des particuliers, les porte-manteaux, valises, coffres, pour voir s'il n'y a point de marchandises de contrebande. Voyez sur cette matiere le Dictionn. du Commerce. (G)
BARRIERE, en Architecture, est un assemblage de pieces de bois qui sert de borne ou de chaînes au-devant, & dans les cours des hôtels & palais. (P)
BARRIERES, en termes de Fortifications, sont des especes de portes faites dans un passage ou un retranchement, pour pouvoir en défendre l'entrée, & en faciliter la sortie.
On les fait communément de grands poteaux d'environ quatre à cinq piés de long, & placés à la distance de dix piés les uns des autres, avec des solives en-travers, afin d'empêcher les chevaux & les hommes de forcer le passage. Dans le milieu est une barre de bois qui est mobile, & qu'on ouvre & ferme à son gré. Les barrieres qui ferment les portes ou les ouvertures des lignes de circonvallation, sont à fleau tournant sur un poteau, dont le sommet taillé en pivot est planté sur le milieu, où il partage l'ouverture en deux passages égaux. Ce fleau bat contre les deux autres poteaux plantés aux deux extrémités des passages, avec des entailles pattées, auxquelles il s'accroche & se ferme avec une cheville plate. Attaque des places de Vauban. (Q)
BARRIERE, (Manége) petit parc fermé où l'on faisoit les joûtes, les tournois, les courses de bague, &c. Sitôt qu'un cheval de bague a franchi la barriere il court de toute sa force. (V)
BARRIERE, en terme de Metteur-en-oeuvre, n'est autre chose qu'une bande en maniere d'ansette, dans laquelle on arrête le ruban d'un bracelet. Voyez ANSETTE.
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BARRIL | (Comm.) vaisseau oblong de forme sphérique, ou plûtôt cylindrique, servant à contenir diverses especes de marchandises, tant seches que liquides : il est plus petit que le tonneau. V. MESURE.
Le barril anglois, mesure de vin, contient le huitieme d'un tonneau, le quart d'une pipe, la moitié d'un muid ; ce qui fait trente-une mesures & demie de celles que l'on nomme en Angleterre gallons, & qui contiennent quatre pintes de Paris. Le barril contient trente-six gallons de biere, & trente-deux d'aile. Voyez PIPE, TONNEAU, &c.
Le barril de biere, de vinaigre, ou d'autre liqueur dont on veut faire du vinaigre, doit contenir trente-quatre de ces mesures, suivant l'étalon de la quarte d'aile, réglé par l'ordonnance de Guillaume III. ch. xxj. dixieme & onzieme année de son regne.
Le barril de Florence est une mesure de liqueurs qui contient vingt bouteilles, ou le tiers d'une étoile, ou staïo. Savary l'appelle star.
Barril est encore en usage pour signifier une certaine quantité de marchandises, un certain poids qui change suivant la diversité des denrées.
Le barril de harengs doit contenir trente-deux gallons ; mesure de vin, c'est-à-dire soixante-quatre pots de Paris, ce qui fait environ vingt-huit gallons, suivant l'ancienne regle, & cela va pour l'ordinaire au nombre de mille harengs laités.
Le barril de saumon doit contenir quarante-deux gallons, ou quatre-vingt-quatre pots de Paris. Et le barril d'anguilles autant.
Le barril de savon doit contenir deux cent cinquante-six livres.
Nous nous servons également en France du mot de barril pour une certaine quantité de marchandises. On dit un barril d'esturgeon, de thon, d'anchois ; un barril ou caque de poudre pour les vaisseaux, est ordinairement de cent livres : on dit encore un barril de chair salée, un barril d'huile d'olive, un barril de câpres, d'olives, de vinaigre, de verjus, de moutarde, pour dire un barril plein de l'une de ces choses. (G)
BARRIL, (Marine) Barril de galere, c'est un barril qu'un homme peut porter plein d'eau, & dont il se sert pour en remplir les barriques, que l'on ne peut transporter ou à la fontaine ou à la riviere, où l'on va faire l'eau.
Barril de quart ; c'est le barril de galere qu'on donne plein d'eau le soir à ceux qui doivent faire le quart de la nuit.
Barril où l'on met les viandes.
Barril de poudre ; c'est sur mer, comme on l'a déjà dit, cent livres de poudre mises dans un barril.
Barrils à bourse, c'est un barril couvert de cuir, où le canonnier met de la poudre fine : on l'appelle ainsi à cause qu'il se ferme comme une bourse. (Z)
BARRILS FOUDROYANS & FLAMBOYANS, sont, dans l'Artillerie, des barrils remplis d'artifice qu'on fait rouler sur l'ennemi lorsqu'il veut franchir les breches & monter à l'assaut. (Q)
BARRIL DE TROMPES, terme d'Artificier, c'est un assemblage de plusieurs artifices appellés trompes, enfermés dans un barril ou fourreau de toile goudronnée, pour les faire partir de dessus l'eau, où on le fait enfoncer jusqu'au collet par le moyen d'un contre-poids.
BARRIL A SCIER, (Tonnelier) c'est un instrument sur lequel les Tonneliers posent les douves qu'ils veulent rogner avec la scie. Il consiste en deux moitiés de barril ajustées l'une au-dessus de l'autre par trois douves communes ; chacune de ces moitiés a deux fonds, desorte que cet instrument peut servir à trois usages. 1°. Il leur sert d'escabeau pour scier les douves qu'ils posent dessus, en appuyant encore un genou sur la douve pour l'assujettir. 2°. Il peut leur servir de siége pour s'asseoir dans leurs boutiques ; & en troisieme lieu, il peut encore leur servir comme d'un réservoir pour y serrer ce qu'ils veulent, au moyen d'un trou pratiqué au fond supérieur de chaque barril. Cet instrument a deux piés ou environ de hauteur en tout. L'espace qui est entre chaque barril est vuide, pour donner plus de legereté à la machine totale qui est ronde, & d'environ un pié de diametre. Voyez Pl. II. du Tonnelier, fig. 2.
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BARRILLAGE | S. m. (Commerce) se dit des petits barrils qui tiennent environ la huitieme partie du muid & au-dessous.
En fait de commerce de saline, barrillage s'entend de toutes sortes de tonneaux ou futailles, comme gonnes, hambourgs, barrils, demi-barrils, &c. Il y a des contrôleurs du barrillage de la saline.
L'ordonnance des aides de 1680, tit. jv. des entrepôts & du barrillage, défend expressément de faire le barrillage, c'est-à-dire de faire arriver du vin en bouteilles, cruches ou barrils, ni vaisseaux moindres que muid, demi-muid, quart & huitieme, à l'exception des vins de liqueur qui viennent en caisse. Il n'est pas même permis aux habitans d'avoir chez eux du vin en bouteilles, cruches & barrils. (G)
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BARRILLARD | S. m. (Marine) c'est ainsi qu'on appelle sur les galeres l'officier qui a soin du vin & de l'eau.
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BARRILLATS | S. m. pl. dans les ports où il y a un arsenal de Marine, on donne ce nom aux ouvriers qui travaillent aux futailles.
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BARRILLET | S. m. diminutif de barril, se dit de tout vaisseau qui a la forme du barril, & qui est plus petit. Voyez BARRIL.
BARRILLET ou CAISSE, en Anatomie, signifie une assez grande cavité derriere le tambour de l'oreille ; elle est doublée d'une membrane qui a plusieurs veines & arteres. On dit que dans les enfans elle est pleine d'une matiere purulente : elle a dans sa cavité quatre petits os, qui sont le marteau, l'enclume, l'étrier, & l'orbiculaire. Voyez OREILLE & TYMPAN. (L)
BARRILLET, s. m. (Hydraulique) est un corps de bois arrondi en-dedans & en-dehors, avec un clapet posé sur le dessus. Ce corps loge dans une pompe à bras qui n'a point de corps de pompe, & sert de fond au jeu du piston, qui fait lever le clapet du barrillet, & ensuite le fait refermer ; & au moyen de la filasse dont il est garni, l'eau ne peut retomber dans le puits quand la soûpape est fermée.
On appelle encore quelquefois barrillet, le piston d'une pompe à bras qui n'a point de corps de pompe, mais qui joue dans un tuyau de plomb, & qui tire l'eau par aspiration d'un puits ou d'une citerne.
Ces sortes de barrillets sont attachés à une anse de fer suspendue à une verge aussi de fer ; & ils ont sur le dessus un clapet qui s'ouvre & se ferme à chaque coup de piston. Voyez POMPE, PISTON, CLAPET. (K)
BARRILLET, nom que les Horlogers donnent à une espece de boîte cylindrique ou tambour qui contient le grand ressort. Voyez la fig. 46, 47, 49, Pl. X. de l'Horlogerie.
Il est composé de deux parties, du barrillet B, proprement dit, & de son couvercle C. Le barrillet a dans sa partie B un rebord pour empêcher la chaîne de glisser ; & dans le dedans vers le milieu de sa hauteur, un crochet auquel s'attache l'oeil d'un bout du ressort. Ce crochet est tourné en sens contraire de celui qui est à l'arbre, afin que le ressort soit attaché fixement à l'un & à l'autre : par ce moyen on bande le ressort, en faisant tourner le barrillet ; car on fait mouvoir en même tems le bout du ressort qui lui est attaché, & l'autre bout fixé à l'arbre étant immobile, cette opération doit nécessairement produire cet effet. Voyez CROCHET.
On distingue dans les montres & dans les pendules les barrillets par les parties auxquelles ils servent ; comme barrillet du mouvement, de la sonnerie, &c. dans les pendules, sur-tout dans celles que l'on fait en France, comme il n'y a pas de fusée, le barrillet est denté à sa partie inférieure, & engrene, dans le pignon de la premiere roue du mouvement, ou de la sonnerie ; de façon que le ressort étant bandé, fait tourner le barrillet, qui communique ainsi le mouvement à toute la machine. Voyez la fig. 10. Q, W, K. Voyez MONTRE, RESSORT, ARBRE DE BARRILLET, PENDULE, SONNERIE, &c. (T)
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BARRILLIER | S. m. (Hist. mod.) nom d'un de ces anciens officiers de l'échansonnerie du roi & des princes, qui avoient soin du vin. Il en est parlé dans l'état des officiers de l'échansonnerie du tems de saint Louis, en 1261.
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BARRIQUAUT | S. m. (Comm.) se dit de certaines petites futailles ou tonneaux, dont les grandeurs ne sont point reglées : on dit un barriquaut de sucre, un barriquaut de soufre, &c. (G)
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BARRIQUE | S. f. (Tonnelier) tonneau ou futaille fait de merrein, & cerclé de cerceaux de bois liés avec de l'osier, & propre à contenir plusieurs sortes de marchandises, & particulierement de l'eau-de-vie.
Les barriques n'ont pas de grandeur reglée partout, à Paris il faut quatre barriques pour faire trois muids.
Ce sont les Tonneliers qui fabriquent & relient les barriques.
Les quatre barriques de vin font à Paris trois muids, à Bordeaux un tonneau six tierçons, en Anjou deux pipes. La barrique contient 210 pintes de Paris, ou vingt-six septiers & un quart ; ce qui revient à 360 pintes de Hollande.
La barrique se mesure encore par verges ou vettes, & varie pour le nombre de ces verges ou vettes dans presque tous les endroits.
En Angleterre la barrique de vin ou d'eau-de-vie est de soixante & trois gallons, ce qui revient à 252 pintes de Paris ; quatre de ces pintes faisant le gallon, Voyez GALLON. On met les sardines & leur huile aussi bien que celle de morue en barrique. (G)
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BARROIR | S. m. outils dont se servent les Tonneliers : c'est un instrument fait en forme de longue tariere, dont la meche est étroite & amorcée par le bout. C'est avec cet outil qu'on perce des trous au-dessus du jable, pour y faire entrer les chevilles qui tiennent les barres des futailles. Voyez Pl. II. du Tonnelier, figure premiere.
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BARROTÉ | adj. en Marine : on dit vaisseau barroté, lorsque le fond de cale est tout rempli, ou rempli jusqu'aux barrots.
BARROTS ou BAUX, (Marine) Voyez BAU. Quoiqu'on se serve indifféremment de ces termes de baux & de barrots, il est pourtant certain que ceux qui sont les plus exacts ne se servent de celui de bau que pour les solives du premier pont, & qu'ils employent celui de barrots pour les solives des autres ponts. Voyez Planche VI. figure 8. la forme de cette piece de bois.
Il y a les barrots des gaillards. Voyez leur situation Pl. IV. fig. prem. n°. 142.
Les barrots de la dunette, n°. 151.
Les barrots du celtis, n°. 128.
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BARROTINS | (Marine) lattes à baux ; ce sont de petits soliveaux qu'on met entre les baux & les barrots sous les ponts pour les soûtenir. Voyez Pl. VI. fig. 10. la forme de cette piece de bois.
Barrotins du premier pont. Voyez leur situation. Pl. IV. fig. prem. n°. 72.
Barrotins du second pont n°. 120.
Barrotins des gaillards, n°. 143.
BARROTINS d'écoutilles, demi-baux ou demi-barrots ; ce sont, en Marine, des bouts de baux & de barrots, qui se terminent aux hiloires & qui sont soûtenus par des pieces de bois nommées arcboutans, mises de travers entre deux baux. Voyez la forme de cette piece, Pl. VI. fig. 11.
Barrotins de caillebotis ; ce sont de petites pieces de bois qui servent à faire les caillebotis, & auxquelles on donne la tonture ou rondeur du pont du vaisseau en sa largeur. Voyez CAILLEBOTIS. (Z)
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BARROU | (LE) Géog. riviere d'Irlande, dans la province de Leinster ; elle passe à Caterlogh & à Leighlin, reçoit la Nure & la Sheire, forme le havre de Waterford, & se jette dans la mer d'Irlande.
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BARROYEMENT | S. m. vieux terme de Pratique, qui signifie un délai de procédure.
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BARROYER | v. n. vieux terme de Pratique, qui signifie à la lettre faire des procédures à la barre de la cour, & en général instruire un procès. Il ne se dit plus à présent que par dérision. (H)
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BARTAVELLE | S. f. (oiseau) PERDRIX ROUGE.
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BARTHELEMI | (SAINT-) Géog. petite île de l'Amérique, l'une des Antilles, au midi de celle de S. Martin. Lat. 17.
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BARTHELEMITES | S. m. pl. (Hist. ecclésiast.) clercs séculiers fondés par Barthelemi Hobzauzer à Saltzbourg le premier Août 1640, & répandus en plusieurs endroits de l'Empire, en Pologne & en Catalogne. Ils vivent en commun ; ils sont dirigés par un premier président, & des présidens diocésains : ils s'occupent à former des ecclésiastiques. Les présidens diocésains sont soûmis aux ordinaires, & ils ont sous eux des doyens ruraux. Ces degrés de subordination, & quelques autres, répondent avec succès au but de leur institution : un curé Barthelemite a ordinairement un aide ; & si le revenu de sa cure ne suffit pas pour deux, il y est pourvû aux dépens des curés plus riches de la même congrégation : tous sont engagés par voeux à se secourir mutuellement de leur superflu, sans être privés cependant de la liberté d'en disposer par legs, ou d'en assister leurs parens. Ce fonds augmenté de quelques donations, suffit à l'entretien de plusieurs maisons dans quelques diocèses. Quand il y en a trois, la premiere est un séminaire commun pour les jeunes clercs, où ils étudient les humanités, la Philosophie, la Théologie, & le Droit canonique. On n'exige aucun engagement de ceux qui font leurs humanités : les philosophes promettent de vivre & de persévérer dans l'institut ; les théologiens en font serment. Ils peuvent cependant rentrer dans le monde avec la permission des supérieurs, pourvû qu'ils n'ayent pas reçû les ordres sacrés. Les curés & les bénéficiers de l'institut habitent la seconde maison ; la troisieme est proprement l'hôtel des invalides de la congrégation. Innocent XI. approuva leurs constitutions en 1680. La même année l'empereur Léopold voulut que dans ses pays héréditaires ils fussent promus de préférence aux bénéfices vacans ; & le même pape Innocent XI. approuva en 1684 les articles surajoûtés à leurs regles pour le bien de l'institut.
* BARUA, (Géog.) ville d'Afrique dans l'Abissinie, capitale du royaume de Barnagasse, située près du fleuve de Marabu.
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BARUCH | (Prophétie de) Théolog. nom d'un des livres de l'ancien-Testament, qui contient en six chapitres les prophéties de Baruch, fils de Neri ou Nerias, & disciple ou secrétaire du prophete Jérémie. Nous n'avons plus l'exemplaire hébreu de la prophétie de Baruch : mais on ne peut douter qu'il n'ait écrit en cette langue, comme les fréquens hébraïsmes dont elle est remplie le font connoître. On en a deux versions syriaques : mais le texte Grec paroît plus ancien. Les Juifs ne reconnoissent point ce livre pour canonique ; & on ne le trouve point dans les catalogues des livres sacrés d'Origene, de Meliton, de S. Hilaire, de S. Grégoire de Nazianze, de S. Jerôme, & de Rufin. Mais dans le concile de Laodicée, dans S. Cyrille, S. Athanase, & S. Epiphane, il est joint à la prophétie de Jérémie. La prophétie de Baruch doit être aussi comprise sous le nom de ce dernier prophete, dans les catalogues des Latins ; car S. Augustin, & plusieurs autres peres, citent les prophéties de Baruch sous le nom de Jérémie. Dupin, Dissert. prélim. sur la Bible.
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BARULES | S. m. pl. (Hist. eccl.) certains hérétiques dont parle Sanderus, qui soûtenoient que le fils de Dieu avoit pris un corps phantastique ; que les ames avoient toutes été créées avant la naissance du monde, & qu'elles avoient toutes péché à la fois. Sander. haeres. 149. (G)
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BARUSSES | (Géog. anc. & mod.) cinq îles de l'Océan oriental, qui, à en juger par ce que Ptolomée en dit, pourroient bien être celles que nous connoissons sous le nom de Philippines. Mercator croit que ce sont celles de Mandanao, Cailon, Sabut, & les voisines de Circium ; & Baudrand, celles de Macassar, Gilolo, Ceram, & autres connues sous le nom de Moluques.
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BARUTH | (Comm.) mesure des Indes qui contient dix-sept gantans, c'est-à-dire, cinquante à cinquante-six livres de poivre poids de Paris. Voy. GANTAN. (G)
* BARUTH, (Géog.) ancienne ville de Turquie dans la Syrie, sur le bord de la mer. Long. 52. 50. lat. 33. 30.
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BARWIC | ou BERWICK, (Géog.) ville d'Angleterre dans le Northumberland, à l'embouchure de la Tweede.
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BARZOD | (Géog.) petite ville de la haute Hongrie, dans le comté du même nom, sur la riviere de Hernath. Le comté de Barzod est borné au septentrion par ceux de Sembin & de Torna ; à l'occident par ceux de Gomor & de Sag ; au midi par celui de Herwecz ; & à l'orient par celui de Chege.
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BAS | adj. terme relatif à la distance, ou la dimension en longueur considérée verticalement : haut est le correlatif de bas. L'usage, la coûtume, les conventions, l'ordre qui regne entre les êtres, & une infinité d'autres causes, ont assigné aux objets, soit de l'art, soit de la nature, une certaine distance ou dimension en longueur considérée verticalement. Si nous trouvons que l'objet soit porté au-delà de cette distance ou dimension, nous disons qu'il est haut ; s'il reste en deçà, nous disons qu'il est bas. Il semble que nous plaçons des points idéaux dans les airs, qui nous servent de termes de comparaison toutes les fois que nous employons les termes bas & haut ou élevé. Nous disons d'un clocher qu'il est bas, & d'une enseigne qu'elle est haute ; quoique de ces deux objets l'enseigne soit le moins élevé. Que signifient donc ici les mots haut & bas ? sinon que relativement à la hauteur ou à la distance verticale à laquelle on a coûtume de porter les clochers, celui-ci est bas ; & que relativement à la hauteur à laquelle on a coûtume de pendre les enseignes, celle-ci est haute. Voilà pour la distance & pour l'art ; voici pour la dimension & pour la nature. Nous disons ce chêne est bas, & cette tulipe est haute : ce qui ne signifie autre chose, sinon que relativement à la dimension verticale que le chêne & la tulipe ont coûtume de prendre, l'un peche par défaut, & l'autre par excès. C'est donc dans l'un & l'autre cas l'observation & l'expérience qui nous apprennent à faire un usage convenable de ces sortes de mots, qu'il ne faudroit peut-être pas définir, puisque l'exactitude, quand on se la propose, rend la définition plus obscure que la chose. Mais on n'écrit pas pour ses contemporains seulement.
BAS, (Marine) les hauts & les bas du vaisseau ; les hauts du vaisseau, ce sont les parties qui sont sur le pont d'en-haut ; & les bas, celles qui sont dessous.
BAS LE PAVILLON, mettre bas le pavillon, (Marine) c'est-à-dire abaisser le pavillon pour se rendre, ou pour saluer un vaisseau plus puissant à qui l'on doit cet honneur. On dit de même avoir les mâts de hune à bas. (Z)
BAS, adj. en Musique, signifie la même chose que grave, & est opposé à haut ou aigu : on dit ainsi que le ton est trop bas, qu'on chante trop bas, qu'il faut renforcer les sons dans le bas. Bas signifie aussi quelquefois doucement, à demi-voix, &c. & en ce sens il est opposé à fort ; on dit parler bas, parler, chanter ou psalmodier à basse-voix : il chantoit ou parloit si bas qu'on ne l'entendoit point.
Coulez si lentement & murmurez si bas,
Qu'Issé ne vous entende pas.
La Mothe, Opera d'Issé. (S)
BAS, (Man.) mettre bas, porter bas, voyez PORTER.
Avoir les talons bas, voyez TALON. (V)
BAS se prend en Venerie, en Chasse, pour peu élevé : on dit bas voler, ou bavoler, en parlant de la perdrix, ou autres oiseaux qui n'ont pas le vol haut.
* BAS, s. m. (Bonnetterie, & autres marchands, comme Peaussier, &c.) c'est la partie de nôtre vêtement qui sert à nous couvrir les jambes : elle se fait de laine, de peau, de toile, de drap, de fil, de filoselle, de soie ; elle se tricote à l'aiguille ou au métier. Voyez pour les bas tricotés à l'aiguille, l'article TRICOTER.
Voici la description du bas au métier, & la maniere de s'en servir. Nous avertissons avant que de commencer, que nous citerons ici deux sortes de Planches : celles du métier à bas, qui sont relatives à la machine ; & celles du bas au métier, qui ne concernent que la main-d'oeuvre. Ainsi la Pl. III. fig. 7. du métier à bas, n'est pas la même Planche que la Pl. III. fig. 7. du bas au métier.
Le métier à faire des bas est une des machines les plus compliquées & les plus conséquentes que nous ayons : on peut la regarder comme un seul & unique raisonnement, dont la fabrication de l'ouvrage est la conclusion : aussi regne-t-il entre ses parties une si grande dépendance, qu'en retrancher une seule, ou altérer la forme de celles qu'on juge les moins importantes, c'est nuire à tout le méchanisme.
Elle est sortie des mains de son inventeur presque dans l'état de perfection où nous la voyons ; & comme cette circonstance doit ajoûter beaucoup à l'admiration, j'ai préféré le métier tel qu'il étoit anciennement, au métier tel que nous l'avons, observant seulement d'indiquer leurs petites différences à mesure qu'elles se présenteront.
On conçoit, après ce que je viens de dire de la liaison & de la forme des parties du métier à bas, qu'on se promettroit en vain quelque connoissance de la machine entiere, sans entrer dans le détail & la description de ces parties : mais elles sont en si grand nombre, qu'il semble que cet ouvrage doive excéder les bornes que nous nous sommes prescrites, & dans l'étendue du discours, & dans la quantité des Planches. D'ailleurs, par où entamer ce discours ? comment faire exécuter ces Planches ? la liaison des parties demanderoit qu'on dit & qu'on montrât tout à la fois, ce qui n'est possible, ni dans le discours, où les choses se suivent nécessairement, ni dans les Planches, où les parties se couvrent les unes les autres.
Ce sont apparemment ces difficultés qui ont détourné l'utile & ingénieux auteur du Spectacle de la nature, d'insérer cette machine admirable parmi celles dont il nous a donné la description : il a senti qu'il falloit tout dire ou rien ; que ce n'étoit point ici un de ces méchanismes dont on pût donner des idées claires & nettes, sans un grand attirail de Planches & de discours ; & nous sommes restés sans aucun secours de sa part.
Que le lecteur, loin de s'étonner de la longueur de cet article, soit bien persuadé que nous n'avons rien épargné pour le rendre plus court, comme nous espérons qu'il s'en appercevra, lorsqu'il considérera que nous avons renfermé dans l'espace de quelques pages l'énumération & la description des parties, leur méchanisme, & la main-d'oeuvre de l'ouvrier. La main-d'oeuvre est fort peu de chose ; la machine fait presque tout d'elle-même : son méchanisme en est d'autant plus parfait & plus délicat. Mais il faut renoncer à l'intelligence de ce méchanisme, sans une grande connoissance des parties : or j'ose assûrer que dans un métier, tel que ceux que les ouvriers appellent un quarante-deux, on n'en compteroit pas moins de deux-mille cinq cent, & par-delà, entre lesquelles on n'en trouveroit à la vérité beaucoup de semblables : mais si ces parties semblables sont moins embarrassantes pour l'esprit que les autres, en ce qu'elles ont le même jeu, elles sont très-incommodes pour les yeux dans les figures, où elles ne manquent jamais d'en cacher d'autres.
Pour surmonter ces obstacles, nous avons crû devoir suivre ici une espece d'analyse, qui consiste à distribuer la machine entiere en plusieurs assemblages particuliers ; représenter au-dessous de chaque assemblage les parties qu'on n'y appercevroit pas distinctement, assembler successivement ces assemblages les uns avec les autres, & former ainsi peu-à-peu la machine entiere. On passe de cette maniere d'un assemblage simple à un composé, de celui-ci à un plus composé, & l'on arrive sans obscurité ni fatigue à la connoissance d'un tout fort compliqué.
Pour cet effet nous divisons le métier à bas en deux parties ; le fût ou les parties en bois qui soûtiennent le métier, & qui servent dans la main-d'oeuvre ; & le métier même, ou les parties en fer, & autres qui le composent.
Nous nous proposons de traiter chacune séparément. Mais avant que d'entrer dans ce détail, nous rapporterons le jugement que faisoit de cette machine un homme qui a très-bien senti le prix des inventions modernes. Voici comment M. Perrault s'en exprime dans un ouvrage, qui plaira d'autant plus, qu'on aura moins de préjugés. " Ceux qui ont assez de génie, non pas pour inventer de semblables choses, mais pour les comprendre, tombent dans un profond étonnement à la vûe des ressorts presqu'infinis dont la machine à bas est composée, & du grand nombre de ses divers & extraordinaires mouvemens. Quand on voit tricoter des bas, on admire la souplesse & la dextérité des mains de l'ouvrier, quoiqu'il ne fasse qu'une seule maille à la fois ; qu'est-ce donc quand on voit une machine qui forme des centaines de mailles à la fois, c'est-à-dire, qui fait en un moment tous les divers mouvemens que les mains ne font qu'en plusieurs heures ? Combien de petits ressorts tirent la soie à eux, puis la laissent aller pour la reprendre, & la faire passer d'une maille dans l'autre d'une maniere inexplicable ? & tout cela sans que l'ouvrier qui remue la machine y comprenne rien, en sache rien, & même y songe seulement : en quoi on la peut comparer à la plus excellente machine que Dieu ait faite, &c.
Il est bien fâcheux & bien injuste, ajoûte M. Perrault, qu'on ne sache point les noms de ceux qui ont imaginé des machines si merveilleuses, pendant qu'on nous force d'apprendre ceux des inventeurs de mille autres machines qui se présentent si naturellement à l'esprit, qu'il suffiroit d'être venus des premier au monde pour les imaginer ".
Il est constant que la machine à bas a pris naissance en Angleterre, & qu'elle nous est venue par une de ces supercheries que les nations se sont permises de tout tems les unes envers les autres. On fait sur son auteur & sur son invention des contes puérils, qui amuseroient peut-être ceux qui n'étant pas en état d'entendre la machine, seroient bien aises d'en parler, mais que les autres mépriseroient avec raison.
L'auteur du Dictionnaire du Commerce dit que les Anglois se vantent en vain d'en être les inventeurs, & que c'est inutilement qu'ils en veulent ravir la gloire à la France ; que tout le monde sait maintenant qu'un François ayant trouvé ce métier si utile & si surprenant, & rencontrant des difficultés à obtenir un privilége exclusif qu'il demandoit pour s'établir à Paris, passa en Angleterre, où la machine fut admirée & l'ouvrier récompensé. Les Anglois devinrent si jaloux de cette invention, qu'il fut long-tems défendu, sous peine de la vie, de la transporter hors de l'île, ni d'en donner de modele aux étrangers : mais un François les avoit enrichis de ce présent, un François le restitua à sa patrie, pat un effort de mémoire & d'imagination, qui ne se concevra bien qu'à la fin de cet article ; il fit construire à Paris, au retour d'un voyage de Londres, le premier métier, celui sur lequel on a construit ceux qui sont en France & en Hollande. Voilà ce qu'on pense parmi nous de l'invention du métier à bas. J'ajoûterai seulement au témoignage de M. Savari, qu'on ne sait à qui l'attribuer en Angleterre, le pays du monde où les honneurs qu'on rend aux inventeurs de la nation, leur permettent le moins de rester ignorés.
DU FUT.
1. Les deux piés de devant qui soûtiennent le siége de l'ouvrier. Figure 1. Planche I.
2. Les deux piés de derriere.
3. La traverse d'en-bas, à laquelle est attachée la patte qui arrête les marches.
4, La traverse du haut du siege.
5. La traverse allegie. On pratique ordinairement à sa surface 5, une espece de rainure assez large, sur laquelle l'ouvrier met les choses qui lui sont commodes en travaillant.
6. La traverse du contre-poids.
7. La traverse d'en-bas.
8. 8. Les deux têtes du fût. Leur partie antérieure devroit être en biseau.
9. 9. Deux pattes de fer qui tiennent le métier fixé.
10. Le siege de l'ouvrier.
11. 11. Deux goussets qui servent à soûtenir le siége.
14. Support du gousset.
15. 15. Traverses qui servent de supports aux goussets.
16. 16. Supports des montans de devant.
17. 17. Les deux montans de devant.
18. 18. Goussets des montans & des piés de derriere.
19. 19. & 19. 19. Ouvertures pratiquées à chaque tête, pour y fixer les grandes pieces du métier.
20. 20. &c. Les vis avec leurs oreilles, qui servent à tenir les parties du fût fermement assemblées.
21. Un arrêtant. Ainsi l'arrêtant est, comme on voit, un morceau de fer fendu d'une ouverture oblongue, qui lui permet d'avancer ou de reculer à discrétion sur la tête de la vis, qui le fixe au côté intérieur du montant, & terminé d'un bout par une pointe dont l'usage est d'arrêter le crochet inférieur de l'abattant, & de l'empêcher d'avancer trop en-devant ; c'est de cet usage que cette piece a pris le nom d'arrêtant. Il y a un autre arrêtant à la surface & à la hauteur correspondante de l'autre montant.
22. Un petit coup. Le petit coup est une espece de vis, dont la tête a une éminence à laquelle on porte le bout du crochet inférieur de l'abattant quand on travaille : cette éminence est coupée en plan incliné vers le fond du métier, & permet au crochet de s'échapper presque de lui même.
23. 23. Les écrous à oreilles de l'arrêtant & du petit coup.
24. 24. Deux broches de fer, capables de recevoir chacune une bobine.
25. Une bobine dans sa broche.
26. 26. Deux passe-soies. Les passe-soies sont deux morceaux de fer recourbés, comme on voit, & percés de trous, par lesquels on fait passer la soie, qu'ils dirigent & empêchent de s'attacher aux objets circonvoisins.
27. Un rouloir avec les crochets qui le suspendent. Le rouloir est un instrument qui sert à plier l'ouvrage à mesure qu'il se fait. Il faut y distinguer plusieurs parties. La barre 1, 2, plate qui tient unis les côtés 3, 4, par leurs extrémités supérieures. La barre ronde 5, 6, qui s'ajuste dans les trous percés aux extrémités inférieures des côtés, comme nous l'allons dire. La noix 7, la gachette 8, le ressort 9, le bouton 10, la tringle 13, 14 ; la barre ronde est faite en douille par les deux bouts ; la noix & le bouton ont chacun une éminence ou espece de tourillon, par lesquels ils s'adaptent, l'un à un bout & l'autre à l'autre bout. Ces especes de tourillons sont percés d'un trou, qui ont leurs correspondans à la douille qui les reçoit. On voit ces trous 11, 12 : on place dans chacun une goupille qui traverse la douille & les tourillons, & qui fixe le bouton à l'une des extrémités de la barre ronde, & la noix à l'autre extrémité. D'où il arrive, que cette barre passée dans les ouvertures pratiquées au bas des côtés du rouloir, peut retourner dans ces ouvertures, mais ne peut s'en échapper, & que la noix est tenue appliquée au côté 3, où l'extrémité de la gachette entre dans ses dents & y reste engrenée, en vertu du ressort qui pousse son autre extrémité.
L'extrémité de la gachette peut bien s'échapper des dents de la noix, & laisser tourner la barre ronde sur elle-même, en un sens, mais non dans l'autre, c'est-à-dire, que l'ouvrage peut s'envelopper sur elle, & ne peut se développer.
La tringle 13, 14, sert à diriger l'ouvrage.
Vûe du fût, dont on a séparé un des côtés pour découvrir les parties suivantes. Planche II. fig. 1.
1. 2. 1. Les trois marches.
3. 3. Quarrés de bois qui les séparent.
4. Quarré de bois percé par le milieu, qui écarte de la marche du milieu les deux autres.
5. 5. Extrémité des deux marches.
6. 6. Traverse de bois, sur laquelle les marches 5, 5, peuvent agir.
7. Traverse de derriere.
8. Crochet de fer qui part d'un bout de la serrure ou de l'anneau de l'extrémité de la marche du milieu, & qui embrasse de l'autre bout la partie la plus basse de la petite anse.
9. 9. Cordes qui partent de l'extrémité des marches 5, 5, passent sur le tambour de la roue 13, & la font mouvoir de gauche à droite, & de droite à gauche à discrétion.
10. 10. Cordes qui partent des extrémités de la traverse 6, 6, & la tiennent suspendue en vertu de leurs crochets 10, 10, qui s'arrêtent à ceux du balancier.
11. Patte de fer attachée à la traverse 4, qui reçoit un boulon, sur lequel sont soûtenues les marches qu'il traverse, & dont l'extrémité qu'on n'apperçoit pas est reçûe dans un piton.
12. Patte de fer qui tient la roue suspendue par une des extrémités de son axe ou arbre ; on conçoit bien que l'autre extrémité est soûtenue de la même maniere.
13. La roue avec son arbre & son tambour, dont elle ne laissent appercevoir que le quarré.
14. La tige du contre-poids ; cette tige est mobile de bas en haut dans la patte 15.
15. La patte du contre-poids.
Fig. 2. Une poulie avec son fil de soie. Cette poulie n'est autre chose qu'un fil de laiton, auquel on a fait une boucle à chaque bout ; le fil de soie passe par ces boucles, & le poids du fil de laiton l'empêche d'approcher des objets circonvoisins, & l'aide à se devider de dessus la bobine. Quand la poulie n'est pas assez lourde pour la soie, on y attache une carte.
Voilà le fût du métier ancien, auquel on n'a presque point fait de changement depuis : on a seulement supprimé les quarrés qui séparent les marches ; on a allégi les pattes qui suspendent la roue. Au lieu de donner une patte à la tige du contre-poids, on a percé la traverse, par le milieu, d'un trou quarré, & l'on a fait passer la tige par ce trou, dont on a garni l'ouverture supérieure d'une plaque de fer, afin qu'elle ne fût point endommagée par la chûte du contre-poids : on en a encore amorti le coup, en attachant un morceau de cuir à la tête de la tige ou branche du contrepoids : cette tête doit être elle-même percée ; on verra dans la suite par quelle raison.
Voilà tout ce qui concerne le fût & ses parties. Nous n'avons rien dit de leur assemblage, parce qu'il n'a rien de particulier, & qu'il est tel qu'on le voit dans les figures. Passons maintenant au metier.
DU MéTIER ET DE SES PARTIES.
Pour faciliter l'intelligence de cette machine, nous allons distribuer ses parties en plusieurs assemblages, qui s'assembleront eux-mêmes les uns avec les autres, & dont on verra résulter peu à peu la machine entiere.
PREMIER ASSEMBLAGE. Planch. II. fig. 3.
Les pieces entiérement semblables de part & d'autre, 1, II, 2, 3 ; 1, II, 2, 3, s'appellent les grandes pieces, & ce sont en effet les plus grandes qu'il y ait dans le metier, elles forment le devant du métier par leur saillie 1, II. 1, II, & le derriere par leur hauteur d'équerre 2, 3, 2, 3. Leur saillie 1, 2 ; 1, 2, s'appelle avant-bras. L'avant-bras a à son extrémité 1, 1, une charniere, & à son extrémité 2, 2, une éminence oblongue & parallélogrammatique, qu'on appelle l'oreille de la grande piece. Cette oreille est percée de plusieurs trous, qui servent à fixer par des vis la grande piece sur la tête du fût.
Les pieces entierement semblables & semblablement placées 4, 5 ; 4, 5, s'appellent les épaulieres ; elles s'assemblent par leurs ouvertures quarrées avec l'arbre 6, 7, dont elles reçoivent les quarrés.
La piece 6, 7, s'appelle l'arbre ; ses deux extrémités, dont on en voit une représentée fig. 4. sont terminées l'une & l'autre par un quarré 1, & par un tourillon 2. L'ouverture 5 quarrée des épaulieres 4, 5 ; 4, 5, reçoit le quarré de l'arbre, dont le tourillon est reçu dans le noeud 3 ou 3 de la grande piece : ainsi les épaulieres sont fixées sur l'arbre, mais l'arbre tourne dans les noeuds 3, 3, des grandes pieces.
L'arbre a dans son milieu une saillie ou espece d'oreille 8 qu'on appelle le porte-faix de l'arbre. On voit à chaque noeud 3, 3, des grandes pieces 1, II, 2, 3 ; 1, II, 2, 3, un bouton en vis 9, 9, qui s'enleve & permet de couler de l'huile dans le noeud 3, 3, quand il en est besoin.
LA PARTIE 10, 10, s'appelle la barre de derriere d'en-haut : elle s'attache, comme on voit ici, au derriere des grandes pieces & en-dehors.
La PARTIE 11, 11, s'appelle la barre de derriere d'en-bas, elle s'attache, comme on voit ici, au derriere des grandes pieces en dedans.
L'usage de ces deux barres est de soûtenir le portefaix d'en-bas.
Le PORTE-FAIX D'EN-BAS fig. 5. est composé de plusieurs piéces : d'une roulette 1 attachée à la piece 2, qui conserve le nom de porte-faix d'en-bas ; d'une chape 3, qui passe sur le porte-faix, qui y est fixée, & qui soûtient la roulette ; & d'un boulon 4, qui traverse les côtés de la chape & la roulette mobile sur ce boulon.
Ce petit assemblage se fixe, fig. 3. au milieu de la barre d'en-haut & de la barre d'en-bas, & entre ces barres, comme on le voit en 12.
La PARTIE 13, 13, s'appelle gueule de loup : la gueule de loup est fixée au milieu de la barre d'en-bas.
Les nouveaux métiers ont deux gueules de loup, attachées à la barre d'en-bas à des distances égales des grandes pieces. Les parties par lesquelles elles sont fixées à la barre sont ouvertes selon leur longueur, afin qu'elles puissent, comme on l'a dit de l'arrêtant, glisser sous la tête des vis qui les fixent, & s'arrêter à telle hauteur qu'on desire : ce qui est très-essentiel.
La PARTIE 14, 14, 15, 15, fixée par deux vis sur chaque extrémité des épaulieres, s'appelle le balancier. Il est composé de deux barres paralleles 14, 14, 15, 15, qui sont assemblées, comme on voit, & dont celle d'en-bas, 15, 15, est terminée par deux petits crochets.
On a corrigé ce balancier dans les métiers nouveaux ; on a supprimé la barre 15, 15, avec son tenon, & on lui a substitué sur la barre 14, 14, à égale distance des épaulieres, deux vis arrêtées par des écrous à oreilles, placés sur la surface supérieure de cette barre. La tête de ces vis se trouve donc sous cette barre. Cette tête percée peut recevoir deux petits crochets ; & ces petits crochets font les mêmes fonctions que ceux de la piece 15, 15, qu'on a supprimée. D'ailleurs, à l'aide des écrous à oreilles, on peut hausser & baisser ces crochets à discrétion.
La PARTIE 16, 16, s'appelle le grand ressort. Son extremité 16 est terminée par un petit tourillon, qui entre dans l'enfoncement du coup de pointe 16 du portefaix d'en-bas ; & son extrémité 16 s'ajuste par un autre tourillon dans l'extrémité de la vis 17, qui traverse le porte-faix d'en-haut, & à l'aide de laquelle il est évident qu'on peut bander ou relâcher à discrétion le grand ressort, dont l'effort tend à relever les épaulieres avec le balancier, en faisant tourner l'arbre sur lui-même.
Voilà le premier assemblage : j'avertis qu'avant de passer au second, il faut avoir celui-ci très-familier ; sinon les pieces venant à se multiplier, & les assemblages mal-compris s'assemblant ensuite les uns avec les autres, formeront des masses confuses où l'on n'entendra rien. On en jugera par le second assemblage, qui ne differe du premier que par un très-petit nombre de pieces sur-ajoûtées, & qui commence toutefois à devenir un peu difficile à bien saisir.
SECOND ASSEMBLAGE. Planche III. fig. 1.
Cet assemblage est formé des pieces de l'assemblage précédent, auquel on a ajoûté les pieces suivantes.
Dans les noeuds 1, 1, des grandes pieces, sont placées les pieces 17, 18, 19 ; 17, 18, 19 : ces pieces s'appellent les bras de presse ; elles sont fixées dans les noeuds 1, 1, par un boulon & par une goupille. Il faut distinguer dans les bras de presse trois parties : 17, le noeud de la charniere du bras ; ce noeud s'ajuste, comme on voit dans la charniere de l'avant-bras de la grande piece & s'y retient, comme nous avons dit : 18, le croissant du bras ; & 19, sa patte.
La patte du bras de presse est garnie d'une vis avec l'écrou à oreilles 20, 20 ; 20, 20, cette vis s'appelle vis de marteau. Son extrémité inférieure vient frapper, dans le travail, sur la grande piece : mais elle ne permet au bras de presse de descendre, qu'autant qu'on le juge à propos.
La PARTIE 21, 21, fig. 2. s'appelle la grande anse. Le lieu qu'elle occupe, & la faculté de son jeu, exigent le coude qu'on lui voit : elle se fixe, comme on voit fig. 1. sur chaque patte des bras de presse, aux lieux 21, 21.
La PARTIE 22, 22, fig. 3. s'appelle la petite anse. Ses deux crochets se placent aux deux angles du coude de la grande anse, comme on voit fig. 1.
La PARTIE 23, 23, s'appelle le crochet de la petite anse, fig. 2. Pl. III. S'il y avoit eu de la place, on le verroit dans le coude de la petite anse.
La PARTIE 24, 24, qui part de l'extrémité, fig. 1. de la branche ou tige du contre-poids, est une courroie de cuir qui vient passer sur la roulette du porte-faix d'en-bas, & s'attacher par son extrémité 24, au milieu du coude de la grande anse.
La PARTIE 25, fig. 1. est un contre-poids attaché, comme on voit, à la branche ou tige 26 du contre-poids qu'on doit reconnoître, & dont nous avons parlé à propos du fût.
Le CROCHET 23, 23, fig. 4. dont un des bouts embrasse le coude de la petite anse, tient par son autre bout à l'anneau de la marche du milieu, comme on peut voir fig. 1. Pl. II.
COROLLAIRE PREMIER.
D'où il s'ensuit : 1°. qu'en appuyant du pié sur cette marche, fig. 1. Pl. II. le crochet 23, 23, fig. 1. Pl. II. sera tiré en-bas ; que la petite anse 22, 22, fig. 1. Pl. III. le suivra, & que la petite anse fera descendre la grande anse 21, 21 : mais la grande anse 21, 21, ne peut descendre que les bras de presse 17, 18, 19 ; 17, 18, 19, ou plûtôt leurs vis de marteau 20, 20, ne viennent frapper sur les grandes piéces 1, II. 2, 3 ; 1, II, 2, 3 ; que la courroie 24, 24, qui passe sur la roulette du porte-faix d'en bas, ne soit tirée en em-bas ; qu'elle ne fasse monter la tige ou branche 26 du contre-poids, & que cette tige n'entraîne en-haut le contre-poids 25.
COROLLAIRE II.
D'où il s'ensuit : 2°. que si on leve le pié de dessus la marche, alors tous les mouvemens se feront en sens contraire : rien ne retenant plus le contre-poids 25, il descendra ; sa branche 26. descendra avec lui ; la courroie 24, 24, avec la branche : mais la courroie passant sur la roulette, ne peut descendre qu'elle ne tire en-haut & ne fasse monter la grande anse 21, 21. La grande anse montera, les bras de presse 17, 18, 19 ; 17, 18, 19, se releveront ; la petite anse 22, 22, montera ; son crochet 23, 23, la suivra ; & la marche suivra le crochet, se relevera, & tout se restituera dans l'état que représente la fig. 1. de cette Pl. III.
Ce second assemblage forme ce qu'on appelle communément la cage du métier, sa carcasse, son corps, ses parties grossieres. Nous allons passer à ce que les ouvriers appellent l'ame du métier. Les parties se multiplieront ici au point, que je ne peux trop conseiller au lecteur de se familiariser avec ce second assemblage, & avec le jeu & les noms de ses parties.
TROISIEME ASSEMBLAGE. même Pl. III. fig. 5.
On voit dans la fig. 5. de cette planche, quatre piéces assemblées. Les deux pieces semblables 27, 28, 29 ; 27, 28, 29, s'appellent porte-grilles ou chameau de la barre fondue : la piece qu'on appelle bois de grille, & dont nous allons parler, se fixe sur leurs parties 28, 29 ; 28, 29, par des vis & des écrous à oreilles. Les extrémités des vis passent dans les ouvertures longitudinales qu'on y voit : on leur a donné cette figure, afin qu'on pût les avancer ou reculer à discrétion. La piéce 30, 30, s'appelle petite barre de dessous ; & celle 31, 31, qui est fixée sur le milieu de la petite barre de dessous, est un porte-roulette garni de sa roulette, du boulon de sa roulette, & de la goupille du boulon.
La figure 6. est l'assemblage des pieces précédentes, & du bois de grille garni de sa grille. On voit 32, 32 ; 32, 32, les vis qui traversent le bois de grille 33, 33, qui passent dans les ouvertures longitudinales des parties 28, 29 ; 28, 29 des chameaux, & qui fixent le bois de grille sur ces chameaux. La grosse piéce 33, 33, s'appelle bois de grille. La grille est l'assemblage de deux rangées paralleles & perpendiculaires des petits ressorts plantés dans le bois de grille. Il est très-à-propos de connoître la configuration de ces petits ressorts, & d'en examiner l'arrangement. Ils sont plantés parallelement : ils laissent entr'eux un petit espace ; & ceux qui forment la ligne de derriere, correspondent exactement aux intervalles que laissent entr'eux ceux qui forment la ligne de devant. L'extrémité supérieure de chacun de ces petits ressorts est renversée en-arriere, & forme une espece de plan incliné. La partie qui est immédiatement au-dessous de ce plan incliné est une cavité, qu'on peut regarder comme formée de deux autres petits plans inclinés, dont la rencontre forme un angle, & fait le fond de la petite cavité. La partie qui est immédiatement au-dessous de la petite cavité, est un quatrieme plan incliné, qui a le reste du ressort pour sa longueur.
La figure 7. est un des petits ressorts de grille détaché. La partie a b est le premier plan incliné ; la partie b c est le second ; la partie c d est le troisieme ; & la partie d f est le quatrieme.
La figure 8. est ce qu'on appelle la barre fondue ou fendue : barre fondue, parce que la partie inférieure de son chassis est coulée & remplie d'étain ; barre fendue, à cause des ouvertures ou fentes qui laissent entr'eux les petits quarrés de cuivre dont elle est garnie. Cette barre fondue ou fendue est composée de plusieurs pieces dont nous allons parler : 34, 34 ; 34, 34, sont deux côtés du chassis : 35, 35 ; 35, 35, sont deux pieces de commodité qui s'ajustent, comme on les voit avec les deux côtés, & qui servent à supporter la barre fondue : 36, 36 ; 36, 36, sont deux charnieres dont l'usage est de recevoir les contre-pouces ; pieces dont nous allons parler. On voit, fig. 9. une de ces charnieres : elle est percée à sa partie inférieure de deux petits trous, dans lesquels on fait passer une goupille qui traverse en même tems les deux côtés de la barre, & qui fixe la charniere entre ces côtés. Les deux quarrés de sa partie supérieure sont aussi percés dans le milieu, de même que tous les quarrés & autres parties prises entre les côtés de la barre fondue. On dira tout à l'heure l'usage de ces ouvertures. Les pieces 37, 37, sont deux autres charnieres, toutes semblables aux précédentes, & pareillement assemblées avec les côtés de la barre fondue ; mais dont l'usage est de recevoir d'autres pieces qu'on appelle tirans : 38, 38 ; 38, 38, &c. sont les cuivres de la barre fondue. On voit, fig. 10. la forme d'un de ces cuivres. Leur partie inférieure ou leur queue s'insere entre les côtés de la barre fondue, & le quarré de la partie supérieure demeure supporté sur ces côtés. Ces deux parties sont percées l'une & l'autre, comme on voit, & comme nous avons dit. Tous ces cuivres sont exactement semblables ; tous placés parallelement les uns aux autres, & laissant tous entr'eux le même petit intervalle. Quand on les a bien disposés, on coule de l'étain dans le dessous du chassis de la barre fondue ; cet étain remplissant exactement le chassis, entre dans les trous pratiqués aux queues des cuivres, & les fixe solidement dans la disposition qu'on leur a donnée. C'est le nombre de ces cuivres qui marque la finesse d'un métier ; plus il y a de cuivres, plus un métier est fin. L'intervalle du premier au dernier cuivre est ordinairement de quinze pouces. On pourroit le prendre plus grand : mais l'expérience l'a déterminé de cette longueur. On divise cet intervalle en parties de trois pouces ; & s'il y a dans chaque intervalle de trois pouces vingt cuivres, on dit que le métier est un vingt ; & s'il y en a trente, on dit que le métier est un trente ; & ainsi de suite. J'ai vû des métiers dont la barre fondue portoit jusqu'à quarante deux cuivres, par trois pouces.
On ajuste aux extrémités de la barre fondue la piece quarrée 39, qu'on voit fig. 11. percée dans le milieu & allongée à son angle inférieur en tourillon. Cette piece est fixée à chaque extrémité de la barre fondue par une vis & son écrou. Cette vis traversant les côtés de la barre fondue avec la piece à tourillon, sert en même tems à serrer ces côtés. La piece, 35 de la fig. 11. est la piece de commodité, séparée de l'assemblage de la fig. 8.
La figure 1. Plan. IV. est un assemblage des portes grilles 27, 28, 29 ; 27, 28, 29, de la petite barre de dessous 30, 30, qu'on ne voit pas ; de la roulette fixée sur son milieu, que le bois cache aussi ; du bois de grille garni de sa grille 33, 33, de la barre fondue entiere 34, 34 ; 34, 34, avec les pieces de commodité 35, 35, des charnieres à contre-pouces 37, 37 ; des charnieres à tirans 36, 36 ; des cuivres 38, 38, &c. des quarrés à tourillon 39, 39.
J'observerai ici que la barre fondue n'est pas tout-à-fait la même dans les nouveaux métiers, que dans celui que je viens de décrire ; on a supprimé les pieces de commodité, & le quarré à tourillon n'a pas tout-à-fait la même figure : la barre se termine d'une façon un peu plus simple.
La piece 40 s'appelle platine à ondes, fig. 2. Il faut distinguer dans cette piece plusieurs parties, qui ont toutes leurs usages, comme on verra dans la suite. a, la tête de la platine ; b, son bec ; c, le dessous du bec ; d, la gorge ; e, le ventre ; f, la queue.
On voit, fig. 3. une piece qui s'appelle onde, 41. On voit que l'onde est fendue par sa partie antérieure, qu'elle a une éminence au milieu ; que cette éminence est percée, & que sa queue se termine en pointe mousse. La tête de la platine à onde s'insere, s'attache & se meut dans la fente de la tête de l'onde ; & ces deux pieces assemblées se placent entre les intervalles que laissent entr'eux les cuivres de la barre fondue, de maniere que l'ouverture de l'éminence de l'onde réponde aux ouvertures des deux cuivres entre lesquels elle est placée, & que sa queue s'avance juste au fond de la cavité d'un ressort de grille.
COROLLAIRE III.
Il s'ensuit de là qu'il faut autant de platines à ondes que d'ondes, autant d'ondes que de cuivres, autant que de ressorts de grille ; & que les queues des ondes doivent être alternativement un peu plus courtes & un peu plus longues ; plus longues en celles qui vont jusqu'au fond de la petite cavité des ressorts de grille de la seconde rangée ; plus courtes en celle qui ne vont qu'au fond de la petite cavité des ressorts de grille de la premiere rangée.
On voit, fig. 4. tous les intervalles laissés entre les cuivres remplis d'ondes garnies de leurs platines, 40, 40, 40, &c. L'usage des cuivres est maintenant évident ; on voit qu'ils servent à tenir les ondes paralleles, & à les empêcher de vaciller à droite ou à gauche.
On a représenté, fig. 5. la piece appellée un tirant, qui doit remplir la charniere de barre fondue, que nous avons appellée charniere de tirant, & que nous avons chiffrée fig. 1. 36. Le tirant 42. fig. 4. ressemble exactement à la partie antérieure d'une onde ; il fait en dessus & en dessous les mêmes coudes : il a l'éminence pareille & pareillement percée ; il est seulement plus fort ; & au lieu d'avoir l'extrémité antérieure fendue, il l'a propre à être ajustée dans le porte-tirant.
On voit fig. 4. le tirant 42. dans sa charniere, dont la figure n'est pas inutile ; car on doit s'appercevoir que ses deux quarrés sont destinés à tenir le tirant, parallele aux ondes & non vacillant.
La piece 43, 44, 45, fig. 4. qu'on voit dans la charniere que nous avons chiffrée 37, fig. prem. s'appelle contre-pouce, sa partie antérieure 43, a la forme d'un pouce ; elle est chargée d'un contre-poids 44 : il y a en-dessous une éminence comme aux tirants & aux ondes ; & sa partie postérieure 45, se termine par un quarré plat & percé dans le milieu.
Les contre-pouces, les tirans, les charniere des contre-pouces, les charnieres des tirans, & toutes les ondes avec les cuivres, sont traversées par une verge ronde, qu'on appelle verge de barre fondue. On voit en 46 l'extremité de cette verge. Les tirans, les contre-pouces & les ondes, peuvent se mouvoir librement sur elle ; & elle sert comme d'axe & de point d'appui à toutes ces parties.
On a ajusté à l'extrémité de la barre fondue, la roulette 47 dans son tourillon, fig. 4.
La piece 48, 48, qu'on voit, fig. 4. ajustée par ses extrémités quarrées, sur les extrémités de même figure des contre-pouces, s'appelle la bascule. Il faut que le bec du contre-pouce avec le poids dont il est chargé, soit plus lourd que la partie postérieure avec la partie de bascule qu'elle soûtient ; car l'usage du contre-pouce & de son contre-poids, est de faire relever la bascule d'elle-même, quand en lâchant le pouce, on cesse de presser le contre-pouce en-dessous & d'appliquer la bascule sur la queue des ondes.
Si l'on revient à la piece de commodité de la barre fondue, fig. 1. on appercevra à l'extrémité de sa partie postérieure un petit tenon o ; c'est sur ce petit tenon qu'est soûtenue la barre à chevalet, ou la machine 49, 49, qu'on voit passée sous la queue des ondes, fig. 4. Dans les métiers nouveaux, la barre à chevalet ne porte que sur les grandes pieces.
On distingue dans le chevalet plusieurs parties ; 50, 50, s'appelle la barre à chevalet ; 51, la joue du chevalet, 52, le corps du chevalet ; 53, l's de la corde à chevalet ; 54 la roulette de la barre à chevalet. Les joues & le corps du chevalet tiennent ensemble : cet assemblage est mobile le long de la barre à chevalet : c'est la même corde qui part d'une des s 53, passe sur une des roulettes 49 de la barre à chevalet, va s'envelopper sous la roue du fût 13, Pl. II. fig. 1. & se rend à l'autre s 53 ; elle est cloüée sur la roue.
COROLLAIRE IV.
D'où il arrive qu'en appuyant sur la marche, 1, 5, qui est à gauche, fig. 1. Pl. II. cette marche faisant tourner le tambour de la roue 13, de droite à gauche, la roue 13 tourne en même sens ; le corps du chevalet Pl. IV. fig. 4. 51, est tiré en même sens : & il va le long de la barre à chevalet 50, 50, de droite à gauche, jusqu'aux arrêts 55, 55, de la barre à chevalet : c'est le contraire, si lorsque le chevalet est aux arrêts 55 de la barre à chevalet, on vient à appuyer sur la marche qui est à droite.
COROLLAIRE V.
Mais le corps du chevalet, faisant combler 51, & étant un peu plus élevé que la position presqu'horisontale des ondes, ou que les petites cavités des ressorts de grille où leurs queues sont placées, ne peut passer sous ces queues sans les chasser de ces cavités ; c'est ce qui produit ce cliquetis assez long qu'on entend, lorsque l'ouvrier travaille. Il est causé par l'action du comble 51 du chevalet, contre le dessous de la queue des ondes par la réaction des ressorts de grille, des cavités desquels les queues des ondes ne peuvent s'échapper, sans repousser ces ressorts & se trouver ensuite sur le petit plan incliné, qui forme leur extrémité & qui facilite cette réaction ; & par la chûte de la tête des ondes sur une piece dont nous parlerons, & qu'on appelle la barre à moulinet, contre laquelle les têtes des ondes viennent frapper. C'est pour que cette chûte se fasse, qu'on a pratiqué en dessous de l'onde entre sa tête & son éminence, un coude ou vuide. Moyennant ce vuide, l'onde n'est point gênée dans son mouvement par la barre fondue, qui ne laisse pas d'avoir de la largeur ; c'est par cette raison qu'on a pratiqué le même coude, ou vuide aux tirans.
La bascule sert à faire sortir les queues des ondes des cavités des ressorts de grille & à les faire descendre ; & le chevalet, à les chasser des mêmes cavités & à les faire monter.
Dans les nouveaux métiers, comme il n'y a point de pieces de commodité, la barre à chevalet porte sur les longues pieces ; elle s'y fixe à l'aide de deux chameaux, qui ont chacun une vis quarrée avec un petit tourillon, qui entre dans le dessous de la barre à chevalet.
Voilà le troisieme assemblage, ou l'ame du métier. Nous allons passer au quatrieme, qui ne sera que l'assemblage du second & du troisieme ; de même que le second n'étoit que l'assemblage du premier & de quelques autres parties.
QUATRIEME ASSEMBLAGE, Pl. IV. fig. 6.
Ce quatrieme assemblage est composé du second & du troisieme. C'est la cage du métier dans laquelle on a placé l'ame.
Nous avons donné ci-dessus un détail si exact des parties de ces deux différens assemblages & de la maniere dont elles sont assemblées, que nous pourrions nous contenter d'observer ici, que l'ame ou le troisieme assemblage est mobile dans le second ou dans la cage ; que la barre fendue ou fondue & toutes ses appartenances sont soûtenues par la gueule de loup, 13, 13, fig. 3. Pl. II. attachée à la barre de derriere d'en bas, qui est fixée aux hauteurs d'équerre des grandes pieces, & par les deux roulettes 47, 47 ; fig. 6. Pl. IV. placées aux extrémités de la barre fondue ; que la roulette de la petite barre de dessous du bois de grille entre & se meut dans la gueule de loup ; que les deux roulettes de l'extrémité de la barre fondue passent & se meuvent sur les grandes pieces ; & que l'assemblage entier que nous avons appellé l'ame du métier, peut s'avancer en devant & se reculer en arriere.
Mais pour faciliter au lecteur l'intelligence de la machine, nous allons lui rappeller toutes les pieces de ce quatrieme assemblage, avec leurs principales correspondances, dans l'ordre où il a vû naître cet assemblage.
1, 2, 3 ; 1, 2, 3. Les grandes pieces.
4, 5 ; 4, 5. Les épaulieres fixées dans le quarré de l'arbre 6, 7.
6, 7. L'arbre mobile sur ses tourillons placés dans les noeuds 3, 3, des grandes pieces.
8. Le porte-faix de l'arbre.
9. Bouton pour couler de l'huile dans le noeud.
10, 10. Barre de derriere d'en-haut.
11, 11. Barre de derriere d'en-bas. Ces deux barres servent à fixer entr'elles le porte-faix d'en-bas, avec sa chape & sa roulette.
12. Porte-faix d'en-bas avec sa chape & sa roulette, fixés entre les barres de derriere.
13. Gueule de loup fixée à la barre de derriere d'en-bas, qui reçoit la roulette de la petite barre de dessous de la barre fondue.
14, 14, 15. 15. Le balancier fixé sur les épaulieres à quelque distance de leurs noeuds.
16, 16. Le grand ressort placé entre les deux portefaix.
17, 18, 19. 17, 18, 19. Les barres de presse assemblées avec les grandes pieces.
20, 20. Vis de marteau avec son écrou, placée sur les pattes des bras de presse.
21, 21. Les extrémités de la grande anse, fixées sur les extrémités des bras de presse.
22, 22. Les deux crochets de la petite anse.
Le noeud 4 de l'épauliere droite, couvre la partie de la courroie, qui prend le milieu de la grande anse & qui passe sur la roulette du porte-faix d'en-bas ; & la barre fondue & ses parties empêchent qu'on ne voye la suite de la courroie, aller de dessus la roulette du porte-faix d'en-bas, au sommet de la tige ou branche du contre-poids : on n'apperçoit qu'une partie, 26, 26, des branches de la petite anse.
27, 28, 29. Un des chameaux ou porte-grille ; l'autre est caché par les platines à ondes.
Le bois de grille cache la petite barre de dessous 30, 31, avec son porte-roulette & sa roulette que reçoit la gueule de loup ; on n'apperçoit que l'extrémité 32 de la vis qui fixe le bois de grille sur le chameau du côté droit, que l'extrémité 33 du bois de grille, & que les extrémités des petits ressorts plantés dans le bois de grille & formant la grille.
34, 34. Les extrémités des deux barres qui forment le chassis de la barre fondue.
35. Une des pieces de commodité qui soûtiennent le chevalet par un piton qui entre dans un trou pratiqué au-dessous de la barre à chevalet.
36. Un des quarrés de la charniere du tirant.
37, 37, Les quarrés des deux charnieres des contre-pouces. Les ondes 42 couvrent les cuivres de la barre fondue.
38. Piece quarrée prise entre les côtes de la barre fondue, de l'angle inférieur, de laquelle part un tourillon dont on voit 47 l'extrémité à-travers la roulette 47 du côté droit.
39, 39, 39. Platines à ondes fixées à l'extrémité des ondes.
40. Ondes.
41, 41, 41. Partie de la surface supérieure des cuivres de la barre fondue.
42. Un tirant dans sa charniere.
43, 44, 45. Un contre-pouce avec son poids, dans sa charniere.
46. L'extrémité de la verge qui traverse les contre-pouces, les tirants, les cuivres & les ondes.
47. Roulettes de la barre fondue.
48, 48. La bascule fixée sur les extrémités de derriere des contre-pouces.
On voit très-bien le chevalet 49, 50, 51, 52, 53, 54, avec toutes ses parties : mais on ne voit point le tourillon de la piece de commodité qui le supporte.
Voilà le détail de ce quatrieme assemblage : j'y ai rappellé toutes les parties dont nous avons fait mention jusqu'à présent ; tant celles qu'on voit dans sa figure, que celles qu'on n'apperçoit point du tout, ou qu'on n'apperçoit qu'en partie. Nous pouvons donc passer maintenant au cinquieme assemblage, & nous tenir pour persuadés que ce sera plûtôt l'effet de l'inattention du lecteur, ou plûtôt celui de la composition de la machine, que notre faute, si l'on ne nous a pas entendus jusqu'à présent.
CINQUIEME ASSEMBLAGE. Planche V.
On voit dans la premiere figure de cette Planche ce cinquieme assemblage complet.
La piece 56, 56, figure 1 & 2, qui sert de base à toutes les autres, s'appelle corps de barre à aiguilles : ce corps de barre à aiguilles a une petite saillie ou cordon qu'on apperçoit au lieu 57. On fixe sur cette saillie la petite barre de la figure 3, qu'on ne peut appercevoir dans la figure premiere qu'on appelle queue d'aronde du corps de barre à aiguilles. La surface inférieure de cette piece est plate ; sa supérieure est un talus ou biseau un peu convexe ; ce biseau est tourné vers le fond du corps de barre à aiguilles. On en verra tout-à-l'heure l'usage.
Les pieces 58, 58, figure premiere, sont appellées par les ouvriers étochios, figure 4, 58 ; elles sont placées sur le corps de barre qu'elles traversent, par un tenon quarré qui les tient fermes & immobiles sur ce corps ; elles sont au niveau de sa saillie, & elles sont appliquées exactement contre la queue d'aronde.
Les pieces 59, 59, 59, figure premiere, &c. sont des plombs à aiguilles avec leurs aiguilles, rangés sur la queue d'aronde, entre les deux étochios. On voit, figure 5 & 6, un de ces plombs à aiguilles avec ses trois aiguilles. On a pratiqué à ce plomb, en le coulant, une petite échancrure à sa partie antérieure de dessous. La queue d'aronde a exactement la forme de cette échancrure ; ensorte qu'elle remplit les échancrures de tous les plombs à aiguilles. Il n'est pas inutile de remarquer que la partie postérieure de dessus du plomb à aiguille est en talus.
Les pieces 60, 60, figure premiere sont des plaques de barre à aiguilles ; ces pieces sont plates en dessus ; mais leur partie antérieure de dessous imite exactement le talus de la partie postérieure de dessus du plomb à aiguille. Les plombs à aiguille sont donc fixés inébranlablement entre les plaques & la queue d'aronde ; entre les plaques qui s'appliquent exactement sur le talus de leur partie postérieure, & la queue d'aronde qui remplit les échancrures de leur partie antérieure. Ces plaques sont fixées fortement sur le corps de barre par deux vis qui les traversent chacune, & le corps de barre.
Les pieces 61, 62 ; 61, 62, s'appellent des corps de jumelles ; ces corps de jumelles sont fixés fortement par leurs pattes 62, 62, sur le corps de barre à platines. Il faut y remarquer deux choses ; leur extrémité supérieure, avec la saillie qui est au-dessous, & parallele à cette extrémité. Cette configuration a son usage, comme on verra dans la suite.
Les jumelles des nouveaux métiers sont mieux entendues ; la plaque supérieure 61 de la jumelle est percée au milieu & traversée d'une vis qu'on peut avancer ou reculer ; & au lieu d'une saillie S, S, telle qu'on la voit ici, elles ont une autre plaque parallele & semblable à celle de l'extrémité 61, percée pareillement & traversée d'une vis, dont la tête est au-dessous de la plaque, & qu'on peut aussi avancer & reculer ; ce qui met moins de difficulté dans la construction du métier, & plus de facilité dans le travail : comme on verra quand je parlerai de la main-d'oeuvre.
Les pieces 63, 63, placées perpendiculairement sur le corps de barre & parallelement aux jumelles, s'appellent les moulinets.
Il y a dans les moulinets plusieurs parties à distinguer : 64, 64, le corps du moulinet, qui se termine par un tenon quarré que le corps de barre reçoit dans un trou quarré ; 65, 65, le ressort du moulinet. Ce ressort est mobile dans une charniere 66, qui traverse le corps du moulinet de dehors en dedans. La queue de ce ressort porte sur un autre ressort placé plus bas qui la releve ; 67, tenon qui traverse le corps du moulinet, & qui est traversé par l'arbre du moulinet qu'il tient ferme & dirige ; 68, croisée du moulinet ; 68, roue dentée du moulinet ; 80, arbre du moulinet.
La piece 81, 81, que traverse l'extrémité en vis de l'arbre à moulinet, s'appelle boîte à moulinet : c'est en effet une boîte, ouverte par sa partie antérieure, & mobile le long du corps à moulinet, à l'aide de l'arbre à moulinet. Cette boîte reçoit une barre de fer quarrée 82, 82, appellée barre à moulinet, que le ressort courbe 83, 83, 83, fixé par ses extrémités aux côtés des deux boîtes, tient dans l'état où on la voit. Ce ressort courbe est encore attaché par son milieu à la barre à moulinet. Cette barre peut se mouvoit en devant & en arriere : mais il est évident que si quelque puissance la pousse en arriere, le ressort la repoussera en devant, & la restituera dans la situation où on la voit dans cette figure, aussi-tôt que la puissance cessera d'agir.
La barre à moulinet étant renfermée par ses extrémités dans les boîtes, son ressort étant fixé par ses extrémités au côté des boîtes, il est évident que l'arbre de moulinet faisant monter ou descendre les boîtes, fera pareillement descendre ou monter avec elles la barre & son ressort. Fin du cinquieme assemblage.
SIXIEME ASSEMBLAGE.
Pour avoir le sixieme assemblage, il ne s'agit que d'assembler cet assemblage avec le quatrieme ; & c'est ce qu'on voit exécuté dans la figure 7 de la même Planche V.
Le corps de barre à aiguille 56, 56, est fixé sur les grandes pieces ; de maniere que les platines à ondes sont passées entre les aiguilles de deux en deux, & sont toutes voisines des plombs à aiguilles ; que les jumelles sont entre les bras de presse, & que l'extrémité des jumelles est appliquée sur les épaulieres, entre leurs noeuds & les extrémités du balancier.
COROLLAIRE VI.
On voit que sans la plaque de l'extrémité des jumelles qui contient les épaulieres, le grand ressort faisant tourner l'arbre du métier, emporteroit au derriere du métier & les épaulieres, & le balancier qui leur est attaché.
COROLLAIRE VII.
On voit encore qu'il est à propos que cette plaque des jumelles soit traversée d'une vis, dont l'extrémité donne sur les épaulieres ; car par ce moyen, on tiendra les épaulieres à telle hauteur qu'on voudra.
COROLLAIRE VIII.
On voit en troisieme lieu que la saillie de la jumelle ne servant qu'à empêcher l'épauliere de descendre trop bas quand on travaille, il vaudroit mieux substituer à cette saillie immobile telle qu'on la voit ici, une autre plaque parallele à celle du dessus de la jumelle, & traversée d'une vis, dont la tête seroit en dessous. Par le moyen de cette vis, l'épauliere ne descendroit qu'autant qu'on le jugeroit à propos ; & l'on verra, quand nous parlerons de la main-d'oeuvre, combien il est important de joüir de ces avantages, qu'on s'est procurés dans le nouveau métier.
Je crois qu'il est assez inutile de rentrer dans une énumération complete de toutes les parties dont ce cinquieme assemblage est formé : il nous suffira, après ce que nous avons dit jusqu'à présent, d'observer deux choses ; l'une concernant cet assemblage, & l'autre concernant les différences de l'ancien métier, tel que nous le donnons ici, & du nouveau métier.
Cet assemblage est formé de trois masses importantes ; la cage avec ses appartenances, comme grande anse, petite anse, crochet de petite anse, branche de contre-poids, & contre-poids, &c.
L'ame ou la barre fondue avec ses appartenances, comme porte-grille, bois de grille, grille, platines à ondes, ondes, tirans, contre-pouces, bascule, &c.
La barre à aiguilles avec ses appartenances, comme aiguilles avec leurs plombs, jumelles, moulinets, boîtes, barre à moulinet, ressort à moulinet, &c.
Les différences de l'ancien métier & du nouveau, sont très-legeres ; elles ajoûtent à la vérité quelque chose à la perfection du métier ; mais elles ajoûtent encore davantage à l'honneur de l'inventeur : car on remarquera que si ce métier devoit être exécuté par des êtres infaillibles dans leurs mesures, & mis en oeuvre par des êtres infaillibles dans leurs mouvemens, il auroit fallu le laisser tel qu'il étoit. On s'est seulement menagé par les changemens qu'on y a faits, la commodité de tâtonner, & d'atteindre dans la pratique à cette précision géométrique que la machine avoit dans l'esprit de son inventeur. Passons au septieme assemblage.
SEPTIEME ASSEMBLAGE Pl. VI.
La fig. premiere, Planche VI. montre ce septieme assemblage tel que nous l'allons détailler.
La piece qu'on voit 84, 84, fig. 2 & fig. 3. s'appelle barre à platine ; les grosses pieces 85, 85, auxquelles elle est fixée, fig. 2. s'appellent abatans.
La piece 86, 86, qu'on voit fig. 4. & qu'on n'apperçoit pas, fig. premiere, s'appelle le chaperon de la barre a platine ; il est placé à la partie supérieure postérieure de la barre à platine.
La piece 87, 87, qu'on voit fig. 5. mais qu'on n'apperçoit pas, fig. premiere, s'appelle queue d'aronde de la barre à platine. Cette queue d'aronde se fixe à la saillie 88, 88, ou au cordon qu'on voit à la barre à platine, fig. 3. nous parlerons de sa figure & de son usage plus bas. Il suffit de dire ici qu'elle sert à fixer les platines à plomb, & qu'elle en est couverte, de même que la queue d'aronde de la barre à aiguilles étoit couverte des plombs à aiguilles, & servoit à les fixer.
La barre à platine a pareillement ses deux étochios 89, 89, fig. 2. fixés aux extrémités de la queue d'aronde, & au niveau de la saillie, ou du cordon de la barre à platine. On voit, fig. 2. 89, 89, ces deux étochios ; ils ont la même figure & le même usage que sur la barre à aiguilles.
Les pieces qu'on voit, fig. 2. 90, 90, & fig. 6. 90, s'appellent porte-tirans ; ils ont une ouverture à la partie supérieure, par laquelle ils sont attachés, fig. 2. fermement au corps de la barre à platine, & une charniere à la partie inférieure, dont on verra l'usage.
Les pieces qu'on voit fig. 2. 91, 91, 91, & fig. 7. 91, s'appellent platines à plombs avec leurs plombs à platines ; elles sont composées de deux parties, la supérieure qu'on voit fig. 8. & qu'on nomme plomb à platine, & l'inférieure qu'on voit fig. 9. qu'on nomme platine à plomb.
Le plomb à platine a deux fentes à sa partie large, & reçoit dans ses fentes deux platines à plomb qu'on y fixe, ensorte qu'il en résulte le tout de la fig. 7. ce tout a à sa partie postérieure un petit crochet qu'on voit fig. 8. la queue d'aronde a à sa partie postérieure une entaille en biseau, toute semblable à ce crochet, ensorte que tous les crochets des plombs à platines remplissent l'entaille ou le biseau de la queue d'aronde, à laquelle ils demeurent suspendus par leurs crochets ; ils sont appliqués du reste contre le corps de la barre à platines.
On les fixe contre le corps de la barre à platines par les plaques de barre à platines 92, 92, & qui sont elles-mêmes fortement attachées par deux écrous & deux vis, comme on voit fig. 2.
Les pieces 93, 93, qu'on voit, fig. 2. attachées au corps des barres à platines par des éminences qui entrent dans une charniere qui tient au corps de barre à platines, & qui leur permet de se mouvoir, s'appellent pouces : on verra ci-après l'usage des pouces.
Passons aux grandes pieces 85, 85, fig. 2. on les appelle abatans ; il faut y distinguer plusieurs parties : on voit sur leur surface antérieure une piece 94, 94, qu'on appelle garde platine ; sur leur surface postérieure une piece 95, 95, qu'on appelle le crochet de dedans de l'abattant, & sous leur partie inférieure, une piece 96, 96, qu'on appelle le crochet de dessous des abatans. Il n'y a pas une de ces pieces qui n'ait son usage relatif à son lieu & à sa configuration : mais cet usage ne s'entendra bien que quand la machine entiere sera formée, & que nous traiterons de la main-d'oeuvre.
La piece qu'on voit, fig. 2. 97, 97, fixée au bas des abatans par ses extrémités, & recevant sur son milieu les queues des platines à plomb, s'appelle la barre à poignée. Les parties a b, A B, sont celles que l'ouvrier tient dans ses mains, dont les doigts passent en dessous, & le pouce en dessus, de maniere qu'il puisse être appliqué contre la partie que nous avons appellée pouce ; cette barre s'appelle aussi barre à boîte, parce qu'elle forme une espece de boîte dans laquelle les queues des platines à plomb sont enfermées.
On voit, fig. 10. le dessus de cette boîte : les extrémités de ce dessus sont faites en coin, & s'appliquent dans des lieux c d, C D, de la barre, fig. 2. où elles sont retenues par deux goupilles dont on voit les trous en e, E, à la barre.
Ce dessus ne gêne pas les queues des platines à plomb. Voilà toutes les parties qui forment le septieme assemblage.
Il ne s'agit plus que d'ajoûter cet assemblage au sixieme assemblage pour avoir le huitieme : c'est cette addition que nous allons considérer.
HUITIEME ASSEMBLAGE. Planche VI.
On voit dans cette fig. 1. le septieme assemblage joint au sixieme.
L'extrémité supérieure des abatans est ajustée dans la charniere des épaulieres ; les tirans sont pris dans la charniere des porte-tirans ; les pouces répondent au-dessous de la partie antérieure des contre-pouces ; les platines à plomb remplissent les intervalles vuides qui restoient entre les aiguilles. Il y a entre chaque aiguille une platine ; il ne s'agit plus que d'attacher en A, a, sur les bras de presse, la piece 98, 98, qu'on voit fig. 12. & qu'on appelle la presse ; que de placer toute cette machine sur le fût, ou sur le bois ; & que de travailler.
Car voilà la machine entiere & complete : voilà ce qu'on appelle le métier à bas ; voilà toutes ses parties, & la maniere dont elles s'assemblent ; il ne reste maintenant que d'en expliquer le jeu, ou que de traiter de la main-d'oeuvre.
OBSERVATION.
Mais avant que de passer au dernier assemblage, celui du métier avec son fût, j'observerai qu'il faut une extrème précision dans la configuration des parties du métier. Il faut que les intervalles que laissent entr'eux les cuivres, répondent bien exactement aux ressorts de grille ; que l'épaisseur des plombs à aiguilles soit bien compassée pour qu'il n'y ait pas plus de plombs à aiguilles que de platines à ondes, & que chaque platine à ondes laisse toûjours entr'elle & celle qui la suit trois aiguilles ; que les plombs à platines à plomb soient bien compassés ; pour que l'épaisseur d'un de ces plombs soit double de l'épaisseur d'un plomb à aiguilles ; que les deux platines que porte chacun de ces plombs, se rencontrent bien dans les deux intervalles que laissent entr'elles les trois aiguilles prises entre chaque platine à ondes, & que toutes ces parties délicates se meuvent librement les unes entre les autres.
COROLLAIRE IX.
J'ai dit que l'intervalle de barre fondue sur lequel sont disposés les cuivres étoit de quinze pouces : j'ai travaillé chez le sieur Barrat, le premier ouvrier dans son genre, & le dernier qu'on verra peut-être de la même habileté, sur un quarante-deux, c'est-à-dire, un métier qui portoit sur chaque trois pouces de barre fondue, quarante-deux cuivres. La barre fondue entiere avoit donc deux cent dix cuivres ; il y avoit donc deux cent dix ondes, deux cent dix platines à ondes, quatre cent vingt platines à plomb, & six cent trente aiguilles. On verra dans la suite que chaque aiguille fait sa maille, & que par conséquent l'ouvrier faisoit, ou pouvoit faire sur ce métier, six cent trente mailles à la fois.
Mais il est à propos de donner ici la représentation d'une aiguille : on en voit une dans cette planche, fig. 11. il faut y distinguer trois parties ; son bec a, sa chasse b, & sa queue c : son bec est élastique, & quand il est pressé, il se cache dans la chasse b ; la queue c est prise dans le plomb à aiguilles. Nous avons donné à l'article AIGUILLE, la maniere de travailler les aiguilles du métier. On a pour ce travail une machine tout-à-fait commode, & très-curieuse ; elle est de l'invention du sieur Barrat, & il y a bien de l'apparence qu'elle differe peu de celle qu'a dû imaginer l'inventeur du métier ; car ce n'étoit pas assez que d'avoir imaginé la machine ; son exécution a dû offrir des difficultés étonnantes, & elle n'a pû avoir lieu que ces difficultés ne fussent levées, pour cet effet, il a fallu trouver les moules des plombs à platines & des plombs à aiguille ; car s'il avoit fallu égaliser ces plombs à la lime, on n'auroit jamais fini : il a fallu trouver le moyen de pratiquer en très-peu de tems des chasses à des aiguilles fines comme des cheveux. Il ne faut donc pas regarder l'inventeur de la machine à faire des bas, comme un homme qui a imaginé une chose seule, très-difficile à la vérité, & qui l'a imaginée aussi parfaite presque qu'elle le pouvoit être ; mais comme un homme qui, lui seul, a encore surmonté tous les obstacles qui s'opposoient à l'exécution de la machine ; & ces obstacles sont de nature à ajoûter beaucoup à l'honneur de celui-là seul qui les auroit surmontés. Il faut consulter pour cet effet les articles de ce Dictionnaire, MOULE & AIGUILLE.
NEUVIEME ASSEMBLAGE. Planche VII.
Ce neuvieme assemblage est la machine entiere sur son fût.
Elle est composée 1°. de la cage, & de ses dépendances.
2°. De l'ame, & de ses dépendances.
3°. Des moulinets avec leurs dépendances.
4°. Des abatans, & de leurs dépendances.
Passons maintenant à la main-d'oeuvre.
MAIN-D'ŒUVRE ou travail des bas sur le métier à bas.
Je diviserai la main-d'oeuvre en sept opérations principales. La formation des mailles est le but de ces sept opérations. La premiere consiste à cueillir, la seconde, à foncer du pié, & à former l'ouvrage ; la troisieme, à amener sous les becs ; la quatrieme, à former aux petits coups ; la cinquieme, à presser les becs ; & à faire passer la maille du derriere sur les becs ; la sixieme, à abattre ; la septieme, à crocher.
PREMIERE OPERATION. Cueillir.
Pour rendre cette opération & les suivantes très-intelligibles, j'ai fait représenter les platines à ondes, & les platines à plomb, en grand.
Il y a une petite opération préliminaire à toute autre, c'est de noüer la soie à la premiere aiguille, comme on voit Planche I. du bas au metier, fig. 1. & fig. 2. au point 1, puis de la passer sous la seconde aiguille, & de lui faire faire un tour sur cette seconde aiguille, en la ramenant dessus ; de la conduire sous la troisieme aiguille, & de lui faire faire un tour sur cette aiguille, en la ramenant dessus ; de la conduire sous la quatrieme aiguille, & de lui faire faire un tour sur cette quatrieme aiguille, en la ramenant dessus, & ainsi de suite, jusqu'à ce qu'il n'y ait plus d'aiguilles, & placer ce commencement d'ouvrage sous la gorge des platines, comme on l'y voit fig. premiere : cela fait, voici comment on travaille.
Le premier mouvement du cueillir consiste à prendre la soie au sortir de dessous la derniere aiguille, & de l'étendre sous les becs, comme on le voit en 3, 4, fig. premiere & fig. 3. & 2.
Le second mouvement, à presser sur la premiere marche à gauche ou à droite, selon le côté où sera le corps du chevalet : s'il est à droite, comme on le suppose ici, on pressera du pié la premiere marche à gauche ; il part de l'extrémité de cette marche une corde qui passe autour du tambour de la roue ; voyez la Pl. II. fig. 1. n°. 9. cette corde 8 fera tourner le tambour & la roue 13 de droite à gauche : mais il y a autour de la roue une corde qui va de-là sur les roulettes de la barre à chevalet, & de ces roulettes aux S. du corps à chevalet ; voyez Pl. IV. fig. 6. n°. 54, 54 ; le corps à chevalet 51 même fig. glissera donc le long de la barre à chevalet 50 de droite à gauche : mais comme le comble 52 du corps à chevalet est plus haut que la queue des ondes, il accrochera en passant les queues des ondes, les chassera de la petite cavité c des ressorts de grille, fig. 1. Pl. IV. & le dessous de la tête de toutes les ondes sera forcé de descendre sur la barre à moulinet, voyez Pl. V. fig. 1. & fig. 7. & s'y tiendra comme collé, par l'action du petit plan incliné a b, qui termine les ressorts de grille. Voyez fig. 1. Pl. IV. Or la tête des ondes ne peut descendre, que les platines à ondes qui sont assemblées avec les ondes ne descendent aussi : mais en descendant, leurs becs rencontreront nécessairement la soie qu'on a étendue dessous, l'entraîneront avec eux, comme on voit Pl. I. fig. 4. & lui donneront la disposition qu'on lui voit fig. 4. 5. ou 6. c'est-à-dire, qu'elle formera des boucles entre la seconde & la troisieme aiguille, entre la cinquieme & la sixieme, entre la huitieme & la neuvieme, & ainsi de suite. Fin de la premiere opération.
II. OPERATION. Foncer du pié & former l'ouvrage.
Le premier mouvement de cette opération se fait du pié dont on a cueilli & des deux mains. L'ouvrier prend la barre à poignée des deux mains, de maniere que ses pouces soient appliqués contre les pieces appellées pouces. Voyez Pl. VII. fig. 1. ses mains sont en A A, & ses pouces en B B. Il fait ensuite trois actions à la fois ; il presse du pié la marche 15, fig. 1. Planc. II. dont il a cueilli ou fait marcher le corps à chevalet de droite à gauche, il tire des mains perpendiculairement en-bas la barre à poignée A A, fig. 1. Pl. VII. & il presse avec ses pouces fortement contre les pouces B B, fig. 1. Pl. VII. voyons quel est le résultat de ces actions.
Il part des extrémités de la traverse 6, 6, fig. 1. Pl. II. qui passe sous les marches 1, 2, 3, des cordes 9, 9, avec leurs crochets 10, 10, qui vont prendre les crochets du balancier 15, 15, Pl. II. fig. 3. la marche 1, 5, même Planc. fig. 1. étant pressée, presse la traverse 6, 6, d'ailleurs le balancier 14, 14, 15, 15, fig. 3. même Pl. est attaché sur les épaulieres, comme on voit en 14, 14 ; les épaulieres, reçoivent dans leurs charnieres les abatans, Pl. VI. fig. 1. 85, 85 ; 85, 85 : la barre à platines est attachée aux abatans, même Pl. & fig. 1. n°. 84, 84. L'action du pié sur la marche tend donc à faire descendre les abatans, & avec les abatans, la barre à platines ; avec la barre à platines, les platines à plomb, 91, 91, 91, même Planche fig. 2.
L'action des mains qui tirent perpendiculairement en-bas les abatans, tend aussi à faire descendre les abatans, la barre à platines, & les platines à plomb.
Les actions du pié & des mains conspirent donc ici. L'action des pouces contre les pieces appellées pouces, tend, fig. 6. Pl. IV. à lever la partie antérieure des contre-pouces 43, 43, par conséquent à faire baisser leur partie postérieure 45, & à appliquer la bascule 48, 48, sur les queues des ondes, ou à le faire baisser ou à relever leur tête, ou à relever les platines à ondes.
Les trois actions combinées de ce mouvement tendent donc à produire deux effets contraires ; l'un d'abaisser les platines à plomb, l'autre de relever les platines à ondes.
Le second mouvement de cette opération consiste à ménager doucement ces deux effets contraires, à les combiner finement, & à faire ensorte que les platines à ondes remontent d'entre les aiguilles, à-peu-près de la même quantité que les platines à plomb y descendent : ensorte que les becs des unes & des autres se trouvent tous de niveau sous les aiguilles, comme on voit Pl. I. du bas au métier, fig. 7.
Il s'est donc fait dans cette seconde opération une nouvelle distribution de la soie, comme on voit fig. 7. 8. & 9 & formé une boucle entre chaque aiguille : mais les nouvelles boucles s'étant formées aux dépens des précédentes, elles sont toutes égales & toutes plus petites que les premieres formées par les seules platines à ondes.
C'étoit pour donner lieu à cette distribution de la soie entre toutes les aiguilles, au rétrécissement des boucles formées par les platines à ondes, & à la formation des boucles faites par les platines à plomb aux dépens des premieres, que l'on a fait un peu relever les platines à plomb ; car si on n'eut point fait relever les platines à plomb, que seroit-il arrivé ? c'est que ces platines eussent tenu tendues sur les aiguilles les portions de soie, 1, 2 ; 3, 4, fig. 5. ou 1, 2 ; 3, 4. fig. 6. Pl. I. du métier à bas, & que les platines à plomb F E, D C, &c. venant à s'appliquer sur les mêmes portions, auroient produit l'un ou l'autre de ces effets, ou enfoncé les trois aiguilles contenues sous chaque portion, ou rompu la soie : au lieu que les platines à ondes A B remontant un peu, fig. 4. & 6. même Pl. lorsque les platines à plomb C D, E F, rencontrent les portions de soie 1, 2 ; 3, 4, fig. 6. & 5 elles font descendre sans peine cette soie sous les aiguilles, & la distribuent entr'elles sans les forcer. Mais chaque boucle des platines à ondes ne perdant qu'autant de soie qu'en prend chaque platine à plomb, & ces platines cessant les unes de remonter, & les autres de descendre entre les aiguilles, lorsque leurs becs sont tous de niveau sur les aiguilles, comme on les voit Pl. I. du bas au métier, fig. 7. 8. 9, toutes les boucles sont égales, & la soie se trouve distribuée entre les aiguilles, comme on voit fig. 7. & 8. La portion 1, 2. faite à la main, fig. 7. est sous les gorges des platines, & la portion 3, 4, sous les becs. Fin de la seconde opération.
III. OPERATION. Amener l'ouvrage sous becs.
Cette opération s'exécute d'un seul mouvement, composé de deux actions ; l'une de laisser remonter les abatans ; & l'autre de tirer la barre à poignée en devant.
Il est évident que pour baisser les abatans, & mettre les platines à plomb de niveau avec les platines à ondes, il a fallu vaincre l'action du grand ressort, car, Pl. VI. figure 1. le grand ressort 16, 16, agissant par son extrémité supérieure contre le portefaix 8 de l'arbre 6, 7, tend à le faire tourner : or l'arbre ne peut tendre à tourner qu'il ne donne le même effort, la même tendance aux épaulieres 5, 85, 85, 5 mais les épaulieres reçoivent dans leurs noeuds les abatans 85, 85 ; 85, 85 : le grand ressort tend donc à relever les abatans.
Ainsi pour laisser remonter les abatans, il n'est question que de lâcher des mains, ne point retenir la poignée A B, & que de laisser agir le grand ressort ; observant, tandis que le grand ressort fait remonter les abatans, de tenir les pouces B B fortement appliqués contre les contre-pouces. C C, Pl. VII. fig. 1. car par ce moyen les pouces B B ne cessant point d'agir contre les contre-pouces C C, la partie antérieure des contre-pouces e e sera levée à mesure que les abatans remonteront leur partie postérieure, d d baissera d'autant ; la bascule f f sera toûjours appliquée sur les queues des ondes ; la tête des ondes g g suivra le mouvement de la barre à platines h h, qui remontera avec les abatans, & les platines à ondes demeureront toûjours de niveau avec les platines à plomb.
L'autre action dont le mouvement de cette troisieme opération est composée, consiste à tirer la barre à poignée A A en-devant.
Cette action se fait horisontalement : mais on ne peut tirer la barre à poignée A B, fig. 1. Pl. VI. en-devant, que tout ce que nous allons dire ne s'ensuive ; voyez Pl. VI. fig. 1. la barre à platine 84, 84, est tirée en-devant ; car elle est attachée aux abatans ; les platines à ondes s'avancent en même tems en-devant, & toûjours paralleles aux platines à plomb ; parce que la barre fondue est contrainte d'avancer en vertu des tirans qui tiennent à elle d'un bout, & de l'autre aux porte-tirans 90, 90, même Pl. fig. 2. qui sont attachés à la barre à platine.
Par le mouvement composé de ces deux actions, les becs des platines a b s'élevent au-dessus des aiguilles, les dessous des becs sont amenés un peu au-delà de leurs têtes c d, & la soie se trouve disposée comme on la voit Pl. I. du bas au métier, fig. 10. 11. 12. mais alors la branche des crochets z de dessous des abatans est appliquée contre les petits coups x, fig. 1. Pl. VII. Fin de la troisieme opération.
IV. OPERATION. Former aux petits coups.
Le premier mouvement de cette opération consiste à laisser remonter l'extrémité des crochets z de dessous des abatans, aux petits coups x, Pl. VII. fig. 1. Ce mouvement se joint presqu'au premier mouvement de l'opération précédente : la surface en talus, ou le dessous du petit coup x, se trouve alors appliqué à la surface en talus pareillement de l'extrémité du crochet z. Mais comme le grand ressort 16, 16, tend toûjours à relever les abatans, il tend en même tems à séparer l'extrémité du crochet z de l'éminence du petit coup x.
Le second mouvement consiste à empêcher cette séparation par de petites secousses, qui font un peu glisser le talus de l'extrémité du crochet z sur le talus intérieur de l'éminence du petit coup x. Ces secousses ont pour but de corrompre & corroyer la soie sous les becs d'aiguilles, & de la tenir tendue en-devant, & presque de niveau avec les becs, comme on voit Pl. I. du bas au métier, fig. 10. 11. 12.
Il faut toûjours tenir les pouces de la main fortement appuyés contre les pouces de la machine, afin que les têtes des ondes demeurant toûjours appliquées à la barre à platines, les platines à ondes & les platines à plomb demeurent toûjours de niveau ; car cela est essentiel, comme il est facile de s'en appercevoir. Fin de la quatrieme opération.
V. OPERATION. Donner le coup de presse, & faire passer l'ouvrage de dessous la gorge des platines sur les becs des aiguilles.
Le premier mouvement de cette opération consiste à abandonner les abatans à eux-mêmes, tenant toûjours les pouces des mains fortement contre les pouces B B de la machine, & les platines à ondes bien paralleles en tous sens aux platines à plomb. L'action du grand ressort 16, 16, fera remonter les abatans, jusqu'à ce que les épaulieres o o soient appliquées aux arrêtans de l'extrémité des jumelles p p, comme on voit Pl. VII. fig. 1.
Mais lorsque les abatans seront remontés à cette hauteur, alors le ventre n des platines correspondra ou se trouvera à la hauteur des aiguilles, comme on voit même Pl. même fig. 1. & Pl. II. bas au métier fig. 1. a b.
Le second mouvement consiste à appuyer fortement le pié sur la marche du milieu ; & voici le résultat de ce mouvement. La marche baisse, tire à elle le crochet de la petite anse, ce crochet tire la petite anse, la petite anse tire la grande anse, la grande anse fait descendre les bras de la presse, & la presse se trouve appliquée sur les becs des aiguilles, dont elle force les pointes à se cacher dans les chasses, comme on voit fig. 1. Pl. II. du bas au métier.
Le troisieme mouvement c'est tandis que la presse est sur les becs des aiguilles, de faire passer l'ouvrage qui est contre les ventres des platines, comme on voit Pl. II. fig. 1. au delà des chasses des aiguilles, comme on voit fig. 4. même Pl. ce qui s'exécute en tirant la barre à poignée brusquement en devant, & horisontalement.
Le quatrieme mouvement, d'ôter le pié de dessus la marche du milieu ; d'où il s'ensuit que rien n'empêchera plus la grande anse qui est tirée en-haut par la lisiere de cuir ou la courroie, qui passe sur la roulette du porte-faix d'en-bas, & qui se rend à la branche du contre-poids, de remonter & d'entraîner avec elle & faire relever les bras de presse ; ce qui séparera la presse de dessus les becs des aiguilles, & permettra à la pointe de ces becs de sortir de leurs chasses. Fin de la cinquieme opération.
VI. OPERATION. Abattre l'ouvrage.
Il n'y a qu'un mouvement assez leger à cette opération ; il consiste à tirer la barre à poignée, & à faire avancer les ventres des platines jusqu'entre les têtes des aiguilles ; il est évident que ces ventres placés, comme on les voit Pl. II. du bas au métier. fig. 3. feront passer l'ouvrage, de l'état où on le voit, sur les becs des aiguilles, fig. 4. 1, 2, dans l'état où on le voit fig. 5, 3, 4, ou fig. 6, 5, 6.
Voilà la formation de la maille : la septieme opération n'y ajoûte rien ; elle restitue seulement & le métier & l'ouvrage déjà fait, dans une position à pouvoir ajoûter de nouvelles mailles aux mailles qu'on voit, ou dans l'état où il étoit quand on a commencé à travailler.
VII. OPERATION. Crocher.
Cette opération n'a qu'un mouvement ; mais c'est le plus considérable & le plus grand de tous.
Quand on est sur le point de crocher, le métier se trouve dans l'état suivant ; les ventres des platines sont au niveau des têtes des aiguilles, & par conséquent le dessous des becs fort au-dessus des aiguilles ; les crochets de dessous des abatans sont au-dessus des petits coups, comme on les voit Pl. VII. fig. 1. & les épaulieres sous les arrêtans des jumelles, comme on les voit même figure.
Pour crocher ; on applique la branche du crochet z de dessous des abatans, contre les arrêtans y ; on tire perpendiculairement en-bas les abatans par la barre à poignée A A ; tenant toûjours les branches des crochets appliquées à l'éminence t des arrêtans qui dirigent dans ce mouvement : on fait descendre de cette maniere les platines à ondes & les platines à plomb, jusqu'à ce que le haut de leurs gorges M soit à la hauteur de N, ou des têtes des aiguilles : puis du même mouvement continué horisontalement, on repousse en arriere les abatans aussi loin que l'on peut, & l'on laisse remonter le métier qui va de lui-même s'arrêter au-dessous de la barre à aiguilles, où il rencontre un crochet prêt à recevoir celui qui est placé au derriere des abatans, & qu'on appelle crochet de dessus des abatans.
Il est évident que dans ce mouvement le haut de la gorge M des platines a emporté avec lui l'ouvrage qui étoit sous les becs, en le faisant glisser le long des aiguilles ; que les becs des aiguilles sont vuides ; que le dessous des becs des platines à ondes & des platines à plomb, se trouve entre les aiguilles ; que l'ouvrage fait est caché pour celui qui ne voit le métier qu'en face, & qu'il le voit alors comme il est représenté Pl. II. fig. 8. du bas au métier, c'est-à-dire prêt à travailler de nouveau, ou à faire de gauche à droite ce qu'il a exécuté de droite à gauche.
C'est maintenant qu'on doit avoir conçû comment se fait la maille, qu'il est à-propos de revenir sur les parties du métier & sur les configurations, dont on n'étoit pas en état auparavant de bien entendre les propriétés.
Commençons par les marches ; elles sont au nombre de trois Pl. II. fig. 1. du métier à bas ; c'est la même corde qui va de la premiere 1, 5, au tambour de la roue 17, & de ce tambour à la troisieme 1, 5 : d'où il s'ensuit que si l'on presse du pié celle qui est à gauche, on fera tourner la roue de droite à gauche, & qu'en pressant du pié celle qui est à droite, la roue tournera de gauche à droite.
C'est la même corde qui passe sous la roue du fût, où elle est cloüée, & qui va se rendre d'un bout sur une des roulettes de la barre à chevalet, & de l'autre sur une roulette, & s'attacher aux s qui partent du corps de ce chevalet, comme on voit Pl. IV. fig. 6. n° 49, 49.
On conçoit actuellement ce que nous avons dit de l'arrêtant, ou de cette partie y t qu'on voit Pl. VII. fig. 1. Il a fallu nécessairement se ménager la facilité de l'avancer ou de la reculer, en pratiquant à la partie appliquée & fixée en montant une ouverture longitudinale r : trop avancé en-devant, ou trop peu, le fond des gorges des platines ne pourroit plus venir chercher l'ouvrage abattu, en vuider les aiguilles, l'entraîner derriere, & donner lieu à la continuation du travail.
Au dessous de l'arrêtant, on voit la piece appellée le petit coup x même Planche & même figure. Sans ce petit coup, qui est ce qui régle l'ouvrier, quand il forme l'ouvrage & corrompt la soie amenée sous les becs des aiguilles ; il seroit exposé à avancer le dessous des platines trop en avant, à casser la soie, ou à rompre les becs des aiguilles.
Voilà ce qu'il y a de plus remarquable sur le fût & ses parties. Passons au métier, & parcourons ses assemblages.
On s'est ménagé aux gueules de loup 13, la même commodité qu'aux arrêtans, celle de les hausser & baisser à discrétion, afin d'ajuster convenablement la barre fondue, Pl. II. fig. 3.
On sent de quelle importance est le grand ressort 16, 16 ; c'est par son moyen que les abatans sont relevés sans que l'ouvrier s'en mêle. Pl. II. fig. 3. la vis 17. qui sert à le bander ou à le relâcher, est très-bien imaginée.
Le balancier 14, 14, 15, 15, n'est pas une piece inutile ; il met le pié à portée d'aider la main ; à vaincre la résistance du grand ressort toutes les fois qu'il faut faire descendre les abatans. Or ce mouvement se faisant souvent, on n'a pû apporter trop d'attention à soulager l'ouvrier.
La patte du bras de presse 17, 18, 19, fig. 1. Pl. III. est garnie d'une vis 20, 20, dont on va sentir toute la finesse : sans cette vis, l'ouvrier, en donnant le coup de presse, seroit exposé ou à rompre toutes les aiguilles, si la presse s'appliquoit trop fortement sur elles, où à ne pas cacher leurs becs dans leurs chasses, si elle ne s'appliquoit pas assez. Mais qui le dirigera dans cette opération ? les vis appliquées à l'extrémité des bras de presse, qui permettront à ces bras de descendre suffisamment, & à la presse de s'appliquer convenablement sur les becs d'aiguilles.
Mais c'eût été bien du tems de perdu pour l'ouvrier, & bien de la peine réitérée, s'il eût fallu relever la presse & la soûtenir : aussi se releve-t-elle d'elle-même à l'aide de la courroie passée de la grande anse sur la roulette du porte-faix d'en-bas, & attachée à la branche du contre-poids.
On s'est encore ménagé aux porte-grilles, Pl. III. fig. 5. le même avantage qu'aux gueules de loup & qu'aux arrêtans. Leur ouverture longitudinale x x, permet aussi de les avancer ou reculer à discrétion.
Le porte-roulette fixé, même fig. au milieu de la petite barre de dessous, facilite avec les roulettes de l'extrémité de la barre fondue, le mouvement en-arriere ou en-devant, de tout ce qu'on appelle l'ame du métier, que l'ouvrier fait, en travaillant, avancer ou reculer toutes les fois qu'il tire à soi ou repousse les abatans ; ce qui lui arrive très-souvent. Aussi louai-je beaucoup ceux qui ont diminué le poids de ces parties, en ajoûtant une roulette à la petite barre, & une gueule de loup à la barre de derriere, pour recevoir la roulette ajoûtée.
Il y a plusieurs choses à considérer dans les ressorts de grille, Pl. III. fig. 6. Premierement ils sont disposés sur deux rangées paralleles, de maniere que les ressorts de la rangée de derriere répondent aux intervalles que laissent entr'eux les ressorts de la rangée de devant : c'est le seul moyen qu'il y eût peut-être de leur donner la force qui leur est nécessaire pour l'usage auquel ils sont employés. Si on les eût tous placés sur une même rangée, ils auroient été plus petits & trop foibles. Voilà pour leur arrangement.
Secondement, ils sont composés de quatre plans inclinés, disposés à-peu-près en zig-zag. Lorsque la queue de l'onde est chassée de la cavité c, figure 7. même Pl. par le corps du chevalet, elle écarte le ressort, qui revient ensuite sur elle quand elle est sortie, & qui la repousse d'autant plus vivement, qu'alors elle se trouve sur un plan incliné a b ; c'est le même effet quand elle est chassée de sa cavité en-dessous par la bascule : elle écarte pareillement le ressort qui revient ensuite sur elle avec d'autant plus de vivacité, qu'elle se trouve encore sur un plan incliné c d. La méchanique n'est pas différente, quand chassée de sa cavité, soit en-dessus, soit en-dessous, elle y est ramenée ; elle ne peut y descendre que par une espece d'échappement fort promt, puisqu'elle y est toûjours conduite par un petit plan incliné c d, c b.
Ce n'est pas une petite affaire que de bien disposer les cuivres de la barre fondue. Leur usage est d'empêcher les ondes de vaciller dans leur mouvement de chûte. Si l'on a bien compris ce que j'ai dit jusqu'à présent, on doit s'appercevoir qu'il y a un rapport bien déterminé entre le nombre des ressorts, les intervalles qu'ils laissent entr'eux ; le nombre des cuivres, leur épaisseur ; les ondes, leur longueur, leur nombre, leur épaisseur ; les platines à ondes, leur nombre, leur épaisseur ; les platines à plomb, leur nombre, leur longueur, leur épaisseur ; les plombs à platines, leur nombre, leur épaisseur ; les aiguilles, leur nombre, leurs intervalles ; les plombs à aiguille ; leur nombre, leur épaisseur ; & que l'une de ces choses étant donnée, tout le reste s'ensuit. Il y a très-peu d'ouvriers en état de combiner avec précision toutes ces choses, sur-tout quand il s'agit de faire un métier un peu fin ; comme un quarante, un quarante-un, un quarante-deux, &c.
La méchanique des contre-pouces 43, 44, 45, Pl. IV. fig. 4. mérite bien un coup-d'oeil. Ces pieces sont chargées à leur extrémité d'un contre-poids 44, qui ne permet à la bascule d'agir sur les queues des ondes, qu'à la volonté de l'ouvrier. Il y a sur les ondes deux actions opposées pendant tout le travail, & elles ont leurs effets successivement, selon les mouvemens des abatans. Ces deux actions sont l'action de la bascule, 48, 48, par le moyen des pouces & contre-pouces sur la queue des ondes, & l'action de la barre à platines sur leur tête. Lorsque l'ouvrier tire les abatans perpendiculairement en-bas, alors la barre à platines, ou son chaperon, c'est-à-dire cette petite plaque qui lui est appliquée par derriere & qui fait éminence, presse fortement sur leurs têtes, les entraîne dans la même direction, & les réduit dans le parallélisme avec les platines à plomb, malgré l'action des pouces sur les contre-pouces, & celle des contre-pouces sur la bascule, & celle de la bascule sur les queues des ondes : mais lorsque l'ouvrier laisse agir le grand ressort, & que les abatans abandonnés à eux-mêmes sont relevés, alors rien ne s'oppose à l'action des pouces, des contre-pouces & de la bascule, qui subsiste pendant tout le travail ; & les ondes se relevent, & leurs queues rentrent dans leur cavité, ou descendent au-dessous, selon que l'ouvrier le veut.
Comme il falloit que dans tous les mouvemens les platines à ondes & les platines à plomb fussent toûjours exactement paralleles en tous sens les unes aux autres, quoique les platines à ondes appartinssent à la barre fondue, & que les platines à plomb appartinssent à la barre à platines, c'étoit donc nécessité que la barre fondue se prêtât & suivît tous les mouvemens de la barre à platines ; c'est ce qui s'exécute par le moyen des tirans qui répondent d'un bout à la barre fondue, & de l'autre à la barre à platines, & par le moyen des trois roulettes de l'ancien métier, & des quatre du métier nouveau, dont deux se meuvent dans les gueules de loup, & deux sur les grandes pieces.
Passons maintenant aux moulinets. Comme nous n'en avons rien dit jusqu'à présent, & que nous avons cependant traité de presque tout ce qui concerne la main-d'oeuvre : on seroit tenté de croire au moins que ces parties & toutes celles qui leur appartiennent, comme la boîte, la barre, & le ressort à moulinet, sont superflues, & qu'il n'y a pas non plus grand besoin de jumelles. On va voir combien ce soupçon est éloigné de la vérité.
Pour bien entendre ce qui suit, il faut examiner un peu la configuration d'une onde en-dessous. On voit, Pl. IV. fig. 3. que depuis a jusqu'à b elle est comme arrondie, & qu'elle est évidée depuis b jusqu'à c. La partie arrondie a b forme sa tête. Lorsque le chevalet passant sous la queue de l'onde, fait descendre cette partie a b, elle s'applique sur la barre à moulinet 82, 82, Pl. V. fig. 1. ensorte que toutes les têtes des ondes sont rangées sur la barre à moulinet, quand le corps à chevalet a fait sa course. D'où il s'ensuit évidemment que plus cette barre sera haute, moins les têtes des ondes descendront, moins les platines à ondes attachées à ces têtes descendront entre les aiguilles : moins les becs des platines descendront au-dessous des aiguilles dans la premiere opération de la main-d'oeuvre ou le cueillement ; moins les boucles de soie formées entre les aiguilles seront grandes ; moins les mailles seront lâches : mais cette barre à moulinet étant enfermée dans des boîtes 81, 81, qui peuvent se hausser ou se baisser à l'aide des arbres à moulinet 68, 81 ; 68, 81, qui les traversent, on pourra donc hausser ou baisser cette barre à discrétion, & faire un bas plus ou moins serré. Voilà l'usage de la barre en elle-même & de sa mobilité le long des corps de moulinet : mais ce n'est pas sans raison qu'on lui a attaché postérieurement un ressort 83, 83, 83, à l'aide duquel elle peut aller & venir dans les boîtes.
Pour sentir l'usage de ce ressort & de la mobilité de la barre dans ses boîtes, il faut relire ou se rappeller la derniere opération de la main-d'oeuvre ou du crochement : il consiste à faire descendre les platines jusqu'à ce que leurs gorges soient un peu plus bas que les têtes des aiguilles, & que ces gorges puissent embrasser l'ouvrage qui remplit ces têtes, & le remporter en-arriere.
Mais pour exécuter ces mouvemens, comme il y a loin de la barre à moulinet sur laquelle les têtes des ondes étoient placées, jusqu'aux têtes des aiguilles, il a fallu amener les têtes des ondes & les platines qui y sont attachées, en-devant ; c'est ce que l'ouvrier a fait, en tirant à lui la barre à poignée ou les abatans. Il a fallu faire descendre les platines, & par conséquent les têtes des ondes auxquelles elles sont assemblées, pour que les gorges des platines se trouvassent un peu au-dessous des têtes des aiguilles, c'est ce qu'il a fait en tirant les abatans aussi bas qu'ils pouvoient descendre, & se laissant diriger par les arrêtans. C'est pour rendre possible ce dernier mouvement, que l'on a évidé les ondes en-dessous ; car si elles avoient été par-tout de la même largeur, elles n'auroient pû descendre ; la barre à moulinet sur laquelle elles auroient continué de porter, les en auroit empêché : mais en les évidant elles ont cessé de porter sur la barre à moulinet, & en les évidant assez, elles n'ont rien rencontré d'ailleurs qui les gênât dans leur descente, & qui empêchât la gorge des platines de parvenir jusqu'au-dessous des becs des aiguilles.
Mais ce n'étoit pas tout, il falloit que ces gorges remportassent l'ouvrage de dessous les becs des aiguilles en-arriere : pour cet effet, l'ouvrier tenant ces gorges entre les têtes des aiguilles, les repousse en-arriere : mais en les repoussant en-arriere, qu'arrive-t-il ? c'est que le talon de l'échancrure des ondes rencontre la barre à moulinet. Si cette barre à moulinet étoit immobile dans les boîtes, elle arrêteroit ce mouvement horisontal, & l'ouvrage ne seroit point remporté en-arriere par les gorges ; aussi l'a-t-on fait mobile : le talon de l'échancrure des ondes la fait reculer ; l'ouvrage est remporté par les gorges ; les ondes se relevent ; leurs talons cessent d'appuyer contre la barre à moulinet ; le ressort circulaire qui agit contre cette barre la restitue dans son premier état, & elle est disposée à recevoir derechef la tête des ondes dans leur chûte, qui se fera au nouveau cueillement.
Voilà les usages de ces parties, qui paroissoient si superflues. On a dentelé la roue 69 du moulinet, figure premiere, Planche V. afin qu'on pût savoir de combien on haussoit ou baissoit la barre à moulinet, & évaluer à-peu-près par ce moyen de combien on relâchoit ou resserroit les mailles, & relâcher & resserrer également de chaque côté. La partie 68, 68, qu'on appelle croisée du moulinet, sert de poignée à l'arbre, & puis c'est le tout.
Il ne nous reste plus qu'un mot à dire des jumelles, 61, 61, fig. premiere, Pl. V. des platines, tant à ondes qu'à plomb, & des gardes-platines. On a pratiqué aux jumelles 61, 61, deux arrêtans 5, 5, l'un en-dessus 61, & l'autre en-dessous 5. L'usage de celui de dessus est de contenir à une juste hauteur les épaulieres & les abatans qui y sont assemblés, malgré l'action du grand ressort. Voyez même Planche, fig. 7. L'usage de celui de dessous est d'empêcher, dans le crochement, les mêmes épaulieres ainsi que les abatans, & par conséquent les gorges des platines, de descendre trop au-dessous des têtes des aiguilles, & de les briser & fausser toutes.
Toutes les sinuosités que l'on remarque aux platines, Pl. IV. fig. 2. ont leur raison. On peut distinguer quatre lieux principaux dans ces parties : leur bec b, qui prend la soie étendue sur les aiguilles & la fait descendre entr'elles : le dessous du bec c, qui amene la soie bouclée sous les becs & la corroi : le ventre e, qui abat l'ouvrage : la gorge d, qui le reprend & le ramene en-arriere : la queue f, qui s'emboîte dans la barre à poignée, & l'empêche de vaciller. S'il n'y avoit point de garde-platine, 94, 94, Pl. VI. fig. 2. quand dans la troisieme opération on amene l'ouvrage sur les becs avec le ventre des platines, ce ventre viendroit frapper contre la presse qui est alors appliquée, & se défigureroit : mais le garde-platine empêche ce choc : il permet aux ventres des platines d'approcher assez de la presse pour que l'ouvrage soit bien amené sur les becs, mais non de la frapper, en rencontrant lui-même assez-tôt pour prévenir cet inconvénient, le bras de presse.
Il survient en travaillant plusieurs accidens, & il y a plusieurs autres choses à observer, dont je vais faire mention.
Lorsqu'il se rencontre des noeuds dans la soie ou qu'elle se casse, on ne peut continuer l'ouvrage sans faire ce que les ouvriers appellent une enture.
Pour enter, on étend bien sur les aiguilles la partie du fil de soie qui tient à l'ouvrage, & l'on couche l'autre partie, non pas bout à bout avec la premiere ; mais on la passe entre la cinq, la sept, &c. avant le bout du fil qui tient à l'ouvrage ; ensorte que le fil se trouve double sur ces cinq, sept aiguilles, & l'on continue de travailler comme si le fil étoit entier.
Tout bas se commence par un ourlet, & voici comment on s'y prend pour le faire. On passe la soie dans la tête de la premiere aiguille, & on l'y arrête en la tordant ; on embrasse ensuite en-dessous les deux suivantes ; on la ramene en-dessus sur la premiere ; puis on la passe en-dessous, & on embrasse la quatrieme & la cinquieme, sur lesquelles on la ramene, & sur la troisieme sous laquelle on la passe, & on embrasse la sixieme & la septieme sur lesquelles on la ramene, & sur la cinquieme sous laquelle on la passe ensuite, & on embrasse la huitieme & la neuvieme, & ainsi de suite.
Un bas n'est pas par-tout de la même venue ; on est obligé de le retrécir de tems en tems. Supposons donc qu'on ait à retrécir d'une maille, on prend un petit outil qu'on appelle poinçon, on s'en sert pour porter la maille de la troisieme aiguille sur la quatrieme aiguille, la maille de la seconde sur la troisieme, la maille de la premiere sur la seconde, & la premiere se trouve vuide.
On demandera peut-être pourquoi on porte la troisieme maille sur la quatrieme aiguille, & non la premiere sur la seconde tout d'un coup : puisqu'il faut qu'il se trouve deux mailles sur une aiguille, pourquoi donner la préférence à la quatrieme ? Je répons que c'est afin que la lisiere soit plus nette ; car si la maille double se trouvoit au bord de la lisiere, elle tireroit trop. Il faut même, si l'on veut que la lisiere ne soit pas trop serrée, bien repousser l'ouvrage en-arriere, & ne pas accoller la platine avec la soie quand on la jette.
Au reste on rétrécit d'une maille de chaque côté du métier, de quatre rangées en quatre rangées, & l'on ne commence à retrécir qu'à un pouce au-dessus de la façon, ou de cet ornement qu'on pratique au-dessus des coins.
Il arrive quelquefois, après le coup de presse, qu'un bec d'aiguille ne se releve pas, mais demeure dans sa chasse : lors donc qu'on a cueilli & qu'on vient à abattre l'ouvrage, il y a une maille qui n'ayant pas été mise dans la tête de l'aiguille, mais ayant passé par-dessus, ne sera pas travaillée, & qu'il faudra relever ; il pourra même se trouver plusieurs mailles non travaillées de suite. Pour les relever, voici comment on s'y prendra : on saisira la derniere qui est bien formée à l'ouvrage, avec le poinçon, & on la passera dans la tête de la tournille ou d'une aiguille emmanchée, puis on prendra avec le poinçon la bride de dessus cette maille ; on passera cette bride sur la tournille : à mesure qu'elle avancera le long du bec, la bonne maille sortira de dessous, & bien-tôt la bonne maille se trouvera entierement sortie & fort loin du bec, & la bride à portée de passer dessous. On l'y fera donc passer ; puis quand elle y sera, on pressera avec le poinçon le bec de l'aiguille & l'on le tiendra dans la chasse ; cependant on tirera la tournille, ce qui fera avancer sa bride dans la tête de la tournille & passer la bonne maille par-dessus le bec, alors la maille sera relevée : on continuera de cette maniere s'il y en a plusieurs de tombées, traitant toujours celle qui se trouvera dans la tête de la tournille comme la bonne, & la bride d'au-dessus comme la mauvaise ou comme la maille à relever ; & quand on en sera à la derniere, on la mettra dans la tête de l'aiguille. Voyez cette manoeuvre, Planche III. du bas au métier, figure 2, 3. On entend par bride, la petite portion de soie, qui au lieu de passer dans la tête de l'aiguille, a passé par dessus, & n'a point été travaillée.
J'observerai pourtant qu'il faut faire cette opération en-dessous ou à l'endroit, c'est-à-dire du côté de l'ouvrage qui ne regarde pas l'ouvrier ; sans quoi les mailles relevées formeront un relief à l'envers, & par conséquent un creux à l'endroit.
Il arrive encore qu'il se forme des mailles doubles ; cet inconvénient arrive de plusieurs façons : s'il y a quelque grosseur dans la matiere, si une aiguille a le bec de travers, s'il y a quelque aiguille fatiguée qui ne presse pas, une aiguille n'aura point de maille & sa voisine en aura deux.
Dans ce cas, de deux mailles on arrête la premiere sous le bec de l'aiguille ; on fait tomber la seconde ; cette seconde tombée, formera une bride qu'on relevera & qu'on portera sur l'aiguille vuide.
Il y a encore des mailles mordues ; on entend par une maille mordue, celle qui est moitié dans la tête de l'aiguille, moitié hors, ou qui est à demi tombée. On fait entierement tomber la maille mordue, & on la releve en plein.
Les ouvriers entendent par la tige du bas, ce pouce d'ouvrage qui est au-dessus des façons & sur lequel on retrécit.
Sur un métier de quinze pouces, on laisse du milieu d'une façon au milieu de l'autre, cinq pouces & un quart. Si le métier a moins de quinze pouces, la distance du milieu d'une façon, au milieu de l'autre diminuera proportionnellement.
Quand on travaille la façon, on continue de rapetisser d'une aiguille de chaque côté de quatre en quatre rangées. Pour reconnoître les milieux des façons, on fait un peu lever les deux aiguilles qui les indiquent.
On fait usage dans les façons de deux especes de mailles, qui ne sont pas de la nature de celles dont le reste du bas est tricoté ; ce sont les mailles portées & les mailles retournées. On entend par une maille portée, celle qui sans sortir de son aiguille, est portée dans la tête de celle qui la suit immédiatement, en allant vers la gauche de l'ouvrier : & par une maille retournée on entend celle qu'on fait tomber & qu'on releve sur la même aiguille, de maniere qu'elle fasse relief à l'envers & creux à l'endroit du bas. Pour cet effet on n'a, comme nous l'avons dit à l'occasion des mailles tombées, qu'à la relever du côté du bas qui regarde l'ouvrier.
Les façons faites, il s'agit de partager les talons. Pour cet effet on prend la maille des aiguilles qui marquoient les milieux des façons, & on la jette sur les aiguilles voisines, en allant à la gauche de l'ouvrier ; puis on prend la maille de chacune des aiguilles voisines de ces aiguilles vuides, en allant à droite, & on la jette sur les aiguilles qui leur sont voisines, en allant aussi à droite.
On a donc en deux endroits de la largeur du bas deux aiguilles vuides, qui partagent cette largeur en trois parties.
On travaille ces trois parties avec trois fils de soie séparés, & qu'on jette chacun séparément. Jetter est synonyme à cueillir.
De ces trois parties, celle du milieu est pour le dessus du pié, & les deux autres sont les deux parties du talon. On travaille le dessus sans le rapetisser. Pour les parties du talon, on les retrécit chacune d'une maille de six rangées en six rangées ; & cette maille on la prend à leurs extrémités ou aux côtés qui doivent se réunir pour former la couture du talon, ou sur la premiere & la derniere aiguilles pleines, ou sur l'aiguille pleine la plus à droite de l'ouvrier, & sur l'aiguille pleine la plus à gauche ; car ce n'est-là que plusieurs manieres différentes de désigner les mêmes aiguilles.
On continue de rapetisser ou retrécir les parties du talon de la maniere que nous avons dit, jusqu'à ce qu'elles n'ayent plus chacune que deux pouces & demi. Alors on forme la pointe du talon, en retrécissant ces deux parties de la maniere suivante. Pour la partie qui est à droite de l'ouvrier, on compte les aiguilles pleines en allant de droite à gauche, & on jette la maille de la quatrieme aiguille, sur la sixieme aiguille ; la maille de la troisieme aiguille aussi sur la sixieme ; la maille de la seconde aiguille sur la cinquieme, & la maille de la premiere aiguille sur la quatrieme, qui est la seule qui reste vuide. Pour la partie du talon qui est à gauche, on compte les aiguilles pleines, en allant de gauche à droite, & on jette la maille de la quatrieme aiguille, sur la sixieme aiguille ; la maille de la troisieme aiguille pareillement sur la sixieme ; la maille de la seconde aiguille sur la cinquieme, & la maille de la premiere aiguille. sur la quatrieme qui est la seule qui reste vuide. On continue ces rapetissemens singuliers, trois, quatre, cinq fois, selon la finesse du bas, & cela de quatre en quatre rangées.
On finit les talons par une rangée lâche. Cette rangée lâche se fait en descendant les platines, comme quand on veut croiser, & en repoussant la barre à moulinet avec le talon des ondes.
On avance ensuite sous les becs, en prenant bien garde d'amener trop ; car on jetteroit le dessus du pié en bas.
On a fait cette rangée lâche, afin de pouvoir, à l'aide de la tournille, la diviser en deux & terminer le talon. Pour cet effet, on prend la premiere maille avec la tournille, & la maille suivante avec le poinçon ; à mesure que la seconde passe sur le bec de la tournille, l'autre sort de dessous la tête. Celle-ci est loin du bec, quand celle-là est à portée d'entrer dessous. On l'y fait donc entrer, & quand elle y est, on presse le bec de la tournille avec le poinçon ; on tire la tournille, & la premiere passe sur le bec & forme avec celle qui est dessous, le commencement d'une espece de chaînette, qu'on exécute exactement, comme quand on releve les mailles tombées ; avec cette différence que les mailles tombées se relevent dans une direction verticale, & que cette chaînette se forme horisontalement.
Pour arrêter la chaînette, on fait sortir la derniere maille qui est sous la tête de la tournille, en avançant la tournille ; on met le fil de soie à sa place : on presse ensuite le bec de la tournille ; on tire la tournille, & la maille passe sur le bec & par consequent le fil de soie à-travers elle. On recommence cette opération plusieurs fois ; cela fait on jette bas les talons sans aucun danger, & l'on continue le dessus du pié.
Avant que d'achever le bas, j'observerai que l'on pratique une rangée lâche, & sur cette rangée quelques autres à l'ordinaire, toutes les fois qu'on veut ôter un ouvrage de dessus le métier, sans donner lieu aux mailles de s'échapper.
Le dessus du pié s'acheve comme on l'a commencé, quand il est achevé, on monte le talon sur le métier, non par le côté de la lisiere de derriere, mais par l'autre côté. Pour cet effet on décroche le métier : on tourne de son côté l'endroit de l'ouvrage ; on prend la seconde rangée de mailles après la lisiere, & on la fait passer dans les aiguilles, en tenant l'ouvrage d'une main au-dessus des aiguilles, & faisant passer chaque maille de la rangée dans chaque aiguille.
En s'y prenant ainsi, il est évident que quand après avoir croché & cueilli, comme on le dira, on abattra l'ouvrage, l'envers se trouvera vers l'ouvrier. Lorsque les mailles sont passées sur les aiguilles, on laisse l'ouvrage sur elles, & on le repousse fort avant vers le derriere du métier, afin qu'il se trouve dans la gorge des platines, lorsqu'on crochera en-dedans ; c'est-à-dire sans avancer le métier en devant, en tirant les abatans perpendiculairement : puis on pratique une enture du côté de la façon : on double la soie à cette enture, sur sept aiguilles seulement. On cueille sur elle avec la main, de peur que l'ouvrage qui est sous les gorges qui sont fort petites & qu'il remplit, ne laissassent pas tomber les platines entre les aiguilles, autant qu'il le faut pour la formation des mailles. On amene sous les becs, & l'on acheve l'ouvrage à l'ordinaire. Voilà comment on commence le coin : voici comment on le continue.
Après avoir cueilli une seconde fois, on rapetisse les coins, où l'on pratique ce que les ouvriers appellent les passemens, de la maniere suivante.
On prend la cinquieme aiguille en comptant de la pointe du coin, & l'on jette la maille sur la quatrieme aiguille ; puis on passe la soie sur ces quatre aiguilles, & l'on forme quatre mailles avec le poinçon.
On prend ensuite la sixieme aiguille, & l'on jette sa maille sur la quatrieme : puis on passe la soie sur ces quatre aiguilles, & l'on forme quatre autres mailles avec le poinçon. On prend ensuite la septieme aiguille, & l'on jette sa maille sur la quatrieme ; puis on passe la soie sur les quatre aiguilles, & l'on forme quatre autres mailles avec le poinçon ; ensuite on prend la huitieme aiguille, & l'on jette sa maille sur la quatrieme ; puis on passe la soie sur ces quatre aiguilles, & l'on forme quatre dernieres mailles avec le poinçon.
Cela fait, il est évident que l'on a quatre aiguilles vuides, & quatre aiguilles pleines ; on prend la quatrieme des pleines, & on la jette sur la neuvieme aiguille ; la troisieme des pleines, & on la jette sur la huitieme aiguille ou la premiere des vuides ; la seconde des pleines, & ainsi de suite. On fait là dessus deux rangées, & l'on recommence les mêmes passemens, jusqu'à ce que le coin ait deux pouces & demi de large par le bas. On le finit par une rangée lâche, sur laquelle on fait quatre à cinq rangées à l'ordinaire, pour que la soie ne se défile pas.
Pour former la maille sur les quatre aiguilles, on passe la soie dans leurs têtes, on repousse l'ouvrage au-delà des têtes ; puis avec le poinçon on presse le bec de chaque aiguille, on retire l'ouvrage, & la maille formée à l'ouvrage passe sur les têtes, & forme de nouvelles mailles avec la soie qu'on y a mise.
Il ne reste plus que la semelle à faire : pour cet effet, on monte les coins par leur largeur bout-à-bout, ce qui forme un intervalle de cinq pouces ; c'est là-dessus qu'on travaille la semelle à laquelle on donne la longueur convenable.
Les grands bas d'hommes ont ordinairement trente-neuf pouces, depuis le bord de l'ourlet jusqu'à la pointe du talon.
Les grands bas de femmes n'ont ordinairement que vingt-neuf pouces, depuis l'ourlet jusqu'à la pointe du talon.
Les grands bas d'hommes, depuis le bord jusqu'à la façon, portent 28 pouces ; les grands bas ds femmes, dix-neuf pouces.
La façon dans les grands bas d'hommes & les grands bas de femmes, est de deux pouces.
Le talon commence à la hauteur des coins, & il a jusqu'à sa pointe, neuf pouces dans les hommes, & huit pouces dans les femmes.
Les coins ont pour les hommes & pour les femmes la même hauteur que les talons.
Les talons finis, on les met bout-à-bout & l'on travaille la semelle, de neuf pouces & demi pour les hommes, & de huit pouces & demi pour les femmes.
Après les talons finis, on continue le dessus du pié, à quatre pouces pour les femmes, & à cinq pouces pour les hommes.
Dans toutes ces dimensions on observe les rétrécissemens que nous avons prescrits dans l'article de la main d'oeuvre, & qu'il est inutile de repéter ici.
On voit, Planche III. du bas au métier, fig. 10. un modèle de façon ; il est tracé sur un papier divisé en petits quarrés de dix en dix. La ligne A B la partage en deux parties égales : chaque petit quarré représente une aiguille : le petit quarré A représente l'aiguille qui marque le milieu de la façon, & chaque rangée de mailles est représentée par chaque rangée de petits quarrés.
Pour exécuter la façon qu'on voit ici représentée il faut donc faire aux mailles marquées par chaque petit quarré quelque changement qui les distingue sur le bas : pour cet effet, on les porte, ou on les retourne ; ainsi tous les petits quarrés marqués d'un point désigneront les mailles portées ou retournées.
Nous avons déjà dit qu'une maille portée étoit celle dont la soie passoit sous deux têtes d'aiguilles, sous la tête de son aiguille propre, & sous la tête de l'aiguille voisine, en allant de droite à gauche de l'ouvrier ; & que la maille retournée étoit celle qu'on faisoit tomber, & qu'on relevoit sur l'envers de l'ouvrage, ensorte qu'elle étoit en relief sur l'envers, & par conséquent en creux sur l'endroit.
Mais les mailles ne se portent ou ne se retournent pas indistinctement partout. On voit évidemment que des mailles qu'il faut altérer pour distinguer la façon, on ne peut porter celles qui se suivent immédiatement. Quand il faut altérer la maille d'une aiguille, si celle qui lui est voisine, en allant de droite à gauche, ne doit point être altérée, on peut ou la porter ou la retourner : mais si elle doit être aussi altérée, il faut la retourner.
Ainsi dans le dessein de façon qu'on voit, toutes les mailles des masses noires doivent être retournées, & toutes les mailles des autres masses qui sont rares, & qui laissent entr'elles des mailles qu'il ne faut point altérer, peuvent être ou portées ou retournées.
Les ouvriers qui construisent des métiers à bas, se servent d'instrumens comme le rabot des verges, le moule à repasser les cuivres, le moule pour hacher les platines, la fraise, la lime à queue d'aronde ; le chevalet pour les platines, le chevalet pour les cuivres, la machine à percer les aiguilles, & son détail, le moule à fondre les plombs à aiguilles & les plombs à platines, le brunissoir, les tourne-à-gauche, les becs-d'âne, les clouyeres ; la chasse-ronde, le pointot, la tranche, les perçoires plate & ronde, les broches, la griffe, les mandrins, le moule à bouton, le poinçon : entre ces instrumens, il y en a qui sont communs au faiseur de métier, & à celui qui s'en sert. On trouvera leurs usages aux articles de leurs noms, & leurs figures sur les planches du métier à bas.
La premiere manufacture de bas au métier fut établie en 1656, dans le château de Madrid, au bois de Boulogne. Le succès de ce premier établissement donna lieu à l'érection d'une communauté de maîtres-ouvriers en bas au métier ; & on leur donna des statuts. Par ces statuts ; on régla la qualité & la préparation des soies, le nombre des brins de ces soies, la quantité des mailles vuides qu'il faut laisser aux lisieres, le nombre d'aiguilles sur lequel se doivent faire les entures, & le poids des bas.
Il fut ordonné trois ans d'apprentissage & deux ans de service chez les maîtres, pour le devenir ; la connoissance du métier, & de sa main-d'oeuvre, & un chef-d'oeuvre qui consiste en un bas façonné aux coins & par-derriere.
Les ouvriers en bas ne travaillerent qu'en soie jusqu'en 1684, qu'il leur fut permis d'employer des laines, le fil, le poil, le coton, à condition toutefois que la moitié des métiers d'un maître seroient occupés en soie, les autres en matiere dont le filage seroit fin. Cette indulgence eut de mauvaises suites, & en 1700, sa Majesté ordonna à tous maîtres faiseurs de bas au métier de se conformer au reglement suivant.
I. Défense d'établir aucun métier ailleurs qu'à Paris, Dourdan, Roüen, Caën, Nantes, Oléron, Aix, Toulouse, Nismes, Usès, Romans, Lyon, Metz, Bourges, Poitiers, Orléans, Amiens & Rheims, où ils étoient déjà établis.
II. De travailler dans lesdites villes & leur banlieue sans être maîtres.
III. De faire bas, caleçons, camisoles, &c. sur autres métiers que des vingt-deux, à trois aiguilles par plomb.
IV. D'employer des soies sans être débouillies au savon, bien teintes, bien desséchées, nettes, sans bourre, doubles, adoucies, plates & nerveuses.
V. D'employer de l'huile dans ledit travail.
VI. D'employer pour le noir des soies autres que non teintes, dont les ouvrages seront envoyés faits aux Teinturiers.
VII. De travailler en soie pure, ou en poil & laine, sur un autre métier que d'un dix-huit au moins, à trois aiguilles par plomb, & de mettre moins de trois brins, deux de soie, ou poil, & un de laine.
VIII. De faire des ouvrages en laine, fil & coton sur un autre métier que de vingt-deux, à deux aiguilles par plomb.
IX. De mettre dans les ouvrages de fil, coton, laine & castor, moins de trois brins ; & d'employer aucun fil d'estame, ou d'estain tiré à feu, parmi les trois fils.
X. De mettre en oeuvre de mauvaise marchandise.
XI. De manoeuvrer mal.
XII. De négliger les lisieres, & de n'y point laisser de maille vuide.
XIII. De faire les entures de moins que de cinq à six mailles, & de négliger de remonter les talons & les bords.
XIV. De fouler les ouvrages au métier avec autre chose que du savon blanc ou verd, à bras ou aux piés.
XV. Aux Fouleurs de se servir d'autres instrumens que des rateliers de bois ou à dents d'os, & aux Fouloniers de recevoir des bas.
XVI. De donner aux ouvrages moins de deux eaux vives, après les avoir dégraissés.
XVII. De se servir de pommelles & cardes de fer pour apprêter & appareiller.
XVIII. De débiter aucun ouvrage sans porter le plomb, qui montrera d'un côté la marque du maître, de l'autre celle de la ville.
XIX. Permission aux privilégiés de se distinguer par la fleur-de-lis jointe à l'initiale de leurs noms.
XX. Seront les articles ci-dessus exécutés à peine de confiscation des métiers, & de cent livres d'amende.
XXI. Défense aux maîtres de mettre en vente d'autres marchandises que celles qu'ils auront fabriquées, eux, leurs apprentifs ou compagnons.
XXII. Permission aux maîtres de faire peigner, carder, filer, mouliner, doubler, &c. les soies dont ils auront besoin.
XXIII. Défense de transporter hors du royaume aucun métier sous peine de confiscation, & de mille livres d'amende.
XXIV. Défense aux maîtres de bas au métier, d'entreprendre sur ceux au tricot ; & à ceux-ci d'entreprendre rien sur les premiers.
Louis XIV. en conséquence de ces reglemens, avoit créé des charges d'inspecteurs, de contrôleurs, de visiteurs, de marqueurs, &c. Les marchands fabriquans en payerent la finance, & en acquirent les droits : mais comme la communauté étoit composée de maîtres privilégiés & d'autres, cette acquisition occasionna de la division entre les maîtres, les privilégiés se tenant exempts des droits, & les non-privilégiés prétendant les y soûmettre. Louis XV. fixa en 1720, la police de ces fabriquans & fit cesser leurs querelles. Il voulut que les métiers dispersés dans les lieux privilégiés, comme le faubourg S. Antoine, le Temple, S. Jean de Latran, &c. payassent trente livres par métiers ; que les brevets des apprentifs fussent de cinq années. Les autres articles sont relatifs à l'acquit des dettes de la communauté, & aux autres objets semblables. Voyez le dictionn. du Commerce.
BAS d'estame ; ce sont ceux qui se font avec du fil de laine très-tors, qu'on appelle fil d'estame ou d'estain. Voyez ESTAME.
BAS drappés ; ce sont ceux qui, fabriqués avec de la laine un peu lâchement filée qu'on appelle fil de trame, ont passé à la foule, & ont ensuite été tirés au chardon.
BAS à étrier ; ce sont des bas coupés par le pié, qui ne couvrent que la jambe ; il y a encore des bas de chamois, qui sont du commerce des Peaussiers, & des bas de toile, qui sont du commerce des Lingeres. On n'exécute pas seulement des bas sur le métier, on y fait aussi des culottes, des caleçons, des mitaines, des vestes, & je ne doute pas qu'on n'y fît des habits. Il est évident, par les desseins qu'on exécute aux coins, qu'on pourroit y faire des fleurs & autres desseins, & qu'en teignant la soie, comme il convient qu'elle le soit, on imiteroit fort bien sur les ouvrages de bas au métier, & le chiné & le flambé des autres étoffes. Voyez CHINER & FLAMBER.
* BAS (l'île de), Géog. petite île de la mer de Bretagne, vis-à-vis Saint-Pol-de-Léon.
BAS-BORD, (Marine) vaisseau de bas bord ; c'est un vaisseau peu élevé, & qui ne porte qu'un tillac ou couverte, & va à voiles & à rames comme les galeres, galiotes & semblables bâtimens. Le brigantin, qui ne porte pas couverte, est un vaisseau de bas-bord.
BAS-BORD ou BABORD, (Marine) c'est le côté gauche du navire, c'est-à-dire celui qui reste à la gauche lorsqu'on est à la poupe, & qu'on regarde la proue ; il est opposé à stribord, qui est le côté droit.
BAS-BORD tout ; c'est un commandement que l'on fait au timonier de pousser la barre du gouvernail à gauche tout autant qu'il est possible.
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BAS-BORDE | ou BAS-BORDAIS, (Marine) on appelle ainsi la partie de l'équipage qui doit faire le quart de bas-bord. Voyez QUART.
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BAS-FOND | S. m. (Marine) c'est un endroit de la mer où le fond est plus élevé, & sur lequel il n'y a pas assez d'eau pour que les vaisseaux puissent y passer sans échoüer. Voyez BANC & BASSES. (Z)
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BAS-JUSTICIER | S. m. (Jurisprudence) seigneur de fief, qui a droit de basse-justice, Voyez JUSTICE.
Quelques coûtumes lui accordent sur les denrées ou les bestiaux qui séjournent sur sa seigneurie, un droit qu'elles appellent levage, voyez LEVAGE ; les espaves immobiliaires, voyez ESPAVE ; le droit de banalité, & autres, voyez BANALITE. (H)
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BAS-MÉTIER | S. m. (Rubanier Passementier) c'est celui sur lequel on fait quantité de petits ouvrages ; il peut se poser sur les genoux. Voyez AGREMENT.
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BAS-OFFICIERS | sub. m. pl. (Art milit.) ce sont dans les compagnies de cavalerie & de dragons, les maréchaux de logis, & dans l'infanterie, les sergens. Ils n'ont point de lettres du roi pour avoir leur emploi, qu'ils ne tiennent que de l'autorité du colonel & de leur capitaine. (Q)
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BAS-RELIEF | S. m. (en Architecture) ouvrage de sculpture qui a peu de saillie, & qui est attaché sur un fonds ; on y représente des histoires, des ornemens, des rinceaux de feuillages, comme on en voit dans les frises, & lorsque dans les bas-reliefs il y a des parties saillantes & détachées, on les nomme demi-bosses, Voyez SCULPTURE. (P)
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BAS-VENTRE | S. m. tout ce qui est au-dessous du diaphragme dans la cavité du ventre. Voyez ABDOMEN. (L)
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BASAN | (Géog. sainte) ancien pays de la Judée, en Asie, entre le Jourdain, la mer de Galilée, le royaume de Galaad, & les montagnes d'Hermon, ou de Seïr ou du Liban. Moyse le conquit sur Og, & le donna à la tribu de Manassé ; il s'appella dans la suite Trachonite.
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BASANNE | S. f. (Tannerie ou Megie) c'est une peau de bélier, mouton ou brebis, passée avec le tan ou avec le redon. La basanne a différens usages suivant les différens apprêts qu'elle a reçus : on en a fait des couvertures de livres, des porte-feuilles ; on en couvre des chaises, fauteuils, banquettes, &c. on l'employe aussi à faire des tapisseries de cuir doré. Voyez CUIRS.
Il y a plusieurs sortes de basannes ; savoir les basannes tannées ou de couche, les basannes coudrées, les basannes chipées, les basannes passées en mesquis, & les basannes aludes.
Les basannes tannées ou de couches ; sont celles qui ont été étendues de plat dans la fosse, pour y être tannées comme les peaux de veaux, mais qu'on n'y a pas laissées si long-tems. On en fait des tapisseries de cuir doré.
Les basannes coudrées, celles qui après avoir été dépouillées de leur laine dans le plein, par le moyen de la chaux, ont été rougies dans l'eau chaude avec le tan. On en fait le même usage que des basannes tannées.
Les basannes chipées, celles auxquelles on a donné un apprêt particulier appellé chippage. Voyez CHIPPAGE.
Les basannes passées en mesquis, celles qui ont été apprêtées avec le redon, au lieu de tan. Voyez REDON.
Les basannes appellées aludes, celles qu'on teint ordinairement en jaune, verd ou violet, & qui sont fort velues d'un côté. On les appelle aludes, parce qu'on se sert d'eau d'alun dans les différens apprêts qu'on leur donne. Cette espece de basanne est tout-à-fait différente des autres : on ne l'employe d'ordinaire qu'à couvrir des livres & des porte-feuilles d'écoliers. Voyez TANNERIE & MEGIE.
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BASARUCO | S. m. (Commerce) petite monnoie d'étain, d'usage aux Indes : il y en a de deux sortes ; les bons sont d'un sixieme plus forts que les mauvais ; trois basarucos valent deux reys de Portugal. Voyez REY.
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BASCAMAN | (Géog. sainte) ville de la Palestine de la tribu de Gad.
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BASCARA | (Géog.) ville de la partie de l'Afrique, que les Arabes appellent Ausath ou moyenne, ou le Biledulgerid.
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BASCATH | Géog. sainte) ville de la Palestine, dans la tribu de Juda, entre Lachis & Eglon.
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BASCH | ou BACHI, s. m. (Hist. mod.) chez les Turcs, joint à un mot qui le précéde, signifie le chef ou le premier d'un corps d'officiers du serrail. Ainsi bogangi bachi signifie le chef des fauconniers, & bostangi bachi le chef des jardiniers, ou sur-intendant des jardins du grand seigneur.
Baschi-capou-oglani, nom qu'on donne à l'eunuque qui commande aux portiers de l'appartement des sultanes ; baschi signifiant chef, capou, porte, & oglan, officier ou valet, RICAUT, de l'empire ottoman. (G)
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BASCULE | S. f. (Méchanique) est une piece de bois qui monte, descend, se hausse, & se baisse par le moyen d'un essieu qui la traverse dans sa longueur pour être plus ou moins en équilibre. Ce peut être encore le contre-poids d'un pont levis, ou d'un moulin à vent, pour en abattre le frein : elle a son axe ou oeil par où passe un boulon qui la soûtient sur un bâti de charpente. En général, bascule est proprement un levier de la premiere espece, où le point d'appui se trouve entre la puissance & la résistance. (K)
BASCULE, sub. f. terme de Fortification, sont deux poutres ou solives, dont une partie s'avance en dehors de la porte, & soûtient des chaînes attachées au pont-levis ; & l'autre est en-dedans de la porte & soûtient des contre-poids qui mettent la bascule en équilibre, ensorte qu'en appuyant sur l'un des bouts, l'autre hausse. Voyez PONT-LEVIS. (Q)
BASCULE, c'est dans une grosse horloge, un levier dont un bout donne sur la roue de cheville d'une sonnerie, & l'autre tire un fil de fer ou de cuivre, pour faire lever le marteau. Voyez l'article HORLOGE DE CLOCHER : voyez aussi la figure 5. Planche II. de l'Horlogerie. (T)
BASCULE, partie du-bas-au métier, voyez BAS-AU-METIER.
BASCULE, terme de Riviere, voyez BANNETON.
BASCULE DU POSITIF, ou PETIT ORGUE, représentées dans les Planches n°. 22. sont des regles A B de bois de chêne, de cinq ou six piés de long, plus larges dans leur milieu qu'à leurs extrémités ; ces regles sont posées de champ & par le milieu sur un dos d'âne F, qui est garni de pointes G. Ces pointes entrent dans un trou percé au milieu de la bascule. Ce trou doit être un peu plus ouvert par le haut que par le bas qui porte sur le dos d'âne ; & cela seulement dans le sens de la longueur de la bascule. A l'extrémité B de la bascule est un petit trou percé verticalement, destiné à recevoir une pointe ou épingle, qui est emmanchée à l'extrémité inférieure de la pilote E C ; les pilotes sont des baguettes de bois de chêne, de quatre ou cinq lignes de diametre : leur partie supérieure traverse une planche D, D, D, figure 20 percée d'autant de trous qu'il y a de pilotes, dont le nombre est égal à celui des touches du clavier, au-dessous desquelles elles doivent répondre ; ensorte que lorsque les pilotes sont passées dans les trous du guide, leurs extrémités supérieures portent contre le dessous des touches à un demi-pié près ou environ de l'extrémité antérieure des touches. L'extrémité A des bascules répond sous le sommier du positif qui est garni en-dessous de pointes de fer, entre deux desquelles les bascules se meuvent. Ces pointes s'appellent le guide des bascules. Elles servent en effet à les guider dans leurs mouvemens.
Lorsque l'organiste baisse une touche du clavier, elle comprime la pilote E C, qui fait baisser l'extrémité B de la bascule, & par conséquent hausser l'extrémité A, qui foule en-haut le petit bâton qui traverse la boursette ; ce qui fait ouvrir la soûpape, la soûpape étant ouverte, laisse aller le vent dans la gravure du sommier. Voyez SOMMIER, POSITIF, BOURSETTE, &c.
Ces bascules qui, du côté des pilotes, n'occupent que la même étendue que le clavier, sont divergentes du côté du sommier du positif, où elles occupent la même étendue que les soûpapes de ce sommier. La place de ces bascules dans l'orgue, est sous le pont qui est entre le grand orgue & le positif, sur lequel le siege de l'organiste est placé. L'extrémité qui porte les pilotes, entre dans le pié du grand orgue, & l'autre extrémité dans le positif au-dessous du sommier.
BASCULES BRISEES de l'orgue, représentées fig. 26, Pl. de l'Orgue, sont composées de deux bascules C H, H D, articulées ensemble par des entailles à moitié bois, comme on voit en H ; elles sont montées sur un chassis A B, dans lequel sont assemblées à queue d'aronde deux barres de bois E, garnies de pointes, qui entrent dans le milieu des bascules, & qui leur servent avec le dos d'âne des barres E E, de point d'appui. Au milieu du chassis, qui est l'endroit où les deux bascules se réunissent, sont deux regles ou barres H G ; l'inférieure H est garnie de chevilles de fer, entre deux desquelles les bascules peuvent se mouvoir. Cette barre avec les pointes s'appelle le guide : vis-à-vis du guide & au-dessus, est une autre barre G, dont l'usage est d'empêcher les bascules de sortir d'entre les chevilles du guide. Le contre-dos d'âne K fait la même fonction ; il sert à empêcher les bascules H D de sortir des pointes de la barre E, vis-à-vis de laquelle il est placé. Aux deux extrémités C D des bascules, on met des anneaux de fil de fer : ceux de la partie C doivent être en-dessous, pour recevoir la targette C L, qui descend de la bascule au clavier ; & ceux de la partie D doivent être en-dessus, pour recevoir la targette D M, qui monte de la bascule au sommier.
Les bascules brisées sont une maniere d'abregé (voyez ABREGE) ; car elles sont convergentes du côté des targettes du clavier, où elles n'occupent pas plus d'étendue que les touches du clavier auxquelles elles répondent perpendiculairement ; & du côté de celles du sommier elles sont divergentes, & occupent la même étendue que les soûpapes auxquelles elles communiquent par le moyen des targettes D M, & des boursettes. Voyez BOURSETTES & SOMMIER.
Lorsqu'on abaisse une touche du clavier, la targette C L qui y est attachée tire en en-bas l'extrémité C de la bascule C H, qui a son point d'appui au point E. L'extrémité C ne sauroit baisser que l'autre extrémité H ne leve : mais cette partie reçoit l'extrémité de l'autre bascule D H ; par conséquent elle doit l'élever avec elle vers la barre G ; ce qui ne se peut faire sans que la bascule H D ne descende & n'entraîne avec elle la targette D M, qui communique par le moyen d'une boursette à la soûpape correspondante du sommier qui sera ainsi ouverte. Lorsqu'on lâchera le doigt, le ressort qui renvoye la soûpape contre la gravure, tirera en-haut la targette M D, qui relevera l'extrémité D de la bascule, & fera par conséquent baisser l'autre extrémité H, qui parce qu'elle appuie sur l'extrémité de l'autre bascule, la fera baisser avec elle, & par conséquent lever par l'autre extrémité C, qui tirera en en-haut la targette C L, & la touche du clavier qui y est attachée.
Les bascules ont différens noms, suivant l'usage qu'on en fait.
La bascule d'un loquet est une piece de fer d'environ deux pouces de long, percée d'un trou quarré long, & posée au bout de la tige du bouton ou du lasseret de la boucle d'un loquet à bascule : cette tige excede l'épaisseur de la porte du côté où le battant doit être posé, de l'épaisseur de la bascule qui est arrêtée sur la tige par une goupille ou un écrou : on place ensuite le battant du loquet de façon que la bascule ait le plus gros de sa queue du côté où la vis arrête le battant sur la porte ; & cela afin que la tête du battant ait plus de poids pour retomber dans le mentonnet. Il faut par cette même raison poser la bascule à deux pouces de la vis qui tient la queue du battant, desorte qu'en tournant le bouton soit à droite soit à gauche, on fasse lever le battant. Il faut remarquer qu'en tournant le bouton & la boucle dans le même sens que l'on tourne la clé d'une porte pour l'ouvrir, le battant sera plus doux à lever ; & qu'au contraire on le trouvera plus rude en tournant de l'autre sens ; car la vis qui tient la queue du battant est ici le point d'appui ; & le battant pese d'autant plus que l'action de la bascule se fait sur lui dans un point plus proche de cette vis.
Bascule qui sert de fermeture aux vanteaux de porte ou d'armoire. Cette bascule est composée de deux verroux, l'un pour fermer en entrant dans la traverse du haut, & l'autre pour fermer en entrant dans la traverse d'en-bas : ils sont montés sur platines ; leurs queues viennent se joindre à la traverse du milieu des vanteaux ; elles sont coudées en croissant, l'une d'un sens, & l'autre d'un autre sens, & percées d'un trou à l'extrémité du croissant ; ces extrémités viennent se poser sur les étochios qui sont à chaque bout d'un T ; ce T est sur un étochio rivé sur une platine quarrée qui s'attache sur le vanteau de la porte ou armoire avec quatre vis ; le T est percé d'un trou dans son milieu, entre les deux étochios de l'extrémité de ses bras.
Pour ouvrir ou fermer la bascule, on prend un bouton qui est à l'extrémité de la main du T : si on meut ou leve la bascule verticalement, l'on ouvre ; si on la baisse perpendiculairement, on ferme.
Cette bascule est couverte par la gâche encloisonnée de la serrure : lorsque la bascule est posée à une porte où il n'y a point de gâche, la platine est ordinairement à panache & polie ; & l'étochio qui porte la bascule, à grand bouton plat, assez large pour couvrir le T, avec les deux bouts des croissans montés sur les étochios du bout des bras du T.
La sorte de bascule dont nous venons de parler peut être composée de deux verroux à ressort, d'un T avec sa rivure, & d'une platine : mais tout s'exécutera comme à la précédente.
Bascule à pignon ; elle ne differe de la précédente qu'en ce que les queues des verroux sont droites, & fendues de la quantité de la course des verroux, & que les côtés de ces queues qui se regardent sont à dents ou à cremailleres, & s'engrenent dans un pignon compris entr'eux. Pour ouvrir cette bascule, on prend un bouton rivé sur la queue du verrou d'en-bas, & en le levant il fait tourner le pignon, qui fait descendre le verrou d'en-haut, & monter le verrou d'en-bas.
Voyez Serrurerie, Pl. V. fig. 5. une bascule 5, 6, 7, 8, 9 ; 6 le bouton ; 6, 7, 8, le T ; 9, 9, les verroux : la fig. 1, 2, 3, 4, représente la même bascule, avec sa platine à panache, la bascule couverte.
Même Pl. fig. 1. est une bascule à pignon : H, H, le pignon ; I, K, les verroux à dents ; E D, G F, extrémités des verroux.
Pl. VII. Serrur. fig. A B C D E : A B, battant du loquet ; E, bascule, D, bouton ; C C, crampon : au lieu de bouton on a quelquefois un anneau ou une boucle, comme on voit dans la fig. F G.
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BAS | la base d'une figure, en Géométrie, est proprement, & en général, la plus basse partie de son circuit, Voyez FIGURE.
La base dans ce sens est opposée au sommet, comme à la partie la plus élevée.
On appelle base d'un triangle, un côté quelconque de cette figure, quoiqu'à proprement parler, le mot base convienne au côté le plus bas, sur lequel le triangle est comme appuyé : ainsi la ligne A B, est la base du triangle A B C (Planch. Géom. fig. 68.) ; quoiqu'en d'autres occasions les lignes A C ou B C, en puissent être la base. Dans un triangle rectangle la base est proprement le côté opposé à l'angle droit, c'est-à-dire, l'hypothenuse. Voyez HYPOTHENUSE. La base d'un triangle isoscele est proprement le côté inégal aux deux autres. La base d'un solide est la surface inférieure ou celle sur laquelle toute la figure est appuyée, ou peut être censée appuyée. Voyez SOLIDE.
Ainsi le plan D F E est la base du cylindre A B D E, (Pl. Géom. fig. 56.).
La base d'une section conique est une ligne droite qui se forme dans l'hyperbole & la parabole par la commune section du plan coupant, & de la base du cone. Voyez CONE & CONIQUE.
BASE distincte, en Optique, voyez DISTINCT. (E)
BASE, s. f. en terme de Fortifications, se dit de la largeur des différens ouvrages de fortification par le bas : ainsi l'on dit la base du rempart, celle du parapet, du revêtement, &c. Voyez REMPART, PARAPET, &c. (Q)
BASE DU COEUR, en Anatomie, la partie supérieure & large de ce viscere, d'où partent quatre gros vaisseaux, deux arteres, l'aorte, & l'artere pulmonaire ; & deux veines, la veine cave & la veine pulmonaire. Voyez les Planch. d'Anatom. & à l'art. Anat. leurs explications. Voyez aussi COEUR, AORTE, &c.
On donne aussi ce nom à la partie principale de l'os hyoïde, & au grand côté de l'omoplate. Voyez OS HYOÏDE & OMOPLATE (L)
BASE DES SABORDS, c'est en Marine le bordage qui est entre la préceinte & le bas des sabords. (Z)
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BASENTELLE | (Géog. anc.) ville d'Italie dans la Calabre, où l'empereur Othon II. fut vaincu & fait prisonnier.
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BASIEGES | (Géog.) petite ville de France, au Languedoc, dans le diocèse de Toulouse, entre cette ville & Carcassonne.
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BASIENTO | (Géog.) riviere du royaume de Naples, qui a sa source près de Potenza, dans la Basilicate, traverse cette province, & se jette dans le golfe de Tarente.
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BASILAIRE | adj. pris s. en Anatomie, épithetes de différentes parties qui sont considérées comme servant de bases : c'est dans ce sens que l'os sacrum & l'os sphénoïde ont été appellés os basilaires. Voyez OS. SACRUM & SPHENOÏDE. (L)
BASILAIRE, ou CUNEIFORME, apophyse de l'os occipital, qui s'articule avec l'os sphénoïde. Voyez OCCIPITAL & SPHENOÏDE.
L'artere basilaire s'avance sous la protubérance annulaire, où elle distribue plusieurs branches ; & lorsqu'elle est parvenue à l'extrémité de cette apophyse, elle se divise en deux, & s'anastomose avec les branches postérieures de la carotide. Voyez PROTUBERANCE, CAROTIDE, &c. (L)
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BASIL | (ORDRE DE S.) ordre religieux, & le plus ancien de tous. Il a tiré son nom, selon l'opinion la plus commune, de S. Basile, évêque de Césarée en Cappadoce, qui vivoit dans le jv. siecle, & qui donna des regles aux cénobites d'orient, quoiqu'il ne fût pas l'instituteur de la vie monastique, dont long-tems avant lui l'histoire de l'Eglise fournit des exemples fameux, sur-tout en Egypte.
Cet ordre a toûjours fleuri en orient ; & presque tous les religieux qui y sont aujourd'hui en suivent la regle. Il passa en occident environ l'an 1057. Le pape Grégoire XIII. le réforma en 1579, & mit les religieux d'Italie, d'Espagne & de Sicile, sous une même congrégation.
On dit que S. Basile s'étant retiré dans la province de Pont vers l'an 357, y resta jusqu'en 362 avec des solitaires auxquels il prescrivit la maniere de vivre qu'ils devoient observer en faisant profession de la vie religieuse. Ensuite Rufin traduisit ces regles en latin ; ce qui les fit connoître en occident, quoiqu'elles n'y ayent été suivies qu'au xj. siecle. Dans le XV. le cardinal Bessarion, grec de nation, & religieux de l'ordre de S. Basile, les réduisit en abregé, & les distribua en 23 articles. Le monastere de S. Sauveur de Messine en Sicile est chef d'ordre de S. Basile en occident ; & l'on assûre qu'on y récite l'office en grec. Le Mire, de orig. Ordin. relig. (G)
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BASILE | S. m. (Menuiserie) est la pente ou inclinaison du fer d'un rabot, d'une varlope, & généralement de tous les outils de Menuisier qui sont montés dans des fûts, & qui servent tant à dresser le bois qu'à pousser des moulures. La pente que l'on donne à ces fers dépend de la dureté des bois ; pour les bois tendres elle forme avec le dessous du fût un angle de douze degrés, & pour les bois durs elle forme un angle de dix-huit degrés. On remarque que plus l'angle est aigu, plus il a de force ; à moins que le bois ne soit si dur, qu'il ne puisse être coupé. Dans ce cas, le fer se place perpendiculairement au fût ; & au lieu de couper, il gratte.
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BASILIC | basiliscus, s. m. (Hist. nat.) animal fabuleux que les anciens mettoient au rang des serpens ou des dragons : on le croyoit de médiocre grosseur, & on prétendoit qu'il avoit sur la tête des éminences en forme de couronne. On a distingué trois especes de basilics ? les uns brûloient & enflammoient tout ce qu'ils regardoient ; les autres causoient par le même moyen la terreur & la mort ; les basilics de la troisieme espece avoient la funeste propriété de faire tomber la chair de tous les animaux qu'ils touchoient : enfin il y avoit une autre espece de basilic qui étoit produit par les oeufs des vieux coqs, &c. Toutes ces absurdités n'ont été que trop répétées par les Naturalistes : on peut juger par ce que nous en avons dit ici, que de pareils contes ne méritoient pas d'être rapportés plus au long. (I)
BASILIC, ocimum, (Hist. nat. bot.) genre de plante à fleur monopétale, labiée, dont la levre supérieure est relevée, arrondie, crénelée, & plus grande que l'inférieure, qui est ordinairement frisée ou legerement échancrée. Il sort du calice un pistil, qui est attaché comme un clou à la partie postérieure de la fleur, & environné de quatre embryons qui deviennent dans la suite autant de semences oblongues, enfermées dans une capsule qui a servi de calice à la fleur. Cette capsule se divise en deux levres, dont la supérieure est relevée & échancrée ; l'inférieure est dentelée. Tournefort, Inst. rei herb. Voyez PLANTE. (I)
On distingue, en Jardinage, quatre sortes de basilics : trois domestiques, dont l'un est appellé le grand basilic ; l'autre, le petit ; le troisieme, le panaché ; & le quatrieme est le sauvage, qui se divise encore en deux especes : tous fleurissent l'été, & viennent de graine.
Les basilics ne craignent point d'être arrosés en plein soleil : on les éleve sur couche & sous des cloches au mois de Mai. Quand ils sont en état d'être transplantés, on les porte en mottes dans les parterres, & on en garnit les pots. Il faut en excepter le petit basilic, qui est trop délicat & qui veut une terre plus legere, & composée de deux tiers de terreau, & l'autre de terre de potager bien criblée. On l'arrose fréquemment ; on coupe avec des ciseaux sa tête pour l'arrondir, & on le fait sécher pour les courbouillons de poisson : d'autres le mettent en poudre pour servir à plusieurs sauces. (K)
BASILIC, (Artillerie) étoit autrefois une piece de canon de quarante-huit livres de balle, qui pesoit environ sept mille deux cent livres. Il ne s'en fond plus de ce calibre en France : mais il y a encore plusieurs arsenaux dans lesquels il se trouve de ces anciennes pieces. (Q)
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BASILICATE | (LA) Géog. province d'Italie au royaume de Naples, bornée par la Capitanate, la Calabre citérieure, les terres de Bari, d'Otrante, le golfe de Tarente, & les principautés. Cirenza en est la capitale.
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BASILICO | (Pharmacie) nom que les Apothicaires donnent à un onguent suppuratif. Voici comme il se prépare. Prenez résine de pin, poix navale, cire jaune, de chaque une demi-livre ; huile d'olive, une livre & demie : faites-les fondre au bain-marie ; passez ensuite le tout. Cet onguent est nommé aussi tetrapharmacon : c'est un des meilleurs suppuratifs que nous possédions. Lemery ajoute à cette formule la térébenthine de Venise.
Basilicon veut dire royal, à cause des grandes vertus de cet onguent. (N)
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BASILICUM | (Hist. anc.) espece d'a justement ou de vêtement des anciens, dont la nature nous est encore inconnue.
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BASILIDIENS | S. m. pl. (Hist. ecclés.) nom d'anciens hérétiques, sectateurs de Basilide, qui vivoit vers le commencement du ij. siecle.
Ce Basilide étoit sorti de l'école des Gnostiques, dont le chef étoit Simon le Magicien. Il croyoit avec lui que J. C. n'avoit été homme qu'en apparence, & que son corps n'étoit qu'un fantôme ; qu'il avoit donné sa figure à Simon le Cyrénéen, qui avoit été crucifié en sa place.
Nous apprenons d'Eusebe, que cet imposteur avoit écrit vingt-quatre livres sur les Evangiles, & qu'il avoit feint je ne sais quels prophetes, à deux desquels il avoit donné les noms de Barcaba, & de Barcoph. Nous avons encore les fragmens d'un évangile de Basilide.
Ses disciples prétendoient qu'il y avoit des vertus particulieres dans les noms, & enseignoient avec Pythagore & avec Platon, qu'ils n'avoient pas été inventés au hasard, mais qu'ils signifioient tous quelque chose de leur naturel. Basilide pour imiter Pythagore, vouloit que ses disciples gardassent le silence pendant cinq ans. Voyez NOM, PYTHAGORICIEN, &c.
Suivant la doctrine de leur maitre, ils croyoient que l'ame étoit punie en cette vie des péchés qu'elle avoit commis auparavant : ils enseignoient la métempsycose, & nioient la résurrection de la chair ; parce que, disoient-ils, le salut n'avoit pas été promis au corps. Ils ajoûtoient, que dans chaque homme il y avoit autour de l'ame raisonnable plusieurs esprits qui excitoient les différentes passions ; que loin de les combattre il falloit leur obéir, & se livrer aux desirs les plus déreglés. Clément Alexandrin, Strom. liv. II. & IV. (G)
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BASILIGOROD | (Géog.) ville de l'empire Russien, dans la Tartarie Moscovite, sur la rive droite du Volga, au confluent de la Sura.
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BASILIMPHA | (Géog.) riviere de Diarbeck dans la Turquie, en Asie ; elle se jette dans le Tigre, entre Mosul & Turit.
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BASILINDE | S. f. (Myth.) nom d'une espece de fête que les Tarentins célébroient en l'honneur de Venus. Pollux prétend, liv. IX. que c'étoit un jeu des Grecs, dans lequel celui que le sort avoit fait roi, commandoit quelque chose aux autres. Lex Jurid. Calv.
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BASILIPOTAMO | (Géog. anc. & mod.) riviere de Grece en Morée, dans la province de Sacanie : elle reçoit d'autres rivieres, & se jette dans la met au golfe de Castel-Rampani. Les anciens l'ont appellée, ou Hemerus, ou Marathon, ou Eurotas.
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BASILIQUE | S. f. (Hist. anc. & mod.) mot tiré du grec , roi ; c'est-à-dire maison royale. C'étoit à Rome un bâtiment public & magnifique, où l'on rendoit la justice à couvert ; ce qui le distinguoit du forum, place publique, où les magistrats tenoient leurs séances en plein air. Il y avoit dans ces basiliques de vastes salles voûtées, & des galeries élevées sur de riches colonnes : des deux côtés étoient des boutiques de marchands, & au milieu une grande place pour la commodité des gens d'affaires. Les tribuns & les centumvirs y rendoient la justice, & les jurisconsultes ou légistes gagés par la république, y répondoient aux consultations. C'est ce qu'a voulu dire Ciceron dans une épitre à Atticus, basilicam habeo, non villam, frequentiâ formianorum ; parce qu'on venoit le consulter de toutes parts à sa maison de campagne, comme s'il eût été dans une basilique. Les principales basiliques de Rome étoient Julia Porcia, Sisimini Sempronii, Caii, Lucii, ainsi nommées de leurs fondateurs, & la banque, basilica argentariorum. On en construisit d'autres moindres pour les marchands, & où les écoliers alloient faire leurs déclamations. Le nom de basilique a passé aux édifices dédiés au culte du vrai Dieu, & aux chapelles bâties sur les tombeaux des martyrs : ce nom paroît surtout leur avoir été affecté en Grece. Ainsi l'on nommoit à Constantinople la basilique des saints apôtres, l'église où les empereurs avoient fait transporter les reliques de quelques apôtres. Il étoit défendu d'y enterrer les morts, & les empereurs même n'avoient leur sépulture que sous les portiques extérieurs, ou le pa vis de la basilique.
Le nom de basilique signifiant maison royale, il est visible que c'est à cause de la souveraine majesté de Dieu, qui est le roi des rois, que les anciens auteurs ecclésiastiques ont donné ce nom à l'Eglise, c'est-à-dire au lieu où s'assemblent les Fideles pour célébrer l'office divin.
Ce mot est souvent employé dans ce sens par saint Ambroise, S. Augustin, S. Jérôme, Sidoine Apollinaire, & d'autres écrivains des jv. & v. siecles.
M. Perrault dit, que les basiliques différoient des temples en ce que les colonnes des temples étoient en-dehors, & celles des basiliques en-dedans. Voyez TEMPLE.
Selon Bellarmin, tom. II. de ses controverses, voici la différence que les Chrétiens mettoient entre les basiliques & les temples. On appelloit basiliques les édifices dédiés au culte de Dieu & en l'honneur des saints, spécialement des martyrs. Le nom de temples étoit propre aux édifices bâtis pour y célébrer les mysteres divins, comme nous l'apprennent S. Basile, S. Gregoire de Nazianze, &c. Quelques anciens, comme Minutius Felix, dans son ouvrage intitulé Octavius, ont soûtenu que le Christianisme n'avoit point de temples, que cela n'étoit propre qu'au Judaïsme & au Paganisme : mais ils parlent des temples destinés à offrir des sacrifices sanglans, & à immoler des animaux. Il est certain que les lieux destinés à conserver & honorer les reliques des martyrs étoient proprement appellés basiliques, & non pas temples. Les Grecs font quelquefois mention des temples des martyrs, mais ils parlent des lieux qui étoient consacrés à Dieu & dédiés au culte des martyrs. Comme consacrés à Dieu, ils étoient appellés temples ; car c'est à lui seul qu'on peut ériger des autels & offrir des sacrifices : mais comme destinés à la vénération des saints, ils avoient seulement le nom de basiliques. (G)
BASILIQUES, adj. pris subst. (Jurisprud.) recueil des lois romaines traduites en grec par ordre des empereurs Basile & Léon, & maintenus en vigueur dans l'empire d'Orient jusqu'à sa dissolution. Voyez DROIT CIVIL.
Les basiliques comprennent les institutes, le digeste, le code & les novelles, avec quelques édits de Justinien & d'autres empereurs. Le recueil étoit de soixante livres, & s'appelloit par cette raison , soixante. On croit que c'est principalement l'ouvrage de l'empereur Léon le philosophe, & qu'il l'intitula du nom de son pere, Basile le Macédonien, qui l'entreprit le premier. Des soixante livres il n'en reste aujourd'hui que quarante-un. Fabrolus a tiré en quelque façon le supplément des dix-neuf autres du Synopsis basilicon, &c.
BASILIQUE, adj. pris subst. (Hist. anc.) dans l'Empire grec, dénomination qui se donnoit aux mandataires du prince, ou à ceux qui étoient chargés de porter ses ordres & ses commandemens. Voyez MANDEMENT. (G)
BASILIQUE, adj. pris subst. en Anatomie, nom d'une veine qui naît du rameau axillaire, qui court dans toute la longueur du bras. Voyez les Plan. d'Anat. & leur explication à l'article ANATOMIE.
La basilique est une des veines que l'on a coûtume d'ouvrir en saignant au bras. Voyez PHLEBOTOMIE. (L)
BASILIQUE ou basilica, est, en Astronomie, le nom d'une étoile fixe de la premiere grandeur dans la constellation du Lion : elle s'appelle aussi Regulus & cor Leonis, ou coeur du Lion. Voyez LION. (O)
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BASILISSA | (Myth.) nom sous lequel Venus étoit honorée par les Tarentins.
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BASILUZZO | (Géog. anc. & mod.) île de la mer de Toscane, appellée jadis Herculis insula : c'est une des îles célebres de l'Y pare.
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BASIN | S. m. (Commerce & Tisserans) étoffe croisée, toute fil & coton ; la chaîne est fil, la trame coton. Il y a des basins unis, figurés, ras & velus ; & dans toutes ces sortes, on en distingue une infinité d'autres relativement à l'aunage & à la condition. Les manufactures principales en sont à Troies, à Roüen, & dans le Beaujolois. Ils ne se travaillent pas autrement que la toile, quand ils sont unis : ils se font à la marche, quand ils sont figurés ; le nombre de lisses & de marches est déterminé par la figure, & c'est la trame qui la fait ; parce qu'étant de coton & plus grosse que la chaîne, elle forme un relief, au lieu que la chaîne se perdroit dans la trame : les velus sont tirés au chardon.
Il est ordonné par les reglemens de donner aux basins unis ou rayés, demi-aune & un pouce de large en peigne & sur le métier ; vingt-quatre portées de quarante fils chacune, voyez PORTEE & PEIGNE ; & vingt-quatre aunes de longueur ; aux basins à petites raies, cent soixante raies ; aux basins à trente-six barres, demi-aune un pouce de large en peigne, vingt-deux portées de quarante fils chacune, & trois raies à chaque barre : aux basins étroits, unis & à petites raies, ou à vingt-cinq barres, demi-aune moins 1/24 de large en peigne, vingt-quatre aunes de long : aux unis, vingt portées : à ceux à petites raies, cent quarante raies ; & à chacune des vingt-cinq barres, trois raies : aux basins à la mode, demi-aune un pouce de large, & vingt-quatre de long ; s'ils sont larges, demi-aune moins 1/24 de large, & vingt-deux aunes de long ; s'ils sont étroits, avec un nombre de portées ou de raies convenable à la largeur & à leur degré de finesse ; & à tous, la chaîne de fil de coton filé fin, sans aucun mêlange d'étoupe, chanvre ou lin, les barres & raies de fil de coton retors.
Quoique les manufactures de France fournissent d'excellens basins, on en tire cependant de l'étranger. Il en vient de Hollande, de Bruges, & des Indes. Les basins de Hollande sont ordinairement rayés : ils sont fins & bons. Ils portent de largeur cinq huitiemes d'aune, & de longueur environ douze aunes. Ceux de Bruges sont unis, rayés à petites raies imperceptibles, à grandes raies ou barres de trois petites raies, & à poil. Les unis ou à poil ont environ cinq douze de large, & douze aunes de long ; & les rayés, un pouce de moins sur la largeur, & les deux tiers de moins sur la longueur. Il y en a de quatre sortes, qu'on distingue à la marque. Ceux qui sont marqués à deux lions rouges s'appellent basin double lion ; à un seul lion, basin simple lion ; à un B, basin B ; à un C, basin C. Voyez dans le dictionnaire de Commerce le détail de toutes ces marques.
Les basins des Indes sont blancs & sans poil ; les uns croisés & sergés ; les autres à carreaux & ouvrés. Les meilleurs se fabriquent à Bengale, Pondichery, & Belcasor.
Il n'est pas besoin d'avertir que les barres dans ce genre d'étoffe, ou plûtôt de toile, sont faites par certains fils de chaîne filés plus gros que les autres & placés à des distances égales, & que les raies sont faites par des fils de la chaîne filés moins gros que ceux qui forment les barres, mais plus gros que les autres, placés à des distances égales sur la barre.
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BASIO-PHARYNGIEN | en Anatomie, nom d'une paire de muscles du pharynx. Voyez HYO-PHARYNGIEN. (L)
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BASIOGLOSE | adject. pris subst. en Anatomie, nom d'une paire de muscles de la langue ; ils viennent de la base de l'os hyoide & de la partie voisine de la grande corne de ce même os, & s'inserent aux parties latérales de la racine de la langue. (L)
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BASIRI | (Géog.) riviere de Perse qui arrose la province de Kirman, la ville de ce nom, celle de Basiri, & se jette dans le golfe d'Ormus.
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BASKIRIE | (Géog.) contrée de la Tartarie Moscovite, bornée au nord par les Tartares de Tumen, à l'orient par les Barabinskoi, & par les terres d'Ablai ; au midi, par la montagne de Sortora ; & à l'occident par le duché de Bulgare.
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BASKRON | PASCATIR, ou PASCHARTI, (Géog.) province de la Tartarie Moscovite, bornée à l'orient par les Kalmuks ; au midi par la grande Nogaia ; au couchant par la riviere de Kam, & au nord par la Permia Velchi, & par une partie de la Siberie.
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BASOCHE | S. f. (Jurisprud.) est la communauté des clercs du Parlement de Paris, laquelle tient une espece de jurisdiction, où se jugent les différends qui peuvent naître entr'eux. Ils s'y exercent aussi à plaider des causes sur des questions difficiles ou singulieres. La basoche a entr'autres officiers un chancelier & un thrésorier de la basoche ; il y avoit même autrefois un roi de la basoche. (H)
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BASQUE | (LES) s. m. pl. (Géog.) petit pays de France, vers les Pyrénées, entre l'Adour, les frontieres d'Espagne, l'Océan, & le Béarn ; il comprend le Labour, la basse Navarre, & le pays de Soule.
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BASRACH | voyez BASSORA.
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BASS | (Géog.) petite île d'Ecosse, dans le golfe d'Edimbourg.
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BASSAAL | S. m. (Hist. nat. bot.) nom d'un arbre des Indes, qui croit dans les lieux sablonneux, particulierement aux environs de Cochin ; il porte des fleurs & des fruits une fois l'an, depuis la premiere fois qu'il a commencé à produire, jusqu'à sa quinzieme année.
La décoction de ses feuilles dans l'eau avec un peu de gingembre, soulage dans les maux de gorge : on frotte le front & les tempes des phrénetiques, avec ses baies frites dans le beurre. Ses amandes tuent les vers.
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BASSANO | (Géog.) petite ville d'Italie dans l'état de Venise, au Vicentin, sur la riviere de France.
BASSANO ou BASSANELLO, (Géog. anc. & mod.) ville d'Italie, dans le patrimoine de S. Pierre, au confluent du Nere & du Tibre, près du lac que les anciens appelloient lacus Vadimonii.
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BASSAREUS | adj. pris subst. (Myth.) surnom donné à Bacchus ; soit du Grec , crier, parce que dans ses mysteres les Bacchantes jettoient de grands cris ; soit d'une sorte de chaussure Lydienne nommée bassareum. On donnoit aussi aux prêtresses de ce dieu le titre de bassarides, que l'ancien scholiaste tire d'une robe ou vêtement qui alloit jusqu'aux talons, & que les Africains & les Thraces appelloient bassyris & bassara. Mais Bochart dans son Chanaana, liv. I. ch. xviij, dit que ce mot vient de l'hébreu bassar, qui signifie la même chose que le des Grecs, qui veut dire vendanger ; étymologie qui vaut bien les deux précédentes. (G)
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BASS | ou BATURE, s. f. c'est, en Marine, un fond mêlé de sable de roche ou de caillous, qui paroît à la surface de l'eau : quand on voit la mer briser dessus, alors on nomme cet endroit bature ou brisant. (Z)
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BASSE | adj. f. Voyez BAS.
BASSE, adj. pris subst. est celle des parties de la Musique qui est au-dessous des autres ; la plus basse de toutes, d'où vient son nom de basse. Voyez PARTITION.
La basse est la plus importante des parties ; parce que c'est sur elle que s'établit le corps de l'harmonie : aussi est-ce une espece d'axiome parmi les Musiciens que quand la basse est bonne, rarement l'harmonie est mauvaise.
Il y a plusieurs especes de basse ; basse fondamentale, dont nous ferons un article particulier.
Basse continue, ainsi appellée parce qu'elle dure pendant toute la piece : son principal usage, outre celui de régler l'harmonie, est de soûtenir les voix, & de conserver le ton. On prétend que c'est un Ludovico-Viana, dont nous en avons un traité, qui au commencement du dernier siecle la mit le premier en usage.
Basse figurée, qui au lieu de s'arrêter sur une seule note, en partage la valeur en plusieurs autres notes sous un même accord. Voyez HARMONIE FIGUREE.
Basse contrainte, dont le sujet ou le chant, borné à un petit nombre de mesures, recommence sans-cesse, tandis que les parties supérieures poursuivent leur chant & leur harmonie, & les varient de différentes manieres. Cette basse appartient originairement aux couplets de la chaconne : mais on ne s'y asservit plus aujourd'hui. La basse contrainte descendant diatoniquement, ou chromatiquement, & avec lenteur, de la tonique à la dominante dans les tons mineurs, est admirable pour les morceaux pathétiques : ces retours périodiques affectent insensiblement l'ame, & la disposent à la tristesse & à la langueur. On en voit de fort beaux exemples dans plusieurs scenes des opéras François.
Basse chantante, est l'espece de voix qui chante la partie de la basse. Il y a des basses récitantes & des basses de choeurs des concordans ou basses tailles, qui tiennent le milieu entre la taille & la basse ; des basses proprement dites que l'usage fait encore appeller aujourd'hui basses-tailles ; & enfin des basses-contre, les plus graves de toutes les voix, qui chantent la basse sous la basse même, & qu'il ne faut pas confondre avec les contre-basses qui sont des instrumens. Voyez CONTRE-BASSE.
BASSE FONDAMENTALE, est celle qui n'est formée que des sons fondamentaux de l'harmonie ; desorte qu'au-dessous de chaque accord, elle fait entendre le vrai son fondamental de cet accord ; par où l'on voit qu'elle ne peut avoir d'autre contexture que celle de la succession fondamentale de l'harmonie.
Pour bien entendre ceci, il faut savoir que tout accord, quoique composé de plusieurs sons, n'en a qu'un qui soit fondamental : savoir celui qui a produit cet accord, & qui lui sert de base. Or la basse qui regne au-dessous de toutes les autres parties, n'exprime pas toujours les sons fondamentaux des accords : car entre tous les sons d'un accord, on est maître de porter à la basse celui qu'on croit préférable, eu égard à la marche de cette basse au beau chant ou à l'expression. Alors le vrai son fondamental, au lieu d'être à sa place naturelle, qui est la basse, se transporte dans les autres parties, ou même ne s'exprime point du tout ; & un tel accord s'appelle accord renversé. Dans le fond, un accord renversé ne differe point de l'accord direct qui l'a produit ; car ce sont toûjours les mêmes sons ; mais ces sons formant des combinaisons différentes, on a long-tems pris ces combinaisons pour autant d'accords fondamentaux, & on leur a donné différens noms, qu'on peut voir au mot ACCORD, & qui ont achevé de les distinguer ; comme si la différence des noms en produisoit réellement dans les choses. M. Rameau a fait voir dans son traité de l'Harmonie, que plusieurs de ces prétendus accords n'étoient que des renversemens d'un seul. Ainsi l'accord de sixte n'est que l'accord parfait dont la tierce est transportée à la basse : en y portant la quinte, on aura l'accord de sixte quarte. Voilà donc trois combinaisons d'un accord qui n'a que trois sons ; ceux qui en ont quatre, sont susceptibles de quatre combinaisons ; car chacun des sons peut être porté à la basse ; mais en portant au-dessous de celle-ci une autre basse, qui sous toutes les combinaisons d'un même accord, présente toûjours le son fondamental, il est évident qu'on réduit au tiers le nombre des accords consonnans, & au quart le nombre des dissonans. Ajoûtez à cela tous les accords par supposition, qui se réduisent encore aux mêmes fondamentaux, vous trouverez l'harmonie simplifiée à un point qu'on n'eût jamais espéré de l'état de confusion où étoient ses regles jusqu'au tems de M. Rameau. C'est certainement, comme l'observe cet auteur, une chose très-étonnante qu'on ait pû pousser la pratique de cet Art jusqu'au point où elle est parvenue, sans en connoître le fondement, & qu'on ait trouvé exactement toutes les regles, avant que de trouver le principe qui les produit.
La marche ou le mouvement de la basse fondamentale se regle sur les lois de la succession harmonique ; desorte que si cette basse s'écarte de l'ordre prescrit, il y a faute dans l'harmonie.
Bien moduler & observer la liaison, sont les deux plus importantes regles de la basse fondamentale. Voy. HARMONIE & MODULATION. Et la principale regle méchanique qui en découle, est de ne faire marcher la basse fondamentale que par intervalles consonnans, si ce n'est seulement dans un acte de cadence rompue, ou après un accord de septieme diminuée, qu'elle monte diatoniquement. Quant à la descente diatonique, c'est une marche interdite à la basse fondamentale, ou tout au plus tolérée dans le cas de deux accords parfaits, séparés par un repos exprimé ou sous-entendu ; cette regle n'a point d'autre exception. Il est vrai que M. Rameau a fait descendre diatoniquement la basse fondamentale sous des accords de septieme, mais nous en dirons la raison aux mots CADENCE & DISSONANCE.
Qu'on retourne comme on voudra une basse fondamentale ; si elle est bien faite, on n'y trouvera jamais que ces deux choses : ou des accords parfaits sur les mouvemens consonnans, sans lesquels ces accords n'auroient point de liaison ; ou des accords dissonans dans des actes de cadence ; en tout autre cas, la dissonance ne sauroit être ni bien placée ni bien sauvée.
Il s'ensuit de-là que la basse fondamentale ne peut jamais marcher que d'une de ces trois manieres ; 1°. monter ou descendre de tierce ou de sixte ; 2°. de quarte ou de quinte ; 3°. monter diatoniquement au moyen de la dissonance qui forme la liaison, ou par licence sur un accord parfait. Toute autre marche de la basse fondamentale est mauvaise.
Quoique la basse fondamentale doive régner généralement au-dessous de la basse continue, il est pourtant des cas où celle-ci descend au-dessous de la fondamentale ; tels sont ceux des accords par supposition ainsi appellés, parce que la basse continue suppose au-dessous de l'accord un nouveau son qui n'est point de cet accord, qui en excede les bornes, & qui ainsi se trouve au-dessous de la basse fondamentale. Voyez SUPPOSITION.
La basse fondamentale, qui n'est faite que pour servir de preuve à l'harmonie, se retranche dans l'exécution, & souvent elle y feroit un fort mauvais effet. Elle produiroit tout-au-moins une monotonie très-ennuyeuse par les retours fréquens du même accord, qu'on déguise & qu'on varie plus agréablement, en le combinant différemment sur la basse continue. (S)
En général, les regles rigoureuses de la basse fondamentale peuvent se réduire à celles-ci.
1°. Il doit toujours y avoir au moins un son commun dans l'harmonie de deux sons fondamentaux consécutifs. Voyez LIAISON.
2°. Dans toute dominante, la dissonance doit être préparée, à moins que la dominante ne soit tonique.
3°. Toute dominante doit descendre de quinte, & toute sous-dominante doit monter de quinte. Voyez DISSONANCE, DOMINANTE, SOUS-DOMINANTE, PREPARER, &c. On trouvera à ces articles les raisons de ces regles.
Au reste la basse fondamentale prend quelquefois des licences ; on peut mettre de ce nombre les accords de septieme diminuée, & les cadences rompues, dont on peut cependant donner la raison. Voy. SEPTIEME DIMINUEE & CADENCE.
Regles de la basse continue. La basse continue n'est qu'une basse fondamentale, renversée pour être plus chantante. Ainsi dès que la basse fondamentale est faite, on trouvera une basse continue par le renversement des accords. Voyez ACCORD. Par exemple, cette basse fondamentale monotone ut sol ut sol ut sol ut, peut donner cette basse continue plus chantante ut si ut ré mi fa mi. La basse continue n'est obligée de se conformer à la basse fondamentale, que lorsqu'elle approche des cadences, ou qu'elle s'y termine. La basse continue admet aussi les accords par supposition. Voy. ACCORD & SUPPOSITION. Toute note qui porte dans la basse continue l'accord de fausse quinte, doit monter ensuite diatoniquement ; toute note qui porte l'accord de triton, doit descendre diatoniquement. Voyez FAUSSE-QUINTE & TRITON. On trouvera les raisons de toutes ces regles à leurs différens articles.
Regles que doit observer le dessus par rapport à la basse fondamentale. Toute note du dessus qui fait dissonance avec la note qui lui répond dans la basse fondamentale, doit être préparée & sauvée. Voyez HARMONIE, DESSUS, COMPOSITION, PREPARER, SAUVER, &c.
La connaissance de la basse fondamentale, ou la regle pour trouver la basse fondamentale d'un chant donné, dépend beaucoup de celle du mode, ou de la modulation. Voyez MODE. (O)
BASSE DE VIOLLE, instrument de Musique. Voyez VIOLE, & la table du rapport & de l'étendue des instrumens de Musique. Cet instrument a sept cordes, dont la plus grosse à vuide est à l'union du la du ravalement des clavecins, ou du la du 16 pié. La plus petite ou la chanterelle, est à l'unisson du ré qui suit immédiatement la clé de c-sol-ut.
BASSE DE FLUTE A BEC, instrument dont la figure & la tablature est entierement semblable à celle de la flûte-à-bec décrite à son article, dont la basse ne differe qu'en grandeur. Cet instrument sonne l'octave au-dessous de la flûte-à-bec, appellée taille. Son ton le plus grave est à l'unisson du fa de la clé f-ut-fa des clavecins, & il a une 13e d'étendue jusqu'au ré à l'octave de celui qui suit immédiatement la clé de c-sol-ut. Voyez la table du rapport de l'étendue des instrumens de Musique.
BASSE DE FLUTE TRAVERSIERE, représentée Pl. IX. de Lutherie, fig. 34 & suiv. est un instrument qui sonne la quinte au-dessous de la flûte traversiere, & qui lui est en tout semblable, à cela près, qu'il est plus grand, & qu'il est courbé dans la premiere partie, pour que l'embouchure a soit plus près de l'endroit où il faut poser les mains. Le coude B qui joint la piece où est l'embouchure avec le reste de l'instrument, est un tuyau de laiton qui entre par chacune de ses extrémités dans des boîtes ou noix pratiquées aux extrémités des pieces qu'il faut joindre. Les trous 1, 2, 3, 4 & 6, auxquels les doigts ne sauroient atteindre, vû la grandeur de l'instrument, se bouchent avec les clés que l'on voit vis-à-vis. Ces clés sont tellement fabriquées, que lorsqu'elles sont abandonnées à leurs ressorts, elles laissent les trous qui sont vis-à-vis, ouverts ; & que lorsque l'on appuie dessus avec un doigt, ils sont fermés, la soûpape de ces clés étant entre la charniere & le point où on applique le doigt : au lieu qu'à la clé du mi b mol, c'est la charniere qui est entre la soûpape & l'endroit où on pose le doigt. Cet instrument sert de basse dans les concerts de flûte. Son ton le plus grave est à l'unisson du sol que se trouve entre la clé de f-ut-fa & de c-sol ut des clavecins ; ce qui est, comme on a dit ci-devant, une quinte au-dessous des flûtes ordinaires qui ont deux piés de long. Voyez FLUTE TRAVERSIERE, & la tablature de cet instrument, qui sert pour celui-ci, observant toutefois de commencer par le sol 5e. On façonne cet instrument qui est de bouis ou de quelqu'autre bois dur, sur le tour, comme tous les autres instrumens à vent. Voyez l'article FLUTE TRAVERSIERE & TOUR A LUNETTE, & la table du rapport & de l'étendue des instrumens de Musique.
BASSE DES ITALIENS, c'est le même instrument que celui que nous appellons basse de violon. Voyez BASSE DE VIOLON. Avec cette différence qu'ils l'accordent une tierce mineure plus bas, ensorte que le son le plus grave de cet instrument sonne l'unisson de la mi la du 16 pié. Voyez la table du rapport de l'étendue de tous les instrumens de Musique.
BASSE DE VIOLON, instrument de Musique, en tout semblable au violon, à l'exception des ouies, qui sont en C, au lieu qu'au violon elles sont en S, & en ce qu'il est beaucoup plus grand, & qu'on le tient entre ses jambes pour en joüer. On le construit sur le moule représenté fig. 2. Plan. XII. de Lutherie. Voyez VIOLON & VIOLE.
Cet instrument sonne l'octave au-dessous de la quinte du violon, & la douzieme au-dessous du violon, & l'unisson des basses du clavecin depuis le c sol ut double octave au-dessous de celui de la clé de c sol ut, ou l'unisson du huit pié ouvert. Voyez la table du rapport de l'étendue des instrumens de Musique.
BASSE ou CALADE, s. f. (Manege) pente douce d'une colline, sur laquelle on accoutume un cheval à courir au galop, pour lui apprendre à plier les jarrets. (V)
BASSE-CONTRE, s. f. acteur qui dans les choeurs de l'opéra & autres concerts chante la partie de basse-contre.
Il y a peu de basses-contre à l'opéra ; l'harmonie des choeurs y gagneroit, s'il y en avoit un plus grand nombre. (B)
BASSE-COUR, s. f. terme d'Architecture ; on appelle ainsi, dans un bâtiment construit à la ville, une cour séparée de la principale, autour de laquelle sont élevés des bâtimens destinés aux remises, aux écuries, ou bien où sont placés les cuisines, offices, communs, &c. Ces basses-cours doivent avoir des entrées de dégagement par les dehors, pour que le service de leurs bâtimens se puisse faire commodément & sans être apperçû des appartemens des maîtres & de la cour principale.
Pour l'ordinaire ces basses-cours ont des issues dans la principale cour : mais la largeur des portes qui leur y donnent entrée s'accordant mal avec l'ordonnance d'un bâtiment régulier, il est mieux que les équipages, après avoir amené les maîtres près le vestibule, s'en retournent par les dehors pour aller à leur destination.
On appelle à la campagne basses-cours, non-seulement celles qui servent aux mêmes usages dont nous venons de parler, mais aussi celles destinées au pressoir, sellier, bûcher, ainsi que celles des bestiaux, des grains, &c. (P)
BASSE-EAU ou BASSE-MER, (Marine) se dit de la mer retirée, & lorsque l'eau n'est pas plus haute qu'elle étoit avant que la mer commençât à monter, ce qui est entierement opposé à plaine mer. (Z)
BASSE-ENCEINTE, s. f. c'est la même chose que la fausse-braie, en terme de Fortification. V. FAUSSE-BRAIE. (Q)
BASSE-JUSTICE, (Jurisprudence) Voyez JUSTICE, & FONCIERE. V. aussi ci-dessus BAS-JUSTICIER. (H)
BASSE-TAILLE, s. m. acteur de l'opéra ou d'un concert qui chante les rôles de basse-taille. V. BASSE.
Ces rôles ont été les dominans ou en sous-ordre, dans les opéra, selon le plus ou le moins de goût que le public a montré pour les acteurs qui en ont été chargés.
La basse taille étoit à la mode pendant tout le tems que Thevenard a resté au théatre : mais les compositeurs d'à présent font leurs rôles les plus brillans pour la haute-contre.
Les rôles de Roland, d'Egée, d'Hidraot, d'Amadis de Grece, &c. sont des rôles de basse-taille.
On appelle Tancrede l'opéra des basses-tailles, parce qu'il n'y a point de rôles de haute-contre, & que ceux de Tancrede, d'Argant & d'Ismenor, sont des rôles fort beaux de basse-taille.
Les Magiciens, les Tyrans, les Amans haïs sont pour l'ordinaire des basses-tailles ; les femmes semblent avoir décidé, on ne sait pourquoi, que la haute-contre doit être l'amant favorisé ; elles disent que c'est la voix du coeur : des sons mâles & forts allarment sans-doute leur délicatesse. Le sentiment, cet être imaginaire dont on parle tant, qu'on veut placer par-tout, qu'on décompose sans-cesse sans l'éprouver, sans le définir, sans le connoître, le sentiment a prononcé en faveur des hautes-contres. Lorsqu'une basse-taille nouvelle se sera mise en crédit, qu'il paroîtra un autre Thevenard, ce système s'écroulera de lui-même, & vraisemblablement on se servira encore du sentiment pour prouver que la haute-contre ne fut jamais la voix du coeur. Voyez HAUTE-CONTRE. (B)
BASSES-VOILES, c'est ainsi qu'on appelle en Marine, la grande voile & celle de misene ; quelques-uns y ajoûtent l'artimon, qui ne doit pas y être compris quand on dit amarrez les basses-voiles ; car l'artimon n'a point de coüets. (Z)
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BASSE-LISSE | Voyez LISSE.
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BASSÉE | S. f. (Commerce) mesure dont on se sert en quelques lieux d'Italie, pour mesurer les liquides. La bassée de Vérone est la sixieme partie de la brinte. Voyez BRINTE. (G)
* BASSEE (la), Géog. ville des Pays-Bas François, au comté de Flandre, sur les confins de l'Artois, & sur un canal qui se rend dans la Deule. Longit. 20. 30. lat. 50. 53.
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BASSEMPOIN | (Géog.) petite ville de France, dans la Gascogne.
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BASSENTO | (Géog.) riviere de la Calabre citérieure, qui passe à Cosenze & se joint au Gratte.
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BASSESSE | abjection, (Gramm.) termes synonymes, en ce qu'ils marquent l'un & l'autre l'état où l'on est : mais si on les construit ensemble, dit M. l'abbé Girard, abjection doit précéder bassesse, & la délicatesse de notre langue veut que l'on dise, état d'abjection, bassesse d'état.
L'abjection se trouve dans l'obscurité où nous nous enveloppons de notre propre mouvement, dans le peu d'estime qu'on a pour nous, dans le rebut qu'on en fait, & dans les situations humiliantes où l'on nous réduit. La bassesse, continue le même auteur, se trouve dans le peu de naissance, de mérite, de fortune, & de dignité.
Observons ici combien la langue seule nous donne de préjugés, si la derniere reflexion de M. l'abbé Girard est juste. Un enfant, au moment où il reçoit dans sa mémoire le terme bassesse, le reçoit donc comme un signe qui doit réveiller pour la suite dans son entendement les idées du défaut de naissance, de mérite, de fortune, de condition, & de mépris : soit qu'il lise, soit qu'il écrive, soit qu'il médite, soit qu'il converse, il ne rencontrera jamais le terme bassesse, qu'il ne lui attache ce cortége de notions fausses ; & les signes grammaticaux ayant cela de particulier, en Morale surtout, qu'ils indiquent non-seulement les choses, mais encore l'opinion générale que les hommes qui parlent la même langue, en ont conçûe, il croira penser autrement que tout le monde & se tromper, s'il ne méprise pas quiconque manque de naissance, de dignités, de mérite, & de fortune ; & s'il n'a pas la plus haute vénération pour quiconque a de la naissance, des dignités, du mérite, & de la fortune ; & mourra peut-être, sans avoir conçû que toutes ces qualités étant indépendantes de nous, heureux seulement celui qui les possede ! Il ne mettra aucune distinction entre le mérite acquis & le mérite inné ; & il n'aura jamais sû qu'il n'y a proprement que le vice qu'on puisse mépriser, & que la vertu qu'on puisse loüer.
Il imaginera que la nature a placé des êtres dans l'élévation, & d'autres dans la bassesse : mais qu'elle ne place personne dans l'abjection ; que l'homme s'y jette de son choix, ou y est plongé par les autres ; & faute de penser que ces autres sont pour la plûpart injustes & remplis de préjugés, la différence mal-fondée que l'usage de sa langue met entre les termes bassesse & abjection, achevera de lui corrompre le coeur & l'esprit.
La piété, dit l'auteur des Synonymes, diminue les amertumes de l'état d'abjection. La stupidité empêche de sentir tous les desagrémens de la bassesse d'état. L'esprit & la grandeur d'ame font qu'on se chagrine de l'un, & qu'on rougit de l'autre.
Et je dis moi que les termes abjection, bassesse, semblent n'avoir été inventés que par quelques hommes injustes dans le sein du bonheur, d'où ils insultoient à ceux que la nature, le hasard, & d'autres causes pareilles n'avoient pas également favorisés ; que la Philosophie soûtient dans l'abjection où l'on est tombé, & ne permet pas de penser qu'on puisse naître dans la bassesse ; que le philosophe sans naissance, sans bien, sans fortune, sans place, saura bien qu'il n'est qu'un être abject pour les autres hommes, mais ne se tiendra point pour tel ; que s'il sort de l'état prétendu de bassesse qu'on a imaginé, il en sera tiré par son mérite seul ; qu'il n'épargnera rien pour ne pas tomber dans l'abjection, à cause des inconvéniens physiques & moraux qui l'accompagnent : mais que s'il y tombe, sans avoir aucun mauvais usage de sa raison à se reprocher, il ne s'en chagrinera guere & n'en rougira point. Il n'y a qu'un moyen d'éviter les inconvéniens de la bassesse d'état & les humiliations de l'abjection, c'est de fuir les hommes ou de ne voir que ses semblables. Le premier me semble le plus sûr ; & c'est celui que je choisirois.
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BASSETS | S. m. plur. (Chasse) ce sont des chiens pour aller en terre. Ils ont les oreilles longues, le corps long, ordinairement le poil roux, les pattes cambrées en-dedans, & le nez exquis.
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BASSETTE | S. f. sorte de jeu de carte qui a été autrefois fort à la mode en France ; mais il a été défendu depuis, & il n'est plus en usage aujourd'hui. En voici les principales regles :
A ce jeu, comme à celui du pharaon (voyez PHARAON), le banquier tient un jeu entier composé de 52 cartes. Il les mêle, & chacun des autres joüeurs qu'on nomme pontes, met une certaine somme sur une carte prise à volonté. Le banquier retourne ensuite le jeu, mettant le dessus dessous ; ensorte qu'il voit la carte de dessous : ensuite il tire toutes ses cartes deux à deux jusqu'à la fin du jeu.
Dans chaque couple ou taille de cartes, la premiere est pour le banquier, la seconde pour le ponte ; c'est-à-dire que si le ponte a mis, par exemple, sur un roi, & que la premiere carte d'une paire soit un roi, le banquier gagne tout ce que le ponte a mis d'argent sur son roi : mais si le roi vient à la seconde carte, le ponte gagne, & le banquier est obligé de donner au ponte autant d'argent que le ponte en a mis sur sa carte.
La premiere carte, celle que le banquier voit en retournant le jeu, est pour le banquier, comme on vient de le dire : mais il ne prend pas alors tout l'argent du ponte, il n'en prend que les 2/3, cela s'appelle facer.
La derniere carte, qui devroit être pour le ponte est nulle.
Quand le ponte veut prendre une carte dans le cours du jeu, il faut que le banquier baisse le jeu, ensorte qu'on voye la premiere carte à découvert : alors si le ponte prend une carte (qui doit être différente de cette premiere), la premiere carte que tirera le banquier sera nulle pour ce ponte ; si elle vient la seconde, elle sera facée pour le banquier ; si elle vient dans la suite, elle sera en pur gain ou en pure perte pour le banquier, selon qu'elle sera la premiere ou la seconde d'une taille.
M. Sauveur a donné dans le journal des Savans, 1679, six tables, par lesquelles on peut voir l'avantage du banquier à ce jeu. M. Jacques Bernoulli a donné dans son ars conjectandi l'analyse de ces tables, qu'il prouve n'être pas entierement exactes. M. de Montmort, dans son essai d'analyse sur les jeux de hasard, a aussi calculé l'avantage du banquier à ce jeu. On peut donc s'instruire à fond sur cette matiere dans les ouvrages que nous venons de citer : mais pour donner là-dessus quelque teinture à nos lecteurs, nous allons calculer l'avantage du banquier dans un cas fort simple.
Supposons que le banquier ait six cartes dans les mains, & que le ponte en prenne une qui soit une fois dans ces six cartes, c'est-à-dire dans les cinq cartes couvertes : on demande quel est l'avantage du banquier.
Il est visible (voyez ALTERNATION & COMBINAISON) que les cinq cartes étant désignées par a, b, c, d, e, peuvent être combinées en 120 façons différentes, c'est-à-dire en 5 fois 24 façons. Imaginons donc que ces 120 arrangemens soient rangés sur cinq colonnes de 24 chacune, de maniere que dans la premiere de ces colonnes a se trouve à la premiere place, que dans la seconde ce soit b qui occupe la premiere place, c dans la troisieme, &c.
Supposons que a soit la carte du ponte, la colonne où la lettre a occupe la premiere place, est nulle pour le banquier & pour les pontes.
Dans chacune des quatre autres colonnes la lettre a se trouve six fois à la seconde place, six fois à la troisieme, six fois à la quatrieme, & six fois à la cinquieme, c'est-à-dire qu'en supposant A la mise du ponte, il y a 24 arrangemens qui font gagner 2 A /3 au banquier, 24 qui le font perdre, c'est-à-dire qui lui donnent-A, 24 qui le font gagner, c'est-à-dire qui lui donnent A, & 24 enfin qui sont nuls. Cela s'ensuit des regles du jeu expliquées plus haut.
Or, pour avoir l'avantage d'un joüeur dans un jeu quelconque, il faut 1°. prendre toutes les combinaisons qui peuvent le faire gagner ou perdre, ou qui sont nulles, & dont le nombre est ici 120. 2°. Il faut multiplier ce qu'il doit gagner (en regardant les pertes comme des gains négatifs) par le nombre des cas qui le lui feront gagner ; ajoûter ensemble ces produits, & diviser le tout par le nombre total des combinaisons. Voyez JEU, PARI. Donc l'avantage du banquier est ici
(24 x 2/3 A + 24 x-A + 24 x A)/120 = 2/15 A ;
1/15 A, c'est-à-dire que si le ponte a mis, par exemple, un écu sur sa carte, l'avantage du banquier est de 2/15 d'écu ou de huit sous.
M. de Montmort calcule un peu différemment l'avantage du banquier : mais son calcul, quoique plus long que le précédent, revient au même dans le fond. Il remarque que la mise du banquier étant égale à celle du ponte, l'argent total qui est sur le jeu, avant que le sort en ait décidé, est 2 A ; dans les cas nuls, le banquier ne fait que retirer son enjeu ; & le ponte le sien, ainsi le banquier gagne A : dans le cas où il perd, son gain est o ; dans les cas facés, il retire A + 2/3 A : dans les cas qui sont pur gain, il retire 2 A ; ainsi le sort total du banquier, ou ce qu'il peut espérer de retirer de la somme 2 A, est
24 x A + 24 x 5/3 A + 24 x o + 24 x 2 A + 24 x A/120 = A + 2/15 A & comme il a mis A au jeu ; il s'ensuit que 2/15 A est ce qu'il peut espérer de gagner, ou son avantage. Voyez AVANTAGE.
M. de Montmort examine ensuite l'avantage du banquier lorsque la carte du ponte se trouve, deux, ou trois, ou quatre fois, &c. dans les cartes qu'il tient. Mais c'est un détail qu'il faut voir dans son livre même. Cette matiere est aussi traitée avec beaucoup d'exactitude dans l'ouvrage de M. Bernoulli que nous avons cité.
A ce jeu, dit M. de Montmort, comme à celui du pharaon, le plus grand avantage du banquier, est quand le ponte prend une carte qui n'a point passé, & son moindre avantage quand le ponte en prend une qui a passé deux fois. Voyez PHARAON ; son avantage est aussi plus grand, lorsque la carte du ponte a passé trois fois, que lorsqu'elle a passé seulement une fois.
M. de Montmort trouve encore que l'avantage du banquier à ce jeu est moindre qu'au pharaon ; il ajoûte que si les cartes facées ne payoient que la moitié de la mise du ponte, alors l'avantage du banquier seroit fort peu considérable ; & il dit avoir trouvé, que le banquier auroit du desavantage, si les cartes facées ne payoient que le tiers. (O)
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BASSICOT | S. m. c'est ainsi qu'on appelle dans les carrieres d'ardoise une espece d'auge, dont on se sert pour sortir les morceaux d'ardoise du fond de la carriere. Voyez à l'article ARDOISE l'usage & la description de ce vaisseau.
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BASSIERS | S. m. pl. en terme de Riviere, espece d'amas de sable dans une riviere qui empêche la navigation. Il y en a un au bout du Cours-la-reine.
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BASSIGN | (LE) (Géog.) petit pays de France, dans la partie méridionale de la Champagne, & dans le Barrois, dans le dioc. de Langres & celui de Toul.
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BASSIN | S. m. se dit en général ou d'un réservoir d'eau, ou d'un vaisseau destiné à en puiser ou à en contenir. Voy. ci-dessous des définitions & des exemples des différentes sortes de bassins.
BASSIN (en Architecture), c'est dans un jardin un espace creusé en terre, de figure ronde, ovale, quarrée, à pans, &c. revêtu de pierre, de pavé, ou de plomb, & bordé de gason, de pierre ou de marbre, pour recevoir l'eau d'un jet, ou pour servir de réservoir pour arroser. Les Jardiniers appellent bac, un petit bassin avec robinet, comme il y en a dans tous les petits jardins du potager à Versailles.
BASSIN de fontaine, s'entend de deux manieres, ou de celui qui est seulement à hauteur d'appui au-dessus du rez-de-chaussée d'une cour ou d'une place publique : ou de celui qui est élevé sur plusieurs degrés, avec un profil riche de moulures & de forme réguliere, comme ceux de la place Navonne à Rome.
BASSIN figuré, est celui dont le plan a plusieurs corps ou retours droits, circulaires ou à pans, comme ceux de la plûpart des fontaines de Rome.
BASSIN à balustrade, celui dont l'enfoncement plus bas que le rez-de-chaussée, est bordé d'une balustrade de pierre, de marbre ou de bronze, comme le bassin de la fontaine des bassins d'Apollon à Versailles.
BASSIN à rigole, celui dont le bord de marbre ou de caillou, a une rigole taillée, d'où sort d'espace en espace un jet ou bouillon d'eau, qui garnit la rigole, & forme une nappe à l'entour de la balustrade, comme à la fontaine du rocher de Belvéder à Rome.
BASSIN en coquille, celui qui est fait en conque ou coquille, & dont l'eau tombe par nappes ou gargouilles, comme la fontaine de Palestrine à Rome.
BASSIN de décharge, c'est dans le plus bas d'un jardin, une piece d'eau ou canal, dans lequel se déchargent toutes les eaux après le jeu des fontaines, & d'où elles se rendent ensuite par quelque ruisseau ou rigole dans la plus prochaine riviere.
BASSIN de partage ou de distribution, c'est dans un canal fait par artifice, l'endroit où est le sommet du niveau de pente, & où les eaux se joignent pour la continuité du canal. Le repaire où se fait cette jonction est appellé point de partage. Il y en a un beau à Versailles au-dessus des reservoirs du parc au cerf, & un autre à Chambly, appellé le bassin des sources.
BASSIN de port de mer, c'est un espace bordé de gros murs de maçonnerie, où l'on tient des vaisseaux à flot. Voyez plus bas BASSIN (Marine).
BASSIN de bain, c'étoit dans une salle de bain chez les anciens, un enfoncement quarré long où l'on descendoit par degrés pour se baigner ; c'est ce que Vitruve appelle labrum.
BASSIN à chaux, vaisseau bordé de maçonnerie, & plancheyé de dosses ou maçonné de libages, dans lequel on détrempe la chaux. Mortarium dans Vitruve, signifie autant le bassin que le mortier. (P)
Construction des bassins des Jardins. On ne sauroit apporter trop de soin à la construction des bassins & pieces d'eau ; la moindre petite fente qui augmente toûjours de plus en plus, peut devenir, par la pesanteur de l'eau, une fente considérable.
On place ordinairement les bassins à l'extrémité ou dans le milieu d'un parterre : ils ne font pas moins bien dans un potager, dans une orangerie & dans les bosquets. Leur forme ordinaire est la circulaire, il y en a cependant d'octogones, de longs, d'ovales, & de quarrés : quand ils passent une certaine grandeur, ils se nomment pieces d'eau, canaux, miroirs, viviers, étangs & réservoirs.
Pour la grandeur des bassins, on ne peut guere déterminer de juste proportion, elle dépend du terrein ; & celle qui est entre le jet & le bassin, est déterminée par la chûte & la force des eaux : leur profondeur ordinaire est de 15 à 18 pouces, ou deux piés tout au plus, & s'augmente quand ils servent de réservoirs.
On construit les bassins de quatre manieres, en glaise, en ciment, en plomb, & en terre franche, soit le bassin A (fig. 1. Jardin.) qu'on veut construire en glaise, de six toises de diametre dans oeuvre ; faites ouvrir la place tracée sur le terrein, de ce qu'il convient pour les épaisseurs du pourtour & du plafond ; le mur de terre B doit avoir un pié au moins ; le mur de douve, ou d'eau C, dix-huit pouces, & le corroi de glaise entre-deux, dix-huit pouces de large, ce qui fait en tout quatre piés, dont il faut augmenter de chaque côté le diametre pour la fouille : on a donc huit piés en tout ; on creusera aussi, pour le fond ou plat-fond du bassin, deux piés plus bas que la profondeur qu'on lui voudra donner ; ces deux piés de fouille seront pareillement occupés par le corroi de glaise de dix-huit pouces, & les autres six pouces seront pour le sable & le pavé qu'on répandra dessus la glaise ; ainsi ce bassin creusé de sept toises deux piés de diametre, & de quatre piés de bas, reviendra à six toises d'eau dans oeuvre, & deux piés de creux, qui sont l'étendue & la profondeur requises. Elevez & adossez, contre les terres, le mur B d'un pié d'épaisseur depuis le bas de la fouille, jusqu'à fleur de terre ; bâtissez de moëllons, libages, ou pierres de meuliere avec du mortier de terre ; faites ensuite apporter la glaise dans le fond du bassin, que vous préparerez en la rompant par morceaux, en y jettant de l'eau, & la labourant deux ou trois fois sans y souffrir aucunes ordures ; faites ensuite jetter par pelletées la glaise contre le mur, & pétrir à piés nuds, de dix-huit pouces d'épaisseur, & de sept à huit piés environ de large, tout au pourtour de ce mur, pour y poser, à dix-huit pouces de distance, le mur de douve C, qui doit porter sur une plate-forme & racinaux D D. Prenez du chevron de trois pouces d'épaisseur, ou des bouts de planches de bateau, épais de deux pouces, & larges de cinq à six ; enfoncez-les à fleur de glaise, de trois piés en trois piés, ensorte qu'ils débordent un peu le parement du mur en-dedans le bassin, c'est ce que l'on nomme les racinaux ; mettez ensuite dessus de longues planches de bateau dont deux, jointes ensemble, seront de la largeur du mur, lesquelles vous clouerez ou chevillerez sur les racinaux ; vous poserez ensuite la premiere assise du mur de douve, que vous éleverez à la hauteur de l'autre, & de dix-huit pouces d'épaisseur, bâti avec du mortier de chaux & sable. On remplira le vuide, ou l'espace entre les deux murs E, appellé le corroi, d'une glaise bien préparée, & on la pétrira jusqu'à fleur de terre.
Pour travailler au plat-fond F, on remplira de glaise toute l'étendue du bassin pour y faire un corroi de dix-huit pouces de haut, en recommençant à pétrir les glaises que l'on a d'abord étendues au-delà des racinaux, & les liant avec celles du plat-fond, qu'on couvrira ensuite de sable, de cinq à six pouces de hauteur, avec un pavé garni d'une aire G G, d'un pouce d'épaisseur de ciment, ou une blocaille de pierres plates posées de champ & à sec dans le sable pour nettoyer plus proprement le bassin, & empêcher le poisson de fouiller.
Les bassins de ciment (fig. 2.) sont construits d'une maniere bien différente. On recule la trace du bassin, d'un pié neuf pouces dans le pourtour, & autant dans le plat-fond, ce qui est suffisant pour retenir l'eau ; ainsi pour un bassin de six toises de diametre, on fouillera six toises trois piés & demi, & on creusera un pié neuf pouces plus bas que la profondeur qu'on a dessein de lui donner. Elevez & adossez contre la terre le mur de maçonnerie H, depuis le fond jusqu'au niveau de la terre, & bâti de moëllons & libages, avec du mortier de chaux & sable tout autour ; ensuite commencez le massif du fond I, d'un pié d'épaisseur, & construit des mêmes matériaux & mortier ; on joindra au mur & au plat-fond un massif ou chemise de ciment K, de neuf pouces d'épaisseur bâti de petits cailloux de vigne mis par lits, & couverts de mortier de chaux & ciment, qu'il ne faut point épargner, de maniere que les cailloux ne se touchent point, & regorgent de mortier partout ; il faudra enduire le tout avec du mortier plus fin, c'est-à-dire avec du ciment passé au sas, avant que de la délayer avec la chaux, unir cet enduit avec la truelle, & le frotter ensuite plusieurs jours avec de l'huile.
Les bassins de plomb (fig. 3.) n'ont de singulier dans leur construction, que les murs faits du mortier de plâtre, parce que la chaux mine le plomb ; on fera le mur de terre L, du double d'épaisseur de celui du plat-fond M, & l'on assurera dessus ces murs les tables de plomb n, n, n, qui seront jointes ensemble avec des noeuds de soudure o, o, o.
Les bassins en terre franche sont à-peu-près construits comme ceux de glaise, à l'exception que les corrois seront plus larges, ayant trois & quatre piés, & les murs d'un pié & demi ou deux, seront en mortier de terre seulement, & fondés sur la masse de terre franche qui regne dans tout le terrein. Ces bassins se peuvent faire avec un seul mur du côté de l'eau, en délayant la terre franche sur le bord, & la coulant dans le corroi.
On aura soin d'entourer le pourtour des bassins, de bordures de gason, afin de préserver les corrois de l'ardeur du soleil. (K)
BASSIN, (Marine) on donne ce nom, dans les ports de mer, au lieu où l'on retire les vaisseaux pour les mettre plus à l'abri, les radouber, les armer & désarmer avec plus de facilité, ou y faire les réparations nécessaires. Voy. Pl. VII. fig. 1. Mar. un bassin coté A A, & sa disposition au milieu de l'arsenal. Il y a deux sortes de bassins ; les uns qu'on peut emplir & mettre à sec à volonté, au moyen d'une écluse qui en ferme l'entrée ; & d'autres qui sont tout ouverts, & dont le fond étant de vase molle, se remplit d'eau quand la mer monte, & se vuide quand elle descend. Voyez DARSE. (Z)
BASSIN, en terme d'Anatomie, est la partie la plus inférieure de la cavité de l'abdomen : il est ainsi appellé de sa ressemblance à un bassin ou à une aiguiere, appellée pelvis en Latin. Voyez ABDOMEN.
Le bassin est toûjours plus large ou plus grand dans les femmes que dans les hommes, pour faire place à l'accroissement du foetus. Voyez MATRICE.
Cette cavité est très-bien fortifiée par les os, pour mettre à couvert des injures du dehors les parties qui y sont contenues. Le bassin est formé ou environné par les os des hanches, le coccyx, & l'os sacrum. Voyez HANCHE, COCCYX.
Le bassin des reins est un grand sinus ou cellule membraneuse dans la partie concave des reins. Voyez l'article ANATOMIE, les Planch. & leur explication. Voy. REINS. Des douze mamelons des reins sortent douze canaux appellés tuyaux membraneux, fistulae membranaceae, ils se réunissent ensuite en trois grosses branches, d'où enfin il en résulte une seule qui forme le bassin ; ce bassin venant encore à se contracter, se termine en un canal membraneux appellé l'urétere. Voyez MAMELON & URETERE.
L'urine étant séparée du sang par les canaux urinaires, auxquels elle a été apportée par les mamelons, les tuyaux membraneux la reprennent pour la reporter dans le bassin, d'où elle se décharge dans l'urétere, & de-là dans la vessie, &c. Voy. URINE &c.
BASSIN OCULAIRE, instrument de Chirurgie, petite soûcoupe ovale très-commode pour laver l'oeil. Sa matiere est d'argent ; sa construction consiste en une petite gondole qui a environ un pouce cinq lignes de long, sur dix ou onze lignes de diametre, plus élevé par les angles que dans le milieu, afin de s'accommoder à la figure globuleuse de l'oeil : elle n'a pas plus de cinq lignes de profondeur, & est montée sur un pié artistement composé ; comme on peut le voir dans la figure 16, Pl. XXIII. Ce pié a environ deux ou trois pouces de hauteur.
Pour se servir de cet instrument, il faut le remplir à moitié de la liqueur avec laquelle on veut bassiner l'oeil, puis on le prend par le pié, & l'on baisse la tête, afin de faire entrer le globe de l'oeil dans la soûcoupe qui est construite de façon à occuper toute la circonférence de la cavité orbitaire : on ouvre ensuite l'oeil, & la liqueur contenue dans ce bassin le mouille parfaitement.
Fabrice d'Aquapendente, célebre Medecin-Chirurgien, & professeur d'Anatomie à Padoue, a le premier imaginé l'application des remedes aqueux sur l'oeil : il se servit d'abord de ventouses communes que l'on tenoit sur l'oeil avec la main, comme le bassin oculaire dont on vient de parler ; ce qu'il remarqua être fort incommode : il en fit faire avec des anses sur chaque côté, dans lesquelles on passoit un cordon pour attacher le vase derriere la tête. Ces petits vaisseaux de crystal faits de façon à s'appliquer exactement sur la circonférence de l'orbite, lui parurent exiger encore une perfection ; car les liqueurs tiedes faisant transpirer la partie ; & la matiere de cette transpiration ne trouvant aucune issue, l'oeil & les parties qui l'avoisinent pouvoient se gonfler par l'usage de ces remedes. Pour prévenir les fluxions, & autres accidens qui seroient l'effet du défaut de transpiration, il fit ajoûter au-dessus de la gondole un petit tuyau percé, par lequel on pût aussi verser les liqueurs convenables au moyen d'un entonnoir, après avoir mis le vase en situation. L'auteur la nomme phiole oculaire, & assûre avoir dissipé des cataractes commençantes par l'usage des remedes convenables appliqués par le moyen de cet instrument. (Y)
BASSIN, (vente au) Comm. nom que l'on donne à Amsterdam aux ventes publiques qui se font par autorité de justice, & où préside un officier commis par les bourgue-mestres, qu'on nomme vendu-meester, c'est-à-dire, maître de la vente. On appelle cette vente vente au bassin, parce qu'avant que de délivrer les lots ou cavelins au plus offrant & dernier enchérisseur, on frappe ordinairement sur un bassin de cuivre, pour avertir qu'on va adjuger. Voyez VENDU-MEESTER. (G)
BASSINS d'une balance, sont deux especes de plats qu'on suspend au bout des bras d'une balance, & dans lesquels on met les poids qu'on veut peser. Voy. BALANCE. (O)
BASSIN, terme de Boulanger, est une espece de casserole à queue de tole blanche ou fer-blanc épais, dont on se sert pour puiser l'eau dans la chaudiere, & la mettre dans le pétrin en quantité convenable. Voyez Planche du Boulanger, fig. 4.
BASSIN, instrument de Chapelier, c'est une grande plaque ronde de fer ou de fonte, qui se place sur un fourneau, pour bâtir les étoffes dont on compose les chapeaux.
Les Chapeliers ont aussi des bassins à dresser les bords des chapeaux : ces bassins ont au milieu une ouverture ronde, assez grande pour y faire entrer les formes les plus larges. Ces bassins sont ordinairement de plomb, & ont par-dessus deux mains, afin que le chapelier puisse les mettre sur les bords des chapeaux, & les enlever facilement. Voyez CHAPEAU. Voyez la fig. 4. Pl. du Chapelier.
BASSIN A BARBE, est une espece de plat creux, rond, & quelquefois ovale, dont les Barbiers-Perruquiers se servent pour savonner le visage des personnes qu'ils rasent. Ce plat est toûjours échancré par un de ses côtés, afin de pouvoir être serré près du cou de la personne qu'on savonne, de peur que l'eau de savon qui tombe du visage ne coule le long du cou & sur les habits.
Les bassins à barbe se font de plusieurs sortes de matieres ; il y en a de fayence, de porcelaine, d'étain, de cuivre, d'argent, &c. Voyez sa fig. Planc. du Perruquier.
BASSIN, s. m. (Lunetier) Les Miroitiers-lunettiers se servent de divers bassins de cuivre, de fer ou de métal composé, les uns grands, les autres plus petits, ceux-ci plus profonds, ceux-là moins, suivant le foyer des verres qu'ils veulent travailler. Voyez les fig. 1. & 2. Pl. du Lunetier ; la premiere représente un bassin de six pouces de foyer ; B le bassin, A son profil : la seconde représente un bassin de trois pouces de foyer ; B est le bassin, & C son profil. Ces bassins sont représentés dans les figures scellées sur la table de l'établi.
C'est dans ces bassins que se font les verres convexes. Les spheres qu'on nomme autrement des boules, servent pour les verres concaves ; & le rondeau, pour les verres dont la superficie doit être plane & unie. Voyez ces deux derniers outils à leurs lettres.
On travaille les verres au bassin de deux manieres : pour l'une l'on attache le bassin à l'arbre d'un tour, & l'on y use la piece, qui tient avec du ciment à une molette de bois, en la présentant & la tenant ferme de la main droite dans la cavité du bassin, tandis qu'on lui donne avec le pié un mouvement convenable : pour l'autre, on affermit le bassin sur un billot ou sur un établi, n'y ayant que la molette garnie de son verre qui soit mobile. Les bassins pour le tour sont petits, & ne passent guere six à sept pouces de diametre : les autres sont très-grands, & ont plus de deux piés de diametre.
Pour dégrossir les verres qu'on travaille au bassin, on se sert de grès & de gros émeri : on les adoucit avec les mêmes matieres, mais plus fines & tamisées : le tripoli & la potée servent à les polir : enfin on en acheve le poliment au papier, c'est-à-dire, sur un papier qu'on colle au fond du bassin. Quelques-uns appellent ces bassins des moules, mais improprement. Voyez MIROITIER & LUNETTE.
La matiere la plus convenable pour faire ces bassins, est le fer & le laiton, l'un & l'autre le plus doux qu'on puisse trouver : car comme ils doivent être formés sur le tour, la matiere en doit être traitable & douce, mais pourtant assez ferme pour bien retenir sa forme dans le travail des verres. Ces deux sortes de matieres sont excellentes, & préférables à toutes les autres : le fer néanmoins est sujet à la rouille, & le laiton ou cuivre jaune à se piquer & verdir par les liqueurs acres & salées ; c'est pourquoi ces deux matieres demandent que les instrumens qui en sont faits soient proprement tenus, bien nettoyés & essuyés après qu'on s'en est servi. L'étain pur & sans alliage est moins propre pour le premier travail de verre qui est le plus rude, à cause que sa forme s'altere aisément : on peut cependant l'employer utilement après l'avoir allié avec la moitié d'étain de glace. Le métal allié, qu'on ne peut former au tour à cause de sa trop grande dureté, comme celui des cloches qui est composé d'étain & de cuivre, ne vaut rien pour les formes dont nous parlons.
On peut préparer ces deux matieres à recevoir la forme de deux manieres, suivant qu'elles sont malléables ou fusibles : elles demandent toutes deux des modeles sur lesquels elles puissent être formées, au moins grossierement d'abord, pour qu'on puisse ensuite les perfectionner au tour. La matiere malléable demande pour modele des arcs de cercle, faits de matiere solide sur les diametres des spheres desquelles on veut les former. Celle qui est fusible demande des modeles entiers de matiere aisée à former au tour ; comme de bois, d'étain, &c. pour en tirer des moules dans lesquels on puisse la jetter pour lui donner la forme la plus approchante de celle qu'on desire ; car il est ensuite fort aisé de la rendre réguliere, & de la perfectionner au tour.
Quoiqu'on puisse forger les formes de laiton ou cuivre jaune à froid au marteau, je conseille cependant de les mouler en fonte, & de leur donner même une épaisseur convenable à la grandeur de la sphere dont on veut les former, aussi-bien qu'à la largeur de la superficie qu'on veut leur donner : premierement à cause qu'étant forgées & écrouïes à froid, elles feroient aisément ressort sur leur largeur, & qu'elles altéreroient par ce moyen leur forme dans l'agitation du travail ; en second lieu, pour empêcher par cette épaisseur convenable que ce métal s'échauffant sur le tour, ne se roidisse contre l'outil, comme il fait pour l'ordinaire, se rejettant dehors avec violence jusqu'à s'applanir, ou même devenir convexe de concave qu'il étoit, s'il n'a pas une épaisseur suffisante pour résister à son effort.
Pour faire les modeles qui doivent servir à faire les moules de ces platines, on ne sauroit employer de meilleure matiere que l'étain, à cause qu'on peut le fondre avec peu de feu, & le tourner nettement sans altérer sa forme. Le bois néanmoins qui est plein, comme le poirier ou le chêne, qui est gras & moins liant étant bien sec, y peut servir assez commodément : pour l'empêcher même de s'envoiler, & de se déjetter à l'humidité de la terre ou du sable qui servent à les mouler, aussi-bien que dans les changemens de tems, il convient de l'enduire & imbiber d'huile de noix, de lin, ou d'olive au défaut de ces deux premieres, laissant doucement sécher ces modeles d'eux-mêmes, dans un lieu tempéré & hors du grand air.
La meilleure maniere de mouler ces modeles, est celle où l'on employe le sable. Tout cuivre n'est pas propre pour faire ces formes ; on doit choisir celui qui est jaune, & qu'on nomme laiton doux : on peut aussi se servir d'étain pur d'Angleterre, ou de celui d'Allemagne, allié avec moitié d'étain de glace. Le fer bien doux est aussi fort propre pour faire les bassins à travailler les verres.
M. Goussier a trouvé une méthode de donner aux bassins & aux moules dans lesquels il fond les miroirs de télescopes, telle courbure qu'il peut souhaiter, soit parabolique, elliptique, hyperbolique, ou autre dont l'équation est donnée. Cette méthode sera expliquée dans un ouvrage particulier qu'il doit donner au public, sur l'art de faire de grands télescopes de réflexion, d'en mouler les miroirs, de maniere qu'ils sortent du moule presque tout achevés.
Nous allons expliquer la machine dont il se sert pour concaver les formes ou bassins concaves de courbure sphérique : cette machine est la même que celle dont il se sert pour donner aux bassins ou aux moules toute autre courbure, en y faisant seulement quelques additions dont nous donnerons l'idée à la fin de cet article.
Cette machine représentée fig. 9-15. Pl. du Lunetier, est proprement un tour en l'air, dont l'axe F H est vertical ; il passe dans deux collets F & H, fixés l'un à la table & l'autre à la traverse inférieure d'un fort établi, qui est lui-même fortement attaché au mur de l'attelier.
Le premier de ces collets F est ouvert en entonnoir ; pour recevoir la partie conique de l'axe représenté en F. fig. 15. le second H est seulement cylindrique.
Vers la partie inférieure de l'axe, à deux ou trois pouces du collet H : est fixée une poulie G ; sur laquelle passe la corde sans fin qui vient de la roue horisontale I, que l'on met en mouvement au moyen du bras L, qui se meut librement sur les pivots de l'arbre R S. Ce bras communique par le lien L K à la manivelle excentrique de l'axe de la roue. Cette méchanique est la même que celle du moulin des Lapidaires. Voyez MOULIN.
La partie supérieure de l'axe H F est armée d'un cercle de fer exactement tourné & centré sur l'axe qui est soûtenu par trois ou quatre branches, qui partant de l'axe, vont s'attacher à sa circonférence. Il appelle cette piece main, qui est représentée séparément fig. 15. on en va voir la raison, & combien il est essentiel qu'elle soit exactement centrée.
Aux deux côtés de la main sont fixées sur l'établi deux poupées D D ; la ligne qui joint ces deux poupées doit passer le centre de l'anneau de la main : c'est sur ces deux poupées que l'on fixe la regle de fer M M, au moyen de deux vis n n, ensorte qu'une de ses arêtes soit un diametre de la main dans laquelle on place le bassin, représenté fig. 13. & 14. cette derniere le représente en profil : a a est un rebord qui s'applique sur l'anneau de la main ; on y fait un repaire commun pour pouvoir replacer le bassin au même point où on l'a placé la premiere fois. Le bassin doit être de laiton fondu, & tourné auparavant sur le tour en l'air. Voyez TOUR EN L'AIR.
Au-dessus du bassin, dans la direction de l'axe H F, est fortement scellée dans le mur une potence de fer A B, à la surface supérieure de laquelle est un petit trou de forme conique : ce trou doit être précisément dans la direction de l'axe H F, & autant éloigné de la surface du bassin F, que l'on veut que le foyer du même bassin le soit.
Le trou dont nous venons de parler reçoit la pointe b de la vis a fig. 10. qui traverse la partie supérieure de l'ouverture O du compas B C, fig. 9. Ce compas est formé par quatre regles de fer ou de bois, assemblées comme on voit en b, même fig. La partie inférieure C du compas B C, représentée en grand fig. 11. est quarrée, & garnie de deux frettes de fer O P, qui servent, au moyen des vis qui les traversent, à assujettir le burin a b, qui est aigu en b ; l'autre burin représenté fig. 12. est arrondi, & sert à effacer les traits que le premier peut avoir laissés sur le bassin.
Toutes choses ainsi disposées, on applique le dos du burin contre la regle de fer M M, qui est courbée en arc de cercle dont le centre est la pointe de la vis a. Pour qu'elle soit parallele à la surface du bassin, on avance ou on recule cette regle, ensorte que lorsque le dos du burin glisse contre son arrête, la pointe du burin décrive exactement un diametre du bassin.
Maintenant si on fait mouvoir l'extrémité inférieure du compas le long de la regle de fer M M, en même tems que le bassin E est mis en mouvement par le moyen de la roue I, comme il a été expliqué, on conçoit que la pointe du burin dont le compas est armé, doit emporter toutes les parties du métal du bassin qui excedent la surface sphérique concave qui a pour centre le point autour duquel le compas se meut, qui est la pointe du pivot de la vis a : mais comme la pointe de cette vis est par la construction dans la direction de l'axe de rotation H F, & que la pointe du burin décrit un arc de cercle, cela produit le même effet que si un secteur de cercle tournoit sur la ligne qui passe par le centre & le milieu de l'arc du secteur, qui comme il est démontré en Géométrie, décrit une surface sphérique.
Après que la pointe du burin a enlevé les parties du métal qui excédoient la surface sphérique concave, on efface les traits qu'elle peut avoir laissés avec le burin arrondi représenté fig. 12. que l'on met en place du premier.
Pour décrire une surface paraboloïdale, hyperboloïdale, ou autre, il suffit, comme on voit, de trouver le moyen de faire décrire à l'extrémité du burin, la parabole, l'hyperbole, ou autre courbe dont le secteur, à cause du mouvement de rotation du bassin, décrira la surface que la courbe engendreroit en tournant sur son axe : c'est ce que M. Goussier exécute par le moyen de plusieurs leviers, qui font hausser ou baisser le point de suspension a du compas, à mesure que son extrémité inférieure C avance de côté ou d'autre. Cette machine sera représentée & expliquée dans l'ouvrage annoncé dans cet article.
BASSIN d'empli, en terme de raffinerie de sucre ; est un vase de cuivre qui ne differe du bassin de cuite que par son embouchure qui fait le demi-cercle, Voyez BASSIN de cuite. On l'appelle bassin d'empli, parce qu'il sert effectivement à faire les emplis, & à transporter la cuite du rafraîchissoir dans les formes. Voyez FORME & RAFRAICHISSOIR.
BASSIN de cuite est, parmi les Raffineurs de sucre, un vase de cuivre tenant à-peu-près deux seaux, de figure oblongue, arrondi vers son extrémité où il est le plus profond, & angulaire vers son embouchure. Il est garni de deux poignées, & surmonté de deux hauts bords, qui diminuent jusqu'à l'embouchure où ils n'excedent plus le fond. Ce bassin sert à transporter la cuite dans le rafraîchissoir. Voyez CUITE & RAFRAICHISSOIR.
BASSIN à clairée, parmi les Raffineurs de sucre, est un vase rond, & également surchargé de bords tout autour, & qui représente assez la figure d'un seau : vers son fond il y a un commencement de tuyau, qui fait même piece avec le bassin, dans lequel on emmanche la dale. Voyez DALE. Ce bassin sert à passer la clairée. Voyez CLAIREE & PASSER.
BASSINS, BASSINETS, ou BOUTONS D'OR, elychrysum, fleur basse de diverses couleurs, ordinairement jaunes, à dix feuilles assez larges, & un godet au milieu de la même couleur, & qui porte sa graine. Cette fleur demande beaucoup d'eau & de soleil, avec de la terre à potager : on la leve au bout de trois ans pour en ôter le peuple. Il y en a de plusieurs especes ; le simple à fleur jaune, le bassinet à fleur d'écarlate, le double à fleur jaune, le bassinet à feuilles frangées, & le bassinet rond. Ils fleurissent tous au printems. (K)
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BASSINE | BASSIN (Gramm.) ; bassin a deux acceptions différentes, comme on peut voir par l'article précédent : bassine n'en a qu'une. La bassine est toûjours un vaisseau de cuivre d'une profondeur peu considérable, relativement à son diametre ; ce en quoi elle differe du bassin, où le diametre & la hauteur sont plus proportionnés.
BASSINE, en terme de Cirier ; c'est un instrument de cuivre de forme presque ovale, dont les deux extrémités sont applaties de maniere que la meche en passant au-dessus, ne s'éloigne pas trop du fond de la bassine. Cet ustensile ne sert proprement qu'à faire fondre la matiere propre aux petites bougies. Voyez la fig. 3. Pl. du Cirier, & la fig. 1. de la même Planche, qui fait voir l'usage de cette machine.
BASSINE ; en terme d'Epinglier-Aiguilletier, est une espece de poele profonde, ressemblant à une chaudiere à confiture, dans laquelle au moyen de ses anses, on remue & on secoue les aiguilles dans de l'eau de savon bouillante. Voyez SAVONNER.
BASSINE, ustensile d'Imprimerie. Il y a dans une Imprimerie bien montée deux sortes de bassines de cuivre : la plus grande doit contenir quelques voies d'eau ; elle sert à tremper le papier : la petite sert à ramoitir les balles, & à mettre tremper les cuirs. Au défaut d'une bassine à tremper le papier, on se sert d'une pierre creusée, ou de baquets de bois : mais ces derniers sont sujets pendant l'été à de grands inconvéniens.
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BASSINER | v. act. en Chirurgie ; c'est fomenter en humectant legerement avec une liqueur tiede ou chaude. (Y)
BASSINER, (Jardinage) c'est arroser legerement ; ce que l'on pratique aux couches de melons.
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BASSINET | S. m. en Hydraulique, est un petit retranchement cintré que l'on ménage sur les bords intérieurs d'une cuvette, pour y faire entrer la quantité d'eau distribuée aux particuliers par une ou plusieurs auges de différens diametres ; ce qui s'appelle jauger.
On appelle encore de ce nom un bassin trop petit pour le lieu. (K)
BASSINET DES REINS, voyez BASSIN.
BASSINET, terme d'Arquebusier ; c'est un morceau de fer plat en-dedans du corps de platine, où il s'attache avec deux vis à tête ronde & plate, dont les têtes n'excedent ni d'un côté, ni de l'autre. Ce bassinet sort en-dehors, & excede le corps de platine d'environ un demi-pouce. Il est de figure ronde en-dessous, & la face de dessus est plate & creusée en rond. Ce creux répond directement à la lumiere du canon de fusil, & sert pour mettre l'amorce qui y est retenue & enfermée par l'assiette de la batterie, qui vient poser sur cette face creusée du bassinet.
BASSINET, en terme d'Orfevre en grosserie, est une espece de bassin qui surmonte la branche ou le corps d'une piece, par exemple, d'un chandelier. Le bassinet est composé de quarrés, de panaches, de collets, & d'un culot. Voyez ces mots à leur article.
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BASSON | BASSON
Il est composé de quatre pieces de bois A, B, D, C, perforées dans toute leur longueur. La premiere piece D d, qui est percée intérieurement d'un trou conique, qui va en s'élargissant de D vers d, a un épaulement a b que l'on a ménagé en tournant l'extérieur de la piece. Cet épaulement est percé de trois trous, qui communiquent au canal intérieur de la piece. Ces trous notés 1, 2, 3, suivent pour gagner le canal ou tuyau D d, la direction des petites lignes ponctuées que l'on voit auprès des trous. Aux deux extrémités de cette piece sont deux tenons D d garnis de filasse, pour les faire joindre exactement. Le tenon D entre dans le trou du bocal E ; comme on voit dans les figures qui représentent le basson tout monté. L'autre tenon d entre dans le trou K de la partie inférieure, qu'on appelle le cul, lequel est la seconde partie. Cette piece est percée de deux trous K C : le premier K reçoit, comme nous avons dit, la piece D d ; & le second C, qui est plus grand, reçoit la piece B b par le tenon b. Les deux trous K C de la piece K L vont dans toute sa longueur ; savoir, le trou K en s'élargissant de K vers L, & le trou C au contraire de L vers C : ces deux trous communiquent l'un à l'autre vers L, ensorte qu'ils forment un tuyau recourbé. On perce les trous comme ceux de tous les autres instrumens à vent. Voyez FLUTE. Ces deux trous K C qui traversent d'outre en outre la piece K L lorsqu'on fabrique l'instrument, sont ensuite rebouchés en L par un tampon de liége, ou autre bois garni de filasse, pour fermer exactement : or avant de reboucher le trou L, on abat un peu de la cloison qui sépare les deux trous K C ; ensorte que du côté de L ils ne forment qu'une seule ouverture ; & que la communication que laisse la breche de la cloison, lorsque la piece L est rebouchée, soit à-peu-près égale à l'ouverture des tuyaux en cet endroit, ensorte que les deux canaux K C forment un tuyau recourbé en L. On garnit de frettes de cuivre ou d'argent les deux extrémités de cette piece K L, pour qu'elle ne fende point lorsqu'on met en L le bouchon, & dans les trous K C, les pieces D d & B b, appellées petite & grosse pieces. Le cul est percé de six trous ; les trois marqués 4, 5, 6, communiquent au tuyau K de la petite piece, en suivant la direction des lignes ponctuées qui partent des ouvertures de ces trous. Le trou marqué 7, & qui est fermé par une clé que son ressort tient appliquée sur ce trou comme celle du mi-b de la flûte traversiere. & qui ne débouche que lorsqu'on appuie avec le petit doigt sur la patte de cette clé, communique aussi avec le tuyau K. Le trou marqué 8, au contraire, communique avec le tuyau C, & est toûjours ouvert quoiqu'il ait une clé d 8, fig. 51 & 52. Cette clé est composée de deux pieces principales ; de la bascule A C, a c, & de la soupape C D, c d. La bascule A C, a c, fait charniere dans un tenon fg, fig. 53. où elle est traversée par une goupille ou une vis h, qui lui laisse la liberté de se mouvoir. La soupape est de même articulée dans un tenon, fig. 54. par le moyen d'une vis qui traverse ses oreilles k k. Les tenons sont fixés sur le corps de l'instrument par le moyen de quelques vis qui le traversent, & vont s'implanter dans le corps de l'instrument. Ces tenons doivent être tellement éloignés les uns des autres, que le crocher de la bascule puisse prendre dans l'anneau de la soupape. Au-dessous de la patte A de la bascule, est un ressort qui la renvoye en en-haut ; ensorte que le crochet de la bascule est toûjours baissé, & par conséquent l'anneau de la soûpape, dont le cuir D est par ce moyen tenu éloigné du trou e. Voy. la fig. 52. Mais lorsqu'on tient le doigt appliqué sur la patte de la bascule, on fait hausser son crochet & l'anneau de la soupape, & par conséquent baisser cette même soupape D d, dont le cuir s'applique & ferme exactement le trou e. Les trois clés du basson qui ferment les trous 8, 10, 12, sont construites de même ; elles ne different que par les différentes longueurs de leurs bascules.
La grosse piece B b, comme la petite D d, est percée dans toute sa longueur d'un trou qui va en s'élargissant de b en B, & terminée de même par deux tenons B b. Le premier qui est garni de filasse, entre dans le trou C, & l'autre B aussi garni, reçoit le bonnet a A, qui est entouré d'une frette de cuivre ou d'argent, selon que les clés & les autres frettes en sont faites. Le bonnet est percé d'un trou dans toute sa longueur, lequel est la continuation de celui de la grosse piece. La grosse piece est percée de trois trous 10, 11, 12, qui communiquent avec le trou intérieur B b. Ces trous marqués 10 & 12, se ferment avec les clés brisées C 10, C 12, lorsqu'on appuie le doigt sur la patte de leurs bascules.
A l'extrémité D de la petite piece, on ajuste le bocal e E, qui est un tuyau de cuivre ou d'argent courbe, comme on voit dans la figure ; on fait entrer le tenon E du bocal dans l'ouverture D de la petite piece, qui est garnie d'une frette comme toutes les parties qui en reçoivent d'autres. A l'extrémité e du bocal on ajuste l'anche e F, composée de deux lames de roseau liées sur une broche de fer de la grosseur du bocal en e : on fait entrer l'extrémité de cette partie à la place de la broche de fer qui a servi de moule à l'anche, à-l'entour de laquelle on fait encore une autre ligature g, qui peut couler le long des lames dans l'espace de deux ou trois lignes. Cette ligature ou anneau, qu'on peut appeller rasette par analogie à celles de l'orgue, sert à déterminer la longueur g F des lames de l'anche qui doivent battre, & par conséquent à la mettre au ton. Voyez ANCHE. La longueur du basson prise depuis l'extrémité e de l'anche a c du bocal jusqu'à l'extrémité A du bonnet, est de huit piés, réduits à quatre à cause de la courbure en i l. Les trous sont percés dans la longueur de ce tuyau qui s'élargit toûjours depuis la pointe e du bocal jusqu'à l'extrémité A du bonnet, où ce trou peut avoir deux pouces 1/4 ou 1/2 de diametre, selon les distances qui conviennent aux tons que ces trous doivent rendre, lesquels sont d'autant plus graves que les trous sont plus éloignés de l'anche. L'ordre des nombres 1, 2, 3, 4, 5, &c. marqués vis-à-vis des trous du basson dans la figure, suivent l'ordre des distances, qui sont d'autant plus grandes, que le nombre qui est vis-à-vis est plus grand. Voyez la figure. Pour joüer de cet instrument, que l'on tient debout devant soi avec les deux mains, il faut d'abord tourner le côté représenté par la figure A B C D, vers soi : on accroche ensuite le ruban qui passe dans l'anneau X, qui est à la frette supérieure du cul C L, à un des boutons de l'habit qui répondent à la partie supérieure de la poitrine, ensorte que le trou 9 réponde vis-à-vis la région ombilicale. L'instrument doit pancher un peu du côté gauche, pour que l'extrémité e du bocal garnie de son anche, se présente à la bouche avec facilité : c'est pour cela que le bocal est mobile, & peut se tourner de différens sens. On porte ensuite la main gauche vers la partie moyenne de l'instrument, avec laquelle on embrasse la grosse piece ; ensorte que le pouce de cette main bouche le onzieme trou, & les doigts index, medius, & annulaire de cette main, les trous 1, 2, 3, fig. A D & I qui répondent à la petite piece. Le pouce de la main gauche qui sert à boucher le 11e trou, lequel répond à la grosse piece, sert aussi à toucher les deux clés brisées, avec lesquelles on ferme le 10 & le 12e trou. Ce pouce doit pouvoir tout-à-la-fois appuyer sur les deux clés pour les fermer, & boucher le 11e trou.
A l'égard de la main droite que l'on porte vers la partie inférieure de l'instrument, le pouce doit boucher le 9e trou ; le doigt index le 4e ; le doigt medius le 5e, & le doigt annulaire de cette main le 6e. Pour le petit doigt, on s'en sert pour toucher les deux clés du 7e & 8e trou, observant que lorsqu'on touche celle du 7e trou on l'ouvre, & qu'au contraire on ferme le 8e lorsqu'on touche sa clé, à cause de la bascule qui précede la soupape.
Après avoir posé les doigts, on soufflera dans l'anche, comme il sera expliqué à l'article HAUT-BOIS, & on observera d'augmenter le vent à mesure que l'on monte sur cet instrument. Cette regle est générale pour tous les instrumens à vent. Quant à son étendue, voyez la table du rapport de l'étendue de tous les instrumens. Tous ceux qui jouent du basson ne peuvent pas faire cette étendue, soit qu'ils ne ménagent pas assez leur vent, ou que l'instrument n'y soit pas propre. Ainsi ils se contentent de descendre en b fa si, b & , lesquels tons se forment sans déboucher aucun trou, par la seule maniere de pousser le vent dans l'instrument. Voyez la tablature suivante, où les notes de Musique font connoître quelle partie sonne cet instrument, & les caracteres noirs & blancs qui sont dessous, quels trous il faut fermer & ouvrir pour faire le ton de la note qui est dessus.
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BASSORA | ou BALSORA, (Géog.) grande ville d'Asie, au-dessous du confluent du Tigre & de l'Euphrate, dans l'Irac-Arabi. Long. 66. lat. 30. 20.
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BASTABLE | (TERRES) adj. pl. (Hist. mod.) terres contestées entre l'Angleterre & l'Ecosse : il étoit autrefois incertain auquel de ces royaumes elles appartenoient avant qu'ils fussent unis. Ce mot a toute l'énergie de litigieux, & vient de battre.
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BASTAGAIRE | S. m. nom de quelques officiers des empereurs grecs, dont la fonction étoit de veiller sur les bagages de l'empereur. On nommoit aussi dans l'église de Constantinople bastagaire, celui à qui il appartenoit de porter l'image du saint de l'église, aux processions, & dans les fêtes solemnelles. En ce sens, bastagaire revient à notre porte-banniere, ou porte-bâton de confrairie.
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BASTERNE | S. f. (Hist. anc. & mod.) voiture traînée par des boeufs, en usage sous les regnes antérieurs à celui de Charlemagne, & appellée basterne, de peuples de ce nom qui habitoient anciennement la Podolie, la Bessarabie, la Moldavie, & la Valachie. Grégoire de Tours dit que la reine Denterie, femme du roi Theodebert, craignant que ce prince ne lui préférât une fille qu'elle avoit eue d'un premier lit, la fit mettre dans une basterne, à laquelle on attacha de jeunes boeufs qui n'avoient pas encore été mis au joug, & qui la précipiterent dans la Meuse. Ces sortes de litieres étoient même plus anciennes que ce tems ; & Ennodius parle dans un de ses vers, de la basterne de la femme de Bassus. Symmaque écrivant aux enfans de Nicomaque, les prie de tenir des basternes prêtes pour leur frere. M. l'abbé de Vertot pense que nos premiers François, dans le tems qu'ils demeuroient au-delà du Rhin, avoient emprunté la basterne des Cimmeriens qui habitoient les rives du Bosphore, avant qu'ils en eussent été chassés par les Getes. Voyez le VIII. vol. des Mém. de l'Académie des Inscriptions.
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BASTI | S. m. (en Architecture) se dit de l'assemblage des montans & traversans qui renferment un ou plusieurs panneaux, en Menuiserie ou Serrurerie : c'est ce que Vitruve appelle replum. (P)
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BASTIA | (Géog.) petite ville maritime de la Turquie en Europe, dans l'Albanie, vis-à-vis l'île de Corfou, à l'embouchure de la Calamou. Long. 38. 5. lat. 39. 40.
BASTIA, (Géog.) petite ville, ou bon bourg d'Italie, dans une petite île que forme le Panaro, au duché de Modene, au-dessous de cette ville.
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BASTIE | (LA) Géog. anc. & mod. ville capitale de l'île de Corse. Long. 27. 12. lat. 42. 35. on croit que c'est le Mantinum ou Mantinorum oppidum des anciens.
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BASTILLE | S. f. (Fortification) petit château à l'antique, fortifié de tourettes. Voyez CHATEAU & TOUR. Telle est la bastille de Paris, qui semble être le seul château qui ait retenu ce nom : l'on commença de la bâtir en 1369, par ordre de Charles V. elle fut achevée en 1383 sous le regne de son successeur, & sert principalement à retenir des prisonniers d'état.
On a aussi appellé autrefois bastille, de petits forts dont on environnoit les places dans les siéges, pour en former une espece de circonvallation. C'est ainsi que les Anglois assiégeoient Orléans, lorsque Jeanne d'Arc, autrement la pucelle d'Orléans, leur en fit lever le siége sous Charles VII. (Q)
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BASTILLÉ | adj. (en terme de Blason) se dit des pieces qui ont des creneaux renversés qui regardent la pointe de l'écu. Belot en Franche-Comté, d'argent, à losanges d'azur au chef cousu d'or, bastillé de trois pieces. (V)
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BASTIMENTOS | (Géog.) petites îles de l'Amérique septentrionale, proche la terre-ferme, à l'embouchure de la baie de Nombre de Dios.
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BASTINGUE | bastingue, bastinguere, s. f. (Marine) c'est la même chose que pavois, ou paviers, & pavesade.
On prononce la lettre s dans ce mot bastingue. C'est une bande d'étoffe ou de toile que l'on tend autour du plat-bord des vaisseaux de guerre, & qui est soûtenue par des pieces de bois mises debout, que l'on appelle pontilles ; afin de cacher ce qui se passe sur le pont pendant le combat. Voyez PAVOIS.
On met des bastingues aux hunes ; on les double, & on les garnit entre les deux étoffes, de façon que les balles de mousquet ne peuvent les percer.
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BASTION | S. m. (en terme de Fortification) est une grande masse de terre ordinairement revêtue de maçonnerie ou de gason, qu'on construit sur les angles de la figure que l'on fortifie, & même quelquefois sur les côtés lorsqu'ils sont fort longs. Sa figure est à-peu-près celle d'un pentagone ; il est composé de deux faces qui forment un angle saillant vers la campagne, & de deux flancs qui joignent les faces à l'enceinte. Voyez FACE & FLANC. Son ouverture vers la place se nomme sa gorge. Voyez GORGE & DEMI-GORGE.
Voyez Planche premiere de Fortification, fig. prem. le bastion F G H I L, dont G H & H I sont les faces ; G F & I L les flancs, & F K I la gorge. V. GORGE.
L'angle G H I formé par les faces G H & H I, est appellé l'angle flanqué du bastion ; l'angle H G F formé d'une face & d'un flanc, se nomme l'angle de l'épaule, & G F E formé d'un flanc & de la partie E F de l'enceinte, se nomme l'angle du flanc ; sa partie E F qui joint ensemble deux bastions, est appellée courtine : ainsi l'angle du flanc est formé du flanc & de la courtine.
Les parties F K & L K du prolongement des courtines E F & L M, sont appellées les demi-gorges du bastion : & l'angle F K L qu'elles font entr'elles, l'angle du centre du bastion ; la ligne K H comprise entre l'angle flanqué H, & l'angle du centre K, se nomme la capitale du bastion.
Les bastions n'ont guere commencé à être en usage que dans le tems de François premier & Charles-Quint, c'est-à-dire vers l'an 1500 ou 1520. On leur a d'abord donné le nom de boulevards, & on les a fait très-petits.
Ce qui a donné lieu à la figure du bastion, est cette maxime essentielle de la Fortification, qu'il ne doit y avoir aucune partie de l'enceinte d'une place qui ne soit vûe & défendue de quelqu'autre.
Les anciens pour flanquer ou défendre toutes les parties de l'enceinte des villes, élevoient de distance en distance des tours rondes ou quarrées P, P, B, B, (Planche prem. de Fortific. fig. 2.) telles qu'on en trouve encore dans les vieilles fortifications. Les parties H G, I C, de ces tours flanquoient ou défendoient les parties de l'enceinte comprises entr'elles. Il n'y avoit que la partie extérieure F G des tours quarrées qui n'étoit pas exactement défendue des flancs des tours opposées, (c'est le nom qu'on avoit donné aux côtés H G & D F des tours) mais on y remédioit en faisant saillir la partie supérieure de la muraille sur celle du pié ; entre cette partie saillante ou supérieure & l'inférieure, on pratiquoit des ouvertures par où le soldat découvroit le pié du mur. Ces sortes d'ouvertures en saillie se nommoient machicoulis ou massecoulis : on en trouve encore aujourd'hui dans les vieilles fortifications, & dans la plûpart des anciens châteaux. Voyez REDOUTES A MACHICOULIS.
Après l'invention de la poudre, & lorsqu'on eut trouvé la maniere de s'en servir pour l'attaque des places, il fallut, pour s'opposer à la violence du canon, donner plus d'épaisseur aux murs des tours & des autres parties de la fortification. Les saillies en machicoulis ne purent se conserver contre la violence de cette machine ; & par-là le côté extérieur des tours demeuroit sans défense. Il restoit du moins une espece de petit triangle au pié de ce côté, moindre à la vérité dans les tours rondes que dans les quarrées, mais toûjours plus que suffisant pour y attacher le mineur, par où l'ennemi pouvoit, sans grand obstacle de la part de l'assiégé, se procurer l'entrée de la place. C'est ce qui engagea les ingénieurs à chercher quelqu'expédient pour remédier à ce défaut. Le plus simple fut de terminer le côté extérieur des tours par deux lignes, qui formant un angle saillant vers la campagne, renfermeroient l'espace qui n'étoit point vû des flancs. Cette correction est la véritable origine de la figure de nos bastions, qui, comme on le voit, n'est point arbitraire, mais fondée sur les maximes de la fortification ; & il en résulte la défense de toutes les parties de l'enceinte : car les flancs défendent les faces & la courtine, & ils se défendent aussi réciproquement.
La grandeur des angles & de toutes les parties du bastion a souffert différentes variations, suivant le tems & les idées particulieres des ingénieurs, ainsi qu'on peut le voir dans le précis des instructions ou systèmes qui sont à la suite du mot FORTIFICATION. On ne peut guere fixer d'une maniere absolue la valeur de toutes ces parties, parce qu'elles changent suivant les différens polygones : mais pour en donner une idée, on peut établir.
1°. Que le flanc doit avoir au moins 20 toises, & qu'il peut aller jusqu'à 30.
2°. Que la demi-gorge doit être égale aux flancs, & qu'ainsi elle peut avoir depuis 20 jusqu'à 30 toises.
3°. Que les faces doivent avoir au moins 40 toises, & au plus 60.
A l'égard des angles du bastion, l'angle flanqué peut être aigu ou obtus, pourvû que dans le premier cas il n'ait pas moins de 60 ou 70 degrés, & dans le second pas plus de 150. Sa grandeur dépend au reste de l'angle de la circonférence du polygone que l'on fortifie : lorsqu'il est un peu obtus, il donne lieu d'augmenter la gorge du bastion ; & une grande gorge est plus avantageuse qu'une petite, non-seulement parce qu'elle donne plus d'espace au bastion, mais parce qu'alors on peut y construire un retranchement plus grand & plus solide, pour disputer pié à pié à l'ennemi le terrein du bastion.
L'angle de l'épaule est celui qui mérite le moins de considération dans le bastion, parce qu'il se trouve déterminé par l'angle flanqué & celui du flanc.
Ce dernier angle exige une attention toute particuliere. S'il est aigu, comme dans le système d'Errard, le flanc ne peut défendre la face du bastion opposé : s'il est droit, il la défend trop obliquement : il doit donc être un peu obtus, pour que le soldat découvre devant lui la face & le fossé du bastion qu'il doit défendre. Voyez DEFENSE.
L'angle du flanc ne doit pourtant pas être trop obtus, parce qu'alors le flanc pourroit être battu du bord du fossé opposé, & de la partie du fossé vis-à-vis l'épaule du bastion.
Il y a des bastions de plusieurs especes ; savoir, de simples, à flancs concaves & à orillons, de vuides, de pleins, de plats, &c.
Le bastion simple est celui dont les flancs sont en ligne droite.
Le bastion à flancs concaves & à orillons, est celui dont les flancs couverts sont disposés en ligne courbe, & dont l'épaule est arrondie. Voyez les constructions de M. de Vauban, à la suite du mot FORTIFICATION.
Les bastions vuides sont ceux dont le rempart est mené parallelement aux flancs & aux faces, de maniere qu'il reste un vuide dans le milieu du bastion : c'est dans ce vuide qu'on place ordinairement les magasins à poudre. Voyez MAGASIN.
Les bastions pleins sont ceux dont toute la capacité se trouve remplie par les terres du rempart. C'est sur les bastions pleins qu'on éleve des cavaliers. Voyez CAVALIER.
Les bastions pleins sont bien plus favorables que les vuides pour se retrancher : le principal avantage de ces derniers est de donner plus de facilité pour aller au-devant du mineur ennemi : mais les retranchemens qu'on y construit ne peuvent être excellens ; car le peu de largeur du rempart ne permet pas de les faire assez grands pour être bien soûtenus ; & si on les place à la gorge, ils se trouvent commandés des logemens que l'assiégeant pratique sur le rempart.
Le bastion plat est un bastion construit sur une ligne droite, & dont par conséquent les deux demi-gorges ne font point d'angle. On n'employe ces sortes de bastions que lorsque les côtés des places se trouvent trop longs pour que les bastions des extrémités puissent se flanquer réciproquement. Ces bastions ont plusieurs inconvéniens : il est difficile de leur donner la même étendue qu'aux autres bastions ; & d'ailleurs l'ennemi peut enfiler leurs courtines d'une même batterie.
Outre les bastions dont on vient de parler, il y a encore les bastions détachés, les coupés, les réguliers, & les irréguliers, &c.
Le bastion détaché est un bastion qui est isolé à l'égard de l'enceinte : telles sont les contregardes des tours bastionnées de Landau & du Neuf-Brissac. L'avantage de ces bastions est de pouvoir être soûtenus jusqu'à la derniere extrémité, parce que leur prise ne donne point d'entrée dans la place : mais ils ont aussi, comme les autres dehors, le desavantage d'avoir avec la place des communications difficiles, & par lesquelles on ne peut que défiler.
Le bastion coupé est celui dont la pointe est retranchée, & qui au lieu de cette pointe a un ou deux angles rentrans : il n'est d'usage que lorsque l'angle flanqué du bastion se trouve trop aigu, c'est-à-dire, au-dessous de 60 degrés ; ou lorsque quelqu'obstacle qu'on trouve dans le terrein ne permet pas de le terminer à l'ordinaire.
Le bastion régulier est celui qui a ses faces égales, ses flancs de même, & ses angles de l'épaule & du flanc égaux entr'eux : c'est celui qui se trouve dans les fortifications régulieres.
Le bastion irrégulier a de l'inégalité dans ses faces, ses flancs, ou ses demi-gorges, de même que dans ses angles du flanc & de l'épaule : c'est ce bastion qui est le plus ordinaire, parce qu'il s'employe dans les fortifications irrégulieres, qui sont bien plus communes que les régulieres. (Q)
* BASTION, se dit, en Medecine, des parties qui servent d'enveloppe & comme de rempart à d'autres : tel est le thorax, par rapport au coeur & aux poumons, & le crane, qui semble fait pour défendre le cerveau.
* BASTION DE FRANCE, (Géog.) place d'Afrique sur la côte de Barbarie, au royaume d'Alger, au nord-est de Bonne.
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BASTOGNAC | ou BASTOGNE, (Géog.) petite ville des Pays-bas dans le duché de Luxembourg. Long. 23. 30. lat. 50. 10.
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BASTON | (Géog.) ville de l'Amérique septentrionale dans la nouvelle Angleterre, mieux connue sous le nom de Boston.
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BASTULE | S. f. (Pêche) c'est une espece de filet dont on se sert pour pêcher dans les étangs salés. L'ordonnance de 1681 fait défenses aux pêcheurs qui se servent d'engins appellés fichûres, de prendre les poissons enfermés dans les bastules, à peine de punition corporelle. (Z)
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BASURURE | (Géog.) riviere de l'Amérique méridionale dans le pays des Caraïbes : elle se jette dans la riviere des Amazones.
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BASVILLE | (Géog.) ville de l'Amérique avec port, dans la Martinique.
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BAT | BATTOLOGIE, BUTUBATA, (Gram.) En expliquant ce que c'est que battologie, nous ferons entendre les deux autres mots.
BATTOLOGIE, s. f. c'est un des vices de l'élocution ; c'est une multiplicité de paroles qui ne disent rien ; c'est une abondance stérile de mots vuides de sens, inane multiloquium. Ce mot est grec, inanis eorundem repetitio, & , verbosus sum. Au ch. vj. de S. Matthieu, v. 7. Jesus-Christ nous défend d'imiter les payens dans nos prieres & de nous étendre en longs discours & en vaines répétitions des même paroles. Le grec porte, , c'est-à-dire, ne tombez pas dans la battologie ; ce que la vulgate traduit par nolite multum loqui.
A l'égard de l'étymologie de ce mot, Suidas croit qu'il vient d'un certain Battus, poëte sans génie, qui répétoit toûjours les mêmes chansons.
D'autres disent que ce mot vient de Battus, roi de Libye, fondateur de la ville de Cyrene, qui avoit, dit-on, une voix frêle & qui bégayoit : mais quel rapport y a-t-il entre la battologie & le bégayement ?
On fait aussi venir ce mot d'un autre Battus, pasteur, dont il est parlé dans le II. livre des Métamorphoses d'Ovide, v, 702 qui répondit à Mercure : sub illis montibus, inquit, erant & erant sub montibus illis.
Cette réponse qui répete à-peu-près deux fois la même chose, donne lieu de croire qu'Ovide adoptoit cette étymologie. Tout cela me paroît puéril. Avant qu'il y eût des princes, des poëtes, & des pasteurs appellés Battus, & qu'ils fussent assez connus pour donner lieu à un mot tiré de quelqu'un de leurs défauts, il y avoit des diseurs de rien ; & cette maniere de parler vuide de sens, étoit connue & avoit un nom ; peut-être étoit-elle déjà appellée battologie. Quoi qu'il en soit, j'aime mieux croire que ce mot a été formé par onomatopée de bath, espece d'interjection en usage quand on veut faire connoître que ce qu'on nous dit n'est pas raisonnable, que c'est un discours déplacé, vuide de sens : par exemple, si l'on nous demande qu'a-t-il dit ? nous répondrons bath ; rien ; patata. C'est ainsi que dans Plaute, (Pseudolus, act. I. sc. 3.) Calidore dit : quid opus est ? à quoi bon cela ? Pseudolus répond : Potin aliam rem ut cures ? vous plaît-il de ne vous point mêler de cette affaire ? ne vous en mettez point en peine, laissez-moi faire. Calidore replique at.... mais.., Pseudolus l'interrompt en disant bat : comme nous dirons ba, ba, ba, discours inutile, vous ne savez ce que vous dites.
Au lieu de notre patipata, où le p peut aisément être venu du b, les Latins disoient butubata, & les Hébreux bitubote, pour répondre à une façon de parler futile. Festus dit que Naevius appelle butubata ce qu'on dit des phrases vaines qui n'ont point de sens, qui ne méritent aucune attention : butubata Naevius pro nugatoriis posuit, hoc est nullius dignationis, Scaliger croit que le mot de butubata est composé de quatre monosyllabes, qui sont fort en usage parmi les enfans, les nourrices & les imbécilles ; savoir bu, tu, ba, ta bu, quand les enfans demandent à boire ; ba ou pa, quand ils demandent à manger ; ta, ou tatam, quand ils demandent leur pere, ou le t se change facilement en p ou en m, maman : mots qui étoient aussi en usage chez les Latins, au témoignage de Varron & de Caton ; & pour le prouver, voici l'autorité de Nonius Marcellus au mot buas. Buas, potionem positam parvulorum. Var. Cato, vel de liberis educandis. Cum cibum ac potionem buas, ac papas docent & matrem mamam, & patrem tatam. (F)
BAT, s. m. (Commerce) petite monnoie de billon de Suisse ; dont on ne peut que difficilement évaluer la valeur. Plusieurs cantons en fabriquent à différens titres & poids. Pour donner la valeur d'un bat, celui de Zuric vaut deux sous & cinq sixiemes de denier, argent de France. Il faut encore distinguer les bons bats des communs.
BAT, (Manége & Maréchallerie) c'est une espece de selle de bois qu'on met sur les ânes, mulets & chevaux, pour y ajuster des paniers ou autres machines destinées à porter des fardeaux. Les bats communs ne sont autre chose qu'une espece d'arçon composé de deux fûts de bois, joints avec des bandes de même matiere. Chaque fût est accompagné d'un crochet, pour tenir les cordes qui soûtiennent aux deux côtés du bât des paniers, des ballots ou des échelettes. Le dessous du bât est garni de panneaux : on y ajoûte une sangle, ou bien on fait passer un surfaix par-dessus. On attache au fût de derriere une courroie qui sert de croupiere. Voyez PANNEAU, SURFAIX, CROUPIERE.
Un cheval de bât est un cheval destiné à porter des fardeaux sur un bât, soit à la guerre, en route, ou dans les messageries. (V.)
* BAT, s. m. chez les marchands de poisson, c'est la queue du poisson, le grand poisson, disent-ils, se mesure entre queue & bât.
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BATA | (Géog.) ville d'Afrique, capitale de la province de même nom au royaume de Congo.
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BATADEUR | S. m. au jeu de Revertier, sont les dames qui font surcase sur la même fleche où il y en a déjà d'accouplées. Elles sont nommées batadeur, parce qu'elles servent à battre les dames découvertes, sans qu'on soit obligé à se découvrir soi-même.
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BATAILLÉ | en terme de Blason, se dit d'une cloche dont le battant est d'un autre émail qu'elle. Bellegarde, d'azur à une cloche d'argent, bataillé de sable. (V)
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BATAILLE | COMBAT, ACTION, (Gramm.) La bataille est une action plus générale, & ordinairement précédée de préparations : le combat est une action plus particuliere, & moins prévue. On peut dire que la bataille de Pharsalles & le combat des Horaces & des Curiaces sont des actions bien connues. Ainsi action semble le genre, & batailles & combat des especes : bataille a rapport aux dispositions, & combat à l'action : on dit l'ordre de bataille, & la chaleur du combat : combat se prend au figuré, bataille ne s'y prend point. On ne parleroit point mal, en disant, il s'est passé en-dedans de moi un violent combat entre la crainte de l'offenser, & la honte de lui céder ; mais il seroit ridicule d'employer en ce sens le terme de bataille ; celui d'action ne convient pas davantage.
BATAILLE, s. f. (Ordre encycl. Entend. Raison, Philos. ou Science, Science de la nat. Mathématique, Mathématiques pures, Géométrie, Tactique.) c'est dans l'Art militaire, une action générale entre deux armées rangées en bataille, qui en viennent aux mains dans une campagne assez vaste pour que la plus grande partie puisse combattre. Les autres actions de troupes, quoique souvent plus meurtrieres que les batailles, ne doivent, selon M. de Feuquieres, se nommer que des combats.
Ainsi, suivant cet officier, l'attaque d'un poste ou d'un village retranché, ne doit point s'appeller bataille, mais un combat. Voyez ORDRE DE BATAILLE & ARMEE.
Une bataille perdue est celle dans laquelle on abandonne le champ de bataille à l'ennemi, avec les morts & les blessés. Si l'armée se retire en bon ordre avec son artillerie & ses bagages, le fruit de la bataille se borne quelquefois à avoir essayé ses forces contre l'ennemi, & au gain du champ de bataille : mais si l'armée battue est obligée d'abandonner son canon & de se retirer en desordre, elle n'est plus en état de reparoître devant l'ennemi qu'elle n'ait réparé ses pertes ; il se trouve par-là maître de la campagne, & en état d'entreprendre des siéges : c'est cette suite qui décide ordinairement du succès des batailles, dont il n'est pas rare de voir les deux partis s'attribuer l'avantage.
Un grand combat perdu, dit M. de Feuquieres, quoique plus sanglant qu'une bataille, emporte rarement la perte de toute l'artillerie, & presque jamais celle des bagages ; parce que les armées n'ayant pû s'aborder par leur front, il est certain qu'elles n'ont pû souffrir que dans la partie qui a combattu ; & que quoique pour attaquer ou pour soûtenir on ait successivement été obligé de se servir de nouvelles troupes tirées du front qui ne pouvoient combattre, l'action n'ayant pû cependant devenir générale, elle n'a pû produire qu'une plus grande ou moindre perte d'hommes, sans influer si absolument sur la suite d'une campagne & sur la décision pour la supériorité, que le peut faire une bataille rangée : elle ne peut produire ni la perte générale des bagages, ni celle de l'artillerie, mais seulement ce qui peut s'en être trouvé sur le terrein où les troupes ont combattu. Mémoires de Feuquieres.
Il suit de-là qu'un général qui craint de se commettre avec un ennemi en rase campagne, doit chercher des postes de chicane, où sans faire agir toute son armée, il puisse attaquer l'ennemi sans s'exposer au hasard de perdre une bataille. Mais il faut convenir que si par ces especes de batailles on ne se met pas en danger d'être battu entierement, on ne peut non plus battre entierement l'ennemi, & l'empêcher de reparoître après le combat comme avant, pour s'opposer aux entreprises qu'on peut former.
L'histoire des batailles n'est proprement que l'histoire des défauts & des bévues des généraux : mais il est heureusement assez ordinaire que les méprises des deux généraux opposés se compensent réciproquement. L'un fait une fausse démarche ; l'autre ne s'en apperçoit pas, ou il n'en sait tirer aucun avantage : de-là il n'en résulte aucune conséquence fâcheuse.
Les Mémoires de M. de Feuquieres sur la guerre, ne sont, pour ainsi dire, qu'un récit des inadvertances & des fautes des deux partis : à peine fait-il mention d'un seul général, excepté Turenne, le grand Condé & Luxembourg, dont la conduite soit autre chose qu'un tissu continuel de fautes. Créqui & Catinat, en certaines occasions, en faisoient de grandes, selon ce même officier, mais ils savoient les compenser par une conduite judicieuse en d'autres occasions. M. le chevalier de Folard trouve aussi très-peu de généraux dont la réputation soit nette à tous égards. Le marquis de Feuquieres, dont la grande capacité dans la guerre paroît par ses Mémoires, eût été un général du premier ordre, dit M. de Folard, s'il eût plû à certaines gens, à qui son mérite faisoit ombrage, de s'empresser un peu moins à travailler à sa disgrace & à le perdre dans l'esprit du roi, après l'avoir gâté dans l'esprit du ministre ; ce qui fit perdre à ce prince un des meilleurs & des plus braves officiers généraux de ses armées, & qui le servoit mille fois mieux & avec plus de courage & d'intelligence que ses indignes ennemis.
Maniere de disposer les troupes dans une bataille rangée. Lorsqu'on a formé le dessein d'aller à l'ennemi, & qu'on est à portée de le pouvoir combattre, " il faut disposer les troupes pour arriver devant lui en bataille, sur deux lignes : l'infanterie au centre, & la cavalerie sur les aîles, si le terrein le permet ; parce qu'il y a des pays si coupés & si fourrés, qu'il faut mettre les brigades d'infanterie ou de dragons aux flancs de la droite & de la gauche, pour empêcher l'ennemi d'en approcher. Il y a d'autres situations partagées par des plaines & des buissons, où l'on place dans les intervalles d'infanterie, des escadrons pour la soûtenir & profiter du terrein que l'on veut disputer.
Quand il y a de la difficulté à pénétrer l'ennemi, & que l'on veut emporter un poste, forcer une droite, une gauche, ou le centre, on doit disposer les troupes de maniere, qu'elles se présentent également de toutes parts à l'ennemi, pendant que le plus fort de l'armée arrive en colonne sur l'endroit que l'on veut pénétrer, qu'on attaque vivement & sans relâche. Un ennemi qui n'est point prévenu de cette disposition, se trouve bien-tôt renversé par un nombre supérieur, & on le poursuit avec ordre, pour achever de le mettre en déroute.
Il y a d'autres situations qu'il faut absolument rechercher avant d'attaquer l'ennemi. S'il est posté dans les pays fourrés & coupés de haies & de fossés où son infanterie peut avoir beaucoup d'avantage, il faut le tourner ou le déplacer, de maniere que la cavalerie sur laquelle on compte beaucoup, puisse agir & partager le mérite d'une action, qu'il vaut mieux différer quelque tems, que de s'exposer à la manquer. Lorsque le général a des troupes de confiance à la droite, & qu'il connoît que le terrein de la gauche de son champ de bataille est avantageux, pour les y faire combattre, il doit les y porter, & mettre à la droite les troupes de la gauche : ce sont des dispositions qu'il faut faire quelquefois, pour mieux s'opposer aux forces de l'ennemi, suivant l'avantage que la situation du lieu donne, & le projet que le géneral forme pour attaquer ; c'est de quoi le coup d'oeil décide.
Il faut autant qu'il est possible, avoir un corps de reserve composé de bonnes troupes, cavalerie & infanterie. La cavalerie doit être en troisieme ligne en bataille, derriere le centre de l'infanterie de la seconde ligne, pour être en état de se porter où elle seroit utile, sans rien déplacer de la seconde ligne ; il faut dérober, s'il est possible, à l'ennemi la connoissance de cette disposition. Dans le moment que la premiere ligne s'ébranle pour combattre, on fait aussi-tôt passer les bataillons de la réserve par les intervalles de la cavalerie de la seconde ligne, pour se porter brusquement dans les intervalles des escadrons de la premiere, en joignant l'escadron le plus proche de la droite & de la gauche de l'infanterie de cette ligne. Suivant cette disposition, qui peut être inconnue à l'ennemi, on peut par le feu de l'infanterie, mettre un grand desordre dans sa cavalerie, lorsqu'elle vient au coup de main. Si l'infanterie reste dans la même disposition, elle favorise toûjours le retour de la cavalerie, ou elle marche pour attaquer en flanc l'infanterie ennemie de la premiere ligne qu'elle déborderoit.
Il faut observer, en mettant en bataille la premiere ligne, de laisser aux deux aîles de cavalerie des intervalles assez spacieux pour ne rien déplacer devant l'ennemi, lorsque l'infanterie de la réserve vient s'y porter. Le général doit faire reconnoître de fort près les flancs de l'armée ennemie pour les déborder, les entamer, & les replier sur le centre, rien n'est plus avantageux, & ne décide plus promtement de la victoire ; l'ennemi ne peut plus s'étendre, ni disposer du terrein dont il étoit le maître, il s'y voit resserré : les troupes n'y combattent plus qu'avec contrainte, ne se reconnoissant plus dans la mêlée, & ne cherchent qu'à se faire jour pour se sauver.
Lorsqu'on a pénétré la ligne par quelque endroit, il est très-à-propos de faire avancer dans le même moment des troupes de la seconde ligne, s'il n'y en a pas du corps de réserve qui soient à portée pour partager l'ennemi, & profiter de cet avantage par la supériorité, sans quoi on lui donne le tems de se rallier & de réparer les desordres où il se trouve. Il faut absolument conserver un grand ordre dans tous les avantages que l'on remporte, afin d'être plus en état de jetter la terreur dans les troupes ennemies, & empêcher leur ralliement ; la disposition doit être faite de maniere, que si la premiere ligne étoit pénétrée, la seconde puisse la secourir, observant toûjours les intervalles nécessaires pour faire agir les troupes, & les former derriere celles qui seront en ordre : on doit attaquer la bayonnette au bout du fusil, les troupes qui ont pénétré la premiere ligne, les prendre de front, & par leurs flancs, afin de les renverser, & remplir à l'instant le même terrein qu'elles occupoient ; c'est dans des coups si importans, que les officiers généraux les plus proches doivent animer par leur présence cette action, & faire couler des troupes de ce côté-là, pour les former sur plusieurs lignes, & rendre inutile l'entreprise de l'ennemi. Un général a bien lieu d'être content des officiers qui ont prévenu & arrêté ce premier desordre par leur diligence & leur valeur.
Il faut que le corps de réserve soit à portée de remplacer les troupes aux endroits où elles auront été prises, afin que l'ennemi ne voye rien de dérangé, & qu'il trouve par-tout le bon ordre & la même résistance.
Les commandans des régimens doivent avoir des officiers sur les ailes & au centre, pour contenir les soldats, & les avertir, que le premier qui se dérangera de sa troupe pour fuir ou autrement, sera tué sur le champ, afin que personne ne puisse sortir de son rang : avec cette précaution, on se présente toûjours à l'ennemi avec beaucoup d'ordre.
Dans un jour de bataille, le poste du général ne doit pas être fixé ; il est obligé de se porter dans les endroits où sa présence est utile, soit pour surprendre l'ennemi par quelques attaques, soit pour secourir une droite, une gauche, ou le centre, qui commenceroient à s'ébranler ; ou faire avancer des troupes pour réparer ce qui seroit dérangé, parcourir la premiere ligne, y animer les troupes, & en même tems jetter le coup-d'oeil sur les forces & la situation de l'ennemi, pour en découvrir le foible, & en profiter par des détachemens que l'on fait marcher.
Tous les lieutenans généraux & maréchaux de camp doivent être aux postes marqués par l'ordre de bataille, pour conduire les troupes des ailes & du centre de l'armée ; les brigadiers à la tête de leurs brigades pour les faire mouvoir suivant les ordres qu'ils en reçoivent, ou l'occasion ; & lorsque dans l'action ils sont partagés par un mouvement brusque de l'ennemi, ils doivent prendre sur le champ le parti de se faire jour, rejoindre leurs troupes, ou de se jetter dans quelque poste, pour empêcher l'ennemi de pénétrer plus loin : par ces démarches hardies & faites à propos, on répare le desordre qui peut être arrivé.
Le major général de l'infanterie, ses aides-majors, le maréchal-de-logis de l'armée, de la cavalerie, des dragons, & le major de l'artillerie, doivent tous suivre le général pour porter ses ordres, & les faire exécuter promtement ; le capitaine des guides doit aussi l'accompagner pour conduite les troupes, & lui expliquer la situation du pays. Les colonels, lieutenans-colonels, majors de brigades, aides-majors des régimens, doivent tous avoir une grande attention de se tenir à leur troupe, & de faire observer un grand silence pour bien entendre le commandement, & le faire exécuter dans l'instant même. C'est une chose essentielle pour bien combattre l'ennemi & le prévenir dans ses démarches.
Dans le tems même que l'on fait une disposition pour combattre, tout le canon de l'armée doit se placer par brigade devant la premiere ligne, & autant qu'il est possible devant l'infanterie aux endroits les plus élevés, pour faire feu sur tout le front de l'armée ennemie. Lorsque toutes les lignes s'ébranlent pour charger, l'on peut se servir de petites pieces dans les intervalles de l'infanterie, pour faire des décharges à portée de l'ennemi, & rompre son premier rang ; après cette décharge, les officiers d'artillerie les font rentrer aussi-tôt dans l'intervalle des deux lignes, pour les faire recharger, & les avancer lorsqu'on leur ordonne.
Il est très-important que les officiers généraux expliquent à ceux qui commandent les troupes sous eux, ce qu'ils doivent faire pour attaquer l'ennemi, suivant la disposition que le général a réglée, afin que dans une affaire de cette conséquence, tout agisse & soit animé du même esprit, & qu'au cas que quelques officiers généraux fussent tués ou blessés, on fût toûjours en état de suivre le même ordre pour combattre. Il faut aussi que l'on sache, en cas de besoin, le lieu de la retraite, & l'ordre pour se rallier de nuit ; ce sont des choses trop importantes pour les oublier.
On doit observer, lorsque les troupes vont au combat, de ne pas permettre que les officiers des régimens détachent des soldats des compagnies pour la garde de leurs équipages ; on y laisse au plus les éclopés, & les valets pour en avoir soin, avec un détachement de l'armée : mais lorsqu'on prévoit une action, il faut absolument renvoyer au moins les gros bagages sous une place, pour ne pas s'affoiblir inutilement ". Observations sur l'Art de faire la guerre suivant les maximes des plus grands généraux.
Le succès des batailles ne dépend pas toûjours de l'habileté du général, & il lui est difficile de se trouver par-tout pour donner les ordres qui peuvent être nécessaires.
" Lorsque deux armées s'ébranlent pour se charger, dit M. le maréchal de Puységur, dans son livre de l'Art de la guerre, que peut faire le général ? courra-t-il le long de la ligne, ou restera-t-il en place ? il n'a pour lors d'autre avantage, sur les officiers généraux inférieurs, que celui de commander par préférence les troupes qui sont sous sa main. Pendant ce tems-là on vient lui dire qu'une telle partie de son armée a battu celle de l'ennemi qu'elle avoit en tête, ou bien que sa gauche est en déroute, & que l'infanterie qui la joignoit a ployé. Je demande, dit toûjours l'illustre maréchal de Puységur, quelle part ce général peut avoir alors au gain ou à la perte de la bataille. Cependant pour marquer dans l'histoire la supériorité d'un général sur un autre, on dit qu'il l'a battu en bataille rangée, quoiqu'à dire la vérité, ce soient ces actions-là dans lesquelles le général a le moins de part. Ce sont, il est vrai, les généraux qui choisissent les postes, & qui ordonnent les dispositions pour combattre : mais l'exécution de leur ordre & l'action sont totalement l'affaire des troupes, non-seulement dans les armées également étendues ; mais même dans celles dont les forces sont fort différentes.
Aussi les généraux qui n'ont pas grande ressource dans leur savoir, préferent-ils toûjours les batailles aux autres actions de la guerre, qui donnent moins au hasard & qui demandent plus d'habileté. Au contraire ceux qui sont savans dans la guerre, cherchent par préférence les actions où ils peuvent soûtenir les troupes par leur intelligence & sans se commettre aux évenemens ; ce qu'ils ne peuvent faire que quand les armées ont peu d'étendue, " c'est-à-dire qu'elles ne sont pas trop nombreuses. Art de la guerre par M. le maréchal de Puységur.
M. de Folard pense sur les armées nombreuses, comme le savant maréchal que nous venons de citer. " Ces armées innombrables & les évenemens prodigieux qu'elles produisent, plaisent & amusent comme les romans, mais elles instruisent peu les gens de guerre. Il y a par-tout à apprendre dans les petites guerres ; & c'est dans celles-ci uniquement que la science & l'intelligence paroissent le plus particulierement. Il faut même plus de l'une & de l'autre que dans les grandes, dont le nombre fait tout le mérite.... M. de Turenne disoit qu'une armée qui passoit cinquante mille hommes, devenoit incommode au général qui la commandoit, & aux soldats qui la composoient. Rien n'est plus vrai & plus judicieux que cette maxime. Les mauvais généraux cherchent toûjours à réparer par le nombre le défaut de leur courage & de leur intelligence. Ils n'ont jamais assez de troupes quoique l'ennemi en ait moins. Ils épuisent toutes les garnisons d'une frontiere, & les vivres en même tems pour grossir leurs armées, gagner l'avantage du nombre & l'avoir bien au-delà.... S'ils ne font rien avec des forces si supérieures, ils nous font juger que c'est à bon droit qu'ils se défient d'eux-mêmes, qu'ils se rendent justice, & que leur hardiesse n'est pas telle qu'ils la vantoient.... On voit peu de grandes armées qui réussisssent lorsqu'on se défend bien : elles se dissipent d'elles-mêmes ; on voit bien-tôt la confusion & le desordre s'y introduire par la faute de paye, par la disette & les maladies : leur propre grandeur entraine leur ruine ". Comment. sur Polybe.
Suivant la remarque d'un auteur célébre, la perte réelle soufferte dans une bataille, c'est-à-dire la mort de quelques milliers d'hommes, n'est pas aussi funeste à l'état que son mal d'opinion, ou le découragement qui l'empêche d'user des forces que la fortune lui a laissées. Considérations sur les causes de la grandeur des Romains, par M. de Montesquieu.
M. de Turenne disoit qu'il estimoit plus un général qui conservoit un pays après une bataille perdue, que celui qui l'avoit gagnée & n'avoit pas sû en profiter. Il avoit raison. Ceux de cette derniere espece ne sont pas rares ; apparuit nescire eos victoriâ uti, dit Tite-Live. Mais ceux qui poussent les avantages d'une victoire aussi loin qu'ils peuvent aller, comme M. le Prince & M. de Turenne, ne se trouvent pas par-tout.... Se servir de l'occasion, est une marque infaillible de l'habileté & du courage d'un général d'armée. L'occasion, dit Tacite, est la mere des grands évenemens, opportunus magnis conatibus transitus rerum. En effet, une victoire décisive & complete nous conduit à une foule d'entreprises & de grands desseins, qui résultent tous de la premiere victoire. Une armée n'est pas abîmée & anéantie pour avoir perdu & abandonné le champ de bataille, son canon, ses morts & ses blessés. Ceux qui fuient à-travers les campagnes ne sont pas morts ; ils sont dissipés aujourd'hui, ils peuvent se réunir demain, trois ou quatre jours après, quinze ou vingt, si l'on veut, se rallier, prendre de nouvelles forces, de nouvelles espérances, & revenir plus braves & plus résolus qu'auparavant, par la honte de leur défaite, ou par l'adresse des généraux. Que ne faut-il pas pour rendre une bataille décisive & complete ? elles ne le sont presque jamais : on voit l'ennemi en fuite, atterré, vaincu, foulé aux piés, il se releve en peu de tems : on diroit que le victorieux n'a marché que sur des ressorts.
Une bataille n'est complete & décisive, qu'autant qu'on en sait profiter dès l'instant que la victoire s'est déclarée sans nulle équivoque, qu'aucun corps ne reste en entier, que tout s'enfuit, que tout court à la débandade. Le général victorieux doit bien se garder alors de faire un lieu de repos du champ de bataille ; mais imiter ce que fit César dans toutes ses victoires, & particulierement dans celle de Pharsale. Il n'a pas plûtôt vaincu Pompée, que sur le champ il marche à l'attaque de son camp qu'il emporte. Ce n'est pas encore assez, il suit sans relâche à marche forcée ; il oblige l'ennemi de s'embarquer ; il y monte aussi & avec la même promtitude, de peur qu'il ne lui échappe. Belle leçon pour les victorieux, qui ne le sont jamais qu'à demi.
On doit laisser là tous les blessés, les gros bagages, la grosse artillerie, enfin tout ce qui peut retarder la marche d'un seul moment ; camper sur les traces des vaincus, afin qu'ils n'ayent pas le tems de se reconnoître & de recourir aux ressources.
Ordinairement une armée battue cherche son salut par différentes routes & diverses retraites. On doit partager son armée en plusieurs corps dans un très-grand ordre ; les envoyer aux trousses des fuyards, tâcher de les atteindre pour les accabler & ruiner le tout. Si les vaincus se réunissent & se rassemblent sous le canon de la place la plus voisine, il faut l'attaquer brusquement à la faveur de la nuit, ou dans le plein jour : on essuie un feu de passage ; mais dès qu'on est aux mains, ce feu n'a plus lieu. Enfin il faut considérer qu'il y a certaines bornes d'où l'on ne sauroit s'écarter après une victoire. Il y a un certain point jusqu'où il est permis de suivre ses avantages. Ce n'est pas connoitre ses forces, ni même celles de ses ennemis, que de n'oser aller jusqu-là, ou de vouloir aller plus loin, lorsque la défaite n'est pas entiere. Bien des généraux ont été battus après une victoire, faute de connoître la juste étendue qu'ils auroient pû lui donner. Commentaire sur Polybe, par M. le chevalier Folard. (Q)
BATAILLE NAVALE, est une bataille donnée sur mer. Voyez COMBAT NAVAL.
BATAILLE, (Jurispr.) s'est dit dans le même sens que combat, lorsque les duels étoient autorisés en justice, Voyez COMBAT. (H)
BATAILLE, (Peinture) on se sert de ce mot au figuré pour signifier les représentations des batailles en peinture & en sculpture. Les batailles d'Alexandre qui sont dans les galeries du Louvre par le Brun, sont mises au nombre des morceaux de peinture les plus achevés qui soient en-deçà des Alpes. Mais personne n'a si bien réussi dans les batailles dont les figures soient habillées à la Françoise, que Wandermeulen, illustre peintre flamand. Il dessinoit les chevaux mieux que qui que ce soit, & il excelloit particulierement dans les paysages & les représentations des pays plats. Il avoit été choisi pour peindre les conquêtes de Louis XIV.
On appelle Peintres de batailles, ceux qui se livrent à ce genre de représentations. (R)
BATAILLE, cheval de bataille, (Manege) est un cheval fort & adroit, que l'on réserve pour les occasions où il faut combattre. (V)
BATAILLES, s. f. pl. c'est ainsi qu'on appelle dans les grosses Forges, la galerie qui regne autour de la charge ou du haut de la cheminée. Ainsi dans Pl. V. fig. 1. des grosses Forges, l'espace F F sont les batailles.
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BATAILLON | S. m. dans l'Art militaire, est un nombre d'hommes à pié, assemblés pour agir & combattre ensemble, comme s'ils ne faisoient qu'un seul & même corps.
" La premiere chose qui se présente à examiner dans le bataillon, c'est le nombre des hommes dont il doit être composé.
On a d'abord observé qu'une troupe formée d'un grand nombre d'hommes, ne pourroit se mouvoir avec facilité ; mais aussi si elle en a un trop petit nombre, elle ne sera capable d'aucun effet considérable : il faut donc que le nombre des hommes du bataillon permette de le faire mouvoir avec facilité ; que ces hommes soient aussi en assez grande quantité pour faire une espece de corps solide, qui puisse attaquer avec fermeté & soûtenir les différens chocs auxquels il est exposé.
Il n'est pas aisé de fixer ce nombre d'une maniere précise & géométrique ; il depend des coûtumes des peuples qui font la guerre, de leurs armes, de la maniere de s'en servir, & de leur façon de combattre : aussi les usages ont-ils été fort différens sur ce point. Mais à présent toutes les nations de l'Europe, hors les Turcs, suivent à peu près le même ordre à cet égard ; les termes mêmes de bataillons & d'escadrons sont employés dans toutes les langues.
Depuis long-tems il paroît que parmi nous le nombre des hommes du bataillon est à peu près fixé à sept cent : mais chez les différentes nations de l'Europe, les uns ont leurs bataillons plus forts, & les autres moins. En France, dans les deux dernieres guerres qui ont précédé la mort de Louis XIV. les bataillons étoient composés de treize compagnies de cinquante hommes chacune, ce qui faisoit six cent cinquante hommes ; ils avoient plus de quarante officiers.
Dans la guerre de 1733 ils étoient composés de seize compagnies de quarante hommes chacune, & d'une dix-septieme de quarante-cinq, ce qui faisoit six cent quatre-vingt-cinq hommes, non compris cinquante-deux officiers.
Dans la guerre de 1741 ils étoient composés de même, excepté qu'ils n'avoient que trente-quatre officiers. Le fonds des bataillons françois a été autrefois plus considérable.
Il faut observer que pendant la guerre, les bataillons étant formés au commencement de la campagne sur le pié prescrit par le prince, & que ces bataillons n'étant point ordinairement recrutés pendant le cours de la campagne, il arrive par la perte que leur causent les actions de la guerre, les maladies, &c, qu'ils ne sont presque jamais complets.
Dans le nombre des hommes fixé pour le bataillon, il y a une compagnie de grenadiers attachée, laquelle est souvent employée à des usages particuliers, & qui n'agit pas toûjours avec le bataillon.
On appelle grenadiers, des soldats choisis sur tout un régiment par rapport à la valeur & à la force du corps. Ils sont destinés aux fatigues & aux emplois périlleux de la guerre. Le nom de grenadiers leur vient des grenades dont ils se servoient autrefois. Voyez GRENADIER.
Les soldats sont assemblés & arrangés dans le bataillon par rang & par file. Ainsi leur nombre & leur distance constituent sa forme & l'espace qu'il occupe sur le terrein.
Du tems de Louis XIII. les bataillons étoient sur huit rangs : ils ont été ensuite réduits à six. Les dernieres ordonnances de Louis XIV. les fixent à cinq : mais l'usage, même de son tems, les a fixés à quatre. A l'égard de leur distance, les ordonnances militaires en distinguent de deux sortes ; savoir, pour paroître & pour combattre.
Les distances pour paroître sont fixées pour l'intervalle d'un rang à un autre, à la longueur de deux halebardes ; ce qui se prend pour douze piés en y comprenant la profondeur ou l'épaisseur des hommes du devant de la poitrine au dos. Les mêmes ordonnances ne prescrivent rien par rapport aux files ; & en effet, leur distance est assez difficile à évaluer exactement : mais il paroît que l'usage le plus ordinaire a toûjours été de compter trois piés pour l'intervalle d'une file à une autre, en comprenant dans cette distance l'espace occupé par un homme, c'est-à-dire du milieu d'un homme au milieu de celui de la file suivante.
Lorsqu'il s'agit de combattre, les officiers s'approchent autant qu'il est possible du bataillon, & les rangs se serrent jusqu'à la pointe de l'épée, c'est-à-dire, que le second rang doit toucher le bout des épées du premier, ce qui ne donne guere que trois piés pour l'épaisseur du rang & pour son intervalle. Les files s'approchent autant qu'il est possible, en conservant la liberté du coude ; ce qui veut dire, comme on l'entend ordinairement, que la file & son intervalle doivent occuper environ deux piés. On voit par-là que le bataillon occupe alors beaucoup moins d'espace qu'auparavant.
Les officiers chargés du soin de former les bataillons, ne paroissent pas s'embarrasser beaucoup à présent de la distance des rangs, parce qu'elle peut être changée fort aisément dans un instant, & surtout diminuée ; c'est pourquoi ils laissent prendre douze piés pour cette distance : mais à l'égard de celle des files, comme il faut plus de tems pour la changer, ils la fixent à deux piés pour l'épaisseur de la file & pour son intervalle, ce qui est un espace suffisant pour combattre.
Il suit de-là que pour savoir l'espace que le bataillon occupe sur le terrein, il faut compter deux piés pour chaque homme dans le rang, & douze piés pour l'épaisseur du rang, jointe à son intervalle.
Ainsi supposant un bataillon de six cent cinquante hommes sans compter les officiers, & que ce bataillon soit composé de cinq rangs, on trouvera les hommes de chaque rang, en divisant six cent cinquante par cinq, ce qui donnera cent trente hommes par rang ; multipliant ensuite ce nombre par deux, on aura deux cent soixante piés, ou quarante-trois toises deux piés pour l'étendue de chaque rang.
A l'égard de la profondeur des cinq rangs, comme ils ne forment que quatre intervalles, elle est de quarante-huit piés ou de huit toises, non compris l'espace occupé par les officiers.
Si le bataillon n'est que sur quatre rangs, il n'aura que trente-six piés de profondeur, attendu que ses rangs ne donneront que trois intervalles ; mais alors son front augmentera ; car six cent cinquante divisés par quatre, donnent cent soixante-deux hommes par chaque rang : multipliant ces hommes par les deux piés qu'ils occupent sur le terrein, on aura trois cent vingt-quatre piés, ou cinquante-quatre toises pour le front du même bataillon.
Ce modele de calcul ou de supputation peut servir pour toutes sortes de bataillons dont le nombre d'hommes sera connu, de même que celui des rangs : dans tous les cas il formera toûjours un rectangle beaucoup plus étendu sur une dimension que sur l'autre " Essai sur la Castramétation, par M. le Blond.
BATAILLON QUARRE, est un bataillon dont les soldats sont arrangés de maniere que les rangs sont égaux aux files, ensorte que les quatre cotés qui le terminent contiennent le même nombre d'hommes. Voyez FILE.
Il y a deux sortes de bataillons quarrés ; savoir, à centre plein, & à centre vuide.
Le bataillon quarré à centre plein, est celui dont les hommes sont placés tout de suite, ne laissant que l'intervalle ordinaire des rangs & des files.
Le bataillon quarré à centre vuide, est celui qui laisse dans son centre un espace vuide de soldats, & qui est assez considérable eu égard au terrein occupé par le bataillon.
Le bataillon quarré à centre plein est très-aisé à former. Ceux qui ont quelque connoissance de l'extraction de la racine quarrée, n'y peuvent pas être embarrassés ; car extrayant la racine quarrée du nombre d'hommes dont le bataillon doit être composé, on trouve d'abord la quantité dont chaque côté doit être composé.
Ce bataillon est assez peu d'usage dans la Tactique moderne.
1°. Parce que le feu des ennemis, & principalement celui du canon, y peut faire un très-grand desordre.
2°. Parce que les soldats du centre ne peuvent presque pas se servir de leur feu contre l'ennemi. M. le chevalier de Folard est presque le seul qui en prescrive l'usage : sa colonne n'est autre chose que deux ou trois bataillons à centre plein placés sans intervalle les uns derriere les autres. Voyez COLONNE.
Le bataillon à centre vuide présente, comme celui qui est à centre plein, des hommes de tous côtés. On prétend que le fameux Maurice de Nassau a été le premier qui ait trouvé l'usage de vuider le centre des bataillons.
Le bataillon à centre vuide n'a pas plus de difficulté dans sa formation que celui à centre plein : un exemple suffira pour en donner une idée.
Soit un nombre d'hommes quelconque, comme 1200, dont on veut faire un bataillon quarré à centre vuide, de maniere que le côté du quarré vuide, par exemple, ait douze hommes.
Il faut retrancher deux unités du nombre 12, parce que le côté du quarré vuide, s'il étoit rempli d'hommes, en contiendroit deux de moins que le dernier rang intérieur de la partie du quarré qui est rempli : ôtant donc 2 de 12, il reste 10 qu'il faut quarrer, & l'on aura 100, que l'on ajoûtera au nombre donné 1200. Ces deux nombres ajoûtés ensemble donneront 1300, dont on extraira la racine quarrée qu'on trouvera être 36 ; il restera quatre hommes qu'on pourra placer dans le centre du bataillon.
Présentement pour former le bataillon, je considere que s'il étoit plein, & qu'il fût de 1300, toutes les files & tous les rangs seroient de 36 hommes : mais il doit y avoir un vuide dans le milieu du bataillon de dix hommes ; donc dans cet endroit les files n'auront que 26 hommes ; c'est-à-dire 36 moins 10 : mais ces dix hommes doivent diminuer également les demi-files du milieu ; elles n'auront donc chacune que 13 hommes ; d'où il suit qu'il n'y aura dans cet exemple que 13 rangs de 36 hommes dans le bataillon, à commencer de la tête & de la queue du bataillon, & de la droite à la gauche. Arrangeant ainsi le bataillon, il restera le vuide demandé ; & alors chaque côté du quarré intérieur sera de 12 hommes, c'est-à-dire, de deux hommes de plus à chaque côté que le côté 10 n'en a.
Pour la preuve il suffit de considérer qu'ayant ajoûté au nombre proposé, le nombre d'hommes qu'occuperoit l'espace qu'on veut laisser vuide dans le bataillon, on peut alors regarder le nombre proposé augmenté de ce dernier, comme le nombre d'hommes dont il faut extraire la racine quarrée : laquelle racine donnera le nombre des hommes, des rangs & des files d'un tel quarré. Or retranchant vers le milieu le nombre qu'on a ajoûté à chaque file, il restera pour le bataillon disposé en quarré le nombres d'hommes qui avoit d'abord été proposé : cela est évident.
On peut par cette même méthode, lorsqu'un nombre d'hommes est donné, en former un bataillon quarré qui paroisse d'un bien plus grand nombre d'hommes : car si l'on a, par exemple, 1200 hommes, dont on veuille former un bataillon quarré qui paroisse 3000, on extraira la racine quarrée de ce dernier nombre, laquelle sera trouvée de 54, avec un reste 84 qu'on peut négliger ; ce nombre seroit celui des hommes de chaque rang, de chaque file d'un bataillon quarré à centre plein de 3000 : mais comme on a ajoûté 1800 hommes au nombre donné 1200, il faut retrancher du dedans de l'intérieur du bataillon l'espace qu'occuperoient ces 1800 hommes. Pour cela il faut extraire la racine quarrée de 1800, laquelle est 42 ; c'est le nombre d'hommes qu'il faut retrancher des files du milieu du bataillon plein. Ces files sont de 54, desquelles ôtant 42, il reste 12, dont la moitié 6 est le nombre des rangs de la tête & de la queue du bataillon, de même que de ceux de la droite & de la gauche. Ainsi par cette formation les 1200 hommes donnés occuperont l'espace d'un bataillon à centre plein de 3000 ; & ils seront rangés sur six de hauteur ou de file sur chaque côté du bataillon. Traité de l'Arithmétique & de la Géométrie de l'officier par M. Leblond.
BATAILLON ROND, est celui dont les soldats sont rangés circulairement, en formant plusieurs circonférences concentriques.
Ce bataillon a été fort en usage parmi les Romains ; c'est ce qu'ils appelloient in orbem : on en voit plusieurs exemples dans les commentaires de César. Feu M. le maréchal de Puysegur faisoit cas de ce bataillon.
BATAILLON TRIANGULAIRE, est un corps de troupes disposé en triangle, & dont les rangs augmentant également, forment une progression arithmétique.
Si le premier rang est un, & que les autres augmentent chacun d'une unité, le bataillon formera un triangle qui aura les trois côtés égaux, c'est-à-dire qu'il sera équilatéral ; autrement il formera un triangle quelconque.
Problème pour la formation du bataillon triangulaire équilatéral : un nombre d'hommes quelconque, par exemple 400, étant donné pour en former un bataillon équilatéral, trouver le nombre des rangs dont il sera composé.
Comme dans ce bataillon le premier rang est 1, le second 2, le troisieme 3, &c. il s'ensuit que ce problème se réduit à trouver le nombre des termes d'une progression arithmétique, dont le premier terme est 1, la différence aussi 1, & la somme 400. Voyez PROGRESSION ARITHMETIQUE.
Solution. Soit le nombre des termes de la progression représenté par n, le dernier sera aussi, n ; car il sera l'unité prise autant de fois qu'il y a de termes.
Cela posé, la somme des extrèmes de la progression sera 1 + n, laquelle multipliée par le nombre des termes n, donnera n + n n ou n n + n, pour le double de la somme de la progression ; c'est-à-dire que cette expression n n + n, sera égale à deux fois 400 ou à 800. Or n n est le quarré du nombre des termes de la progression, n en est la racine : donc 800 contient le quarré du nombre des termes de la progression, plus la racine de ce quarré.
Il suit de-là que pour avoir la valeur de n, ou le nombre des termes de la progression, il faut extraire la racine quarrée de 800, de maniere qu'il y ait un reste égal à la racine, ou qui la contienne.
Pour le prouver, il faut chercher quelle est la somme de la progression dont le premier terme est 1, le second 2, & le nombre des termes 27.
Il suit de la résolution du problème précédent, que pour former des bataillons triangulaires équilatéraux, il faut, quelque nombre de soldats que l'on ait, pour cet effet, le doubler, & ensuite en extraire la racine quarrée : mais de maniere qu'il y ait un reste égal à la racine, ou qui la contienne, & qu'alors cette racine sera le nombre des rangs du bataillon, dont tous les côtés seront égaux.
On déterminera de la même maniere celui de tous les autres de la même espece que l'on pourra proposer.
Remarque. Si on suppose que la différence qui regne dans la progression est 2, c'est-à-dire que le premier terme étant toûjours 1, le second est 3, le quatrieme est 5, &c. le dernier terme sera (n étant toûjours le nombre des termes) n-1 multiplié par 2, plus 1, ou 2 n-2 + 1 ; & ajoûtant à ce terme le premier 1, la somme des extrèmes sera 2 n-2 + 1 + 1 ; expression qui se réduit à 2 n, dont la moitié étant multipliée par le nombre des termes, donnera le nombre de la progression n n. Ainsi nommant S la somme de la progression, on a n n = S, c'est-à-dire le quarré du nombre des termes égal à la somme de la progression ; & par conséquent n qui est la racine quarrée de n n, est égal à celle de S ; ensorte que n = S.
D'où il suit que dans une progression arithmétique dont le premier terme est 1, & le second 3, le nombre des termes est égal à la racine quarrée de la sommes des termes.
Pour le prouver, considérez que ce dernier rang sera 1 + 19 x 2 ou 39, & qu'en y ajoûtant 1, on aura 40 pour la somme des extrèmes, laquelle étant multipliée par 10, moitié du nombre des termes, donnera 400 pour la somme de la progression, c'est-à-dire le nombre proposé.
On opérera de même pour tous les autres bataillons de même espece, quel que soit le nombre dont on voudra les former.
On voit par ce qui vient d'être enseigné sur les bataillons triangulaires, qu'ils ne sont pas plus difficiles à calculer que les bataillons quarrés. Plusieurs officiers leur donnent la préférence sur ces bataillons, parce qu'ils présentent un plus grand front, & qu'ils font également face de tous côtés. Mais comme il est difficile de faire marcher des soldats dans cet ordre, M. Bottée les croit préférables aux bataillons quarrés, seulement dans les cas où il faut combattre de pié ferme & se donner un grand front ; ou lorsque la situation du terrein exige cette disposition. On pourra voir dans cet auteur la maniere de les former par des mouvemens réguliers. Arithm. & Géom. de l'officier, par M. Le Blond. (Q)
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BATALES | S. m. pl. (Hist anc.) nom que les anciens donnoient aux hommes lascifs & efféminés d'un certain Batale joüeur de flûte, qui exerçoit son art avec mollesse & dissolution, & qui parut le premier sur la scene en chaussure de femme. Les ennemis de Démosthene l'appelloient batale.
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BATANOMES | S. f. (Comm.) toiles longues de 28 piés la piece, & dont la largeur varie : elles se vendent au Caire vingt médins. Voyez MEDINS & CAIRE.
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BATARD | S. m. ou ENFANT NATUREL, (Hist. anc. mod. & Jurisp.) qui est un terme plus adouci, est celui qui est né hors d'un légitime mariage.
Il y a de deux sortes de bâtards : les uns simples, tels que ceux qui sont nés de deux personnes libres, c'est-à-dire non engagées dans le mariage, ou dans un état qui les oblige à la continence ; mais qui pouvoient contracter mariage ensemble : les autres sont ceux qui sont nés d'autres conjonctions plus criminelles, comme les bâtards adultérins & les incestueux.
Les bâtards adultérins sont ceux dont le pere ou la mere, ou tous les deux, étoient engagés dans le mariage. On appelle même adultérins les enfans des prêtres ou des religieuses.
Les bâtards incestueux sont ceux dont le pere & la mere étoient parens à un degré auquel le mariage est prohibé par les canons.
Les bâtards en général ne sont d'aucune famille & n'ont aucuns parens ; ils ne succedent dans la plus grande partie du royaume, ni à leur pere ni à leur mere, & encore moins aux parens de l'un ou de l'autre, en exceptant le Dauphiné & quelques coûtumes particulieres, où ils succedent à leur mere.
Ils ne peuvent pas même recevoir de leurs pere ou mere naturels des legs universels ou donations considérables ; mais ils en peuvent recevoir de médiocres, proportionnément aux facultés du pere ou de la mere. C'est à la prudence des juges de décider si elles sont modérées ou excessives.
Pour les bâtards adultérins & incestueux, ils ne peuvent recevoir que des alimens : mais aussi peuvent-ils même les exiger, soit de leur pere naturel, soit de ses héritiers, s'il est mort sans y avoir pourvû ; du moins jusqu'à ce qu'ils ayent appris un métier, & qu'ils ayent été reçûs maîtres.
Comme par le droit commun les bâtards ne succedent à personne, personne non plus ne leur succede, si n'ayant point d'enfans, ils décedent sans avoir disposé de leurs biens par donation ou par testament ; en ce cas leur succession appartient aux seigneurs hauts-justiciers, pourvû que les trois conditions suivantes concourent ensemble ; qu'ils soient nés dans la justice du seigneur, qu'ils y soient décédés, & que leurs biens y soient : l'une de ces trois conditions manquant, c'est au roi qu'elle appartient.
Du reste ils sont capables de toutes sortes de contrats, & entr'autres de mariage ; ils peuvent disposer librement de leurs biens, soit entre-vifs, soit par testament : ils ne sont incapables ni d'offices ni de dignités ; mais ils ne peuvent avoir des bénéfices sans dispense, à moins qu'ils ne soient légitimés. Voyez LEGITIMATION.
Chez les Athéniens, une loi de Solon excluoit du droit de bourgeoisie, non-seulement les enfans nés des concubines, mais encore tous ceux qui n'étoient pas nés d'un pere & d'une mere athéniens. Cette loi souffrit de tems en tems quelques atteintes de la part de ceux qui eurent assez de crédit pour faire aggréger leurs bâtards au corps des citoyens. Tel fut Themistocle, dont la mere étoit de Thrace. Periclès renouvella cette loi dans toute sa vigueur, & condamna cinq mille batards à être vendus comme esclaves ; mais la peste lui ayant enlevé ses enfans légitimes, il demanda lui-même au peuple la révocation de la loi en faveur d'un bâtard qu'il avoit d'Aspasie. On la lui accorda, & cet exemple eut des suites pernicieuses : bientôt il n'y eut plus de distinction entre les enfans légitimes & les batards, entre les femmes athéniennes & les étrangeres ; ce qui jetta le trouble & la confusion dans toutes les familles.
En France les batards ou fils naturels du roi sont princes, lorsqu'il s'en reconnoît le pere : ceux d'un prince ou d'un homme de qualité sont gentilshommes : mais ceux d'un gentilhomme ne sont que roturiers, & dans cette qualité ils sont sujets à la taille.
Suivant le droit romain, la mere succédoit à son enfant bâtard ; mais ce droit mettoit une grande différence entre les batards qu'il qualifioit nothi ou simplement batards & ceux qui étoient spurii.
La loi ne reconnoissoit point ces derniers, & leur refusoit jusqu'à la nourriture, parce qu'ils étoient les fruits d'une prostitution publique, & sans peres qui fussent bien connus pour tels par leurs meres même, par la raison que is non habet patrem, cui pater est populus. Les autres étant nés dans le concubinage : qui ressemble au mariage, héritoient de leurs meres, & pouvoient exiger des alimens de leurs peres naturels.
On les considéroit comme des créanciers domestiques, & des personnes que l'on devoit traiter avec d'autant plus d'humanité, qu'elles étoient les innocentes productions des crimes de leurs parens.
Les peres n'avoient point l'autorité paternelle sur leurs batards : parce que n'étant, disoit-on, peres que pour le plaisir, ce plaisir devoit être leur unique récompense.
Anciennement à Rome les enfans naturels étoient absolument exclus de la succession de leurs peres ab intestat, mais ils pouvoient être institués héritiers.
Les empereurs Arcadius & Honorius firent une exception en faveur des enfans naturels, & les admirent au douzieme de la succession à partager avec leur mere, quand il y avoit des enfans légitimes ; ensuite Justinien les admit à ce partage pour une moitié, & voulut qu'ils eussent un sixieme de l'hérédité ab intestat, lorsqu'il y avoit des enfans légitimes.
Les batards pouvoient être légitimés, soit par un mariage subséquent, ou par lettres de l'empereur. En France le roi seul a le droit de légitimer des batards, & de les rendre habiles à succéder. Voyez LEGITIMATION.
En Angleterre ce droit privatif appartient au roi & au parlement.
L'empereur Anastase permit aux peres de légitimer leurs bâtards par la seule adoption : mais ce privilége fut aboli par Justin & Justinien, de peur qu'une telle condescendance n'autorisât le concubinage.
Le pape a quelquefois légitimé des bâtards : le saint siége a même en certaines occasions usé de dispense par des considérations spirituelles, non-seulement envers des personnes dont la naissance n'étoit pas légitime, mais encore envers des bâtards adultérins, en permettant leur promotion à l'épiscopat.
Les bâtards non légitimés peuvent disposer de leurs biens par donations entre-vifs, & par testament ; ceux qu'un mariage subséquent a légitimés, sont dans le même état & joüissent des mêmes droits que ceux qui sont nés dans le mariage : mais les bâtards légitimés par lettres du prince, ne sont réputés ni légitimes, ni capables de succéder, qu'à l'égard des parens qui ont consenti à cette légitimation.
Le pape Clément VII. défendit par sa bulle à un certain prêtre de résigner son bénéfice à son bâtard.
Les armes d'un bâtard doivent être croisées d'une barre, d'un filet, ou d'une traverse, de la gauche à la droite. Ils n'avoient point autrefois la permission de porter les armes de leur pere.
Les bâtards ne peuvent être présentés à des bénéfices simples, ni admis aux moindres ordres, ni posséder plus qu'un simple bénéfice, à moins qu'ils n'en ayent obtenu dispense du pape, ni être revêtus d'aucune charge sans lettres du prince.
Un bâtard, suivant le droit d'Angleterre, ne peut être héritier de son pere à l'immeuble, & ne sauroit avoir d'autre héritier que l'hoir de son corps. L'enfant engendré par celui qui dans la suite en épouse la mere, est un bâtard en droit, quoiqu'il soit réputé légitimé par l'Eglise. Si celui qui vient d'épouser une femme, décede avant la nuit sans avoir couché avec elle, & qu'ensuite elle fasse un enfant, il en est censé le pere, & l'enfant est légitime. Si un époux ou une femme se marie ailleurs, les enfans qui naissent de cette polygamie pendant la vie de l'autre conjoint, sont bâtards. Si une femme ayant quitté son mari pour suivre un adultere, a de celui-ci un enfant, tandis que son mari est dans l'enceinte des quatre mers, l'enfant est légitime, & sera son héritier à l'immeuble. Si quelqu'un fait un bâtard dans le bailliage de Middelton, dans la province de Kent ses biens meubles & immeubles sont confisqués au profit du roi. (H)
BATARD DE RACAGE, c'est, en Marine, une corde qui sert à tenir & à lier un assemblage de bigots & de raques, dont le tout pris ensemble porte le nom de racage, qui sert à amarrer la vergue au mât. Voyez RACAGE. (Z)
* BATARD, en Musique, c'est ainsi que Brossard appelle le mode hyper-éolien, qui a sa finale en b fa si, & conséquemment sa quinte fausse ou diminuée diatoniquement ; ce qui le chasse du nombre des modes authentiques ; & le mode hyper-phrygien, dont la finale est en f ut fa, & la quarte superflue, ce qui l'ôte du nombre des modes plagaux.
BATARD, en Jardinage, se dit de toute plante sauvage, ou qui n'est pas cultivée, & même du fruit qu'elle donne.
BATARD, en Fauconnerie, se dit d'un oiseau qui tient de deux especes, comme du sacre & du lanier.
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BATARDEAU | sub. m. terme de riviere & de mer, c'est une espece de digue faite d'un double rang de pieux joints par des planches, & dont l'intervalle est rempli de terre ; on s'en sert pour détourner l'eau d'une riviere.
On donne aussi le nom de batardeau à une espece d'échafaud fait de quelques planches qu'on éléve sur le bord d'un vaisseau, pour empêcher l'eau d'entrer sur le pont, lorsqu'on couche le vaisseau sur le côté pour le radouber. (Z)
BATARDEAU (le) est, dans la Fortification, un massif de maçonnerie qui traverse toute la largeur du fossé : on le place ordinairement vis-à-vis les angles saillans des bastions & des demi-lunes, & sur le prolongement des capitales de ces ouvrages.
On fait des bâtardeaux dans les fossés d'une place, pour en retenir l'eau & empêcher qu'elle ne s'écoule par les endroits du fossé qui se trouvent plus bas que les autres.
Pour qu'un bâtardeau soit bon & solide, il doit avoir depuis 15 piés jusqu'à 18 piés d'épaisseur. On le construit vis-à-vis les angles saillans des ouvrages de la fortification ; parce que dans tout autre endroit il pourroit servir de couvert à l'ennemi dans le passage du fossé contre le feu de la place. Sa partie supérieure forme une espece de toît en dos-d'âne, & elle se nomme la cape du bâtardeau. On construit sur le milieu de la cape une petite tour d'environ 6 ou 7 piés de hauteur, & d'autant de diametre ; elle sert à empêcher qu'on marche sur la cape, & elle s'oppose ainsi à la désertion des soldats. Voyez un bâtardeau en D, Pl. IV. de Fortific. fig. 3. (Q)
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BATARDIERE | S. f. (Jardinage) est un lieu de passage ; c'est la place dans un jardin où l'on transplante des arbres tout greffés tirés de la pépiniere, & que l'on y met en réserve.
Pour les mieux lever en motte dans la suite, on les plante à 6 ou 7 piés de distance l'un de l'autre sur des alignemens tirés au cordeau.
Les fruits à noyaux sont ordinairement séparés d'avec ceux à pepin.
On les leve pour être transportés trois ans après avoir été greffés dans la pépiniere.
On laboure & on taille ces arbres, qui donnent souvent de très-beaux fruits. (K)
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BATARDIS | (DROIT DE) subst. f. terme de Jurisprudence, est le droit qu'ont les souverains en France, & en certains cas les seigneurs haut-justiciers, de s'approprier la succession des bâtards morts sans enfans & sans avoir disposé de leur bien par donation ou ordonnance de derniere volonté. Voyez BATARD. (H)
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BATATE | TOPINAMBOUR ou POMME DE TERRE, s. f. (Hist. nat. & Jard.) On en distingue de trois especes ; celle d'Espagne, celle de la Virginie, & celle du Canada. La premiere a passé de Newfoundland dans les jardins d'Espagne. Elles ont toutes les trois à-peu-près les mêmes propriétés médicinales.
On doit les choisir grasses, bien nourries, tendres, rougeâtres en-dehors, blanches en-dedans, & d'un goût approchant de celui de l'artichaut. Elles nourrissent, elles humectent beaucoup, elles adoucissent les acrimonies de la poitrine : mais elles engendrent des humeurs grossieres, & excitent des vents.
Ces fruits ou plûtôt ces racines sont émollientes, & bonnes pour prévenir ou dissiper les maladies qui proviennent de la rigidité des fibres ; c'est un aliment convenable à ceux qui font beaucoup d'exercice, aux gens bilieux, & à tous ceux dont les humeurs sont trop acres & trop agitées.
BATATE CATHARTIQUE ou CACAMOTE HANAQUILONI. (Medecine) Les racines prises à la dose de deux onces sur le point de se mettre au lit, purgent doucement & sans danger. On dit que cette batate est douce & agréable au goût, & ne le cede en rien à nos pois. (N)
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BATAVES | S. m. pl. (LES) Hist. mod. & Géog. Il est fait mention de ces peuples dans les commentaires de César, & autres écrivains anciens. Ils occupoient une partie de la Hollande méridionale, une partie du duché de Gueldre & de la seigneurie d'Utrecht. On entend aujourd'hui par Bataves les Hollandois.
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BATAVIA | (Géog.) ville d'Asie, dans l'île de Java, au royaume de Bantan. Long. 124. 30. latit. mérid. 6. 10.
* BATAVIA, (Géog.) nom d'une riviere de la terre Australe, dans la province appellée Carpentaria, vers la mer.
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BATAYOLLES | S. f. pl. (Marine) ce sont des pieces de bois, ou gros bâtons quarrés d'environ quatre pouces, & de la hauteur de trois piés qui sont attachées perpendiculairement par le dedans aux bacalas. Voyez la Planche II. n°. 19. (Z)
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BATE | S. f. en terme de Fourbisseur, est cette partie polie & luisante d'un corps d'épée, sur laquelle on monte la moulure. V. CORPS D'EPEES & MOULURE.
BATE d'une boîte de montre. Voyez BOITE DE MONTRE, & la fig. 12. Pl. XII. de l'Horlogerie.
BATE, en terme de Metteur-en-oeuvre ; c'est la partie élevée perpendiculairement sur le fond de la boîte ou tabatiere, qui en fait les côtés & le contour, & qui forme la cuvette. Voyez CUVETTE & BOITE.
BATES ou ROUELLES, terme de Potier-d'étain ; ce sont des plaques d'étain jettées en moule toutes plates ; elles servent à faire des pieces de rapport. Voyez PIECES DE RAPPORT.
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BATEAU | BATEAUX, s. m. On nomme ainsi, en terme de Marine, diverses sortes de petits vaisseaux que l'on mene à la voile & à la rame, mais qui sont faits plus matériellement & plus forts que les chaloupes : l'on a aussi de grands bateaux portant mâts, voiles & gouvernail, & qui ne peuvent aller qu'à la voile.
Il y a différentes especes de bateaux, auxquels on donne différens noms, suivant leur forme, leur usage, & les lieux où l'on s'en sert. Ainsi on peut renfermer sous ce nom, la chaloupe, la barque, l'esquif, la canot, le paquebot, le coche-d'eau, le bac, le flibot, la patache, la gondole, le ponton, la felouque, le bateau marnois, le bateau-foncet, le chaland, le bateau de selle, le bateau de poste, le bachot, la nacelle, le batelet, &c. & quelques autres.
BATEAUX A EAU, (Marine) Les bateaux ou barques à eau sont destinés en Hollande à amener de l'eau douce dans les lieux où il n'y en a pas, comme l'on fait à Amsterdam pour les brasseurs de biere, & quand l'eau de pluie manque : on s'en sert encore pour aller querir de l'eau de mer dont on fait du sel. Ceux qui amenent de l'eau douce sont fort plats, & enfoncent dans l'eau presque jusqu'au bord, ou du moins à un pied du bord, lorsqu'ils sont chargés : ils ont un peu de relevement à l'avant & à l'arriere, & il y a des trous dans le carreau par où s'écoule l'eau qui y tombe ou qui y entre de dehors ; les coutures en sont fort bien calfatées ou goudronnées : on y fait entrer l'eau par un trou qui est dessous, qu'on bouche quand le bateau est plein.
Ceux qui amenent de l'eau salée, sont faits à la maniere des semaques, & mâtés en fourches. (Z)
* BATEAUX MAIRES ; c'est ainsi qu'on appelle ceux qui sont destinés au transport des sels.
* BATEAUX DE POSTE ; c'est ainsi qu'on appelle ceux qui sont établis sur la Loire & sur le Rhone. Ils sont étroits & plats, & font une très-grande diligence.
* BATEAUX DE SELLES ; c'est ainsi qu'on appelle à Paris de grands bateaux longs, plats, & garnis à leurs extrémités de deux roues à godets, qui puisent de l'eau & la jettent dans des canaux qui la conduisent sur des bancs & ailleurs où peuvent en avoir besoin les blanchisseuses, à l'usage desquelles sont ces bateaux : elles y vont laver leur linge en payant.
* BATEAUX (ais de) ; ce sont ceux qui proviennent du déchirement des vieux bateaux. Les menuisiers les achetent. & s'en servent par-tout où le bois neuf n'est pas nécessaire. Le commerce en est considérable dans toutes les grandes villes où il y a des ports.
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BATELÉE | S. f. (Marine) terme dont on se sert sur les rivieres, pour dire charge entiere de bateau.
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BATELIERS | S. m. pl. (Marine) on donne ce nom à ceux qui conduisent les bateaux sur les rivieres. (Z)
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BATEMBURGIQUES | S. m. pl. (Hist. mod.) nom de coureurs, qui dans le seizieme siecle pillerent les églises, renverserent les autels, & firent beaucoup de dégâts sous la conduite d'un soldat séditieux.
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BATENBOURG | (Géog.) ville des Provinces-Unies au duché de Gueldre sur la Meuse, entre Ravenstein & Megen.
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BATER un cheval | un mulet, ou un âne, (Maréch. & Manege.) c'est lui attacher le bât sur le dos : le débâter, c'est lui ôter le bât de dessus le dos. (V)
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BATH | BATHUS, ou EPHA, (Hist. anc.) mesure des Hébreux, qui contenoit la dixieme partie du chore ou gomor, c'est-à-dire vingt-neuf pintes, chopine, demi-septier, un poisson, & cette fraction de pouce 457158/04469.
Quelques critiques ont imaginé qu'il y avoit chez les Hébreux deux sortes de baths ; l'un sacré, qui ne servoit qu'au temple ; & l'autre ordinaire, usité dans le commerce, & plus petit que le premier. Le premier, disent-ils, contenoit un bath & demi ordinaire ; ce qu'ils essayent de prouver par ce qu'il est dit dans le III. liv. des Rois, ch. vij. v. 26. que la mer d'airain de Salomon contenoit deux mille baths ; & qu'on lit dans les Paralipomenes, liv. II. chap. jv. v. 5 qu'elle tenoit trois mille mesures ou trois mille baths. Mais on concilie aisément ces deux passages, en disant que la coupe ou cuvier de la mer d'airain contenoit deux mille baths, comme le dit le III. livre des Rois, & que le pié de ce vase qui étoit creux en contenoit encore mille, ce qui faisoit en tout trois mille, comme le portent les Paralipomenes. Calmet, Diction. de la Bible, tom. I. pag. 299. Voyez MER D'AIRAIN. (G)
* BATH, (Géog.) ville d'Angleterre en Sommersetshire, sur l'Avon. Long. 15. 10. lat. 51. 20.
BATH. (eaux de) Voyez EAU.
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BATH-KOL | c'est-à-dire fille de la voix, (Hist. anc.) c'est ainsi que les Juifs appellent un oracle, dont il est souvent fait mention dans leurs livres, sur-tout dans le Talmud. L'auteur du supplément aux cérémonies des Juifs, a remarqué qu'ils admettent différentes sortes d'inspirations, & qu'ils croyent communément que la prophétie ou inspiration divine a duré chez eux jusque vers la quarantieme année du second temple, à laquelle succéda une autre sorte d'inspiration, qu'ils nomment bath-kol. Les Rabbins, comme Buxtorf l'a observé dans son grand dictionnaire, disent qu'après la mort d'Aggée, de Zacharie, & de Malachie, le saint-Esprit se retira d'Israel ; mais que cependant ils eurent l'usage de la fille de la voix : & ils ne manquent point d'histoires pour appuyer cette rêverie. Voyez Buxtorf sur le mot bath-kol. (G)
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BATHA | (Géog. anc. & mod.) petite ville du royaume d'Alger en Barbarie, dans la province de Telensin, sur la riviere de Mina. Quelques-uns la prennent pour l'ancienne Vaga ou Vago.
* BATHA, BATH, BACHIA, (Géog.) ville de Hongrie, capitale du comté du même nom, sur la rive occidentale du Danube, à cinq lieues du confluent de la Drave. Long. 37. lat. 46. 40.
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BATHANÉE | (Géog. sainte) contrée de la Thraconite dans la tribu de Manassé, au-delà du Jourdain.
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BATHASECK | (Géog.) ville de la basse Hongrie dans le comté de Tolna, sur la Sarwitze. Il y en a qui prétendent que c'est la même ville que Batha. Voyez BATHA.
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BATHMONSTER | (Géog.) ville de Hongrie au comté de Bath, sur la rive orientale du Danube.
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BATHOS | (Géog. & Myth.) vallée de la Macédoine, près du fleuve Alpha, où l'on croyoit que les géans avoient combattu contre les dieux : on y faisoit des sacrifices au bruit d'éclairs & de tonnerres artificiels.
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BATI | S. m. c'est ainsi qu'on appelle, en Menuiserie, les battans, les montans, & traverses d'une partie de lambris d'une porte ou d'un guichet de croisée assemblés, soit que les panneaux y soient ou non.
BATI, chez les Tailleurs ; c'est le gros fil qui a servi à bâtir un habit. Voyez BATIR. Ainsi ils disent, ôtez le bâti de cet habit, pour ôtez le fil avec lequel on en a assemblé les morceaux.
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BATICALA | (Géog.) royaume des Indes sur la côte de Malabar, au nord du royaume de Canara. Long. 95. 50. lat. 14. 8.
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BATICAL | ou MATICALO, (Géog.) ville d'Asie dans la partie orientale de l'île de Ceylan, capitale du royaume de même nom, sur la riviere de Batecalo. Long. 99. 53. lat. 7. 55.
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BATIER | S. m. ouvrier qui fait & vend des bâts de mulets & autres bêtes de somme. Les Bâtiers font partie de la communauté des Selliers. Voy. SELLIER.
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BATIMENA | (Géog.) royaume de la presqu'île des Indes au-delà du Gange, dans le Malabar, vers les montagnes & le royaume de Cochin.
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BATIMENT | S. m. (Architect.) on entend sous ce nom tous les lieux propres à la demeure des grands & des particuliers, aussi-bien que les édifices sacrés, places publiques, portes de ville, arcs-de-triomphe, fontaines, obélisques, &c. construits tous de pierre, ou de pierre & de bois de charpente, & dans lesquels on employe le marbre, le bronze, le fer, le plomb, & autres matieres. Ces différens bâtimens passent pour réguliers ou pour irréguliers, selon la forme des plans qui les composent. Ainsi on dit qu'un bâtiment est régulier, lorsque son plan est quarré, ou de forme oblongue, pourvû que ses côtés opposés, ses avant-corps, pavillons & arriere-corps, soient égaux, & bâtis avec symmétrie : au contraire on dit qu'il est irrégulier, lorsque son plan n'est pas renfermé dans des lignes paralleles entr'elles, tel qu'est un plan triangulaire, ou celui qui n'a qu'un pavillon, qu'une aîle à l'une de ses extrémités, & qui n'en a point à ses côtés opposés.
Ces mêmes bâtimens prennent encore différens noms, eu égard à leur situation : on les appelle isolés, lorsqu'ils sont entourés de rues, de jardins, ou de grandes cours, comme est celui de l'Observatoire ; flanqués ou adossés, lorsqu'ils touchent à quelque autre grand édifice, tels que ceux qui sont mitoyens au Palais-royal ou au Luxembourg ; enfoncé, lorsque leur sol est plus bas que la rue, ou les maisons adjacentes, tels que ceux qui sont construits dans les rues basses du rempart, à la porte Saint-Honoré, Montmartre, Saint-Denys, &c.
On ajoûte ordinairement au terme de bâtiment, celui de son usage en particulier ; par exemple, on appelle bâtimens civils, ceux qui servent de demeures aux princes, aux ministres, aux prélats, & en général ceux qui sont rélatifs à la société ; au contraire on appelle bâtimens militaires, ceux qui sont consacrés à l'art de la guerre, tels que les portes de ville, les arsenaux, casernes, bastions, guérites, &c. on appelle bâtimens hydrauliques, ceux qui sont destinés à contenir les machines pour élever les eaux, soit pour l'utilité publique, comme celui du pont Notre-Dame ; soit pour les embellissemens des maisons royales, tels que ceux de la Samaritaine & de Marly : bâtimens publics, ceux qui sont destinés à rendre la justice, ou à l'usage du public, comme le Palais à Paris, l'Hôtel-de-ville, les fontaines de Grenelle & des Innocens, ou autres de cette espece : bâtimens du commerce, ceux où les négocians s'assemblent certain jour de la semaine, pour s'y tenir en correspondance avec les étrangers ; c'est ce qu'on appelle bourse, banque, &c.
Bâtimens de Marine, sont ceux qui sont destinés à la construction des vaisseaux, dans lesquels sont compris les magasins, arsenaux, corderies, aussi-bien que ceux où l'on tient ces vaisseaux en sûreté, comme les ports, moles, bassins, &c. bâtimens rustiques & champêtres, ceux qui à la campagne sont destinés à contenir les bestiaux, les grains, les jardins potagers, vergers légumiers, connus sous le nom de fermes ; ils sont ordinairement voisins de quelque terre considérable, enfin on appelle bâtimens particuliers, ceux qui sont destinés à la demeure des habitans d'une ville ou d'une province, qui n'ont point d'autre objet qu'une commodité relative à l'état & à la condition de leur propriétaire.
On dit aussi d'un bâtiment qu'il est triple, double, demi-double, ou simple, lorsque dans sa profondeur entre cour & jardin, il est partagé par trois, deux, une & demie, ou une seule piece ; comme on dit bâtiment en aîle ; lorsque l'on pratique ou ajoûte après-coup à un bâtiment un ou plusieurs étages, en retour de sa façade principale.
On dit encore qu'un bâtiment est feint, lorsqu'on veut parler d'une aîle affectée contre un mur mitoyen : sans autre utilité que la symmétrie, soit que cette affectation se fasse en peinture ou en maçonnerie, comme celle que l'on a pratiquée à l'hôtel de Beauvilliers à Paris ; de même on appelle bâtiment ruiné, celui qui par vétusté ne laisse plus que quelques fragmens de son ancienne ordonnance, tels que les ruines de Tivoli, ou la plûpart des anciens châteaux aux environs de Paris, dont il ne reste plus que quelques vestiges.
Des parties essentielles qui composent la plûpart des bâtimens dont nous venons de parler, on en distingue trois de préférence, savoir la solidité, la commodité, & l'ordonnance ; la premiere a pour objet la connoissance de l'emploi & de la qualité des matériaux, & doit être considérée comme la plus importante partie du bâtiment, connue sous le nom de construction ; la seconde consiste dans l'art de distribuer les plans selon la dignité du personnage qui fait bâtir, connue sous le nom de distribution ; la troisieme consiste dans l'art de donner de la proportion, de l'harmonie & de l'accord aux parties d'un bâtiment, pour que réunis ensemble ils concourent à faire un beau tout ; & c'est ce qu'on appelle décoration. Voyez la définition de chacun des termes dont on vient de parler à leurs différens articles. (P)
BATIMENT, (Marine) on entend ordinairement par ce mot toutes sortes de navires ou vaisseaux, depuis le plus petit jusqu'au plus grand, lorsqu'ils ne sont pas vaisseaux de guerre. Il y a cependant beaucoup de gens qui l'attribuent également aux vaisseaux de guerre & aux vaisseaux marchands.
Bâtiment ras, c'est un bâtiment qui n'est pas ponté.
Bâtiment délicat, c'est un navire foible de bois. (Z)
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BATIR | v. a. & n. terme d'Architecture, se dit & de la dépense que fait un particulier pour élever ou restaurer un bâtiment, & du travail de l'architecte chargé de la conduite des ouvrages. Aussi dit-on de quelqu'ouvrage d'importance, un tel prince a bâti tel édifice, & que tel architecte a bâti tel monument, parce qu'il en a donné les desseins.
On dit encore qu'un entrepreneur bâtit bien, lorsque ses bâtimens sont construits avec choix de bons matériaux, & avec le soin & la propreté que l'art demande. Voyez BATIMENT. (P)
BATIR ou BASSETIR, terme de Chapelier, c'est façonner le feutre sur le bassin pour en former les quatre capades : quand elles ont été bien marchées & feutrées, on les joint ensemble & on en compose un tout qui ressemble assez à une chauffe à hypocras, après quoi on foule, & on dresse le chapeau sur une forme de bois avec l'avaloire, la piece, & le choque. Voyez CHAPEAU, AVALOIRE, PIECE, & CHOQUE.
BATIR, terme de Tailleur, qui signifie assembler les pieces d'un habit en les cousant à grands points avec du gros fil, avant que de les coudre à demeure avec de la soie ou du fil plus fin.
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BATISSOIR | S. f. instrument de Tonnellerie ; c'est un cercle de fer plus ou moins grand selon les ouvrages, dont le Tonnelier se sert pour assembler les douves d'une futaille qu'il veut construire.
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BATISTE | S. f. (Comm.) toile de lin fine & blanche qui se fabrique en Flandre & en Picardie : on en distingue de trois sortes ; il y a la batiste claire, la moins claire, & la hollandée ; les deux premieres ont deux tiers ou trois quarts & demi de large, & se mettent par pieces de six à sept aunes ; la hollandée porte deux tiers de large, & douze à quinze aunes de long. De quelque longueur que les ouvriers fassent les batistes claires, les courtiers les réduisent à douze aunes, & ces douze aunes en deux pieces de six. Les morceaux enlevés de ces pieces se nomment coupons, s'ils sont de deux aunes juste ; s'ils ont plus ou moins de deux aunes, on les bâtit, & on les vend comme la piece. Les batistes viennent des manufactures, enveloppées dans des papiers bruns battus ; chaque paquet est d'une piece entiere, ou de deux demi-pieces : on en emplit des caisses de sapin, dont les ais sont assemblés avec des chevilles au lieu de clous, ce qui est très-commode ; car en cloüant les ais, on pourroit aisément percer les pieces. L'on fait avec cette toile des fichus, des mouchoirs, des surplis, &c.
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BATMA | ou BATTEMENT, s. m. (Commerce) poids de Turquie. Il y en a deux sortes ; l'un est composé de six ocquos, chaque ocquo pesant trois livres trois quarts de Paris ; ensorte que ce premier batman est de vingt-deux livres & demie.
L'autre est pareillement composé de six ocquos ; mais chacun de ces ocquos ne pese que quinze onces, qui est trois quarts moins que le premier : ce dernier batman ne revient donc qu'à cinq livres dix onces.
Le quintal, qui est aussi un poids de Turquie, pese trente batmans. Voyez QUINTAL & OCQUO.
Batman est aussi un poids de Perse ; il y en a de deux sortes, ainsi qu'en Turquie ; l'un qu'on nomme batman de chahi ou cheray, & qui est le poids du roi ; & l'autre qui s'appelle batman de Tauris, du nom d'une des principales villes de Perse.
Le batman de chahi sert à peser tant les choses nécessaires à la vie, que les charges des bêtes de somme : il pese douze livres & demie de Paris.
Celui de Tauris, qu'on ne met en usage que pour les marchandises de négoce, pese moitié moins que le batman de chahi, & n'est par conséquent que de six livres un quart.
Telle est la proportion de ces poids avec les nôtres, selon Tavernier : mais Chardin y met quelque différence ; car il ne fait le batman de Tauris que de cinq livres quatorze onces de Paris, & le batman de chahi, ou le batman du roi, que de douze livres douze onces. (G)
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BATOCHIRE | (Géog.) partie de l'île de Gilolo, l'une des Moluques.
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BATOCK | ou BATOGGI, s. m. plur. (Hist. mod.) sont deux bâtons minces dont on se sert à Moscow pour battre les criminels jusqu'à la mort : lorsque quelqu'un est condamné à ce supplice, on lui ôte ses habits, & on ne lui laisse que sa chemise ; un des exécuteurs s'assied sur sa tête, & un autre sur ses jambes, tandis qu'un troisieme frappe jusqu'à ce que le patient ait reçû la dose de coups prescrite par le magistrat.
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BATON | S. m. se dit en général d'un morceau de bois rond, tourné au tour ou non tourné, & s'applique à beaucoup d'autres choses qui ont la même forme : ainsi on dit en Tabletterie, un bâton d'ivoire, un bâton d'écaille, pour un morceau d'ivoire ou d'écaille rond ; chez les Marchands de bois, un bâton de coteret, pour un morceau de menu bois de chauffage, fait des petites branches des arbres ; chez les Epiciers, un bâton de casse, un bâton de cire d'Espagne ; chez les Gantiers, un bâton à gant ; voyez plus bas, un bâton de jauge, pour l'instrument qui sert à mesurer les tonneaux ; un bâton de croisure, chez les Hautelissiers, pour la baguette qui tient leurs chaînes croisées ; chez les Pâtissiers & Boulangers, un bâton, pour le morceau de bois que l'on met en-travers sur le pétrin, & sur lequel on meut le sas pour en tirer la farine ; chez les Fondeurs, un bâton, pour le rouleau qui leur sert à corroyer ensemble le sable & la terre qui entrent dans la façon de leurs moules. Voyez la suite de cet article.
BATON, s. m. (Hist. anc. & mod.) est un instrument dont on se sert ordinairement pour s'appuyer en marchant. Le cardinal Bona observe dans son traité des Liturgies, qu'autrefois ceux qui se servoient de bâton dans l'église pour s'appuyer, étoient obligés de le quitter, & de se tenir debout seuls & droits dans le tems qu'on lisoit l'évangile, pour témoigner leur respect par cette posture, & faire voir qu'ils étoient prêts d'obéir à Jesus-Christ, & d'aller par-tout où il leur commanderoit d'aller.
On se sert souvent aussi d'un bâton comme d'une espece d'arme naturelle, offensive & défensive. Les Lacédémoniens ne portoient jamais d'épée en tems de paix, mais se contentoient de porter un bâton épais & crochu qui leur étoit particulier.
S. Evremont observe que chez les Romains les coups de bâton étoient une façon modérée de punir les esclaves, & qu'ils les recevoient par-dessus leurs habits.
Les Maîtres-d'armes & les gens susceptibles du point d'honneur, croyent qu'il est bien plus honteux de recevoir un coup de bâton qu'un coup d'épée, à cause que l'épée est un instrument de guerre, & le bâton un instrument d'outrage.
Les lois de France punissent bien séverement les coups de bâton. Par un reglement des maréchaux de France, fait en 1653, au sujet des satisfactions & réparations d'honneur, il est ordonné que quiconque en frappera un autre du bâton, sera puni par un an de prison, qui pourra être modéré à six mois en payant 3000 livres, applicables à l'hôpital le plus prochain : outre cela l'aggresseur doit demander pardon à genoux à l'offensé, &c. tout prêt à recevoir de lui un égal nombre de coups de bâton ; & il y a certains cas où ce dernier peut être contraint de les donner, quand même il auroit trop de générosité pour s'y résoudre de lui-même.
Par un autre reglement des maréchaux, de l'année 1679, celui qui frappe du bâton après avoir reçû des coups de poing dans la chaleur de la dispute, est condamné à deux mois de prison ; & à quatre années, s'il a commencé à frapper à coups de poing.
La loi des Frisons ne donne qu'un demi-sou de composition à celui qui a reçû des coups de bâton, & il n'y a si petite blessure pour laquelle elle n'en accorde davantage. Par la loi Salique, si un ingénu donnoit trois coups de bâton à un ingénu, il payoit trois sous ; s'il avoit fait couler le sang, il étoit puni comme s'il eût blessé avec le fer, & il payoit quinze sous. La peine & l'indemnité se mesuroient sur la grandeur des blessures. La loi des Lombards établit différentes compositions pour un coup, pour deux, trois, quatre : aujourd'hui un coup en vaut mille.
La constitution de Charlemagne, insérée dans la loi des Lombards, veut que ceux à qui elle permet le duel, combattent avec le bâton ; peut-être fut-ce un ménagement pour le clergé ; ou que, comme on entendoit l'usage des combats, on voulût les rendre moins sanguinaires. Le capitulaire de Louis le Débonnaire donne le choix de combattre avec le bâton ou avec les armes : dans la suite il n'y eut que les serfs qui combattissent avec le bâton.
Déja je vois naître & se former les articles particuliers de notre point d'honneur, dit l'auteur de l'esprit des lois, tome II. p. 202. L'accusateur commençoit par déclarer devant le juge qu'un tel avoit commis une telle action, & celui-ci répondoit qu'il en avoit menti : sur cela le juge ordonnoit le duel. La maxime s'établit que lorsqu'on avoit reçu un démenti, il falloit se battre.
Quand un homme avoit déclaré qu'il combattroit, il ne pouvoit plus s'en départir sans être condamné à une peine. Autre regle qui s'ensuivit ; c'est que quand un homme avoit donné sa parole, l'honneur ne lui permettoit plus de se rétracter.
Les gentilshommes se battoient entr'eux & avec leurs armes ; les vilains se battoient à pié & avec le bâton. Le bâton devint donc un instrument outrageant, parce que celui qui en avoit été frappé, avoit été traité comme un vilain.
Il n'y avoit que les vilains qui combatissent à visage découvert, ainsi il n'y avoit qu'eux qui pussent recevoir des coups au visage : de-là vînt qu'un soufflet fut une injure qui devoit être lavée par le sang, parce que celui qui l'avoit reçu, avoit été traité comme un vilain.
Voilà comment par des degrés insensibles se sont établies les lois du point d'honneur, & avant elles les différences entre les instrumens contondans. Le bâton est devenu une arme deshonorante quelquefois pour celui qui s'en sert, & toûjours pour celui avec qui l'on s'en est servi.
BATON, (Hist. mod.) est quelquefois une marque de commandement, & un attribut de dignité ou d'emploi : tels sont les bâtons de maréchaux de France, de maîtres d'hôtel, de capitaines des gardes, d'exempts, &c. Celui de maréchal est fleurdelisé ; le roi l'envoye à celui qu'il éleve à ce grade militaire. Les maîtres d'hôtel, les capitaines des gardes, les exempts, &c. peuvent être méconnus pour ce qu'ils sont, s'ils s'exposent à l'exercice de leurs charges sans leurs bâtons : c'est-là l'usage principal du bâton.
BATON de gardes de nuit qui courent les rues de Londres en criant l'heure qu'il est. Celui qui tient le manoir de Lambourn dans le comté d'Essex, doit le service du bâton, c'est-à-dire qu'il est obligé de fournir une charge de paille sur une charrette tirée à six chevaux, deux cordes, deux hommes armés de pié en cap, pour garder le bâton quand on le porte à la ville d'Aibridge, &c. Camb. tit. Essex.
BATON TRAINANT, (Hist. mod.) ou BATON A QUEUE. Edoüard I. roi d'Angleterre, rendit sous ce titre un édit contre les usurpateurs des terres, lesquels, pour opprimer les propriétaires véritables, transportoient ces terres usurpées à de grands seigneurs ; contre ceux qu'on loüoit pour maltraiter & outrager les autres ; contre les violateurs de la paix, ravisseurs, incendiaires & duellistes ; contre ceux qui vendoient à faux poids & à fausses mesures, & autres malfaiteurs. Cette espece d'inquisition fut exécutée avec tant de rigueur, que les amendes qui en provinrent, apporterent au roi des thrésors immenses.
On appelloit juges à bâton traînant, ceux qui étoient chargés de l'exécution de cet édit, soit par rapport à la maniere rigoureuse & sommaire dont ils faisoient leurs exécutions, soit par rapport au bâton qu'ils portoient comme une marque de leur autorité, & qu'ils tenoient à la main en jugeant les malfaiteurs. (G)
* BATON, en Mythol. on distingue particulierement l'augural & le pastoral : l'augural, appellé par les Latins lituus, étoit façonné en crosse par le bout ; il servoit à l'augure pour partager le ciel dans ses observations. Celui de Romulus avoit de la réputation chez les Romains. Ceux d'entr'eux qui ne se piquoient pas d'une certaine force d'esprit, croyoient qu'il avoit été conservé miraculeusement dans un grand incendie. Quintus tire de ce prodige, & de la croyance générale qu'on lui accordoit, une grande objection contre le pyrrhonisme de son frere Cicéron, qui n'y répond que par des principes généraux, dont l'application vague seroit souvent dangereuse : ego Philosophi non arbitror testibus uti, qui aut casu veri, aut malitia falsi fictique esse possunt. Argumentis & rationibus oportet, quare quidque ita sit, docere ; non eventis, iis praesertim quibus mihi non liceat credere... omitte igitur lituum Romuli, quem maximo in incendio negas potuisse comburi.... Nil debet esse in Philosophia commentitiis fabellis loci. Illud erat Philosophi, totius augurii primum naturam ipsam videre, deinde inventionem, deinde constantiam... quasi quidquam sit tam valde, quàm nihil sapere vulgare ? aut quasi tibi ipsi in judidicando placeat multitudo.
Cicéron a beau dire, il y a cent mille occasions où la sorte d'examen qu'il propose ne peut avoir lieu ; où l'opinion générale, la croyance non interrompue & la tradition constante, sont des motifs suffisans ; où le jugement de la multitude est aussi sûr que celui du philosophe. Toutes les fois qu'il ne s'agira que de se servir de ses yeux, sans aucune précaution antérieure, sans le besoin d'aucune lumiere acquise, sans la nécessité d'aucune combinaison ni induction subséquente, le paysan est de niveau avec le philosophe. Celui-ci ne l'emporte sur l'autre que par les précautions qu'il apporte dans l'usage de ses sens ; par les lumieres qu'il a acquises, & qui bientôt ôtent à ses yeux l'air de prodige à ce qui n'est que naturel ; ou lui montrent comme surnaturel ce qui est vraiment au-dessus des forces de la nature, qui lui sont mieux connues qu'à personne ; par l'art qu'il a de combiner les expériences, d'évaluer les témoignages, & d'estimer le degré de certitude ; & par l'aptitude qu'il a de former des inductions ou de la supposition ou de la vérité des faits.
Le bâton pastoral est de deux sortes : c'est ou celui qu'on voit dans les monumens anciens à la main des Faunes, des Sylvains, en un mot des dieux des bois & des forêts ; il est long, noüeux, & terminé en crosse : ou c'est la crosse même que nos évêques portent à la main dans les jours de cérémonie. C'est un assemblage de différentes pieces façonnées d'or & d'argent, entre lesquelles on peut distinguer le bec de corbin ou la crosse d'en-haut, les vases, les fonds de lanterne, les dômes, les douilles, & les croisillons.
Il y a encore des bâtons de chantre & de confrairie. Le bâton de confrairie n'est autre chose qu'un long morceau de bois tourné au tour, façonné, doré ou argenté, à l'extrémité duquel est fixée l'image du patron de la confrairie.
Le bâton de chantre en usage dans quelques cathédrales, ressemble assez au bâton pastoral, quant à la richesse, & même quant à la forme, à l'exception qu'il n'est pas terminé en haut par la crosse, mais qu'il a quelque autre forme relative, soit à la dignité du chantre, soit aux prérogatives de l'église.
BATON, en terme de Blason, sorte de bande qui n'a qu'un tiers de la largeur ordinaire. Voyez BANDE.
Le bâton ne va pas d'un côté à l'autre de l'écusson, comme fait la bande ou l'écharpe ; mais il est coupé court en forme de tronçon : il est d'usage pour marquer la bâtardise. (V)
BATONS A DEUX BOUTS ; ce sont de longs bâtons que les gardes des forêts & des parcs, &c. portent comme une marque de leur emploi, & dont ils se servent aussi comme d'une arme.
BATONS ou BACULI, en Pharmacie, compositions façonnées en cylindre, ayant la figure de bâtons. C'est ainsi que l'on figure les magdaleons des emplâtres officinales.
C'est sous cette figure que l'on met les chandelles galeniques ou bougies médicamenteuses. Voyez CHANDELLE, BOUGIE.
C'est aussi sous cette forme que l'on réduit certaines préparations bechiques, ou que l'on ordonne dans la toux, comme le suc de réglisse de Blois, les tablettes ou bâtons de sucre d'orge. Voyez TABLETTES, SUC DE REGLISSE. (N)
BATON d'Arpenteur, voyez EQUERRE d'Arpenteur. (E)
BATON DE JACOB, instrument dont on se sert en mer pour mesurer la hauteur des astres : on l'appelle autrement arbalestrille. Voyez ARBALESTRILLE. (T)
BATON A MECHE, (Marine) c'est une meche qu'on entretient toûjours brûlante sur le château-d'avant.
BATON DE PAVILLON ou D'ENSEIGNE, (Marine) c'est un petit matereau ou longue gaule de sapin ou d'autre bois leger, qui sert à arborer le pavillon. Voyez -en la figure & la position dans la Pl. I. à la lettre G.
BATON DE GIROUETTE, c'est un matereau très-petit, ou gaule, dans laquelle est plantée la verge de fer qui tient la giroüette. Voyez à la Planche I. les giroüettes marquées g.
BATON DE FLAMME, c'est un bâton qui n'est long qu'autant que la flamme est large par le haut. C'est ce bâton qui la tient au haut du mât.
BATON DE VADEL, BATON ou MANCHE DE GUIPON, (Marine) ce sont certains bâtons où l'on attache les bouchons d'étoupe ou de penne, dont se sert le calfateur pour goudronner ou braier le vaisseau. (Z)
BATONS DE NEPER, voyez NEPER.
BATON, en Architecture, c'est une moulure usitée dans la base des colonnes. Voyez TORE.
BATON, en Musique, est une barre épaisse qui traverse perpendiculairement une ou plusieurs lignes de la portée, & qui, selon ses différentes longueurs, selon le plus ou le moins de ces lignes qu'elle embrasse, exprime un plus grand ou moindre nombre de mesures qu'on doit compter en silence.
Anciennement les bâtons représentoient autant de différentes valeurs de notes, depuis la ronde jusqu'à la maxime qui en valoit huit, & dont la durée en silence s'évaluoit par un bâton, qui partant d'une ligne, traversoit trois intervalles, & alloit joindre la quatrieme ligne.
Aujourd'hui le plus grand bâton est de quatre mesures ; il faut que partant d'une ligne, il traverse la suivante & arrive à la troisieme ainsi :
On le répete une fois, deux fois, ou autant de fois qu'il faut pour exprimer huit mesures, ou douze, ou tout autre multiple de quatre ; & l'on ajoûte ordinairement au-dessus un chiffre qui dispense de compter la valeur de tous ces bâtons. Ainsi ces marques indiquent un silence de seize mesures.
Le plus petit bâton est de deux mesures, & s'étend seulement d'une ligne à sa voisine, en cette sorte,
Les autres moindres silences, comme d'une mesure, d'une demi-mesure, d'un tems, &c. s'expriment par les mots de pause, demi-pause, soupir, &c. Voyez ces mots. Il est aisé de comprendre qu'en combinant tous ces signes, on peut exprimer à sa volonté des silences d'une durée quelconque. Voyez SILENCE.
Il ne faut pas confondre avec les bâtons des silences, d'autres bâtons précisément de même figure, qui, sous le nom de pauses initiales, servoient dans nos anciennes musiques à déterminer le mode, c'est-à-dire la mesure, & dont nous parlerons au mot MODE.
BATON DE MESURE, est un bâton fort court, ou même un simple rouleau de papier, dont le maître de Musique se sert dans un concert pour régler le mouvement, & marquer la mesure & les tems. Voyez BATTRE LA MESURE. (S)
BATONS DE CHASSE, ce sont ceux que l'on porte quand on va courre.
BATON A EGRISER, parmi les Diamantaires, est un morceau de bois tourné, composé d'une tête sur laquelle on cimente le diamant pour l'égriser ; plus bas est un collet ou espace beaucoup moins gros, qui est proprement la place du pouce & de l'index de l'ouvrier. Au-dessous de ce collet est la poignée grosse à pouvoir remplir la main. Il se termine en pointe comme le petit bout d'un fuseau. Voyez K L, Pl. I. du Diamantaire, fig. 6. qui représente une portion d'établi, sur laquelle sont montés deux égrisoirs. Voyez EGRISOIR.
BATON, en terme de Formier ; c'est un petit cylindre garni d'une peau de chien de mer, dont on se sert pour frotter les formes ou autres ouvrages : Voyez FROTTER ; voyez fig. 1. Pl. du Formier-Talonnier.
BATON A GANT, autrement RETOURNOIR, ou TOURNE-GANT, est un morceau de bois fait en forme de fuseau long, dont les Gantiers se servent dans la fabrique de leurs gants. Ils sont ordinairement doubles quand on s'en sert. Voyez GANT & TOURNE-GANT.
Bâtonner un gant, ou réformer un gant, c'est après l'avoir fini, l'élargir sur le réformoir avec des bâtons faits exprès, & appellés bâtons à gant, afin de lui donner plus de forme.
BATON A CIMENTER, terme de Lapidaire, est un morceau de bois gros par un bout & menu par l'autre, où les Lapidaires enchâssent leurs crystaux & leurs pierres par le moyen d'un mastic, Voyez la figure 15. Pl. du Lapidaire. Ce mastic n'est autre chose qu'un mélange de ciment & de poix résine.
BATON A DRESSER, c'est, parmi les Orfevres en grosserie, un rouleau dont on se sert pour mettre de niveau une plaque de métal mince, & qui voile au gré de l'air. Voyez VOILER ; voyez Pl. I. fig. 4.
BATON A TOURNER, en Passementerie, est un simple bâton rond de 7 à 8 pouces de long, assez menu, qui à 3 ou 4 lignes de l'un de ses bouts, a une petite rainure tout-à-l'entour de lui-même, pour recevoir & tenir les deux bouts d'une moyenne ficelle, qui n'est point coupée par son autre bout ; ce bout de ficelle non coupé s'introduit, se fixe dans le petit trou du bout de l'ensuple, & s'enveloppe sur ce bout jusqu'auprès du bâton à tourner, qui sert ainsi par le mouvement de la main droite à faire tourner l'ensuple sur le ployoir, lorsque l'on ploie les pieces relevées sur le billot, au sortir de dessus l'ourdissoir.
BATON, en terme de Planeur, est un morceau de bois de tremble ou de tilleul, sur lequel les Planeurs nettoyent leurs marteaux.
BATON ROMPU, en Serrurerie, est un morceau de fer quarré ou rond, coudé en angle obtus ; l'angle est plus ou mois obtus, selon l'endroit où le morceau de fer doit être appliqué.
BATON DE SEMPLE, partie du métier d'étoffe de soie. Le bâton de semple est rond ; il a un pié & demi de long : on y attache les cordes du semple les unes après les autres, & on les y fixe avec un noeud courant. Pour cet effet on double les cordes, & on forme une boucle double. Le bâton de semple est placé au bas du métier, à l'extrémité inférieure des cordes de semple. Voyez la description du métier à l'article VELOURS.
BATON DE RAME, partie du métier d'étoffe de soie. Le bâton de rame a deux piés de long ; il est de la même forme que celui du semple, & on y attache les cordes de rames de la même maniere que celles du semple, Voyez la description du métier à l'art. VELOURS.
BATON DE GAVASSINIERE, est celui auquel on attache la gavassiniere ; pour disposer la tireuse à travailler.
BATON DE PREUVE, en terme de Raffineur de sucre, est une espece de bâton plat par un bout, allant ou s'élargissant un peu jusqu'à l'extrémité du même côté. L'autre bout qui lui sert de manche est rond, & commence un peu plus haut que la moitié du bâton. C'est sur ce bâton trempé dans sa cuite (V. CUITE), que le raffineur prend la preuve & fait l'essai de la matiere (V. PREUVE). Il sert encore à battre dans la chaudiere à cuite (Voyez CHAUDIERE A CUITE) lorsque le sucre monte avant de prendre son bouillon.
BATON DE CROISURE, (Tapissier) est un bâton rond, ordinairement de bois de saule. On en fait de diverses longueurs, mais tous d'un pouce de diametre. Les Hautelissiers s'en servent pour croiser les fils de leurs chaînes. Voyez HAUTE-LISSE.
* BATON, (ISLE) ou BUTON, (Géog.) île d'Asie dans la mer Indienne, à l'orient de l'île de Macassar ou Célebes, entre celles de Wawani, Coelinea, & Cabinus.
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BATON A CIRE | terme de Metteur-en-oeuvre, est un petit bâton, pour l'ordinaire d'yvoire, enduit de cire par le bout, que l'on mollifie dans les doigts jusqu'à ce qu'on puisse haper les diamans avec : on s'en sert pour représenter les pierres dans les chatons, & les en retirer lors de l'ajustage.
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BATONNÉE | S. f. bâtonnée d'eau, en Marine ; c'est la quantité d'eau qu'on puise à la pompe, chaque fois qu'on fait joüer la brimbale. (Z)
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BATONNER | v. act. en termes de Palais, c'est soûligner un endroit d'un acte ou d'une piece, pour avertir le juge ou autre qui la lira, de faire une singuliere attention à cet endroit. (H)
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BATONNET | jeu d'enfant : il se joue avec deux bâtons ; l'un long, assez gros, rond, & long d'une aulne ou environ ; l'autre plus petit, rond, aiguisé par les deux bouts, & long de quatre à cinq pouces. On tient à la main le gros bâton ; on frappe sur une des extrémités pointues du petit qu'on appelle bâtonnet ; le bâton s'éleve en l'air ; & l'adresse du jeu consiste à le frapper tandis qu'il est en l'air, & à l'envoyer bien loin. Si on ne l'atteint pas, ou si on ne l'envoye pas, en l'atteignant, à une certaine distance, on cede le bâtonnet à son adversaire, & l'on se succede ainsi alternativement.
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BATONNIER | BATONNIER
On l'appelle apparemment bâtonnier, à cause du bâton de la confrairie de S. Nicolas, dont il est le chef ; l'étant des avocats mêmes, qui tous en sont confreres nés. (H)
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BATRACHITE | S. f. (Hist. nat.) pierre qui se trouve, dit-on, dans la grenouille. On lui attribue de grandes vertus contre les venins : mais l'existence de la pierre n'est pas encore constatée.
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BATRACHOMYOMACHIE | S. m. (Belles-Lett.) combat des grenouilles & des rats ; titre d'un poëme burlesque attribué communément à Homere.
Ce mot est formé de trois autres mots grecs, , grenouille, , souris ou rat, & , combat.
Le sujet de la guerre entre ces animaux est la mort de Psicarpax, jeune rat, fils de Toxaster, qui étant monté sur le dos de Physignate, grenouille, pour aller visiter son palais où elle l'avoit invité de venir, fut saisi de frayeur au milieu de l'étang, chancela, lâcha sa conductrice & périt. Les rats soupçonnant Physignate de perfidie, en demandent satisfaction, déclarent la guerre, & livrent bataille aux grenouilles, qu'ils auroient exterminées, si Jupiter & les autres dieux, en présence desquels se donnoit le combat, n'eussent envoyé au secours des grenouilles des cancres qui arrêterent la fureur des rats.
Suidas fait honneur de ce poëme à Pigrez ou Tigrés d'Halicarnasse, frere de l'illustre Artémise, & le nom de ce Carien se lit à la tête d'un ancien manuscrit de la bibliotheque du Roi. Etienne Nunnésius & d'autres savans modernes pensent aussi qu'Homere n'en est point l'auteur. Cependant l'antiquité dépose en faveur de ce poëte ; Martial le dit expressément dans cette épigramme.
Perlege Meonio cantatas carmine ranas,
Et frontem nugis solvere disce meis.
Stace est du même sentiment ; & ce qui semble confirmer l'opinion des anciens à cet égard, c'est que dans le siecle dernier on déterra près de Rome, dans des anciens jardins de l'empereur Claude, un bas-relief d'Archelaüs, sculpteur de Pryene, représentant un Homere avec deux rats, pour signifier qu'il étoit auteur du combat des rats.
Quoi qu'il en soit, feu M. Boivin, de l'Académie Françoise & de celle des Belles-Lettres, a traduit ce petit poëme en vers François ; & sa traduction est aussi exacte qu'élégante : à cela près que pour la commodité de la rime, il a quelquefois donné aux rats & aux grenouilles, des noms différens de ceux qu'ils ont dans le texte Grec.
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BATSKA | (Géog.) grande contrée de la Hongrie, entre le Danube & le Théiss.
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BATTA | (Géog.) province du royaume de Congo, en Afrique, une de ses six parties, bornée au septentrion par les contrées de Sundi & de Pango ; à l'occident par celles de Pemba ; & au midi par le lac d'Aquelonda. Elle est arrosée par la riviere de Barbela.
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BATTAGE | BATTAGE
BATTAGE, en Draperie ; c'est une des préparations que l'on donne aux laines avant que de les employer à la fabrication des draps. Cette préparation succede au triage. Voyez TRIAGE & DRAPERIE. Elle consiste à les porter sur une claie de corde, & à les battre comme on voit Plan. de Draperie. A, la claie ; B B, ouvriers battant les laines. Cette opération a deux objets, le premier, de faire ouvrir la laine, ou de la séparer par les coups de baguette ; le second, de la purger entierement de sa poussiere. Voyez l'article DRAPERIE.
BATTAGE, s. m. en terme de Salpétrier, se dit du tems qu'on employe à battre la poudre dans le moulin. Les pilons sont de bois, & armés de fonte, & les mortiers de bois, creusés dans une poutre ; quand ils sont de fer, il en arrive souvent des accidens. Pour faire la bonne poudre, il faut un battage de vingt-quatre heures à 3500 coups de pilons par heure, si le mortier contient 16 livres de composition. Le battage est moins rude l'été que l'hyver, à cause que l'eau est moins forte. Voyez MOULIN A POUDRE.
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BATTANS | S. m. pl. terme d'Architecture ; ce sont dans les portes & les croisées de Menuiserie, les principales pieces de bois en hauteur où s'assemblent les traverses.
On appelle aussi battans les venteaux des portes. On dit une porte à deux battans, lorsqu'elle s'ouvre en deux parties. Les Latins appelloient ces portes bifores. (P)
BATTANT de pavillon, (Marine) on entend par le battant de pavillon, sa longueur qui voltige en l'air. On appelle le guindant, sa largeur ou la hauteur qui regne le long du bâton. (Z)
BATTANT, terme de Fondeurs de cloches ; c'est une masse de fer un peu plus longue que la cloche, & d'une pesanteur proportionnée au poids de la cloche. Le battant est terminé par en-bas par une masse arrondie, & va en diminuant jusqu'en-haut, où il se termine par une espece d'anneau, dans lequel on passe le brayer pour attacher le battant à l'anse de fer qui est au cerveau de la cloche en-dedans. Voyez A O fig. 6. Pl. de la Fonte des cloches, & l'article FONTE DES CLOCHES.
BATTANS, en Menuiserie ; ce sont les montans des croisées, des guichets de porte, &c. c'est-à-dire les pieces de bois dans lesquelles les traverses s'emmanchent, & qui forment la hauteur.
BATTANS feuillures, dans le même métier ; ce sont ceux qui au lieu de noix ont une feuillure pour fermer sur les dormans.
BATTANS menau ; sont ceux dans les croisées qui portent les espagnolettes.
BATTANS à noix ; sont ceux qui ont une languette arrondie, qui entre dans une feuillure faite dans les dormans : c'est ce qu'on appelle croisée à noix.
BATTANT, partie essentielle de tous les métiers à ourdir, soit de Tisserans, de Drapiers, de Passementiers, de Manufacturiers en soie, &c. & c'est toûjours un instrument ou chassis dans la partie inférieure duquel s'ajuste le peigne : entre les dents du peigne passent les fils de la chaîne ; & ces dents par le moyen du poids du battant, qui est de cent livres dans les étoffes riches, servent à serrer la trame dans l'étoffe, à l'y faire pour ainsi dire entrer, & à la rendre plus forte. Voyez métier de TISSERANS, métiers de PASSEMENTIER, de DRAPIER, de MANUFACTURIERS EN SOIE.
Il y a deux especes de battans ; le battant simple, & le battant brisé ; le battant brisé ne sert qu'aux métiers de velours uni ; les deux lames ou côtés du chassis sont coupés à deux ou trois pouces au-dessous de la poignée ; & à cette partie du bois des lames enlevées, on a substitué deux courroies un peu fortes. Cette brisure est nécessaire pour faire dresser le fer du velours & le ramener sur sa cannelure. Voyez VELOURS.
Le battant simple est celui où les lames ou côtés du chassis ne sont point coupés, & sont tout d'une piece.
BATTANT, en Passementerie ; c'est le chassis qui porte le peigne pour frapper la trame : dans le métier au battant, ce n'est point l'ouvrier qui frappe lui-même (comme dans l'ouvrage au moule qui se frappe avec un doigtier de cuivre), il ne fait que pousser avec la main le battant pour donner passage à la navette, le battant est ramené de lui-même par la force du bandage qui l'oblige de venir frapper la trame ; ce qui soulage beaucoup l'ouvrier.
BATTANT de locquet, en Serrurerie ; c'est une barre de fer où l'on distingue deux parties ; l'une appellée la tête, & l'autre la queue. La queue est percée, & s'attache sur la porte avec une vis ou un clou ; l'autre ou tête passe dans le cramponet, & se ferme dans le mentonnet.
Il y en a qui ont la tête faite en mentonnet ; d'autres sont droits, selon les lieux où on les pose.
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BATTE | S. f. instrument commun à un grand nombre d'ouvriers, chez qui il a la même fonction, mais non la même forme : elle varie, ainsi que sa matiere, selon les différentes matieres à battre. La batte des plâtriers & des pileurs de ciment est une grosse masse de bois emmanchée, bandée d'un cercle de fer, & garnie de clous. Celle des Jardiniers est tantôt à-peu-près comme celle de Carreleurs, tantôt comme un battoir de lavandieres : c'est un morceau de bois d'un pié & demi de long, épais d'un pié & demi, & large de neuf pouces, emmanché d'un long bâton dans le milieu. On s'en sert pour battre les allées qui sont en recoupe ou en salpêtre. Celle qui est plus courte, sert à plaquer du gason. Voyez la Planche de Jardinage. Celle des Maçons n'est qu'un long bâton, terminé comme une petite massue : celle des Carreleurs est une regle d'environ quatre piés de long, large de cinq, & d'un pouce & demi d'épais, dont ils se servent pour frapper & mettre de niveau leurs carreaux : celle des Vanniers est toute de fer, ronde par le bout, terminée par l'autre en masse, & s'employe à chasser & serrer les osiers entre les montans ; le petit bout de cette batte qui se tient à la main, a un arrêt pour qu'elle soit mieux empoignée : celle des Tapissiers n'est qu'une baguette ou deux cordes repliées, dont ils écharpissent la bourre & la laine qui ont déjà servi : celle des Potiers-de-terre est un battoir. La batte-à-beurre est faite d'un long manche, ajusté dans le milieu d'un rondin de bois de cinq pouces ou environ de diametre, sur un pouce d'épais, percé de plusieurs trous ; voyez son usage à l'article BEURRE. Les Blanchisseuses ont leur batte ou battoir ; ce n'est qu'une pelle plate à manche court, dont elles frappent leur linge pour en faire sortir l'eau & la saleté. La batte-à-boeuf des Bouchers n'est qu'un bâton rond dont ils battent les gros bestiaux quand ils sont tués ou soufflés, pour en attendrir la chair. La batte à Fondeur est singuliere, sa pelle est triangulaire. Voy. à l'article FONDEUR EN TERRE son usage ; voyez aussi les articles suivans, où l'on définit plus exactement quelques-unes des battes précédentes, & quelques autres dont nous n'avons pas parlé.
BATTE, (Architecture) nom que les ouvriers de bâtiment donnent à un morceau de bois fait en forme de massue d'Hercule, avec lequel ils battent le plâtre.
BATTE, autre espece d'outil qui sert à battre & à affermir les allées avant d'y mettre le sable. (P)
BATTE, (Marbreur de papier) est un bâton dont une des extrémités est enfoncée dans une portion de cylindre, coupé transversalement. Les Marbreurs se servent d'une batte K pour broyer & délayer la gomme adragant dans une espece de pot à beurre L, avant que de la verser dans le baquet. Voyez la fig. K L dans le bas de la Planche du Marbreur.
BATTE à recaler, sert aux Menuisiers à recaler ou dresser les onglets des cadres.
BATTES, (Manégé & Sellier) Les battes sont des parties d'une selle à piquer élevées sur les arçons, sur le devant & le derriere, afin que le cavalier se tienne ferme, & que les secousses du cheval ne l'ébranlent point : ordinairement les selles n'ont point de batte de derriere. On dit chausser une batte, pour dire qu'on met le liége de la selle dans la batte, afin de tenir la batte en état. Le mot de liége vient de ce qu'autrefois cette partie de la selle étoit de liége ; car aujourd'hui elle est de bois. (V)
BATTE, outil de Facteur d'orgue, est une forte regle de bois bien dressée sur le plat, dont ils se servent pour redresser les tables de plomb sur l'établi, & les ployer sur les mandrins. Voyez la fig. 65. Planche d'orgue, & l'article ORGUE.
BATTE, (Rubanier) instrument de fer en forme de forte lime, mais uni & égal dans toute sa longueur, servant pour la fabrique des peignes. Cet instrument est emmanché dans un manche de bois : il y a de ces battes plus ou moins fortes, suivant la nécessité. Voyez PEIGNE.
BATTE de jeu de Paume, c'est un instrument qu'on appelle plus communément battoir, ou plûtôt c'est la partie antérieure du battoir qui frappe la balle. Voyez PAUMIER.
BATTE, terme de Potier de terre, c'est une espece de maillet plat à quatre angles, & d'une même piece avec son manche. Il sert à travailler le carreau.
BATTE, en terme de Vannerie, est un morceau de fer assez lourd, & de figure quarrée, dont les Vanniers se servent pour presser leur osier de façon qu'il n'y ait entre les brins qu'un très-petit intervalle, point du tout même si l'on peut.
BATTE, à la Monnoie, ce sont des especes de sabres de bois quarrés par le bout, d'environ deux piés sur trois ou quatre pouces de large, & un pouce & demi d'épaisseur, avec un manche arrondi. Ces battes servent à fouler & presser les sables dont on fait les moules, & leur faire prendre la forme à force de frapper le sable.
BATTE-LESSIVE ou BATTE-QUEUE, petit oiseau mieux connu sous le nom de bergeronnette. Voyez BERGERONNETTE. (I)
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BATTÉE | S. f. c'est le nom que les Relieurs donnent à une portion d'un livre qu'ils battent sur la pierre : on met les différentes battées dans une presse, avec un ais entre chaque battée pour les façonner.
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BATTEL | (Géog.) ville d'Angleterre, dans la province de Sussex.
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BATTELLEMENT | S. m. en Architecture, est le dernier rang des tuiles doubles par où un toît s'égoutte dans un chêneau ou une gouttiere. C'est le stillicidium des Latins. (P)
BATTEMENS, s. m. pl. en Medecine, agitations & palpitations réciproques du coeur & du pouls. Voyez POULS.
Quelques medecins distinguent quatre-vingt-une différentes sortes de battemens simples, & quinze de battemens composés : ils disent que le pouls en a soixante par minute, dans un homme d'une constitution bien tempérée : mais ils ne sont point d'accord à ce sujet avec l'expérience générale. Voyez POULS. (N)
BATTEMENT, en Architecture, est une tringle de bois ou barre de fer plate, qui cache l'endroit où les deux venteaux d'une porte de bois ou de fer se joignent. (P)
BATTEMENS, en Horlogerie, se dit du coup que donne à la coulisse l'étochio qui est à la circonférence du balancier lorsqu'il décrit de grands arcs. Voyez RENVERSEMENT.
Il ne doit point y avoir de battemens dans une montre ; ou s'il y en a, ils doivent être fort legers, & seulement lorsqu'elle est nouvellement nettoyée ; sans cela on aura beaucoup de peine à la régler.
Battement est aussi synonyme à vibration : mais il ne se dit que de celles du balancier des montres ; dans les pendules on se sert toûjours du mot de vibration.
Le nombre des battemens qu'une montre doit donner par heure a été long-tems incertain chez les Horlogers ; tantôt ils fixoient ce nombre à quelque chose de moins que 16000 ; tantôt ils le portoient jusqu'à 18000 ; enfin l'expérience a paru montrer que 17000 & quelque chose étoit le nombre le plus convenable. Dans le premier cas, les montres étoient sujettes à varier par les secousses & par la chaleur ; dans le second, le balancier devenant trop leger & les inégalités du roüage étant augmentées à cause de l'augmentation des frottemens, ces deux causes produisoient d'autres variations. Voyez VIBRATION. (T)
BATTEMENT D'EPEE, en Escrime, est une attaque qui se fait en frappant avec la lame de son épée celle de l'ennemi. Les battemens d'épée se font toûjours de pié ferme, en dégageant ou sans dégager, sur les armes ou sous les armes.
BATTEMENS d'épée en dégageant, se font comme les battemens simples, excepté qu'on commence par dégager. Voyez BATTEMENT D'EPEE.
BATTEMENT d'épée de tierce, sans dégager sur les armes ou sous les armes. Il se fait en frappant d'un coup sec du fort du faux tranchant sur celui de l'épée de l'ennemi, en faisant un mouvement en avant comme quand on part ; & au même instant on allonge l'estocade de tierce ou de seconde sans quitter son épée.
Nota que dans l'instant que vous frappez sur l'épée de l'ennemi, il peut dégager ou la forcer : s'il dégageoit, alors vous ne rencontreriez pas son épée ; c'est pourquoi en pareil cas, au lieu de pousser l'estocade de tierce ou de seconde, vous allongerez une estocade de quarte ou de quarte basse ; & s'il force l'épée, vous porterez l'estocade de quarte ou de quarte basse en dégageant. Voyez PREMIER DEGAGEMENT FORCE.
BATTEMENT d'épée de quarte, sans dégager sur les armes ou sous les armes. Il se fait en frappant un coup sec du fort tranchant sur le fort de l'épée de l'ennemi (on frappe ce coup en faisant un mouvement en avant comme quand on pare), & au même instant on allonge l'estocade de quarte ou de quarte basse sans quitter la lame.
Nota que dans l'instant que vous frappez sur l'épée de l'ennemi, il peut dégager ou la forcer, & alors vous ne rencontreriez pas son épée ; c'est pourquoi en pareil cas, au lieu de pousser l'estocade de quarte ou de quarte basse, vous allongerez votre estocade de tierce droite ou de seconde ; & s'il force l'épée, vous porterez l'estocade de tierce ou de seconde. Voyez PREMIER DEGAGEMENT SERRE.
BATTEMENS, en terme de Danse, ce sont des mouvemens en l'air que l'on fait d'une jambe, pendant que le corps est posé sur l'autre, & qui rendent la danse très-brillante, sur-tout lorsqu'ils sont faits avec légereté.
La hanche & le genou forment & disposent ces mouvemens : la hanche conduit la cuisse pour s'écarter ou s'approcher ; & le genou par sa flexion forme le battement, en se croisant soit devant, soit derriere l'autre jambe qui porte.
Supposé donc que vous soyez sur le pié gauche, la jambe droite en l'air & bien étendue, il faut la croiser devant la gauche, en approchant la cuisse & en pliant le genou, & l'étendre en l'ouvrant à côté ; plier du même tems le genou en croisant derriere, puis l'étendre à côté, & continuer d'en faire plusieurs de suite, tant d'une jambe que de l'autre. On mêle les battemens avec d'autres pas ; ils en rendent la danse beaucoup plus gaie.
Battemens simples. On fait, par exemple, un coupé en avant du pié gauche, & la jambe droite qui est derriere, vient faire un battement en frappant la jambe gauche, & se reporte du même tems en arriere à la quatrieme position. Ce battement se fait les jambes étendues, parce qu'aux demi-coupés que l'on fait en avant, on doit être élevé sur la pointe, & les jambes tendues ; c'est dans ce même tems que vous faites ce battement : alors la jambe droite se portant en arriere, le talon gauche se pose à terre, & donne la liberté au pié droit de se porter à la quatrieme position, comme on le voit à l'article des COUPES. Voyez COUPE.
Il y a encore des battemens qui se font différemment des autres ; ce n'est que des hanches qu'ils se forment, comme les entrechats, les caprioles, & autres pas de ballet.
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BATTERIE | S. f. (Art. milit.) on appelle ainsi dans l'Art militaire tous les endroits où l'on place du canon & des mortiers, soit pour tirer sur l'ennemi, soit pour la destruction ou l'attaque des places de guerre : ainsi une batterie de canon est une batterie qui ne contient que des canons, & une batterie de mortiers est celle qui est destinée au service des mortiers.
Dans un combat, on tire le canon à découvert sans qu'il y ait aucune élévation de terre qui couvre ceux qui le chargent & qui le font manoeuvrer. Comme il n'a pas ordinairement alors de position fixe, & qu'il en change, suivant que le général le croit nécessaire, on ne peut lui pratiquer d'épaulement. Il n'en est pas de même dans l'attaque des places ; le canon s'établit fixement dans les lieux où on le juge utile ; & il est absolument nécessaire, pour qu'on puisse le servir sûrement, qu'il soit derriere un parapet assez épais pour résister à l'effort du canon de la place.
La construction de ce parapet, qu'on appelle ordinairement épaulement, est proprement celle de la batterie. On en donnera ici le détail tel que M. de Vauban le donne dans son traité de l'attaque des places.
Il faut, autant que l'on peut, que le lit du canon, c'est-à-dire, l'endroit ou le terrein sur lequel il est placé, soit élevé de quelques piés au-dessus du niveau de la campagne.
Il faut donner au parapet trois toises d'épaisseur, & sept piés & demi de hauteur.
On construit ces parapets de terre, & de fascines ou saucissons.
On les trace avec un cordeau, ou avec de la meche, parallelement aux parties de la fortification qu'on veut détruire. Cela fait, on prend de la terre sur le devant de la batterie, en y pratiquant pour cet effet un petit fossé. On fait alternativement un lit de terre bien foulé, & un lit de fascines mises en boutisses, c'est-à-dire couchées, selon leur longueur, dans la largeur du parapet ; on les attache bien solidement ensemble par des piquets qui les lient, de maniere que tous ces différens lits ne font qu'un seul & même corps. On pose des fascines en parement, c'est-à-dire couchées, selon leur longueur, le long de tous les côtés du parapet ; elles sont attachées fortement avec des piquets à l'intérieur du parapet.
On éleve d'abord ce parapet jusqu'à la hauteur de deux piés & demi ou trois piés, & l'on commence ensuite les embrasures du côté intérieur de la batterie. Elles se font de dix-huit piés en dix-huit piés, afin que le merlon ou la partie de l'épaulement qui est entre les embrasures, ait assez de solidité pour résister à l'effort du canon. Ces embrasures ont trois piés d'ouverture du côté intérieur de la batterie, & neuf du côté extérieur.
Les embrasures étant ainsi tracées, on acheve d'élever le reste de l'épaulement, & l'on donne à la partie du parapet plus élevée que les embrasures, la pente ou le talud convenable pour que les merlons ne s'éboulent pas dedans.
On appelle genouilliere de la batterie, la partie du parapet, depuis le niveau de la campagne jusqu'à l'ouverture des embrasures, dont les joues sont les deux côtés de l'épaisseur de l'épaulement, qui terminent l'embrasure de part & d'autre.
Le parapet ou l'épaulement étant achevé, on prépare les plates-formes vis-à-vis les embrasures. (Voyez PLATE-FORME) Lorsqu'elles sont achevées, on y fait conduire le canon.
La fig. 10. de la Planche VIII. de l'Art milit. mettra au fait de tout ce qui concerne les batteries de canon.
Elle représente le plan d'une batterie avec les plates-formes, & le canon posé dessus vis-à-vis les embrasures ; & la fig. 1. de la Planc. IX. fait voir le profil d'une batterie avec une piece de canon dans son embrasure, & prette à tirer.
On ajoûtera ici, pour plus de détail, la maniere suivante de construire une batterie de canon devant une place assiégée : elle est tirée des Mémoires d'Artillerie de M. de S. Remy.
Le commissaire qui doit commander la batterie, commence par reconnoître le terrein avec quelques officiers de ceux qui doivent y servir, & ensuite il fait provision de toutes les choses nécessaires, comme des outils à pionniers de toutes sortes, le double de ce qu'il y aura de travailleurs ; il doit en prendre des qualités qu'il jugera à propos, selon le terrein, c'est-à-dire, pour une terre grasse & de gason, beaucoup de bêches.
Dans du sable, beaucoup de pelles de bois ferrées.
Dans des pierres ou dans la terre-ferme, des boyaux ou pics-boyaux.
Des serpes, masses, haches & demoiselles, deux de chaque façon par piece ; des fascines & des piquets. Les fascines doivent être de cinq à six piés de longueur, & environ dix pouces de diametre, à chacune trois bons liens.
Les piquets doivent être de trois piés & demi de longueur, & un pouce & demi de diametre par le gros bout.
Lorsque le commissaire sera sur le terrein destiné pour la batterie, il la tracera avec de la meche & des fascines, & observera qu'elle soit parallele à ce qu'on lui aura marqué de battre. Il donnera dix-huit ou vingt piés d'épaisseur à l'épaulement, suivant les bonnes ou méchantes terres ; & supposé que la batterie soit de six pieces, il faudra prendre vingt toises de terrein ; & pour diligenter la batterie, il faudra du moins quatre-vingt travailleurs, qui seront partagés moitié d'un côté, moitié de l'autre, & environ à trois piés l'un de l'autre.
A l'égard des commissaires & officiers qui seront destinés pour la batterie, il les postera de distance en distance d'un & d'autre côté, afin de faire travailler les soldats avec diligence ; après quoi il faudra jetter la terre pour faire l'épaulement : ceux qui seront dans le dedans de la batterie tireront de la terre de loin pour ne pas s'enfoncer ; & ceux du dehors & du côté de la place feront un fossé d'environ dix piés de large & six piés de profondeur, afin de trouver beaucoup de terre, tant pour se mettre à couvert du feu de la place, que pour faire l'épaulement.
Il fera laisser entre le fossé & la fascine qui aura servi à tracer la batterie, une berme d'environ trois ou quatre piés, afin d'avoir plus de facilité à jetter la terre sur l'épaulement pour raccommoder la batterie lorsqu'elle sera éboulée par le souffle du canon de la batterie même, & par le canon de la place.
Lorsqu'on aura assez jetté de terre du fossé sur l'épaulement, ou que le jour commencera à faire voir de la place les travailleurs, alors le commissaire les fera retirer de derriere, & les fera passer devant pour toûjours jetter de la terre sur l'épaulement avec les autres, & ensuite fasciner le devant de la batterie, aussi-bien que les deux extrémités qu'il faut faire en petit épaulement ; & pour cet effet il fera faire un petit fossé de côté & d'autre, afin d'avoir de la terre, tant pour se couvrir des pieces de la place, qui peuvent battre en roüage, que pour empêcher la communication & les passages, qui sont incommodes, des tranchées à la batterie ; & cette terre servira aussi pour emplir & fortifier les merlons des deux bouts.
Lorsque le parement de la batterie sera fasciné de trois piés de hauteur, qui doit être celle de la genouillere, il partagera les vingt toises de terrein, qui font cent vingt piés, en treize parties.
La premiere sera de neuf piés, pour le premier merlon.
La seconde de deux piés, pour une embrasure.
La troisieme de dix-huit piés, pour le merlon d'entre deux pieces, & tout le reste de même.
Ce sera encore pour le dernier merlon neuf piés.
Il donnera de l'ouverture à l'embrasure en-dehors de neuf piés, après quoi il partagera les embrasures aux commissaires & aux officiers qui seront avec lui, suivant qu'il se pratique ordinairement, afin que les commissaires fassent fasciner & piqueter avec soin leurs embrasures ; on observera de mettre toujours trois bons piquets par chacune fascine contre les liens. Il prendra garde de tems à autre que les commissaires ouvrent & dégorgent les embrasures, de maniere qu'elles puissent battre en ligne directe, ce qui leur aura été marqué ; après quoi il fera toûjours fasciner & jetter de la terre à la hauteur de six piés ; & en cas que la batterie soit battue de quelque cavalier ou bastion élevé, il la fera hausser de sept à huit piés, autant qu'il en sera besoin.
Quand les embrasures seront bien fascinées & dégorgées, & qu'il ne restera plus de terre que pour s'empêcher d'être vû de la place, on travaillera aux plates-formes, & l'on commencera à mettre le terrein de niveau, ensorte qu'il n'y reste aucunes pierres, s'il se peut ; après quoi l'on doit poser le heurtoir qui sera de neuf piés de longueur, sur neuf à dix pouces en quarré, & ensuite le premier madrier qui sera de neuf piés & 1/2 de longueur, sur un pié de large & deux pouces d'épaisseur.
Le second sera de dix piés de longueur.
Le troisieme de dix piés & 1/2.
Et tous les autres en suivant jusqu'au nombre de dix-huit, & toûjours un demi-pié de plus les uns que les autres, pour rendre la plate-forme depuis les heurtoirs jusqu'au dernier madrier de recul, de dix-huit piés de long, & dix-huit piés de large au recul.
La plate-forme sera relevée depuis le heurtoir jusqu'au dernier madrier de recul de neuf à dix pouces, & bien arrêtée au recul par deux gros piquets de bois de charpente ; après quoi il pourra demander à faire marcher le canon du grand parc, qui doit être armé pour chaque piece de deux lanternes & deux refouloirs, autant d'écouvillons & de coins de mire, & de huit leviers.
Les canonniers ordonnés pour mettre le feu au canon, doivent avoir chacun deux dégorgeoirs, deux fournimens, deux boute-feux ; & pour toute la batterie, quelques tireboures du calibre des pieces.
Il faudra choisir un endroit pour un grand magasin à poudre pour toute la batterie, derriere un fossé relevé, ou redan de terre, & s'il n'y en a point, faire un épaulement à cinquante pas de la batterie. Quelques-uns même sont d'avis de porter ce magasin à cent pas, pour mettre à couvert une cinquantaine de barrils de poudre, & la sentinelle pour les garder.
Il faudra aussi avoir un petit magasin à poudre de deux pieces en deux pieces, qui puisse contenir deux tonneaux de poudre, éloigné du recul des pieces d'environ dix à douze pas, & couvert de fascines, avec un petit boyau de chaque côté pour y entrer, en cas que l'on soit vû de la place.
Il est nécessaire que le canon arrive à nuit fermante à la batterie avec toutes les munitions, & qu'il y ait au moins de quoi tirer cent coups de chaque piece. Ces munitions seront mises dans le grand magasin près la batterie, & dans les petits que l'on aura faits à dix pas des plates-formes ; & l'on ne perdra aucun tems pour faire placer les pieces, afin qu'elles puissent être logées & en état de tirer la nuit même, si le général l'ordonne, ou à l'ordinaire à la pointe du jour.
Le commissaire doit avoir soin, sur toutes choses, de visiter de tems en tems les grands & petits magasins ; afin qu'en prenant des mesures justes, il ne lui manque rien, ni poudre, ni boulets, ni fourrage. Il faut même qu'il ait toûjours des fascines & des piquets pour raccommoder le soir les épaulemens & les embrasures ; & sur-tout, que les plates-formes soient bien nettes, & qu'il ne s'y répande point de poudre, non plus que dans les magasins, afin de ne point courir le risque du feu qui arrive souvent sans toutes ces précautions.
Lorsque le canon est prêt à tirer, on fait détruire le côté extérieur des embrasures qu'on a laissé exprès d'une très-petite épaisseur, & seulement pour cacher ou masquer la batterie ou les embrasures : ou bien l'on tire le canon qui détruit bientôt cette espece de petit rideau. C'est ce qu'on appelle démasquer une batterie.
Pour tout ce qui concerne le service d'une batterie de canon, voyez CHARGE & CANON.
La table suivante qui est aussi tirée des mémoires d'artillerie de M. de Saint-Remy, peut être fort utile pour donner une connoissance exacte de toutes les choses nécessaires à la construction & au service des batteries de canon.
BATTERIES DU CHEMIN COUVERT, sont celles qu'on établit sur la partie supérieure du glacis pour battre en breche, lorsqu'on est maître du chemin couvert.
Ce qu'il y a d'essentiel à observer dans ces batteries, c'est d'en ouvrir les embrasures, ensorte qu'elles découvrent bien toutes les parties de la place qu'elles doivent battre, & qu'elles ayent une assez grande pente du derriere au devant pour plonger jusqu'au-bas des revêtemens que l'on veut ruiner. Comme leur construction est fort dangereuse, parce qu'elle se fait sous le feu du rempart de la place, on les masque quelquefois, c'est-à-dire, qu'on met devant les endroits où elles s'établissent, des sacs à laine, ou quelqu'autre chose qui cache les travailleurs à l'ennemi. Voyez BATTERIE A RICOCHET, voyez aussi Pl. XII. de l'Art milit. le plan des batteries du chemin couvert.
BATTERIE DE MORTIER ; c'est un lieu préparé pour tirer les mortiers sur une place assiégée. Ces batteries ne different de celles du canon, qu'en ce qu'on ne fait point d'embrasures à leur épaulement.
Les plates-formes de ces batteries ont un pié de longueur & six de largeur : le devant se pose à deux piés de l'épaulement de la batterie.
Le magasin à poudre pour le service de la batterie, doit être derriere à quinze ou vingt pas, comme aux batteries de canon, avec un boyau de communication pour y aller en sûreté. On met des planches ou des fascines avec de la terre dessus pour le garantir du feu.
Les bombes chargées se mettent à côté du même magasin à cinq ou six pas de distance.
Pour ce qui concerne la maniere de charger le mortier & de le pointer, voyez MORTIER & BOMBE.
Instruction de M. Camus des Touches, pour le service d'un mortier de douze pouces, à un siége. Lorsque la batterie est construite, & que les mortiers y sont logés, on assemble tout ce qui est nécessaire pour l'exécution. Savoir, une provision de bombes chargées ; une botte de fourrage ; de la terre douce ; deux couteaux de bois ou spatules ; une bêche ; un pic-boyau ; un balai ; quatre leviers ; une demoiselle ; un crochet ; une curete ou racloir ; un quart de cercle ; deux boute-feux ; deux coins de mire : chaque mortier doit être aussi fourni, & avoir à portée de quoi remplacer dans le besoin. Le magasin à poudre sera dans le milieu de la batterie, vingt ou vingt-cinq pas derriere ; & s'il faut un boyau pour y communiquer sans être vû, on le tirera du milieu de la batterie, ou de quatre mortiers en quatre mortiers, si la batterie est considérable ; observant de laisser un terre-plein entre le mortier & le commencement du boyau, afin qu'on puisse se remuer dans la batterie.
Les bombes chargées seront à côté du magasin à quelques pas de distance, la fusée renversée en terre. Les armes du mortier seront couchées à droite & à gauche.
Pour servir un mortier de douze pouces, il faut un cadet bombardier, & quatre servans. Le cadet & ces quatre servans doivent être placés comme il suit, avec ce qui sert au service du mortier.
Les deux boutefeux seront mis derriere le mortier. Le cadet bombardier doit avoir un quart de cercle & un dégorgeoir. Il a soin d'aller chercher la poudre dans un sac au petit magasin. Il charge le mortier avec une mesure, après avoir mis son dégorgeoir dans la lumiere, & demande à l'officier qui commande, à combien de poudre il veut qu'on charge ; il la met dans la chambre du mortier, & l'égalise bien avec la main. Le premier servant de la gauche lui fournit un bouchon de fourrage ; le premier de la droite lui donne la demoiselle : le cadet refoule un petit coup le fourrage qu'il a mis sur la poudre. Le premier soldat de la gauche lui fournit de la terre douce sur la bêche, pour mettre dans la chambre, & achever de la remplir.
Le cadet, après avoir placé cette terre, la refoule à petits coups, puis de plus fort en plus fort, jusqu'à ce que la chambre soit pleine, & fait sur la superficie un lit pour asseoir la bombe. Le premier soldat de la droite remet la demoiselle en son lieu. Le second servant de la droite, & celui de la gauche, prennent un levier & le crochet, & apportent la bombe chargée, ils aident le cadet à la placer : le cadet pose la bombe bien droite dans l'ame du mortier. Le premier servant de la gauche lui fournit de la terre pour mettre autour de la bombe avec le couteau ou spatule, que le premier de la droite lui donne. Le cadet place la terre autour de la bombe, de maniere que son centre se trouve, s'il est possible, dans l'axe de l'ame du mortier, que les anses soient en haut & tournées suivant l'alignement des tourillons.
Lorsque la bombe est placée dans le mortier, le cadet pointe en s'alignant sur le piquet planté au haut de l'épaulement, & qui sert à s'ajuster ; & pour cela les quatre servans ensemble prennent chacun un levier ; le premier de la droite & celui de la gauche embarrent devant, & les deux autres derriere : tous ensemble poussent le mortier en batterie, suivant le commandement de l'officier ou du cadet ; ensuite les deux premiers servans lui passent un levier sous le ventre, pour le baisser & le hausser suivant les degrés de hauteur que l'officier ou le cadet veulent lui donner ; & le second servant de la gauche pousse ou retire le coin de mire pour cet effet, au commandement qu'il en reçoit. Ce deuxieme servant avec son camarade de la droite, prennent chacun un levier pour donner du flasque. Le mortier pointé, le cadet retire son dégorgeoir de la lumiere, il amorce avec de la poudre fine, & met un peu de poulverin sur le bassinet & sur la fusée de la bombe, après avoir gratté la composition avec la pointe de son dégorgeoir, afin que le feu y prenne promtement. Le premier servant de la droite prend le boutefeu, met le feu à la fusée. Le premier servant de la gauche met le feu au mortier au commandement de l'officier ou du cadet, qui ne se donne que quand la fusée est bien allumée. Lorsque son coup n'a pas beaucoup de portée, il laisse brûler quelque tems la fusée, & ordonne le feu au mortier suivant l'estimation du tems qu'elle doit encore durer, ensorte qu'elle puisse crever au moment après qu'elle est tombée ; la longueur de la fusée se connoît en comptant 1, 2, 3, &c. également depuis son commencement jusqu'à sa fin. Le cadet ou l'officier, en donnant le commandement, se tiennent à portée de pouvoir observer leur coup, pour se corriger, & mieux ajuster dans la suite. Quand la bombe est partie, le premier servant de la droite nettoye le mortier avec la curete ou racloir, & un bouchon de fourrage, que celui de sa gauche lui donne. Le second servant de la gauche, a le soin de balayer toûjours pendant qu'on sert la piece, afin qu'il ne reste point de poudre qui puisse mettre le feu à la batterie. Les deux seconds servans prennent chacun un levier, les placent sous le ventre du mortier pour le mettre debout, & en état d'être rechargé. Le cadet va à la poudre avec un sac, charge le mortier avec la mesure, &c. chacun reprend le même poste & ses mêmes fonctions enseignées ci-dessus. Pour charger les bombes, on les emplit de poudre avec un entonnoir ; on fait ensuite entrer la fusée par le petit bout dans la lumiere de la bombe, & on l'enfonce avec un repoussoir de bois à coups de maillet de bois, & jamais de fer.
Les petits mortiers se servent à proportion comme celui de douze pouces. Ceux à grenades sont servis par un seul homme ; à l'égard du pierrier, il ne faut que trois hommes. La différence qu'il y a de son service à celui du mortier, est qu'au lieu de la bombe, on met des pierres dans l'ame, sous lesquelles on place un plateau ou une pierre plate, lesquels couvrent la chambre. Ces pierres sont arrangées jusqu'à la bouche ; quelquefois on les met dans un panier. Il faut faire un amas de pierres à portée de la batterie, & dans la batterie même, & sur-tout en avoir quelques-unes de larges pour mettre au fond du pierrier : ces pierres tiennent lieu de plateaux, il faut aussi que chaque pierrier soit muni d'une bonne civiere pour aller chercher les pierres.
Le pierrier se met en batterie, & se pointe comme un mortier : le principal Bombardier a soin de bien arranger les pierres ; & soit qu'on se serve du panier ou qu'on ne s'en serve pas, il faut qu'il y ait de la terre autour pour ajuster la charge, ainsi qu'on en use autour de la bombe. Chacun de messieurs les commandans de l'école peuvent réduire l'exercice du mortier à la voix ou au tambour : mais il faut observer que chacune des fonctions soit dans l'ordre de la présente instruction.
Les soldats servans qui se trouveront le plus d'intelligence, seront quelquefois employés aux fonctions de cadets ; on les changera de place de tems en tems, afin qu'ils sachent servir également dans les postes de droite ou de gauche, de premier ou de second servant. Les officiers & les sergens tiendront chacun dans leur devoir, & sur-tout veilleront à la propreté de la batterie ; ensorte qu'il n'y ait point de poudre à terre, ou sur la plate-forme, qui puisse causer aucun danger ; le feu est bien plus à craindre dans une batterie de mortiers, à cause des bombes chargées qui s'y trouvent : les plus exactes précautions y sont nécessaires.
Il est à remarquer qu'une plate-forme de mortiers ne peut avoir trop de solidité : de-là dépend la justesse du mortier ; il faut que les lambourdes ayent au moins six pouces en quarré.
Recapitulation des différentes fonctions des cadets bombardiers & soldats, dans l'exécution du mortier de douze pouces.
Le cadet va chercher la poudre ; met le dégorgeoir dans la lumiere ; charge le mortier ; met le fourrage sur la poudre, refoule avec la demoiselle sur le fourrage ; refoule la terre douce ; pose la bombe, & met de la terre à-l'entour ; s'aligne sur ce qu'il veut battre ; donne l'élévation avec le quart de cercle ; retire le dégorgeoir de la lumiere ; amorce & gratte la composition de la fusée ; ordonne le feu au mortier ; observe le coup.
Premier servant de la gauche : donne le fourrage au cadet, fournit la terre douce pour la chambre, donne la terre pour mettre autour de la bombe, embarre sur le devant de l'affut pour l'alignement du mortier sur le piquet, passe un levier sous le ventre du mortier pour l'élevation, met le feu au mortier, donne du fourrage à son camarade pour nettoyer.
Premier servant de la droite : donne la demoiselle au cadet, la remet en sa place, donne le couteau ou spatule, embarre au-devant de l'affut pour l'alignement sur le piquet, passe un levier sous le ventre du mortier pour l'élevation, prend le boute-feu, & met le feu à la fusée, nettoye le mortier avec la curete.
Deuxieme servant à la gauche : va chercher la bombe chargée, aide au cadet à la placer, embarre au derriere de l'affut pour l'alignement, pousse ou retire le coin derriere pour l'élevation, prend un levier & met le mortier debout.
Deuxieme servant de la droite : va chercher la bombe chargée, aide au cadet à la placer, embarre au derriere de l'affut pour l'alignement, prend un levier, & met le mortier debout, balaye la batterie. Mém. d'Artillerie de S. Remy, troisieme édition.
BATTERIE A RICOCHET, c'est celle qui est destinée à tirer le canon à ricochet.
On dit qu'on tire le canon à ricochet, lorsqu'on le charge d'une quantité de poudre capable seulement de chasser ou porter le boulet vers le commencement des faces des pieces attaquées. Il faut pour cela que le canon soit posté dans le prolongement de ces faces. Le boulet tiré de cette maniere va en roulant & en bondissant, & il tue ou estropie tous ceux qu'il rencontre dans le cours de son mouvement. Il fait bien plus de desordre en allant ainsi mollement, que s'il étoit chassé avec force ou roideur.
Les batteries à ricochet ont été inventées par M. le maréchal de Vauban ; il commença à les employer au siege d'Ath en 1697. Voici ce qu'il prescrit touchant ces batteries, dans son traité de l'Attaque des places.
Pour tirer à ricochet il faut mettre les pieces sur la semelle, c'est-à-dire à toute volée, & charger avec des mesures remplies & raclées avec exactitude, versant la charge dans la lanterne, & la conduisant doucement au fond de la piece, sur laquelle on coule la bourre, appuyant dessus avec le refouloir sans battre. La piece étant chargée de la sorte, pointée & posée sur la semelle, comme il est dit ci-dessus, il n'y aura plus que le trop ou le trop peu de charge qui puisse empêcher le coup d'aller où l'on veut. Mais on a bien-tôt trouvé la véritable charge qu'il lui faut, car en chargeant toûjours de même poudre & de mesure, on l'augmente ou diminue jusqu'à ce qu'on voye le boulet entrer dans l'ouvrage, effleurant le sommet du parapet ; ce qui se voit aisément, parce qu'on conduit le boulet à l'oeil. Quand on a une fois trouvé la vraie charge, il n'y a qu'à continuer : comme la piece ne recule pas, au moins sensiblement, à cause de cette charge qui est beaucoup plus petite que la charge ordinaire, tant que la même poudre dure, le boulet se porte toûjours où il doit aller.
Observez aussi que quand on change de poudre, il faut prendre garde au ricochet, & le régler de nouveau ; & quand il est trop fort, c'est-à-dire quand il éleve considérablement, il sera bon de l'abaisser & d'employer pour cet effet le coin de mire, & augmenter la charge afin de le roidir un peu davantage ; il en devient plus dangereux : mais il faut prendre garde à deux choses ; l'une, de ne pas trop roidir, parce qu'il pourroit passer sans plonger ; & l'autre, qu'il rase toûjours les paniers dont les soldats assiégés se couvrent ; & quand il en abat quelqu'un, il n'est que meilleur ; car c'est la perfection de bien tirer, que de raser toûjours le sommet du parapet le plus près qu'il est possible, sans le toucher ; un peu d'expérience & d'attention l'ont bientôt reglé.
Il faut encore bien prendre garde à une chose, c'est que le ricochet ne doit pas faire bond sur le parapet des faces prolongées, mais sur le rempart qui est derriere ; c'est pourquoi il faut toûjours laisser quatre toises ou environ, depuis le devant des pieces que l'on bat jusqu'à l'endroit où l'on pointe. Quand il y a lieu de changer d'objet & de battre en revers sur le chemin couvert, ou dans le fossé ou sur l'arriere des bastions, il n'y a qu'à donner un peu de flasque à la piece, la repointer, & toûjours l'abattre sur la semelle, & remonter ensuite le ricochet jusqu'à ce qu'on soit ajusté, après quoi il n'est plus nécessaire d'y retoucher. Quand les pieces sont dirigées sur ce qu'on veut battre, comme elles ne reculent point, on peut les affermir pour la nuit & le jour, & quand même il faudroit les contenir par des tringles cloüées sur les plates-formes pour mieux s'en assûrer, cela n'en seroit que mieux.
Le nombre des pieces aux batteries à ricochets doit être depuis cinq jusqu'à huit ou dix ; si l'on en mettoit moins, le ricochet seroit trop lent, & laisseroit du tems à l'ennemi, dont il pourroit se prévaloir pour travailler à ses retranchemens.
Par cette raison on ne doit jamais permettre de tirer en salve, mais toûjours un coup après l'autre par intervalles égaux.
On ne doit jamais non plus tirer à ricochet qu'on ne charge avec des mesures, c'est de quoi on doit être abondamment fourni.
Les mesures nécessaires doivent être de fer blanc, comme celles dont on mesure le sel, savoir, d'une once, de deux, de trois, de quatre, de huit qui font la demi-livre, de seize onces qui font la livre.
Cette quantité par chaque piece doit suffire, & même on pourroit se contenter de moins ; car s'il s'agit de charger d'une once, vous en aurez la mesure, si de deux, vous l'avez aussi ; si de trois, de même ; si de quatre, vous l'avez encore ; si de cinq, ajoûtez un à quatre ; si de six, ajoûtez deux à quatre ; si de sept, ajoûtez trois à quatre ; la huitieme fait la demi-livre, qui répetée deux fois fait la livre ; trois fois fait la livre & demie ; quatre fois font deux livres.
Il vaut mieux néanmoins avoir quelques mesures de plus pour ne point tâtonner, & les faire toutes numéroter avec bien de l'exactitude. On est bientôt accoûtumé au ricochet, qui est la meilleure & la plus excellente maniere d'employer utilement le canon dans les siéges.
Les propriétés de ces batteries dans les commencemens d'un siége, sont,
1°. De démonter promtement les barbettes & toutes les autres pieces montées le long des faces des bastions & demi-lunes, qui peuvent incommoder la tranchée, en battant à pleine charge.
2°. De plonger les fossés, y couper les communications de la place aux demi-lunes, principalement s'ils sont pleins d'eau.
3°. De chasser l'ennemi des défenses de la place opposées aux attaques, en battant à ricochet.
4°. De chasser l'ennemi des chemins couverts, & de l'y tourmenter tellement par la rupture des pallissades, en les plongeant d'un bout à l'autre, qu'il soit obligé de les abandonner.
5°. De prendre le derriere des flancs & des courtines qui peuvent s'opposer aux passages des fossés & les rendre inutiles.
6°. D'être d'une grande oeconomie, en ce qu'elles peuvent servir tant que le siége dure, sans qu'on soit obligé de changer les batteries.
7°. De consommer sept ou huit fois moins de poudre, & de ne tirer jamais inutilement.
8°. De tirer plus juste & plus promtement, & bien plus efficacement que par toutes les autres manieres de battre.
Après les batteries à ricochet, il n'en faut pas d'autres que celles du chemin couvert ; car pour ce qui est de rompre les défenses, outre qu'elles sont de longue discussion, c'est une erreur, on ne le fait jamais ; & il n'arrive point qu'un parapet à l'épreuve soit assez rasé pour que l'on ne s'en puisse plus servir. D'ailleurs cela est inutile quand le ricochet est bien placé & qu'il fait son devoir : ainsi toutes les autres batteries nécessaires doivent s'établir sur le haut du parapet du chemin couvert, & se doivent border ; elles sont toutes de même espece, mais elles ont différens usages.
Les premieres en ordre doivent être les deux d, d, (Planche XVII. de l'Art milit. fig. 1.) quatre pieces chacune destinée à l'ouverture de la demi-lune C ; on les place de part & d'autre de son angle, à-peu-près dans les endroits marqués d, d ; & quand la demi-lune est prise, on les peut changer de place, en les mettant un peu à droite & un peu à gauche, pour enfiler son fossé, afin de pouvoir battre en breche les épaules des bastions, comme on le voit en e e.
Après que les breches sont faites, soit à la demi-lune, soit aux bastions, & bien éboulées, on tient ces batteries en leur premier état, toûjours prêtes à battre le haut jusqu'à ce qu'on en soit le maître ; on biaise même les embrasures pour aggrandir les breches ; observant que pour faire breche avec le canon, il faut toûjours battre en salve, & le plus bas qu'on peut, mais jamais le plus haut, parce que cela attire des ruines au pié qui rompent l'effet du canon. Pour bien faire, il ne faut pas que la sappe ait plus de six à sept piés de haut. On ne doit jamais quitter le trou qu'on bat, qu'on ne l'ait enfoncé de 8 à 10 piés au moins, après quoi on leur fait élargir la breche, comme on l'a dit ci-dessus, ce qui est une affaire de vingt-quatre heures au plus : on peut donc dire que les batteries des demi-lunes ont trois usages :
Le premier, est celui d'ouvrir la piece attaquée.
Le second, de battre le haut de la breche.
Et le troisieme, d'ouvrir le corps de la place par des orillons.
Les secondes batteries en ordre sont celles marquées h, h, (Planche XVII. de l'Art milit. fig. 1.) qui s'établissent sur le haut du chemin couvert, devant les faces des bastions A B qu'on veut ouvrir.
Les bombes se peuvent aussi tirer à ricochet. M M. les commandans de l'école d'artillerie de Strasbourg ont fait en 1723 des expériences à ce sujet, rapportées de cette maniere dans le Bombardier François. " Pour tirer les bombes à ricochet on se sert de mortiers de huit pouces montés sur des affuts de canon. Les batteries que l'on fait pour cela, se placent sur le prolongement des branches du chemin couvert. ou de tout autre ouvrage, mais principalement du chemin couvert, parce que les bombes y font un si grand ravage, qu'il n'est presque pas possible de pouvoir y tenir. Elles rompent les pallissades, les tambours & reduits que l'on fait dans des places d'armes rentrantes, & causent bien plus de desordre que les boulets ; car non-seulement elles sont plus grosses & plus pesantes, mais après avoir faits plusieurs bonds, elles crevent à l'endroit où elles viennent se terminer & ne s'enterrent point. Leurs éclats sont toûjours meurtriers ; d'autre part ces mortiers peuvent être servis avec beaucoup plus de célérité que les canons ; car il n'est question que de mettre la poudre dans sa chambre, la bombe dessus, & tirer ; & comme cela peut se faire en 3 ou 4 minutes, une batterie de deux mortiers servie de cette façon, pourra jetter trente ou quarante bombes par heure. Je laisse à penser, ajoûte M. Belidor, si un chemin couvert étoit croisé par de semblables batteries, quelle est la garnison qui pourroit s'y maintenir, l'avantage qu'on auroit de l'attaquer de vive force, & combien on auroit de facilité pour avancer les travaux.
Comme il faut éviter que les bombes ne s'enterrent en tombant, parce qu'elles ne feroient point le ricochet, les mortiers ne doivent jamais être pointés au-dessus de 12 degrés : mais on peut se servir de tous les angles que le mortier pent faire avec l'horison entre 8 & 12 degrés, & choisir le plus convenable à la charge dont on se servira, relativement à la distance dont on sera de l'endroit où les bombes doivent commencer à bondir. Les épreuves faites à Strasbourg peuvent servir de regles à ce sujet. Voici en quoi elles consistent.
On a construit une batterie à 70 toises de l'angle saillant du chemin couvert de la demi-lune du polygone de cette école : un mortier pointé à 9 degrés au-dessus de la ligne horisontale, & chargé de 13 quarterons de poudre, a jetté les bombes sur le glacis, à 2, 4, 6, 8 toises du parapet du chemin couvert, d'où elles se relevoient & alloient plonger dans la branche entre les deux traverses, & de-là dans la place d'armes rentrante contre un petit réduit qu'on y avoit fait.
L'on a pointé ensuite à 10 degrés avec la même charge, & après cinq ou six coups répétés de cette maniere, l'on a observé que les bombes tomboient dans la place d'armes saillante, d'où elles se relevoient & alloient plonger comme les précédentes, dans la branche entre les deux traverses, & de-là dans la place d'armes rentrante. Enfin on a pointé le mortier à 11 degrés toûjours avec la même charge, & après cinq ou six coups réitérés, on a observé que les bombes tomboient encore dans la branche, entre les deux traverses ; d'où elles se relevoient & alloient passer par-dessus le reste du chemin couvert : ce qui a fait conclure que la maniere la plus avantageuse & la plus convenable de faire agir ce ricochet, étoit de ménager la direction du mortier ; desorte que les bombes pussent tomber sur la crête du chemin couvert, ou dans la place d'armes saillante, moyennant quoi elles faisoient toûjours un grand effet.
On a éprouvé si la fusée ne s'éteindroit point, soit par la chûte des bombes, ou par le frottement du ricochet en roulant ; & pour cela on en a fait tirer plusieurs avec des fusées allumées, qui ont toutes réussi, ayant été entierement consumées ".
BATTERIES EN ROUAGE, sont celles qu'on destine à démonter les pieces de l'ennemi.
BATTERIES ENTERREES, sont celles dont les plates-formes sont enfoncées dans le terrein de la campagne ; de maniere que ce terrein sert de parapet ou d'épaulement à la batterie, & qu'on peut y pratiquer des embrasures.
BATTERIES DIRECTES, sont celles qui battent à peu-près perpendiculairement les côtes des ouvrages devant lesquels elles sont placées.
BATTERIES MEURTRIERES. Voyez BATTERIES DE REVERS.
BATTERIES DE REVERS, sont celles qui battent le derriere d'un ouvrage, & qui voyent le dos de ceux qui le défendent. Elles sont aussi appellées batteries meurtrieres, à cause qu'elles sont les plus dangereuses, & qu'il est fort difficile de se parer ou mettre à couvert de leur canon.
BATTERIES EN ECHARPE, sont celles dont les tirs font un angle au plus de 20 degrés avec les faces, ou les côtés des pieces qu'elles battent. On les appelle aussi quelquefois batteries de bricole ; parce que le boulet ne faisant, pour ainsi dire, qu'effleurer la partie sur laquelle il est tiré, se réfléchit dans les environs, à peu-près comme le fait une balle de billard, qui a frappé la bande obliquement.
BATTERIE D'ENFILADE, est celle qui découvre toute la longueur de quelque partie d'un ouvrage de fortification ; ensorte que le boulet peut prendre par le flanc ou le côté, tous ceux qui sont placés sur ce côté, & qui font face au parapet.
BATTERIES EN CROIX, ou BATTERIES CROISEES, ou encore en CHAPELET, sont dans l'Art militaire, des batteries qui se croisent pour battre la même face ; ensorte que l'une acheve ce que l'autre a commencé d'ébranler. (Q)
BATTERIES, (Marine) c'est une quantité de canon placé des deux côtés du vaisseau, à son avant & à son arriere.
Les gros vaisseaux de guerre ont trois batteries ; la premiere qui est la plus basse, porte les canons du plus fort calibre. La seconde est au-dessus de la premiere, c'est-à-dire, au second pont, & porte des canons d'un moindre calibre. La troisieme est sur le dernier pont, ou pont d'en-haut ; chaque rang étant ordinairement de quinze sabords, sans y comprendre ceux de la sainte barbe, & les batteries qui sont sur les châteaux. La premiere batterie, qui est la plus basse, doit être pratiquée assez haut, pour que dans le gros tems elle ne soit pas noyée, c'est-à-dire, qu'elle ne se trouve pas sous l'eau, ce qui la rendroit inutile.
Voyez à la Pl. I. Mar. la maniere dont les batteries sont disposées dans un vaisseau du premier rang.
BATTERIE TROP BASSE ou BATTERIE NOYEE, se dit d'un vaisseau qui a son premier pont & ses sabords trop près de l'eau.
BATTERIE BASSE, se dit de la batterie du premier pont.
BATTERIE HAUTE, se dit de la batterie du pont d'en-haut.
BATTERIE ENTRE DEUX PONTS ou SECONDE BATTERIE.
Mettez la batterie dehors, c'est-à-dire, mettez les canons aux sabords.
Mettre la batterie dedans, c'est-à-dire, ôter les canons des sabords pour les remettre dans le vaisseau. (Z)
BATTERIE, (terme d'Arquebusier) c'est un morceau de fer large d'un bon pouce, qui est reployé en équerre plate, dont les faces extérieures sont un peu arrondies ; les intérieures sont exactement plates : la face de dessous sert pour couvrir le bassinet & empêcher l'amorce de sortir : celle qui la surmonte sert pour faire sortir du feu de la pierre & allumer l'amorce. La partie qui couvre le bassinet a une petite oreille plate, qui est percée d'un trou où se place une vis qui assujettit la batterie au corps de platine, & qui ne l'empêche point de se mouvoir en retournant dessus la vis. Le bout de cette oreille forme un petit talon qui est fait en rond, & qui pese sur le ressort de la batterie.
BATTERIE, (en Boissellerie) c'est le pié, ou le dessous, ou fond du tamis. On l'appelle peut-être ainsi, parce que l'on remue le tamis en le battant par en-bas sur une table, &c. pour mieux faire passer ce qui est dedans.
BATTERIE, (terme de Chapelier) qui signifie l'endroit où on foule les chapeaux, & où sont établis le fourneau, la chaudiere & les fouloirs. On dit une batterie à deux, à quatre, à huit, &c. pour désigner une foulerie où deux, quatre, huit &c. ouvriers peuvent travailler à la fois. Voyez FOULERIE, voyez aussi CHAPEAU.
BATTERIE, se dit dans les Manufactures à papier, à poudre, & autres, de la chûte des pilons dans les mortiers. Ainsi arrêter la batterie, c'est empêcher les pilons de tomber dans les mortiers. Voyez MOULIN A PAPIER, MOULIN A POUDRE.
BATTERIE (chez les Chapeliers & Bonnetiers) est synonyme à foulerie. Voyez CHAPELLERIE & BONNETTERIE.
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BATTEURS | BATTEURS
BATTEUR, s. m. nom commun dans les Arts méchaniques, à un grand nombre d'ouvriers dont l'emploi est d'écraser, de pulvériser, ou d'étendre ; & pour les distinguer les uns des autres, on ajoute au terme batteur celui de la matiere, & l'on dit batteur de plâtre, de soude, d'étain, d'or, &c.
Le batteur de plâtre, est celui qui écrase le plâtre après qu'il est cuit : pour cet effet il en étend à terre une certaine quantité qu'il frappe avec sa batte jusqu'à ce qu'il soit assez menu pour être gaché.
Le batteur de soude est celui qui chez les Epiciers pile la soude dans un mortier de fer avec un pilon de même matiere.
Le batteur d'étain, est celui qui chez les Miroitiers étend sur un marbre l'étain qui doit être appliqué en feuilles très-minces derriere les glaces.
Le batteur d'or, est celui qui réduit sur le marbre l'or dans ces feuilles très-minces qu'on vend par livrets, & qui servent à dorer la plûpart des ouvrages qui se font en argent, en cuivre, en bois, &c. On trouvera à l'article BATTRE L'OR une description étendue du métier du batteur d'or.
Les Batteurs d'or à Paris sont un corps de maîtres-marchands, ayant des statuts, priviléges & reglemens, suivant lesquels ils se conduisent dans leur communauté : ils ne sont pas plus de trente environ, dont les uns ne battent que de l'or uniquement, & les autres l'argent ; ayant néanmoins le choix de l'un ou de l'autre commerce, & pouvant même les faire tous les deux à la fois.
* BATTEUR en grange ; c'est à la campagne l'ouvrier ou l'homme de journée qui frappe le blé avec un fléau, pour faire sortir le grain de l'épi. Voy. BLE.
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BATTITURES | S. f. (Mat. med.) écailles des métaux qui s'en séparent en les battant : elles ont les mêmes usages en Médecine que les métaux dont on les tire. (N)
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BATTOIR | S. f. (Arts méchaniq.) instrument de bois plat, large & quarré, qui est plus ou moins épais, selon les différens usages auxquels il doit être appliqué, & qu'on tient à la main par le moyen d'un manche rond & tout d'une piece avec l'autre partie que j'appelle la pelle. Les blanchisseurs & autres ouvriers ont leurs battoirs. Voyez BATTE.
BATTOIR, terme de Paume, est un instrument rond ou quarré par un bout, garni d'un long manche, le tout couvert d'un parchemin fort dur : on s'en sert à la longue paume pour chasser les balles.
BATTORIE, s. f. (Comm.) nom que les villes Anséatiques donnent aux comptoirs ou magasins qu'elles ont hors de chez elles. Les principales de ces battories sont celles d'Archangel, de Novogrod, de Berghen, de Lisbonne, de Venise & d'Anvers. Elles en avoient aussi une à Londres : mais il y a déja du tems qu'elles s'en sont retirées à cause des impositions excessives qu'on mettoit sur leurs marchandises. (G)
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BATTRE | frapper, (Gramm.) Battre marque plusieurs coups ; c'est avoir frappé que d'en avoir donné un. On n'est point battu qu'on ne soit frappé ; on est quelquefois frappé sans être battu. Battre suppose toûjours de l'intention ; on peut frapper sans le vouloir. Le plus violent frappe le premier ; le plus foible doit être battu. Frapper est toûjours un verbe actif ; battre devient neutre dans se battre : car se battre ne signifie point se frapper soi-même de coups redoublés, mais seulement combattre quelqu'un. La loi du prince défend de se battre en duel ; celle de Jesus-Christ défend même de frapper.
BATTRE, en terme de l'Art militaire, signifie attaquer une place, un ouvrage, &c. avec beaucoup d'artillerie. Voyez BATTERIE.
Battre en breche, c'est ruiner avec le canon le revêtement ou le rempart de quelque ouvrage que ce soit, pour y faire une ouverture par laquelle on puisse y entrer.
Battre par camarade, est quand plusieurs pieces de canon tirent tout à la fois sur un même ouvrage, soit d'une même batterie, soit de plusieurs.
Battre en salve : c'est tirer tout à la fois les différentes pieces d'une batterie, avec lesquelles on bat un ouvrage en breche.
Battre en écharpe ; c'est battre un ouvrage sous un angle au plus de 20 degrés.
Battre de bricole ; c'est battre un ouvrage par réflexion, c'est-à-dire faire frapper le boulet à une partie du revêtement, ensorte qu'il puisse se réflechir, & se porter à celle qu'on veut détruire ou incommoder.
Battre en sappe, c'est battre un ouvrage par le pié de son revêtement. (Q)
Battre la chamade. Voyez CHAMADE.
BATTRE la mesure, en Musique ; c'est en marquer les tems par des mouvemens de la main ou du pié, qui en reglent la durée, & qui rendent toutes les mesures semblables parfaitement égales en tems.
Il y a des mesures qui ne se battent qu'à un tems, d'autres à deux, à trois, & à quatre qui est le plus grand nombre de tems que puisse renfermer une mesure : encore cette derniere espece peut-elle toûjours se résoudre en deux mesures à deux tems. Dans toutes ces différentes mesures, le tems frappé est toûjours sur la note qui suit la barre immédiatement ; celui qui la précede est toûjours levé, à moins que la mesure ne soit à un seul tems.
Le degré de lenteur ou de vîtesse qu'on donne à la mesure, dépend 1°. de la valeur des notes qui la composent ; on voit bien qu'une mesure qui contient une ronde, doit se battre plus posément & durer davantage que celle qui ne contient que deux croches : 2°. du caractere du mouvement énoncé par le mot François ou Italien, qu'on trouve ordinairement à la tête de l'air. Gravement, gai, vîte, lent, &c. sont autant d'avertissemens sur les manieres de modifier le mouvement d'une espece de mesure.
Les musiciens françois battent la mesure un peu différemment des Italiens : ceux-ci dans la mesure à quatre tems, frappent successivement les deux premiers tems, & levent les deux autres ; ils frappent aussi les deux premiers dans la mesure à trois tems, & levent le troisieme. Les François ne frappent jamais que le premier tems, & marquent les autres par différens mouvemens de la main à droite & à gauche : cependant la Musique Françoise auroit beaucoup plus besoin que l'Italienne d'une mesure bien marquée ; car elle ne porte point sa cadence par elle-même ; le mouvement n'en a aucune précision naturelle, on le presse, on le ralentit au degré du chanteur. Tout le monde est choqué à l'opéra de Paris du bruit desagréable & continuel que fait avec son bâton celui qui bat la mesure. Sans ce bruit personne ne la sentiroit : la Musique par elle-même ne la marque point : aussi les étrangers n'apperçoivent-ils presque jamais la mesure dans les mouvemens de nos airs. Si l'on y réfléchit bien, on trouvera que c'est ici la différence spécifique de la Musique Françoise & de l'Italienne. En Italie, la mesure est l'ame de la Musique ; c'est elle qui gouverne le musicien dans l'exécution : en France, c'est le musicien qui gouverne la mesure, & le bon goût consiste à ne la pas même laisser sentir.
Les anciens, dit M. Burette, battoient la Musique en plusieurs façons : la plus ordinaire consistoit dans le mouvement du pié, qui s'élevoit de terre & la supposoit alternativement, selon la mesure des deux tems égaux ou inégaux. (Voyez RYTHME) : c'étoit ordinairement la fonction du maître de Musique appellé Coryphée, ; parce qu'il étoit placé au milieu du choeur des musiciens, & dans une situation élevée, pour être vû & entendu plus facilement de toute la troupe. Ces batteurs de mesure se nommoient en Grec & à cause du bruit de leurs piés ; , à cause de l'uniformité, & si l'on peut parler ainsi, de la monotonie du rythme qu'ils battoient toûjours à deux tems. Ils s'appelloient en Latin pedarii, podarii, pedicularii. Ils garnissoient ordinairement leurs piés de certaines chaussures ou sandales de bois ou de fer, destinées à rendre la percussion rythmique plus éclatante, & nommée en Grec ; & en Latin pedicula, scabella ou scabilla, à cause qu'ils ressembloient à de petits marche-piés ou de petites escabelles.
Ils battoient la mesure non-seulement du pié, mais aussi de la main droite, dont ils réunissoient tous les doigts pour frapper dans le creux de la main gauche ; & celui qui marquoit ainsi le rythme, s'appelloit manuductor. Outre ce claquement de main & le bruit de sandale, les anciens avoient encore pour battre la mesure, celui des coquilles, des écailles d'huîtres, & des ossemens d'animaux, qu'on frappoit l'un contre l'autre, comme on fait aujourd'hui les castagnettes, le triangle, & autres pareils instrumens. (S)
BATTRE, a plusieurs sens dans le Manége, où l'on dit qu'un cheval bat à la main ou bégaye, pour marquer un cheval qui n'a pas la tête ferme, qui leve le nez, qui branle & secoue la tête à tout moment en secouant sa bride. Les chevaux turcs & les cravates sont sujets à battre à la main. Un cheval bat à la main, parce qu'ayant les barres trop tranchantes, il ne peut souffrir la sujetion du mors, quelque doux qu'il soit. Pour lui ôter l'envie de battre à la main, & lui affermir la tête, il n'y a qu'à mettre sous sa muserole une petite bande de fer plate & tournée en arc, qui réponde à une martingale. Cet expédient au reste ne fait que suspendre l'habitude ; car la martingale n'est pas plûtôt ôtée, que le cheval retombe dans son vice. Voyez MARTINGALE. On dit aussi qu'un cheval bat la poudre ou la poussiere, lorsqu'il trépigne ; qu'il fait un pas trop court, & avance peu : ce qui se dit de tous ces tems & mouvemens. Un cheval bat la poudre au terre-à-terre, lorsqu'il n'embrasse pas assez de terrein avec les épaules, & qu'il fait tous ses tems trop courts, comme s'il les faisoit dans une place. Il bat la poudre aux courbettes, lorsqu'il les hâte trop & les fait trop basses. Il bat la poudre au pas, lorsqu'il va un pas trop court, & qu'il avance peu, soit qu'il aille au pas par le droit, ou sur un rond, ou qu'il passege. On dit enfin qu'un cheval bat du flanc, quand il commence à être poussif. Le battement des flancs du cheval est une marque de plusieurs maladies. Battre des flancs, c'est les agiter avec violence. (V)
BATTRE l'eau, terme de Chasse ; quand une bête est dans l'eau, alors on dit aux chiens, il bat l'eau.
Se faire battre, c'est se faire chasser long-tems dans un même canton : on dit, ce chevreuil s'est fait battre long-tems.
* BATTRE, dans les Arts méchaniques, a différentes acceptions : tantôt il se prend pour forger, comme chez presque tous les ouvriers en métaux ; tantôt pour écraser, comme chez presque tous les ouvriers qui employent, la pierre, les minéraux, les fossiles. On bat le beurre ; Voyez BEURRE. On bat le tan ; voyez TAN. On bat en grange, voyez BATTAGE. On bat des pieux pour les enfoncer ; voyez MOUTON. On bat le papier, l'or, l'argent, les livres, &c. voyez ci-dessous quelques autres significations du même terme, ou quelques-unes des précédentes plus détaillées.
* BATTRE l'or, l'argent, le cuivre (Ordre encyc. Entend. Mém. Hist. Hist. de la Nat. employée, Arts Méchan. Art de battre l'or) c'est l'action de réduire ces métaux en feuilles extrèmement minces, mais plus ou moins cependant, selon le prix qu'on se propose de les vendre : cette action s'appelle batte, & l'ouvrier batteur.
Les opérations principales sont la fonte, la forge, le tirage au moulin, & la batte. On peut appliquer ce que nous allons dire de l'or aux autres métaux ductiles.
L'or qu'on employe est au plus haut titre, & il est difficile d'en employer d'autre : l'alliage aigrit l'or, le rend moins ductile ; & l'ouvrier qui l'allieroit s'exposeroit à perdre plus par l'inutilité de son travail, qu'il ne gagneroit par le bas aloi de la matiere. Les Batteurs d'or le prennent en chaux chez l'affineur de la monnoie, à vingt-quatre carats moins un quart, ou à cent trois livres l'once. Il y en a qui préferent à cet or les piastres, & autres anciennes pieces d'Espagne : ils prétendent que même en alliant l'or de ces monnoies il se bat mieux & plus facilement que celui qu'ils sont obligés d'acheter à cent trois livres l'once. Il y a trois sortes d'or en feuille ou battu ; l'or pâle, l'or fin ou verd, & l'or commun. On employe l'or dans toute sa pureté, & comme il vient de l'affinage dans l'or fin battu : il y a quatre gros de blanc ou d'argent sur l'once d'or, dans l'or pâle ou verd ; & jusqu'à douze grains de rouge, ou de cuivre de rosette, & six grains de blanc ou d'argent dans l'or commun.
On fond l'or dans le creuset avec le borax comme on voit Pl. du Batteur d'or, fig. 1. & quand il a acquis le degré de fusion convenable, on le jette dans la lingotiere a, qu'on a eu grand soin de faire chauffer auparavant pour en ôter l'humidité, & de frotter de suif.
Ces précautions sont nécessaires : elles garantissent de deux inconvéniens également nuisibles ; l'un en ce que les parties de la matiere fondue qui toucheroient l'endroit humide pourroient rejaillir sur l'ouvrier ; l'autre en ce que les particules d'air qui s'insinueroient dans l'effervescence causée par l'humidité entre les particules de la matiere, y produiroient de petites loges vuides ou soufflures, ce qui rendroit l'ouvrage défectueux. Après la fonte on le fait recuire au feu pour l'adoucir, & en ôter la graisse de la lingotiere.
Quand la matiere ou le lingot est refroidi, on le tire de la lingotiere pour le forger. On le forge sur une enclume b qui a environ trois pouces de large, sur quatre de long, avec un marteau c qu'on appelle marteau à forger ; il est à tête & à panne ; il pese environ trois livres ; sa panne peut avoir un pouce & demi en quarré, & son manche six pouces de long. Si l'ouvrier juge que ce marteau ait rendu sa matiere écroüie, il la fait encore recuire. d est le bloc de l'enclume.
Ou l'on destine la matiere forgée & étirée au marteau à passer au moulin, ou non : si l'on se sert du moulin, il suffira de l'avoir réduite sur l'enclume à l'épaisseur d'environ une ligne & demie, ou deux lignes, au plus. Le moulin est composé d'un banc très-solide, vers le milieu duquel se fixe avec de fortes vis le chassis du moulin : ce chassis est fait de deux jumelles de fer d'un demi-pouce d'épaisseur, sur deux pouces & demi de largeur, & quatorze pouces de hauteur. Ces jumelles sont surmontées d'un couronnement, qui avec la traverse inférieure servent à consolider le tout. Le couronnement & les jumelles sont unis par de longues & fortes vis. Dans les deux jumelles sont enarbrés deux cylindres d'acier, polis, de deux pouces de diametre, sur deux pouces & demi de longueur ; le supérieur traverse des pieces à coulisses, qui à l'aide d'une vis placée de chaque côté, l'approchent ou l'écartent plus ou moins de l'inférieur, selon que le cas le requiert : l'axe du cylindre inférieur est prolongé de part & d'autre du chassis ; à ses deux extrémités équarries s'adaptent deux manivelles d'un pié & demi de rayon, qui mettent les cylindres en mouvement. Les cylindres mobiles sur leur axe étendent en tournant la matiere serrée entre leurs surfaces, & la contraignent de glisser par le mouvement qu'ils ont en sens contraire.
L'artiste se propose deux choses dans le tirage ; la premiere, d'adoucir les coups de marteau qui avoient rendu la surface du métal inégal & raboteuse ; la seconde, d'étendre en peu de tems le métal très-également. Les ouvriers suppléoient autrefois au moulin par le marteau ; & quelques-uns suivent encore aujourd'hui l'ancienne méthode.
Ceux qui se servent du moulin obtiennent par le moyen de cette machine un long ruban, qu'ils roulent sur une petite latte ; ils le pressent fortement sur la latte, afin qu'il prenne un pli aux deux côtés de la latte, qu'ils retirent ensuite ; & afin que le ruban ne se détortille pas, qu'il conserve son pli aux endroits où il l'a pris, & que les surfaces de ces tours restent bien exactement appliquées les unes sur les autres, ils font deux ligatures qui les contiennent dans cet état, l'une à un bout, & l'autre à l'autre ; ces ligatures sont de petites lanieres de peau d'anguille. Cela fait, avec le même marteau qui a servi à forger, ils élargissent la portion du ruban comprise entre les deux ligatures, en chassant la matiere avec la panne vers les bords, d'abord d'un des côtés du ruban, puis de l'autre ; ensuite ils frappent sur le milieu pour égaliser l'épaisseur, & augmenter encore la largeur.
Lorsque la portion comprise entre les ligamens est forgée, ils ôtent les ligatures, ils inserent leurs doigts au milieu des plis, & amenent vers le milieu les portions qui étoient d'un & d'autre côté au-delà des ligatures ; de maniere que quand les ligatures sont remises, ce qui est précisément au-delà des ligatures, est la partie forgée qui étoit auparavant comprise entr'elles ; & que ce qui a été amené entr'elles, est la partie qui n'a pû être forgée, qui formoit le pli, & qui étoit au-delà des ligatures. Il est évident que cette portion doit former une espece de croissant : on forge cette portion comme la précédente, en commençant par les bords, & s'avançant vers le milieu d'un & d'autre côté, puis forgeant le milieu, jusqu'à ce que le ruban se trouve également épais & large dans toute sa longueur : cette épaisseur est alors à peu près d'une demi-ligne, ou même davantage.
Si l'on ne se sert point du moulin, on forge jusqu'à ce que la matiere ait à peu près l'épaisseur d'une forte demi-ligne, puis on la coupe toute de suite en parties qui ont un pouce & demi de long, sur un pouce de large ; ce qu'on ne fait qu'après le tirage au moulin, quand on s'en sert. Ces portions d'un pouce & demi de long sur un pouce de large, & une demi-ligne & davantage d'épais, s'appellent quartiers : on coupe ordinairement cinquante-six quartiers ; l'ouvrier prend entre ses doigts un nombre de ces quartiers, capable de former l'épaisseur d'un pouce ou environ, il les applique exactement les uns sur les autres, & il leur donne la forme quarrée sur l'enclume & avec la panne du marteau, commençant à étendre la matiere vers les bords, s'avançant ensuite vers le milieu, en faisant autant à l'autre côté, forgeant ensuite le milieu, & réduisant par cette maniere de forger réitérée tous les quartiers du même paquet, & tous à la fois, à l'épaisseur d'une feuille de papier gris, & à la dimension d'un quarré dont le côté auroit deux pouces.
Lorsque l'or est dans cet état, on prend des feuillets de vélin, on en place deux entre chaque quartier ; ainsi pour cela seul les cinquante-six quartiers exigent cent douze feuillets de vélin : mais il en faut encore d'autres qu'on met à vuide en-dessus & en-dessous ; & sur ces feuillets vuides, tant en-dessus qu'en-dessous, on met encore deux feuillets de parchemin. Cet assemblage s'appelle le premier caucher ; & les feuillets vuides, avec les feuillets de parchemin ou sans eux, s'appellent emplures. Ainsi voici donc la disposition & l'ordre du premier caucher, deux feuillets de parchemin, une vingtaine plus ou moins de feuillets de vélin vuides ; un quartier, deux feuillets de vélin ; un quartier, deux feuillets de vélin ; & ainsi de suite jusqu'à la concurrence de cinquante-six quartiers, une vingtaine de feuillets de vélin vuides, & deux feuillets de parchemin. L'usage des emplures est d'amortir l'action des coups de marteau sur les premiers quartiers, & de garantir les outils. Les Batteurs d'or entendent par les outils l'assemblage des feuillets de vélin. Le caucher se couvre de deux fourreaux ; le fourreau est une enveloppe de plusieurs feuillets de parchemin appliqués les uns sur les autres, & collés par les deux bouts, de maniere qu'ils forment une espece de sac ouvert. On a deux fourreaux ; quand on a mis le caucher dans un, on fait entrer le caucher & ce premier fourreau dans le second, mais en sens contraire : d'où il arrive que quoique les fourreaux soient tous les deux ouverts, cependant ils couvrent partout le caucher. V. fig. 6. un caucher, & fig. 7. & 8. les fourreaux. Mettre les fourreaux au caucher, cela s'appelle enfourer. Les feuillets de vélin & de parchemin sont des quarrés dont le côté a quatre pouces.
Le caucher ainsi arrangé, on le bat sur un marbre, comme on voit fig. 2. ce marbre est noir ; il a un pié en quarré, & un pié & demi de haut. On ajuste à sa partie supérieure une espece de boîte F, ouverte du côté de l'ouvrier : cette boîte s'appelle la caisse ; elle est faite de sapin, & revêtue en-dedans de parchemin collé : le parchemin collé qui s'étend jusque sur le marbre, n'en laisse appercevoir au milieu de la caisse que la portion e. La caisse est embrassée du côté de l'ouvrier par la peau h que l'ouvrier releve sur lui, & dont il se fait un tablier. Quand il travaille, cette peau ou tablier reçoit les lavures. On entend par les lavures, les parties de matiere qui se détachent d'elles-mêmes, ou qu'on détache des cauchers.
Comme l'action continuelle d'un marteau de douze à quinze livres sur une masse de pierre d'un poids énorme, ne manqueroit pas d'ébranler à la longue les voûtes d'une cave, s'il s'en trouvoit une immédiatement au-dessous ; dans ce cas, il est prudent de l'étayer, soit par une forte piece de bois, soit par un massif de pierre, placé sous l'endroit qui correspond au marbre du batteur d'or.
Il faut que la surface du marbre & du marteau soit fort unie, sans quoi les caucher ou outils, & les feuilles d'or seroient maculées. On bat le premier caucher pendant une demi-heure, en chassant du centre à la circonférence, le retournant de tems en tems, & appliquant au marbre la surface sur laquelle on frappoit, & frappant sur l'autre. Le marteau dont on se sert dans cette opération s'appelle marteau plat, ou à dégrossir : il pese quatorze à quinze livres ; sa tête est ronde & tant soit peu convexe : il a six pouces de haut, & va depuis sa tête jusqu'à son autre extrémité un peu en diminuant, ce qui le fait paroître cone tronqué : sa tête a cinq pouces de diametre ou environ. L'ouvrier a l'attention de défourrer de tems en tems son caucher, & d'examiner en quel état sont les quartiers. Il ne faut pas espérer qu'ils s'étendent tous également ; il en trouvera qui n'occuperont qu'une partie de l'étendue du feuillet de vélin ; d'autres qui l'occuperont toute entiere ; d'autres qui déborderont : il pourra, s'il le veut, ôter les avant-derniers, & il fera bien d'ôter les derniers : il est évident qu'après cette soustraction le caucher sera moins épais. Mais on empêchera les fourreaux d'être lâches, en insérant des petits morceaux de bois dans les côtés, entr'eux & le caucher.
On continuera de battre jusqu'à ce qu'on ait amené les quartiers restans à l'étendue ou environ des feuillets de vélin qui les séparent : cela fait, la premiere opération de la batte sera finie. Si on laissoit desafleurer les quartiers au-delà des outils, ceux-ci pourroient être gâtés.
Au sortir du premier caucher les quartiers sont partagés en quatre parties égales avec le ciseau. On a donc deux cent vingt-quatre nouveaux quartiers, dont on forme un second caucher de la maniere suivante : on met deux feuillets de parchemin, une douzaine de feuillets de vélin vuides ou d'emplures ; un quartier, un feuillet de vélin, un quartier, un feuillet de vélin ; & ainsi de suite jusqu'à cent douze inclusivement : une douzaine d'emplures, deux feuillets de parchemin ; deux autres feuillets de parchemin, une douzaine d'emplures ; un quartier, un feuillet de vélin ; un quartier, un feuillet de vélin ; & ainsi de suite jusqu'à cent douze inclusivement, douze emplures & deux feuillets de vélin.
D'où l'on voit que le second caucher est double du premier, & qu'il est séparé par le milieu en deux parts distinguées par quatre feuillets de parchemin, dont deux finissent la premiere part, & lui appartiennent, & deux appartiennent à la seconde part, & la commencent : en un mot il y a dans le milieu du second caucher quatre feuillets de parchemin entre vingt-quatre emplures de vélin, douze d'un côté & douze de l'autre. Au reste, il n'y a pas d'autre différence entre le premier caucher & le second : il a ses deux fourreaux aussi, il ne s'enfourre pas différemment, & les feuillets de vélin sont de la même forme & de la même grandeur.
Ce second caucher enfourré comme le premier, on le bat de la même maniere, avec le même marteau, & pendant le même tems que le premier : observant non-seulement d'opposer tantôt une des faces, tantôt l'autre au marteau & au marbre : au marbre celle qui vient d'être opposée au marteau & au marteau celle qui vient d'être opposée au marbre : mais encore de défourrer de tems en tems, de séparer les deux parts du caucher, afin de mettre en-dedans la face de l'une & de l'autre part qui étoit en-dehors, & en-dehors celle qui étoit en-dedans ; & d'examiner attentivement quand les quartiers desafleurent les outils : lorsque les quartiers desafleurent les outils, alors la seconde opération sera finie.
On desemplit le second caucher ; pour cet effet, on a à côté de soi le caucher même : on écarte les deux parchemins & les emplures ; on prend la premiere feuille d'or que l'on rencontre, & on l'étend sur un coussin, on enleve le second feuillet de vélin, & l'on prend la seconde feuille d'or qu'on pose sur la premiere ; mais de maniere que la seconde soit plus reculée vers la gauche que la premiere : on ôte un autre feuillet de vélin, & l'on prend une troisieme feuille d'or que l'on étend sur la seconde, de maniere que cette troisieme soit plus avancée vers la droite que la seconde : en un mot, on range les feuilles en échelle ; on fait ensorte qu'elles ne se débordent point en-haut, mais qu'elles se débordent toutes à droite & à gauche d'un demi-pouce ou environ ; puis avec un couteau d'acier, émoussé par le bout, & à l'aide d'une pince de bois leger qu'on voit fig. 10. on les prend toutes quatre à quatre, & on les coupe en quatre parties égales ; ce qui donne huit cent quatre vingt-seize feuilles.
Quand cette division est faite, voici comment on arrange ces huit cent quatre-vingt-seize feuilles : on laisse-là les feuillets de vélin ; on en prend d'une autre matiere qu'on appelle baudruche, & dont nous parlerons plus bas ; on met deux feuillets de parchemin, quinze emplures de baudruche, une feuille d'or, un feuillet de baudruche ; une feuille d'or, un feuillet de baudruche, & ainsi de suite jusqu'à quatre cent quarante-huit inclusivement ; puis quinze emplures, puis deux feuillets de parchemin ; puis encore deux feuillets de parchemin, puis quinze emplures ; puis une feuille d'or, puis un feuillet de baudruche, puis une feuille d'or, puis un feuillet de baudruche, & ainsi de suite, jusqu'à quatre cent quarante-huit inclusivement, puis quinze emplures de baudruche, & enfin deux feuillets de parchemin, cet assemblage s'appelle chaudret.
D'où l'on voit que le chaudret, ainsi que le second caucher, est divisé en deux parts au milieu, dans l'endroit où il se rencontre quatre feuillets de parchemin, dont deux appartiennent à la premiere part du chaudret, & la finissent, & deux à la seconde part, & la commencent.
Le feuillet du chaudret a environ cinq pouces en quarré ; il est de baudruche, matiere bien plus déliée & bien plus fine que le vélin ; c'est une pellicule que les Bouchers ou les Boyaudiers enlevent de dessus le boyau du boeuf : deux de ces pellicules minces collées l'une sur l'autre, forment ce qu'on appelle le feuillet de baudruche ; & ces feuillets de baudruche & de parchemin, disposés comme nous venons de le prescrire, forment le chaudret ; le chaudret s'enfourre comme les cauchers.
On bat environ deux heures le chaudret : le marseau est le même que celui des cauchers ; on observe en le battant tout ce qu'on a observé en battant le second caucher ; je veux dire de défourrer de tems en tems, d'examiner si les feuilles d'or desafleurent ou non ; de mettre en-dedans les faces des deux parts qui sont en-dehors, & celles qui sont en-dehors, de les mettre en-dedans ; de battre selon l'art, en chassant du centre à la circonférence &c. Lorsqu'on s'apperçoit que toutes les feuilles desafleurent, la troisieme opération est finie.
Alors on prend le chaudret défourré avec une tenaille a b c, qu'on voit figure 9. on sert le chaudret par un de ses angles, entre les extrémités a de la tenaille, on empêche la tenaille de se desserrer, en contraignant une de ses branches e, d'entrer dans un des trous de la plaque x, attachée à l'autre branche b ; on a à côté de soi un coussin d'un pié de large, sur deux piés & demi à trois piés de long, couvert de peau de veau, comme on le voit en 1, 2, fig. 3 ; on leve les feuillets de baudruche de la main gauche ; & de la droite, on enleve avec une pince de bois qu'on voit figure 10. les feuilles d'or ; on les rogne avec un couteau d'acier, & on les range par échelle sur le coussin ; on les divise en quatre parties égales ; ce qui donne quatre fois huit cent quatre-vingt-seize feuilles d'or : on divise ce nombre de quatre fois huit cent quatre-vingt-seize feuilles en quatre portions d'environ huit cent feuilles chacune, & l'on arrange ces huit cent feuilles d'or de la maniere suivante, afin de continuer le travail.
On prend deux feuillets de parchemin, vingt-cinq emplures de baudruche, une feuille d'or, un feuillet de baudruche ; une feuille d'or, un feuillet de baudruche, & ainsi de suite, jusqu'à huit cent inclusivement, puis vingt-cinq emplures, & enfin deux feuilles de parchemin. Cet assemblage forme ce qu'on appelle une moule ; les divisions du chaudret en quatre donnent de quoi former quatre moules qui se travaillent l'une après l'autre, & séparément.
La feuille de la moule a six pouces en quarré, comme disent les ouvriers très-improprement, c'est-à-dire a la forme d'un quarré, dont le côté a six pouces ; on l'enfourre, & on la bat plus ou moins de tems ; cela dépend de plusieurs causes ; de la disposition des outils, de la température de l'air, & de la diligence de l'ouvrier : il y a des ouvriers qui battent jusqu'à deux moules par jour. Chaque moule ne contient que huit cent feuilles d'or, quoiqu'il dût y en avoir quatre fois huit cent quatre-vingt-seize pour les quatre ; ce qui fait plus de huit cent pour chacune : mais partie de cet excédent s'est brisé dans la batte, quand il est arrivé que la matiere étoit aigre, ou qu'elle n'étoit pas assez épaisse pour fournir à l'extension ; partie a été employée à étouper les autres. On appelle étouper une feuille, appliquer une piece à l'endroit foible où elle manque d'étoffe.
C'est ici le lieu d'observer qu'il importoit assez peu que les cinquante-six premiers quartiers qui ont fourni un si grand nombre de feuilles, fussent un peu plus forts ou un peu plus foibles les uns que les autres ; la batte les réduit nécessairement à la même épaisseur : la seule différence qu'il y ait, c'est que dans le cours des opérations, les forts desafleurent beaucoup plus que les foibles.
On commence à battre la moule avec le marteau rond qui pese six à sept livres, qui porte quatre pouces de diametre à la tête, & qui est un peu plus convexe qu'aucun de ceux dont on s'est servi pour les cauchers & le chaudret, il s'appelle marteau à commencer ; on s'en sert pendant quatre heures ; on lui fait succéder un second marteau qui pese quatre à cinq livres, qui porte deux pouces de diametre à la tête, & qui est encore plus convexe que les précédens ; on l'appelle marteau à chasser, & l'on s'en sert pendant une demi-heure ; on reprend ensuite le marteau à commencer ; on revient au marteau à chasser, dont on se sert pendant encore une demi-heure, & l'on passe enfin au marteau à achever. Le marteau à achever porte quatre pouces de diametre à la tête, est plus convexe qu'aucun des précédens, & pese douze à treize livres. On a eu raison de l'appeller marteau à achever ; car c'est en effet par lui que finit la batte.
On observe aussi pendant la batte de la moule, de la frapper tantôt sur une face, tantôt sur une autre ; de défourrer de tems en tems, & d'examiner si les feuilles desafleurent : quand elles desafleurent toutes, la batte est finie. Il ne s'agit plus que de tirer l'or battu d'entre les feuillets de la moule, & c'est ce que fait la fig. 3. & de les placer dans les quarterons.
Pour cet effet, on se sert de la tenaille de la fig. 9. on serre avec elle la moule par l'angle, & l'on en sort les feuilles battues les unes avec les autres, à l'aide de la pince de bois de la fig. 10. on les pose sur le coussin ; on souffle dessus pour les étendre, on prend le couteau de la fig. 11. fait d'un morceau de roseau 5 ; on coupe un morceau de la feuille en ligne droite ; ce côté de la feuille qui est coupé en ligne droite, se met exactement au fond du livret & du quarteron ; que la feuille déborde de tous les autres côtés ; on continue de remplir ainsi le quarteron ; quand il est plein, on en prend un autre, & ainsi de suite. Lorsque la moule est vuide, on prend un couteau, & l'on enleve tout l'excédent des feuilles d'or qui paroît hors des quarterons ou livrets ; & l'on emporte ce que le couteau a laissé, avec un morceau de linge qu'on appelle frottoir.
Les quarterons dont on voit un, fig. 5. sont des livrets de vingt-cinq feuillets quarrés ; il y en a de deux sortes : les uns, dont le côté est de quatre pouces ; d'autres, dont le côté n'est que de trois pouces & demi. Un livret d'or dont le côté est de quatre pouces, se vend quarante sous ; un livret pareil d'argent, se vend six sous.
Quatre onces d'or donnent les cinquante-six quartiers avec lesquels on a commencé le travail. Il y a eu dans le cours du travail, tant en lavures qu'en rognures ou autrement, dix-sept gros de déchet. Ainsi quatre onces moins dix-sept gros, pourroient fournir trois mille deux cent feuilles quarrées, chacune de trente-six pouces de surface : mais elles ne les donnent que de 16 pouces en quarré ; car les feuilles qui sortent de la moule de 36 pouces en quarré, s'enferment dans un quarteron de 16 pouces en quarré. Ainsi l'on ne couvriroit qu'une surface de 41200 pouces quarrés, avec quatre onces d'or moins dix-sept gros, ou deux onces un gros : mais on en pourroit couvrir une de 115200 pouces quarrés.
Pour avoir de bons cauchers, il faut choisir le meilleur vélin, le plus fin, le plus serré & le plus uni. Il n'y a pas d'autre préparation à lui donner, que de le bien laver dans de l'eau froide, de le laisser sécher à l'air, & de le passer au brun ; on verra plus bas ce que c'est que le brun.
Quand à la baudruche, ou à cette pellicule qui se leve de dessus le boyau de boeuf, c'est autre chose : elle vient d'abord pleine d'inégalités & couverte de graisse ; on enleve les inégalités en passant legerement sur sa surface le tranchant mousse d'un couteau. Pour cet effet on la colle sur les montans verticaux d'une espece de chevalet ; le même instrument emporte aussi la graisse. Quand elle est bien égale & bien dégraissée, on l'humecte avec un peu d'eau ; & l'on applique l'une sur l'autre deux peaux de baudruche humides. L'humidité suffit pour les unir indivisiblement. Le batteur d'or paye soixante-quinze livres les huit cent feuilles ; cela est cher, mais elles durent : quatre mois, six mois, huit mois de travail continu les fatiguent, mais ne les usent point.
Avant que de les employer, le Batteur d'or leur donne deux préparations principales : l'une s'appelle le fond, & l'autre consiste à les faire suer. Il commence par celle-ci ; elle consiste à en exprimer ce qui peut y rester de graisse. Pour cet effet, il met chaque feuille de baudruche entre deux feuillets de papier blanc ; il en fait un assemblage considérable, qu'il bat à grands coups de marteau. L'effort du marteau en fait sortir la graisse, dont le papier se charge à l'instant. Donner le fond aux feuilles de baudruche, c'est les humecter avec une éponge, d'une infusion de canelle, de muscade, & autres ingrédiens chauds & aromatiques ; l'effet de ce fond est de les consolider, & d'en resserrer les parties. Quand on leur a donné le fond une premiere fois, on les laisse sécher à l'air, & on le leur donne une seconde fois ; quand elles sont seches, on les met à la presse & on les employe.
Les Batteurs donnent en général le nom d'outils aux assemblages, soit de vélin, soit de baudruche : & quand ces assemblages ont beaucoup travaillé, ils disent qu'ils sont las ; alors ils cessent de s'en servir. Ils ont de grandes feuilles de papier blanc qu'ils humectent, les uns de vinaigre, les autres de vin blanc. Ils prennent les feuillets de baudruche las ; il les mettent feuillets à feuillets entre les feuilles de papier blanc préparées ; ils les y laissent pendant trois ou quatre heures : quand ils s'apperçoivent qu'ils ont assez pris de l'humidité des papiers blancs, ils les en retirent & les distribuent dans un outil de parchemin, dont chaque feuillet est un quarré, dont le côté a douze pouces. Ils appellent cet outil plane. Pour faire sécher les feuillets de baudruche enfermés entre ceux de la plane ils battent avec le marteau la plane pendant un jour : puis ils les brunissent, ou donnent le brun ; c'est-à-dire, qu'ils prennent du gypse ou de ce fossile qu'on appelle miroir d'âne, qu'on tire des carrieres de plâtre ; qu'ils le font calciner, qu'ils le broyent bien menu, & qu'avec une patte de lievre, ils en répandent sur les feuillets de baudruche d'un & d'autre côté.
Le brun se donne aussi aux outils de vélin.
Il faut que les outils de baudruche soient pressés & séchés toutes les fois qu'on s'en sert ; sans quoi l'humidité de l'air qu'ils pompent avec une extrème facilité, rendroit le travail pénible. Il ne faut pourtant pas les faire trop sécher ; la baudruche trop seche est perdue.
On a pour presser & sécher en même tems la baudruche, un instrument tel qu'on le voit fig. 4. La partie M N O P peut contenir du feu : c'est une espece de vaisseau de fer ; le fond q est une plaque de fer : ce vaisseau & sa plaque peuvent se baisser & se hausser en vertu de la vis t u ; la bride a b c est fixe sur la plaque inférieure q r s : on insere entre ces plaques les outils enfermés entre deux voliches ; on serre la presse : on met du feu dans le vaisseau supérieur, dont la plaque m n o p fait le fond ; & l'on pose la plaque inférieure q r s, sur une poële pleine de charbons ardens : les outils se trouvent par ce moyen entre deux feux.
Quant aux outils de vélin, quand ils sont très-humides, on les répand sur un tambour ; c'est une boîte faite comme celle où l'on enfermeroit une chaufrette, avec cette différence qu'elle est beaucoup plus grande & plus haute ; & qu'au lieu d'une planche percée, sa partie supérieure est grillée avec du fil d'archal ; on étend les feuillets de vélin sur cette grille, & l'on met du feu dans le tambour.
Il paroît que les Romains ont possédé l'art d'étendre l'or : mais il n'est pas aussi certain qu'ils l'ayent poussé jusqu'au point où nous le possédons. Pline rapporte que dans Rome on ne commença à dorer les planchers des maisons, qu'après la ruine de Carthage, lorsque Lucius Mummius étoit censeur ; que les lambris du capitole furent les premiers qu'on dora : mais que dans la suite le luxe prit de si grands accroissemens, que les particuliers firent dorer les plats-fonds & les murs de leurs appartemens.
Le même auteur nous apprend qu'ils ne tiroient d'une once d'or que cinq à six cent feuilles de quatre doigts en quarré ; que les plus épaisses s'appelloient bracteae praenestinae, parce qu'il y avoit à Preneste une statue de la Fortune, qui étoit dorée de ces feuilles épaisses ; & que les feuilles de moindre épaisseur se nommoient, bracteae quaestoriae. Il ajoûte qu'on pouvoit tirer un plus grand nombre de feuilles que celui qu'il a désigné.
Il étoit difficile d'assujettir les Batteurs d'or à la marque. La nature de leur ouvrage ne permet pas de prendre cette précaution contre l'envie qu'ils pourroient avoir de tromper, en chargeant l'or qu'ils employent, de beaucoup d'alliage : mais heureusement l'art même y a pourvû, car l'or se travaillant avec d'autant plus de facilité, & ayant d'autant plus de ductilité, qu'il est plus pur, ils perdent du côté du tems & de la quantité d'ouvrage, ce qu'ils peuvent gagner sur la matiere, & peut-être même perdent-ils davantage. Leur communauté paye mille écus à la monnoie pour ce droit de marque.
Quoiqu'il ne s'agisse que de battre, cette opération n'est pas aussi facile qu'elle le paroît ; & il y a peu d'arts ou le savoir-faire soit si sensible ; tel habile ouvrier fait plus d'ouvrage & plus de bon ouvrage en un jour, qu'un autre ouvrier n'en fait de mauvais en un jour & demi.
Cependant le meilleur ouvrier peut avoir contre lui la température de l'air, dans les tems pluvieux, humides : pendant les hyvers nébuleux, les vélins & les baudruches s'humectent, deviennent molles, & rendent le travail très-pénible. C'est à la Physique à chercher un remede à cet inconvénient.
Il ne me reste plus qu'une observation à faire, c'est sur la découverte de la baudruche. Comment les hommes se sont-ils avisés d'aller chercher sur le boyau du boeuf cette pellicule déliée, sans laquelle ils auroient eu bien de la peine à étendre l'or ? Ce ne sont sûrement pas des considérations philosophiques qui les ont conduits là. La baudruche étoit-elle trouvée avant qu'on l'employât à cet usage ; ou bien est-ce le besoin qu'on en avoit qui l'a fait chercher ?
BATTRE, en termes de Cardeur de laine, c'est préparer la laine pour être huilée, en la secoüant sur une claie avec des baguettes, pour en ôter la poussiere.
BATTRE, en termes de Filassier, c'est écraser & adoucir la filasse à coups de maillet de bois.
BATTRE une allée, c'est après qu'elle est réglée, en affermir la terre avec la batte, pour la recouvrir ensuite de sable.
BATTRE LA CHAUDE, terme d'ancien monnoyage : avant la découverte du laminoir, on battoit les lingots d'or, d'argent, &c. sur l'enclume à grands coups de marteau, après avoir été retirés du moule ; ensuite on les donnoit aux ouvriers afin de recevoir les préparations nécessaires pour être empreints.
BATTRE, en termes de Potier, c'est étendre à la main un creuset, par exemple, sur son moule. Voyez MOULE.
BATTRE DU PAPIER, terme de Papetier, signifie l'applatir, & le rendre uni en le battant sur la pierre avec un marteau pesant, dont le manche est court & la masse large. Voyez PAPIER.
Dans les manufactures de papier, on se sert pour battre le papier & le lisser, d'un marteau, ou plûtôt d'une grosse masse de bois B fort pesante, emmanchée d'un long manche C aussi de bois, auquel l'arbre de la roue du moulin à papier, donne le mouvement par le moyen de plusieurs leviers ou morceaux de bois, qui sortent de cet arbre, & qui appuient sur l'extrémité du manche du marteau : l'ouvrier A est assis dans un creux, afin d'avoir les mains de niveau à la pierre D, sur laquelle il change le papier continuellement de place, pour le faire battre également partout ; il a autour de lui différentes piles de papier G G G, desquelles les unes sont le papier qu'il a retiré de dessous le marteau, & les autres celui qu'il doit y mettre.
BATTRE les livres pour les relier : le batteur doit tenir de la main droite un marteau pesant environ neuf à dix livres, & de la main gauche une partie du livre, que l'on nomme une battée, tel que Planc. premiere du Relieur, figure A. Son ouvrage est d'applatir les feuilles du livre avec art, pour que le livre soit facile à s'ouvrir. Il y a des papiers fort difficiles à unir.
BATTRE les cartons ; on bat sur la pierre à battre les cartons quand ils sont attachés au volume, pour en applanir toutes les inégalités.
BATTRE les ficelles : lorsque les ficelles sont passées dans les cartons, on en applatit les bouts avec le marteau à endosser sur la pierre à parer, pour éviter qu'elles fassent de l'élévation sous la couverture. On dit aussi rabaisser les ficelles.
BATTRE les plats : lorsque le livre est marbré sur le plat & que la couleur est seche, on bat le plat sur la pierre à battre avec le marteau à battre pour mieux effacer toutes les inégalités, s'il en est resté, & pour renforcer la couverture.
BATTRE devant, se dit chez les ouvriers qui s'occupent à battre un morceau de fer sur l'enclume, de ceux qui aident le forgeron avec de gros marteaux & qui sont placés devant lui ou à ses côtés.
BATTRE du tan ; terme de Tanneur, qui signifie concasser de l'écorce de chêne dans des mortiers, ou la faire réduire en poudre sous les pilons d'un moulin. Voyez TAN.
BATTRE une dame au jeu du revertier, c'est mettre une dame sur la même fleche où étoit placée celle de son adversaire. Quand toutes les dames sont battues hors du jeu, on ne peut plus joüer, à moins qu'on ne les ait toutes rentrées.
* BATTRE au trictrac, c'est en comptant de la droite à la gauche les points amenés par les dés, tomber de la fleche la plus voisine d'une de ses dames, sur une fleche de son adversaire où il n'y ait qu'une dame, cette dame découverte est battue, si le dernier point d'un des dés ou de tous les deux tombe sur elle.
On peut battre de trois façons ; d'un dé, de l'autre, & des deux ensemble.
On bat par doublets, lorsqu'on a amené le même point des deux dés, comme deux quatre, deux cinq, &c.
On bat à faux, lorsqu'en comptant les points amenés par les deux dés, le dernier point de l'un & de l'autre des dés tombe sur une fleche de l'adversaire couverte de deux dames.
On gagne sur une dame battue simplement & d'une façon, dans le grand jan, deux points ; de deux façons, quatre ; de trois façons, six.
On gagne sur une dame battue par doublets dans le grand jan, quatre points ; six dans le petit jan.
Quand on bat à faux, on perd ce qu'on eût gagné en battant bien.
On bat le coin comme une dame, quand on a le sien & que l'adversaire ne l'a pas.
On bat les deux coins quand on n'a que deux dames abattues, & que les points amenés par l'un & l'autre dés tombent tous les deux sur le coin.
On gagne quatre points quand on bat le coin ou les deux coins simplement ; six quand on les bat par doublets.
On en perd autant si on bat le coin à faux ; ce qui arrive quand on n'a que deux dames abattues, & que l'adversaire a son coin.
Il y a encore d'autres manieres de battre. Voyez TRICTRAC, DAME FLECHE, &c.
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BATTU | adj. (Marine) vaisseau battu de la tempête, se dit d'un vaisseau qui ayant essuyé des coups de vent, se trouve tourmenté ou maltraité par la mer. (Z)
BATTU, adj. se dit, dans les manufactures de soie, des ouvrages où il est entré beaucoup d'or & d'argent : on dit ce brocard est tout battu d'or.
BATTU, adj. pris subst. se dit chez les Tireurs d'or, du trait d'or ou d'argent quand il est écaché. Voyez TRAIT & TIREUR D'OR.
BATTU pas battu : voyez PAS.
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BATTUE | (faire la) dans les endroits où l'on tire la soie (voyez les articles SOIE & TIRAGE) ; c'est l'opération qui succede au tirage, & à la séparation des cocons : elle consiste à foüetter avec un balai les cocons dans la bassine pleine d'eau chaude, & placée devant la machine à tirer la soie, afin d'en séparer & démêler des brins ou fils, & en commencer ou continuer le tirage. Voyez SOIE.
* BATTUE, s. f. (Chasse) maniere de chasser le loup ; c'est la plus dangereuse pour les chasseurs & pour les loups ; pour les chasseurs, parce que si celui qui conduit cette chasse les dispose mal, ils sont exposés à s'entre-tuer ; pour les loups, parce que les loups effarouchés par une multitude d'enfans & de femmes de tout âge, qui sont armés de bâtons & qui traquent toute une forêt, sont tous chassés & forcés de passer devant les tireurs.
BATTUE, (Pêche) le poisson s'enfonce dans la boue pendant l'hyver ; on reconnoît sa grosseur par le creux qu'il y fait : on appelle ce creux la battue du poisson.
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BATTURE | S. f. (Marine) c'est un endroit où le fond s'éleve & que la mer couvre, mais où il n'y a pas assez d'eau pour qu'on y puisse passer sans danger. Voyez BASSE. (Z)
BATTURE, composition qu'on met sur les ouvrages de peinture à plat ou de bossage, comme la sculpture, & sur laquelle on applique de l'or ou du cuivre en feuilles.
Cette composition s'employe chaude, & se fait avec la colle de Flandre & du miel jaune, autant de l'un que de l'autre : on y ajoûte du vinaigre dans la quantité qu'on juge nécessaire pour la faire couler. (Q)
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BATUECA | ou LOS BATUECAS, (Géog.) peuples d'Espagne, dans le royaume de Léon, au diocèse de Coria, dans une vallée qu'on appelle le val de Batuecas, couverte par des montagnes presqu'inaccessibles, entre Salamanque au septentrion, Coria au midi, la riviere de Tormes au levant, & la roche de France au couchant. Il n'y a pas plus de 150 ans qu'il ont été découverts par le duc d'Albe. On conjecture que ce sont des restes des anciens Goths, qui s'étoient refugiés dans cette vallée entre des montagnes fort hautes, où ils avoient échappé aux Maures. D'autres disent au contraire que ce fut là que se retirerent plusieurs anciens Espagnols ou Iberes dans le tems de l'invasion des Goths, & où eux & leurs descendans vécurent séparés du commerce du reste des humains, jusqu'à ce que le hasard les fit découvrir par un fugitif, sous le regne de Philippe II. qui leur envoya des ecclésiastiques pour leur prêcher le Christianisme & leur faire changer de moeurs. Ils sont cependant encore aujourd'hui peu policés, & si grossiers, que les Espagnols disent d'un homme rustre, qu'il vient des vallées de Batuecas.
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BATURIN | (Géog.) ville de l'Ukraine, sur la Desne, autrefois résidence du général des Cosaques.
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BATUSABER | (Géog.) ville d'Asie, dans les Indes, dans la partie méridionale de la presqu'île de Malaca.
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BATZEN | (Commerce) monnoie d'Allemagne, qui est en usage sur les bords du Rhin & en Suabe. 22 1/2 batzen valent un florin & demi d'Empire, ce qui revient environ à 3 livres 15 sols argent de France ; ainsi un batzen fait quelque chose de plus que trois sous de notre monnoie.
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BAU | BAUX, BARROTS, c'est, en Marine ou construction de vaisseau, une solive qui est mise avec plusieurs autres semblables par la largeur ou par le travers du vaisseau, d'un flanc à l'autre, pour affermir les bordages & soûtenir les tillacs. Voyez Pl. V. fig. 1. dans la coupe transversale d'un vaisseau, les baux n° 69 & 119, & dans la Pl. IV. fig. 1. dans la coupe longitudinale d'un vaisseau sous les n° 119 & 69, la situation de ces baux & leur nombre.
Le bout de chaque bau porte sur des pieces de charpente appellées courbatons ou courbes, qui sont d'une figure triangulaire, & qui entretiennent les baux ou barrots avec les vaigres, voyez dans la Pl. 5. fig. 1. les courbatons n° 70, & les vaigres n° 32 ; & dans la Pl. IV. fig. 1, n° 70, les courbes ou courbatons du premier pont.
De part & d'autre des écoutilles il y a des barrotins ou demi-baux, qui se terminent aux hiloires, & qui sont soûtenus par des arcboutans ou pieces de bois mises de travers entre deux baux. Voyez Pl. IV. fig. 1. n° 73, les arcboutans du premier pont, & n° 77 les hiloires du premier pont.
Il faut remarquer qu'on ne se sert ordinairement du mot bau que pour le premier pont, & de celui de barrot pour les autres ponts. Voyez BARROT.
Pour donner l'épaisseur & la largeur aux baux du premier pont, la plûpart des constructeurs mettent un pouce & la huitieme partie d'un pouce pour chaque dix piés de la longueur du vaisseau, prise de l'étrave à l'étambord, chaque dix piés de long leur donne un pouce de tonture. Il y a aussi plusieurs constructeurs qui ont pour regle de donner aux baux l'épaisseur de l'étrave prise en-dedans.
Il y a d'autres charpentiers qui proportionnent les baux par la largeur du vaisseau. Ils donnent à ceux du premier pont, par chaque cinq piés de largeur, deux pouces d'épaisseur de haut en-bas : mais ils leur donnent un peu plus de largeur si le bois le permet, & comme ceux qui sont à l'avant & à l'arriere n'ont pas tant de largeur que les autres, on peut les tenir un peu moins épais si l'on veut. Ces mêmes charpentiers veulent qu'on leur donne six à sept pouces de rondeur, & qu'on fasse le faux point sur ce même modele : ils veulent que les baux ou barrots du haut pont soient un tiers moins larges & moins épais que ces premiers, mais ils leur donnent un peu plus de rondeur : ils posent les baux à trois ou à quatre piés l'un de l'autre, hormis ceux qui sont aux côtés des écoutilles des vaisseaux marchands, qui chargent toutes sortes de marchandises & de gros ballots ; ceux-là se posent à sept piés de distance l'un de l'autre.
Les bouts des baux surmontent de cinq pouces ou cinq pouces & demi les serre-banquieres, & sont assemblés à queue d'aronde. Voyez la Pl. V. fig. 1. au n° 68 & 69, le bau & le serre-banquiere du premier pont.
Au devant & au derriere des baux de dale & de lof, on pose des courbes à l'équerre, & il y en a une autre au-dessus du bau de dale qui est posée le long de la serre-gouttiere & le long de la barre d'arcasse. La serre-gouttiere s'ente dans le jarlot qu'on fait dans cette courbe.
MAITRE BAU, (Marine) c'est celui qui étant le plus long des baux, donne par sa longueur la plus grande largeur au vaisseau ; il est posé à l'embelle ou au gros du vaisseau, sur le premier gabarit.
FAUX BAU, (Marine) ce sont des pieces de bois pareilles aux baux, qui sont mises de six piés en six piés sous le premier tillac des grands vaisseaux, pour fortifier le fond du bâtiment & former le faux-pont. Voyez la Pl. V. fig. 1. les faux-baux côtés 38, & dans la Pl. IV. fig. 1 sous la même cote 38.
On pose le plus souvent les faux-baux à trois piés & demi au-dessous des baux du premier pont, c'est-à-dire, dans un vaisseau de 134 piés pris de l'étrave à l'étambord ; & par conséquent de 13 piés ou 13 piés 1/2 de creux depuis le premier pont ; & l'on suit à peu près cette proportion dans de plus grands vaisseaux. C'est sur ces faux-baux qu'on fait souvent un faux pont, dans lequel on pratique un retranchement derriere le grand mât, où le faux pont a le plus de hauteur : les soldats y couchent.
BAU DE DALE, (Marine) c'est celui qui est le dernier vers l'arriere.
BAU DE LOF, c'est celui qui est le dernier vers l'avant sur l'extrémité. (Z)
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BAUBIS | chiens, (Chasse) c'est ainsi qu'on appelle des chiens dressés au lievre, au renard & au sanglier. On leur coupe presque toute la queue. Ils sont plus bas de terre & plus longs que les autres, de gorge effroyable. Ils heurlent sur la voie. Ils ont le nez dur, & le poil demi-barbet.
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BAUCIS | BAUCIS
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BAUD | S. m. (Chasse) race de chiens courans qui viennent de Barbarie. Ils chassent le cerf. Ils sont ordinairement tous blancs : on les appelle aussi chiens muets, parce qu'ils cessent d'aboyer quand le cerf vient au change.
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BAUDEQUIN | S. m. (Comm.) petite monnoie de la valeur de six deniers ou environ, ainsi appellée, à ce qu'on conjecture, d'un baldaquin ou dais sous lequel le roi y étoit représenté. Elle étoit en usage au commencement du quatorzieme siecle.
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BAUDET | sub. m. c'est ainsi que les scieurs de planches appellent les treteaux ou chevalets sur lesquels ils placent leurs pieces élevées pour travailler.
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BAUDIR | BAUDIR
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BAUDOSE | S. f. espece d'instrument de Musique à plusieurs cordes, dont Aimery du Peyrat, abbé de Moisac, fait mention dans une vie de Charlemagne, manuscrite. Voyez n°. 1343 de la bibliotheque du roi, quidam baudosam concordabant.
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BAUDRIER | S. m. c'est chez les Ceinturiers, une bande de cuir large de quatre ou cinq doigts, le plus souvent enjolivée, qui prend depuis l'épaule droite & se vient rendre au côté gauche, & qui est composée de la bande & de deux pendans, au travers desquels on passe l'épée.
Le BAUDRIER (Hist. anc.) est une partie de l'habillement des gens de guerre, qui sert à porter leur épée. Les militaires qui étoient admis aux festins de l'empereur ou des généraux d'armées, avoient coûtume de quitter leurs baudriers ou ceinturons avant que de se mettre à table. Trebellius Pollion rapporte que dans un repas que l'empereur Galien donnoit à plusieurs officiers, le jeune Salonin, fils de ce prince, leur enleva leurs baudriers dorés & constellés, auratos constellatosque balteos. M. Baudelot, dans les Mémoires de l'Académie des Belles-Lettres, croit que ces baudriers constellés étoient des ceinturons chargés de pierres précieuses & de lames d'or & d'argent, sur lesquelles étoient gravées quelques figures mystérieuses de signes célestes, suivant les idées superstitieuses de la théologie payenne, ou qui avoient été fabriquées sous l'aspect de quelques constellations. Tertullien en décrivant quelques ceintures, semble vouloir parler de ces talismans ; latent in cingulis smaragdi. Or Pline & Marcellus Empiricus attribuent beaucoup de vertus aux figures d'aigles & de scarabées qu'on gravoit sur ces pierres, smaragdi. Les gens de guerre aussi superstitieux que d'autres, pouvoient avoir d'autant plus de foi à ces pierres constellées, dont leurs baudriers étoient enrichis, qu'on croyoit communément que c'étoit par la vertu d'un semblable amulete que Milon & Crotone avoient été invincibles dans les combats ; & que l'hématite, autre espece de pierre précieuse, n'étoit pas moins salutaire pour repousser les ennemis & les vaincre ; recherches que cet académicien appuie des témoignages de plusieurs anciens auteurs. Sans prétendre diminuer le mérite de toutes ces découvertes ingénieuses, j'hasarderai que comme dans le passage de Trebellius Pollion, auratos balteos signifie des baudriers ornés ou enrichis de dorures, constellatos y signifie tout simplement qu'ils étoient parsemés d'étoiles en broderie, & qu'apparemment Casaubon qui n'y a point entendu de mystere, a crû que ce sens se présentoit de lui-même, & n'avoit pas besoin d'explication. (G)
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BAUDROIE | rana piscatrix, s. f. (Hist. nat. Zoolog.) poisson de mer ainsi nommé, parce que sa bouche est si grande qu'on l'a comparée à un baudrier : on lui a donné le nom de rana, parce qu'il ressemble au tétard ; & on a ajoûté celui de piscatrix, parce qu'il est bon pécheur. La baudroie est plate, & de couleur brune ou enfumée ; sa tête est grosse, ronde, applatie, & garnie de plusieurs aiguillons ; l'ouverture de la bouche est au-devant de la tête, & non pas en-dessous ; la mâchoire inférieure & la langue sont plus longues que la mâchoire supérieure, c'est pourquoi la bouche est toûjours ouverte : chaque mâchoire a des dents longues, pointues, & recourbées en-dedans ; il s'en trouve sur le palais & sur la langue. Les yeux sont placés sur le dessus de la tête, dirigés de côté, & environnés d'aiguillons. Il y a au-devant des yeux deux barbillons, qui sont fort menus à leur naissance, & plus gros à leur extrémité : on prétend que par le moyen de ces barbillons, la baudroie est avertie de l'approche des petits poissons lorsqu'elle est dans le sable ou dans l'eau trouble. Elle a deux nageoires au milieu du corps, une de chaque côté, & une ouverture pour les oüies aussi de chaque côté, recouverte par une peau. La queue est épaisse, charnue, & terminée par une seule nageoire ; il s'en trouve une autre sur le dessus de la queue. Il y a de petits prolongemens charnus qui pendent des deux côtés de la tête de la queue, & qui sont placés à quelque distance les uns des autres. Ce poisson fait des oeufs ; sa chair est de mauvais goût & de mauvaise odeur. Lorsqu'on a tiré les entrailles par la bouche & qu'on a étendu le corps, on voit le jour au-travers ; & si on met une chandelle au-dedans, il paroît fort hideux ; c'est pourquoi les Italiens l'ont nommé diavolo di mare. Rondelet. Voyez POISSON. (I)
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BAUDROYER | v. act. vieux terme synonyme à courroyer ou préparer les cuirs, colorés seulement.
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BAUDROYEUR | S. m. ouvrier qui courroyoit les cuirs de couleur. La communauté des Baudroyeurs est unie à celle des Courroyeurs, qui se qualifient maîtres Baudroyeurs-Courroyeurs.
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BAUDRUCHE | S. m. en terme de Batteur d'or ; c'est une pellicule d'un boyau de boeuf apprêtée, dont ils font les feuillets de leurs outils. Voyez BATTRE l'or.
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BAUGE | S. f. (Commerce) espece de droguet d'une demi-aune de large au sortir du foulon, qui se fabrique en Bourgogne, sur des rats ou peignes de trois quarts, avec de la laine grossiere, & du fil filé gros.
* BAUGE, s. f. (Oeconomie rustique) c'est de la terre franche mêlée avec de la paille & du foin hachés. On pétrit ce mélange, on le corroie, & l'on s'en sert où le plâtre & la pierre sont rares. Les murs sont ou de bauge, ou de cailloux liés de bauge. Ces derniers ne s'en appellent pas moins murs de bauge. La plûpart des chaumieres ne sont pas construites d'autre chose. Quand la bauge est soûtenue par de la charpente, comme dans les granges, les étables & d'autres bâtimens, cela s'appelle torchis ; parce que cette charpente n'étant pour l'ordinaire qu'un assemblage de perches & de pieux lattés, pour remplir & consolider cette espece de grillage, on se sert de bâtons fourchus & de branches d'arbres qu'on enduit de bauge, & qui ressemblent assez alors à une torche ; on insere ces torches dans les entailles & ouvertures de la charpente, quand le mur est plein, on le crépit du haut en bas avec de la bauge pure & bien corroyée ; on l'unit avec la truelle, & l'on blanchit le tout, si l'on veut avec du lait de chaux ; ce cloisonnage est de peu de dépense ; & il est d'autant plus solide que les palissons ou palats (c'est ainsi qu'on appelle les bâtons ou rameaux qu'on enduit de bauge) sont plus courts, & par conséquent les perches & pieux qui forment la charpente plus serrés : il ne faut point employer de bois verd dans cette maniere de bâtir ; car il se déjette, & donne lieu à des crevasses & à la chûte des murs. Que les palissons ou palats soient de chêne ; que la terre soit bien délayée, & qu'elle soit en une pâte ni molle ni dure : voilà les conditions principales à observer dans la maniere de faire & d'employer la bauge.
* BAUGE, s. f. (Chasse) c'est le lieu où la bête noire, comme le sanglier, se couche tout le jour ; c'est ordinairement un endroit bourbeux & touffu de la forêt.
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BAUGÉ | (Géog.) ville de France, en Anjou, sur le Coesnon, à quatre lieues de la Fleche.
BAUGE, (Géog.) ville de France, dans la Bresse, dont elle étoit autrefois la capitale à une lieue de Mâcon.
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BAUGENCI | (Géog.) ville de France, dans l'Orléanois proprement dit avec titre de comté.
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BAUHINE | bauhinia, genre de plante dont le nom a été dérivé de celui de Jean & Gaspar Bauhin, la fleur des plantes de ce genre est polypétale irréguliere, composée pour l'ordinaire de cinq pétales tous rangés du même côté ; il s'éleve du fond du calice un pistil recourbé & entouré d'étamines aussi recourbées, il devient dans la suite une silique remplie de semences qui ont la forme d'un rein. Plumier, nova plant. Americ. gen. Voyez PLANTE. (I)
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BAUMANN | (Caverne de) elle est proche de Goslar, dans le comté de Blanckenburg, sous un rocher. On dit qu'on y trouve des pierres auxquelles la nature a donné la figure d'os d'animaux, & d'autres formes bisarres ; il y a six grottes qui communiquent les unes aux autres, & s'étendent sous terre à une très-grande profondeur ; on ajoûte sur ces grottes beaucoup de choses fabuleuses, qu'il est inutile de rapporter ici.
* BAUMARIS, (Géog.) ville située dans l'île d'Anglesey.
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BAUME | plante. Voyez MENTE. (I)
BAUME, proprement dénote une substance huileuse, résineuse, odoriférante, provenant des incisions de certaines plantes, d'une vertu souveraine pour la cure des plaies & de divers autres maux.
Nous l'appellons quelquefois par maniere de distinction, baume naturel. Nous disons baume de la Méque, baume du Pérou, de Tolu, de Copahu, d'ambre liquide à quoi peut être ajoûté le baume de Carpathie.
BAUME de Giléad, est des plus estimés, quoiqu'il y ait des auteurs qui veulent que celui du Pérou ne lui soit point inférieur en vertu. On le tire par incision d'un arbre du même nom, qui croît en Egypte & dans la Judée, mais principalement dans l'Arabie Heureuse, & qui est d'une si grande valeur, qu'il fait partie du revenu particulier du grand-seigneur, sans la permission duquel il n'est point permis d'en planter ou cultiver aucun. L'incision par laquelle cette admirable suc coule, se fait pendant la canicule. Théophraste dit qu'elle doit être faite avec des clous de fer ; Pline avec du verre, parce que, dit-il, le fer fait mourir la plante. Tacite nous dit que lorsque les branches sont pleines de seve, leurs veines semblent appréhender le fer, & s'arrêter quand une incision est faite avec ce métal, mais couler librement lorsqu'elles sont ouvertes avec une pierre, ou un têt de cruche cassée. Enfin Marmol dit que les veines doivent être ouvertes avec de l'ivoire ou du verre. Le suc est d'abord d'une couleur sombre : il devient ensuite blanc, enfin vert, & peu-à-peu d'une couleur d'or, & quand il est vieux, de la couleur du miel : il est de la consistance de la térébenthine ; son odeur est agréable & très-vive ; son goût amer, piquant, & astringent : il se dissout aisément dans la bouche, & ne laisse point de tache sur le drap.
Il est à remarquer que le suc qui nous est apporté pour du baume, n'est pas proprement la gomme, ou pleurs de l'arbre, extraites par incision, parce qu'il n'en rend que peu de cette façon ; mais est préparé du bois & des branches vertes de l'arbre distillées, & toutefois il se trouve même souvent sophistiqué avec de la térébenthine de Chypre, & d'autres résines & huiles, ainsi qu'avec du miel, de la cire, &c. Outre cela, il y a pareillement une liqueur extraite de la semence de la plante qu'on fait passer souvent pour le véritable baume, quoique son odeur soit beaucoup plus foible, & son goût beaucoup plus amer.
Le baumier est à-peu-près de la hauteur du grenadier ; ses feuilles semblables à celle de la rue, toûjours vertes ; ses fleurs blanches, & en forme d'étoiles, d'où sortent de petites cosses pointues, renfermant un fruit semblable à l'amande, appellé carpo-balsamum ; comme le bois est appellé xylo-balsamum, & le suc opo-balsamum. Voyez OPO-BALSAMUM, &c.
Le carpo-balsamum entre dans la composition de la thériaque de Venise, & n'a guere d'autre usage dans la Medecine : on doit le choisir d'un goût aromatique, & d'agréable odeur. Voyez CARPO-BALSAMUM. Le xylo-balsamum, qui comme les autres productions du baumier, est apporté du Caire, entre dans la composition des trochisques hedychrois ; il est apporté en petits fagots, ayant l'écorce rouge, le bois blanc résineux & aromatique. Voyez XYLO-BALSAMUM.
Il y a pareillement un baume de la Meque, qui est une gomme seche & blanche, ressemblante à la couperose, sur-tout quand elle est vieille. Elle est apportée de la Meque, au retour des caravanes de pélerins & marchands Mahométans, qui vont là par dévotion au lieu de la naissance de leur prophete. Elle a toutes les vertus du baume de Giléad, ou de la Judée, & est probablement le même baume, qui est seulement endurci, & dont la couleur est altérée.
BAUME du Pérou, est de trois especes, ou plûtôt un même baume à trois différens noms : savoir, baume d'incision, qui est une résine blanche & glutineuse provenant d'une incision faite dans l'arbre, & ensuite épaissie & endurcie. Il est excellent pour les plaies récentes, fraîches, & ressemble beaucoup à l'opo-balsamum, à l'odeur près qui le distingue. Baume sec, qui se distille des bouts de branches coupées, auxquelles sont attachés de petits vaisseaux pour recevoir la liqueur, qui est d'abord semblable à du lait, mais rougit étant exposée au soleil. Son usage principal est dans la composition du lait virginal, qui se fait beaucoup mieux avec ce baume, qu'avec le storax ou le benjoin. Enfin le baume de lotion, qui est noirâtre, est tiré de l'écorce, des racines, & feuilles de l'arbre hachées & bouillies ensemble ; on s'en sert pour les plaies comme du baume blanc, & il est fort en usage chez les parfumeurs, à cause de son odeur.
BAUME de Copahu, ou de Copaiba, vient du Brésil, dans des bouteilles de terre : il y en a de deux sortes, l'un est clair & liquide : l'autre est d'une couleur plus sombre & épais ? le premier est blanc, d'une odeur résineuse ; l'autre tire un peu plus sur le jaune ; tous deux sont admirables pour les plaies ; les Juifs s'en servent après la circoncision pour étancher le sang.
BAUME de Tolu, est une résine liquide, qui à mesure qu'elle vieillit, devient de la couleur & de la consistance de la colle de Flandre. Elle se tire par incision de quelques arbres qui croissent dans la nouvelle Espagne, où les habitans la reçoivent dans de petits vaisseaux de cire noire, elle ressemble au baume de Giléad pour le goût & pour l'odeur, selon qu'elle devient vieille, elle prend la consistance d'un baume sec.
BAUME d'ambre liquide, est une résine claire & rouge, produite par un arbre de la nouvelle Espagne, appellé par les naturels du pays ososol ; il ressemble à l'ambre gris, sur-tout par l'odeur, d'où vient son nom. Le nouveau baume est liquide, & est nommé huile d'ambre liquide : mais quand il est vieux, on l'appelle baume d'ambre liquide : il vient des deux Espagnes en barrils, & est très-rare parmi nous.
On le trouve souverain pour les plaies, particulierement pour les fistules à l'anus ; il ressemble au baume de Tolu par l'odeur & la couleur, & est exprimé, de la même maniere que l'huile du laurier, d'un fruit rouge qui croît dans l'île de Saint-Domingue.
BAUME, est aussi appliqué à de certaines compositions faites par les chimistes & apothicaires, principalement lorsqu'il y entre des ingrédiens balsamiques & consolidans, en imitation des baumes naturels.
Ceux-ci sont appellés par maniere de distinction, baumes factices ou artificiels. Nous avons deux différentes compositions de baumes, en imitation du bau me véritable d'Egypte ; l'un par Mathiole, l'autre par Furicus Cordus. Pomet a aussi donné une méthode d'imiter le baume naturel.
BAUME de Saturne, est un sel ou sucre de plomb dissous dans l'huile ou esprit de térébenthine, genievre ou semblables, digéré jusqu'à ce que la matiere ait acquis une teinture rouge. On dit qu'il résiste à la putréfaction des humeurs, & qu'il est propre à nettoyer & cicatriser les ulceres. (N)
BAUME de soufre ; c'est une dissolution du souffre par une liqueur huileuse. On peut employer pour cette opération toute sorte d'huile : mais de toutes les huiles, l'huile de térébenthine est la plus convenable pour tirer une teinture de soufre.
Le baume de soufre térébenthiné est le plus en usage. Pour le faire, on met dans un petit matras deux onces de fleurs de soufre, on verse dessus huit onces d'huile de térébenthine, on place le matras sur un feu de sable, & on fait un feu de digestion cinq ou six heures ; & après avoir laissé refroidir le tout, on sépare le baume d'avec le reste du soufre qui ne s'est point dissous, en versant à clair la liqueur qui a une couleur de rubis.
Le baume de soufre est en usage lorsqu'il y a ulcere aux poumons après une fluxion de poitrine, une pleurésie, une péripneumonie, après l'empyeme & la vomique, en général lorsqu'on soupçonne un abcès dans l'intérieur, & qu'on juge que la matiere peut prendre la route des urines ou celle de la transpiration. Il faut donner tous les matins, & quelquefois tous les après-midi, du baume de soufre dans de la conserve de violette, de rose, ou de fleurs de pié-de-chat, depuis une goutte jusqu'à dix.
Les femmes peuvent user de ce remede dans le tems même de leurs regles ; il ne les arrête pas, au contraire : mais il faut avoir l'attention de ne le pas donner lorsqu'il y a de la fievre ; & quand même il n'y auroit pas de fievre, il seroit contraire s'il y avoit de la secheresse : dans ce cas la térébenthine sans soufre convient mieux. Ou bien on fait le baume de soufre avec l'huile d'amandes douces : mais pour peu qu'il y ait disposition à la fievre, autre que la fievre lente, ces remedes ne conviennent point.
Il est bon de remarquer que les baumes de soufre mettent le sang en mouvement, & qu'ils sont pernicieux lorsqu'il y a érésipele ou disposition à l'érésipele.
Lorsque pour faire le baume de soufre on se sert de l'huile d'anis, on le nomme baume de soufre anisé. Ce baume est bon dans les maladies d'estomac & des intestins, il est moins desagréable que les autres. Lorsqu'on fait le baume de soufre avec l'huile de succin, on le nomme baume de soufre succiné : on l'emploie lorsqu'il y a complication par maladies de nerfs.
On fait aujourd'hui un grand usage du baume blanc de Canada ; mais les baumes de soufre m'ont paru beaucoup plus efficaces, dans la pratique de la Medecine, pour les ulceres du poumon, & pour ceux des reins. Lorsqu'on destine le baume de soufre pour être employé dans les maladies des reins, de la vessie & de la matrice, on le prépare avec l'huile de genievre.
On fait peu d'usage extérieurement du baume de soufre, quoiqu'il y fût fort utilement employé dans plusieurs occasions, il est vulnéraire & détersif en vuidant les extrémités des vaisseaux rompus ; il divise les humeurs visqueuses & purulentes, & les fait couler ; ce qui s'appelle déterger.
On peut faire un baume de soufre pour l'usage externe : on prend pour cela une once de fleurs de soufre ; on verse dessus de l'huile de lin, ou de l'huile de noix 6 onces, des huiles de millepertuis, de jusquiame & de pavot blanc, de chaque deux gros ; & on fait digérer le tout ensemble pour faire la dissolution du soufre. Malouin, Traité de Chimie. (M)
BAUME du Pérou artificiel : prenez huile d'olive une livre & demie, santal rouge une demie-once : faites bouillir jusqu'à ce que l'huile soit d'un rouge foncé : dissolvez-y cire jaune une livre, térébenthine fine une livre & demie, baume du Pérou une once.
Ces baumes tiennent lieu des naturels, & sont en grand usage pour l'extérieur. La plûpart des pharmacopées sont remplies de ces especes de baumes. Voici la description de ceux dont on se sert le plus ordinairement.
BAUME d'Arceus : prenez suif de bouc deux livres, térébenthine de Venise, gomme élemi, de chaque une livre & demie, graisse de porc une livre ; faites fondre le tout ensemble, passez, & vous aurez le baume : c'est un très-bon digestif, & le plus en usage dans la cure des plaies.
BAUME du Commandeur : prenez racine d'angélique de Bohème, séchée & coupée par petits morceaux, une demi-once ; fleurs de millepertuis séchées, une once ; esprit-de-vin rectifié, deux livres quatre onces : faites-les digérer au soleil ou au bain-marie dans un vaisseau fermé, en remuant de tems à autre le mélange, jusqu'à ce que la teinture soit parfaitement tirée : passez ensuite & dans la colature ajoûtez myrrhe, oliban, de chaque demi-once : faites digérer comme auparavant ; & ensuite prenez styrax calamite deux onces, benjoin choisi trois onces, baume de. Tolu une once, aloès succotrin demi-once : ajoûtez, si vous le jugez à propos, ambre gris six grains, mettez en poudre ces drogues, & les jettez ensuite dans la teinture ci-dessus énoncée, faites-les encore digérer pendant quarante jours au soleil ; filtrez, & conservez la colature pour l'usage.
Ce baume est un grand vulnéraire, détersif & incarnatif, appliqué à l'extérieur ; & pris à l'intérieur dans du vin ou dans quelqu'autre liqueur, il est excellent contre les coliques, les dévoiemens, les vomissemens ; il est propre pour exciter les regles : enfin on lui attribue, comme à tous les nouveaux remedes, de grandes vertus qui sont toûjours relatives aux indications qui se présentent dans les maladies : on peut en faire un alexitaire, un stomachique, & enfin un diaphorétique.
BAUME ou ONGUENT de genievre : prenez huile d'olive trois livres, eau-rose une livre, cire neuve demi-livre, térébenthine une livre, santal rouge en poudre deux onces : faites bouillir le tout dans un pot de terre neuf, avec trois demi-septiers de vin rouge étant refroidi, on séparera le baume du vin. Voyez Mémoire de l'Académie 1702.
BAUME de Lucatelli : prenez de la meilleure huile d'olive que vous pourrez trouver, deux livres & demie ; vin de Canarie, deux livres ; sang de dragon pulvérisé, une once : faites bouillir ces drogues jusqu'à consomption du vin : ajoûtez-y cire jaune une livre, térébenthine de Venise une livre & demie, santal rouge en poudre deux onces, baume du Pérou deux onces ; mêlez-les & faites-les fondre ensemble, & ne mettez le baume qu'après avoir retiré le mélange du feu.
Ce baume est un excellent vulnéraire employé dans les ulceres internes & externes, dans les tubercules. & dans les ulceres & les hémorrhagies internes. On l'applique sur les plaies & les contusions.
BAUME odoriférant : prenez pommade sans odeur une once ; faites-la fondre à petit feu dans une tasse de porcelaine, & ajoûtez-y peu-à-peu cire blanche un gros ; le tout étant bien mêlé, retirez le vaisseau : lorsque le mélange commencera à s'épaissir versez-y huile essentielle de citron un gros : remuez la matiere, pour que le mélange soit plus parfait : mettez le vaisseau dans l'eau froide, pour qu'il se refroidisse plûtôt ; & le baume étant tout-à-fait froid, serrez-le dans de petites boîtes, où il soit bien bouché.
Il se garde plusieurs années sans se corrompre : on peut au lieu de pommade & de cire, employer l'huile exprimée de noix muscade, après l'avoir lavée si long-tems dans l'eau qu'elle devienne blanche. Ce baume est propre à ranimer, c'est un grand cordial : on en peut faire un pareil avec toutes les especes d'huile essentielle.
BAUME pectoral : prenez benjoin, myrrhe, baume du Pérou, safran, muscade, teinture de sel de tartre, gomme ammoniaque, de chaque deux gros ; huile d'anis, de macis, de fenouil, de chaque dix gouttes. Cette composition peut se donner liquide, en l'étendant davantage avec l'esprit-de-vin.
BAUME polychreste : prenez esprit-de-vin quatre livres ; faites-y infuser à petit feu en remuant, gomme de gayac douze onces ; ajoûtez-y ensuite baume du Pérou, térebenthine, de chaque deux onces.
BAUME préparé par la décoction des bois résineux balsamiques ; prenez râpure de santal, de bois de rose, de genevrier, de sassafras, de bois de vie, racine de salsepareille, de chaque une once ; racine de pimprenelle, d'angélique, canelle, clous de girofle, râpure de bois d'aloès, de chaque deux gros ; mêlez ces drogues, & faites-les bouillir avec du vin rouge dans un vaisseau fermé. Cette décoction peut être d'usage comme les baumes.
BAUME solide & astringent ; prenez baume de Copahu, de Tolu, succin, mastic, oliban, cachou, terre sigillée, antimoine diaphorétique, corail préparé, de chaque un gros, huile de sassafras dix gouttes : préparez ces drogues selon l'art ; il produit des effets admirables dans la gonorrhée.
BAUME verd de Mets ou de Mademoiselle Feuillet : prenez huile de lin par expression, d'olive, de chaque une livre, de laurier une once, térébenthine de Venise deux onces, liquéfiez le tout à petit feu ; & quand elles seront refroidies, ajoûtez-y l'huile distillée de baies de genievre une once & demi ; verd-de-gris trois gros, aloès succotrin en poudre deux gros, vitriol blanc pulvérisé un gros & demi, huile de girofle un gros ; faites-en un baume selon l'art. Il est propre pour mondifier les plaies & les ulceres, pour les incarner & les cicatriser, contre la morsure des bêtes venimeuses : on en fait chauffer, & on en met dans la plaie avec la barbe d'une plume.
Ce baume a été inventé en premier lieu par M. Duclos, Medecin de Mets ; Mademoiselle Feuillet l'a fait appeller de son nom l'ayant mis en vogue à Paris. Lemery, Pharmacop. univers.
BAUME vulnéraire : prenez essence de myrrhe, succin, gomme élémi, santal rouge, baume du Pérou, de Tolu, huile d'armoise, sommités de mille-feuilles, d'hypericum, de chaque une once : on mêle ces drogues avec cinq quarterons d'huile & de vin, & on en fait un baume excellent en les digérant sur un feu modéré. Hoffman les distille & en tire un esprit qu'il préfére au baume de Lucatelli.
Ce baume est un excellent vulnéraire & stomachique ; on en peut user intérieurement comme extérieurement.
On n'auroit jamais fait, si on vouloit détailler tous les baumes artificiels qui ont été découverts par les auteurs qui nous ont laissé des dispensaires. Lemery en compte soixante-treize especes différentes dans sa Pharmacopée universelle, en y comprenant quelques-uns de ceux dont nous avons parlé plus haut. On en trouve un grand nombre d'autres dans les dispensaires étrangers. (N)
* BAUME (la sainte), grotte sur une montagne de France en Provence, entre Aix, Marseille & Toulon. Ce lieu est très-fréquenté, parce que les peuples sont imbus du préjugé que la Magdeleine y est morte.
* BAUME LES NONES, (Géog.) ville de Franche-Comté, en France, sur le Doux.
* BAUNACH, (Géog.) riviere de Franconie.
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BAUSK | (Géog.) ville importante de Curlande, sur les frontieres de Pologne au nord : sur la riviere de Musza. Long. 42. 14. lat. 56. 30.
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BAUTZE | ou BUDISSEN, (Géog.) ville d'Allemagne, capitale de la haute Lusace, sur la Sprée Long. 32. 13. lat. 51. 10.
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BAVAROIS | (LES) s. m. pl. (Géog.) peuples d'Espagne, connus anciennement sous le nom de Boiens ou Boiares. Ce sont les premiers des anciens Germains qui ayent passé les Alpes, pénétré dans la Grece, & qui ayent paru en armes sur les rives du Tibre & du Thermodon. En 493 ils occupoient la partie du Norique qui étoit le long du Danube, ou ce que nous appellons la haute & moyenne Autriche, avec la seconde Rhetie, contrée située entre l'Oein & le Lech. Ces peuples ont eu & conservé de tout tems une haute réputation de bravoure. Leurs ancêtres vainquirent les peuples du midi, & leurs descendans arrêterent les courses des peuples du Nord.
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BAVER | v. neut. (Jardinage) se dit d'une eau qui vient en décharge, ou d'un jet qui ne s'éléve pas haut. (K)
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BAVETTE | S. f. chez les Boyaudiers, est un ustensile qui dépend en quelque façon du tablier, quoiqu'il en soit séparé : c'est une espece de plastron composé de vieux chiffons que ces ouvriers mettent devant eux pour garantir leur poitrine, & empêcher que leurs habits ne soient gâtés. Les Boyaudiers suspendent la bavette à leur cou, & se l'attachent derriere eux avec des cordons.
BAVETTE, terme de Plombier ; s'est ainsi qu'on appelle une sorte de plate-bande de plomb qui couvre les bords des chenaux.
BAVETTE, se dit aussi des plaques de plomb, qui se mettent au-dessous des bourseaux qui servent d'ornement sur les couvertures d'ardoise.
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BAVEUSE | bavosa, s. f. (Hist. nat. Zoolog.) poisson de mer ainsi appellé à Antibes, parce qu'il est toûjours couvert d'une bave gluante, il n'a point d'écailles, il est lisse & moucheté, le dos est brun & le ventre de couleur blanchâtre. Il a deux nageoires près des oüies, & deux au-dessous, une sur le dos, qui s'étend depuis la tête jusqu'à la queue, & une autre qui va depuis l'anus jusqu'à la queue. Ce poisson ressemble beaucoup à celui que l'on nomme percepierre & coquillade. Rondelet Voyez PERCEPIERRE, COQUILLADE, POISSON. (I)
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BAVEY | (Géog.) petite ville de France, dans le Haynault.
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BAVIERE | (Géog.) état considérable d'Allemagne, avec titre de duché, borné au septentrion par la Bohème & le haut Palatinat ; à l'orient par l'Autriche, l'archevêché de Saltzbourg, & l'évêché de Passau ; au midi par l'évêché de Brixen & le Tirol ; à l'occident par le Lech. Il a environ 50 lieues d'occident en orient, & 35 du midi au septentrion : ses principales rivieres sont le Danube, l'Inn, l'Iser, & le Lech. La Baviere se divise en haute, où est la régence de Munich, capitale de Baviere ; & en basse, où sont les trois régences de Burckhausen, Landshut, & Straubingen.
BAVIERE, (cercle de) partie de l'Allemagne beaucoup plus étendue que la Baviere ; comprenant outre la Baviere, le haut Palatinat, l'archevêché de Saltzbourg, les évêchés de Frizingue, de Passaw, & de Ratisbonne, avec le duché de Neubourg. Elle est bornée à l'orient & au midi par le cercle d'Autriche, & à l'occident & au septentrion par les cercles de Franconie & de Suabe, & par la Bohème.
BAVIERE, (Palatinat de) partie du Nortgaw, dont la capitale est Amberg.
Il ne faut pas confondre, comme on voit, la Baviere, soit avec le cercle, soit avec le Palatinat de même nom.
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BAVOIS | S. m. ancien terme de Monnoie, étoit la feuille du compte où l'on marquoit l'évaluation des droits de seigneuriage, foiblage, brassage, &c. selon le prix courant que le prince par ses ordonnances, avoir prescrit pour l'or, pour l'argent, & pour le billon en oeuvre ou hors d'oeuvre.
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BAVOLET | S. m. (terme de Marchande de mode) c'est la seconde piece d'une coeffure, mais qui n'a point de barbe, & qui forme seulement le dessus de tête ; au reste ce bavolet est garni & plissé comme la piece de dessous ; c'est aussi sur lui que l'on monte le fer qui forme le gros pli du milieu.
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BAXANA | plante Indienne, ainsi caractérisée dans les auteurs, baxana, arbor fructu venenato, radice venenorum antidoto.
BAXANA, arbre à fruit vénéneux, & à racine anti-vénéneuse ; on le trouve à Queyonne, proche Ormuz. On dit que son fruit suffoque, en quelque petite quantité qu'on en prenne, & que son ombre est mortelle si l'on s'y tient pendant un quart-d'heure : mais Ray traite ces effets de fable, sur ce que dans d'autres contrées on attribue à la racine, aux feuilles & au fruit du même arbre, des propriétés salutaires. Au reste que cet arbre soit aussi pernicieux ou aussi utile qu'on le dit, il n'est pas moins constant qu'il en faudroit une autre description que la précédente, & que tant qu'une plante, étrangere sur-tout, ne nous sera pas mieux connue que par une phrase, telle que la précédente ; c'est précisément comme si elle n'existoit pas.
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BAXEA | (Hist. anc. & Antiq.) espece de chaussure ancienne, du nombre de celles qui s'attachant sur le pié avec des bandes, ne le couvroient pas entierement. Plaute en a fait mention : mais on croit que le baxea de Plaute étoit une sorte de sandale à l'usage des philosophes. Arnobe parle de baxées faites de feuilles de palmier.
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BAY | ou BAJA, (Géog.) ville de la basse Hongrie, dans le comté de Bath, près du Danube. Long. 37. lat. 46. 25.
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BAYADERE | S. f. (Hist. mod.) nom de femmes galantes, entretenues, comme on dit vulgairement aux Indes, par les pagodes, c'est-à-dire qui passent leur vie dans l'intérieur de ces temples des dieux de la gentilité. Voyez PAGODE.
Les brames ou brachmanes fournissent de quoi vivre à ces femmes destinées aux plaisirs secrets des Indiens. Toutes les fois qu'on donne des fêtes particulieres, on en envoie chercher pour danser ; elles ne sortent jamais sans être mandées, ou bien dans certains jours où elles assistent en chantant & en dansant au son de divers instrumens qu'elles touchent en l'honneur de leurs dieux qu'elles précedent toujours, quand les gentils les promenent dans les villes, ou d'une pagode à une autre.
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BAYANISM | ou BAIANISME, s. m. (Hist. éccles. & Théol.) erreurs de Baïus & de ces disciples.
Michel Baïus ou de Bay né en 1513 à Melin, dans le territoire d'Ath en Haynault, après avoir étudié à Louvain & passé successivement par tous les grades de cette université, y reçut le bonnet de docteur en 1550, & fut nommé l'année suivante, par Charles V. pour y remplir une chaire d'Ecriture sainte, avec Jean Hessels, son compagnon d'étude & son ami. Il enseigna dans ses écrits & fit imprimer diverses erreurs sur la grace, le libre arbitre, le péché originel, la charité, la mort de Jésus-Christ, &c. Elles sont contenues dans 76 propositions, condamnées d'abord en 1567 par le pape Pie V.
On peut rapporter toutes les propositions de Baïus à trois chefs principaux. Les unes regardent l'état d'innocence ; les autres l'état de nature tombée ou corrompue par le péché ; & les autres enfin l'état de nature réparée par le fils de Dieu fait homme & mort en croix.
1°. Les anges & les hommes sont sortis des mains de Dieu justes & innocens : mais Baïus & ses disciples ont prétendu que la destination des anges & du premier homme à la béatitude céleste, que les graces qui les menoient de proche en proche à cette derniere fin, que les mérites qui résultoient de ces graces, & la récompense qui étoit attachée à ces mérites, n'étoient pas proprement des bienfaits non dûs ou des dons gratuits ; que ces dons étoient inséparables de la condition des anges & du premier homme, & que Dieu ne les leur devoit pas moins qu'il devoit à ce dernier la vûe, l'oüie, & les autres facultés naturelles. Tout cela est appuyé sur ce principe fondamental de Baïus, que ce n'est point par une destination accidentelle & arbitraire que la vision ou jouissance intuitive de Dieu a été préparée aux anges & au premier homme, mais en vertu du droit de leur création dans l'état d'innocence, & par une suite de leur condition naturelle : qu'une créature raisonnable & sans tache ne peut avoir d'autre fin que la vision intuitive de son Créateur ; que par conséquent Dieu n'a pû, sans être lui-même l'auteur du péché, créer les anges & le premier homme que dans un état exclusif de tout crime, ni par conséquent les destiner qu'à la béatitude céleste : que cette destination étoit à la vérité un don de Dieu, mais un don que Dieu ne pouvoit leur refuser sans déroger à sa bonté, à sa sainteté, à sa justice. Telle est la doctrine de Baïus dans son livre de primâ hominis justitiâ, sur-tout chap. viij. & elle est exprimée dans les propositions 21, 23, 24, 26, 27, 55, 71, & 72, condamnées par la bulle de Pie V. 2°. Si Dieu n'a pû créer les anges & l'homme dans ce premier état, sans cette destination essentielle, il est évident qu'il a été dans l'obligation indispensable de leur départir les moyens nécessaires pour arriver à leur fin ; d'où il résulte que toutes les graces, soit actuelles soit habituelles, qu'ils ont reçues dans l'état d'innocence, leur étoient dûes comme une suite naturelle de leur création. 3°. Que les mérites des vertus & des bonnes actions étoient de même espece, c'est-à-dire, naturels, ou ce qui revient au même, le fruit de la premiere création. 4°. Que la félicité éternelle attachée à ces mérites étoit de même ordre, c'est-à-dire une pure rétribution, où la libéralité gratuite de Dieu n'entroit pour rien ; en un mot qu'elle étoit une récompense & non pas une grace. Dans ce système, les dons divins gratuits n'avoient donc point de lieu dans l'économie du salut des anges & du premier homme, puisque tout y étoit dû & un apanage nécessaire de la nature innocente. 5°. Enfin par rapport à cet état, Baïus & ses disciples ont erré sur ce qui concerne la connoissance des devoirs, l'exemption des souffrances, & l'immortalité, en soûtenant que l'homme innocent étoit à l'abri de l'ignorance, des peines & de la mort en vertu de sa création, & que l'exemption de tous ces maux étoit une dette que Dieu payoit à l'état d'innocence, ou un ordre établi par la loi naturelle toûjours invariable, parce qu'elle a pour objet ce qui est essentiellement bon & juste. C'est la doctrine expresse des propositions 53, 69, 70, & 75 de Baïus. Voyez le P. Duchesne, hist. du Baïanisme, liv. II. page 177. 180. & liv. IV. page 356. & 361. & le traité historique & dogmatique sur la doctrine de Baïus, par l'abbé de la Chambre, tome I. chap. ij. page 49. & suiv.
II°. Quant à l'état de nature tombée, voici les erreurs de Baïus & de ses sectateurs sur la nature du péché originel, sa transfusion, & ses suites. 1°. Dans leur système le péché originel n'est autre chose que la concupiscence habituelle dominante. 2°. Cette idée supposée, la transfusion du péché d'Adam n'est plus un mystere qui révolte la raison ; ce n'est plus l'effet du violement d'une loi de Dieu qui ait attaché le sort des hommes à la fidélité de leur premier pere. Ce péché se transmet de la même maniere que l'aveuglement, la goutte, & les autres mauvaises qualités physiques de ceux dont on tient la naissance : cette communication se fait indépendamment de tout arrangement arbitraire de la part de Dieu ; tout péché par sa nature ayant la force d'infecter le transgresseur & toute sa postérité, comme a fait le péché originel, prop. 50. & cependant ce dernier est en nous sans aucun rapport à la volonté du premier pere, prop. 46. Sur les suites du péché originel Baïus dit 1° que le libre arbitre sans la grace n'a de force que pour pécher, prop. 28. 2°. qu'il ne peut éviter aucun péché, prop. 29. que tout ce qui en sort, même l'infidélité négative, est un péché ; que l'esclave du péché obéit toûjours à la cupidité dominante ; que jusqu'à ce qu'il agisse par l'impression de la charité, toutes ses actions partent de la cupidité & sont des péchés, prop. 34. 36. 64. 68. &c. 3°. qu'il ne peut y avoir en lui aucun amour légitime dans l'ordre naturel, pas même de Dieu, aucun acte de justice, aucun bon usage du libre arbitre, ce qui paroît dans les infideles, dont toutes les actions sont des péchés, comme les vertus des philosophes sont des vices, prop. 25 & 26. Ainsi, selon Baïus, la nature tombée & destituée de la grace, est dans une impuissance générale à tout bien, & toûjours déterminée au mal que sa cupidité dominante lui propose. Il ne lui reste ni liberté de contrariété, ni liberté de contradiction exempte de nécessité : incapable d'aucun bien, elle ne peut produire d'action qui ne soit un péché ; & nécessitée au mal, elle s'y porte au gré du penchant qui la domine, & n'en est ni moins criminelle ni moins punissable devant Dieu. Voyez le P. Duchesne, hist. du Baïanisme, liv. II. pag. 180. 182. & liv. IV. page 361. & 367. & le traité historique & dogmatique déjà cité, pag. 54. & suiv.
III°. Les erreurs de Baïus, d'Hessels, & de leurs sectateurs, ne sont pas moins frappantes quant à l'état de nature réparée par le rédempteur : ils disent formellement, que la rétribution de la vie éternelle s'accorde aux bonnes actions, sans avoir égard aux mérites de Jésus-Christ, qu'elle n'est pas même, à proprement parler, une grace de Dieu, mais l'effet & la suite de la loi naturelle, par laquelle il a été établi par un juste jugement de Dieu, dès la premiere institution du genre humain, que le royaume céleste seroit le salaire de l'obéissance à la loi ; que toute bonne oeuvre est de sa nature méritoire du ciel, comme toute mauvaise est de sa nature méritoire de la damnation ; que les bonnes oeuvres ne tirent pas leur mérite de la grace d'adoption, mais uniquement de leur conformité à la loi ; que le mérite ne se prend pas de l'état de grace mais seulement de l'obéissance à la loi ; que les bonnes actions des catéchumenes, qui précedent la rémission de leurs péchés, comme la foi & la pénitence, méritent la vie éternelle. Prop. 11. 12. 13. 18. 69.
La justification des adultes, selon Baïus, de justif. cap. viij. & de justif. cap. iij. & jv. consiste dans la pratique des bonnes oeuvres & la rémission des péchés. La rémission des péchés peut s'entendre de la coulpe & de la peine éternelle ou temporelle : l'obéissance à la loi justifie sans remettre la peine éternelle ; pour la coulpe, elle passe avec la peine du péché. En conséquence les Baïanistes ont avancé, que le pécheur pénitent n'est point vivifié par le ministere du prêtre qui l'absout, & qu'il n'en reçoit que la remission de la peine ; que les sacremens de baptême & de pénitence ne remettent point la coulpe, mais la peine seulement ; qu'ils ne conferent point la grace sanctifiante, qu'il peut y avoir dans les pénitens & les catéchumenes une charité parfaite, sans que leurs péchés leur soient remis ; que la charité, qui est la plénitude de la loi, n'est pas toûjours jointe avec la rémission des péchés ; que le catéchumene vit dans la justice avant que d'avoir obtenu la rémission de ses péchés ; qu'un homme en péché mortel peut avoir une charité même parfaite, sans cesser d'être sujet à la damnation éternelle, parce que la contrition, même parfaite, jointe à la charité & au desir du sacrement, ne remet point la dette de la peine éternelle, hors le cas de nécessité ou de martyre ; sans la réception actuelle du sacrement. Prop. 31. 54. 55. 67. 68. &c.
Comme dans le système de Baïus on est formellement justifié par l'obéissance à la loi, ce docteur & ses disciples disent qu'ils ne reconnoissent d'autre obéissance à la loi que celle qui coule de l'esprit de charité, prop. 6. point d'amour légitime dans la créature raisonnable, que cette loüable charité que le S. Esprit répand dans le coeur, & par laquelle on aime Dieu ; & que tout autre amour est cette cupidité vicieuse qui attache au monde, & que S. Jean réprouve. Prop. 38.
Enfin leur doctrine n'est pas moins erronée sur le mérite & la valeur des bonnes oeuvres, puisqu'ils avancent d'un côté que dans l'état de la nature réparée il n'y a point de vrais mérites qui ne soient gratuitement conférés à des indignes ; & que de l'autre ils prétendent que les bonnes oeuvres des fideles qui les justifient, ne peuvent pas satisfaire à la justice de Dieu pour les peines temporelles qui restent à expier après la rémission des péchés, ni les expier ex condigno : ces peines, selon eux, ne pouvant pas être rachetées, même par les souffrances des Saints. Prop. 8. 57. 74. Voyez les auteurs cités ci-dessus : voyez aussi l'abrégé du Traité de la grace de Tournely par M. Montagne, doct. de Sorb. de la maison de S. Sulpice.
Ce système, comme le remarque solidement ce dernier théologien, est un composé bizarre & monstrueux de Pélagianisme, quant à ce qui regarde l'état de nature innocente, & de Luthéranisme & de Calvinisme, pour ce qui concerne l'état de nature tombée. Quant à l'état de nature réparée, tous les sentimens de Baïus, sur tout sur la justification, l'efficace des sacremens, & le mérite des bonnes oeuvres, sont si directement opposés à la doctrine du concile de Trente, qu'ils ne pouvoient éviter les différentes censures qu'ils ont essuyées.
En effet, dès 1552 Ricard Tapper, Josse Ravestein, Richtou, Cuner & d'autres docteurs de Louvain, s'éleverent contre Baïus & Hessels, qui répandoient les premieres semences de leurs opinions. En 1560, deux gardiens des Cordeliers de France en déférerent 18 articles à la faculté de Théologie de Paris, qui les condamna par sa censure du 27 Juin de la même année. En 1567 parut la bulle de Pie V. du premier Octobre, portant condamnation de 76 propositions qu'elle censuroit in globo, mais sans nommer Baïus. Le cardinal de Granvelle, chargé de l'exécution de ce decret, l'envoya à Morillon son vicaire général, qui le présenta à l'université de Louvain le 29 Décembre 1567. La bulle fut reçue avec respect, & Baïus même parut d'abord s'y soûmettre : mais ensuite il écrivit une longue apologie de sa doctrine qu'il adressa au pape, avec une lettre du 8 Janvier 1569. Pie V. après un mûr examen, confirma le 13 Mai suivant son premier jugement, & écrivit un bref à Baïus pour l'engager à se soûmettre sans tergiversation. Baïus hésita quelque tems, & se soûmit enfin en donnant à Morillon une révocation des propositions condamnées. Mais après la mort de Josse Ravestein, arrivée en 1570, Baïus & ses disciples remuerent de nouveau : Grégoire XIII. pour mettre fin à ces troubles, donna une bulle le 29 Janvier 1579, en confirmation de celle de Pie V. son prédécesseur, & choisit pour la faire accepter par l'université de Louvain, François Tolet Jésuite, & depuis cardinal. Baïus rétracta alors ses propositions, & de vive voix, & par un écrit signé de sa main, daté du 24 Mars 1580. Dans les huit années suivantes qui s'écoulerent jusqu'à la mort de Baïus, les contestations se réveillerent, & ne furent enfin assoupies que par un corps de doctrine dressé par les Théologiens de Louvain, & adopté par ceux de Douai. Jacques Janson, professeur de Théologie à Louvain, voulut ressusciter les opinions de Baïus & en chargea le fameux Cornélius Jansénius son éleve qui, dans son ouvrage intitulé Augustinus, a renouvellé les principes & la plûpart des erreurs de Baïus. Voyez l'histoire du Baïanisme par le P. Duchesne, qui rapporte tous ces événemens dans un détail que la nature de cet ouvrage ne nous permet pas d'imiter. Voyez JANSENISME. (G)
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BAYART | S. m. terme de riviere, instrument qui sert à deux hommes pour porter différens fardeaux.
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BAY | ou BAIE, s. f. (Marine) c'est un bras de mer qui se jette entre deux terres, & qui s'y termine en cul-de-sac, par un ventre ou enfoncement plus grand que celui de l'ance, & plus petit que celui du golfe. Voyez BAIE. (Z)
BAYES, s. f. (Marine) baye d'un vaisseau, ce sont les ouvertures qui se font dans sa charpente, comme celles des écoutilles, les trous par où les mâts passent. &c. (Z)
* BAYE DE TOUS LES SAINTS, (Géog.) grande baie sur la côte méridionale du Bresil, proche Saint Salvador.
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BAYELTE s | f. (Commerce) espece de flanelle grossiere & fort large, dont on fabrique en plusieurs endroits de France : elle est faite de laine non croisée, fort lâche, & tirée à poil d'un côté.
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BAYEUX | (Géog.) ville de France dans la Normandie, capitale du Bessin, sur la riviere d'Aure. Long. 16. 57. 9. lat. 49. 16. 30.
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BAYON | (Géog.) ville de Lorraine sur la Moselle, à cinq lieues de Nancy.
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BAYONNE | voyez BAIONNE.
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BAYONNETTE | S. f. (Art. milit.) dague courte, large, façonnée en forme de lancette, ayant au lieu de poignée un manche creux de fer, pour la fixer au bout d'un mousquet, desorte qu'elle n'empêche ni de tirer ni de charger.
Les bayonnettes sont d'un grand usage aux dragons & aux fusiliers, lorsqu'ils ont consumé leurs provisions de poudre & de balles.
On dit que la bayonnette a été inventée à Bayonne.
Les troupes Françoises sont très-redoutables la bayonnette au bout du fusil.
On se sert du même instrument à la chasse du sanglier : mais on le fait plus grand pour cet exercice que pour le service militaire. (Q)
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BAZ | (Géog.) petite île à l'occident de l'Irlande, vis-à-vis le comté de Desmond en Mommonie, au nord de la baie de Dingle. Les Irlandois la nomment Blasquo.
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BAZ | ou BASA, (Géog.) ville d'Espagne au royaume de Grenade près du Guadalentin, sur les limites de la Murcie & de la Castille.
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BAZAC | S. m. (Commerce) coton filé très-beau & très-fin qui vient de Jérusalem, ce qui l'a fait appeller coton de Jérusalem : il y a le demi & le moyen bazac, qui sont d'une qualité fort inférieure au bazac simple ou de la premiere sorte.
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BAZADOIS | (LE) Géog. province de France qui fait partie de la basse Gascogne, entre la Guienne propre, l'Agénois, & le Condomois. Bazas en est la capitale.
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BAZA | ou BAZARI, (Commerce) lieu destiné au commerce parmi les Orientaux, particulierement chez les Persans. Les uns sont découverts, comme les marchés d'Europe, & servent aux mêmes usages, mais seulement pour y vendre les marchandises les moins précieuses & de plus grand volume ; les autres sont couverts de voûtes fort élevées, & percées par des especes de dômes qui y donnent un jour : c'est dans ces derniers où les marchands de pierreries, de riches étoffes, d'orfévrerie, & d'autres semblables marchandises, ont leurs boutiques quelquefois même les esclaves s'y vendent, quoique ce barbare commerce se fasse aussi dans les bazars découverts. Furetiere dit que ce terme est purement Arabe, & signifie achat & échange de marchandise, & se dit par extension des lieux où se fait le trafic.
Le bazar ou maidan d'Ispaham est une des plus belles places de toute la Perse, & surpasse même toutes celles qu'on voit en Europe : mais nonobstant sa grande magnificence, il faut avoüer que le bazar de Tauris est la place la plus vaste que l'on connoisse : on y a plusieurs fois rangé trente mille hommes en bataille. Il contient plus de quinze mille boutiques, & passe sans contredit pour le plus superbe de la Perse. On appelle dans cette derniere ville le bazar des pierreries, kaiserié, c'est-à-dire marché royal. Voyez MAIDAN. (G)
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BAZARIE | (Hist. anc. & Géog.) province des Scythes dont les habitans formoient des parcs de bêtes fauves & d'autres animaux : ils choisissoient pour cet effet de grandes forêts arrosées d'eau ; ils les fermoient de murailles, & les garnissoient de tours où les chasseurs se retiroient. Alexandre le grand entra dans un de ces parcs où l'on n'avoit point chassé depuis quatre cent ans, & y fut attaqué par un lion qu'il eut le bonheur de tuer.
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BAZAS | (Géog.) ville de France, capitale du Bazadois en Gascogne, sur un rocher. Long. 17. 20. lat. 44. 20.
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BAZAT | S. m. coton qui vient de Leyde : il y a le bazat de la premiere sorte, l'ordinaire & le moyen. Le premier est le plus beau.
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BAZIOTHIA | (Géog. sainte) ville de la Palestine dans la tribu de Juda. Samson croit que c'est la même que Bethsabée.
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BAZUNA | (Géog.) ville maritime de l'Océan éthiopique ou oriental, située entre les Cafres & le Zanguebar. On dit que ses habitans ne se nourrissent que de serpens & de grenouilles.
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BAZZARUCO | voyez BASARUCO.
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BAZZO | S. m. (Commerce) petite monnoie de billon qui a cours en Allemagne : elle a différentes empreintes, selon les différens états. Elle vaut un sou six deniers quatre cinquiemes, argent de France.
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BDELLIUM | (Mat. med.) gomme aromatique apportée du levant, & d'usage en Medecine. On croit que ce mot est formé de l'hébreu bedollach, que les traducteurs ont rendu par bdellium. On écrit aussi bedellium, bedella, ptellium, petalium, megalium, & telinum.
Ce nom se trouve dans les Anciens Naturalistes & dans l'Ecriture : mais y est-il pris dans le même sens que dans nos langues ? cela est fort douteux. Moyse dit que la manne étoit de la couleur du bdellium ; & Josephe expliquant ce passage, prétend que c'est la gomme d'un arbre semblable à l'olivier, & que la manne dont furent nourris les Juifs dans le desert lui ressembloit. Mais Scaliger & d'autres auteurs rejettent cette conjecture, & avouent qu'ils ignorent ce que c'est que le bdellium dont il est fait mention dans l'Ecriture. (N)
* Dioscoride en distingue de trois sortes ; l'un en larmes, transparent, semblable à la colle de taureau, gras en-dedans, facile à fondre sans bois & sans ordure, amer au goût, odorant quand on le brûle, de la couleur de l'ongle, & produit par un arbre du pays des Sarrasins : l'autre en masses grasses, noires sordides, de la couleur de l'aspalathe, & apporté des Indes : le troisieme, sec, résineux, livide, & tiré de la ville de Petra. Galien reconnoît deux bdellium ; l'Arabique & le Scythique. Pline dit qu'il y a dans la Bactriane un arbre noir de la grandeur de l'olivier avec la feuille du chêne, & la forme & le fruit du figuier sauvage, appellé bdellium, & donnant une gomme transparente semblable à la cire odorante, grasse au toucher, amere au goût, mais sans acreté : il ajoûte qu'il y avoit aussi de cette gomme dans l'Arabie, aux Indes, dans la Médie, & à Babylone.
Si l'histoire du bdellium est très-obscure dans les anciens, elle n'est pas plus claire dans les modernes : il y en a qui le confondent avec la myrrhe, d'autres avec la gomme animée ; il y en a même qui font signifier au mot bdellium escarboucle ou crystal.
G. Bauhin en compte six especes différentes. Dale le décrit ou comme une substance gommeuse & résineuse, grasse, tenace, gluante, noirâtre, & ressemblant à la myrrhe, dont elle imite la couleur & le goût, & il fait venir ce bdellium de l'Arabie, de la Médie & des Indes : ou comme une substance résineuse, un peu dure, noirâtre, friable, en gouttes durcies, de la même odeur & du même goût que la précédente ; & il le fait venir de Ganea. Pomet prétend qu'on a dans les boutiques sous le nom de bdellium des résines d'especes différentes : mais M. Geoffroi dit que le bdellium des boutiques est la même chose que la premiere espece de Dale, & qu'il n'y a rien de certain sur l'arbre qui le porte.
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BEALT | (Géog.) petite ville d'Angleterre dans la principauté de Galles, sur la riviere de Vye.
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BEAN | (Géog. sainte) ville de la tribu de Gad, dont les habitans tourmenterent cruellement les Juifs dans le tems des guerres des Macédoniens. Elle fut détruite par Judas Macchabée.
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BEAT | (S.) Géog. petite ville de France au comté de Comminges, au confluent de la Garonne & de la Pique : toutes les maisons y sont bâties de marbre. Long. 18. 16. lat. 42. 50.
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BEATIFICATION | S. f. (Théol.) acte par lequel le pape déclare qu'une personne, dont la vie a été sainte, accompagnée de quelques miracles, &c. joüit après sa mort du bonheur éternel. La béatification differe de la canonisation en ce que dans la premiere le pape n'agit pas comme juge, en déterminant l'état du béatifié, mais seulement en ce qu'il accorde à certaines personnes, comme à un ordre religieux, à une communauté, &c. le privilege de rendre au béatifié un culte particulier, qu'on ne peut regarder comme superstitieux, dès qu'il est muni du sceau de l'autorité pontificale ; au lieu que dans la canonisation, le pape parle comme juge, & détermine ex cathedrâ l'état du nouveau saint.
La cérémonie de la béatification a été introduite lorsqu'on a pensé qu'il étoit à propos de permettre à un ordre ou une communauté de rendre un culte particulier au sujet proposé pour être canonisé, avant que d'avoir une pleine connoissance de la vérité des faits, & à cause de la longueur des procédures qu'on observe dans la canonisation. V. CANONISATION. (G)
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BEATITUDE | BONHEUR, FELICITé (Gramm.) termes relatifs à la condition d'un être qui pense & qui sent. Le bonheur marque un homme riche des biens de la fortune ; la félicité, un homme content de ce qu'il en a ; la béatitude, l'état d'une ame que la présence immédiate de son Dieu remplit dans ce monde-ci ou dans l'autre ; état qui seroit au-dessus de toutes expression sans-doute, si nous le connoissions. Le bonheur excite l'envie ; la félicité se fait sentir à nous seuls ; la béatitude nous attend dans une autre vie. La joüissance des biens fait la félicité ; leur possession le bonheur ; la béatitude réveille une idée d'extase & de ravissement, qu'on n'éprouve ni dans le bonheur, ni dans la félicité de ce monde. C'est aux autres à faire notre bonheur ; notre félicité dépend davantage de nous ; il n'y a que Dieu qui puisse nous conduire à la béatitude. Le bonheur est pour les riches, dit M. l'abbé Girard dans ses Synonymes ; la félicité pour les sages ; & la béatitude pour les pauvres d'esprit.
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BEAU | adj. (Métaphysique) Avant que d'entrer dans la recherche difficile de l'origine du beau, je remarquerai d'abord, avec tous les auteurs qui en ont écrit, que par une sorte de fatalité, les choses dont on parle le plus parmi les hommes, sont assez ordinairement celles qu'on connoît le moins ; & que telle est entre beaucoup d'autres, la nature du beau. Tout le monde raisonne du beau : on l'admire dans les ouvrages de la nature : on l'exige dans les productions des Arts : on accorde ou l'on refuse cette qualité à tout moment ; cependant si l'on demande aux hommes du goût le plus sûr & le plus exquis, quelle est son origine, sa nature, sa notion précise, sa véritable idée, son exacte définition ; si c'est quelque chose d'absolu ou de relatif ; s'il y a un beau essentiel, éternel, immuable, regle & modele du beau subalterne ; ou s'il en est de la beauté comme des modes : on voit aussitôt les sentimens partagés ; & les uns avouent leur ignorance, les autres se jettent dans le scepticisme. Comment se fait-il que presque tous les hommes soient d'accord qu'il y a un beau ; qu'il y en ait tant entr'eux qui le sentent vivement où il est, & que si peu sachent ce que c'est ?
Pour parvenir, s'il est possible, à la solution de ces difficultés, nous commencerons par exposer les différens sentimens des auteurs qui ont écrit le mieux sur le beau ; nous proposerons ensuite nos idées sur le même sujet, & nous finirons cet article par des observations générales sur l'entendement humain & ses opérations relatives à la question dont il s'agit.
Platon a écrit deux dialogues du beau, le Phedre & le grand Hippias : dans celui-ci il enseigne plûtôt ce que le beau n'est pas, que ce qu'il est ; & dans l'autre, il parle moins du beau que de l'amour naturel qu'on a pour lui. Il ne s'agit dans le grand Hippias que de confondre la vanité d'un sophiste ; & dans le Phedre, que de passer quelques momens agréables avec un ami dans un lieu délicieux.
S. Augustin avoit composé un traité sur le beau : mais cet ouvrage est perdu, & il ne nous reste de S. Augustin sur cet objet important, que quelques idées éparses dans ses écrits, par lesquelles on voit que ce rapport exact des parties d'un tout entr'elles, qui le constitue un, étoit, selon lui, le caractere distinctif de la beauté. Si je demande à un architecte, dit ce grand homme, pourquoi ayant élevé une arcade à une des aîles de son bâtiment, il en fait autant à l'autre : il me répondra sans-doute, que c'est afin que les membres de son architecture symmétrisent bien ensemble. Mais pourquoi cette symmétrie vous paroît-elle nécessaire ? Par la raison qu'elle plaît. Mais qui êtes-vous pour vous ériger en arbitre de ce qui doit plaire ou ne pas plaire aux hommes ? & d'où savez-vous que la symmétrie nous plaît ? J'en suis sûr, parce que les choses ainsi disposées ont de la décence, de la justesse, de la grace ; en un mot parce que cela est beau. Fort bien : mais dites-moi, cela est-il beau parce qu'il plaît ? ou cela plaît-il parce qu'il est beau ? Sans difficulté cela plaît, parce qu'il est beau. Je le crois comme vous : mais je vous demande encore pourquoi cela est-il beau ? & si ma question vous embarrasse, parce qu'en effet les maîtres de votre art ne vont guere jusque-là, vous conviendrez du moins sans peine que la similitude, l'égalité, la convenance des parties de votre bâtiment, réduit tout à une espece d'unité qui contente la raison. C'est ce que je voulois dire. Oui : mais prenez-y garde, il n'y a point de vraie unité dans les corps, puisqu'ils sont tous composés d'un nombre innombrable de parties, dont chacune est encore composée d'une infinité d'autres. Où la voyez-vous donc cette unité qui vous dirige dans la construction de votre dessein ; cette unité que vous regardez dans votre art comme une loi inviolable ; cette unité que votre édifice doit imiter pour être beau, mais que rien sur la terre ne peut imiter parfaitement, puisque rien sur la terre ne peut être parfaitement un ? Or de là que s'ensuit-il ? ne faut-il pas reconnoître qu'il y a au-dessus de nos esprits une certaine unité originale, souveraine, éternelle, parfaite : qui est la regle essentielle du beau, & que vous cherchez dans la pratique de votre art ? D'où S. Augustin conclut, dans un autre ouvrage, que c'est l'unité qui constitue, pour ainsi dire, la forme & l'essence du beau en tout genre. Omnis porro pulchritudinis forma, unitas est.
M. Wolf dit, dans sa Psycologie, qu'il y a des choses qui nous plaisent, d'autres qui nous déplaisent ; & que cette différence est ce qui constitue le beau & le laid : que ce qui nous plaît s'appelle beau, & que ce qui nous déplaît est laid.
Il ajoûte, que la beauté consiste dans la perfection, de maniere que par la force de cette perfection, la chose qui en est revêtue est propre à produire en nous du plaisir.
Il distingue ensuite deux sortes de beautés, la vraie & l'apparente : la vraie est celle qui naît d'une perfection réelle ; & l'apparente, celle qui naît d'une perfection apparente.
Il est évident que S. Augustin avoit été beaucoup plus loin dans la recherche du beau que le philosophe Lebnitien : celui-ci semble prétendre d'abord qu'une chose est belle, parce qu'elle nous plaît ; au lieu qu'elle ne nous plaît que parce qu'elle est belle, comme Platon & S. Augustin l'ont très-bien remarqué. Il est vrai qu'il fait ensuite entrer la perfection dans l'idée de la beauté : mais qu'est-ce que la perfection ? le parfait est-il plus clair & plus intelligible que le beau ?
Tous ceux qui se piquant de ne pas parler simplement par coûtume & sans réflexion, dit M. Crouzas, voudront descendre dans eux-mêmes, & faire attention à ce qui s'y passe, à la maniere dont ils pensent, & à ce qu'ils sentent lorsqu'ils s'écrient cela est beau, s'appercevront qu'ils expriment par ce terme un certain rapport d'un objet, avec des sentimens agréables ou avec des idées d'approbation, & tomberont d'accord que dire cela est beau, c'est dire, j'apperçois quelque chose que j'approuve ou qui me fait plaisir.
On voit que cette définition de M. Crouzas n'est point prise de la nature du beau, mais de l'effet seulement qu'on éprouve à sa présence : elle a le même défaut que celle de M. Wolf. C'est ce que M. Crouzas a bien senti ; aussi s'occupe-t-il ensuite à fixer les caractere du beau : il en compte cinq, la variété, l'unité, la régularité, l'ordre, la proportion.
D'où il s'ensuit, ou que la définition de S. Augustin est incomplete , ou que celle de M. Crouzas est redondante. Si l'idée d'unité ne renferme pas les idées de variété, de régularité, d'ordre & de proportion, & si ces qualités sont essentielles au beau, S. Augustin n'a pas dû les omettre : si l'idée d'unité les renferme, M. Crouzas n'a pas dû les ajoûter.
M. Crouzas ne définit point ce qu'il entend par variété ; il semble entendre par unité, la relation de toutes les parties à un seul but ; il fait consister la régularité dans la position semblable des parties entr'elles ; il désigne par ordre une certaine dégradation de parties, qu'il faut observer dans le passage des unes aux autres ; & il définit la proportion, l'unité assaisonnée de variété, de régularité & d'ordre dans chaque partie.
Je n'attaquerai point cette définition du beau par les choses vagues qu'elle contient ; je me contenterai seulement d'observer ici qu'elle est particuliere, & qu'elle n'est applicable qu'à l'Architecture, ou tout au plus à de grands touts dans les autres genres, à une piece d'éloquence, à un drame, &c. mais non pas à un mot, à une pensée, à une portion d'objet.
M. Hutcheson, célebre professeur de Philosophie morale dans l'université de Glascou, s'est fait un système particulier : il se réduit à penser qu'il ne faut pas plus demander qu'est-ce que le beau, que demander qu'est-ce que le visible. On entend par visible, ce qui est fait pour être apperçû par l'oeil ; & M. Hutcheson entend par beau, ce qui est fait pour être saisi par le sens interne du beau. Son sens interne du beau est une faculté par laquelle nous distinguons les belles choses, comme le sens de la vûe est une faculté par laquelle nous recevons la notion des couleurs & des figures. Cet auteur & ses sectateurs mettent tout en oeuvre pour démontrer la réalité & la nécessité de ce sixieme sens ? & voici comment ils s'y prennent.
1°. Notre ame, disent-ils, est passive dans le plaisir & dans le déplaisir. Les objets ne nous affectent pas précisément comme nous le souhaiterions ; les uns font sur notre ame une impression nécessaire de plaisir ; d'autres nous déplaisent nécessairement : tout le pouvoir de notre volonté se réduit à rechercher la premiere sorte d'objet, & à fuir l'autre : c'est la constitution même de notre nature, quelquefois individuelle, qui nous rend les uns agréables & les autres désagréables. Voyez PEINE & PLAISIR.
2°. Il n'est peut-être aucun objet qui puisse affecter notre ame, sans lui être plus ou moins une occasion nécessaire de plaisir ou de déplaisir. Une figure, un ouvrage d'architecture ou de peinture, une composition de musique, une action, un sentiment, un caractere, une expression, un discours ; toutes ces choses nous plaisent ou nous déplaisent de quelque maniere. Nous sentons que le plaisir ou le déplaisir s'excite nécessairement par la contemplation de l'idée qui se présente alors à notre esprit avec toutes ses circonstances. Cette impression se fait, quoiqu'il n'y ait rien dans quelques-unes de ces idées de ce qu'on appelle ordinairement perceptions sensibles ; & dans celles qui viennent des sens, le plaisir ou le déplaisir qui les accompagne, naît de l'ordre ou du désordre, de l'arrangement ou défaut de symmétrie, de l'imitation ou de la bisarrerie qu'on remarque dans les objets ; & non des idées simples de la couleur, du son, & de l'étendue, considérées solitairement. V. GOUT.
3°. Cela posé, j'appelle, dit M. Hutcheson, du nom de sens internes, ces déterminations de l'ame à se plaire ou à se déplaire à certaines formes ou à certaines idées, quand elle les considere, & pour distinguer les sens internes des facultés corporelles connues sous ce nom, j'appelle sens interne du beau, la faculté qui discerne le beau dans la régularité, l'ordre & l'harmonie ; & sens interne du bon, celle qui approuve les affections, les actions, les caracteres des gens raisonnables & vertueux. Voyez BON.
4°. Comme les déterminations de l'ame à se plaire ou à se déplaire à certaines formes ou à certaines idées, quand elle les considere, s'observent dans tous les hommes, à moins qu'ils ne soient stupides ; sans rechercher encore ce que c'est que le beau, il est constant qu'il y a dans tous les hommes un sens naturel & propre pour cet objet ; qu'ils s'accordent à trouver de la beauté dans les figures, aussi généralement qu'à éprouver de la douleur à l'approche d'un trop grand feu, ou du plaisir à manger quand ils sont pressés par l'appetit, quoiqu'il y ait entr'eux une diversité de goûts infinie.
5°. Aussi-tôt que nous naissons, nos sens externes commencent à s'exercer & à nous transmettre des perceptions des objets sensibles ; & c'est-là sans-doute ce qui nous persuade qu'ils sont naturels. Mais les objets de ce que j'appelle des sens internes, ou les sens du beau & du bon, ne se présentent pas si-tôt à notre esprit. Il se passe du tems avant que les enfans refléchissent, ou du-moins qu'ils donnent des indices de réflexion sur les proportions, ressemblances & symmétries, sur ses affections & ses caracteres : ils ne connoissent qu'un peu tard les choses qui excitent le goût ou la répugnance intérieure ; & c'est-là ce qui fait imaginer que ces facultés que j'appelle les sens internes de beau & du bon, viennent uniquement de l'instruction & de l'éducation. Mais quelque notion qu'on ait de la vertu & de la beauté, un objet vertueux ou bon est une occasion d'approbation & de plaisir, aussi naturellement que des mets sont les objets de notre appétit. Et qu'importe que les premiers objets se soient présentés tôt ou tard ? si les sens ne se développoient en nous que peu-à-peu & les uns après les autres, en seroient-ils moins des sens & des facultés ? & serions-nous bien venus à prétendre, qu'il n'y a vraiment dans les objets visibles, ni couleurs, ni figures, parce que nous aurions eu besoin de tems & d'instructions pour les y appercevoir, & qu'il n'y auroit pas entre nous tous, deux personnes qui les y appercevroient de la même maniere ? Voyez SENS.
6°. On appelle sensations, les perceptions qui s'excitent dans notre ame à la présence des objets extérieurs, & par l'impression qu'ils font sur nos organes. Voyez SENSATION. Et lorsque deux perceptions different entierement l'une de l'autre, & qu'elles n'ont de commun que le nom générique de sensation, les facultés par lesquelles nous recevons ces différentes perceptions, s'appellent des sens différens. La vûe & l'oüie, par exemple, désignent des facultés différentes, dont l'une nous donne des idées de couleur, & l'autre les idées du son ; mais quelque différence que les sons ayent entr'eux, & les couleurs entr'elles, on rapporte à un même sens toutes les couleurs, & à un autre sens tous les sons ; & il paroît que nos sens ont chacun leur organe. Or si vous appliquez l'observation précédente au bon & au beau, vous verrez qu'ils sont exactement dans ce cas. Voyez BON.
7°. Les défenseurs du sens interne entendent par beau, l'idée que certains objets excitent dans notre ame, & par le sens interne du beau, la faculté que nous avons de recevoir cette idée ; & ils observent que les animaux ont des facultés semblables à nos sens extérieurs, & qu'ils les ont même quelquefois dans un degré supérieur à nous ; mais qu'il n'y en a pas un qui donne un signe de ce qu'on entend ici par sens interne. Un être, continuent-ils, peut donc avoir en entier la même sensation extérieure que nous éprouvons, sans observer entre les objets, les ressemblances & les rapports ; il peut même discerner ces ressemblances & ces rapports sans en ressentir beaucoup de plaisir ; d'ailleurs les idées seules de la figure & des formes, &c. sont quelque chose de distinct du plaisir. Le plaisir peut se trouver où les proportions ne sont ni considérées ni connues, il peut manquer, malgré toute l'attention qu'on donne à l'ordre & aux proportions. Comment nommerons-nous donc cette faculté qui agit en nous sans que nous sachions bien pourquoi ? sens interne.
8°. Cette dénomination est fondée sur le rapport de la faculté qu'elle désigne avec les autres facultés. Ce rapport consiste principalement en ce que le plaisir que le sens interne nous fait éprouver, est différent de la connoissance des principes. La connoissance des principes peut l'accroître ou le diminuer : mais cette connoissance n'est pas lui ni sa cause. Ce sens a des plaisirs nécessaires, car la beauté & la laideur d'un objet est toûjours la même pour nous, quelque dessein que nous puissions former d'en juger autrement. Un objet désagréable, pour être utile, ne nous en paroît pas plus beau ; un bel objet, pour être nuisible, ne nous paroît pas plus laid. Proposez-nous le monde entier, pour nous contraindre par la récompense à trouver belle la laideur, & laide la beauté ; ajoûtez à ce prix les plus terribles menaces, vous n'apporterez aucun changement à nos perceptions & au jugement du sens interne ; notre bouche loüera ou blâmera à votre gré, mais le sens interne restera incorruptible.
9°. Il paroît de-là, continuent les mêmes systématiques, que certains objets sont immédiatement & par eux-mêmes, les occasions du plaisir que donne la beauté ; que nous avons un sens propre à le goûter ; que ce plaisir est individuel, & qu'il n'a rien de commun avec l'intérêt. En effet, n'arrive-t-il pas en cent occasions qu'on abandonne l'utile pour le beau ? cette généreuse préférence ne se remarque-t-elle pas quelquefois dans les conditions les plus méprisées ? Un honnête artisan se livrera à la satisfaction de faire un chef-d'oeuvre qui le ruine, plûtôt qu'à l'avantage de faire un ouvrage qui l'enrichiroit.
10°. Si on ne joignoit pas à la considération de l'utile, quelque sentiment particulier, quelqu'effet subtil d'une faculté différente de l'entendement & de la volonté, on n'estimeroit une maison que pour son utilité, un jardin que pour sa fertilité, un habillement que pour sa commodité. Or cette estimation étroite des choses n'existe pas même dans les enfans & dans les sauvages. Abandonnez la nature à elle-même, & le sens interne exercera son empire : peut-être se trompera-t-il dans son objet, mais la sensation de plaisir n'en sera pas moins réelle. Une philosophie austere, ennemie du luxe, brisera les statues, renversera les obélisques, transformera nos palais en cabanes, & nos jardins en forêts : mais elle n'en sentira pas moins la beauté réelle de ces objets ; le sens interne se révoltera contr'elle ; & elle sera réduite à se faire un mérite de son courage.
C'est ainsi, dis-je, que Hutcheson & ses sectateurs s'efforcent d'établir la nécessité du sens interne du beau : mais ils ne parviennent qu'à démontrer qu'il y a quelque chose d'obscur & d'impénétrable dans le plaisir que le beau nous cause ; que ce plaisir semble indépendant de la connoissance des rapports & des perceptions ; que la vûe de l'utile n'y entre pour rien, & qu'il fait des enthousiastes que ni les récompenses ni les menaces ne peuvent ébranler.
Du reste, ces philosophes distinguent dans les êtres corporels un beau absolu & un beau relatif. Ils n'entendent point par un beau absolu, une qualité tellement inhérente dans l'objet, qu'elle le rend beau par lui-même, sans aucun rapport à l'ame qui le voit & qui en juge. Le terme beau, semblable aux autres noms des idées sensibles, désigne proprement, selon eux, la perception d'un esprit ; comme le froid & le chaud, le doux & l'amer, sont des sensations de notre ame, quoique sans-doute il n'y ait rien qui ressemble à ces sensations dans les objets qui les excitent, malgré la prévention populaire qui en juge autrement. On ne voit pas, disent-ils, comment les objets pourroient être appellés beaux, s'il n'y avoit pas un esprit doüé du sens de la beauté pour leur rendre hommage. Ainsi par le beau absolu, ils n'entendent que celui qu'on reconnoît en quelques objets, sans les comparer à aucune chose extérieure dont ces objets soient l'imitation & la peinture. Telle est, disent-ils, la beauté que nous appercevons dans les ouvrages de la nature, dans certaines formes artificielles, & dans les figures, les solides, les surfaces ; & par beau relatif, ils entendent celui qu'on apperçoit dans des objets considérés communément comme des imitations & des images de quelques autres. Ainsi leur division a plûtôt son fondement dans les différentes sources du plaisir que le beau nous cause, que dans les objets ; car il est constant que le beau absolu a, pour ainsi dire, un beau relatif, & le beau relatif un beau absolu.
Du beau absolu, selon Hutcheson & ses sectateurs. Nous avons fait sentir, disent-ils, la nécessité d'un sens propre qui nous avertit par le plaisir de la présence du beau ; voyons maintenant quelles doivent être les qualités d'un objet pour émouvoir ce sens. Il ne faut pas oublier, ajoûtent-ils, qu'il ne s'agit ici de ces qualités que relativement à l'homme ; car il y a certainement bien des objets qui font sur eux l'impression de beauté, & qui déplaisent à d'autres animaux. Ceux-ci ayant des sens & des organes autrement conformés que les nôtres, s'ils étoient juges du beau, en attacheroient des idées à des formes toutes différentes. L'ours peut trouver sa caverne commode : mais il ne la trouve ni belle ni laide ; peut-être s'il avoit le sens interne du beau la regarderoit-il comme une retraite délicieuse. Remarquez en passant, qu'un être bien malheureux, ce seroit celui qui auroit le sens interne du beau, & qui ne reconnoîtroit jamais le beau que dans les objets qui lui seroient nuisibles ; la providence y a pourvû par rapport à nous ; & une chose vraiement belle, est assez ordinairement une chose bonne.
Pour découvrir l'occasion générale des idées du beau parmi les hommes, les sectateurs d'Hutcheson examinent les êtres les plus simples, par exemple, les figures ; & ils trouvent qu'entre les figures, celles que nous nommons belles, offrent à nos sens l'uniformité dans la variété. Ils assûrent qu'un triangle équilatéral est moins beau qu'un quarré ; un pentagone moins beau qu'un exagone, & ainsi de suite, parce que les objets également uniformes sont d'autant plus beaux, qu'ils sont plus variés ; & ils sont d'autant plus variés, qu'ils ont plus de côtés comparables. Il est vrai, disent-ils, qu'en augmentant beaucoup le nombre des côtés, on perd de vûe les rapports qu'ils ont entr'eux & avec le rayon ; d'où il s'ensuit que la beauté de ces figures n'augmente pas toûjours comme le nombre des côtés. Ils se font cette objection, mais ils ne se soucient guere d'y répondre. Ils remarquent seulement que le défaut du parallélisme dans les côtés des eptagones & des autres polygones impairs en diminue la beauté : mais ils soûtiennent toûjours que, tout étant égal d'ailleurs, une figure réguliere à vingt côtés surpasse en beauté celle qui n'en a que douze ; que celle-ci l'emporte sur celle qui n'en a que huit, & cette derniere sur le quarré. Ils font le même raisonnement sur les surfaces & sur les solides. De tous les solides réguliers, celui qui a le plus grand nombre de surfaces est pour eux le plus beau, & ils pensent que la beauté de ces corps va toûjours en décroissant jusqu'à la pyramide réguliere.
Mais si entre les objets également uniformes, les plus variés sont les plus beaux ; selon eux, réciproquement entre les objets également variés, les plus beaux seront les plus uniformes : ainsi le triangle équilatéral ou même isoscele est plus beau que le scalene, le quarré plus beau que le rhombe ou losange. C'est le même raisonnement pour les corps solides réguliers, & en général pour tous ceux qui ont quelque uniformité, comme les cylindres, les prismes, les obélisques, &c. & il faut convenir avec eux, que ces corps plaisent certainement plus à la vûe que des figures grossieres où l'on n'apperçoit ni uniformité, ni symmétrie, ni unité.
Pour avoir des raisons composées du rapport de l'uniformité & de la variété, ils comparent les cercles & les spheres avec les ellipses & les sphéroïdes peu excentriques ; & ils prétendent que la parfaite uniformité des uns est compensée par la variété des autres, & que leur beauté est à peu près égale.
Le beau, dans les ouvrages de la nature, a le même fondement selon eux. Soit que vous envisagiez, disent-ils, les formes des corps célestes, leurs révolutions, leurs aspects ; soit que vous descendiez des cieux sur la terre, & que vous considériez les plantes qui la couvrent, les couleurs dont les fleurs sont peintes, la structure des animaux, leurs especes, leurs mouvemens, la proportion de leurs parties, le rapport de leur méchanisme à leur bien être ; soit que vous vous élanciez dans les airs & que vous examiniez les oiseaux & les météores ; ou que vous vous plongiez dans les eaux & que vous compariez entre eux les poissons, vous rencontrerez par-tout l'uniformité dans la variété, par-tout vous verrez ces qualités compensées dans les êtres également beaux, & la raison composée des deux, inégale dans les êtres de beauté inégale ; en un mot, s'il est permis de parler encore la langue des Géometres, vous verrez dans les entrailles de la terre, au fond des mers, au haut de l'atmosphere, dans la nature entiere & dans chacune de ses parties, l'uniformité dans la variété, & la beauté toûjours en raison composée de ces deux qualités.
Ils traitent ensuite de la beauté des Arts, dont on ne peut regarder les productions comme une véritable imitation, telle que l'Architecture, les Arts méchaniques, & l'harmonie naturelle : ils font tous leurs efforts pour les assujettir à leur loi de l'uniformité dans la variété ; & si leur preuve peche, ce n'est pas par le défaut de l'énumération ; ils descendent depuis le palais le plus magnifique jusqu'au plus petit édifice, depuis l'ouvrage le plus précieux jusqu'aux bagatelles, montrant le caprice par-tout où manque l'uniformité, & l'insipidité où manque la variété.
Mais il est une classe d'êtres fort différens des précédens, dont les sectateurs d'Hutcheson sont fort embarrassés ; car on y reconnoît de la beauté, & cependant la regle de l'uniformité dans la variété ne leur est pas applicable ; ce sont les démonstrations des vérités abstraites & universelles. Si un théorème contient une infinité de vérités particulieres qui n'en sont que le développement, ce théorème n'est proprement que le corollaire d'un axiome d'où découle une infinité d'autres théorèmes ; cependant on dit voilà un beau théorème, & l'on ne dit pas voilà un bel axiome.
Nous donnerons plus bas la solution de cette difficulté dans d'autres principes. Passons à l'examen du beau relatif, de ce beau qu'on apperçoit dans un objet considéré comme l'imitation d'un original, selon ceux de Hutcheson & de ses sectateurs.
Cette partie de son système n'a rien de particulier. Selon cet auteur, & selon tout le monde, ce beau ne peut consister que dans la conformité qui se trouve entre le modele & la copie.
D'où il s'ensuit que pour le beau relatif, il n'est pas nécessaire qu'il y ait aucune beauté dans l'original. Les forêts, les montagnes, les précipices, les cahos, les rides de la vieillesse, la pâleur de la mort, les effets de la maladie, plaisent en peinture ; ils plaisent aussi en Poësie : ce qu'Aristote appelle un caractere moral, n'est point celui d'un homme vertueux ; & ce qu'on entend par fabula bene morata, n'est autre chose qu'un poëme épique ou dramatique, où les actions, les sentimens & les discours sont d'accord avec les caracteres bons ou mauvais.
Cependant on ne peut nier que la peinture d'un objet qui aura quelque beauté absolue, ne plaise ordinairement davantage que celle d'un objet qui n'aura point ce beau. La seule exception qu'il y ait peut-être à cette regle, c'est le cas où la conformité de la peinture avec l'état du spectateur gagnant tout ce qu'on ôte à la beauté absolue du modele, la peinture en devient d'autant plus intéressante ; cet intérêt qui naît de l'imperfection, est la raison pour laquelle on a voulu que le héros d'un poëme épique ou héroïque ne fût point sans défaut.
La plûpart des autres beautés de la poësie & de l'éloquence suivent la loi du beau relatif. La conformité avec le vrai rend les comparaisons, les métaphores, & les allégories belles, lors même qu'il n'y a aucune beauté absolue dans les objets qu'elles représentent.
Hutcheson insiste ici sur le penchant que nous avons à la comparaison. Voici selon lui quelle en est l'origine. Les passions produisent presque toûjours dans les animaux les mêmes mouvemens qu'en nous ; & les objets inanimés de la nature, ont souvent des positions qui ressemblent aux attitudes du corps humain, dans certains états de l'ame ; il n'en a pas fallu davantage, ajoûte l'auteur que nous analysons, pour rendre le lion symbole de la fureur, le tigre celui de la cruauté ; un chêne droit, & dont la cime orgueilleuse s'éleve jusque dans la nue, l'emblème de l'audace ; les mouvemens d'un mer agitée, la peinture des agitations de la colere ; & la mollesse de la tige d'un pavot, dont quelques gouttes de pluie ont fait pancher la tête, l'image d'un moribond.
Tel est le système de Hutcheson, qui paroîtra sans-doute plus singulier que vrai. Nous ne pouvons cependant trop recommander la lecture de son ouvrage, sur-tout dans l'original ; on y trouvera un grand nombre d'observations délicates sur la maniere d'atteindre la perfection dans la pratique des beaux Arts. Nous allons maintenant exposer les idées du P. André jésuite. Son essai sur le beau est le système le plus suivi, le plus étendu, & le mieux lié que je connoisse. J'oserois assûrer qu'il est dans son genre ce que le traité des beaux Arts réduits à un seul principe est dans le sien. Ce sont deux bons ouvrages auxquels il n'a manqué qu'un chapitre pour être excellents ; & il en faut savoir d'autant plus mauvais gré à ces deux auteurs de l'avoir omis. M. l'abbé Batteux rappelle tous les principes des beaux Arts à l'imitation de la belle nature : mais il ne nous apprend point ce que c'est que la belle nature. Le P. André distribue avec beaucoup de sagacité & de philosophie le beau en général dans ses différentes especes ; il les définit toutes avec précision : mais on ne trouve la définition du genre, celle du beau en général, dans aucun endroit de son livre, à moins qu'il ne le fasse consister dans l'unité comme S. Augustin. Il parle sans-cesse d'ordre de proportion, d'harmonie, &c. mais il ne dit pas un mot de l'origine de ces idées.
Le pere André distingue les notions générales de l'esprit pur, qui nous donnent des regles éternelles du beau ; les jugemens naturels de l'ame où le sentiment se mêle avec les idées purement spirituelles, mais sans les détruire ; & les préjugés de l'éducation & de la coûtume, qui semblent quelquefois les renverser les uns & les autres. Il distribue son ouvrage en quatre chapitres. Le premier est du beau visible ; le second, du beau dans les moeurs ; le troisieme, du beau dans les ouvrages d'esprit ; & le quatrieme, du beau musical.
Il agite trois questions sur chacun de ces objets ; il prétend qu'on y découvre un beau essentiel, absolu, indépendant de toute institution, même divine ; un beau naturel dépendant de l'institution du Créateur, mais indépendant de nos opinions & de nos goûts ; un beau artificiel & en quelque sorte arbitraire, mais toûjours avec quelque dépendance des lois éternelles.
Il fait consister le beau essentiel, dans la régularité, l'ordre, la proportion, la symmétrie en général ; le beau naturel, dans la régularité, l'ordre, les proportions, la symmétrie observés dans les êtres de la nature ; le beau artificiel, dans la régularité, l'ordre, la symmétrie, les proportions observées dans nos productions méchaniques, nos parures, nos bâtimens, nos jardins. Il remarque que ce dernier beau est mêlé d'arbitraire & d'absolu. En Architecture par exemple, il apperçoit deux sortes de regles : les unes qui découlent de la notion indépendante de nous, du beau original & essentiel, & qui exigent indispensablement la perpendicularité des colonnes, le parallélisme des étages, la symmétrie des membres, le dégagement & l'élégance du dessein, & l'unité dans le tout : les autres qui sont fondées sur des observations particulieres, que les maîtres ont faites en divers tems, & par lesquelles ils ont déterminé les proportions des parties dans les cinq ordres d'Architecture. C'est en conséquence de ces regles, que dans le toscan la hauteur de la colonne contient sept fois le diametre de sa base, dans le dorique huit fois, neuf dans le ionique, dix dans le corinthien, & dans le composite autant ; que les colonnes ont un renflement, depuis leur naissance jusqu'au tiers du fût ; que dans les deux autres tiers, elles diminuent peu à peu en fuyant le chapiteau ; que les entre-colonnemens sont au plus de huit modules, & au-moins de trois ; que la hauteur des portiques, des arcades, des portes & des fenêtres est double de leur largeur. Ces regles n'étant fondées que sur des observations à l'oeil & sur des exemples équivoques, sont toûjours un peu incertaines & ne sont pas tout-à-fait indispensables. Aussi voyons-nous quelquefois que les grands architectes se mettent au-dessus d'elles, y ajoûtent, en rabattent, & en imaginent de nouvelles selon les circonstances.
Voilà donc dans les productions des Arts, un beau essentiel, un beau de création humaine, & un beau de système : un beau essentiel, qui consiste dans l'ordre ; un beau de création humaine, qui consiste dans l'application libre & dépendante de l'artiste des lois de l'ordre, ou pour parler plus clairement, dans le choix de tel ordre ; & un beau de système, qui naît des observations, & qui donne des variétés même entre les plus savans artistes, mais jamais au préjudice du beau essentiel, qui est une barriere qu'on ne doit jamais franchir. Hic murus aheneus esto. S'il est arrivé quelquefois aux grands maîtres de se laisser emporter par leur génie au-delà de cette barriere, c'est dans les occasions rares où ils ont prévû que cet écart ajoûteroit plus à la beauté qu'il ne lui ôteroit : mais ils n'en ont pas moins fait une faute qu'on peut leur reprocher.
Le beau arbitraire se sous-divise selon le même auteur, en un beau de génie, un beau de goût, & un beau de pur caprice : un beau de génie fondé sur la connoissance du beau essentiel, qui donne les regles inviolables : un beau de goût, fondé sur la connoissance des ouvrages de la nature & des productions des grands maîtres, qui dirige dans l'application & l'emploi du beau essentiel ; un beau de caprice, qui n'étant fondé sur rien, ne doit être admis nulle part.
Que devient le système de Lucrece & des Pyrrhoniens, dans le système du pere André ? que reste-t-il d'abandonné à l'arbitraire ? presque rien : aussi pour toute réponse à l'objection de ceux qui prétendent que la beauté est d'éducation & de préjugé, il se contente de développer la source de leur erreur. Voici, dit-il, comment ils ont raisonné : ils ont cherché dans les meilleurs ouvrages des exemples de beau de caprice, & ils n'ont pas eu de peine à y en rencontrer, & à démontrer que le beau qu'on y reconnoissoit étoit de caprice : ils ont pris des exemples du beau de goût, & ils ont très-bien démontré qu'il y avoit aussi de l'arbitraire dans ce beau ; & sans aller plus loin, ni s'appercevoir que leur énumération étoit incomplete , ils ont conclu que tout ce qu'on appelle beau, étoit arbitraire & de caprice. Mais on conçoit aisément que leur conclusion n'étoit juste que par rapport à la troisieme branche du beau artificiel, & que leur raisonnement n'attaquoit ni les deux autres branches de ce beau, ni le beau naturel, ni le beau essentiel.
Le pere André passe ensuite à l'application de ses principes aux moeurs, aux ouvrages d'esprit & à la Musique ; & il démontre qu'il y a dans ces trois objets du beau, un beau essentiel, absolu & indépendant de toute institution, même divine, qui fait qu'une chose est une ; un beau naturel dépendant de l'institution du Créateur, mais indépendant de nous ; un beau arbitraire, dépendant de nous, mais sans préjudice du beau essentiel.
Un beau essentiel dans les moeurs, dans les ouvrages d'esprit & dans la Musique, fondé sur l'ordonnance, la régularité, la proportion, la justesse, la décence, l'accord, qui se remarquent dans une belle action, une bonne piece, un beau concert, & qui font que les productions morales, intellectuelles & harmoniques sont unes.
Un beau naturel, qui n'est autre chose dans les moeurs, que l'observation du beau essentiel dans notre conduite, relative à ce que nous sommes entre les êtres de la nature : dans les ouvrages d'esprit, que l'imitation & la peinture fidele des productions de la nature en tout genre ; dans l'harmonie, qu'une soûmission aux lois que la nature a introduites dans les corps sonores, leur résonnance & la conformation de l'oreille.
Un beau artificiel, qui consiste dans les moeurs à se conformer aux usages de sa nation, au génie de ses concitoyens, à leurs lois ; dans les ouvrages d'esprit, à respecter les regles du discours, à connoître la langue & à suivre le goût dominant, dans la Musique, à insérer à propos la dissonnance, à conformer ses productions aux mouvemens & aux intervalles reçûs.
D'où il s'ensuit que, selon le P. André, le beau essentiel & la vérité ne se montrent nulle part avec tant de profusion que dans l'univers ; le beau moral, que dans le philosophe chrétien ; & le beau intellectuel, que dans une tragédie accompagnée de musique & de décorations.
L'auteur qui nous a donné l'essai sur le mérite & la vertu, rejette toutes ces distinctions du beau, & prétend, avec beaucoup d'autres, qu'il n'y a qu'un beau, dont l'utile est le fondement : ainsi tout ce qui est ordonné de maniere à produire le plus parfaitement l'effet qu'on se propose, est suprèmement beau. Si vous lui demandez qu'est-ce qu'un bel homme, il vous répondra que c'est celui dont les membres bien proportionnés conspirent de la façon la plus avantageuse à l'accomplissement des fonctions animales de l'homme. Voyez Essai sur le mérite & la vertu, pag. 48. L'homme, la femme, le cheval, & les autres animaux, continuera-t-il, occupent un rang dans la nature : or dans la nature ce rang détermine les devoirs à remplir ; les devoirs déterminent l'organisation ; & l'organisation est plus ou moins parfaite ou belle, selon le plus ou le moins de facilité que l'animal en reçoit pour vaquer à ses fonctions. Mais cette facilité n'est pas arbitraire, ni par conséquent les formes qui la constituent, ni la beauté qui dépend de ces formes. Puis descendant de-là aux objets les plus communs, aux chaises, aux tables, aux portes, &c. il tâchera de vous prouver que la forme de ces objets ne nous plaît qu'à proportion de ce qu'elle convient mieux à l'usage auquel on les destine ; & si nous changeons si souvent de mode, c'est-à-dire, si nous sommes si peu constans dans le goût pour les formes que nous leur donnons, c'est, dira-t-il, que cette conformation la plus parfaite relativement à l'usage, est très-difficile à rencontrer ; c'est qu'il y a là une espece de maximum qui échappe à toutes les finesses de la Géométrie naturelle & artificielle, & autour duquel nous tournons sans-cesse : nous nous appercevons à merveille quand nous en approchons & quand nous l'avons passé, mais nous ne sommes jamais sûrs de l'avoir atteint. De-là cette révolution perpétuelle dans les formes : ou nous les abandonnons pour d'autres, ou nous disputons sans fin sur celles que nous conservons. D'ailleurs ce point n'est pas par-tout au même endroit ; ce maximum a dans mille occasions des limites plus étendues ou plus étroites : quelques exemples suffiront pour éclaircir sa pensée. Tous les hommes, ajoûtera-t-il, ne sont pas capables de la même attention, n'ont pas la même force d'esprit ; ils sont tous plus ou moins patiens, plus ou moins instruits, &c. Que produira cette diversité ? c'est qu'un spectacle composé d'académiciens trouvera l'intrigue d'Héraclius admirable, & que le peuple la traitera d'embrouillée ; c'est que les uns restraindront l'étendue d'une comédie à trois actes, & les autres prétendront qu'on peut l'étendre à sept ; & ainsi du reste. Avec quelque vraisemblance que ce système soit exposé, il ne m'est pas possible de l'admettre.
Je conviens avec l'auteur, qu'il se mêle dans tous nos jugemens un coup-d'oeil délicat sur ce que nous sommes, un retour imperceptible vers nous-mêmes, & qu'il y a mille occasions où nous croyons n'être enchantés que par les belles formes ; & où elles sont en effet la cause principale, mais non la seule, de notre admiration ; je conviens que cette admiration n'est pas toûjours aussi pure que nous l'imaginons : mais comme il ne faut qu'un fait pour renverser un système, nous sommes contraints d'abandonner celui de l'auteur que nous venons de citer, quelqu'attachement que nous ayons eu jadis pour ses idées ; & voici nos raisons.
Il n'est personne qui n'ait éprouvé que notre attention se porte principalement sur la similitude des parties, dans les choses mêmes où cette similitude ne contribue point à l'utilité : pourvû que les piés d'une chaise soient égaux & solides, qu'importe qu'ils ayent la même figure ? ils peuvent différer en ce point, sans en être moins utiles. L'un pourra donc être droit, & l'autre en pié de biche ; l'un courbe en-dehors, & l'autre en-dedans. Si l'on fait une porte en forme de biere, sa forme paroîtra peut-être mieux assortie à la figure de l'homme qu'aucune des formes qu'on suit. De quelle utilité sont en Architecture les imitations de la nature & de ses productions ? A quelle fin placer une colonne & des guirlandes où il ne faudroit qu'un poteau de bois, ou qu'un massif de pierre ? A quoi bon ces cariatides ? Une colonne est-elle destinée à faire la fonction d'un homme, ou un homme a-t-il jamais été destiné à faire l'office d'une colonne dans l'angle d'un vestibule ? Pourquoi imite-t-on dans les entablemens, des objets naturels ? qu'importe que dans cette imitation les proportions soient bien ou mal observées ? Si l'utilité est le seul fondement de la beauté, les bas-reliefs, les cannelures, les vases, & en général tous les ornemens, deviennent ridicules & superflus.
Mais le goût de l'imitation se fait sentir dans les choses dont le but unique est de plaire ; & nous admirons souvent des formes, sans que la notion de l'utile nous y porte. Quand le propriétaire d'un cheval ne le trouveroit jamais beau que quand il compare la forme de cet animal au service qu'il prétend en tirer ; il n'en est pas de même du passant à qui il n'appartient pas. Enfin on discerne tous les jours de la beauté dans des fleurs, des plantes, & mille ouvrages de la nature dont l'usage nous est inconnu.
Je sais qu'il n'y a aucune des difficultés que je viens de proposer contre le système que je combats, à laquelle on ne puisse répondre : mais je pense que ces réponses seroient plus subtiles que solides.
Il suit de ce qui précede, que Platon s'étant moins proposé d'enseigner la vérité à ses disciples, que de désabuser ses concitoyens sur le compte des sophistes, nous offre dans ses ouvrages à chaque ligne des exemples du beau, nous montre très-bien ce que ce n'est point, mais ne nous dit rien de ce que c'est.
Que S. Augustin a réduit toute beauté à l'unité ou au rapport exact des parties d'un tout entr'elles, & au rapport exact des parties d'une partie considérée comme tout, & ainsi à l'infini ; ce qui me semble constituer plûtôt l'essence du parfait que du beau.
Que M. Wolf a confondu le beau avec le plaisir qu'il occasionne, & avec la perfection ; quoiqu'il y ait des êtres qui plaisent sans être beaux, d'autres qui sont beaux sans plaire ; que tout être soit susceptible de la derniere perfection, & qu'il y en ait qui ne sont pas susceptibles de la moindre beauté : tels sont tous les objets de l'odorat & du goût, considérés relativement à ces sens.
Que M. Crouzas en chargeant sa définition du beau, ne s'est pas apperçû que plus il multiplioit les caracteres du beau, plus il le particularisoit ; & que s'étant proposé de traiter du beau en général, il a commencé par en donner une notion, qui n'est applicable qu'à quelques especes de beaux particuliers.
Que Hutcheson qui s'est proposé deux objets ; le premier, d'expliquer l'origine du plaisir que nous éprouvons à la présence du beau ; & le second, de rechercher les qualités que doit avoir un être pour occasionner en nous ce plaisir individuel, & par conséquent nous paroître beau ; a moins prouvé la réalité de son sixieme sens, que fait sentir la difficulté de développer sans ce secours la source du plaisir que nous donne le beau ; & que son principe de l'uniformité dans la variété n'est pas général ; qu'il en fait aux figures de la Géométrie une application plus subtile que vraie, & que ce principe ne s'applique point-du-tout à une autre sorte de beau, celui des démonstrations des vérités abstraites & universelles.
Que le système proposé dans l'essai sur le mérite & sur la vertu, où l'on prend l'utile pour le seul & unique fondement du beau, est plus défectueux encore qu'aucun des précédens.
Enfin que le pere André jésuite, ou l'auteur de l'essai sur le beau, est celui qui jusqu'à présent a le mieux approfondi cette matiere, en a le mieux connu l'étendue & la difficulté, en a posé les principes les plus vrais & les plus solides, & mérite le plus d'être lû.
La seule chose qu'on pût desirer peut-être dans son ouvrage, c'est de développer l'origine des notions qui se trouvent en nous de rapport, d'ordre, de symmétrie : car du ton sublime dont il parle de ces notions, on ne sait s'il les croit acquises & factices, ou s'il les croit innées : mais il faut ajoûter en sa faveur que la matiere de son ouvrage, plus oratoire encore que philosophique, l'éloignoit de cette discussion, dans laquelle nous allons entrer.
Nous naissons avec la faculté de sentir & de penser : le premier pas de la faculté de penser, c'est d'examiner ses perceptions, de les unir, de les comparer, de les combiner, d'appercevoir entr'elles des rapports de convenance & disconvenance, &c. Nous naissons avec des besoins qui nous contraignent de recourir à différens expédiens, entre lesquels nous avons souvent été convaincus par l'effet que nous en attendions, & par celui qu'ils produisoient, qu'il y en a de bons, de mauvais, de promts, de courts, de complets, d'incomplets, &c. la plûpart de ces expédiens étoient un outil, une machine, ou quelqu'autre invention de ce genre : mais toute machine suppose combinaison, arrangement de parties tendantes à un même but, &c. Voilà donc nos besoins, & l'exercice le plus immédiat de nos facultés, qui conspirent aussi-tôt que nous naissons à nous donner des idées d'ordre, d'arrangement, de symmétrie, de méchanisme, de proportion, d'unité : toutes ces idées viennent des sens, & sont factices ; & nous avons passé de la notion d'une multitude d'êtres artificiels & naturels, arrangés, proportionnés, combinés, symmétrisés, à la notion positive & abstraite d'ordre, d'arrangement, de proportion, de combinaison, de rapports, de symmétrie, & à la notion abstraite & négative de disproportion, de désordre & de cahos.
Ces notions sont expérimentales comme toutes les autres : elles nous sont aussi venues par les sens ; il n'y auroit point de Dieu, que nous ne les aurions pas moins : elles ont précédé de long-tems en nous celle de son existence : elles sont aussi positives, aussi distinctes, aussi nettes, aussi réelles, que celles de longueur, largeur, profondeur, quantité, nombre : comme elles ont leur origine dans nos besoins & l'exercice de nos facultés, y eût-il sur la surface de la terre quelque peuple dans la langue duquel ces idées n'auroient point de nom, elles n'en existeroient pas moins dans les esprits d'une maniere plus ou moins étendue, plus ou moins développée, fondée sur un plus ou moins grand nombre d'expériences, appliquée à un plus ou moins grand nombre d'êtres ; car voilà toute la différence qu'il peut y avoir entre un peuple & un autre peuple, entre un homme & un autre homme chez le même peuple ; & quelles que soient les expressions sublimes dont on se serve pour désigner les notions abstraites d'ordre, de proportion, de rapports, d'harmonie ; qu'on les appelle, si l'on veut, éternelles, originales, souveraines, regles essentielles du beau ; elles ont passé par nos sens pour arriver dans notre entendement, de même que les notions les plus viles ; & ce ne sont que des abstractions de notre esprit.
Mais à peine l'exercice de nos facultés intellectuelles, & la nécessité de pourvoir à nos besoins par des inventions, des machines, &c. eurent-ils ébauché dans notre entendement les notions d'ordre, de rapports, de proportion, de liaison, d'arrangement, de symmétrie, que nous nous trouvâmes environnés d'êtres où les mêmes notions étoient, pour ainsi dire, répétées à l'infini ; nous ne pûmes faire un pas dans l'univers sans que quelque production ne les réveillât ; elles entrerent dans notre ame à tout instant & de tous côtés ; tout ce qui se passoit en nous, tout ce qui existoit hors de nous, tout ce qui subsistoit des siecles écoulés, tout ce que l'industrie, la réflexion, les découvertes de nos contemporains, produisoient sous nos yeux, continuoit de nous inculquer les notions d'ordre, de rapports, d'arrangement, de symmétrie, de convenance, de disconvenance, &c. & il n'y a pas une notion, si ce n'est peut-être celle d'existence, qui ait pû devenir aussi familiere aux hommes, que celle dont il s'agit.
S'il n'entre donc dans la notion du beau soit absolu, soit relatif, soit général, soit particulier, que les notions d'ordre, de rapports, de proportions, d'arrangement, de symmétrie, de convenance, de disconvenance ; ces notions ne découlant pas d'une autre source que celles d'existence, de nombre, de longueur, largeur, profondeur, & une infinité d'autres, sur lesquelles on ne conteste point, on peut, ce me semble, employer les premieres dans une définition du beau, sans être accusé de substituer un terme à la place d'un autre, & de tourner dans un cercle vicieux.
Beau est un terme que nous appliquons à une infinité d'êtres : mais quelque différence qu'il y ait entre ces êtres, il faut ou que nous fassions une fausse application du terme beau, ou qu'il y ait dans tous ces êtres une qualité dont le terme beau soit le signe.
Cette qualité ne peut être du nombre de celles qui constituent leur différence spécifique ; car ou il n'y auroit qu'un seul être beau, ou tout au plus qu'une seule belle espece d'êtres.
Mais entre les qualités communes à tous les êtres que nous appellons beaux, laquelle choisirons-nous pour la chose dont le terme beau est le signe ? Laquelle ? il est évident, ce me semble, que ce ne peut être que celle dont la présence les rend tous beaux ; dont la fréquence ou la rareté, si elle est susceptible de fréquence & de rareté, les rend plus ou moins beaux ; dont l'absence les fait cesser d'être beaux ; qui ne peut changer de nature, sans faire changer le beau d'espece, & dont la qualité contraire rendroit les plus beaux désagréables & laids ; celle en un mot par qui la beauté commence, augmente, varie à l'infini, décline, & disparoît : or il n'y a que la notion de rapports capable de ces effets.
J'appelle donc beau hors de moi, tout ce qui contient en soi de quoi réveiller dans mon entendement l'idée de rapports ; & beau par rapport à moi, tout ce qui réveille cette idée.
Quand je dis tout, j'en excepte pourtant les qualités relatives au goût & à l'odorat : quoique ces qualités puissent réveiller en nous l'idée de rapports, on n'appelle point beaux les objets en qui elles résident, quand on ne les considére que relativement à ces qualités. On dit un mets excellent, une odeur délicieuse ; mais non un beau mets, une belle odeur. Lors donc qu'on dit, voilà un beau turbot, voilà une belle rose, on considere d'autres qualités dans la rose & dans le turbot que celles qui sont relatives aux sens du goût & de l'odorat.
Quand je dis tout ce qui contient en soi de quoi réveiller dans mon entendement l'idée de rapport, ou tout ce qui réveille cette idée, c'est qu'il faut bien distinguer les formes qui sont dans les objets, & la notion que j'en ai. Mon entendement ne met rien dans les choses, & n'en ôte rien. Que je pense ou ne pense point à la façade du Louvre, toutes les parties qui la composent n'en ont pas moins telle ou telle forme, & tel & tel arrangement entr'elles : qu'il y eût des hommes ou qu'il n'y en eût point, elle n'en seroit pas moins belle, mais seulement pour des êtres possibles constitués de corps & d'esprit comme nous ; car pour d'autres, elle pourroit n'être ni belle ni laide, ou même être laide. D'où il s'ensuit que, quoiqu'il n'y ait point de beau absolu, il y a deux sortes de beau par rapport à nous, un beau réel, & un beau apperçû.
Quand je dis, tout ce qui réveille en nous l'idée de rapports, je n'entends pas que pour appeller un être beau, il faille apprécier quelle est la sorte de rapports qui y regne ; je n'exige pas que celui qui voit un morceau d'Architecture soit en état d'assûrer ce que l'Architecte même peut ignorer, que cette partie est à celle-là comme tel nombre est à tel nombre ; ou que celui qui entend un concert, sache plus quelquefois que ne sait le Musicien, que tel son est à tel son dans le rapport de 2 à 4, ou de 4 à 5. Il suffit qu'il apperçoive & sente que les membres de cette Architecture & que les sons de cette piece de Musique ont des rapports, soit entr'eux, soit avec d'autres objets. C'est l'indétermination de ces rapports, la facilité de les saisir, & le plaisir qui accompagne leur perception, qui a fait imaginer que le beau étoit plûtôt une affaire de sentiment que de raison. J'ose assûrer que toutes les fois qu'un principe nous sera connu dès la plus tendre enfance, & que nous en ferons par l'habitude une application facile & subite aux objets placés hors de nous, nous croirons en juger par sentiment : mais nous serons contraints d'avoüer notre erreur dans toutes les occasions où la complication des rapports & la nouveauté de l'objet suspendront l'application du principe : alors le plaisir attendra pour se faire sentir, que l'entendement ait prononcé que l'objet est beau. D'ailleurs le jugement en pareil cas est presque toûjours du beau relatif, & non du beau réel.
Ou l'on considere les rapports dans les moeurs, & l'on a le beau moral ; ou on les considere dans les ouvrages de Littérature, & on a le beau littéraire ; ou on les considere dans les pieces de Musique, & l'on a le beau musical ; ou on les considere dans les ouvrages de la nature, & l'on a le beau naturel ; ou on les considere dans les ouvrages méchaniques des hommes, & on a le beau artificiel ; ou on les considere dans les représentations des ouvrages de l'art ou de la nature, & l'on a le beau d'imitation : dans quelque objet & sous quelque aspect que vous considériez les rapports. dans un même objet, le beau prendra différens noms
Mais un même objet, quel qu'il soit, peut être consideré solitairement & en lui-même, ou relativement à d'autres. Quand je prononce d'une fleur qu'elle est belle, ou d'un poisson qu'il est beau, qu'entends-je ? Si je considere cette fleur ou ce poisson solitairement ; je n'entends pas autre chose, sinon que j'apperçois entre les parties dont ils sont composés, de l'ordre, de l'arrangement, de la symmétrie, des rapports (car tous ces mots ne désignent que différentes manieres d'envisager les rapports mêmes) : en ce sens toute fleur est belle, tout poisson est beau ; mais de quel beau ? de celui que j'appelle beau réel.
Si je considere la fleur & le poisson relativement à d'autres fleurs & d'autres poissons ; quand je dis qu'ils sont beaux ; cela signifie qu'entre les êtres de leur genre, qu'entre les fleurs celle-ci, qu'entre les poissons celui-là, réveillent en moi le plus d'idées de rapports, & le plus de certains rapports ; car je ne tarderai pas à faire voir que tous les rapports n'étant pas de la même nature, ils contribuent plus ou moins les uns que les autres à la beauté. Mais je puis assûrer que sous cette nouvelle façon de considérer les objets, il y a beau & laid : mais quel beau, quel laid ? celui qu'on appelle relatif.
Si au lieu de prendre une fleur ou un poisson, on généralise, & qu'on prenne une plante ou un animal ; si on particularise & qu'on prenne une rose & un turbot, on en tirera toûjours la distinction du beau relatif, & du beau réel.
D'où l'on voit qu'il y a plusieurs beaux relatifs, & qu'une tulipe peut être belle ou laide entre les tulipes, belle ou laide entre les fleurs, belle ou laide entre les plantes, belle ou laide entre les productions de la nature.
Mais on conçoit qu'il faut avoir vû bien des roses & bien des turbots, pour prononcer que ceux-ci sont beaux ou laids entre les roses & les turbots ; bien des plantes & bien des poissons, pour prononcer que la rose & le turbot sont beaux ou laids entre les plantes & les poissons ; & qu'il faut avoir une grande connoissance de la nature, pour prononcer qu'ils sont beaux ou laids entre les productions de la nature.
Qu'est-ce donc qu'on entend, quand on dit à un artiste, imitez la belle nature ? Ou l'on ne sait ce qu'on commande, ou on lui dit : si vous avez à peindre une fleur, & qu'il vous soit d'ailleurs indifférent laquelle peindre, prenez la plus belle d'entre les fleurs ; si vous avez à peindre une plante, & que votre sujet ne demande point que ce soit un chêne ou un ormeau sec, rompu, brisé, ébranché, prenez la plus belle d'entre les plantes ; si vous avez à peindre un objet de la nature, & qu'il vous soit indifférent lequel choisir, prenez le plus beau.
D'où il s'ensuit, 1°. que le principe de l'imitation de la belle nature demande l'étude la plus profonde & la plus étendue de ses productions en tout genre.
2°. Que quand on auroit la connoissance la plus parfaite de la nature, & des limites qu'elle s'est prescrites dans la production de chaque être, il n'en seroit pas moins vrai que le nombre des occasions où le plus beau pourroit être employé dans les Arts d'imitation, seroit à celui où il faut préférer le moins beau, comme l'unité à l'infini.
3°. Que quoi qu'il y ait en effet un maximum de beauté dans chaque ouvrage de la nature, considéré en lui-même ; ou, pour me servir d'un exemple, que quoique la plus belle rose qu'elle produise, n'ait jamais ni la hauteur, ni l'étendue d'un chêne, cependant il n'y a ni beau, ni laid dans ses productions, considérées rélativement à l'emploi qu'on en peut faire dans les Arts d'imitation.
Selon la nature d'un être, selon qu'il excite en nous la perception d'un plus grand nombre de rapports, & selon la nature des rapports qu'il excite, il est joli, beau, plus beau, très-beau ou laid ; bas, petit, grand, élevé, sublime, outré, burlesque ou plaisant ; & ce seroit faire un très-grand ouvrage, & non pas un article de dictionnaire, que d'entrer dans tous ces détails : il nous suffit d'avoir montré les principes ; nous abandonnons au lecteur le soin des conséquences & des applications. Mais nous pouvons lui assûrer, que soit qu'il prenne ses exemples dans la nature, ou qu'il les emprunte de la Peinture, de la Morale, de l'Architecture, de la Musique, il trouvera toûjours qu'il donne le nom de beau réel à tout ce qui contient en soi dequoi réveiller l'idée de rapports ; & le nom de beau relatif, à tout ce qui réveille des rapports convenables avec les choses auxquelles il en faut faire la comparaison.
Je me contenterai d'en apporter un exemple, pris de la Littérature. Tout le monde sait le mot sublime de la tragédie des Horaces, qu'il mourût. Je demande à quelqu'un qui ne connoît point la piece de Corneille, & qui n'a aucune idée de la réponse du vieil Horace, ce qu'il pense de ce trait, qu'il mourût. Il est évident que celui que j'interroge ne sachant ce que c'est que ce qu'il mourût ; ne pouvant deviner si c'est une phrase complete ou un fragment, & appercevant à peine entre ces trois termes quelque rapport grammatical, me répondra que cela ne lui paroît ni beau ni laid. Mais si je lui dis que c'est la réponse d'un homme consulté sur ce qu'un autre doit faire dans un combat, il commence à appercevoir dans le répondant une sorte de courage, qui ne lui permet pas de croire qu'il soit toûjours meilleur de vivre que de mourir ; & le qu'il mourût commence à l'intéresser. Si j'ajoûte qu'il s'agit dans ce combat de l'honneur de la patrie ; que le combattant est fils de celui qu'on interroge ; que c'est le seul qui lui reste ; que le jeune homme avoit à faire à trois ennemis, qui avoient déjà ôté la vie à deux de ses freres ; que le vieillard parle à sa fille ; que c'est un Romain : alors sa réponse qu'il mourût, qui n'étoit ni belle ni laide, s'embellit à mesure que je développe ses rapports avec les circonstances, & finit par être sublime.
Changez les circonstances & les rapports, & faites passer le qu'il mourût du théatre françois sur la scene italienne, & de la bouche du vieil Horace dans celle de Scapin, le qu'il mourût deviendra burlesque.
Changez encore les circonstances, & supposez que Scapin soit au service d'un maître dur, avare & bourru, & qu'ils soient attaqués sur un grand chemin par trois ou quatre brigands. Scapin s'enfuit ; son maître se défend : mais pressé par le nombre, il est obligé de s'enfuir aussi ; & l'on vient apprendre à Scapin que son maître a échappé au danger. Comment, dira Scapin trompé dans son attente ; il s'est donc enfui : ah le lâche ! Mais lui répondra-t-on, seul contre trois que voulois-tu qu'il fit ? qu'il mourût, répondra-t-il ; & ce qu'il mourût deviendra plaisant. Il est donc constant que la beauté commence, s'accroît, varie, décline, & disparoît avec les rapports, ainsi que nous l'avons dit plus haut.
Mais qu'entendez-vous par un rapport, me demandera-t-on ? n'est-ce pas changer l'acception des termes, que de donner le nom de beau à ce qu'on n'a jamais regardé comme tel ? Il semble que dans notre langue l'idée de beau soit toûjours jointe à celle de grandeur, & que ce ne soit pas définir le beau que de placer sa différence spécifique dans une qualité qui convient à une infinité d'êtres, qui n'ont ni grandeur, ni sublimité. M. Crouzas a péché, sans-doute, lorsqu'il a chargé sa définition du beau d'un si grand nombre de caracteres, qu'elle s'est trouvée restrainte à un très-petit nombre d'êtres : mais n'est-ce pas tomber dans le défaut contraire, que de la rendre si générale, qu'elle semble les embrasser tous, sans en excepter un amas de pierres informes, jettées au hazard sur le bord d'une carriere ? Tous les objets, ajoûtera-t-on, sont susceptibles de rapports entr'eux, entre leurs parties, & avec d'autres êtres ; il n'y en a point qui ne puissent être arrangés, ordonnés, symmétrisés. La perfection est une qualité qui peut convenir à tous : mais il n'en est pas de même de la beauté ; elle est d'un petit nombre d'objets.
Voilà, ce me semble, sinon la seule, du moins la plus forte objection qu'on puisse me faire, & je vais tâcher d'y répondre.
Le rapport en général est une opération de l'entendement, qui considere soit un être, soit une qualité, entant que cet être ou cette qualité suppose l'existence d'un autre être ou d'une autre qualité. Exemple : quand je dis que Pierre est un bon pere, je considere en lui une qualité qui suppose l'existence d'une autre, celle du fils ; & ainsi des autres rapports, tels qu'ils puissent être. D'où il s'ensuit que, quoique le rapport ne soit que dans notre entendement, quant à la perception, il n'en a pas moins son fondement dans les choses ; & je dirai qu'une chose contient en elle des rapports réels, toutes les fois qu'elle sera revêtue de qualités qu'un être constitué de corps & d'esprit comme moi, ne pourroit considérer sans supposer l'existence ou d'autres êtres, ou d'autres qualités, soit dans la chose même, soit hors d'elle ; & je distribuerai les rapports en réels & en apperçus. Mais il y a une troisieme sorte de rapports ; ce sont les rapports intellectuels ou fictifs : ceux que l'entendement humain semble mettre dans les choses. Un statuaire jette l'oeil sur un bloc de marbre ; son imagination plus promte que son ciseau, en enleve toutes les parties superflues, & y discerne une figure : mais cette figure est proprement imaginaire & fictive ; il pourroit faire sur une portion d'espace terminée par des lignes intellectuelles, ce qu'il vient d'exécuter d'imagination dans un bloc informe de marbre. Un philosophe jette l'oeil sur un amas de pierres jettées au hasard ; il anéantit par la pensée toutes les parties de cet amas qui produisent l'irrégularité, & il parvient à en faire sortir un globe, un cube, une figure réguliere. Qu'est-ce que cela signifie ? Que quoique la main de l'artiste ne puisse tracer un dessein que sur des surfaces résistantes, il en peut transporter l'image par la pensée sur tout corps ; que dis-je, sur tout corps ? dans l'espace & le vuide. L'image, ou transportée par la pensée dans les airs, ou extraite par imagination des corps les plus informes, peut être belle ou laide : mais non la toile idéale à laquelle on l'a attachée, ou le corps informe dont on l'a fait sortir.
Quand je dis donc qu'un être est beau par les rapports qu'on y remarque, je ne parle point des rapports intellectuels ou fictifs que notre imagination y transporte, mais des rapports réels qui y sont, & que notre entendement y remarque par le secours de nos sens.
En revanche, je prétends que quels que soient les rapports, ce sont eux qui constitueront la beauté, non dans ce sens étroit où le joli est l'opposé du beau, mais dans un sens, j'ose le dire, plus philosophique & plus conforme à la notion du beau en général, & à la nature des langues & des choses.
Si quelqu'un a la patience de rassembler tous les êtres aux quels nous donnons le nom de beau, il s'appercevra bientôt que dans cette foule il y en a une infinité où l'on n'a nul égard à la petitesse ou la grandeur : la petitesse & la grandeur sont comptées pour rien toutes les fois que l'être est solitaire, ou qu'étant individu d'une espece nombreuse, on le considere solitairement. Quand on prononça de la premiere horloge ou de la premiere montre qu'elle étoit belle, faisoit-on attention à autre chose qu'à son méchanisme, ou au rapport de ses parties entr'elles ? Quand on prononce aujourd'hui que la montre est belle, fait-on attention à autre chose qu'à son usage & à son méchanisme. Si donc la définition générale du beau doit convenir à tous les êtres auxquels on donne cette épithete, l'idée de grandeur en est exclue. Je me suis attaché à écarter de la notion du beau, la notion de grandeur, parce qu'il m'a semblé que c'étoit celle qu'on lui attachoit plus ordinairement. En Mathématique, on entend par un beau problème, un problème difficile à résoudre ; par une belle solution, la solution simple & facile d'un problème difficile & compliqué. La notion de grand, de sublime, d'élevé, n'a aucun lieu dans ces occasions où on ne laisse pas d'employer le nom de beau. Qu'on parcoure de cette maniere tous les êtres qu'on nomme beaux : l'un exclura la grandeur, l'autre exclura l'utilité ; un troisieme la symmétrie ; quelques-uns même l'apparence marquée d'ordre & de symmétrie : telle seroit la peinture d'un orage, d'une tempête, d'un cahos ; & l'on sera forcé de convenir, que la seule qualité commune, selon laquelle ces êtres conviennent tous, est la notion de rapports.
Mais quand on demande que la notion générale de beau convienne à tous les êtres qu'on nomme tels, ne parle-t-on que de sa langue, ou parle-t-on de toutes les langues ? Faut-il que cette définition convienne seulement aux êtres que nous appellons beaux en françois, ou à tous les êtres qu'on appelleroit beaux en hébreu, en syriaque, en arabe, en chaldéen, en grec, en latin, en anglois, en italien, & dans toutes les langues qui ont existé, qui existent, ou qui existeront ? & pour prouver que la notion de rapports est la seule qui resteroit après l'emploi d'une regle d'exclusion aussi étendue, le philosophe sera-t-il forcé de les apprendre toutes ? ne lui suffit-il pas d'avoir examiné que l'acception du terme beau varie dans toutes les langues ; qu'on le trouve appliqué là à une sorte d'êtres, à laquelle il ne s'applique point ici, mais qu'en quelque idiome qu'on en fasse usage, il suppose perception de rapports ? Les Anglois disent a fine flavour, a fine woman, une belle femme, une belle odeur. Où en seroit un philosophe anglois, si ayant à traiter du beau, il vouloit avoir égard à cette bisarrerie de sa langue ? C'est le peuple qui a fait les langues ; c'est au philosophe à découvrir l'origine des choses ; & il seroit assez surprenant que les principes de l'un ne se trouvassent pas souvent en contradiction avec les usages de l'autre. Mais le principe de la perception des rapports, appliqué à la nature du beau, n'a pas même ici ce desavantage ; & il est si général, qu'il est difficile que quelque chose lui échappe.
Chez tous les peuples, dans tous les lieux de la terre, & dans tous les tems, on a eu un nom pour la couleur en général, & d'autres noms pour les couleurs en particulier, & pour leurs nuances. Qu'auroit à faire un philosophe à qui l'on proposeroit d'expliquer ce que c'est qu'une belle couleur ? sinon d'indiquer l'origine de l'application du terme beau à une couleur en général, quelle qu'elle soit, & ensuite d'indiquer les causes qui ont pû faire préférer telle nuance à telle autre. De même c'est la perception des rapports qui a donné lieu à l'invention du terme beau ; & selon que les rapports & l'esprit des hommes ont varié, on a fait les noms joli, beau, charmant, grand, sublime, divin, & une infinité d'autres, tant relatifs au physique qu'au moral. Voilà les nuances du beau : mais j'étends cette pensée, & je dis :
Quand on exige que la notion générale de beau convienne à tous les êtres beaux, parle-t-on seulement de ceux qui portent cette épithete ici & aujourd'hui, ou de ceux qu'on a nommés beaux à la naissance du monde, qu'on appelloit beaux il y a cinq mille ans, à trois mille lieues, & qu'on appellera tels dans les siecles à venir ; de ceux que nous avons regardés comme tels dans l'enfance, dans l'âge mûr, & dans la vieillesse ; de ceux qui font l'admiration des peuples policés, & de ceux qui charment les sauvages ? La vérité de cette définition sera-t-elle locale, particuliere, & momentanée ? ou s'étendra-t-elle à tous les êtres, à tous les tems, à tous les hommes, & à tous les lieux ? Si l'on prend le dernier parti, on se rapprochera beaucoup de mon principe, & l'on ne trouvera guere d'autre moyen de concilier entr'eux les jugemens de l'enfant & de l'homme fait : de l'enfant, à qui il ne faut qu'un vestige de symmétrie & d'imitation pour admirer & pour être recréé ; de l'homme fait, à qui il faut des palais & des ouvrages d'une étendue immense pour être frappé : du sauvage & de l'homme policé ; du sauvage, qui est enchanté à la vûe d'une pendeloque de verre, d'une bague de laiton, ou d'un brasselet de quincaille ; & de l'homme policé, qui n'accorde son attention qu'aux ouvrages les plus parfaits : des premiers hommes, qui prodiguoient les noms de beaux, de magnifiques, &c. à des cabanes, des chaumieres, & des granges, & des hommes d'aujourd'hui, qui ont restraint ces dénominations aux derniers efforts de la capacité de l'homme.
Placez la beauté dans la perception des rapports, & vous aurez l'histoire de ses progrès depuis la naissance du monde jusqu'aujourd'hui : choisissez pour caractere différentiel du beau en général, telle autre qualité qu'il vous plaira, & votre notion se trouvera tout-à-coup concentrée dans un point de l'espace & du tems.
La perception des rapports est donc le fondement du beau ; c'est donc la perception des rapports qu'on a désignée dans les langues sous une infinité de noms différens, qui tous n'indiquent que différentes sortes de beau.
Mais dans la nôtre, & dans presque toutes les autres, le terme beau se prend souvent par opposition à joli ; & sous ce nouvel aspect, il semble que la question du beau ne soit plus qu'une affaire de Grammaire, & qu'il ne s'agisse plus que de spécifier exactement les idées qu'on attache à ce terme. Voyez à l'article suivant BEAU opposé à JOLI.
Après avoir tenté d'exposer en quoi consiste l'origine du beau, il ne nous reste plus qu'à rechercher celle des opinions différentes que les hommes ont de la beauté : cette recherche achevera de donner de la certitude à nos principes ; car nous démontrerons que toutes ces différences résultent de la diversité des rapports apperçûs ou introduits, tant dans les productions de la nature, que dans celles des arts.
Le beau qui résulte de la perception d'un seul rapport, est moindre ordinairement que celui qui résulte de la perception de plusieurs rapports. La vûe d'un beau visage ou d'un beau tableau, affecte plus que celle d'une seule couleur ; un ciel étoilé, qu'un rideau d'asur ; un paysage, qu'une campagne ouverte ; un édifice, qu'un terrein uni, une piece de musique, qu'un son. Cependant il ne faut pas multiplier le nombre des rapports à l'infini ; & la beauté ne suit pas cette progression : nous n'admettons de rapport dans les belles choses, que ce qu'un bon esprit en peut saisir nettement & facilement. Mais qu'est-ce qu'un bon esprit ? où est ce point dans les ouvrages en-deçà duquel, faute de rapports, ils sont trop unis, & au-delà duquel ils en sont chargés par excès ? Premiere source de diversité dans les jugemens. Ici commencent les contestations. Tous conviennent qu'il y a un beau, qu'il est le résultat des rapports apperçûs : mais selon qu'on a plus ou moins de connoissance, d'expérience, d'habitude de juger, de méditer, de voir, plus d'étendue naturelle dans l'esprit, on dit qu'un objet est pauvre ou riche, confus ou rempli, mesquin ou chargé.
Mais combien de compositions où l'artiste est contraint d'employer plus de rapports que le grand nombre n'en peut saisir, & où il n'y a guere que ceux de son art, c'est-à-dire, les hommes les moins disposés à lui rendre justice, qui connoissent tout le mérite de ses productions ? Que devient alors le beau ! Ou il est présenté à une troupe d'ignorans qui ne sont pas en état de le sentir, ou il est senti par quelques envieux qui se taisent ; c'est-là souvent tout l'effet d'un grand morceau de Musique. M. d'Alembert a dit dans le Discours préliminaire de cet Ouvrage, Discours qui mérite bien d'être cité dans cet article, qu'après avoir fait un art d'apprendre la Musique, on en devroit bien faire un de l'écouter : & j'ajoûte qu'après avoir fait un art de la Poësie & de la Peinture, c'est en vain qu'on en a fait un de lire & de voir ; & qu'il régnera toujours dans les jugemens de certains ouvrages une uniformité apparente, moins injurieuse à la vérité pour l'artiste que le partage des sentimens, mais toujours fort affligeante.
Entre les rapports on en peut distinguer une infinité de sortes : il y en a qui se fortifient, s'affoiblissent, & se temperent mutuellement. Quelle différence dans ce qu'on pensera de la beauté d'un objet, si on les saisit tous, ou si l'on n'en saisit qu'une partie ! Seconde source de diversité dans les jugemens. Il y en a d'indéterminés & de déterminés : nous nous contentons des premiers pour accorder le nom de beau, toutes les fois qu'il n'est pas de l'objet immédiat & unique de la science ou de l'art de les déterminer. Mais si cette détermination est l'objet immédiat & unique d'une science ou d'un art, nous exigeons non-seulement les rapports, mais encore leur valeur : voilà la raison pour laquelle nous disons un beau théorème, & que nous ne disons pas un bel axiome ; quoiqu'on ne puisse pas nier que l'axiome exprimant un rapport, n'ait aussi sa beauté réelle. Quand je dis, en Mathématiques, que le tout est plus grand que sa partie, j'énonce assûrément une infinité de propositions particulieres, sur la quantité partagée : mais je ne détermine rien sur l'excès juste du tout sur ses portions ; c'est presque comme si je disois : le cylindre est plus grand que la sphere inscrite, & la sphere plus grande que le cone inscrit. Mais l'objet propre & immédiat des Mathématiques est de déterminer de combien l'un de ces corps est plus grand ou plus petit que l'autre ; & celui qui démontrera qu'ils sont toûjours entr'eux comme les nombres 3, 2, 1, aura fait un théorème admirable. La beauté qui consiste toûjours dans les rapports, sera dans cette occasion en raison composée du nombre des rapports, & de la difficulté qu'il y avoit à les appercevoir ; & le théorème qui énoncera que toute ligne qui tombe du sommet d'un triangle isoscele sur le milieu de sa base, partage l'angle en deux angles égaux, ne sera pas merveilleux : mais celui qui dira que les asymptotes d'une courbe s'en approchent sans-cesse sans jamais la rencontrer, & que les espaces formés par une portion de l'axe, une portion de la courbe, l'asymptote, & le prolongement de l'ordonnée, sont entr'eux comme tel nombre à tel nombre, sera beau. Une circonstance qui n'est pas indifférente à la beauté, dans cette occasion & dans beaucoup d'autres, c'est l'action combinée de la surprise & des rapports, qui a lieu toutes les fois que le théorème dont on a démontré la vérité passoit auparavant pour une proposition fausse.
Il y a des rapports que nous jugeons plus ou moins essentiels ; tel est celui de la grandeur relativement à l'homme, à la femme, & à l'enfant : nous disons d'un enfant qu'il est beau, quoiqu'il soit petit ; il faut absolument qu'un bel homme soit grand ; nous exigeons moins cette qualité dans une femme ; & il est plus permis à une petite femme d'être belle, qu'à un petit homme d'être beau. Il me semble que nous considérons alors les êtres, non-seulement en eux-mêmes, mais encore relativement aux lieux qu'ils occupent dans la nature, dans le grand tout ; & selon que ce grand tout est plus ou moins connu, l'échelle qu'on se forme de la grandeur des êtres est plus ou moins exacte : mais nous ne savons jamais bien quand elle est juste. Troisieme source de diversité de goûts & de jugemens dans les arts d'imitation. Les grands maîtres ont mieux aimé que leur échelle fût un peu trop grande que trop petite : mais aucun d'eux n'a la même échelle, ni peut-être celle de la nature.
L'intérêt, les passions, l'ignorance, les préjugés, les usages, les moeurs, les climats, les coûtumes, les gouvernemens, les cultes, les évenemens, empêchent les êtres qui nous environnent, ou les rendent capables de réveiller ou de ne point réveiller en nous plusieurs idées, anéantissent en eux des rapports très-naturels, & y en établissent de capricieux & d'accidentels. Quatrieme source de diversité dans les jugemens.
On rapporte tout à son art & à ses connoissances : nous faisons tous plus ou moins le rôle du critique d'Apelle ; & quoique nous ne connoissions que la chaussure, nous jugeons aussi de la jambe ; ou quoique nous ne connoissions que la jambe, nous descendons aussi à la chaussure : mais nous ne portons pas seulement ou cette témérité ou cette ostentation de détail dans le jugement des productions de l'art ; celle de la nature n'en sont pas exemptes. Entre les tulipes d'un jardin, la plus belle pour un curieux sera celle où il remarquera une étendue, des couleurs, une feuille, des variétés peu communes : mais le Peintre occupé d'effets de lumiere, de teintes, de clair obscur, de formes relatives à son art, négligera tous les caracteres que le fleuriste admire, & prendra pour modele la fleur même méprisée par le curieux. Diversité de talens & de connoissances, cinquieme source de diversité dans les jugemens.
L'ame a le pouvoir d'unir ensemble les idées qu'elle a reçûes séparément, de comparer les objets par le moyen des idées qu'elle en a, d'observer les rapports qu'elles ont entr'elles, d'étendre ou de resserrer ses idées à son gré, de considérer séparément chacune des idées simples qui peuvent s'être trouvées réunies dans la sensation qu'elle en a reçûe. Cette derniere opération de l'ame s'appelle abstraction. V. ABSTRACTION. Les idées des substances corporelles sont composées de diverses idées simples, qui ont fait ensemble leurs impressions lorsque les substances corporelles se sont présentées à nos sens : ce n'est qu'en spécifiant en détail ces idées sensibles, qu'on peut définir les substances. Voyez SUBSTANCE. Ces sortes de définitions peuvent exciter une idée assez claire d'une substance dans un homme qui ne l'a jamais immédiatement apperçûe, pourvû qu'il ait autrefois reçû séparément, par le moyen des sens, toutes les idées simples qui entrent dans la composition de l'idée complexe de la substance définie : mais s'il lui manque la notion de quelqu'une des idées simples dont cette substance est composée, & s'il est privé du sens nécessaire pour les appercevoir, ou si ce sens est dépravé sans retour, il n'est aucune définition qui puisse exciter en lui l'idée dont il n'auroit pas eû précédemment une perception sensible. Voyez DEFINITION. Sixieme source de diversité dans les jugemens que les hommes porteront de la beauté d'une description ; car combien entr'eux de notions fausses, combien de demi-notions du même objet !
Mais ils ne doivent pas s'accorder davantage sur les êtres intellectuels : ils sont tous représentés par des signes ; & il n'y a presqu'aucun de ces signes qui soit assez exactement défini, pour que l'acception n'en soit pas plus étendue ou plus resserrée dans un homme que dans un autre. La Logique & la Métaphysique seroient bien voisines de la perfection, si le Dictionnaire de la langue étoit bien fait : mais c'est encore un ouvrage à desirer ; & comme les mots sont les couleurs dont la Poësie & l'Eloquence se servent, quelle conformité peut-on attendre dans les jugemens du tableau, tant qu'on ne saura seulement pas à quoi s'en tenir sur les couleurs & sur les nuances ? Septieme source de diversité dans les jugemens.
Quel que soit l'être dont nous jugeons ; les goûts & les dégoûts excités par l'instruction, par l'éducation, par le préjugé, ou par un certain ordre factice dans nos idées, sont tous fondés sur l'opinion où nous sommes que ces objets ont quelque perfection ou quelque défaut dans des qualités, pour la perception desquels nous avons des sens ou des facultés convenables. Huitieme source de diversité.
On peut assûrer que les idées simples qu'un même objet excite en différentes personnes, sont aussi différentes que les goûts & les dégoûts qu'on leur remarque. C'est même une vérité de sentiment ; & il n'est pas plus difficile que plusieurs personnes different entr'elles dans un même instant, relativement aux idées simples, que le même homme ne differe de lui-même dans des instans différens. Nos sens sont dans un état de vicissitude continuelle : un jour on n'a point d'yeux, un autre jour on entend mal ; & d'un jour à l'autre, on voit, on sent, on entend diversement. Neuvieme source de diversité dans les jugemens des hommes d'un même âge, & d'un même homme en différens âges.
Il se joint par accident à l'objet le plus beau des idées désagréables : si l'on aime le vin d'Espagne, il ne faut qu'en prendre avec de l'émétique pour le détester ; il ne nous est pas libre d'éprouver ou non des nausées à son aspect : le vin d'Espagne est toûjours bon, mais notre condition n'est pas la même par rapport à lui. De même, ce vestibule est toûjours magnifique, mais mon ami y a perdu la vie. Ce théatre n'a pas cessé d'être beau, depuis qu'on m'y a sifflé : mais je ne peux plus le voir, sans que mes oreilles ne soient encore frappées du bruit des sifflets. Je ne vois sous ce vestibule, que mon ami expirant ; je ne sens plus sa beauté. Dixieme source d'une diversité dans les jugemens, occasionnée par ce cortege d'idées accidentelles, qu'il ne nous est pas libre d'écarter de l'idée principale. Post equitem sedet atra cura.
Lorsqu'il s'agit d'objets composés, & qui présentent en même tems des formes naturelles & des formes artificielles, comme dans l'Architecture, les jardins, les ajustemens, &c. notre goût est fondé sur une autre association d'idées moitié raisonnables, moitié capricieuses : quelque foible analogie avec la démarche, le cri, la forme, la couleur d'un objet malfaisant, l'opinion de notre pays, les conventions de nos compatriotes, &c. tout influe dans nos jugemens. Ces causes tendent-elles à nous faire regarder les couleurs éclatantes & vives, comme une marque de vanité ou de quelqu'autre mauvaise disposition de coeur ou d'esprit : certaines formes sont-elles en usage parmi les paysans, ou des gens dont la profession, les emplois, le caractere nous sont odieux ou méprisables ; ces idées accessoires reviendront malgré nous, avec celles de la couleur & de la forme ; & nous prononcerons contre cette couleur & ces formes, quoiqu'elles n'ayent rien en elles-mêmes de desagréable. Onzieme source de diversité.
Quel sera donc l'objet dans la nature sur la beauté duquel les hommes seront parfaitement d'accord ? La structure des végétaux ? Le méchanisme des animaux ? Le monde ? Mais ceux qui sont le plus frappés des rapports, de l'ordre, des symmétries, des liaisons qui regnent entre les parties de ce grand tout, ignorant le but que le créateur s'est proposé en le formant, ne sont-ils pas entraînés à prononcer qu'il est parfaitement beau, par les idées qu'ils ont de la divinité ? & ne regardent-ils pas cet ouvrage comme un chef-d'oeuvre, principalement parce qu'il n'a manqué à l'auteur ni la puissance ni la volonté pour le former tel ? Voyez OPTIMISME. Mais combien d'occasions où nous n'avons pas le même droit d'inférer la perfection de l'ouvrage, du nom seul de l'ouvrier, & où nous ne laissons pas que d'admirer ? Ce tableau est de Raphael, cela suffit. Douzieme source, sinon de diversité, du moins d'erreur dans les jugemens.
Les êtres purement imaginaires, tels que le sphynx, la syrene, le faune, le minotaure, l'homme idéal, &c. sont ceux sur la beauté desquels on semble moins partagé, & cela n'est pas surprenant : ces êtres imaginaires sont à la vérité formés d'après les rapports que nous voyons observés dans les êtres réels ; mais le modele auquel ils doivent ressembler, épars entre toutes les productions de la nature, est proprement par-tout & nulle part.
Quoi qu'il en soit de toutes ces causes de diversité dans nos jugemens, ce n'est point une raison de penser que le beau réel, celui qui consiste dans la perception des rapports, soit une chimere ; l'application de ce principe peut varier à l'infini, & ses modifications accidentelles occasionner des dissertations & des guerres littéraires : mais le principe n'en est pas moins constant. Il n'y a peut-être pas deux hommes sur toute la terre, qui apperçoivent exactement les mêmes rapports dans un même objet, & qui le jugent beau au même degré : mais s'il y en avoit un seul qui ne fût affecté des rapports dans aucun genre, ce seroit un stupide parfait ; & s'il y étoit insensible seulement dans quelques genres, ce phénomene décéleroit en lui un défaut d'économie animale, & nous serions toûjours éloignés du scepticisme, par la condition générale du reste de l'espece.
Le beau n'est pas toûjours l'ouvrage d'une cause intelligente : le mouvement établit souvent, soit dans un être considéré solitairement, soit entre plusieurs êtres comparés entr'eux, une multitude prodigieuse de rapports surprenans. Les cabinets d'histoire naturelle en offrent un grand nombre d'exemples. Les rapports sont alors des résultats de combinaisons fortuites, du moins par rapport à nous : La nature imite, en se joüant, dans cent occasions, les productions de l'art ; & l'on pourroit demander, je ne dis pas si ce philosophe qui fut jetté par une tempête sur les bords d'une île inconnue, avoit raison de s'écrier, à la vûe de quelques figures de Géométrie : courage, mes amis, voici des pas d'hommes ; mais combien il faudroit remarquer de rapports dans un être, pour avoir une certitude complete qu'il est l'ouvrage d'un artiste ; en quelle occasion un seul défaut de symmétrie prouveroit plus que toute somme donnée de rapports ; comment sont entr'eux le tems de l'action de la cause fortuite, & les rapports observés dans les effets produits ; & si, à l'exception des oeuvres du Tout-puissant, il y a des cas où le nombre des rapports ne puisse jamais être compensé par celui des jets.
* BEAU, JOLI, (Gramm.) le beau opposé à joli, est grand, noble & régulier ; on l'admire : le joli est fin, délicat ; il plait. Le beau dans les ouvrages d'esprit, suppose de la vérité dans le sujet, de l'élévation dans les pensées, de la justesse dans l'expression, de la nouveauté dans le tour, & de la régularité dans la conduite : l'éclat & la singularité suffisent pour les rendre jolis. Il y a des choses qui peuvent être jolies ou belles, telle est la comédie ; il y en a d'autres qui ne peuvent être que belles, telle est la tragédie. Il y a quelquefois plus de mérite à avoir trouvé une jolie chose qu'une belle ; dans ces occasions, une chose ne mérite le nom de belle, que par l'importance de son objet, & une chose n'est appellée jolie, que par le peu de conséquence du sien. On ne fait attention alors qu'aux avantages, & l'on perd de vûe la difficulté de l'invention. Il est si vrai que le beau emporte souvent une idée de grand, que le même objet que nous avons appellé beau, ne nous paroîtroit plus que joli, s'il étoit exécuté en petit. L'esprit est un faiseur de jolies choses ; mais c'est l'ame qui produit les grandes. Les traits ingénieux ne sont ordinairement que jolis ; il y a de la beauté par-tout où l'on remarque du sentiment. Un homme qui dit d'une belle chose qu'elle est belle, ne donne pas une grande preuve de discernement ; celui qui dit qu'elle est jolie, est un sot, ou ne s'entend pas. C'est l'impertinent de Boileau, qui dit que le Corneille est joli quelquefois.
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BEAU PAS | Voyez PAS.
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BEAU-CHASSEUR | en Venerie, se dit d'un chien qui crie bien dans la voie, & qui a toûjours en chassant la queue retournée sur les reins.
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BEAU-FIL | ou BELLE-FILLE, (Jurispr.) nom d'affinité, qui se dit du fils ou de la fille de quelqu'un qui se remarie en secondes nôces, par rapport à celui ou celle qui épouse le veuf ou la veuve.
Beau-fils & belle-fille se disent aussi quelquefois du gendre & de la bru. Voyez GENDRE & BRU.
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BEAU-FRER | ou BELLE-SOEUR, autre nom d'affinité, dont on se sert pour exprimer l'alliance de l'un des conjoints avec le frere ou la soeur de l'autre.
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BEAU-LIEU | (Manege) on dit qu'un cheval porte en beau lieu, lorsqu'il porte bien sa tête.
* BEAU-LIEU, (Géog.) nom de deux petites villes de France, l'une en Touraine sur l'Indre, l'autre dans la Vicomté de Turenne, sur la Dordogne.
Beau ou beau-parer ou beau-partir, porter beau ou en beau lieu. Voyez PARER, PARTIR.
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BEAU-PER | ou BELLE-MERE, est le terme qui correspond à ceux de beau-fils ou belle-fille, dans les deux sens exprimés ci-dessus au mot BEAU-FILS. (H)
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BEAU-REVOIR | S. m. se dit, en terme de Chasse de l'action du limier, lorsqu'étant sur les voies il bande fort sur la bête & sur le trait.
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BEAUCAIRE | (Géog.) ville du bas Languedoc, sur le bord du Rhone. Long. 22. 18. lat. 43. 43.
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BEAUCE | (Géog.) province de France entre le Perche, l'île de France, le blésois & l'Orléanois.
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BEAUCOUP | PLUSIEURS, (Gramm.) termes relatifs à la quantité : beaucoup a rapport à la quantité qui se mesure ; & plusieurs à celle qui se compte. Beaucoup d'eau, plusieurs hommes. L'opposé de beaucoup est peu ; l'opposé de plusieurs est un. Pour qu'un état soit bien gouverné, nous disons qu'il ne faut qu'un seul chef, plusieurs ministres, beaucoup de lumiere & d'équité.
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BEAUFORT | (Géog.) petite ville d'Anjou. Long. 17. 26. lat. 47. 26.
* BEAUFORT, (Géog.) ville de Savoye, sur la riviere d'Oron. Long. 24. 18. lat. 45. 40.
* BEAUFORT, (Géog.) petite ville de France en Champagne, avec titre de duché. Elle porte maintenant le nom de Montmorenci.
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BEAUJEU | (Géog.) ville de France dans le Beaujolois sur l'Ardiere. Long. 22. 10. lat. 46. 9.
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BEAUJOLOIS | (Géog.) petit pays de France entre la Saone & la Loire, le Lyonnois & la Bourgogne. Ville-franche en est la capitale.
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BEAULIE | (Géog.) petite ville d'Ecosse, dans le comté de Ross.
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BEAUMARCHèS | (Géog.) petite ville de France dans la généralité d'Ausch, élection de Riviere-Verdun.
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BEAUMARIS | (Géog.) ville d'Angleterre, capitale de l'île d'Anglesey, sur le détroit de Menay. Long. 13. 4. lat. 53. 20.
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BEAUMONT | (Géog.) petite ville des Pays-Bas dans le Hainaut, entre la Sambe & la Meuse, avec titre de comté. Long. 21. 51. lat. 50. 12.
BEAUMONT-LE-ROGER, (Géog.) ville de haute Normandie. Long. 18. 26. lat. 49. 2.
BEAUMONT-LE-VICOMTE, (Géog.) ville du Maine, sur la Sarte. Long. 17. 40. lat. 48. 12.
BEAUMONT-SUR-L'OISE, ville de l'île de France, sur la pente d'une montagne : avec titre de comté. Long. 19. 58. 57. lat. 59. 8. 38.
Il y a encore en France une petite ville de même nom, dans le Périgord, avec titre de comté.
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BEAUNE | (Géog.) ville de France en Bourgogne. Long. 22. 20. lat. 47. 2.
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BEAUPORT | (Géog.) petite baie d'Afrique, en Cafrerie. Les Portugais l'appellent la baya hermosa.
BEAUPORT, (Géog.) port de l'Amérique, sur la côte méridionale de l'île Espagnole ; on l'appelle dans le pays el puerto hermoso.
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BEAUPRÉ | S. m. (Marine) c'est un mât qui est couché sur l'éperon à la proue des vaisseaux ; son pié est enchâssé sur le premier pont, au-dessous du château d'avant, avec une grande boucle de fer & deux chevilles aussi de fer, qui sortent entre deux ponts. Voyez la position de ce mât & ses dépendances. Pl. I. en Z. Voyez aussi la Pl. IV. fig. premiere, n°. 201. Ces figures donneront une idée plus claire de ce mot & de ce qui le concerne, qu'un discours plus étendu.
Le beaupré s'avance au-de-là de la proue ; il est couché sur l'étambraie, & passe au-delà de l'éperon autant qu'il est nécessaire pour donner du jeu à la voile, afin qu'elle ne s'embarrasse point avec l'éperon ; il est appuyé sur l'étrave ou accotté sur un coussin, & couché sur l'étambraie. (Pl. IV. fig. 1. n°. 210.) Quelquefois il passe entre les bittes, & son pié est contre le mât de misene, s'affermissant ainsi l'un & l'autre ; car sans cela on pourroit ne pas entrer le beaupré si avant dans le vaisseau. Il y a au mât de misene un gros taquet, qui entre dans les petits blocs avec une entaille, & qui vient finir sur ce beaupré. Il a 12 pouces de large, & 4 pouces d'épais, avec un collier de fer sur le bout.
Pour affermir encore le beaupré, on le surlie, & on couvre d'une peau de mouton cette liure ou saisine, afin de la conserver. Cette liure ou saisine tient le beaupré avec l'aiguille de l'éperon.
BEAUPRE SUR POUPE, terme de Marine, pour dire qu'un vaisseau se met le plus près qu'il peut de l'arriere d'un autre.
Passer sur le beaupré d'un autre vaisseau. Voyez PASSER.
Petit beaupré, perroquet de beaupré, tourmentin ; c'est le mât qui est arboré sur la hune de beaupré.
Voile de beaupré, voyez CIVADIERE. (Z)
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BEAUTÉ | S. f. terme relatif ; c'est la puissance ou faculté d'exciter en nous la perception de rapports agréables. J'ai dit agréables, pour me conformer à l'acception générale & commune du terme beauté : mais je crois que, philosophiquement parlant, tout ce qui peut exciter en nous la perception de rapports, est beau. Voyez l'article BEAU. La beauté n'est pas l'objet de tous les sens. Il n'y a ni beau ni laid pour l'odorat & le goût. Le P. André, Jésuite, dans son Essai sur le beau, joint même à ces deux sens celui du toucher : mais je crois que son systême peut être contredit en ce point. Il me semble qu'un aveugle a des idées de rapport, d'ordre, de symmétrie, & que ces notions sont entrées dans son entendement par le toucher, comme dans le nôtre par la vûe, moins parfaites peut-être & moins exactes : mais cela prouve tout au plus que les aveugles sont moins affectés du beau, que nous autres clair-voyans. Voyez l'article AVEUGLE. En un mot, il me paroît bien hardi de prononcer que l'aveugle statuaire qui faisoit des bustes ressemblans, n'avoit cependant aucune idée de beauté.
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BEAUVAIS | (Géog.) ville de France, capitale du Beauvoisis, dans le gouvernement de l'île de France sur le Therain. Long. 19. 44. 42. lat. 46. 26. 2.
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BEAUVOIR-SUR-MER | (Géog.) petite ville maritime de France en Poitou, avec titre de marquisat.
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BEAUVOISI | ou BEAUVAISIS. (Géog.) petit pays de France, dont Beauvais est la capitale.
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BEAUX | adj. pl. pris subst. (Hist. mod.) Les Anglois ont fait un substantif de cet adjectif François ; & c'est ainsi qu'ils appellent les hommes occupés de toutes les minuties qui semblent être du seul ressort des femmes, comme les habillemens recherchés, le goût des modes & de la parure ; ceux, en un mot, à qui le soin important de l'extérieur fait oublier tout le reste. Les beaux sont en Angleterre, ce que nos petits-maîtres sont ici ; mais les petits-maîtres de France possedent l'esprit de frivolité, & l'art des bagatelles & des jolis riens, dans un degré bien supérieur aux beaux de l'Angleterre. Pour corriger un petit-maître Anglois, il n'y auroit peut-être qu'à lui montrer un petit-maître François : quant à nos petits-maîtres François, je ne crois pas que tout le phlegme de l'Angleterre puisse en venir à bout.
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BEAUX-JARRETS | voyez JARRET.
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BEAWDLEY | (Géog.) ville d'Angleterre, dans la province de Worcester.
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BEBR | ou CHABRE, (Géog.) riviere du Bourbonnois en France, qui a sa source vers Montmorillon, reçoit le Val & le Teiche, passe à la Palisse & à Jaligne, & se jette dans la Loire.
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BEBRIACUM | (Géog. anc. & mod.) ville voisine de Crémone, dont Plutarque a fait mention dans la vie d'Othon. Les uns prétendent que c'est notre Bina, d'autres veulent que ce soit Canetto.
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BEC | S. m. (Hist. nat. Ornitholog.) partie de la tête des oiseaux, qui leur tient lieu de dents. Il y a des oiseaux dont le bec est dentelé à peu près comme une scie : mais ces sortes de dents sont bien différentes de celles des quadrupedes, qui sont logées dans des alvéoles. Non-seulement le bec sert aux oiseaux pour prendre leur nourriture ; mais c'est aussi pour eux une arme offensive, de plus ils arrangent leurs plumes avec leur bec, il y en a quelques-uns qui s'en aident comme d'un crochet pour élever leur corps & qui se laissent tomber sur cette partie dure lorsqu'ils veulent descendre à une petite distance ; tels sont les perroquets.
Les becs des oiseaux sont fort différens les uns des autres par la grandeur, la figure, &c. & ces différences sont si sensibles, qu'on en a fait des caracteres distinctifs dans les divisions méthodiques des oiseaux. Voyez OISEAU, & la Plan. VIII. où les principales figures des becs des oiseaux sont exposées, selon la méthode de M. Barrere, dans son Ornithologie. (I)
* BEC, s. m. ce terme transporté par métaphore de la partie de la tête des oiseaux, qui porte ce nom, à une infinité d'autres productions naturelles & artificielles, se dit ordinairement de parties solides, antérieures & pointues.
BEC A CISEAUX, oiseau, Voyez BEC CROISE.
BEC COURBE, oiseau mieux connu sous le nom d'avoceta. Voyez AVOCETA.
BEC CROISE, s. m. loxia, (Hist. nat. Ornithol.) oiseau qui ne differe guere du verdier ; il pese une once & demie : il a environ six pouces de longueur depuis la pointe du bec jusqu'à l'extrémité de la queue. Le bec est noir, dur, épais, & fort ; il est crochu en-dessus & en-dessous ; cette figure est particuliere à cet oiseau à l'exclusion de tout autre. Voyez la Planche VIII. fig. 10. les deux pieces du bec sont courbées à leur extrémité en sens contraire l'une de l'autre ; desorte que l'extrémité de la piece inférieure est recourbée en-haut, & celle de la piece supérieure l'est en-bas. La situation de ces pieces n'est pas toûjours la même dans tous les oiseaux de cette espece : il y en a dont la piece supérieure passe à droite en se croisant avec la piece inférieure, & dans d'autres elle se trouve à gauche ; c'est à cause de cette conformation qu'on a donné à ces oiseaux les noms de bec croisé & de bec à ciseaux. La mâchoire inférieure & la langue sont semblables à la mâchoire & à la langue du pinson ; les ouvertures des narines sont rondes, les trous des oreilles sont grands, l'iris des yeux est de couleur de noisette, les pattes sont brunes, les ongles noirs ; le doigt extérieur tient au doigt du milieu à sa naissance. Le milieu des plumes de la tête & du dos est noir, & les bords sont verds ; il y a aussi sur la tête une legere teinte de couleur cendrée ; le croupion est verd, le menton cendré, la poitrine verte, & le ventre blanc ; mais les plumes qui se trouvent sous la queue, sont en partie noires ou brunes. Il y a dix-huit grandes plumes dans chaque aile ; elles sont noirâtres à l'exception des bords extérieurs des premieres plumes qui sont verdâtres ; la queue a environ deux pouces de longueur ; elle est composée de douze plumes noires, dont les bords sont verdâtres.
On dit que cet oiseau change trois fois de couleur par an ; qu'il est verd en autonne, jaune en hyver, & rouge au printems. Gesner rapporte que les plumes de la poitrine, du cou, & du ventre, prennent d'abord une couleur rouge, qui devient ensuite jaune, & que leur couleur varie principalement en hyver. D'autres assûrent que ces oiseaux changent tous les ans de couleur ; qu'ils sont tantôt jaunes, tantôt verds, tantôt rouges ou cendrés. Ce qu'il y a de plus vraisemblable, c'est que ce changement de couleur dépend de l'âge de l'oiseau, ou des saisons de l'année. Au rapport d'Aldrovande, le bec-croisé est fort vorace ; il aime beaucoup le chénevi ; il mange aussi des semences de sapin, il niche sur cet arbre aux mois de Janvier & de Février ; il ne chante que quand il gele ou qu'il fait très-froid, tandis que les autres oiseaux gardent le silence ; au lieu qu'il se taît en été, tandis que tous les autres chantent, &c. Ces derniers faits mériteroient d'être observés avec attention. On dit que d'un ou de deux coups de bec, ces oiseaux fendent par le milieu les pommes de sapin, & qu'ensuite ils en mangent les semences, ce qui cause un grand dommage dans les jardins. Le chant du bec-croisé est assez agréable : on trouve ces oiseaux en grande quantité & pendant toute l'année, en Allemagne, en Baviere, en Suede, en Norwege, & il en vient quelquefois beaucoup sur la côte occidentale de l'Angleterre, où ils font un grand dégât dans les vergers. Willughby, Ornit. Voyez OISEAU. (I)
GROS-BEC, subst. m. coccothrostes, (Hist. nat. Ornith.) oiseau ainsi nommé pour la grosseur de son bec relativement à celle du corps. Il est d'un tiers plus grand que le pinson ; son corps est court ; il pese environ une once trois quarts : il a sept pouces de longueur depuis la pointe du bec jusqu'au bout des ongles, & un pié d'envergeure : la tête est grosse en comparaison du corps ; le bec est gros, dur, large à la base, & très-pointu à l'extrémité ; sa longueur est d'environ trois quarts de pouces ; il est de couleur de chair, ou de couleur blanchâtre ; la pointe est noirâtre, l'iris des yeux est de couleur cendrée ; la langue semble avoir été coupée à l'extrémité comme celle du pinson : les pattes sont d'une couleur rouge-pâle ; les ongles sont longs, sur-tout celui du doigt du milieu, le doigt extérieur tient à sa naissance au doigt du milieu : les plumes qui se trouvent auprès de la base du bec, sont de couleur orangée ; celles qui occupent l'espace qui est entre le bec & les yeux sont noires ; la même couleur est dans les mâles sur les plumes qui sont autour de la mâchoire inférieure ; la tête est d'une couleur jaune roussâtre ; le cou de couleur cendrée ; le dos roux, à l'exception du milieu de chaque plume qui est blanchâtre : le croupion est de couleur jaune cendrée ; la poitrine, & principalement les côtés, sont d'une couleur cendrée, legerement teinte de rouge ; les plumes sont blanchâtres sous la queue & sous le milieu du ventre. Il y a dix-huit grandes plumes dans les ailes, dont les neuf ou dix premieres sont blanches dans le milieu seulement sur les barbes intérieures : dans les suivantes la couleur blanche de ces barbes ne s'étend pas jusqu'au tuyau ; les trois dernieres plumes sont rousses ; la pointe des plumes depuis la seconde jusqu'à la dixieme, est de couleur de gorge de pigeon ; les six ou sept plumes qui suivent, ont le bord extérieur de couleur cendrée. Tout le reste de ces dix-huit grandes plumes est de couleur brune ; la queue est courte ; elle n'a qu'environ deux pouces de longueur ; elle est composée de douze plumes ; les barbes intérieures de la partie supérieure de chaque plume sont blanches ; les barbes extérieures sont noires dans les premieres plumes de chaque côté de la queue, & roussâtres dans celles du milieu.
Ces oiseaux sont fort communs en Italie, en France, en Allemagne ; ils restent en été dans les bois & sur les montagnes ; en hyver ils descendent dans les plaines ; ils cassent avec beaucoup de facilité les noyaux de cerises & d'olives ; ils vivent pour l'ordinaire de semence de chénevi, de panis, &c. ils mangent aussi les boutons des arbres. On dit que c'est sur leur sommet que ces oiseaux font leurs nids, & que les femelles y déposent cinq ou six oeufs.
Il y a une espece de gros-bec dans les Indes, surtout en Virginie, il est à-peu-près de la grosseur du merle ; son bec est un peu plus court que celui du nôtre, il a une belle crête sur la tête. Cet oiseau est d'une belle couleur écarlate, qui est moins foncée sur la tête & sur la queue que sur le reste du corps ; son chant est fort agréable. Willughby, Ornit. Voyez OISEAU. (I)
BEC DE GRUE, geranium, (Hist. nat. bot.) genre de plante à fleur en rose, composée de plusieurs pétales disposés en rond ; il s'éleve du calice un pistil qui devient dans la suite un fruit en forme d'aiguille, dont le noyau a cinq rainures sur sa longueur ; dans chacune de ces rainures est attachée une capsule terminée par une longue queue. Ces capsules se détachent ordinairement de la base du fruit vers la pointe, & se recoquillent en-dehors : chacune renferme une semence ordinairement oblongue. Tournefort, Inst. rei herb. Voyez PLANTE. (I)
BEC D'OIE, nom que l'on a donné au dauphin, à cause de la ressemblance de son bec, ou plûtôt de ses mâchoires avec le bec d'une oie. Voyez DAUPHIN. (I)
BEC ou TUYAU de l'entonnoir, en Anatomie, c'est une production très-mince de la substance des parois de la cavité que l'on appelle entonnoir, qui s'épanoüit autour de la glande pituitaire où elle se termine. V. PITUITAIRE. (L)
BEC, (Blason) on appelle becs en termes de Blason, les pendans du lambel. Voyez LAMBEL. Ils étoient autrefois faits en pointes ou en rateaux, & ils ont aujourd'hui la figure des goûtes qui sont au-dessous des triglyphes dans l'ordre dorique. Voyez ORDRE DORIQUE. (V)
BEC ; s. m. (Géog.) nom que nous donnons à plusieurs pointes de terre, où deux rivieres se joignent, ainsi nous disons le bec d'ambes, de l'endroit où la Garonne & la Dordogne se rencontrent.
BEC, (en terme de Bijoutier, & autres artistes) c'est une petite avance, telle qu'on la voit aux tabatieres, ou de même matiere que la tabatiere, & soudée sur le devant du dessus, par laquelle on ouvre la boîte en y appuyant le doigt ; ou de matiere différente & attachée au même endroit. On donne le nom de bec à un grand nombres d'autres parties accessoires dans les ouvrages des artistes.
DOUBLE BEC, sorte de cuilliere à l'usage des Ciriers. Voyez Pl. du Cirier, fig. 13.
BEC, (en Ecriture) se dit de la partie fendue de la plume, qui sert à tracer des caracteres sur le papier. Il y a quatre sortes de bec : la premiere, où les deux parties du bec sont coupées d'égale longueur, & parallelement ; la seconde, où elles sont coupées en angle ; la troisieme, où l'angle est plus considérable ; la quatrieme, ou le bec est très-menu & coupé inégalement. La premiere est pour l'expédition ; la seconde pour le style aisé ; la troisieme pour le style régulier, & la derniere pour les traits d'ornement.
BEC, (en terme d'Epinglier fabriquant d'aiguilles pour les Bonnetiers) se dit de l'extrémité pliée & recourbée, qui entre dans la châsse de l'aiguille ; c'est proprement la pointe ou le crochet de l'aiguille. Voyez BAS AU METIER.
Faire le bec, (en terme d'Epinglier-Aiguilletier) c'est avec une tenaille arcuer le bec d'une aiguille en forme de demi-cercle, dont la concavité est en-dehors, & la convexité en-dedans, ou regarde le corps de l'aiguille & la châsse.
BEC D'ANE, (chez les Serruriers) c'est une espece de burin à deux biseaux, qui forme le coin, mais dont les côtes supérieures vont en s'arrondissant & en s'évasant. Sa largeur est ordinairement de trois à quatre lignes au plus. Son usage est pour commencer à ébaucher les cannelures & mortoises qu'on pratique aux grosses barres ; le bec d'âne résistant mieux en pareil cas que les autres burins. Il sert aussi à refendre les clés : mais alors il est très-petit & très-menu.
BEC D'ANE (chez les Arquebusiers) c'est un petit outil d'acier dont la figure n'est guere différente du bec d'âne des Menuisiers : ils s'en servent pour former des mortoises dans le bois ; & ils en ont de toutes grosseurs, depuis celle du bec d'âne des Menuisiers, jusqu'à la moindre grosseur.
BEC D'ANE, (chez les Menuisiers & les Charpentiers) est un outil d'acier, de la même forme que les précédens, & qu'ils employent au même usage. Voyez MENUISIER. Planc. 1. fig. 7.
Ce sont les Taillandiers qui font les becs d'âne. Voyez Pl. II. du Taillandier, fig. prem. un bec d'âne. K K est sa queue, I sa tige.
Les Tonneliers ont aussi des becs d'âne, & cet outil est commun à presque tous les ouvriers en bois.
Les Tourneurs en ont de deux sortes, de droits & de ronds, terminés l'un & l'autre par une espece particuliere de biseau, qui ne differe que par l'arrête du tranchant, qui est perpendiculaire à la longueur de l'outil dans le droit, & qui est arrondie en demi-cercle dans le rond. Voyez BISEAU, & les fig. Pl. I. du tour.
BEC DE CANNE, (terme de Cloutier) c'est une espece de clou à crochet qu'on nomme aussi clou à pigeon. Le crochet en est plat & ressemble à un bec de canne. Ces clous servent à attacher les paniers à pigeons dans les volets. Voyez Pl. du Cloutier, fig. 17.
BEC DE CANNE, outil qui sert aux Menuisiers à dégager le derriere des moulures ; il ne differe du bec d'âne qu'en ce qu'il est plus foible de tige, & plus étroit & plus allongé par le bec. Voyez Pl. I. Menuis. figure 8.
BEC DE CORBIN, ou les Gentilshommes au bec de corbin (Hist. mod.) officiers de la maison du roi, institués pour la garde de la personne de sa Majesté, qui étoient aussi appellés les cent gentilshommes. Ils marchoient deux à deux devant le roi aux jours de cérémonie, portant le bec de corbin ou le faucon à la main ; & dans un jour de bataille, ils devoient se tenir auprès du roi. Ces officiers ne subsistent plus. (G)
BEC DE CORBIN : on donne en général, ce nom dans les Arts, à tout ce qui est recourbé & terminé en pointe. Cette expression est tirée du bec du corbeau ; ainsi quand on dit, cela est fait en bec de corbin, c'est comme si l'on disoit, cela imite la forme du bec du corbeau.
BEC DE CORBIN, (Marine) c'est un instrument de fer, fait en crochet, avec lequel un calfat tire la vieille étoupe d'une couture, ou d'entre les joints de deux bordages. (Z)
BEC DE CORBIN, BEC DE CANNE, BEC DE LESARD, sont des instrumens de Chirurgie en forme de pincette, qui ne different pas essentiellement du bec de grue, dont on donnera plus bas la description. Leur usage est le même, & on ne leur a donné tous ces différens noms qu'à raison de la différente longueur ou largeur des branches antérieures. On ne trouve plus ces instrumens que dans les anciens arsenaux de Chirurgie. Les bornes qui sont prescrites pour chaque matiere, ne permettent pas de donner des descriptions de ces instrumens ; on peut les voir dans le traité d'opérations de M. Dionis, à l'article de l'extraction des corps étrangers. Voyez Pl. XXX. de Chirurgie, fig. 2. 3. & 4. la construction de quelques-unes de ces pincettes. Voyez TIRE-BALLE. (Y)
BEC DE CORBIN, (Jardinage) figure faite en crochet ou en bec d'oiseau, qui entre dans la composition des parterres de broderie. V. PARTERRE. (K)
BEC DE CORBIN, (outil d'Arquebusier) c'est un ciseau emmanché, comme le bec d'âne, &c. dont le fer est recourbé par en-bas, comme un bec de corbeau. Le bout du bec est plat & très-tranchant. Les Arquebusiers s'en servent pour nettoyer une mortoise, & sculpter des ornemens sur un bois de fusil.
BEC DE CORBIN, (terme de Chapelier) c'est une espece de crochet de bois, qui fait partie de l'arçon des Chapeliers : le bec de corbin soûtient par un bout la corde de l'arçon, & sert à arçonner ou faire voler l'étoffe sur la claie. Voyez la fig. 16. Pl. du Chap.
BEC DE CORBIN, (Manége) est un petit morceau de fer de la largeur d'un pouce, & qui en a 3 ou 4 de long, que l'on soude à un des fers de derriere, pour empêcher un cheval boiteux de marcher sur l'autre fer de derriere. (Z)
BEC DB GRUE MUSQUE. Voyez HERBE A ROBERT.
BEC DE GRUE, c'est un instrument dont se servent les Chirurgiens dans leurs opérations, particulierement pour tirer des balles de plomb & autres corps étrangers hors des plaies. Voyez TIRE-BALLE. Le bec de grue est une pincette composée de deux branches unies ensemble par jonction passée. Voyez Pl. III. fig. 3. La branche qui reçoit se nomme branche femelle, & on appelle branche mâle celle qui est reçûe. La jonction de ces deux pieces forme le corps de l'instrument, qui paroît au-dehors d'une figure quarrée ; les surfaces supérieure & inférieure de ce quarré ont environ cinq lignes de longueur : & les latérales excedent cette mesure d'une ligne, le corps de l'instrument se divise en parties antérieures & parties postérieures.
Les parties postérieures sont regardées comme le manche de l'instrument, elles sont différemment contournées ; la branche mâle est toute droite, & la femelle est doucement courbée dans toute sa longueur ; ce qui l'éloigne de deux pouces ou environ de la branche mâle, lorsque la pincette est fermée, & augmente considérablement la force de l'instrument. Ces branches sont plates, pour présenter plus de surface à la main & aux doigts qui doivent les empoigner. Leurs faces intérieures sont planes : mais l'extérieure est legerement arrondie pour s'accommoder à la figure creuse de la main. La longueur de ces branches est de cinq à six pouces ; leur épaisseur près du corps est de trois lignes, & leur largeur est de cinq : mais en s'approchant de l'extrémité, elles diminuent d'épaisseur & augmentent de quelques lignes en largeur.
Ces pincettes sont naturellement écartées par un simple ressort très-élastique ; c'est une languette d'acier battue à froid ; afin d'en resserrer les pores & lui donner par-là beaucoup d'élasticité. Ce ressort est percé d'un trou à son talon, pour y passer un clou qui traverse aussi la branche mâle de la pincette, & qui est si exactement rivé & limé sur la surface supérieure qu'il n'y paroit point.
Il nous reste à examiner la partie antérieure ou le bec de l'instrument. Il commence à la partie antérieure du corps au-delà de la jonction, par une tête arrondie sur ses faces supérieure & inférieure, mais applatie sur les côtés. Cette tête est formée par deux demi-cercles, dont le plus grand se trouve à la partie supérieure ou branche femelle, & l'autre à l'inférieure ; ces deux cercles mis ensemble, font un trou horisontal qu'on appelle l'oeil de la pincette : mais lorsque l'instrument est ouvert, ils ressemblent avec le bec à une gueule béante.
Le reste du bec est deux branches pyramidales, dont le commencement a environ deux lignes & demie d'épaisseur & cinq lignes de large ; elles sont exactement planes en-dedans, arrondies en-dehors, & vont un peu en diminuant dans l'espace de trois pouces pour se terminer par une pointe mousse & très-arrondie. Ces deux lames qui forment le bec sont legerement courbées en-dedans ; ce qui fait que l'instrument étant fermé, on voit un espace entre ces deux lames ou branches, qui devient moins considérable à mesure qu'il approche de l'extrémité du bec ; ce qui fait que ces branches se touchant par leur extrémité, pincent avec plus d'exactitude. Cette description est extraite du traité d'Instrumens de M. de Garengeot, Chirurgien de Paris. (Y)
BEC-DE-LIEVRE, (terme de Chirurgie) est une difformité dans laquelle la levre supérieure est fendue comme celle des lievres. Cette division qui arrive aussi quelquefois à la levre inférieure, vient d'un vice de conformation avant la naissance, ou par accident, comme chûte, coup, incision, &c. Le bec-de-lievre accidentel est ancien ou récent : l'ancien est celui dans lequel les bords de la plaie n'ayant point été réunis, se sont cicatrisés à part sans se joindre : le récent est celui dont les bords sont encore sanglans. Celui-ci se guérit par le bandage unissant, si la plaie est en long, ou par la suture entre-coupée, si elle a une autre direction. Ces deux moyens de réunion n'ont lieu que lorsqu'il n'y a point de déperdition de substance ; & dans ces cas le traitement du bec-de-lievre accidentel & récent ne differe point de celui qui convient à une plaie simple. Voyez PLAIE.
Le bec-de-lievre de naissance, celui qui est accidentel & ancien, & celui qui est accidentel récent, & dans lequel il se trouve perte de substance, exigent la suture entortillée, parce que dans les deux premiers cas il faut rafraîchir les bords de la division, avant de procéder à la réunion ; & que la suture entre-coupée n'est point capable d'assujettir les deux levres de la plaie, lorsqu'il y a déperdition de substance.
Pour rafraîchir les levres de la division d'un bec-de-lievre de naissance ou accidentel ancien, on se sert des ciseaux ou du bistouri : on approche ensuite les deux plaies récentes, ayant soin de les mettre bien au niveau l'une de l'autre : un aide les soûtient dans cette situation, en avançant avec ses mains les deux joues vers la division. La peau prête assez pour cette approximation, quelque déperdition de substance qu'il y ait. Les levres de la plaie étant bien rapprochées, le chirurgien pose l'extrémité du pouce & du doigt indicateur de la main gauche, au côté droit de la division : il prend avec le pouce & le doigt indicateur de la main droite, une aiguille convenable (Voyez AIGUILLE), qu'il fait entrer dans le côté gauche, à quelques lignes de la division, pour traverser la plaie, en approchant le plus qu'on peut de la membrane interne de la levre, afin de procurer également la réunion de toute l'épaisseur de cette partie. La pointe de l'aiguille doit sortir entre les deux doigts de la main gauche, qui appuient legerement sur la peau, & qui la tendent au côté droit de la division : la sortie de l'aiguille doit être à la même distance du bord droit de la plaie, que son entrée l'est du bord gauche. Pour réunir un bec-de-lievre, il suffit ordinairement de mettre deux aiguilles : la premiere doit se passer un peu au-dessus du bord rouge de la levre, & l'autre près de l'angle supérieur de la plaie. Lorsque les aiguilles sont placées, on prend un fil ciré, qu'on fait tourner simplement deux ou trois fois autour de la premiere aiguille qu'on a mise, en le faisant passer alternativement sous sa tête & sous sa pointe. Le même fil sert à faire pareillement deux ou trois tours sous les extrémités de l'aiguille supérieure ; on arrête les deux bouts du fil par une rosette à côté de l'angle supérieur de la plaie : on met une petite compresse ou une petite boule de cire, sous la pointe de chaque aiguille, pour empêcher qu'elle ne blesse ; & on en met autant sous les têtes pour leur servir d'appui.
On couvre la division avec un petit lambeau de toile, imbibé de baume vulnéraire, & on maintient le tout avec une petite bandelette à quatre chefs, dont le plein pose sur l'appareil, & dont les extrémités s'appliquent au bonnet, en se croisant de chaque côté, de façon que le chef supérieur croise l'inférieur, & aille s'attacher latéralement au bonnet, au-dessous de celui-ci. On appelle ce bandage une fronde, il est simplement contentif. Quelques praticiens le préferent à l'unissant, parce qu'il est moins sujet à se déranger. Je crois cependant qu'il faudroit préférer un bandage, qui, en tendant à rapprocher les joues vers les levres, soulageroit beaucoup les points de suture. Voyez FRONDE.
Pendant l'opération qui vient d'être décrite, le malade doit être assis sur une chaise, & avoir la tête appuyée sur la poitrine de l'aide chirurgien, dont les mains rapprochent les joues, & les poussent l'une contre l'autre vers la division.
Quelques heures après l'opération & l'application de l'appareil, on fait saigner le malade pour prévenir l'inflammation. On lui défend exactement de parler ; on tâche d'éloigner de sa vûe tout ce qui pourroit le déterminer à cette action ou à rire ; on ne lui donne du bouillon que rarement, & dans un biberon ou cuilliere couverte, parce que l'action des levres nuiroit beaucoup à la réunion. L'éternuement peut occasionner beaucoup de desordre après l'opération du bec-de-lievre. Si un enfant se trouve dans le cas de cette opération, on conseille de l'empêcher de dormir une nuit, & on opere le lendemain au matin. Par ce moyen il pourra rester tranquille après l'opération ; ce stratagème paroît pouvoir assûrer la réunion : elle est ordinairement faite au bout de 24 ou 36 heures ; on ôte alors les aiguilles, & on continue le bandage unissant ; on pourroit même contenir les levres de la plaie avec des languettes de toile couvertes d'emplâtre agglutinatif. On peut lire dans le premier volume des Mémoires de l'Académie royale de Chirurgie, des observations singulieres de M. de la Faye, & de plusieurs autres académiciens, sur les becs-de-lievre venus de naissance, & sur différentes méthodes de corriger ces difformités : on y trouvera des moyens de remédier au déchirement qui survient lorsque les points d'aiguille manquent, & qu'il n'est plus possible de pratiquer la suture entortillée par le défaut de solidité des parties qui devoient la soûtenir. (Y)
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BEC-FIGUE | S. m. ficedula, (Hist. nat. Ornith.) beccafigo à Florence ; très-petit oiseau qui est à peine de la grosseur de la linote ordinaire. Le corps est court. La tête, le dos, les aîles & la queue, sont de couleur cendrée ou de feuille morte mêlée de verd ; & dans quelques-uns de ces oiseaux, elle est d'un brun verdâtre. Les grandes plumes des aîles sont de couleur brune ou gris de souris ; leurs tuyaux sont noirs ; les bords extérieurs sont verdâtres, La queue a environ deux pouces de longueur ; elle est brune. Le ventre est blanc ou de couleur argentée ; celle de la poitrine est un peu plus foncée, avec quelque teinte de jaune. Le bec est court ; la piece supérieure est noire, & l'inférieure bleuâtre. Le dedans de la bouche est rouge. Les pattes sont courtes, de couleur bleuâtre, & quelquefois plombée.
Il est assez difficile de distinguer cet oiseau par le moyen de la description, parce qu'il n'y a rien de tranché dans ses couleurs : aussi y a-t-il plusieurs sortes d'oiseaux que l'on rapporte aux mêmes noms de bec. figue & de ficedula. Willughby, Ornit. Voy. TETE NOIRE. Le bec-figue est excellent à manger : il se nourrit de figues, de raisin, &c. Voyez OISEAU. (I)
* Pour l'apprêter, on le plume ; on lui coupe la tête & les piés ; on le rotit à la broche ; à mesure qu'il cuit on le saupoudre de croûte de pain rapée & mêlée de sel, & on le mange au verjus de grain & au poivre blanc.
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BÉCASSE | S. f. scolopax, (Hist. nat. Ornith.) oiseau qui est moins gros que la perdrix. Toute sa partie supérieure est bigarrée de trois couleurs, qui sont le roux, le noir & le cendré. Depuis le bec jusqu'au milieu de la tête, les plumes sont presque toutes de couleur rousse mêlée de noir ; la poitrine & le ventre sont de couleur cendrée, il y a des lignes transversales d'un brun obscur ; le dessous de la queue est un peu jaune ; le menton est de couleur blanchâtre mêlée de jaune : il y a une ligne noire depuis les yeux jusqu'au bec : le derriere de la tête est presqu'entierement noir, avec deux ou trois bandes transversales de couleur de terre cuite. Il y a vingt-trois grandes plumes dans les ailes, elles sont noires, & ont des taches transversales de couleur rousse ; les petites plumes qui sont sous les ailes, ont des bandes transversales de deux couleurs, qui sont le cendré & le roux. La queue a environ trois pouces trois lignes de longueur, elle est composée de douze plumes, dont les pointes sont blanches sur la face inférieure, & de couleur cendrée sur la face supérieure ; les bords semblent avoir des entailles ou des dents de couleur rousse, le reste est noir.
Le bec a trois pouces de longueur ; il est d'un brun obscur à son extrémité, mais auprès de la tête cette couleur est moins foncée, & tire sur la couleur de chair ; la partie supérieure du bec est un peu plus longue que la partie inférieure ; la langue est tendineuse ; le palais est tuberculeux ; les oreilles sont grandes & bien ouvertes ; les yeux sont placés plus haut, & plus en arriere que dans les autres oiseaux ; c'est pourquoi la bécasse ne se blesse pas lorsqu'elle fouille dans la terre avec son bec ; les jambes, les pattes, les doigts sont d'un brun pâle, les ongles sont noirs ; le doigt de derriere est fort court, & son ongle est le plus petit de tous.
Au printems cet oiseau quitte notre pays : mais il s'accouple auparavant. Le mâle & la femelle se suivent par-tout : ils vivent dans les forêts humides, le long des petits ruisseaux & des haies. On dit que dans les jours nébuleux, ils ne cessent d'aller & de venir en volant : leurs oeufs sont longs, de couleur rougeâtre, pâles & bigarrés d'ondes & de taches bien foncées.
La femelle est un peu plus grande, & pese plus que le mâle, & sa couleur est plus foncée. Ils ont environ treize pouces de longueur depuis la pointe du bec, jusqu'à l'extrémité de la queue ; l'envergeure est de deux piés : la chair de la bécasse est excellente, la cuisse est le meilleur morceau. Willughby, Ornithologie. Voyez OISEAU. (I)
* On prend les bécasses à la pentiere ; si vous avez des bois taillis, & proche de-là une haute futaie, coupez-en quelques arbres dans le milieu ; faites-y une clairiere ou passée de sept à huit toises ; & fermez votre passée par la pentiere, comme vous la voyez dans la figure de nos planches de chasse. Ebranchez deux arbres A B ; ajoûtez-y deux perches C D, C D ; ayez des boucles de verre, comme elles sont n°. 3. ces boucles serviront à suspendre votre filet aux lieux D, D ; attachez les extrémités E E de votre filet, aux piés des arbres A, B, par deux cordes lâches ; liez des cordes F, F, les deux autres extrémités G, G ; faites passer ces cordes dans vos boucles de verre ; qu'elles se rendent l'une & l'autre en un même lieu R, à sept ou huit toises de la pentiere ; faites-là une loge, avec cinq ou six branches d'arbres ; que cette loge soit ouverte vers le filet. Quand une bécasse se viendra jetter dans la pentiere, le chasseur caché lâchera les extrémités R des cordes ; alors le filet tombera, & la bécasse n'aura pas le tems de s'en débarrasser. Les bécasses ne volent presque jamais de jour ; elles restent dans les bois, pour n'en sortir que le soir à l'approche de la nuit.
On peut aussi les prendre aux lacets dans les bois, ou le long des ruisseaux ; ces lacets n'ont rien de particulier.
Les bécasses se mangent roties, sans être vuidées : quand on en veut faire un ragoût, on ne les laisse cuire à la broche qu'à moitié ; on les dépece ; on les met dans une casserole avec du vin, des capres, des champignons, du sel & du poivre, & on les laisse bouillir jusqu'à ce que la cuisson soit achevée. Le salmi se fait presque de la même maniere ; on ajoûte seulement des truffes & des anchois, & on lie la sausse avec le foie & les entrailles de la bécasse.
La bécasse considérée comme aliment, passe pour être nourrissante, restaurante & fortifiante : mais elle ne se digere pas si aisément que les oiseaux dont la chair est blanche ; ses sels sont fort exaltés par son exercice continuel, ce qui fait que sa chair fait du bien à ceux qui regorgent d'acides. Ses cendres passent pour lithontriptiques. La bécassine se digere moins bien, elle a au reste les mêmes propriétés que la précédente. Voyez BECASSINE. (N)
BECASSE DE MER, hoematopus, (Hist. nat. Ornith.) oiseau de la grosseur de la pie ou de la corneille ; cette ressemblance de grosseur jointe à celle des couleurs, a fait donner à cet oiseau le nom de pie de mer Il pese dix-huit onces, il a dix-huit pouces de longueur depuis la pointe du bec jusqu'à l'extrémité de la queue ou des pattes.
Le bec est droit, long de trois pouces, applati sur les côtés, terminé en pointe, & de couleur rouge : dans une autre bécasse de mer, qui étoit peut-être plus jeune que celle qui a servi à cette description, le bec étoit noirâtre depuis la pointe jusqu'au milieu de sa longueur. La partie supérieure du bec est un peu plus longue que l'inférieure ; l'iris des yeux & les tarses des paupieres sont d'un beau rouge ; dans une autre ils étoient de couleur de noisette : les piés sont rouges, cet oiseau n'a point de doigts de derriere, & le doigt extérieur tient au doigt du milieu par une membrane. On a vû des oiseaux de cette espece, qui avoient les pattes d'un brun pâle, peut-être étoient-ils jeunes. Les ongles sont noirs, de même que la tête, le cou, la gorge, jusqu'au milieu de la poitrine, & le dos. Le reste de la poitrine, le ventre & le croupion sont blancs. Il y avoit dans une autre bécasse de mer, une grande tache blanche sous le menton, & une autre petite sous les yeux : la queue est en partie noire & en partie blanche : la premiere des grandes plumes de l'aile est noire, à l'exception du bord intérieur qui est blanc : dans les autres plumes, l'espace qu'occupe le blanc, augmente de plus en plus jusqu'à la vingtieme qui est entierement blanche, de même que les trois suivantes ; mais depuis la vingt-troisieme, la couleur noire reparoît sur les plumes qui suivent. Les petites plumes de l'aile qui recouvrent les grandes du milieu, sont blanches, ce qui forme un trait blanc transversal sur l'aile.
On trouve dans l'estomac de la bécasse de mer, des patelles entieres, ce qui prouve qu'elle fait sa principale nourriture de ce coquillage On voit fréquemment cet oiseau sur les côtes occidentales de l'Angleterre ; sa chair est noire & dure. Willughby, Ornit. Voyez OISEAU. (I)
BECASSE, scolopax, (Hist. nat. Ichthiolog.) poisson de mer. Il a été ainsi nommé, parce que son bec est long comme celui de l'oiseau appellé bécasse. On lui a aussi donné le nom d'éléphant, par une comparaison plus éloignée que l'on a faite du bec de ce poisson avec la trompe de l'éléphant. Ce poisson a le corps rond, de couleur rouge, couvert d'écailles rondes : il y a auprès de la queue un grand aiguillon garni de dents comme une scie, du côté de la queue qui est menue. Ce poisson est petit. Rondelet. Voy. POISSON & BECUNE. (I)
BECASSE, est un instrument dont les Vanniers se servent pour renverger leurs ouvrages de clôture. Voyez RENVERGER. Cet outil n'est autre chose qu'une verge de fer courbée en arc de cercle, dont le bout seroit un peu prolongé en ligne droite : l'autre bout sert de tige à la partie coudée, & se termine par une queue qui s'emmanche dans un morceau de bois. Voyez la Planche du Vannier.
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BÉCASSINE | S. f. gallinago minor, (Hist. nat. Ornith.) oiseau qui pese environ quatre onces : il a un pié de longueur depuis la pointe du bec jusqu'à l'extrémité des pattes, & seulement onze pouces, si on ne prend la longueur que jusqu'au bout de la queue ; l'envergeure est de sept pouces.
Une bande blanche mêlée de roux, occupe le milieu de la tête, & de chaque côté on voit une tache de couleur mêlée de brun & de roux. Il y a au-dessus des yeux une autre bande, de la même couleur que celle du milieu de la tête, & une autre entre les yeux & le bec, qui est de couleur brune. La couleur des plumes qui sont au-dessous du bec est blanche ; le cou est de couleur brune mêlée de roux ; la poitrine & le ventre sont presque entierement blancs ; les grandes plumes qui sortent de l'épaule, s'étendent presque jusqu'à la queue ; leurs barbes intérieures sont noires & un peu luisantes ; la pointe de ces plumes est de couleur rousse, & les barbes extérieures sont d'un roux pâle, ce qui forme alternativement des bandes de différentes couleurs. Les plumes qui couvrent le dos sont de couleur brune : elles ont des lignes transversales de couleur blanchâtre. Les plumes qui couvrent la queue sont rousses, avec des lignes noires transversales. Les plus grandes des plumes qui recouvrent les aîles sont de couleur brune, à l'exception de la pointe qui est blanche, & les petites sont panachées de noir & de roux pâle. Il y a dans chaque aîle vingt-quatre grandes plumes ; le bord extérieur de la premiere est blanc presque jusqu'à la pointe ; l'extrémité de celles qui suivent est un peu blanchâtre, mais cette couleur est beaucoup plus claire sur les plumes qui se trouvent depuis la onzieme jusqu'à la vingtieme ; au reste toutes ces plumes sont rousses : enfin les dernieres ont des lignes transversales, dont les unes sont noires, & les autres de couleur blanche mêlée de roux.
La queue est composée de douze plumes : elle paroît très-courte, parce qu'elle est recouverte presqu'en entier par les plumes qui l'environnent. La pointe de ses plumes extérieures est blanche, & le reste est traversé par des bandes de couleur brune, & des bandes de couleur pâle posée alternativement ; leur bord extérieur est d'un blanc plus clair ; les plumes qui suivent de chaque côté jusqu'à celles du milieu sont presque de la même couleur, excepté que la pointe est moins blanche, que le brun approche plus du noir, & que la bande blanche du haut est un peu rougeâtre. La pointe des plumes du milieu est blanchâtre ; au-dessus du blanc il y a une bande brune qui est suivie d'une tache rougeâtre avec des taches brunes dans le milieu : le reste de la plume est presque entierement noir, à l'exception d'une ou deux taches rougeâtres qui sont sur les bords extérieurs. Le bec de la bécassine a près de trois pouces de longueur ; il est noir à la pointe ; il est un peu applati & parsemé de petits grains. La langue est pointue. L'iris des yeux est couleur de noisette. Les pattes sont d'un verd pâle. Les ongles sont noirs. Les doigts sont longs & séparés dès leur naissance ; celui de derriere est très-petit.
Ces oiseaux sont passagers, au moins pour la plûpart. Ils nichent dans les marais. La femelle fait d'une seule ponte quatre ou cinq oeufs. La bécassine vit dans les lieux marécageux & le long des petits ruisseaux. Sa chair est très-tendre & d'un goût excellent. Willughby, Ornit. Voyez OISEAU. (I)
* On apprête les bécassines comme les bécasses, quand on les veut manger roties : mais pour les mettre en ragoût, on les fend en deux sans les vuider ; on les passe à la poële au lard fondu, avec poivre & ciboule : on y fait ensuite distiller du jus de champignon, avec un peu de celui de citron ; & le ragoût est fait, quand les bécassines sont achevées de cuire ; car il faut observer qu'elles doivent être à moitié roties avant que d'être fendues en deux.
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BECCABUNGA | (Hist. nat. bot.) Il y a deux plantes de ce nom ; le grand & le petit beccabunga. Le grand a la racine fibreuse, blanche & rampante ; la tige couchée à terre, cylindrique, fongueuse, rougeâtre & branchue ; & la feuille rangée par paires opposées sur les noeuds, arrondie, longue d'un pouce & plus lisse, luisante, épaisse, crenelée, & d'un verd foncé. De l'aisselle de la feuille il sort des pédicules longs d'une palme ou d'une palme & demi, chargés de fleurs disposées en épi, d'une seule piece, en rosette bleue, partagée en quatre parties percées dans le centre, à deux étamines surmontées d'un sommet bleuâtre, avec un pistil qui se change en un fruit membraneux de la forme d'un coeur applati, long de trois lignes, divisé en loges qui contiennent plusieurs petites graines applaties.
Le petit beccabunga ne differe du grand qu'en ce que sa tige, sa feuille & sa fleur sont plus petites.
On les trouve, par l'analyse chimique, composés d'un sel essentiel salé, vitriolique, doux & tempéré, peu different du sel admirable de Glauber : délayé dans beaucoup de phlegme, & enveloppé d'une assez grande portion d'huile.
On leur attribue la vertu d'échauffer, d'exciter les urines & les regles, de briser le calcul, & de hâter la sortie du foetus : on s'en sert encore pour le scorbut ; mais on ne l'ordonne qu'aux malades d'un tempérament sec & chaud.
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BECCADE | S. f. (Fauconnerie) Les fauconniers disent faire prendre la beccade à l'oiseau, pour dire lui donner à manger.
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BECHARN | oiseau. Voyez FLAMAND. (I)
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BECHE | insecte. Voyez LISETTE. (I)
BECHE, s. f. (Jard.) est un outil de fer tranchant, large, applati, d'environ un pié de long sur huit, à neuf pouces de large, & emmanché d'un bâton de trois piés de long. Il est à l'usage des Jardiniers, qui s'en servent pour labourer la terre.... Voyez Pl. du Jardinier. (K)
Les Artilleurs ont aussi leur beche ; elle leur sert à préparer les endroits où des batteries doivent être placées. Voyez Art milit. Pl. XVII. (Q)
Ce sont les Taillandiers qui les font. Il y en a de rondes & de quarrées. Les rondes entrent plus facilement dans la terre, les quarrées séparent des morceaux de terre plus étendus. Pour s'en servir, on les tient à la main ; on les place dans l'endroit qu'on veut cultiver, & on les fait entrer en poussant avec le manche, & en aidant cette action avec le pié qu'on appuie à la partie supérieure de la beche, à côté de la douille où le manche est reçû. Voyez Pl. VII. du Taillandier, en B & en D, une beche ronde & une beche quarrée.
* BECHE, (Géog.) riviere de Hongrie, qui se jette dans le Danube près de Belgrade.
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BECHET | espece de chameau. V. CHAMEAU. (I)
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BECHIN | (Géog.) petite ville de Boheme, du cercle de même nom. Long. 32. 35. lat. 49. 14.
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BECHIQUES | adj. nom qu'on donne en Medecine, à tous les remedes indiqués dans la toux : il vient de , toux,
Quincy donne dans sa pharmacopée, la préparation du trochisque suivant, que M. James dit préférable à tout autre, & salutaire dans toutes sortes de toux. Prenez des quatre grandes semences froides écossées, de chacune deux onces ; graine de pavot blanc, une once, mettez le tout dans un mortier de marbre ; versez dessus une quantité suffisante de jus de réglisse délayé dans de l'eau-rose, & de la consistance d'un sirop : faites une pulpe douce ; passez cette pulpe par un tamis, après y avoir ajoûté quatre ou cinq onces de pulpe de réglisse : ajoûtez ensuite storax dissous & passé, une once ; poudre d'iris, trois onces ; graine d'anis, une once ; fenouil, une once ; sucre fin, deux livres & demie : mettez le tout en une pâte, & faites-en des tablettes, dont vous pourrez user à discrétion.
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BECHIRES | S. m. pl. (Géog.) peuples de Scythie, dont Pline a fait mention.
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BECHOTTER | (Jardinage) Voyez BEQUILLER.
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BECK | (Commerce) c'est un poids d'usage en Angleterre pour peser des marchandises seches. Le beck tient deux gallons ou seize livres d'Angleterre. Voyez GALLON.
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BECKE | ou BECKUM, (Géog.) petite ville de l'évêché de Munster en Westphalie.
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BECKENRIEDT | (Géog.) ville de Suisse dans le canton d'Underwaldt.
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BECQUÉ | adj. en terme de Blason, se dit des oiseaux dont le bec est d'un autre émail que le corps.
Guiffray Vachat en Bugey, d'asur au griffon d'or, becqué d'argent. (V)
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BECQUILLON | S. m. en Fauconnerie, se dit du bec des oiseaux de proie, lorsqu'ils sont encore jeunes. Cet oiseau n'a encore que le becquillon.
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BECSANGIL | (Géog.) province d'Asie, qui fait partie de la Natolie, bornée au septentrion par la mer Noire, à l'occident par la mer de Marmora & l'Archipel, au midi par la Natolie propre, & à l'occident par la province de Boli.
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BECTACHIS | S. m. pl. (Hist. mod.) espece de religieux chez les Turcs, ainsi nommés de Haji Bectak leur fondateur, fameux par de prétendus miracles & des prophéties. Il vivoit sous le regne d'Amurat I. qui lui envoya, dit-on, la nouvelle milice qu'il vouloit former d'enfans enlevés aux Chrétiens, afin qu'il la désignât par un nom ; & il nomma ces soldats Janissaires : soit en mémoire de cet évenement, soit parce que les Bectachis ne sont pas fort réguliers sur l'heure de la priere, les Janissaires trouvent leur dévotion fort commode, & sont très-attachés à leur secte.
Les bectachis sont habillés de blanc, & portent des turbans de laine, dont la lesse est tortillée comme une corde. Ils croyent honorer singulierement l'unité de Dieu en criant hû, c'est-à-dire qu'il vive. Ces moines se marient, demeurent dans les villes & dans les bourgs : mais par leur institut ils sont obligés de voyager dans les pays éloignés. Ils doivent à tous ceux qu'ils rencontrent le gazel, espece de chant affectueux qui par allégorie est appliqué à l'amour divin ; & l'elma, qui est une invocation d'un des noms de Dieu qui sont chez eux au nombre de mille & un. Guer, moeurs des Turcs, tom. I.
Ricaut, dans son ouvrage de l'empire Ottoman, fait mention d'une autre secte Mahométane, suivie par quelques Janissaires, & nommée Bectaschistes de Bectas, aga des Janissaires, au commencement du regne de Mahomet IV. On les nomme autrement Zératites, & le vulgaire les appelle Mun sconduren, c'est-à-dire ceux qui éteignent la chandelle ; parce qu'on les accuse d'avoir indifféremment commerce avec toutes sortes de personnes dans leurs assemblées, & d'y permettre l'inceste à la faveur de l'obscurité. Au reste ils observent la loi de Mahomet pour ce qui regarde le culte divin : mais ils pensent qu'il n'est pas permis de donner des attributs à Dieu, ni de dire qu'il est grand, qu'il est juste ; parce qu'il est un être très-simple, & que nos idées n'approchent point de la simplicité de son essence. Ce mélange monstrueux de spiritualité raffinée & de libertinage fait que cette secte est très-peu suivie. (G)
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BECUIBA NUX | noix de Becuiba, (Hist. nat. bot.) espece de noix brune, commune au Bresil, de la grosseur d'une noix muscade, pleine d'une amande huileuse, couverte d'une coque ligneuse. On met cette amande au rang des balsamiques.
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BECUN | ou BEKUNE, s. f. (Hist. nat. Ichthiol.) poisson de mer auquel on a aussi donné le nom de brochet de mer, parce qu'il ressemble à notre brochet, & que sa chair en a le goût. Il y a des bécunes que l'on appelle bécasses de mer, parce qu'elles ont le bec allongé. On pêche la bécune sur la côte d'Or en Guinée, sur les rivages avec de grands filets, dans les mois d'Octobre & de Novembre. Celle que l'on nomme bécasse de mer se trouve sur les côtes de l'Amérique ; elle a jusqu'à huit piés de longueur. Ce poisson est fort dangereux par sa morsure sur-tout, parce qu'il mord hardiment sans s'épouvanter du bruit, ni des mouvemens que l'on peut faire pour l'écarter. On dit que sa chair est souvent un poison aussi dangereux que l'arsenic, & on prétend que c'est lorsque la bécune s'est nourrie de mançeuille sur les côtes des îles de l'Amérique. (I)
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BECZAU | (Géog.) ville de Boheme sur la riviere de Topel.
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BECZKA | S. f. (Commerce) mesure dont on se sert en Pologne pour les marchandises seches & humides. La beczka de Vilna tient 350 livres de grain, & celle de Smolensko 325 livres.
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BEDA | (Métallurg.) on nomme ainsi au Potosi une mine d'or ou d'argent, lorsqu'elle est mêlée de fer. Voyez MINE. (M)
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BEDARIEUX | (Géog.) ou BEC D'ARIEUX ville de France, dans le Languedoc, au diocèse de Beziers, sur la riviere d'Obe. Long. 20. 54. lat. 43. 39.
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BEDAS | (Géog. & Hist. mod.) peuples d'Asie, dans l'île de Ceylan. Ils habitent une grande forêt auprès de la mer, au nord-est de l'île. Ce sont des sauvages blancs, fort adroits à tirer de l'arc. Ils apprêtent leur viande avec du miel ; ils la mettent avec cet assaisonnement dans un trou d'arbre, bouché d'un tampon, où ils la laissent pendant un an ; après quoi, ils l'en retirent & la mangent. Il y a beaucoup d'abeilles dans leurs forêts ; ils n'ont aucune demeure fixe ; ils errent, habitant tantôt un lieu tantôt un autre.
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BEDBUR | (Géog.) petite ville du duché de Juliers.
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BEDEAU | S. m. (Hist. mod.) bas officier, sergent, qui somme les personnes de paroître ou de répondre.
BEDEAU, se dit encore d'un officier subalterne dans les universités, dont la fonction est de marcher devant le recteur & les autres principaux, avec une masse, dans toutes les cérémonies publiques.
Les uns disent que bedelli vient par corruption de pedelli, parce que les bedeaux servent & courent à pié ; les autres font dériver ce nom de pedo seu baculo, parce qu'ils portent une baguette ; ils forment pedellus de pedum, espece de baguette, qui est leur symbole ; & de pedellus, ils font le nom bedellus. Il en est qui s'imaginent en avoir trouvé l'étymologie dans l'hébreux bedal ordonner, ranger, disposer. Spelman, Vossius & Somner, dérivent bedeau du Saxon bidel, crieur public ; c'est dans le même sens que certains anciens manuscrits Saxons, nomment les évêques bedeaux de Dieu, Dei bedalli.
Le traducteur du nouveau Testament saxon rend exactor, par bydele ; & ce mot est employé dans les lois d'Ecosse, pour signifier la même chose.
Dans les églises & paroisses on nomme bedeaux de bas officiers laïcs, vêtus de longues robes de drap rouge ou bleu, portant sur la manche gauche une plaque d'argent, ou un chiffre en broderie, qui représente l'image ou le nom du patron de cette église ; ils ont à la main droite une verge ou baleine, garnie de viroles & de plaques d'argent ; précédent le clergé dans les cérémonies, & servent à maintenir le bon ordre pendant l'office, en chassant les mendians, les chiens, &c. (G)
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BEDEGUAR | (Hist. nat. Mat. med.) nom que quelques auteurs qui ont écrit de la matiere médicale, ont donné aux excroissances spongieuses du laurier sauvage. On dit que les cendres du bedeguar sont bonnes dans la gravelle, dans la dysurie, & qu'elles font dormir si on en tient sous l'oreiller.
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BEDER | (Géog.) ville d'Asie dans les états du Mogol, capitale des Talingas. Long. 95. 10. lat. 16. 50.
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BEDES | ou ROMO, (Géog.) riviere d'Italie, qui a sa source dans la Toscane entre la Romagne, arrose Forli, prend le nom d'Acquedatto, & se jette dans le golfe de Venise au-dessus de Ravenne.
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BEDFORD | (Géog.) ville d'Angleterre dans la province de même nom, avec titre de duché, sur l'Ouse. Long. 17. 52. 8.
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BEDFORDSHIRE | (Géog.) petite province d'Angleterre, dont Bedford est la capitale.
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BEDIZ-VELE | ou BELZ, (Géog. anc. & mod.) ville d'Afrique au royaume de Fez, sur la côte de la Méditerranée, avec port & château. On la prend pour l'ancienne Acrath.
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BEDOUINS | S. m. pl. (Géog. & Hist. mod.) peuples d'Arabie, qui vivent toûjours dans les deserts & sous des tentes. Ils ne sont soûmis qu'aux émirs leurs princes, ou aux cheiks, autres seigneurs subalternes. Ils se prétendent descendus d'Ismaël. Celui d'entre leurs souverains qui a le plus d'autorité, habite le desert qui est entre le mont Sinaï & la Mecque. Les Turcs lui payent un tribu annuel pour la sûreté des caravanes. Il y a des Bedouins dans la Syrie, la Palestine, l'Egypte, & les autres contrées d'Asie & d'Afrique. Ils sont Mahométans ; ils n'en traitent pas plus mal les Chrétiens. Ils sont naturellement graves, sérieux, & modestes ; ils font bon accueil à l'étranger : ils parlent peu, ne médisent point, & ne rient jamais ; ils vivent en grande union : mais si un homme en tue un autre, l'amitié est rompue entre les familles, & la haine est irréconciliable. La barbe est en grande vénération parmi eux ; c'est une infamie que de la raser. Ils n'ont point de gens de justice ; l'émir, le cheik, ou le premier venu, termine leur différend. Ils ont des chevaux & des esclaves. Ils font assez peu de cas de leur généalogie ; pour celle de leurs chevaux, c'est tout autre chose. Il en ont de trois especes ; des nobles, des mésalliés, & des roturiers. Ils n'ont ni medecins, ni apothicaires. Ils ont tant d'aversion pour les lavemens, qu'ils aimeroient mieux mourir que d'user de ce remede. Ils sont secs, robustes, & infatigables. Leurs femmes sont belles, bien faites, & fort blanches. Voyez le dictionn. géog. de M. Vosgien. A juger des peuples sur ce qu'on nous en raconte, il est à présumer que n'ayant ni medecins, ni jurisconsultes, ils n'ont guere d'autres lois que celles de l'équité naturelle, & gueres d'autres maladies que la vieillesse.
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BEEL-PHEGO | ou BEL-PEHOR, s. m. (Myth.) fausse divinité que les Israélites adoroient à l'imitation des Moabites, selon le récit que Moyse en fait au ch. xx. des Nombres. Selden croit que c'étoit un faux dieu des Moabites & des Madianites, & le même qui est seulement nommé peor au chap. qui vient d'être cité, & au xxxj. du même livre ; comme encore au xxij. de Josué. Une lettre hébraïque , dont la prononciation est difficile, & qui se change souvent en g dans les autres langues, a fait aussi, qu'on l'a nommée phegor. Origene, homel. xx. sur le livre des nombres, dit qu'il n'a rien pu trouver dans les écrits des Hébreux, touchant cette idole de saleté & d'ordure : Beel-phegor, dit-il, est le nom d'une idole qui est adorée dans le pays de Madian, principalement par les femmes. Le peuple d'Israel se dévoüa à son service, & fut initié dans ses mysteres. Origene ajoûte que Beel-phegor marque une espece de turpitude & de vilainie. Le rabbin Salomon de Lunel, autrement Jarchi, dans son commentaire sur le xxv. des Nomb. croit que ce nom signifie faire ses ordures devant quelqu'un, & que les idolâtres faisoient cette sale action devant Beel-phegor. Le célebre Moyse, fils de Maimon, approche de son sentiment, l'explique un peu plus au long dans son livre intitulé More Neuochim, part. III. chap. xlvj. que Buxtorf le fils a traduit en latin. On a encore allégué d'autres raisons du nom de cette idole. Quelques-uns croyent qu'elle s'appelloit ainsi à cause qu'elle avoit la bouche ouverte. Philon juif, est de cette opinion ; & il semble qu'au lieu de Beel-phegor, il avoit lû Baal piaghor ; ce qui peut signifier la bouche ou l'ouverture supérieure de la peau. S. Jérôme sur le jv. & le jx. du prophete Osée, & au premier livre contre Jovinien, chap. xij. croit que le Beel-phegor des Moabites & des Madianites, est le même que le Priape des Grecs & des Latins. Isidore est de cette opinion, au VIII. livre des Origines ; & Rufin au III. livre sur Osée. Ces auteurs prouvent par les endroits de l'Ecriture sainte, où il est parlé des fornications des Moabites & des Hébreux, que ces deux idoles, Beel-phegor & Priape, étoient honorées avec d'infames cérémonies. Ils alleguent aussi le ch. jx. du prophete Osée, où ceux qui servoient Beel-phegor sont accusés de commettre des impudicités, & de faire des choses abominables. Le P. Kircher suit aussi le sentiment de S. Jérôme, & dit que cette infame idolatrie étoit venue d'Egypte, où les Hébreux avoient vû les détestables cérémonies d'Osiris. Scaliger conjecture que le nom de phegor fut donné en dérision au dieu des Moabites qui s'appelloit Baal-kéem, le dieu du tonnerre, que les Hébreux appellerent par mépris le dieu du pet ; comme ils changerent le nom du dieu d'Accaron, Beelzebub, qui signifie le dieu des mouches, en celui de Beelzebul, dieu des excrémens ; & comme ils donnerent à Béthel, où étoient les veaux d'or de Jéroboam, le nom de beth-aven, maison d'iniquité. Vossius après S. Jérôme, croit que phegor est le dieu Priape ; d'autres se persuadent que cette idole reçut son nom de quelque prince qui fut mis au nombre des dieux, ou de quelque montagne du même nom, car il y avoit dans le pays de Moab une montagne qui s'appelloit phegor ; & l'on croit que Baal y avoit un temple, où on lui offroit des sacrifices. Balac, dit Moyse, Nomb. chap. xxiij. verset 28, conduisit Balaam au sommet de Phegor, qui regarde vis-à-vis du désert de Jesimon. Théodoret sur le pseaume cv. fait venir de-là le nom de Beel-phegor, & Suidas en donne l'étymologie en ces termes : Beel, c'est Saturne ; Phegor, le lieu où il étoit adoré ; & de ces deux noms a été formé celui de Beel-phegor : car comme Jupiter a été appellé Olympien, & Mercure Cyllenien, à cause des montagnes de Thessalie & d'Arcadie, où ils étoient adorés, il y a apparence que Baal étoit appellé Baal-phegor, à cause du mont Phegor où on lui sacrifioit. Il est fait mention au chap. xxxjv. du Deuteronome de la maison de Phegor ou de Beeth-phegor, qui étoient dans le pays de Moab, auprès de la vallée dans laquelle Moyse fut enseveli. Les noms de beth-dagon, de beth-shemesh, &c. semblent être des preuves que Beel-phegor se peut prendre-là pour la montagne où étoit le temple de l'idole : car les Hébreux appellent un temple beth, c'est-à-dire maison. Les Moabites offroient les sacrifices à Beel-phegor, dont il est parlé dans les Nombres, chap. xxv. . 2. Les filles de Moab inviterent les Israélites à leurs sacrifices ; ils mangerent, & adorerent leurs dieux, & Israel fut invité aux mysteres de Beel-phegor. Et dans le Pseaume cv. ils furent initiés à Beel-phegor, & ils mangerent les sacrifices des morts. Par ces sacrifices des morts, quelques-uns entendent les sacrifices offerts à Beel-phegor, qui étoit un dieu mort. D'autres entendent par-là les cérémonies des funérailles, & les offrandes que les Moabites faisoient aux morts. Selden prétend que Beel-phegor étoit le dieu des morts, ou le Pluton des Grecs ; & que les offrandes que l'on faisoit aux manes pour les appaiser, sont ces sacrifices des morts, dont il est parlé en cet endroit. Le P. dom Augustin Calmet conjecture que Phegor est peut-être le même qu'Adonis ou Isiris, dont on célébroit les fêtes comme des funérailles des morts, avec des lamentations & des pleurs, & d'autres cérémonies lugubres, & il prétend que la défense que Moyse fait aux Hébreux, Lévitique xjx. de se raser & de se faire des incisions dans la chair pour les morts, a rapport au culte de Beel-phegor. Cela paroît assez vraisemblable ; & il est certain que l'on honoroit ainsi Adonis : mais il se peut faire que deux différens dieux ayent eu le même culte dans deux diverses habitations ; & il paroît que les Hébreux n'appelloient pas Adonis Phegor, mais Thamus. Le même Bénédictin donne encore une autre conjecture sur le dieu Phegor, en prétendant que c'est l'Orus des Egyptiens, fils d'Isis : mais toutes ces conjectures n'ont rien de certain. Consultez Vossius, de l'idolatrie des payens ; livre II. chap. vij. Voyez BAAL ; Selden, de Diis Syris ; Dom Augustin Calmet, dissertation sur les Nombres. (G)
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BEELZEBUB | (Myth.) c'est-à-dire dieu mouche, ou dieu de la mouche, étoit le nom d'un célébre dieu des Accaronites, dont il est parlé au IV. livre des Rois, ch. j. Quelques auteurs ont crû que les Juifs lui avoient donné ce nom par dérision, parce que dans le temple de Jérusalem on ne voyoit point de mouches sur les victimes. Scaliger est de cette opinion. Mais il est bien plus probable que les Accaronites avoient eux-mêmes donné ce nom à leur dieu ; ce qu'on peut prouver par les paroles d'Ochosias, qui envoya consulter ce dieu beelzebub ; il n'y a aucune apparence qu'il eût voulu consulter un dieu dont il se moquoit. Maldonat est de ce dernier sentiment, dans son commentaire sur le ch. x. de S. Matth. Cette idole étoit donc appellée le dieu mouche ou de la mouche, parce qu'on l'invoquoit contre les mouches. Ceux d'Arcadie sacrifioient tous les ans à un dieu semblable appellé Myagros. Les Juifs par l'horreur qu'ils avoient pour cette idole, appellerent le diable beelzebub : on lit néanmoins dans la plûpart des exemplaires grecs du nouveau Testament, beelzebul, qui signifie un dieu d'excrément : ce que les Juifs auroient pû faire du mot beelzebub, par mépris pour cette idole, comme on l'a dit dans l'article précédent. Au reste on pourroit croire qu'il faut aussi bien lire beelzebub dans le nouveau Testament comme dans l'ancien ; & que beelzebul est une ancienne erreur des copistes grecs. Voyez BAAL. (G)
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BEELZEPHO | ou BAAL-TSEPHON, (Myth.) idole des Egyptiens. Ce mot est composé de beel, seigneur ou dieu, & de tsephon caché, ou le septentrion, comme qui diroit le dieu caché, ou le dieu du nord. On donna aussi ce nom au lieu où cette idole étoit placée, sur les confins de l'Egypte vers la mer Rouge. Rabbi Aben Ezra dit que c'étoit un talisman d'airain : que les magiciens de Pharaon avoient fait pour empêcher que les Israélites ne sortissent de l'Egypte. D'autres disent que les Egyptiens dressoient de ces talismans en tous les endroits par où les ennemis pouvoient aisément faire irruption dans l'Egypte, afin que leurs efforts fussent arrêtés par la force magique de ces idoles. Il y en a qui croyent que cette idole de beelzephon avoit la figure d'un chien, & qu'elle aboyoit lorsque quelque Israélite passoit par ce lieu pour s'enfuir. Kircher, Oedipus Aegiptiacus, tome I. (G)
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BEEMSTER | (Géog.) c'est une petite étendue de pays dans la Hollande septentrionale, vulgairement appellée Noort-Hollande : c'étoit autrefois un lac que l'on est parvenu à dessécher, & dont l'industrie des habitans a fait un des plus rians séjours de l'Univers.
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BEENEL | (Hist. nat. bot.) arbrisseau toûjours verd qui croit dans le Malabar : on lui attribue quelques propriétés médicinales, sur lesquelles il ne faut pas compter tant qu'on n'aura pas de la plante une meilleure description.
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BEER-RAMATH | (Géog. sainte) ville de Palestine dans la tribu de Siméon.
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BEESHA | (Hist. nat. bot.) espece de bambu qui croît au Malabar : on dit des merveilles de sa décoction pour l'érosion des gencives, les maux de dents, & la suppression des regles.
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BEFORT | (Géog.) ville de France, capitale du Sundgaw, au haut d'une montagne. Long. 24. 32. 30. lat. 47. 38. 18.
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BEFROY | S. m. (Art milit.) c'est dans les villes de guerre, ou dans les places à portée de l'ennemi, une tour, clocher, ou autre lieu élevé, où il y a une cloche qui sonne lorsqu'on apperçoit l'ennemi, ou qu'on veut assembler les troupes. Dans les villes de guerre on sonne la cloche du béfroi à la pointe du jour pour l'ouverture des portes. Voyez OUVERTURE DES PORTES. (Q)
BEFROY, (Charpenterie) est la charpente d'une tour ou d'un clocher, dans laquelle les cloches sont suspendues. Voyez la fig. 7. Pl. de la Fonderie des cloches, & l'article FONTE DES CLOCHES.
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BEG-ERI | (Géog. anc. & mod.) petite île d'Irlande près de Wexford, dans un petit golfe formé par la riviere de Slany, à son embouchure. Les Géographes sont partagés entre Beg-Eri & Bardesei, & ils ne savent laquelle des deux fut l'ancienne, Andros, Edros, ou Hedros.
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BEGAYER | v. n. (Manege) c'est la même chose que battre à la main par l'incommodité de la bride. Voyez BATTRE A LA MAIN. (V)
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BEGGHARD | ou BEGGUARDS, BEGUINS & BEGUINES, (Hist. ecclés.) sous tous ces noms on comprend une secte d'hérétiques qui s'éleverent en Allemagne sur la fin du xiij. siecle, & auxquels quelques auteurs donnent pour chef Dulcin ou Doucin : mais il ne faut pas les confondre avec les Dulcinistes. Voyez DULCINISTES.
Les principales erreurs des Begghars, Béguins, & Béguines, étoient que l'homme peut acquérir en cette vie un tel degré de perfection, qu'il deviendra entierement impeccable, & ne pourra plus avancer dans la grace : parce que si quelqu'un y croissoit toûjours, il pourroit être plus parfait que J. C. : que quand on est arrivé à ce degré de perfection, on ne doit plus prier ni jeûner, mais qu'alors la sensualité est tellement soûmise à l'esprit & à la raison, qu'on peut librement accorder à son corps tout ce qu'on veut ; que ceux qui sont en ce degré de perfection, & qui ont l'esprit de liberté, ne sont point soûmis à l'autorité des hommes, ni obligés aux commandemens de l'Eglise, parce que là où est l'esprit du Seigneur, là est la liberté ; qu'on peut obtenir en cette vie la béatitude finale, comme on l'obtiendra dans l'autre ; que toute nature intellectuelle est heureuse en soi, & que l'ame n'a pas besoin de lumiere de gloire pour voir Dieu & joüir de lui : que c'est être imparfait que de s'exercer à la pratique des vertus, l'ame parfaite les ayant exclus : qu'à l'élévation du corps de J. C. les parfaits ne doivent ni se lever ni lui rendre aucune marque de respect, parce que ce seroit une imperfection que de descendre de la pureté & de la hauteur de leur contemplation pour penser à l'eucharistie, à la passion ou à l'humanité de J. C.
Le pape Clément V. condamna ces fanatiques dans le concile général de Vienne tenu en 1311. Comme ils portoient l'habit religieux, sans garder ni le célibat ni aucune observance monastique, on les a quelquefois confondus avec ceux dont nous allons parler dans l'article suivant.
BEGGHARDS, BEGUINS, & BEGUINES, sont aussi les noms qu'on a donnés aux religieux du tiers ordre de S. François. On les appelle encore à présent dans les Pays-bas, Begghards, parce que long-tems avant qu'ils eussent reçû la regle du tiers ordre de S. François, & qu'ils fussent érigés en communauté réguliere, ils en formoient cependant dans plusieurs villes, vivans du travail de leurs mains, & ayant pris pour patrone sainte Begghe, fille de Pepin le vieux, & mere de Pepin de Herstal, laquelle fonda le monastere d'Andenne, s'y retira, & y mourut, selon Sigebert, en 692. A Toulouse on les nomma Béguins, parce qu'un nommé Barthelemi Bechin leur avoit donné sa maison pour les établir en cette ville. De cette conformité de nom le peuple ayant pris occasion de leur imputer les erreurs des Begghards & des Béguins, condamnés au concile de Vienne, les papes Clément V. & Benoit XII. déclarerent par des bulles expresses que ces religieux du tiers ordre n'étoient nullement l'objet des anathèmes lancés contre les Begghards & les Béguins répandus en Allemagne. Il y a encore aujourd'hui dans plusieurs villes de Flandre des communautés de filles qu'on nomme Béguines, & leurs maisons sont appellées béguinages. Voyez BEGUINES. (G)
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BEGI | ou BEGGIE, (Géog.) ville d'Afrique au royaume de Tunis, sur la pente d'une montagne. Long. 27. lat. 37.
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BEGLERBEG | S. m. (Hist. mod.) nom qu'on donne en Turquie au gouverneur général d'une grande étendue de pays. Ce mot se trouve écrit diversement dans les auteurs : begleberg, beylery, & begheler-beghi ; il signifie seigneur des seigneurs.
Les beglerbegs sont autant de vicerois qui commandent à tout un royaume ; leur autorité s'étend également sur la guerre, sur la justice, & sur la police : ils ont au-dessous d'eux d'autres gouverneurs particuliers, soit d'une province, soit d'une grosse ville, qu'on nomme sanjacs ou sanjiacs. Après le grand-visir, les beglerbegs seuls ont le pouvoir de publier dans leurs départemens les ordonnances impériales, & d'y tenir la main. Par tout l'empire, hors de l'enceinte de Constantinople, ils peuvent faire décapiter, ou punir de tel autre genre de mort ou châtiment que bon leur semble, les coupables qu'on leur amene, sans que le bacha du lieu puisse s'y opposer ; il a seulement la liberté de se plaindre à la Porte s'ils abusent de leur autorité.
Autrefois il n'y avoit que deux beglerbegs dans tout l'empire ; celui d'Europe ou de Romelie, & celui de Natolie en Asie : mais l'empire s'étant accru, le nombre des beglerbegs s'est aussi augmenté en Asie ; celui de Romelie est resté seul en Europe, & semble représenter l'empereur Grec. Il est le plus éminent de tous les beglerbegs ; car quoique tous les visirs à trois queues joüissent de ce titre, il sert cependant à caractériser plus particulierement le beglerbeg de Romelie, gouverneur général de toutes les provinces Européennes dépendantes du grand-Seigneur ; le beglerbeg de Natolie & celui de Syrie, qui fait sa résidence à Damas. Le gouverneur de Bude & celui de l'Arabie Pétrée portoient autrefois ce titre ; & si quelques bachas le prennent aujourd'hui, c'est sans l'aveu de la cour qui ne les traite que de plénipotentiaires. Guer. moeur. & usages des Turcs, tome II. (G)
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BEGONE | S. f. begonia, (Hist. nat. bot.) genre de plante dont le nom a été dérivé de celui de M. Bégon, & qui a été observée par le pere Plumier. Les fleurs des plantes de ce genre sont de deux sortes : l'une est stérile, & composée de quatre pétales grands & étroits ; l'autre est en rose, composée de plusieurs pétales disposés en rond sur un calice garni de feuilles, qui devient dans la suite un fruit à trois angles, ailé, divisé en trois loges, & rempli de petites semences. Tournefort, Inst. rei herb. app. Voyez PLANTE. (I)
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BEGU | adj. (Manege) Un cheval begu est celui qui, depuis l'âge de cinq ans jusqu'à sa vieillesse, marque naturellement & sans artifice à toutes les dents de devant : il s'y conserve un petit creux & une marque noire, qu'on appelle germe de féve, qui aux autres chevaux s'efface vers les six ans. Les chevaux begus ont les dents plus dures que les autres chevaux, ce qui fait que quand ils ont une fois marqué, ils marquent toûjours également aux pinces, aux dents moyennes, & aux coins. Les jumens sont plus sujettes à être beguës que les chevaux ; & parmi les chevaux Polonois, Hongrois, & Cravates, on trouve force chevaux begus. Les maquignons nient qu'il y ait des chevaux begus. Pour distinguer les begus des jeunes chevaux, on examine s'ils ont les dents courtes, nettes, & blanches ; c'est alors un signe de jeunesse. S'ils ont les dents longues, jaunes, crasseuses & décharnées, quoiqu'ils marquent encore à toutes les dents de devant, c'est un signe que ces chevaux sont vieux & bégus. (V)
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BEGUILL | (Hist. nat. bot.) fruit de la grosseur d'une pomme, & couvert d'une écorce rude & noüeuse, sous laquelle il y a une pulpe semblable au fruit de l'arbousier.
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BEGUINES | S. f. (Hist. mod.) c'est le nom qu'on donne dans les Pays-bas à des filles ou veuves, qui sans faire de voeux se rassemblent pour mener une vie dévote & reglée. Pour être aggregée au nombre des béguines, il ne faut qu'apporter suffisamment de quoi vivre. Le lieu où vivent les béguines s'appelle béguinage ; celles qui l'habitent peuvent y tenir leur ménage en particulier, ou elles peuvent s'associer plusieurs ensemble. Elles portent un habillement noir, assez semblable à celui des autres religieuses. Elles suivent de certaines regles générales, & font leurs prieres en commun aux heures marquées, le reste du tems est employé à travailler à des ouvrages d'aiguille, à faire de la dentelle, de la broderie, &c. & à soigner les malades. Il leur est libre de se retirer du béguinage, & de se marier quand il leur plaît. C'est ordinairement un ecclésiastique qui leur est préposé, & qui remplit les fonctions de curé du béguinage. Elles ont aussi une supérieure, qui a droit de les commander, & à qui elles sont tenues d'obéir tant qu'elles demeurent dans l'état de béguines.
Il y a dans plusieurs villes des Pays-bas des béguinages si vastes & si grands, qu'on les prendroit pour de petites villes. A Gand en Flandre il y en a deux, le grand & le petit, dont le premier peut contenir jusqu'à 800 béguines.
Il ne faut pas confondre ces béguines avec certaines femmes qui étoient tombées dans les excès des Béguins & des Begghards, qui furent condamnés comme hérétiques par le pape Jean XII. & dont il ne reste plus aucun vestige. Voyez BEGGHARDS.
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BEHEMOTH | S. m. ce mot signifie en général bête de somme, & toute autre sorte de bétail : il se prend, selon les rabbins, dans Job, pour un boeuf d'une grandeur extraordinaire. Les docteurs talmudistes & les auteurs allégoriques des Juifs, & entr'autres R. Eliezer dans ses chapitres, disent que Dieu créa ce grand animal, appellé behemoth, le sixieme jour, & qu'il paît sur mille montagnes pendant le jour, que l'herbe de ces mille montagnes repousse pendant la nuit, & que les eaux du Jourdain lui servent pour boire. Ils ajoûtent que ce behemoth a été destiné pour faire un grand banquet aux justes à la fin du monde. Les Juifs les plus sensés savent bien à quoi s'en tenir sur ce conte : mais ils disent que c'est une allégorie qui désigne la joie des justes, figurée par ce festin. Cette théologie symbolique tient quelque chose du style des anciens prophetes : nous en voyons même des exemples dans le Nouveau-Testament. Mais les rabbins proposent trop cruement leurs allégories, & y ajoûtent certaines circonstances qui les rendent le plus souvent ridicules. Samuel Bochart a montré dans la seconde partie de son Hieroz. liv. V. chap. xv. que le behemoth de Job est l'hippopotame. Rab. Eliezer, Job, Ludolf, hist. de l'Abyssinie. (G)
* BEHEMOTH, (Hist. nat.) c'est le nom que l'on a donné à l'animal, auquel on prétend qu'ont appartenu les os qui se trouvent en Russie & d'autres contrées, sur-tout du Nord ; ses dents sont d'un ivoire plus beau que celui qui vient des Indes. Les Turcs & les Persans en font des manches de poignards & des poignées de sabre, qu'ils estiment autant que si elles étoient d'argent. Voyez éLEPHANT.
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BEHEN | (en Pharmacie) racine médicinale, en grande estime, sur-tout chez les Arabes, à cause de ses vertus cardiaques, aromatiques, & aléxitériales,
Il y a deux especes de behen ; savoir, le behen album ou blanc, qui est insipide, faisant peu d'impression sur la langue, ou celle d'une petite amertume seulement qu'il laisse après lui. Les botanistes modernes prétendent que c'est la même chose que notre lychnis terrestris ; d'autres veulent que ce soit proprement le papaver spumeum. Le behen rouge, behen rubrum, a des fibres, est brun par dehors & rouge en-dedans : on présume qu'il n'est point différent de notre lemonium maritimum majus, ou lavande marine. L'un & l'autre viennent du Levant ; ils ont les mêmes vertus : on les substitue réciproquement ; il faut les choisir secs, & d'un goût aromatique astringent. (N)
* Le behen blanc est la racine d'une plante qui s'appelle jacea orientalis, patula, carthami facie, flore luteo magno ; elle est longue, noüeuse, sans chevelure ; elle s'étend de côté & d'autre comme la réglisse, à laquelle elle ressemble par sa figure & par sa grosseur, mais elle est plutôt blanche que jaune. De la racine s'éleve une tige unique, de la hauteur d'une coudée, à la partie inférieure de laquelle naissent de grandes feuilles, longues, épaisses, semblables à celles de la patience, soûtenues par de longues queues. Les feuilles ont vers leur base quatre découpures, deux de chaque côté : mais les feuilles qui naissent de la partie supérieure de la tige l'embrassent sans queue, comme dans la perce-feuille ordinaire & le mouron de Crete. Le sommet de cette tige se partage en plusieurs rameaux garnis de petites feuilles, qui portent chacun une fleur composée de plusieurs fleurons, profondément découpés, jaunes, posés sur un embryon, & renfermés dans un calice écailleux, sans épines, jaune. Cet embryon se change dans la suite en une semence en aigrette.
On ne sait rien sur l'origine du behen rouge ; au sentiment des Arabes, l'un & l'autre fortifie, engraisse, forme la semence, est utile dans le tremblement, produit encore d'autres effets salutaires.
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BEHER | (Géog.) ville du Semigalle, en Courlande.
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BEHIMA | (Hist. nat. bot.) herbe qui croit dans la province de Tremecen, en Afrique ; elle engraisse fort promtement les chevaux & le bétail, à qui on n'en laisse manger que jusqu'à ce qu'elle soit en épi ; car alors elle les étrangleroit.
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BEHOUR | ou BEHOURT ou BOHOURT, s. m. (Hist. mod.) mot dont l'origine & la racine sont assez obscures, mais qu'on rencontre fréquemment dans nos anciens romans, pour signifier un combat que l'on faisoit à cheval la lance au poing, ou une course de lances dans les réjouissances publiques. Dans la basse Latinité on l'a appellé behordium, en vieux Gaulois behourt & tournoy, & l'on disoit behorder, behourder, & border, pour marquer les exercices où la jeune noblesse combattoit avec des lances & des boucliers. Les Espagnols en ont retenu quelque chose dans le jeu qu'ils nomment cannas. On appelloit aussi dies de behourdeis, ce que d'autres auteurs ont nommé en bonne Latinité dies hastiludii. Parmi les gens de la campagne & la bourgeoisie des petites villes, le behourd étoit un jour assigné pour joûter avec des cannes & de longs bâtons non ferrés, ce qui se pratique encore en Angleterre à certains jours de l'année ; & Monet assûre que le même usage avoit autrefois lieu en France le premier & le second Dimanche de carême ; & d'autres ajoûtent, que pour exprimer un exercice à-peu-près semblable, les Florentins se servent du terme bagordare. (G)
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BEICHLINGEN | (Géog.) ville d'Allemagne, au comté de même nom, dans le cercle de haute Saxe. Long. 29. 20. lat. 51. 20.
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BEID-EL-OSSA | ou BEID-EL-SSAR, plante égyptienne, dont on trouvera la description & les propriétés dans Prosper Alpin & dans Veslingius. Elle croît aux environs d'Alexandrie ; ses feuilles coupées rendent un suc laiteux : on s'en sert pour dépouiller les peaux de leur poil ; pour cet effet on les laisse macérer dans ce suc.
Le fruit de la plante est environné d'un duvet ou coton fort doux, dont on fait des lits, des coussins, & des meches. Les abeilles se reposent volontiers sur le beid-el-ossar.
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BEIDHAH | (Géographie) ville de la province de Perse proprement dite, proche Schiraz.
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BEIGE | S. f. (Commerce) serge noire, grise ou tannée, que l'on fabrique en Poitou avec la laine, telle qu'on l'enleve de dessus le mouton, tant à la chaîne qu'à la trame. Elle doit avoir trente-huit à trente-neuf portées, & chaque portée vingt fils.
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BEIL | ou BEIE, (Géog. anc. & mod.) ville d'Afrique, au royaume de Tunis, entre Constantine & Tunis. On croit que c'est la Bulla regia des anciens.
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BEILSTEIM | (Géog.) petite ville d'Allemagne, dans la Veteravie, avec titre de comté, entre Marbourg, Nassau, & Coblentz.
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BEIRA | (Géog.) province de Portugal, bornée au septentrion par les provinces entre Minho & Douro, & Tra-los-Montes ; au midi par l'Estramadure Portugaise ; à l'orient par l'Estramadure Espagnole ? à l'occident par la mer. Elle a environ 30 lieues en long, sur autant en large : sa capitale est Coimbre.
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BEIRE | (Géog.) petite ville de France, en Bourgogne, au bailliage de Dijon.
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BEIST | ou BISTI, subst. m. (Commerce) petite monnoie d'argent billoné, à très-bas titre, que beaucoup d'auteurs ont traitée de monnoie de compte. Le beisty est rond, frappé de quelques caracteres bisarres & sans ordre ; il vaut argent de France un sou cinq deniers deux neuviemes.
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BEIZ | ou BEIZATH, (Hist. anc.) mot Hébreu qui signifie un oeuf, & aussi une certaine mesure usitée parmi les Juifs. Ils disent que l'oeuf contient la sixieme partie du log, & par conséquent trois pouces cubes, & cette fraction de pouces 678895/2114907 Voyez LOG. Le beizath est aussi une monnoie d'or usitée parmi les Perses, & qui pese quarante dragmes. Le P. Calmet prétend que c'est de ce mot, & non de la ville de Bysance, qu'est dérivé le mot besam ou besan, nom d'une autre monnoie d'or aussi en usage, du moins autrefois en orient, un besam valoit deux dinars, & chaque dinar vingt ou vingt-cinq dragmes. Voyez BEZANT, DINAR, DRAGME. (G)
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BEJ | ou BEJER, (Géog.) contrée de Barbarie, dans le royaume de Tunis.
* BEJA, (Géog.) ville de Portugal, dans l'Alentejo, près du lac de même nom ; long. 10. 10. lat. 37. 58. On dit qu'il y a dans ce lac une espece de poisson bon à manger, qui présage la pluie & la tempête, & l'annonce par des mugissemens semblables à ceux du taureau ; d'autres attribuent ces mugissemens & le bruit, précurseurs des mauvais tems, à l'agitation des eaux du lac.
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BÉJAUNE | sub. m. se dit, en Fauconnerie, des oiseaux niais & tout jeunes, qui ne savent encore rien faire ; béjaune ou bec-jaune signifie ignorance. Ce terme, béjaune, vient des petits oiseaux qui, avant d'être en état de sortir du nid, ont le bec jaune.
* BEJAUNE ou BEC-JAUNE, (Hist. mod.) c'est ainsi qu'on nomme communément le régal qu'un officier donne à ses camarades en entrant dans un régiment : on dit payer son béjaune.
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BEKAV | ou BEKAWA, (Géog.) petite ville de Pologne, dans le Palatinat de Lublin.
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BEKIA | (Géog.) île de l'Amérique septentrionale, une des Antilles, qui n'est guere fréquentée que par quelques Caraïbes de S. Vincent qui y font la pêche, & y cultivent de petits jardins ; elle manque d'eau-douce ; & abonde en viperes dangereuses. Lat. 12. 24.
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BEL-OUTIL | S. m. chez les Orfevres & les Bijoutiers, c'est une espece de petite enclume très-étroite, fort longue ; un peu convexe & portative, à deux cornes longues, l'une ronde & l'autre quarrée : c'est de-là que plusieurs artistes l'appellent aussi bigorne ou bigorneau. Elle sert au même usage que la bigorne ; mais à des ouvrages concaves qui ont beaucoup de longueur, & dont l'entrée doit être étroite. Les deux bigornes ou cornes longues sont séparées par un petit quarré oblong. Il y a des outils d'orfevre qui portent le même nom de bel-outil, & qui n'ont qu'une corne ; le reste depuis l'origine de la corne, est un quarré oblong & étroit, d'une forme un peu convexe, & qui va en s'allongeant & en conservant la même forme. Voyez ORFEVRE, Planche I. & II.
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BELA | (Géog.) petite ville de Hongrie.
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BELALCAZAR | (Géog.) petite ville du royaume d'Andalousie.
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BELANDR | ou BELANDE, s. m. (Marine) c'est un petit bâtiment fort plat de Varangue, qui a son appareil de mâts & de voiles semblable à l'appareil d'un heu : son tillac ou pont s'éleve de poupe à proue d'un demi-pié plus que le plat-bord ; outre qu'entre le plat-bord & le tillac, il y a un espace d'environ un pié & demi qui regne en-bas, tant à stribord qu'à babord. Les plus grands belandres sont de 80 tonneaux, & se conduisent par trois ou quatre hommes pour le transport des marchandises, ils ont des semelles pour aller à la bouline comme le heu. Voyez HEU. (Z)
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BELATUCADRUS | S. m. (Myth.) nom d'une fausse divinité honorée autrefois en Angleterre, dont il est fait mention dans une inscription trouvée sur une vieille pierre dans la maison du sieur Th. Dikes, dans le comté de Cumberland, qui porte : Deo sancto Belatucadro Aurelius Diatova aram ex voto posuit. L. L. M. M. On trouve encore sur une autre pierre cette inscription au même Belatucadrus : Belatucadro Jul. Civilis Opt. V. S. L. M. & sur une troisieme qui a échappé au recueil des inscriptions de Gruter, & que Cambden a communiquée. On lit dans cette derniere : Deo Belatucadro lib. votum fecit Jolus. Selden dans son ouvrage de Diis Syris, croit que ce Belatucadrus est le même que Belenus & Abellion, nom que les Payens donnoient au soleil qu'ils adoroient particulierement. Gerard Jean Vossius est du même sentiment dans son livre de origine & progressu Idololatr. lib. II. c. 17. Voyez BELENUS. (G)
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BELBAIS | (Géog. anc. & mod.) ville d'Egypte, à l'une des embouchures du Nil ; c'étoit autrefois Peluse.
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BELBIN | ou BELENTINE, (Géog. anc.) ville située à l'entrée de la Laconie, vers le nord, près de l'Eurotas. Plutarque en fait mention dans la vie de Cléomenes.
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BELBO | (Géog.) riviere du duché de Milan.
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BELBUCH | & ZEOMBUCH, (Myth.) divinités des Vandales. C'étoient leur bon & leur mauvais génie : Belbuch étoit le dieu blanc, & Zeombuch le dieu noir : on leur rendoit à l'un & à l'autre les honneurs divins. Le Manichéisme est un système dont on trouve des traces dans les siecles les plus reculés, & chez les nations les plus sauvages ; il a la même origine que la Métempsycose, les desordres apparens qui regnent dans l'ordre moral & dans l'ordre physique, que les uns ont attribués à un mauvais génie, & que ceux qui n'admettoient qu'un seul génie, ont regardés comme la preuve d'un état à venir, où les choses morales seroient dans une position renversée de celle qu'elles ont. Mais ces deux opinions ont leurs difficultés.
Admettre deux dieux, c'est proprement n'en admettre aucun. Voyez MANICHEISME. Dire que l'ordre des choses subsistant est mauvais en lui-même. c'est donner des soupçons sur l'ordre des choses à venir ; car qui a pû permettre le désordre une fois, pourroit bien le permettre deux. Il n'y a que la révélation qui puisse nous rassûrer ; & il n'y a que le Christianisme qui joüisse de cette grande prérogative. Voyez IMMORTALITE & AME.
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BELCASTRO | (Géog. anc. & mod.) ville d'Italie, au royaume de Naples, dans la Calabre ultérieure, sur une montagne. Long. 34. 45. lat. 39. 6.
On la prend pour la Chonia des anciens : mais il y a peu d'apparence qu'elle ait été bâtie sur les ruines de la Petilia, dont il est parlé dans Strabon, Pline, Ptolomée, & Pomponius Méla.
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BELCHITE | (Géog.) petite ville d'Espagne, au royaume d'Aragon, sur la riviere d'Almonazir. Long. 17. lat. 41. 19.
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BELEDIN | S. m. (Commerce) coton filé, d'une médiocre qualité & de peu de débit.
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BELELACS | S. m. pl. (Commerce) especes de taffetas qui se fabriquent au Bengale : leur aunage est de quarante cobres de longueur, deux de large.
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BÉLEMNITE | Nous ne pouvons mieux faire que de rapporter ici l'article de M. Formey, secrétaire de l'académie royale des Sciences & Belles-Lettres de Prusse, sur la bélemnite, qui nous a été remis manuscrit.
" BELEMNITE, (Hist. nat.) ce nom vient de la ressemblance de cette pierre avec le fer d'une fleche. Elle porte aussi celui de dactylus idaeus, à cause de sa conformité avec un doigt de la main, & du mont Ida, où Pline dit qu'on la trouve ; & celui de lapis lyncis, ou lyncusius pris de la fabuleuse origine que les anciens lui donnoient ; parce qu'ils pensoient bonnement que c'étoit de l'urine de lynx changée en pierre. D'autres lui ont donné avec aussi peu de fondement le nom de pierre de tonnerre, pensant qu'elle tomboit du ciel. On trouve la bélemnite dans toutes sortes de lits de terre, de sable, de marne & de pierre ; presque toûjours accompagnée de coquillages ou d'autres dépouilles de l'Océan, & souvent un peu applaties, à demi cassées, ou autrement défigurées par les mouvemens violens des couches de pierre ou de terre qui les ont comprimées, comme il est arrivé à un grand nombre de coquillages, & à d'autres productions marines.
Il y a des bélemnites qui sont chargées de petites huîtres & de petits tuyaux de vers marins, dont la nature est d'être nécessairement attachés aux corps où ils naissent, vivent & meurent sans changer de place ; d'autres ont été rongés par de petits insectes, comme cela arrive souvent aux huîtres & aux autres coquilles de mer. Les bélemnites sont en général d'une figure fort réguliere ; elles different néanmoins en trois manieres entr'elles. Il y en a de parfaitement coniques, d'autres presque cylindriques, dont la pointe paroît au haut après une espece d'arrondissement, qui les fait ressembler à un doigt de la main ; les dernieres ont un renflement à-peu-près comme les fuseaux. Leur longueur est depuis environ deux pouces jusqu'à huit & davantage, & leur grosseur depuis celle d'une plume médiocre jusqu'à trois & quatre pouces de circonférence ; leur couleur bien que différente ne peut point servir à les distinguer, puisqu'elle dépend uniquement des lieux où on les trouve. Elles ont toutes une cannelure plus ou moins marquée, qui regne depuis la base jusqu'à la pointe, mais dont l'enfoncement va toûjours en diminuant ; & c'est cette cannelure qui fait qu'elles se fendent facilement en long. Toutes celles qui sont entieres, ont à leur base une cavité de figure conique, qui differe en largeur & en longueur, selon que ces pierres sont plus grosses & plus longues. Cette cavité est souvent vuide & quelquefois pleine de sable, de crystaux & d'autres matieres. Il en a aussi qui renferment une alvéole fort curieuse, composée de plusieurs petites coupes semblables aux verres des montres de poche, enchassées l'une dans l'autre, & qui toutes ensemble forment un cone parfaitement convenable au vuide de la pierre ; ce qui fait que quoique ces alvéoles soient de différentes matieres, tous les auteurs qui en ont parlé croyent qu'ils appartiennent véritablement à la bélemnite, & qu'ils se sont formés dans sa cavité.
Leur structure inférieure est toûjours absolument la même. Elles sont toutes composées de plusieurs couches très-régulierement rangées, comme les aubiers des arbres, & si minces qu'il faut une loupe pour les distinguer avec quelque exactitude. Leur matiere forme par ses filets presque imperceptibles des rayons qui vont du centre à la circonférence. Ces rayons partent d'un très-petit tuyau, qui occupe toute la largeur de la pierre, & qui n'est bien visible que dans les plus transparentes : d'horisontaux qu'ils sont d'abord, ils s'élevent ensuite peu-à-peu vers la circonférence, surtout en approchant de la pointe. C'est-là la raison pourquoi la partie de la pierre du côté de la base paroît creuse, & l'autre paroît convexe, quand on l'a coupée en travers. Le demi-diametre de la bélemnite qui regarde la cannelure, est toûjours plus court que celui qui lui est opposé ; & l'on remarque par intervalles des lignes longitudinales, qui se terminent en cone autour du petit tuyau. On peut facilement séparer les couches de ces pierres en les mettant sur un charbon allumé, ou à la flamme d'une chandelle. Elles sont en-dedans & en-dehors d'un parfait poli, & deviennent blanches lorsqu'elles sont exposées au feu. Il en sort une mauvaise odeur, comme de corne brûlée, ou d'urine de chat, quand on les frotte l'une contre l'autre, mais sur-tout quand on les brûle.
On agite la question ; si ces pierres sont de vrais minéraux, ou si elles appartiennent à quelque animal, & en ce cas à quelle de ses parties on doit les rapporter. Il faut lire là-dessus les Lettres philosophiques sur la formation des sels & des crystaux, &c. par M. Bourguet. Ce savant de Neufchâtel y établit d'une maniere qui me paroît démonstrative, que les bélemnites n'appartiennent point au regne minéral, vû que les corps les plus réguliers que ce regne fournisse ne gardent point une symmétrie aussi parfaite dans leur structure. Il compare la bélemnite à la stalactite, qui est de toutes les pierres celle qui en approche le plus ; & il fait voir qu'il reste encore une énorme différence entr'elles. Cela le conduit à conjecturer que c'est une dent d'animal ; & quoiqu'on ne puisse pas encore indiquer l'animal auquel elles ont appartenu, la grande conformité qu'a la bélemnite avec les dents d'autres animaux, & particulierement avec les dents droites du crocodile, met cette conjecture dans une fort grande vraisemblance. La cavité de figure conique que les bélemnites entieres ont à leur base, est en effet semblable à celle qu'on voit aux dents du crocodile & du physeter, aux défenses de l'éléphant, & du poisson nahrwal. La cannelure de la même pierre a beaucoup de rapport avec celles des dents de la scie du spadon, qui sont enchâssées dans cette longue défense, comme dans une mâchoire. Enfin ses petits filets sont de même nature que ceux de la structure intérieure de l'émail des dents de presque tous les autres animaux. Quant à l'alvéole, ses couches répondent aux couches de la bélemnite par le moyen des lignes longitudinales, qui forment d'espace en espace de petits cones qui marquent peut-être les divers tems de son accroissement. M. Bourguet répond ensuite aux difficultés de M. Scheuchzer, & de quelques autres Physiciens. Enfin il explique la formation & le méchanisme organique de la bélemnite d'une maniere fort plausible. Comme les animaux auxquels ces dents appartiennent, croissent pendant toute leur vie, il n'est pas étonnant qu'il y ait des bélemnites si différentes en grosseur & en longueur ".
Nous ajoûterons seulement à cet article l'opinion de M. Woodward & celle de M. le Monnier le Medecin, de l'académie royale des Sciences. M. Woodward rapporte dans sa lettre sur l'origine, la nature & la constitution de la bélemnite, que M. Lhwyd prétendoit qu'elle se forme dans le pinceau de mer ou dans le coquillage appellé dentale. Notre auteur réfute ce sentiment par la raison qu'on ne voit jamais aucunes traces du moule dans lequel la bélemnite se seroit formée, comme on voit celle du moule des autres pétrifications ; que le prétendu moule de la bélemnite devroit être bien apparent autour de celles qui ont près de deux piés de longueur, & environ deux pouces de diametre à l'endroit le plus gros ; & que cependant il n'en a apperçû aucun vestige dans des bélemnites de cette grandeur qu'il a observées.
M. Woodward répond ensuite à ceux qui croyent que les bélemnites sont des cornes d'animaux ou des dents de poissons : il soûtient que ce ne sont pas des cornes, parce que la plûpart n'en ont pas la figure ; & pour le prouver, il fait mention de trois principales especes de bélemnites, qui sont la bélemnite conoïde, qui est la plus commune ; la bélemnite en forme de fuseau, & la bélemnite cylindrique terminée en pointe par les deux bouts ; & il conclut que si toutes ces bélemnites ressemblent à des cornes, il n'y a rien qui ne puisse y ressembler. Le même auteur ne croit pas qu'il soit à présumer que la bélemnite soit une corne, parce qu'on la trouve dans la terre avec des coquilles, des dents & d'autres parties d'animaux ; puisqu'il s'y trouve aussi bien d'autres choses qui ne sont certainement pas des cornes. Il nie que toutes les bélemnites ayent une odeur de corne brûlée, c'est-à-dire une odeur animale : il assure que les bélemnites d'Angleterre n'ont ordinairement aucune odeur, & que toutes celles qu'il a trouvées dans la craie n'en ont point du tout ; & il croit que les bélemnites n'ont que l'odeur qui leur a été communiquée par des matieres salines, sulphureuses ou bitumineuses avec lesquelles elles ont séjourné. Enfin M. Woodward soûtient que les bélemnites ne sont ni des cornes ni des dents ; parce que leur pesanteur spécifique est différente de celle des cornes & des dents : les raisons qu'il en donne sont tirées de ses principes sur l'Histoire naturelle de la terre.
C'est en conséquence de ces mêmes principes que M. Woodward met la bélemnite dans la classe des corps talqueux, parce que sa pesanteur est égale à celle de ces corps. La couleur jaune de certaines bélemnites est semblable à celle de quelques talcs, spars, & autres productions minérales.
La substance de la bélemnite, dit M. Woodward, n'est pas coriace & ténace comme celle des animaux, mais friable & cassante comme celle du talc, &c. à la vûe elle paroît minérale ; & on en est convaincu par les épreuves chimiques ; sa tissure, ajoûte le même auteur, est directement contraire à celle des dents, & des autres parties solides des animaux ; ses fibres coupent diamétralement son axe, au lieu que celles des dents, des os, des cornes, &c. sont paralleles à leur axe. Le talc fibreux ou cannelé, le gypse strié, le spar talqueux, l'amiante, l'alun de plume, &c. ont leurs fibres transversales comme celles des bélemnites. L'auteur cite un exemple remarquable de cette tissure, qu'il a observée dans quelques stalactites composées d'un spar talqueux, qui sont suspendues dans des grottes soûterraines ; il y en a vû plusieurs qui étoient cannelées.
De tout ceci M. Woodward conclut affirmativement que les bélemnites ne peuvent venir d'un animal. Quand on lui objecte qu'elles ont été altérées comme d'autres pétrifications, il répond que cela n'est pas possible, parce qu'il en seroit resté au moins quelqu'une sans altération, comme il y a tant de coquilles fossiles qui ne sont pas pétrifiées.
Les tuyaux vermiculaires, les coquilles d'huîtres qui sont attachées sur quelques bélemnites, ne prouvent rien pour leur origine ; puisque l'on trouve les mêmes choses sur des cailloux, des pyrites, &c. D'ailleurs si la bélemnite étoit une dent de poisson, on trouveroit au moins quelques vestiges de cette dent, ou quelques marques de son adhérence à une mâchoire. On aura beau dire que cette dent aura été séparée de la mâchoire, M. Woodward ne conçoit pas que cela puisse être pour toutes les bélemnites qui sont si nombreuses ; tandis que toutes les vraies dents fossiles sont reconnoissables à ces mêmes marques qui manquent aux bélemnites. Géographie, Physique, &c. pag. 363.
M. Le Monnier n'est point opposé au sentiment de M. Woodward, pour l'origine de la bélemnite ; il la croit appartenante au regne minéral. Il en a vû dans le Berri qui étoient entierement solides, & d'autres qui étoient creuses en-dedans : celles-ci avoient une cavité conique comme la surface extérieure de la bélemnite ; l'axe du cone extérieur étoit double de celui du cone intérieur ; desorte que la pointe de la bélemnite étoit entierement solide, & cette solidité alloit toûjours en diminuant jusqu'aux bords de la base, qui n'étoit qu'une lame transparente, & mince comme une feuille de papier ; cette cavité étoit remplie d'une terre très-fine, jaune, grasse & humide, qui paroissoit être, pour ainsi dire, la matrice des bélemnites. M. le Monnier n'a pas vû d'apparence que ces bélemnites fussent des tuyaux, des pointes d'hérisson de mer, non plus que des dents du souffleur ; il lui à semblé au contraire que ce sont des productions de la terre, comme des stalactites ou des pyrites. M. le Monnier appuie cette conjecture sur ce que les bélemnites incrustées dans la pierre & dans la craie, & qui n'ont pour ainsi dire plus de vie, ne renferment point de cette terre jaune & humide, que cette même terre se trouve par-tout où il y a des bélemnites en certaine quantité : & que le feuillet mince, transparent & fragile qui termine la bélemnite, peut être regardé, comme un ouvrage en train, auquel la nature n'a pas encore mis la derniere main. M. le Monnier sait parfaitement que l'on trouve avec les bélemnites des cornes d'ammon, & d'autres coquilles, telles que les gryphytes, les petoncles, les cames, &c. mais il fait remarquer qu'on rencontre aussi dans les mêmes endroits du gypse & des pyrites. Mérid. de l'Observ. de Paris, &c. Observ. d'Hist. nat. p. 125. & suiv.
On voit par cet exposé, que les Naturalistes ne sont point d'accord sur l'origine & la nature de la bélemnite : on n'a pas encore prouvé d'une maniere décisive que ce soit un minéral ou une pétrification originaire du regne animal. (I)
BELEMNITE ou PIERRE DE LYNX, (Mat. med.) Les Allemands la croyent bonne contre le cochemar & le calcul des reins ; ils en ordonnent la poudre depuis un gros jusqu'à un gros & demi. (N)
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BELENOIDE | apophyse bélenoïde, voy. STYLOÏDE. (L)
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BELENO | ou BELENUS, (Myth.) nom que les Gaulois donnoient au soleil, qu'ils appelloient aussi Mithra. On croit que c'est le même que le baal de l'Ecriture, & le Belus des Assyriens. Elias Schedius persuadé que le nom de Belenus étoit mystérieux, jusque dans les lettres qui le composent, les a considérées selon leur valeur dans les nombres (à la maniere des anciens Grecs, dont les caracteres étoient, dit-on, en usage parmi les Druides), & a trouvé qu'elles faisoient trois cent soixante-cinq jours ? tems de la révolution du soleil autour de la terre.
L'on voit plusieurs inscriptions rapportées par Gruter & par d'autres antiquaires, qui prouvent que Belenus étoit la même divinité que le soleil ou Apollon ; entr'autres celle-ci :
Apollini Beleno. C. Aquileiens. felix. (G)
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BELERAN | (Géog.) île de la mer Méditerranée, proche d'Yvica.
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BELESME | (Géog.) ville de France assez ancienne, dans le Perche. Long. 17. 14. 15. lat. 48. 22. 32.
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BELETTE | S. f. (mustela domestica ; (Hist. nat. Zoolog.) petit animal quadrupede dont on a donné le nom à un genre entier de quadrupedes, genus mustelinum. Les animaux de ce genre sont carnassiers : mais ils different des autres animaux carnassiers, en ce qu'ils sont plus petits, qu'ils ont le corps plus mince & plus long, la tête plus petite & plus allongée, & les pattes plus courtes ; desorte qu'ils semblent être faits pour se glisser & s'insinuer à-travers les plus petites ouvertures ; & en effet ils pénetrent dans des endroits dont l'entrée est si étroite, qu'on ne croiroit pas qu'il leur fût possible d'y entrer.
La belette est plus petite que le putois ; le dos & les côtés du corps sont de couleur rousse, la gorge & le ventre sont blancs ; & cette couleur s'étend depuis le bout de la mâchoire inférieure, jusqu'à l'extrémité des pattes de derriere sur leur côté intérieur ; car le côté extérieur, & presque tout le reste du corps est roux ; le museau ressemble à celui du chien, desorte que la mâchoire supérieure est plus avancée que l'inférieure. La belette a des soies en forme de moustache. Ses dents sont au nombre de trente-deux ; six incisives, deux canines, & huit molaires dans chaque mâchoire ; les canines sont longues & fortes : les yeux sont petits & noirs ; les oreilles courtes & larges, arrondies, couvertes de petit poil fort épais : ce qu'il y a de singulier, c'est que la partie postérieure de la conque est double, c'est-à-dire, composée de deux panneaux qui forment une sorte de poche dont l'entrée est au bord de la conque. La queue est assez semblable à celle d'un rat, quoique beaucoup plus courte : les piés sont larges à proportion de la grosseur de l'animal ; il y a cinq doigts à chaque pié, & un petit ongle à chaque doigt. La belette est un animal fort vif & fort agile ; elle habite dans les greniers, dans les vieux murs, dans les étables, & sur-tout dans les trous en terre : elle cherche avec avidité les oeufs des pigeons, des poules, &c. pour les manger. Elle se nourrit le plus souvent de rats, de serpens, de taupes ; elle les surprend dans leurs trous, parce qu'elle est faite de façon qu'elle y pénetre aisément ; & elle est assez courageuse pour attaquer des animaux plus gros qu'elle, comme sont les gros rats ; car on prétend qu'elle leur donne la chasse de quelque espece qu'ils soient. L'agilité de la belette & la finesse de son instinct lui donnent aussi de l'avantage sur les chauvesouris & sur d'autres oiseaux, dont on prétend qu'elle suce le sang après qu'elle les a tués. Ray. Aldrovande. Voyez FOUINE, PUTOIS, QUADRUPEDE. (I)
La belette est d'usage. Après en avoir ôté les boyaux, l'avoir salée & fait sécher à l'ombre, deux gros de cet animal préparé comme on vient de dire, passent pour un remede efficace contre le venin du serpent, & contre toute sorte de poison. Son ventricule rempli de semence de coriandre, & gardé pendant un tems convenable, est salutaire contre l'épilepsie & la morsure des serpens.
La belette calcinée dans un pot de terre, est utile contre les douleurs de la goutte ; son sang diminue les tumeurs scrophuleuses lorsqu'on l'applique dessus ; ses cendres mêlées avec du vinaigre ont la même vertu, Dioscoride. (N)
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BELEZO | (Géog.) ville & palatinat de la Pologne.
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BELFAST | (Géog.) ville d'Irlande au comte d'Antrim, avec château & port.
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BELFORTE | (Géog. anc. & mod.) village du royaume de Naples dans la Calabre ultérieure, près de la riviere de Metramno, au midi de Mileto. On y voit encore les ruines de l'ancienne Subcinum ou Subsicinum des Brutiens.
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BELGAR | ou BELGRAD, (Géog.) ville du duché de Poméranie, sur la Persante.
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BELGE | ou BELGIQUE, (Géog. & Hist. anc.) peuples qui habitoient une des trois parties de la Gaule, qu'on appella Belgique. La Belgique fut soûdivisée dans la suite en Belgique premiere, Belgique seconde, Germanie inférieure, & Germanie supérieure. César la place entre le Rhin, l'Océan, & les rivieres de Seine & de Marne. On donne aujourd'hui le nom de Belgique à la basse Allemagne, qui comprend les 17 provinces des Pays-bas.
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BELGRADE | (Géog. anc. & mod.) ville de la Turquie Européenne, capitale de la Servie, au confluent du Danube & de la Save. Long. 38. 30. lat. 45. Quelques uns croyent que c'est le Taurinum des anciens.
* BELGRADE, (Géog.) petite ville de la Turquie Européenne dans la Romanie, sur le Bosphore de Thrace. Long. 40. 30. lat. 41. 42.
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BELGRADO | (Géog.) petite ville d'Italie dans le Frioul & l'état de Venise. Long. 30. 35. lat. 46.
* BELGRADO, (Géog.) petite riviere de la Romanie en Turquie.
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BELI | voyez COVALAM ; c'est un grand arbre fruitier qui ressemble assez au coignassier, qu'on appelle aussi serifole Bengalensium.
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BELIAL | S. m. (Myth.) nom d'une idole des Sidoniens. S. Paul donne ce nom à Satan ou au démon. S. Jérôme dit que par les enfans de bélial, on doit entendre les enfans du démon, c'est-à-dire les méchans. C'est en ce sens que les deux fils d'Heli, Ophni & Phinées, sont appellés filii belial. Reg. c. ij. v. 12. Parmi les imprécations que Semeï fait à David fuyant devant Absalon, il l'appelle homme de sang, homme de belial ; vir belial ; c'est-à-dire, cruel & méchant. II. Reg. c. xvj. vers. 7. Aquila explique ce mot par celui d'apostat : il renferme, selon d'autres, une espece d'injure qui répond à nos mots François de fainéant & de vaurien. Gregorii lexic. sanct. (G)
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BELIC | S. m. terme de Blason qu'on employe quelquefois au lieu de gueules, pour signifier couleur rouge. On dit aussi belif. Voyez. GUEULES. (V)
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BELIER | (Géog.) riviere de Catalogne qui se jette dans la Méditerranée proche de Barcelone.
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BELIERES | subst. f. pl. en terme de Metteur-en-oeuvre, se dit de certains petits anneaux d'or ou d'argent auxquels on suspend une pendeloque ou un pendant. On nomme béliere du talon, celle qui reçoit l'une ou l'autre de ces choses ; & béliere du cliquet, celle qui passe sous le tendon de l'oreille, & retient toûjours la bouche du même côté. Voy. CLIQUET & TALON.
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BELILLA | (Hist. nat. bot.) arbrisseau indien qui porte des baies, & sur le compte duquel on ne tarit point : on lui attribue une foule de propriétés médicinales qu'on peut voir dans le dictionnaire de Medecine ; nous ne les rapporterons point ici, parce que nous n'ajoûtons pas beaucoup de foi aux propriétés des choses qui nous paroissent aussi peu connues que le belilla, dont on n'a qu'une phrase botanique.
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BELIN | (Marine) Voyez BLIN.
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BELINCE | S. f. (Commerce) tiretaine grossiere, fil & laine, qui se fabrique à Beauchamp le vieil, en Picardie.
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BELINGELA | (Hist. nat. bot.) c'est un fruit qui se trouve en Afrique & en Amérique : ses racines sont grosses & courtes, ses feuilles grandes, d'un verd obscur, & remplies de veines brunes tirant sur le pourpre. Elle porte deux ou trois fleurs blanches mouchetées de rouge ; le fruit à l'extérieur est rond, uni & brillant comme une pomme ; le dedans est plein de chair, & contient beaucoup de semences. Les habitans du Bresil en font un très grand cas. Il n'est pas sain de le manger crud : mais en le faisant cuire, & l'assaisonnant avec du poivre & de l'huile, il prend un goût aigrelet & agréable, qui a quelque rapport avec celui du citron.
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BELINZONA | (Géog.) ville de la Suisse, sur le Tessin aux frontieres du Milanois.
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BELITZ | (Géog.) petite ville de la Marche de Brandebourg, sur l'Ada.
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BELIZANA | (Myth.) nom sous lequel les Gaulois adoroient Minerve, inventrice des Arts. Elle étoit représentée sans lance & sans guide, revêtue d'une tunique sans manches ; les piés croisés, & la tête appuyée sur sa main droite, comme une femme qui médite. On auroit pû lui ôter encore son casque & son aigrette.
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BELLA | BELLA
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BELLA-POLA | (Géog.) île située dans le golfe de Napoli, en Morée.
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BELLAC | (Géog.) petite ville de France, dans la Marche, sur la petite riviere d'Unicon. Long. 18. 48. lat. 46. 4.
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BELLADONE | S. f. belladona, (Hist. nat. bot.) genre de plante à fleur monopétale en forme de cloche, découpée sur ses bords. Il s'éleve du calice un pistil, qui est attaché comme un clou à la partie postérieure de la fleur, dont la base devient dans la suite un fruit presque rond, mou, partagé en deux loges par une cloison mitoyenne. Ce fruit renferme plusieurs semences attachées à un placenta. Tournefort, inst. rei herb. Voyez PLANTE. (I)
BELLADONE ou SOLANUM, lethale offic. solanum maniacum multis, seu belladona. J. B. 3. 611. Les fruits & les feuilles aussi-bien que les tiges de cette plante sont assoupissans, & très-dangereux : leur usage intérieur est très-équivoque. On lit dans les mémoires de l'académie 1703, que des enfans ayant mangé de ces fruits, eurent une fievre violente avec des convulsions & des battemens de coeur terribles ; ils perdirent la connoissance & les sens, & tomberent dans une aliénation d'esprit. Un petit garçon de quatre ans mourut le lendemain ; on lui trouva trois plaies dans l'estomac avec des grains de solanum écrasés, & des pepins enfermés dans les plaies, le coeur livide, nulle sérosité dans le péricarde : ces faits furent attestés par M. Boulduc.
Le remede à ces maux est le vomissement, procuré en bûvant de l'eau miellée, ou du vinaigre en grande quantité.
Les feuilles & les fruits sont bons appliqués extérieurement ; ils sont adoucissans & résolutifs ; on s'en sert sur les hémorrhoïdes & sur le cancer : on les fait bouillir avec le saindoux, & on en compose une pommade pour les ulceres carcinomateux, & pour les durillons des mammelles. Ces avis sont de Mrs. Ray & Tournefort.
Les peintres en mignature font macérer le fruit, & en préparent un beau vert. (N)
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BELLAGINE | ou BILAGINES, subst. f. plur. (Jurisprudence) c'est le recueil des loix municipales des Goths, ainsi appellé par Diceneus des mots saxons by, qui signifie habitation, bourg ou ville, & lagen, loi.
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BELLANO | (Géog.) ville sur le lac de Come, dans le Milanois.
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BELLE | EMBELLE, s. f. (Marine) c'est la partie du pont d'en-haut, qui regne entre les haubans de misene & les grands haubans ; & qui ayant son bordage & son plat-bord moins élevé que le reste de l'avant & de l'arriere, laisse cet endroit du pont presqu'à découvert par les flancs. Pendant un combat on met des pavois & des gardes-corps pour fermer ou boucher la belle. C'est ordinairement par la belle qu'on vient à l'abordage. Voyez HERPE & EMBELLE.
La belle est presque toûjours au tiers du vaisseau ou à l'endroit où l'on prend le gros du vaisseau. Voy. Pl. I. L'espace entre les lettres L & K est la belle.
Aborder en belle ; voyez ABORDER. (Z)
BELLE, terme de riviere, sorte de perche de frêne dont on se sert sur les bateaux pour soûtenir les bannes ou toiles.
BELLE DE NUIT, (Hist. nat. bot.) plante qui doit se rapporter au genre appellé jalap. Voyez JALAP. (I)
Cette plante est fort commune dans les jardins, où elle orne les parterres & les boulingrins. On l'appelle quelquefois merveille du Pérou. Elle s'éleve de deux piés, est assez garnie de feuilles pointues & d'un beau verd ; ses fleurs de couleur rouge ou de jaune & de blanc, forment un tuyau évasé en entonnoir à cinq parties qui sont jointes ensemble avec deux calices, dont le premier lui sert d'enveloppe, & le second d'appui, qui devient un fruit rempli de semence. La belle de nuit ne fleurit qu'en automne, & ne s'épanoüit que le soir, d'où elle a pris son nom. On la transplante dans les parterres parmi les plantes de la grande espece, à l'ombre si l'on peut : on la met encore dans des pots. Elle se seme sur couche à claire voie, & demande à être arrosée. (K)
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BELLE-FACE | (Manége) Voyez CHANFREIN.
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BELLE-ISLE | (Géog.) île de France à six lieues de la côte de Bretagne, dans l'évêché de Vannes, d'environ six lieues de long sur deux de large.
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BELLEGARDE | (Géog.) ville de France en Bourgogne sur la Sône, avec titre de duché.
BELLEGARDE, (Géog.) ville de France dans le Roussillon, au-dessus du col de Pertuis sur la frontiere de Catalogne, entre Ceret & Jonquieres. Long. 20. 30. lat. 42. 20.
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BELLERIES | (Médecine) espece de myrobolans. Voyez MYROBOLANS.
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BELLEVILLE | (Géog.) petite ville de France dans le Beaujolois, près de la Sône. Long. 22. 16. lat. 45. 5.
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BELLE | ou BELLAY, (Géog.) ville de France, capitale du Bugey, proche le Rhone. Long. 23. 20. lat. 45. 43.
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BELLICULE | S. f. (Hist. nat.) c'est une espece de limaçon de mer ou poisson à coquille umbilicaire, blanche, avec des taches jaunes, ou jaune avec des raies noires.
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BELLIDASTRUM | (Hist. nat. bot.) genre de plante qui ne differe de la paquerette que parce que ses semences sont garnies d'aigrettes, & que la couche de la fleur n'est pas faite en pyramide. Nova plantarum genera, &c. par M. Micheli. Voyez PLANTE. (I)
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BELLIGAMME | (Géog.) contrée du royaume de Jasnapatman, dans l'île de Ceylan.
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BELLINUS | (Myth.) c'est le même que Belenus. Voyez BELENUS. De tous les pays de la Gaule où Bellinus avoit des autels, il n'y en avoit aucun où il fût plus révéré qu'en Auvergne.
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BELLI | ou MARGUERITE, leucanthemum. Voyez MARGUERITE.
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BELLOC | (Géog.) petite ville de France en Béarn, sur le gave de Pau.
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BELLONAIRES | (Hist. anc.) prêtres de Bellone, la déesse des combats. Lorsqu'on les admettoit au sacerdoce, ils se faisoient des incisions à la cuisse ou au bras, & recevant dans la paume de la main le sang qui sortoit de cette blessure, ils en faisoient un sacrifice à leur déesse. Cette cérémonie violente ne fut plus que simulée dans la suite. Ces prêtres étoient des fanatiques, qui dans leurs enthousiasmes prédisoient la prise des villes, la défaite des ennemis, & n'annonçoient que meurtre & que carnage. (G)
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BELLONE | S. f. bellonia, (Hist. nat. bot.) genre de plante dont le nom a été dérivé de celui de Pierre Belon, medecin de Caen, qui a écrit sur les arbres coniferes, & sur d'autres parties d'histoire naturelle. La fleur des plantes de ce genre est monopétale, rayonnée & découpée : il s'éleve du fond du calice un pistil, qui est attaché comme un clou au milieu de la fleur. Le calice devient dans la suite un fruit dur, d'une figure ovoïde pointue, rempli de petites semences. Plumier, Nova plant. Amer. gen. Voyez PLANTE. (I)
BELLONE, (Myth.) déesse de la guerre, qu'on représentoit armée d'un casque & d'une cuirasse, les cheveux épars & en désordre, avec une pique à la main & un flambeau ; ou une espece de foüet ensanglanté. Communément ses temples étoient hors des villes, parce qu'on la regardoit comme une divinité turbulente : Arnobe même l'a mise au nombre des divinités infernales. Elle en avoit un à Rome près de la porte Carmentale, où le sénat donnoit audience publique aux ambassadeurs qu'il ne jugeoit pas à propos de recevoir dans la ville. Il y avoit dans ce temple une petite colonne nommée bellica, sur laquelle on mettoit une pique lorsqu'on étoit prêt de déclarer la guerre à quelque ennemi ; ou, comme d'autres prétendent, par-dessus laquelle les consuls ou les féciaux lançoient un javelot le plus loin qu'ils pouvoient, comme s'ils l'eussent jetté dans le pays ennemi, pour déclarer la guerre. (G)
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BELLONS | (Hist. mod.) c'est une espece de lampe usitée en Espagne, que l'on place sur un pié d'argent ou d'autre métal fort évasé. Chaque lampe a huit ou dix tuyaux par où l'on fait passer la meche ; ce qui fait que ces lampes éclairent parfaitement ; & pour augmenter encore la lumiere, on place derriere une plaque d'argent bien polie, qui la refléchit. On y brûle ordinairement de l'huile très-pure.
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BELLUNO | (Géog.) ville d'Italie, capitale du Bellunois dans la Marche-Trévisane, sur la Piave. Long. 29. 45. lat. 46. 9.
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BELMONT | (Géog.) petite ville de France dans le Quercy, généralité de Montauban.
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BELNAUX | S. m. pl. (Oeconom. rust.) ce sont des especes de tombereaux qui servent à la campagne au transport des fumiers dans les terres. Comme ils sont lourds, on leur préfere les charettes.
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BELOÉRE | (Hist. nat. bot.) plante indienne, toûjours verte. Nous ne dirons rien de ses propriétés, parce qu'on ne nous en apprend pas assez pour la connoître.
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BELOMANTIE | S. f. (Divination) espece de divination qui se faisoit avec des fleches ; du grec , arme de jet, dard, fleche, &c. & , divination. Elle étoit fort en usage chez les Orientaux pour prendre les augures, surtout avant que de commencer les expéditions militaires. " Le roi de Babylone, dit Ezéchiel en parlant de Nabuchodonosor, s'est arrêté à la tête des deux chemins ; il a mêlé des fleches dans un carquois pour en tirer un augure de la marche qu'il doit prendre. Le sort est tombé sur Jérusalem, & lui a fait prendre la droite ". D'où il s'ensuit que la belomantie se pratiquoit de cette sorte. Celui qui vouloit tirer un augure sur son entreprise, prenoit plusieurs fleches, sur chacune desquelles il écrivoit un mot relatif à son dessein & pour ou contre ; il brouilloit ensuite & confondoit ces fleches dans un carquois ; & la premiere qu'il tiroit le décidoit, suivant ce qu'elle portoit écrit. Le nombre des fleches n'étoit pas déterminé ; quelques-uns le font monter à onze : mais Pocockius, dans son Essai sur l'histoire des Arabes, remarque que ces peuples, dans une espece de divination semblable à la belomantie, & qu'ils nomment alazalam, n'employent que trois fleches ; l'une sur laquelle ils écrivent ces mots : le Seigneur m'a commandé ; sur la seconde ceux-ci : le Seigneur m'a empêché, & ne marquent rien sur la troisieme. Si du vase où ils ont mis ces trois fleches ils tirent du premier coup la premiere ou la seconde, c'en est assez pour leur faire exécuter le dessein qu'ils ont projetté, ou pour les en détourner. Mais si la troisieme leur tombe d'abord sous la main, ils la remettent dans le vase jusqu'à ce qu'ils en ayent tiré une des deux autres, afin d'être absolument décidés. Voyez DIVINATION.
Il est encore mention dans le prophete Osée, ch. vj. d'une espece de divination qu'on faisoit avec des baguettes, & qui a plus de rapport à la rhabdomantie qu'à la belomantie. Voyez RHABDOMANTIE. Grotius & S. Jérôme confondent ces deux sortes de divinations, & prouvent que la belomantie eut lieu chez les Mages, les Chaldéens, les Scythes ; que ceux-ci la transmirent aux Sclavons, de qui les Germains la reçurent. (G)
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BELON | S. m. (Medecine) maladie extrèmement commune en Derbyshire, à laquelle les animaux, la volaille & les hommes sont sujets ; en général elle regne dans toutes les contrées infectées de l'odeur de la mine de plomb : c'est pourquoi on distingue un certain espace autour des lieux où l'on travaille la mine de plomb, que l'on appelle la sphere du belon. Il est très dangereux pour tout animal de paître dans cet intervalle. Les symptomes concomitans de cette maladie sont la langueur, la foiblesse, des douleurs insupportables, des tiraillemens dans le ventre, & généralement la constipation. Elle est ordinairement mortelle. La méthode de la guérir la plus heureuse, est d'ordonner aux malades la crême ou les crystaux de tartre en petite dose, mais fréquemment réitérés ; par exemple, deux ou trois fois par jour. Il faut remarquer que le sucre de saturne pris avec excès, produit la même maladie : elle a été occasionnée dans des personnes à qui on l'avoit ordonné, pris en remede contre les fleurs blanches. Voyez PLOMB. (N)
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BELOUSES | S. f. pl. (Paumier) ce sont des trous pratiqués sur la table d'un billard, dans lesquels on tâche de faire entrer les billes en les frappant avec d'autres billes. Il y a ordinairement six belouses sur une table de billard, savoir une à chaque coin, & deux autres dans le milieu de la longueur des deux grands côtés.
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BELT | (Géog.) nom de deux détroits de Danemarck, dont l'un est appellé le grand Belt, & l'autre le petit Belt.
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BELUS | (Myth.) c'étoit la grande divinité des Babyloniens. S'il est vrai que la tour de Babel lui ait servi de temple, le paganisme n'a point eu d'autels plus anciens que ceux de Belus. Les rois de Babylone y amasserent successivement des thresors immenses, que Xerxès pilla au retour de son expédition de Grece. Ce fut alors que le temple fut démoli : il en reste une belle description dans le premier livre d'Herodote. Les prêtres de Belus avoient persuadé aux habitans de Babylone, que le dieu honoroit de sa présence toute vierge Babylonienne, qui se rendoit dans un lit magnifique qu'on avoit dressé dans le lieu du temple le plus élevé ; & toutes les nuits Belus avoit une compagne nouvelle. Ce Belus, qui accueilloit si bien les filles de Babylone, étoit le soleil pendant le jour, ou la nature elle-même qu'on adoroit sous son nom. Dans la suite, le premier roi des Assyriens, qui porta le nom de Belus, ayant été mis au rang des dieux, on confondit ce Belus avec la grande divinité des Assyriens. Il y eut beaucoup d'autres princes de ce nom ; & Cicéron appelle du nom de Belus, le cinquieme de ses Hercules.
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BELUTE | (LES) s. m. plur. (Géog.) peuple de voleurs & de vagabonds, qui vivent sous des tentes, & se tiennent aux environs de Candahar, entre les frontieres de Perse & l'empire du Mogol.
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BELUTTA | BELUTTA
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BELVEDERE | S. m. (Architecture) mot italien qui signifie belle vûe ; c'est ordinairement un petit bâtiment situé à l'extrémité d'un jardin ou d'un parc pour y prendre le frais, & s'y mettre à l'abri de l'ardeur du soleil ou des injures du tems. Les belvederes ne sont composés, pour la plûpart, que d'un salon percé à jour, ainsi qu'il s'en voit dans plusieurs de nos maisons royales ; ou bien d'une seule piece à pans, elliptique ou circulaire, fermée de portes & croisées, comme est celui de Sceaux, nommé le pavillon de l'aurore ; ou enfin ils sont composés de plusieurs pieces, savoir de vestibules, salons, cabinets, chambres à coucher, garde-robes, tels qu'on l'a pratiqué à la ménagerie de Sceaux, nommée ainsi parce que ce bâtiment est situé au milieu du jardin potager, dans lequel sont distribuées les basse-cours de la ménagerie.
Lorsqu'un bel aspect, une campagne fertile, des prés, des vallons, étalent avec éclat les dons de la nature, & que ces points de vûe, qui font les délices de la campagne, se trouvent éloignés du château d'une distance assez considérable, alors on distribue plusieurs appartemens dans ces belvederes, pour s'y rassembler par choix & sans tumulte : mais dans ce cas, on nomme ces bâtimens trianons. V. TRIANON.
La décoration extérieure d'un belvedere doit être tenue simple & rustique ; & leur interieur, au lieu de lambris, doit être revêtu de marbre ou de pierre de liais, à moins que ces pavillons par leur proximité ne soient assez près du château pour être souvent visités dans les différentes saisons par les maîtres ou par les étrangers. (P)
On appelle aussi très-souvent belvedere, en jardinage, un simple berceau élevé sur quelque montagne ou terrasse ; ce peut être aussi une éminence ou plate-forme élevée & soûtenue par des talus de gason, pour joüir de la belle vûe dont le belvedere a pris son nom. On voit un fort beau belvedere en forme de palais, dans les jardins de Bagnolet, & dans ceux de Meudon, de S. Cloud, & de Marly : on en trouve tout de gason. (K)
BELVEDERE, s. f. (Hist. nat. bot.) plante qui doit être rapportée au genre nommé patte d'oye. Voyez PATTE D'OYE. (I)
La belvedere, linaria, (Jardinage) est une plante que les Latins appellent linaria, qui jette plusieurs tiges à la hauteur de deux piés, garnies de feuilles semblables à celles du lin. Ses fleurs sont jaunes, fermées en-devant par deux levres en forme de mâchoires. Il s'éleve du calice un pistil qui se change en un fruit à deux baies remplies de semences.
Cette plante se multiplie par la graine que l'on seme en pleine terre pour la replanter. On la trouve dans les lieux incultes, & on la met sur une plate-bande ou dans des pots : elle aime assez l'ombre, & forme un buisson. (K)
* BELVELDERE, (Géog.) ville de Grece, capitale de la province du même nom, dans la Morée. La province est située sur la côte occidentale de la mer.
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BELZELINGEN | (Géog.) ville de Suisse dans le canton d'Uri.
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BELZIC | (Géog.) petite ville de Pologne, dans le palatinat de Lublin.
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BELZIEH | (Géog.) ville de l'électorat de Saxe.
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BEME | S. m. (Hist. mod.) autel des Manichéens, ou jour de fête qu'ils célebroient en mémoire de la mort de Manès leur fondateur. Beme en général signifie aussi sanctuaire. De tous les laïcs, il n'y avoit chez les Grecs que l'empereur qui pût entrer dans le beme.
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BEMILUCIUS | (Mythol.) surnom d'un Jupiter jeune & sans barbe, qui avoit ses autels dans la province que nous nommons la Bourgogne, aux environs de l'endroit où est maintenant l'abbaye de Flavigny.
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BÉMOL | en Musique, voyez B. MOL. (S)
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BEN | subst. m. (Hist. nat. bot.) petite noix de la grosseur d'une aveline, de figure tantôt oblongue, tantôt arrondie, triangulaire, couverte d'une coque blanchâtre, médiocrement épaisse, fragile, contenant une amende assez grosse, couverte d'une pellicule fongueuse, blanche, de la consistance d'une aveline. On estime celle qui est récente, pleine, blanche, & se sépare aisément de sa coque : on l'apporte d'Egypte.
C'est le fruit d'un arbre appellé glans unguentaria, qui a deux sortes de feuilles, l'une simple, & l'autre branchue. La branchue prise depuis l'endroit où elle tient à la tige, est composée d'une côte molle, pliante, cylindrique, grêle, semblable au petit jonc ou à un rameau de genêt, mais une fois plus menue ; de cette côte sortent des queues ou petites côtes d'une palme & plus de longueur, fort écartées les unes des autres, mais toûjours rangées deux à deux, garnies chacune de quatre ou de cinq conjugaisons de feuilles, qui se terminent aussi en une pointe fort menue. Le tout ensemble forme la feuille branchue : mais ces rameaux de feuilles en portent d'autres petites à leurs noeuds, toûjours posées deux à deux, de figure & de grandeur différentes ; car les premieres sont à pointes mousses, comme les feuilles du tournesol ; celles qui sont au milieu sont plus pointues & semblables à celles du myrte ; & celles qui sont à l'extrémité sont plus petites & plus étroites, & approchent de celles de la renouée. Elles tombent toutes en hyver ; d'abord les petites feuilles, puis toute la feuille branchue ; c'est pourquoi Aldinus l'appelle feuille. Si c'étoit une branche, dit cet auteur, elle ne tomberoit pas. La racine de cette plante est épaisse, semblable en quelque façon à celle du navet, noire en dedans, & peu branchue. Le fruit, selon Bauhin, est une gousse longue d'une palme, composée de deux cosses, cylindrique, grêle, partagée intérieurement en deux loges, renflée depuis son pédicule jusqu'à son milieu, contenant une noisette dans chaque loge. Cette gousse est pointue ou en forme de stylet, recourbée en bec à son extrémité, roussâtre en-dedans, brune ou cendrée en-dehors, cannelée & ridée dans toute sa longueur, coriace, flexible, de la nature des écorces, insipide, un peu astringente & sans suc. Chaque loge contient une noisette de médiocre grosseur, triangulaire, laquelle renferme sous une coque & sous une pellicule blanche & fongueuse une amande triangulaire, grasse, blanchâtre, un peu acre, amere, huileuse, & qui provoque le vomissement.
On trouve par l'analyse, que la noix de ben contient beaucoup d'huile épaisse, une certaine huile essentielle, acre, & brûlante, en petite quantité à la vérité, mais unie à un sel ammoniacal : c'est cette huile subtile & acre qui purge & fait vomir.
La noix de ben est contraire à l'estomac, trouble les visceres, purge avec peine & lentement, & a quelque causticité. Les parfumeurs vantent son huile, parce qu'elle se rancit difficilement, & qu'étant sans odeur, elle ne gâte point celle des fleurs.
Voici comment on tire les odeurs des fleurs par le moyen de cette huile : on prend un vaisseau de verre ou de terre, large en-haut, étroit par bas ; on y met de petits tamis de crin par étage ; on arrange sur ces tamis des fleurs par lits, avec du coton cardé bien menu & imbibé d'huile de ben : on laisse le tout dans cet état pendant quatre heures, puis on jette les fleurs. On en remet d'autres avec le même coton, & l'on réitere jusqu'à ce que l'huile soit suffisamment imprégnée de l'odeur des fleurs : on finit par exprimer l'huile du coton.
Il y a une autre espece de noix de ben, appellée mouringou ; elle croît sur un arbre haut d'environ 25 piés, & gros d'environ 5 piés. Voyez sa description à l'article MOURINGOU.
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BEN | ou BECCABENA, royaume de Nigritie.
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BEN | ou BENE, (Géog.) petite ville du Piémont, avec titre de comté. L. 25. 30. lat. 44. 29.
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BENACHUS | (Géog. anc. & mod.) un des plus grand lacs de l'Italie, dans l'état de Venise. Nous l'appellons aujourd'hui lac de Garde.
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BENADKI | (Géog.) petite ville de Boheme.
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BENARES | (Géog.) ville de l'Indostan, sur le Gange ; c'est où les bramines tiennent leurs écoles.
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BENARI | oiseau. Voyez ORTOLAN. (I)
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BENATAGE | S. m. c'est ainsi qu'on nomme dans les Salines, la fonction des bénatiers. Voyez BENATIERS & BENATE.
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BENATE | S. f. (terme de Saline) c'est une espece de caisse d'osier capable de contenir douze pains de sel. On donne aussi le nom de benate à la quantité de sel qui entre dans la benate. Voyez BENATIERS.
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BENATH | S. f. (Medecine) nom que les Arabes donnent à de petites pustules qui s'élevent sur le corps pendant la nuit après la sueur. (N)
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BENATIERS | S. m. pl. ouvriers occupés dans les salines de Moyenvic, au nombre de dix-huit, à assembler des bâtons de bois avec des osiers & de la ficelle, & à en former des especes de paniers capables de contenir douze pains de sel, ce qu'on appelle une benate. Voyez BENATE.
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BENAUGE | (Géog.) petite contrée de la Guienne province de France, le long de la Garonne, au midi de Bordeaux, en allant vers l'orient.
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BENAVARRI | (Géog.) ville d'Espagne, au royaume d'Aragon. Long. 18. 10. lat. 41. 55.
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BENAVENTE | (Géog.) ville d'Espagne, au royaume de Léon, dans la tierra de Campos, avec titre de duché, sur la riviere d'Ezla. Long. 12. 30. lat. 42. 4.
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BENDA | (Géog.) ville de la Macédoine, appartenante aux Turcs.
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BENDARMARSSE | ou BENJARMASEN, (Géog.) ville d'Asie, capitale du royaume de même nom, dans l'île de Borneo, sur la riviere de Benjarmasse. Longit. 131. 20. lat. mérid. 2. 40.
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BENDE | ou TEKIN, (Géog.) ville de la Turquie Européenne, dans la Bessarabie, sur le Niester.
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BENDERICK | (Géog.) ville & port sur le golfe Persique.
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BENDIDIES | adj. pris subst. (Mythol.) fêtes qui se célébroient à Athenes, dans le Pyrée, en l'honneur de Diane Bendis ; elles y furent apportées par des marchands qui fréquentoient les côtes de la Thrace. Voyez BENDIS.
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BENDIMIR | (Géog.) fleuve de Perse qui tombe dans le golfe de Bengale.
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BENDIS | (Mythol.) nom que les peuples de Thrace donnoient à Diane. Les uns prétendent qu'ils entendoient par ce mot la terre ; d'autres, la lune. Les fêtes qu'on célebroit en son honneur différoient peu des bacchanales ; elles précédoient de quelques jours les panathénées, & elles se faisoient dans le Pyrée.
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BENEDICTINS | S. m. pl. (Hist. ecclés.) moines ainsi nommés de S. Benoît, Benedictus, dont ils suivent la regle.
C'est aux Bénédictins proprement que convient le nom de moines, monachi ; & les plus éclairés d'entre eux, tels que les PP. Mabillon, Martenne, Ruinard, &c. s'en sont fait honneur à la tête de leurs ouvrages ; celui de religieux convenant plus particulierement aux autres ordres & congrégations. Voyez MOINES & RELIGIEUX.
Dans le droit canon, les Bénédictins sont appellés moines noirs, à cause de la couleur de leur habit, par opposition à celle des ordres blancs. Ils n'étoient connus autrefois en Angleterre que sous ce nom. Cet habit est composé d'une robbe & d'un scapulaire noirs, avec un petit capuce de même couleur, qu'ils portent dans l'intérieur de leur maison & en voyage. Au choeur & lorsqu'ils vont en ville, ils mettent pardessus une ample chape de serge noire à grandes manches, avec un capuchon qui se termine en pointe.
L'ordre de Saint-Benoît a été florissant dès sa naissance. Il subsiste depuis plus de treize cent ans avec un éclat qui a été rarement obscurci ; également distingué par les sciences & par la piété, il a été l'asyle des lettres dans les siecles où il sembloit qu'elles n'en dûssent avoir aucun, & a donné à l'Eglise un très-grand nombre de saints, de souverains pontifes, de cardinaux, patriarches, archevêques, évêques, &c.
Les réformes qu'y ont introduit en divers tems plusieurs personnages éminens en sainteté, l'ont partagé en plusieurs branches ou congrégations. Saint Odon, abbé de Cluny, commença la réforme de cet ordre vers l'an 940, & de-là est venu l'ordre ou la congrégation de Cluny. Celle de Sainte Justine de Padoue & du Mont-Cassin, s'est établie en Italie en 1408, & s'est renouvellée en 1504. Celle de Saint Maur en France a commencé en 1621, & s'est depuis soûtenue avec beaucoup de gloire : elle a produit ces hommes dont les noms ne périront jamais dans la république des lettres, qui nous ont donné d'excellentes éditions de presque tous les PP. de l'Eglise, & beaucoup d'autres qui se distinguent encore par leur vertu & leurs lumieres. La réforme de Saint Vanne & de Saint Hydulphe, établie en Lorraine en 1600, s'est aussi rendue célebre par les savans ouvrages qui en sont sortis ; tels que ceux de dom Calmet & de dom Remi Ceillier.
L'ordre de Saint-Benoît a été la tige de plusieurs autres, dont les plus considérables sont ceux de Camaldoli, de Valombreuse, des Chartreux, de Citeaux, de Grammont, des Célestins, &c. qui ont rendu de grands services à la religion, ou par leur doctrine, ou par l'édification de leur vie, & qui suivent tous pour le fond la regle de S. Benoit. Voyez CAMALDULES, CHARTREUX, CITEAUX, &c.
Il y a aussi des religieuses appellées Bénédictines, dont on attribue l'institution à sainte Scholastique, soeur de S. Benoît : elles suivent la regle de ce patriarche des moines d'Occident. (G)
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BÉNÉDICTION | S. f. (Théol.) l'action de bénir, c'est-à-dire de souhaiter quelque chose d'heureux, soit par des signes, soit par des paroles. Cette cérémonie a été en usage de toute antiquité, tant parmi les Juifs que parmi les Chrétiens.
Les Hébreux entendent souvent sous ce nom les présens que se font les amis ; apparemment parce qu'ils sont d'ordinaire accompagnés de bénédictions & de complimens de la part de ceux qui les donnent, & de ceux qui les reçoivent. Voyez Gen. xxxiij. 2. Josué, xv. 19. I. Reg. xxv. 27. xxx. 26. IV. Reg. v. 15. &c. les bénédictions solemnelles que les prêtres donnoient au peuple dans certaines cérémonies : par exemple, Moyse dit au grand-prêtre Aaron : Quand vous bénirez les enfans d'Israël, vous direz : que le Seigneur vous bénisse & vous conserve ; que le Seigneur fasse briller sur vous la lumiere de son visage ; qu'il ait pitié de vous ; qu'il tourne sa face sur vous, & qu'il vous donne sa paix. Il prononçoit ces paroles debout à voix haute, & les mains étendues & élevées. Les prophetes & les hommes inspirés donnoient aussi souvent des bénédictions aux serviteurs de Dieu & au peuple du Seigneur. Les pseaumes sont pleins de pareilles bénédictions. Les patriarches au lit de la mort bénissoient leurs enfans & leur famille. Le Seigneur ordonne que le peuple d'Israël étant arrivé dans la terre promise, on assemble toute la multitude entre les montagnes d'Hébal & de Garizim, & que l'on fasse publier des bénédictions pour ceux qui observent les lois du Seigneur sur la montagne de Garizim, & des malédictions contre les violateurs de ces lois, sur la montagne d'Hébal. C'est ce que Josué exécuta après qu'il eut fait la conquête d'une partie de la terre de Chanaan. Voyez l'article HEBAL, num. vj. 24. Genes. xxvij. xljx. Tob. vij. 7. Deut. xj. Josué, &c.
Bénédiction signifie aussi abondance. Celui qui seme avec épargne moissonnera peu ; & celui qui seme avec bénédiction, moissonnera avec bénédiction, avec abondance : & encore : Je les ai prié de passer chez vous, afin que cette bénédiction que vous avez promise soit toute prête, & qu'elle soit, comme elle est véritablement, une bénédiction, & non un don d'avarice ; & Jacob souhaite à son fils Joseph les bénédictions du ciel, ou la pluie & la rosée en abondance ; les bénédictions de l'abysme, l'eau des sources ; les bénédictions des entrailles & des mammelles, la fécondité des femmes & des animaux. Et le Psalmiste : vous remplirez tout animal de bénédiction, de l'abondance de vos biens. Cor. jx. 6. 5. Gen. xljx. 15. Ps. cxljv. 16. D. Calmet, dict. de la Bible, tom. I. pag. 307. (G)
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BÉNÉFICE | GAIN, PROFIT, LUCRE, éMOLUMENT, (Grammaire) Le gain semble dépendre beaucoup du hasard ; le profit paroît plus sûr ; le lucre est plus général, & a plus de rapport à la passion ; l'émolument est affecté aux emplois ; le bénéfice semble dépendre de la bienveillance des autres. Le gain est pour les joüeurs ; le profit pour les marchands ; le lucre pour les hommes intéressés ; l'émolument pour certaines gens de robe & de finance ; & le bénéfice pour celui qui revend sur le champ. Le joüeur dira, j'ai peu gagné ; le marchand, je n'ai pas fait grand profit ; l'employé, les émolumens de mon emploi sont petits ; le revendeur, accordez-moi un petit bénéfice ; & l'on peut dire d'un homme intéressé, qu'il aime le lucre.
BENEFICE, s. m. (Droit canoniq.) office ecclésiastique auquel est joint un certain revenu qui n'en peut être séparé. Ce nom vient de ce qu'au commencement les évêques donnoient quelquefois aux ecclésiastiques qui avoient long-tems servi, quelque portion des biens de l'Eglise pour en joüir pendant un tems, après lequel ce fonds revenoit à l'Eglise ; ce qui ressembloit aux récompenses que les empereurs accordoient aux soldats romains en considération de leurs services ; d'où l'on appelloit ces soldats, milites beneficiarii ; & d'où quelques auteurs tirent l'origine de nos fiefs. Ce nom a passé ensuite aux ecclésiastiques, à qui on a donné de semblables fonds pour subsister. Leur véritable origine ne paroît pas avoir précédé le viij. siecle, où l'on fit le partage des biens d'Eglise. On ne laisse pourtant pas que de trouver quelques vestiges des bénéfices dès l'an 500, sous le pape Symmaque : on voit qu'alors on donna à un clerc qui avoit bien servi l'Eglise, un champ en fonds qu'il posséda, & dont il tira sa subsistance. On trouve de plus dans un canon du premier concile d'Orange, tenu en 441, quelques traces de la fondation des bénéfices, & du droit de patronage tant ecclésiastique que laïque : mais ce n'étoit pas l'ordinaire avant le viij. siecle ; communément les ecclésiastiques subsistoient des revenus des biens des églises & des oblations des fideles que l'évêque distribuoit entr'eux. Du tems de Charlemagne, les curés & les autres ministres de l'Eglise joüissoient de revenus fixes & certains, & percevoient des dixmes ; & cette coûtume s'établit dans tout l'Occident. Ce fut alors que ces titres ecclésiastiques furent appellés bénéfices, & que chaque clerc eut un revenu attaché à son titre.
Les bénéfices sont ou séculiers ou réguliers. Les séculiers sont l'évêché, les dignités des chapitres ; savoir, la prevôté, le doyenné, l'archidiaconné, la chancellerie, la chantrerie ; les charges d'écolâtres ou capricol, ou théologal, de thrésorier, de chefcier, & les canonicats, qui sont des places de chanoines, ou sans prébende, ou avec prébende, ou avec semi-prébende. Les autres bénéfices séculiers les plus ordinaires, sont les simples cures, les prieurés-cures, les vicaireries perpétuelles, les prieurés simples, & les chapelles.
Les bénéfices réguliers sont l'abbaye en titre, les offices claustraux qui ont un revenu affecté, comme le prieuré conventuel en titre, les offices de chambrier, aumônier, hospitalier, sacristain, célérier, & autres semblables. Les places de moines anciens & non-réformés, sont regardés presque comme des bénéfices. On ne donne pourtant proprement ce nom qu'aux offices dont on prend des provisions.
On divise encore les bénéfices en bénéfices sacerdotaux, bénéfices à charge d'ames, & bénéfices simples. Les bénéfices sacerdotaux sont des bénéfices ou dignités ecclésiastiques, qu'on ne peut posséder sans être prêtre, ou en âge de l'être du moins dans l'année. Les bénéfices à charge d'ames sont ceux dont le pourvû a jurisdiction sur une certaine portion de peuple, dont l'instruction est confiée à ses soins ; tels sont les évêchés & les cures. Enfin les bénéfices simples sont ceux qui n'ont ni charge d'ames, ni obligation d'aller au choeur, & qui par conséquent n'obligent point à résidence ; telles sont les abbayes ou prieurés en commande, & les chapelles chargées seulement de quelques messes, que l'on peut faire célébrer par d'autres.
Il y a des irrégularités qui empêchent de posséder des bénéfices ; telles que la bâtardise, la bigamie, la mutilation, le crime public pour lequel on peut être repris de justice, & le crime ecclésiastique, comme l'hérésie, la simonie, la confidence, &c. qui emportent privation du bénéfice. Les casuistes disputent sur la pluralité des bénéfices ; quelques-uns la croyent illégitime ; le plus grand nombre la croit permise, & l'Eglise la tolere. En Angleterre, la plûpart des bénéfices ont été supprimés du tems de la réformation, parce qu'alors les biens ecclésiastiques ont passé dans les mains des laïcs. Fleury, Instit. au droit ecclés. tom. I. part. II. chap. xjv. xjx. & xxviij.
BENEFICES CONSISTORIAUX, grands bénéfices, comme les évêchés, abbayes & autres dignités, ainsi appellés, parce que le pape en donne les provisions après une délibération faite dans le consistoire des cardinaux. On donne ce nom en France aux dignités ecclésiastiques dont le Roi a la nomination, suivant le concordat fait entre le pape Léon X. & François I. Mais ce concordat n'a fait que renouveller un droit que les rois de France avoient possédé dès le commencement de la monarchie. Grégoire de Tours, Aimoin, & nos anciens historiens sont pleins d'exemples qui prouvent que nos rois de la premiere race disposoient des évêchés. Ils en parlent en ces termes : talis episcopus ordinatus est jussu regis, ou assensu regis, ou decreto regis. Cet usage continua sous la seconde race. Loup, abbé de Ferrieres, rapporte que le roi Pepin obtint le consentement du pape pour nommer aux grandes dignités ecclésiastiques, ceux qu'il en jugeroit les plus capables pour le bien de son état. Hincmar, archevêque de Rheims, & Flodoard, parlent aussi de ces nominations. C'est ce qu'on voit encore dans le second concile d'Aix-la-Chapelle, tenu sous Louis le Débonnaire. Les rois successeurs d'Hugues Capet en userent ainsi, comme le témoigne, en plusieurs endroits de ses épîtres, Fulbert évêque de Chartres, qui vivoit dans le xj. siecle, du tems du roi Robert. Il est vrai que dans le xij. les papes disposerent de plusieurs de ces bénéfices : mais vers le commencement du xiij, sous Philippe Auguste, les élections eurent lieu, desorte néanmoins que le roi les autorisoit, & l'évêque élû ne pouvoit être consacré sans le consentement du prince. Le concordat n'a donc fait que rendre au roi le droit de nomination aux grands bénéfices, que quelques-uns disent appartenir au roi de France en qualité de Roi ; parce que le choix des prélats est une chose importante pour la conservation de l'état, & que ce monarque est le premier patron & protecteur des églises de son royaume. Les autres rois & princes souverains joüissent d'un pareil droit ; & cette nomination a eu lieu en Hongrie, en Espagne, dans les Pays-Bas, à Venise & en Savoie. Elle étoit aussi en usage en Angleterre & en Ecosse avant la réformation, & le roi y nomme encore aux archevêchés & évêchés : mais on ne peut plus appeller ces dignités bénéfices consistoriaux, depuis que le pape n'en donne plus la confirmation. Pithou, traité des libert. de l'Eglise Gallic. (G)
BENEFICE, en terme de Droit civil, signifie en général une exception favorable accordée par la loi ou par le prince, qui rend l'impétrant habile à une fonction ou une qualité dont il étoit incapable à la rigueur. Tels sont le bénéfice d'âge, voyez AGE ? le bénéfice de cession, voyez CESSION ; de division, voyez DIVISION ; de discussion, voyez DISCUSSION ; d'inventaire, voyez INVENTAIRE, &c.
Bénéfice se prend aussi quelquefois pour un simple privilége ou droit favorable. C'est en ce sens qu'on dit, que le bénéfice du vendeur sert à l'acheteur. (H)
BENEFICE, (Commerce) signifie avantage, gain, profit. On dit qu'un marchand a du bénéfice sur le marché ou la vente de certaines marchandises.
Quand on dit qu'un banquier fait tenir de l'argent d'une place à l'autre avec bénéfice, cela doit s'entendre qu'au lieu de demander quelque chose pour l'échange, il donne du profit. Quand le change est au pair, il n'y a ni bénéfice ni perte.
On nomme bénéfice d'aunage, le profit qui se rencontre sur l'aunage des étoffes, des toiles, &c. Il y a des endroits où, quoique l'aune soit égale à celle de Paris, on ne laisse pas de trouver un bénéfice considérable sur l'aunage, par la bonne mesure que donnent les fabriquans pour attirer les marchands. Ainsi, par exemple, à Roüen on donne vingt-quatre aunes de toile pour vingt aunes, ce qui est quatre aunes de bon ou de bénéfice sur chaque fois vingt aunes. Voyez AUNAGE. (G)
BENEFICES, s. m. (Hist. anc.) terme dont les anciens se servoient pour signifier les fonds de terre qu'on donnoit aux vieux soldats ou vétérans, pour récompense de leurs services ; & c'est de là qu'on appelloit ces soldats beneficiarii milites. Les Turcs en usent encore aujourd'hui de même à l'égard de leurs spahis ou timariots. Voyez SPAHIS & TIMARIOT. (G)
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BÉNÉFICIABLE | adj. (Chimie) profitable ; il se dit ordinairement d'une mine. On dit qu'une mine est bénéficiable, lorsqu'on veut dire qu'elle peut être exploitée avec profit ; qu'on en peut tirer du bénéfice. Pour rendre une mine bénéficiable, il faut en séparer ce qui détruiroit le métal, ou ce qui l'empêcheroit de se séparer de sa mine. (M)
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BÉNÉFICIAIRE | adj. pris subst. terme de Droit, qui ne se dit qu'en un seul cas, à savoir en parlant de l'héritier qui a pris des lettres de bénéfice d'inventaire. Voyez INVENTAIRE.
En pays coûtumier, l'héritier pur & simple en ligne collatérale exclut le bénéficiaire ; secus en ligne directe : mais en pays de Droit écrit, l'héritier pur & simple n'exclut pas le bénéficiaire, même en collatérale.
L'héritier bénéficiaire a l'administration de tous les biens de la succession, dont il doit un compte aux créanciers & légataires, pour le reliqua duquel, s'il se trouve redevable, ils ont hypotheque sur ses propres biens, du jour qu'il a été déclaré héritier bénéficiaire. (H)
* BENEFICIAIRES, s. m. pl. (Hist. anc.) c'est ainsi qu'on appelloit dans les troupes romaines ceux qui servoient volontairement, soit pour obtenir les bonnes graces & la faveur des consuls, soit pour obtenir quelque récompense des chefs. Ils étoient rangés sous les drapeaux dans les cohortes ; ils ne montoient point la garde ; ils étoient dispensés de travailler aux fortifications & aux campemens. Ils faisoient l'office de centurions, en cas de besoin, & portoient comme eux la branche de vigne. Le terme bénéficiaire se prend en différens sens, & tout ce que nous venons de dire de leurs fonctions a été sujet à bien des changemens.
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BÉNÉFICIAL | qui concerne les bénéfices. Cet adjectif ne se trouve employé qu'au féminin, ainsi l'on dit des causes, des matieres bénéficiales : mais on ne diroit pas des codes bénéficiaux. (H)
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BÉNÉFICIATURES | S. f. plur. (terme de Droit ecclésiastiq.) sortes de bénéfices amovibles, qui ne peuvent se résigner, & peuvent vaquer par l'absence, comme les bénéfices de chantres ou vicaires, choristes, chapelains. Les bénéficiatures ne peuvent être appellées qu'improprement bénéfices ; ce sont plûtôt des places destinées à des prêtres chargés pour ce de rendre un service actuel à l'église, & que le chapitre peut destituer, s'ils y manquent pendant deux mois de suite, sans qu'il soit nécessaire de faire précéder aucune monition canonique ; monitions sans lesquelles, suivant le droit commun, on ne pourroit pas priver de son bénéfice un véritable bénéficier.
On appelle aussi les bénéficiatures, bénéfices serfs. Voyez BENEFICE. (H)
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BÉNÉFICIER | v. neut. en Chimie, c'est exploiter les mines avec bénéfice, avec profit. (M)
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BENESCHAU | (Géog.) il y a deux villes de ce nom ; l'une dans le royaume de Boheme, & l'autre en Silésie.
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BENEVENT | (Géog.) ville d'Italie au royaume de Naples, près du confluent du Sabato & du Calore. Long. 32. 27. lat. 41. 6.
* BENEVENT, (Géog.) petite ville de France dans le Limosin.
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BENEVOL | adj. (terme de Droit ecclésiastique) est un acte par lequel un supérieur octroye une place monacale dans sa maison, à un religieux d'un autre ordre, qui est dans le dessein de se faire transférer dans le sien. Il doit avoir ce bénévol, pour être en état d'obtenir le bref de translation, de peur qu'il ne se trouve sans cloître & sans demeure fixe. Voyez GIROVAGE. (H)
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BENFELD | (Géog.) ville de France, en Alsace, sur l'Ill. Long. 25. 15. lat. 48. 14.
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BENGALE | (Géog.) royaume d'Asie, aux Indes, sur le golfe de même nom. Il est traversé par le Gange, & habité par des Gentils & des Mahométans très-dissolus. Les femmes y sont bien faites, fort parées & très-voluptueuses.
Il prend son nom de sa capitale, qui est située sur une des bouches du Gange. Le commerce s'y fait tant par les étrangers que par les habitans. On y trouve des marchands de tous les endroits de l'Asie. On y prend des soies, du poivre, du riz, du salpetre, des bois de teinture, la terra-merita, les lacques, des cires, de l'indigo, du camphre, de l'esquine, de l'aloès, de la gomme-gutte, & des cannes. Les villes les plus marchandes du Bengale, sont Kassambazar, Ougli, Pipeli, & Bellezoor : on y ajoûte Patna, quoiqu'elle ne soit pas du Bengale. On trouve à Ougli les marchandises les plus précieuses des Indes. Il se fait des soies en grande quantité à Kassambazar. Choupar, de la dépendance de Patna, fournit le salpetre. Il faut porter au Bengale de l'argent du Japon, du cuivre, de l'étain de Malaca, du vermillon, du mercure, du plomb, des tables, des cabinets vernis, de la porcelaine, de l'écarlate, des miroirs, des draps, de l'ivoire, des épiceries, & même des oiseaux. On tire encore du Bengale du borax, des tapisseries, des couvertures, des fruits, du beurre, des diamans, & autres pierres ; mais sur-tout des coutils, des basins, & des toiles. Ces dernieres marchandises sont les objets les plus importans de son commerce. Ce commerce se fait intérieurement par les Benjans, voyez BENJANS ; l'extérieur, par les vaisseaux hollandois particulierement.
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BENGALI | (Hist. nat. bot.) c'est une plante du Bresil ; ses racines sont courtes & grosses, les feuilles ont la couleur & l'odeur des feuilles de choux ; elle porte deux ou trois fleurs monopétales & hexagones. Le fruit est de la grandeur d'une pomme, fort agréable au goût, mais dangereux, parce qu'il est trop froid.
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BENGEBRE | (LES), s. m. pl. (Géog.) peuples d'Arabie qui n'ont point de demeure fixe ; ils font des courses continuelles, & attaquent souvent les caravanes qui vont à la Meque.
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BENGI-EIRI | (Hist. nat. bot.) espece de ricin indien, toûjours verd, & qui croît dans le Malabar. C'est encore une de ces plantes auxquelles on attribue d'autant plus de propriétés, qu'on les connoît moins ; & l'on a raison, car il est difficile d'être démenti.
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BENGUELA | (Géog.) royaume d'Afrique, sur la côte occidentale, entre le royaume d'Angola & le Jaga, avec ville de même nom, qu'on appelle aussi Saint-Philippe ou le vieux Benguela.
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BENI-ARAX | (Géog.) ville d'Afrique au royaume d'Alger. Long. 17. lat. 35.
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BENIGHEIM | (Géog.) ville du duché de Wirtemberg, en Suabe.
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BENIN | adj. usité en Medecine ; il se donne aux maladies dont les symptomes ne sont point fâcheux, & dans lesquelles le malade n'est pas exposé à un grand danger. C'est dans ce sens que les auteurs ont distingué la petite vérole en benigne & maligne. La fievre se divise aussi en fievre simple ou benigne, & en fievre maligne. Voyez FIEVRE.
Benin, se dit aussi d'un médicament doux, c'est-à-dire dont l'action n'est pas violente. (N)
* BENIN, (Géog.) capitale du royaume de même nom, en Afrique, sur le golfe de Guinée ou de Saint-Thomas. Le roi de Benin est puissant, il peut mettre en peu de tems 100000 hommes sur pié ; il ne se montre en public qu'une fois l'an, alors on honore sa présence en égorgeant quinze ou seize esclaves. Quand il meurt, la plûpart des princes de sa cour le suivent au tombeau : on tue un bon nombre de sujets pour leur faire compagnie, & on enterre avec le monarque ses habits & ses meubles. Les Beniniens ont du courage & de la générosité ; cependant ils sont tous esclaves, & portent une incision sur le corps, en signe de servitude. Les hommes n'osent porter d'habit, qu'ils ne l'ayent reçu du roi ; les filles ne se vêtissent que quand elles sont mariées ; c'est leur époux qui leur donne le premier habit ; ainsi les rues sont pleines de personnes de l'un & de l'autre sexe toutes nues. Le privilége du monarque d'être accompagné sous la tombe par les principaux seigneurs de sa cour, s'étend à ceux-ci : on immole sur leurs cadavres une partie de leurs esclaves. Les jours suivans on célebre des fêtes sur leur tombeau, & l'on danse au son du tambour. Ces peuples ne rendent aucun culte à Dieu ; ils prétendent que cet être étant parfaitement bon de sa nature, n'a pas besoin de prieres ou de sacrifices : mais ils adressent les unes & les autres au diable, par la raison contraire. Ils ont des idoles. Benin est près de la riviere Formosa. Long. 26. lat. 7. 40.
Les Européens n'y font pas grand commerce, cependant on en pourroit tirer des étoffes de coton, du jaspe, des femmes, des peaux de léopard, & du corail. Il faudroit leur porter des étoffes riches, des draps rouges, de l'écarlate, des pendans d'oreilles, des miroirs, des pots de terre, des fruits, du cuivre, & du fer. Les Hollandois font ce commerce. Les autres commerçans de l'Europe y sont moins fréquens, parce qu'ils ne sont point attirés par l'or, les cuirs, les esclaves, &c. & autres marchandises précieuses, pour lesquelles ils s'exposeront plûtôt à de grands dangers, que d'avoir affaire aux tranquilles & fideles habitans du Benin, qui n'ont que des choses communes à leur donner. Ils se sont fait une loi particuliere de ne point vendre d'hommes : ils ont moins de scrupule pour les femmes, soit qu'ils en fassent moins de cas dans leur pays, soit qu'ils connoissent assez bien les contrées éloignées, pour savoir que l'esclavage n'y est pas fort dur pour elles.
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BENINGANIO | (Hist. nat. bot.) fruit qui croît dans la baie de Saint Augustin. Il est de la grosseur du limon, & rouge au-dedans : on peut en manger.
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BENITIER | S. m. en Architecture, est un vase de marbre de figure ronde ou ovale, & isolé, porté sur une espece de balustre : ou une coquille sur quelque console, & attachée à un pilier à l'entrée d'une église. (P)
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BENJANS | S. m. plur. (Hist. mod. & Commerce) sorte d'Indiens répandus dans toute l'Asie, par les mains desquels se fait tout le commerce. Ils font le courtage pour les compagnies de France, d'Angleterre & de Hollande. Ils ne le cedent en rien pour l'expérience, pour l'habileté & l'avidité du gain, ni aux Arméniens ni aux Juifs. Ils font aussi la banque. Ils ont beaucoup de crédit, & sont d'assez bonne foi. Ils ont des caisses où l'on peut déposer en sûreté son argent.
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BENJOIN | (Hist. nat. & mat. méd.) benzoinum offic. substance résineuse inflammable, quelquefois rougeâtre, d'autres fois d'une couleur pâle, & ordinairement fort sale ; d'une odeur agréable, tant soit peu acre au goût, & fort employée dans les parfums. Elle vient des îles Philippines & de Sumatra : les anciens ne l'ont pas bien connue. Le benjoin convient dans les asthmes, il atténue le phlegme qui embarrasse les poumons, il est salutaire dans les ulceres de ce viscere : mais on donne la préférence à ses fleurs dans les maladies internes.
On doit choisir le benjoin pur & débarrassé de parties hétérogenes, autant qu'il sera possible : on doit rejetter celui qui est noir & sans odeur.
Préparation de benjoin. La teinture de benjoin se fait en versant sur une quantité de benjoin réduite en poudre de l'esprit-de-vin, & le faisant bouillir jusqu'à ce que la teinture soit fort riche. Cette teinture est chaude, odoriférante, amere, & balsamique ; elle est cordiale, sudorifique, &c. Le lait virginal se prépare en versant quelques gouttes de cette teinture sur une grande quantité d'eau ; il en naîtra sur le champ un mélange blanc, laiteux, opaque, appellé pour cette raison lait virginal. Ce lait est un cosmétique innocent : si on s'en lave le visage, il prendra une couleur douce & vermeille, & se couvrira d'une peau claire & brillante, si on le laisse sécher dessus.
La résine de benjoin est bonne, prise à l'intérieur, pour fondre & résoudre les obstructions de la poitrine ; elle entre pour cette raison dans les pilules de Morton.
Les fleurs tirées par la sublimation sont pectorales, mais sur-tout dans l'asthme humide : elles atténuent & résolvent les viscosités des bronches : on les prend sous toutes sortes de formes : elles donnent une odeur agréable à toutes les compositions où elles entrent. La dose est depuis trois grains jusqu'à dix ou douze. (N)
* On en trouve de deux sortes dans les boutiques : le premier s'appelle amygdaloïde ; il est pâle, d'un rouge brun, & contient des grains blancs comme des amandes ; l'autre est noirâtre & n'a point de taches, ou très-peu. L'arbre qui donne le benjoin est grand ; il a la feuille du citronnier, plus petite cependant, moins luisante, & blanchâtre en-dessous, & la fleur du laurier, & les porte renfermées au nombre de cinq, dans une enveloppe commune qui n'a point de pédicule, composée de quatre feuilles, & assez semblable à celle qui entoure la fleur du cornouiller. Chacune de ces fleurs a un pédicule aussi long que l'enveloppe, avec un calice propre, découpé en six quartiers jaunes & très-étroits, huit ou neuf étamines de la longueur du calice, placées autour d'un embryon ovoïde, surmonté d'un style simple. Cet embryon occupe le fond du calice, & les étamines naissent de ses bords : ses fruits sont des noix de la grosseur des muscades, arrondies, applaties, composées d'une écorce charnue, moins épaisse que celle des noix ordinaires, raboteuses en-dehors, & cendrées, vertes en-dedans, & d'une coque un peu applatie, cendrée, dont la substance est plus mince & plus tendre que celle de la noisette. Cette coque renferme une amande blanchâtre ou verdâtre intérieurement, & couverte d'une peau rougeâtre & ridée.
Quant à la maniére de recueillir sa résine, quand l'arbre a cinq ou six ans, on lui fait des incisions longitudinales & un peu obliques, qui pénétrent jusqu'au bois dans la partie supérieure, à la couronne du tronc, vers l'origine des branches. C'est par ces incisions que coule la résine, d'abord blanche, ténue, glutineuse, transparente ; peu-à-peu elle se fige, se durcit, & devient jaune & rougeâtre. Si on la sépare de l'arbre à tems, elle est belle & brillante ; si l'on tarde trop, elle devient sale & brune. Le même arbre n'en donne pas plus de trois livres, & n'en donne qu'une fois ; on le coupe après la premiere récolte, & l'on en plante un autre, parce que les jeunes arbres donnent plus de résine & la donnent meilleure que celle des vieux arbres.
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BENNE | S. f. (Commerce) c'est une voiture qui sert de mesure à charbon dans la Flandre. La benne contient 25 vaux ou 18 queues, & la queue 2 mannes. Pour faire une benne de charbon, il faut au moins six cordes de bois ; la corde de bois revient rendue à Namur à dix escalins, & la benne à seize florins.
On nomme aussi benne un petit vaisseau qui sert à charger des bêtes de somme, pour transporter des grains, de la chaux, la vendange, &c. elle tient deux minots.
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BENOIT-DU-SAUT | (S.) Géog. petite ville de France au diocèse de Bourges.
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BENOITE | S. f. caryophillata. (Hist. nat. bot.) genre de plante à fleur en rose, composée de plusieurs feuilles disposées en rond, qui sortent des échancrures d'un calice d'une seule piece, & en forme de bassin. Le pistil s'éleve du milieu de ce calice, & devient dans la suite un fruit presque rond, sur lequel sont attachées plusieurs semences, terminées chacune par un prolongement en forme de queue. Tournef Inst. rei herb. Voyez PLANTE. (I)
BENOITE, caryophillata offic. germ. 842. La benoite est amere ; elle donne au vin où elle est infusée un goût & une odeur agréable, & le rend plus cordial ; elle appaise les douleurs des intestins, elle est céphalique & alexipharmaque. La racine, qui est la seule qu'on employe, rougit le papier bleu ; elle sent le clou de girofle : le sel approche du sel ammoniac, mais il est fort chargé d'acide, & enveloppé de beaucoup d'huile essentielle & de terre. Le vin de la benoite nommée ci-dessus, est stomacal, apéritif, vulnéraire, & détersif. L'extrait de cette plante a les mêmes vertus : on l'ordonne dans les rhûmatismes. (N)
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BENSHEIM | (Géog.) petite ville d'Allemagne dans l'électorat de Mayence, sur un ruisseau. Long. 26. 15. lat. 49. 49.
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BENTHEIM | (Géog.) petite ville d'Allemagne avec château, au comté de même nom, dans le cercle de Westphalie, sur le Vecht. Long. 24. 43. lat. 52. 23.
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BENTIVOGLIO | (Géog.) petite ville à château d'Italie dans le Bolonois. Long. 29. 4. lat. 44. 37.
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BÉORI | S. m. (Hist. nat.) animal des Indes occidentales qui ressemble à un veau, dont la peau est épaisse & dure, & qui vit d'herbes sauvages. C'est tout ce qu'on dit de cet animal, peut-être mieux connu & décrit par les Naturalistes sous un autre nom.
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BEOTARQUE | S. m. (Hist. anc.) nom de dignité chez les Thébains. Thebes étant la plus considérable ville & la capitale de la Béotie, les magistrats & généraux qui y étoient chargés du gouvernement portoient pendant leur administration le nom de béotarques, c'est-à-dire commandans ou gouverneurs de la Béotie. Ce mot est composé du nom de la province, & du grec , commander. (G)
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BÉOTIE | (Géog. anc. & mod.) province de Grece dite aujourd'hui Stramulipe ; on la place ordinairement dans l'Achaïe ou la Livadie. Elle étoit renfermée jadis entre la Phocide, la Thessalie, la Doride, l'Attique, la mer Egée, ou l'Archipel & le Négrepont. On la divisoit en haute & basse : la haute comprenoit la ville de Lebadia, dite aujourd'hui Bodia, Cheronée, Orchomene, Platée, Amphiclée, Leuctres, Hyampolis, Coronée, Thespie, &c. la basse comprenoit Thebes capitale du pays, qu'on appelle aujourd'hui Stives, Phocie, Mycalessus ou Malacassa, Anthedon, Tanagrada, &c.
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BEQUARRE | en Musique, voyez B QUARRE. (S)
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BEQUETTE | S. f. dans plusieurs Arts méchaniques, tels que celui du Damasquineur, de l'Epinglier, du Serrurier, du Plombier, du Chaînetier, de l'Orfévre, &c. & même du Verrier ; ce sont des pinces ou tenailles à main à branches rondes & recourbées, & dont les pointes, appellées aussi becs, sont courtes, fortes, rondes, & coniques toutes deux, ou toutes deux plates, ou l'une ronde & l'autre plate. Voyez BEQUETTE de Chaînetier & d'Epinglier.
BEQUETTE de Chaînetier ; c'est un outil de la longueur de sept ou huit pouces ; la partie d'en-bas, faite comme celle des pinces ordinaires, est convexe & plate ; ses branches jointes de même aux deux tiers par un clou rivé, ont la facilité de s'ouvrir & de se fermer, chaque bec de la partie haute est rond, de la grosseur du doigt : le Chaînetier s'en sert pour contourner & former les gros chaînons.
BEQUETTE d'Epinglier, c'est une espece de tenailles dont une mâchoire est pyramidale & l'autre ronde, & diminuant de grosseur vers son extrémité. Elle sert à tourner le fil de fer ou de laiton comme il plaît à l'ouvrier, soit qu'il fasse des crochets, des portes, des claviers, & des hameçons : Voyez ces mots à leur article. Cet outil se nomme aussi bec-d'âne & de canne.
BEQUETTE de Fondeur de petit-plomb ; c'est encore une sorte de petite pince dont l'ouvrier se sert pour tirer la branche du moule. V. BRANCHE & MOULE.
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BEQUILLER | v. act. (Jardinage) est le même que béchotter, pour signifier le petit labour que l'on donne tous les mois aux orangers & aux autres arbres encaissés, afin de rendre meuble la terre, qui est trop battue sur la superficie d'une caisse, & que les arrosemens puissent pénétrer jusqu'aux racines de l'arbre.
Ce labour doit être fort leger, fait à la houlette autour d'un arbre encaissé, semblable à celui que l'on appelle binage en fait d'entretien de bois & de pépiniere.
On peut encore béquiller une planche de laitue, de chicorée, de fraisier, d'asperges, avec une serfoüette ; ce qui ne produit toûjours qu'un très-petit labour. (K)
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BEQUILLON | S. m. terme de Fleuriste, qui signifie les petites feuilles arrondies qui garnissent le dedans de l'anémone, c'est-à-dire qui sortent de la peluche de certaines anémones. Un béquillon pour être beau, doit être large & arrondi par le bout ; c'est une marque que la fleur est forte. (K)
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BER | (Hist. nat. bot.) grand arbre ou pommier des Indes, qui porte beaucoup de feuilles, de fleurs, & de fruit. Il a la feuille semblable à celle du pommier, d'un verd obscur & blanchâtre par le bas, & velue comme celle de la sauge ; la fleur petite, blanche, à cinq pétales, & sans odeur ; & le fruit comme la jujube, mais plus agréable au goût. On le trouve sur les côtes de Malabar & de Malaca. On le nomme aussi Malaïo. On dit qu'on trouve sur cet arbre la gomme lacque ; & l'on attribue à ses feuilles la qualité d'arrêter le cours de ventre.
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BERACA | (Hist. ecclés.) c'est le mot qui designe la bénédiction que donne, parmi les Juifs, sur le boire & sur le manger, celui qui se trouve être le plus qualifié de l'assemblée.
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BERAMS | S. m. (Comm.) toile toute fil de coton, unie ou rayée, qui vient de Surate. La blanche porte dix-neuf aunes sur sept huitiemes de large : la rayée, qui est de couleur, a onze aunes 1/2 sur trois quarts.
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BERAR | (Géog.) province de l'empire du Mogol en Asie, près du royaume de Bengale. Shapour en est la capitale.
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BERAUN | (Géog.) ville de Boheme, capitale du cercle du même nom, sur une riviere. Long. 31. 55. lat. 50. 2.
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BERAY | (Géog.) ville de France dans la haute-Normandie, avec titre de comté, sur la Carantone. Long. 18. 20. lat. 49. 6.
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BERBICE | (LA) Géog. riviere de l'Amérique en Terre-Ferme, qui se jette dans la mer du Nord, au 6. 30. de latitude. Les Hollandois y ont des établissemens fort considérables : ils y ont fait, ainsi qu'à Surinam, de grandes plantations de caffé. Ils ont apporté du caffé de Moka ; ils ont cultivé ce caffé dans leurs serres d'Amsterdam ; & quand les plantes ont été assez fortes pour supporter le voyage, ils les ont transportées à Surinam & à Berbice.
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BERCAD | (Géog.) ville de Pologne dans le palatinat de Braclaw.
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BERCE | oiseau. Voyez GORGE-ROUGE. (I)
BERCE, s. f. sphondylium, (Hist. nat. bot.) genre de plante à fleurs en rose, disposées en ombelle. Chaque fleur est composée de plusieurs feuilles inégales faites en forme de coeur, disposées en rond & soûtenues par un calice. Ce calice devient dans la suite un fruit composé de deux grandes semences applaties, ovoïdes, échancrées par le haut, & cannelées. Ces semences quittent ordinairement leurs enveloppes, & sont marquées de quelques traits à l'endroit par où elles se touchent. Tournefort, inst. rei herb. Voyez PLANTE. (I)
Sphondylium vulgare hirsutum, C. B. P. 157. Tourn. Inst. 320. Les Polonois & les Lithuaniens font bouillir les feuilles & les graines de la berce dans l'eau ; & en y ajoûtant un ferment, ils en tirent une forte boisson, qui fait la biere des pauvres.
La berce est d'une qualité acre comme le férule & la thapsie : quelques-uns la regardent comme émolliente.
Sa racine est bonne en décoction dans la passion hystérique : elle purge l'humeur pituiteuse, guérit la jaunisse, l'orthopnée, l'épilepsie.
Son huile est bonne contre les maux de tête ; la phrénésie, la léthargie : on l'applique en embrocation. (N)
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BERCEAU | S. m. (Coupe des pierres & Architect.) est une voûte cylindrique quelconque, dont la courbure peut être de différente espece. Lorsqu'elle est circulaire, on l'appelle plein cintre. Les arches des ponts sont pour la plûpart des berceaux cylindriques, principalement lorsque leur longueur excede leur largeur. Voyez CINTRE. (D)
BERCEAU, instrument à l'usage des Graveurs dans la maniere noire : il est emmanché dans un morceau de bois de la longueur de quatre pouces, & de la forme d'un coeur allongé, du milieu duquel partiroit une espece de tige évuidée, & propre à être reçûe entre les doigts, & à la surface postérieure duquel on auroit pratiqué un gros bouton, propre à s'appliquer dans le creux de la main. Cet outil, qui ressemble à une petite bêche quarrée, est en biseau d'un côté ; & de l'autre il est sillonné de traits paralleles entr'eux, qui forment autant de petites dents à l'arc convexe qui termine sa partie supérieure. Le graveur prend cet instrument, applique la convexité de son arc perpendiculairement à la surface du cuivre sur lequel il se propose de graver, & le balançant également de droite à gauche sur des lignes qu'il a tracées pour lui servir de guide, il couvre toute la surface de son cuivre de petits points ; ce qu'on appelle faire le grainage. Voyez GRAINAGE ; voyez GRAVURE en maniere noire ; voyez aussi Pl. V. de Gravûre, fig. 9. & 10. Il y a des ouvriers qui emmanchent autrement leur berceau ; ce n'est qu'une petite poire, semblable à celle qui sert de manche aux burins. On a des berceaux de toute grandeur, pour satisfaire à toutes sortes de grainage. Voyez aussi la Planche des outils dans la maniere noire.
BERCEAU ou TONELLE, (Jardinage) ces deux mots sont synonymes : celui de tonelle est plus ancien. C'est une longueur d'allée couverte, formant une treille ou bien un cabinet de verdure, fait de charmille ou de treillage, garnie de jasmins, chevrefeuils, rosiers, chasselas, verjus, &c.
On les fait de charpente, de perches, & d'échalas : souvent ces berceaux sont quarrés par-dessus, pour y mettre de la vigne & du verjus ; mais ils sont moins beaux que les cintrés. (K)
BERCEAU D'EAU, (Jardinage) On appelle ainsi deux rangées de jets obliques, qui en se croisant forment des especes de berceaux, sous lesquels on peut se promener sans craindre d'être mouillé. (K)
BERCEAU de presse d'Imprimerie en lettres ; ce sont deux pieces de bois à rainures, posées sur champ, assemblées aux deux extrémités par deux traverses plates. La figure d'un berceau de presse est celle d'un chassis quarré long, dans le vuide duquel sont placées les bandes, qui sont deux autres pieces de bois de même longueur, posées à distance égale, & revêtues sur leur plat de fer à arrête ou en lame. Ce berceau est soûtenu d'un bout par un pié qui lui est propre ; il est appuyé par le milieu sur un sommier mobile, & à l'extrémité sur une des barres de bois du train de derriere, où il entre comme dans une mortoise, & y est retenu ou par un écrou, ou par une barre de bois qui le traverse, posée derriere le sommier. Voyez Pl. IV. fig. 2. G g qui représente le pié du berceau ; k k m, dont on ne voit que les côtés n k k ; m le quatrieme opposé à k k, lui est en tout semblable.
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BERCELLE | S. f. outil d'Emailleur ; c'est une espece de petite pincette dont ces ouvriers se servent quand ils veulent tirer l'émail à la lampe, elle est faite d'un seul morceau de fer qui est replié en deux ; ses branches sont plates & un peu pointues. Voyez EMAIL ; voyez aussi MOULE.
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BERCER | (SE) v. pas. en Manége, se dit d'un cheval qui se laisse aller nonchalamment d'un côté & d'autre au pas & au trot, imitant pour ainsi dire, le mouvement qu'on fait faire au berceau pour endormir un enfant. Ce dandinement marque très-souvent un cheval mou & sans vigueur. (V)
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BERCHE | S. f. (Marine) sorte d'artillerie dont on se servoit anciennement dans les navires. C'étoient de petites pieces de canon de fonte verte. Il y en avoit de fer fondu qu'on appelloit barces. Ces sortes de canons ne sont plus en usage. (Z)
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BERCHEROCT | S. m. (Commerce) poids dont on se sert à Archangel, & dans tous les états du czar de Moscovie, pour peser les marchandises d'une grande pesanteur ou de grand volume. Le bercheroct pese quatre cent livres moscovites, qui rendent environ trois cent vingt-huit livres, poids de Paris. (G)
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BERCHITURIA | (Géog.) ville de Sibérie sur la riviere de même nom, à la frontiere de Russie.
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BERCHTOLSGADEN | (Géog.) ville d'Allemagne dans la préfecture de même nom, enclavée dans l'archevêché de Saltzbourg, & située sur l'Aha. Long. 30. 40. lat. 47. 30.
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BERCKEL | (Géog.) riviere qui prend sa source dans l'évêché de Munster, & se jette dans l'Issel, à Zutphen.
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BERCKHEIM | (Géog.) ville de France en Alsace.
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BERCOWITZ | (Commerce) L'on nomme ainsi en Russie un poids usité dans ce pays, pour charger des navires. Le bercowitz pese dix pudes, ou quatre cent livres de Russie.
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BERDI | ou BERLIN, coquillage. Voyez PATELLE. (I)
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BERDISH | S. f. (Géog. mod.) espece de hache legere, que les Moscovites ont coûtume de porter en guise d'armes.
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BERDOA | (Géog.) peuple de brigands, & desert de même nom en Barbarie, au midi du royaume de Tripoli.
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BERDO | ou BERDOA, ville d'Asie dans la Perse, province de Grandja. Long. 65. 30. lat. 41.
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BEREBERE | ou BREBERES, (LES) Géog. & Hist. mod. peuples d'Afrique qui vivent sous des tentes à la maniere des Arabes, dans les différentes contrées de la Barbarie, mais surtout au midi des royaumes de Tunis & de Tripoli. Ils sont braves & se piquent de noblesse ; ils se disent descendus de la tribu des Sabéens, qui passerent de l'Arabie heureuse en Afrique sous la conduite de leur roi Melec-Ifriqui ; qui, selon quelques-uns, a donné son nom à l'Afrique. Il y a des Bereberes sédentaires.
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BERECINTH | ou BERECINTHIE, (Mythol.) c'est ainsi que la mere des dieux fut appellée de Bérécinthe, montagne de Phrygie, le lieu de sa naissance. Son culte dura dans les Gaules jusqu'au quatrieme siecle. On plaçoit Bérécinthe sur un char attelé de boeufs, & on la promenoit dans les champs & dans les vignes, pour la conservation des biens de la terre, Le peuple suivoit en foule, chantant & dansant devant le char.
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BERENGARIENS | S. m. pl. (Hist. ecclés.) hérétiques ainsi nommés de leur chef Berenger, archidiacre d'Angers, thrésorier & écolâtre de S. Martin de Tours, dont il étoit natif, & qui vivoit dans le xj. siecle. Cet hérésiarque fut le premier qui osa nier la présence réelle de Jesus-Christ dans l'eucharistie : condamné successivement par plusieurs papes & plusieurs conciles, il rétracta ses erreurs, & signa trois différentes fois des professions de foi catholique qu'il abjura autant de fois : mais enfin on croit qu'il mourut sincerement converti & desabusé de ses erreurs. A celle dont nous venons de parler, & qui étoit la principale, il ajoûta celles de combattre les mariages légitimes, soûtenant que l'on pouvoit user de toutes sortes de femmes. Il attaquoit aussi le baptême des enfans, qu'il regardoit comme nul.
Lanfranc & Guimond ses contemporains, écrivirent contre lui avec beaucoup d'avantage : ce dernier expose ainsi les sentimens & les variations des Berengariens sur le sacrement de l'eucharistie. " Tous, dit-il, s'accordent à dire que le pain & le vin ne sont pas changés essentiellement ; mais ils different en ce que les uns disent qu'il n'y a rien absolument du corps & du sang de Notre-Seigneur dans le sacrement, & que ce n'est qu'une ombre & une figure. D'autres cédant aux raisons de l'église, sans quitter leur erreur, disent que le corps & le sang de Jesus-Christ sont en effet contenus dans le sacrement, mais cachés par une espece d'impanation, afin que nous les puissions prendre ; & ils disent que c'est l'opinion la plus subtile de Berenger même. D'autres croyent que le pain & le vin sont changés en partie ; quelques uns soûtiennent que ces élémens sont changés entierement, mais que quand ceux qui se présentent pour les recevoir, en sont indignes, alors la chair & le sang de Jesus-Christ reprennent la nature du pain & du vin " Guimond, contr. Bereng. bibliot. PP. pag. 327.
On voit clairement par cet exposé que les Berengariens ont été les précurseurs des Luthériens & des Calvinistes ; & par la conduite de l'Eglise, à l'égard des premiers, il est aisé de décider quelle étoit alors sa foi ; & qui est coupable d'innovation à cet égard, ou des Catholiques, ou des Protestans.
Au reste, quelques efforts qu'eussent fait les Berengariens pour répandre leur doctrine en France, en Italie, & en Allemagne, les auteurs contemporains remarquent que ces hérétiques étoient en fort petit nombre ; & il seroit difficile de prouver qu'il en restât encore lorsque Luther & Calvin parurent. On peut consulter le dictionnaire de Moréri, à l'article Berenger, sur ce qui concerne la personne & les diverses avantures de cet hérésiarque. (G)
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BERENZNO | ou BERESINA, (Géog.) riviere qui a sa source en Lithuanie, & se jette dans le Nieper.
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BERESOWA | (Géog.) ville de la Samogitie, en Moscovie, sur l'Oby.
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BERG | (DUCHE DE) Géog. contrée d'Allemagne, sur le bord oriental du Rhin, dans le cercle de Westphalie. Dusseldorp en est la capitale.
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BERG-BITTENHEI | ou BERGBIETEN, petite ville de la basse Alsace.
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BERG-OP-ZOOM | (Géog.) ville des Pays-bas, dans le Brabant hollandois, & le marquisat de même nom, en partie sur une montagne, & en partie sur la riviere de Zoom. Long. 21. 45. lat. 51. 30.
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BERG-St-VINOX | (Géog.) ville & abbaye des Pays-bas, dans le comté de Flandre, sur la Côme, au pié d'une montagne. Long. 20. 5. lat. 50. 57.
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BERG-ZABERN | petite ville de France en Alsace. Long. 25. 25. lat. 49. 4.
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BERGA | (Géog.) petite ville de Catalogne, sur la riviere de Lobrega.
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BERGAMASC | (Géog.) province d'Italie, dans l'état de Venise, borné par le Bressan, la Valteline & le Milanez. Bergame en est la capitale.
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BERGAME | S. f. (Tapissier) grosse tapisserie, qui se fabrique avec différentes sortes de matieres filées, comme bourre de soie, laine, coton, chanvre, poil de boeuf, de vache, ou de chevre. C'est proprement un tissu de toutes ces sortes de fils, dont celui de la chaîne est ordinairement de chanvre, qui se manufacture sur le métier à-peu-près comme la toile. Quelques-uns prétendent que le nom de bergame lui a été donné, de ce que les habitans de Bergame en Italie en ont été les premiers inventeurs.
Rouen & Elbœuf fournissent une quantité considérable de bergames de toutes les couleurs & nuances ; les unes en façon de point d'Hongrie ; les autres à grandes barres chargées de fleurs & d'oiseaux, ou d'autres animaux ; d'autres à grandes & petites barres unies, sans aucune façon ; & d'autres qu'on appelle chine & écaille, parce qu'elles sont remplies de façons qui imitent le point de la Chine & les écailles de poisson. Il s'en fait une sorte particuliere à Roüen, que l'on nomme tortin, à cause qu'il y entre de la laine torse. Il s'en fait aussi quelques-unes à Toulouse. Les hauteurs les plus ordinaires des bergames sont une aulne & demie, une aulne trois quarts, deux aulnes, & deux aulnes & demie. Il s'en fait néanmoins quelques-unes de deux aulnes trois quarts ; mais cette derniere hauteur est peu commune, ne s'en faisant guere que pour les marchands qui les commandent ; il y en a de fines, de moyennes, de grosses, ou communes. Ceux qui en font commerce sont les marchands Merciers, les Tapissiers, & les Fripiers ; mais il n'y a guere que les premiers qui les tirent directement des lieux où elles se fabriquent.
Il vient de Tournai une sorte de bergame à la romaine, ou bergame de Flandre, qui se fabrique par bandes & bordures, dont on fait des tapisseries beaucoup plus estimées que celles de Roüen & d'Elbœuf. Voyez TAPISSERIE.
* BERGAME, (Géog.) ville d'Italie, dans l'état de Venise, capitale du Bergamasc. Long. 27. 8. lat. 45. 42.
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BERGAMOTTES | S. f. (Jardinage) on prétend que l'origine de l'oranger bergamotte vient d'un Italien qui s'avisa d'enter une branche de citronnier sur le tronc d'un poirier bergamotte ; ce qui fait que les citrons qui en proviennent tiennent des qualités, des vertus, & des propriétés du citronnier & du poirier ; en effet, la bergamotte est une orange différente des autres, & qui a une odeur bien plus agréable. On l'appelle souvent cedrat. (K)
BERGAMOTTE, nom d'une sorte d'essence, extraite d'un fruit que produit le citronnier enté sur le tronc d'un poirier de bergamotte ; c'est précisément le fluide huileux de ces citrons exprimé avec les doigts. Voyez ESSENCE, &c.
Il y a aussi une espece de tabac en poudre, à qui l'on donne le même nom, & qui n'est qu'un tabac pur legerement frotté de cette essence. Voy. TABAC.
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BERGAS | (Géog. anc. & mod.) ville de la Turquie européenne, dans la Romanie, sur la riviere de Larisse. Long. 45. lat. 41. 17. Anciennement Arcadiopolis, Pyrgus.
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BERGE | S. m. (Architect.) c'est ainsi qu'on appelle les bords ou levées des rivieres & grands chemins, qui étant taillées dans quelques côtés, sont escarpés en contre-haut, ou dressées en contre-bas avec talud, pour empêcher l'éboulement des terres, & retenir les chaussées faites de terres rapportées. (P)
BERGE, (Marine) Les Marins se servent aussi quelquefois du terme de berges, pour désigner les rochers élevés à pic sur l'eau. Il y a sur la côte de Poitou des rochers que l'on appelle les berges d'Olone. (Z)
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BERGEN | (Géog.) capitale de la Norwege, dans la province de Bergenhus, avec château, & un port très-profond. Long. 23. 15. lat. 60. 11.
BERGEN, (Géog.) petite ville d'Allemagne, en Poméranie, vis-à-vis de Stralsund, capitale de l'île de Rugen. Long. 31. 30. lat. 54. 40.
Il y a encore une ville de ce nom dans la basse-Saxe, à trois lieues de Daneberg. Une autre au duché de Juliers, entre Juliers & Cologne ; & une troisieme près de Francfort sur le Mein.
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BERGENHUS | (Géog.) province de Norwege, la plus occidentale entre le gouvernement d'Aggerhus & la mer. Bergen en est la capitale.
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BERGER | S. m. (Oecon. rust.) est celui qui garde un troupeau. Il faut qu'il soit levé de grand matin ; qu'il fasse sortir les bestiaux à la fraîcheur ; qu'il connoisse les bons endroits pour les y conduire ; qu'il ait un bon chien ; qu'il ne laisse point répandre son troupeau dans les blés ; qu'il ait soin d'avoir de bons béliers ; qu'il sache aider une brebis à agneler ; qu'il puisse médicamenter les brebis malades ; qu'il s'entende à leurs maladies, & qu'il ne se laisse point surprendre par les loups. On peut lui confier depuis cent jusqu'à cent cinquante brebis ; on lui fera nettoyer la bergerie une ou deux fois l'an, au mois de Mars & à la fin d'Août ; il tiendra un sac de sel pendu dans la bergerie, afin que les brebis pour qui ce seroit un remede, puissent l'aller lécher ; & il veillera soigneusement à ce que les couleuvres ne tetent point ses brebis, soit dans la bergerie, soit aux champs.
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BERGERAC | (Géog.) petite ville de France, dans le Périgord, sur la Dordogne. Long. 18. 7. lat. 45.
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BERGÉRETTE | oiseau. Voy. BERGERONNETTE.
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BERGERIE | S. f. (Oeconom. rust.) lieu où l'on héberge les bestiaux ; on donne cependant plus communément le nom d'étable aux lieux où l'on héberge les gros bestiaux, réservant celui de bergerie pour celui où l'on héberge les bêtes à laine, les boucs & les chevres. Les bergeries se bâtissent assez legerement ; leur exposition est la meilleure au midi ; les uns les font sans planchers, d'autres avec des planchers qui servent de greniers aux fourrages ; les bestiaux sont plus chaudement dans celles-ci, sur-tout si l'on a l'attention de faire les planchers bas ; il faut que leur aire soit unie & sans pierres ; qu'elle aille en pente du fond vers la porte, afin que l'urine descende d'elle-même ; qu'elle ne cause point de mal aux piés des brebis, & que leur laine n'en soit pas gâtée : on n'y donnera du jour que par une petite fenêtre de deux piés en quarré. Quand on a des brebis dont la laine est fine & précieuse, on fait l'aire de la bergerie de planche, & on y pratique des trous pour servir d'écoulement aux eaux. Il faut avoir deux bergeries, ou en couper une en deux, afin de séparer les agneaux de leur mere, & mettre aussi les béliers à part.
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BERGERONETTE | S. f. motacilla flava (Hist. nat. Ornith.) Cet oiseau est de la grosseur & de la figure de la lavandiere ; il pese 5 gros ; il a environ 6 pouces de longueur, depuis la pointe du bec jusqu'à l'extrémité de la queue. Le dessous du corps de cet oiseau est de couleur jaune ; le dessus est d'un verd obscur, à l'exception du milieu du dos qui est noirâtre. Le sommet de la tête est d'un verd jaunâtre. Il y a au-dessus des yeux une ligne jaune, qui s'étend jusque derriere la tête. La queue a environ deux pouces & demi de longueur ; elle est composée de douze plumes : les deux du milieu sont plus pointues que les autres ; l'extérieure de chaque côté est blanche sur la moitié de sa longueur & plus ; les autres sont noires, elles sont toutes d'égale longueur. Les ailes ressemblent à celles de la lavandiere pour la forme. Il y a dix-huit grandes plumes dans chacune ; la seizieme est plus longue que celles qui sont auprès, & son bord est blanchâtre. La pointe des petites plumes du milieu est d'un verd blanchâtre ; le reste des ailes est brun. Le bec est noir ; la langue est fourchue sans être déchiquetée ; l'iris des yeux est de couleur cendrée, mêlée de couleur de noisette ; les pattes sont noirâtres. Le doigt extérieur tient au doigt du milieu à sa naissance ; l'ongle du doigt de derriere est allongé comme dans les aloüettes. On trouve des oiseaux de cette espece, dans lesquels le jaune ou le verd sont plus foncés que dans les autres. La bergeronette niche dans les blés ; elle fait son nid avec des herbes, & elle met une couche de poils sous ses oeufs. La femelle fait d'une seule ponte quatre ou cinq oeufs, parsemés de taches & de lignes brunes disposées irrégulierement.
Il y a une autre espece de bergeronette, motacilla cinerea aut flava altera. Ald. qui est de la même grandeur que la précédente ; elle a le bec droit, noir, mince & pointu ; les yeux verdâtres, les paupieres blanches ; il y a au-dessus des yeux une ligne blanchâtre. La tête est petite & un peu brune ? le dessus du corps est de couleur cendrée ; les ailes sont noirâtres, & traversées par une ligne blanchâtre peu apparente ; le menton & la gorge sont de couleur mêlée de blanc & de cendré ; celle de la poitrine & du ventre est d'un blanc sale ; il y a du jaune foncé sur le croupion. La queue est plus longue que tout le reste du corps. La premiere plume de chaque côté est blanche ; les deux plumes qui suivent ont les barbes intérieures blanches & les extérieures noirâtres ; & les six plumes du milieu sont entierement noirâtres. Les cuisses & les pattes sont d'un brun pâle ; les ongles sont crochus, & celui de derriere est le plus long. Cette description a été faite sur une femelle ; le mâle est peu différent, il a seulement une tache noire sous le menton. Ces oiseaux se trouvent le long des fleuves qui roulent sur le gravier, & ils vivent d'insectes d'eau. Willughby, ornit. Voyez OISEAU. (I)
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BERGINUS | (Myth.) divinité particuliere aux habitans de Bresse, en Italie, où elle avoit un temple & une prêtresse. On la voit dans un monument habillée à la romaine.
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BERGREICHENSTEIN | (Géog.) ville de Bohème, dans le territoire de Prague.
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BERGSTRASS | (Géog.) petit pays au-delà du Rhin, appartenant en partie aux électeurs de Mayence & Palatin, & au landgrave de Darmstadt. Il s'y trouve un chemin planté de noyers des deux côtés, qui va depuis Darmstadt jusqu'à Heidelberg, c'est-à-dire l'espace de 12 lieues.
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BERI BERI | (Hist. nat. ou Medecine) c'est le nom d'une maladie à laquelle on est sujet dans les Indes orientales, & qui emporte en très-peu de tems ceux qui en sont attaqués ; elle ressemble beaucoup à l'apoplexie.
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BERICHOT | oiseau. Voyez ROITELET. (I)
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BERIL | S. m. Beryllus, (Hist. nat.) pierre précieuse de couleur d'eau de mer, c'est-à-dire de couleur mêlée de verd & de bleu ; c'est pourquoi les modernes lui ont donné le nom d'aigue marine. Voyez AIGUE MARINE. Les anciens distinguoient plusieurs sortes de bérils. Les plus beaux étoient ceux dont la couleur approchoit le plus de celle de l'eau de la mer. Après ceux-là on estimoit le plus ceux qui étoient pâles & qui avoient des reflets de couleur d'or, chrysoberylli. On en reconnoissoit une sorte qui étoit de couleur encore plus pâle, & que l'on appelloit chrysoprasus. Ceux que l'on nommoit acroides étoient plus verds ; il y en avoit aussi que l'on comparoit à la cire & à l'huile pour l'apparence ; & d'autres que l'on trouvoit semblables au crystal. Mais la plûpart de ces pierres portent à présent d'autres noms que celui de béril, & appartiennent à d'autres genres. Plin. lib. XXXVII. ch. v. Boetii de Boot gemmarum, hist. lib. II. ch. lxjx, & lxx. (I)
La maniere de le contrefaire est de mêler à la matiere dont on fait le crystal factice, lorsqu'elle est en fonte, une certaine quantité d'aes ustum, ou de cuivre calciné par trois fois, avec le soufre. Voy. CRYSTAL FACTICE. On réduit ce cuivre calciné en poudre très-déliée ; on y joint un peu de safre pareillement réduit en poudre ; on jette petit-à-petit & à différentes reprises, ce mélange dans la matiere ou fritte du crystal factice ; on remue bien le tout, & l'on continue à mettre des deux poudres combinées, jusqu'à ce que le verre ou crystal ait pris une couleur telle qu'on la demande. Les doses en grand sont de mettre sur 60 liv. de matiere de verre, une livre & 3/2 de cuivre calciné, & quatre onces de safre. (-)
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BERINGEN | (Géog.) petite ville du pays de Liége.
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BERLAS | (Géog.) petite ville de France, dans le haut Languedoc, au diocèse de Castres.
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BERLE | S. f. sium, (Hist. nat. bot.) genre de plante à fleur en rose & en ombelle, composée de plusieurs feuilles ordinairement égales, disposées en rose, & soûtenues par un calice. Ce calice devient un fruit arrondi, qui renferme deux semences applaties d'un côté, arrondies & cannelées de l'autre. Ajoûtez au caractere de ce genre, que les feuilles sont rangées par paires sur une côte terminée par une seule feuille. Tournefort, Inst. rei herb. Voyez PLANTE. (I)
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BERLIN | (Géog.) ville d'Allemagne, capitale de l'électorat de Brandebourg, & résidence du roi de Prusse, sur la Sprée, qui tombe dans l'Elbe & qui communique à l'Oder par un canal, dont l'entrée est à Francfort. Long. 31. 7. 15. lat. 52. 53.
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BERLINE | S. f. (Sellier-Carrossier) espece de voiture de la nature des carrosses, fort en usage depuis peu, & tirant son nom de la ville de Berlin en Allemagne, quoique certaines personnes en attribuent l'invention aux Italiens, & prétendent en trouver l'étymologie dans berlina, nom que ceux-ci donnent à une espece de théatre, sur lequel on fait subir à des coupables une ignominie publique. La berline est une allure très commode en voyage : elle est plus legere qu'un char, & moins sujette à verser. Le corps en est élevé sur des fleches, & suspendu par des bandes de cuir ; elle a une espece d'étriers ou de marchepié pour y entrer ; & au lieu de portieres, des paravents que l'on baisse lorsque le tems est mauvais, & que l'on éleve lorsqu'il fait beau. Voyez les Planches du Sellier. Il y a des berlines à un & à deux fonds.
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BERLINGES | (Géog.) îles de l'Océan, proche la côte de Portugal.
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BERLINGOT | S. m. (Sellier-Carrossier) petite voiture de la forme de la berline, mais beaucoup plus legere. Voyez BERLINE.
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BERLINICKEN | (Géog.) petite ville de la Marche de Brandebourg, sur la frontiere de Poméranie.
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BERME | S. f. en Architecture, est un chemin qu'on laisse entre une levée & le bord d'un canal ou d'un fossé, pour empêcher que les terres de la levée, venant à s'ébouler, ne remplissent le canal ou fossé. (P)
BERME, en Fortification, est un espace large de quatre à cinq piés, au-dehors, entre le pié du rempart, & le côté du fossé. Son usage est de recevoir la terre qui s'éboule du rempart, & d'empêcher qu'en tombant elle ne comble le fossé. On l'appelle aussi lisiere & relais.
On plante ordinairement un rang de palissade sur la berme, afin d'empêcher l'ennemi de s'y établir aisément. On la fortifie encore quelquefois par une haie vive, qui lui sert d'une excellente défense. L'ennemi est obligé de la détruire avec le canon. Les palissades & cette haie vive assûrent aussi la place contre l'escalade, & rendent cette entreprise plus difficile. (Q)
BERME, s. f. terme d'Amydonniers ; c'est un tonneau dans lequel ces artisans mettent les recoupes de froment, ou le froment dont ils composent l'amydon, pour y fermenter ou y recevoir les autres préparations. Voyez AMYDON.
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BERM | ou RELAIS, (Hydraulique) est une retraite de quatre à cinq piés qu'on laisse en-dehors entre le pié d'une jettée ou d'un rempart, & l'escarpe du fossé pour recevoir la terre qui s'éboule. Elle ne se pratique ordinairement que dans les ouvrages de terre. (K)
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BERMIERS | BERMIERS
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BERMUDES | (LES) Géog. îles de l'Amérique septentrionale, vis-à-vis la Caroline, découvertes en 1522 ou 27, par Jean Bermudez espagnol.
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BERMUDIENNE | S. f. bermudiana, (Hist. nat. bot.) genre de plante à fleur liliacée, composée de six pétales. Le calice devient un fruit triangulaire qui s'ouvre en trois parties, & qui est intérieurement partagé en trois loges remplies de semences arrondies. Tournefort, Inst. rei herb. Voyez PLANTE. (I)
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BERN-CASTEL | (Géog.) petite ville d'Allemagne, dans l'électorat de Treves, sur la Moselle, entre Trarbach & Weldens.
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BERNACLE | oiseau. Voyez CRAVANT. (I)
BERNACLE, s. f. concha anatifera, (Hist. nat.) coquillage, dont la coquille est composée de cinq pieces. M. Needham la décrit dans ses nouvelles observations microscopiques. Cette production se trouve dans la mer : on y peut distinguer trois parties différentes ; le pédicule, la coquille, & l'animal qui est renfermé dans la coquille. Le pédicule est une sorte d'étui cylindrique, qui a jusqu'à six pouces de longueur ; il est noirâtre & compact. C'est par l'une des extrémités de cette sorte de pédicule, que le bernacle adhere aux rochers & aux vaisseaux. Le diametre de la cavité du pédicule n'est pas proportionné à celui de la circonférence extérieure ; parce que le tuyau est formé par plusieurs membranes composées de fibres longitudinales, qui s'étendent quelquefois au double de leur longueur ordinaire. Lorsque ces fibres se dessechent après la mort de l'animal, elles se durcissent, & deviennent rudes & grenues comme du chagrin. " La coquille tient au pédicule, elle paroît être bivalve en apparence, mais si on l'examine un peu attentivement, on découvre bientôt que chacun de ses côtés est composé de deux pieces adhérentes l'une à l'autre par une fine membrane, qui en tapisse toute la surface concave, & qui s'insinuant entre chaque division, joint ces pieces ensemble, de façon que l'animal a l'avantage de pouvoir attirer à soi l'eau & la nourriture ; & pour cela, il n'est pas nécessaire que les deux battans de sa coquille s'éloignent l'un de l'autre, comme ceux des huîtres & des moules ; ils en sont empêchés par une charniere courbe & concave, dans les bords de laquelle ils sont engrenés, & qui s'étend au-delà de la moitié de leur circonférence ; mais ils forment un angle à chacune de leurs divisions, & par-là ils laissent entr'eux une ouverture qui a à peu-près la figure d'un rhomboïde. Ainsi tout ce qui est attiré par le jeu des cornes du poisson, est aisément retenu dans cette cavité. Lorsque l'animal est tranquille, sa coquille est toujours ouverte ; parce qu'il a continuellement besoin de nouvelle eau, qu'il suce & qu'il rejette alternativement ; ce qu'on peut remarquer par le jeu de deux antennes correspondantes, qui ressemblent à celles de quelques insectes, & dont le mouvement répond assez bien à celui des oüies des autres poissons " Nouv. observ. microscop. pag. 220. & 221.
La tête de l'animal est au moins garnie d'une vingtaine de petites cornes ou bras de différente longueur ; lorsqu'on voit ces prolongemens par le moyen du microscope, ils paroissent frangés ; au lieu d'être rangés circulairement autour de la bouche, ils sont tous placés à côté ; lorsqu'ils se contractent, ils forment des courbes irrégulieres enfermées les unes dans les autres. Il y a plusieurs incisions sur le côté concave ; & on voit dans les intervalles compris entre ces incisions, des touffes de poil assez semblables à de petites brosses. M. Needham croit que lorsque l'animal les agite soit au-dedans de sa coquille, soit au-dehors, il forme dans l'eau un courant, & que par ce moyen il attire les animalcules dont il se nourrit. La tête hérissée de ces sortes de cornes peut sortir au-dehors de la coquille, & rentrer au-dedans.
Il y a au milieu du grouppe de ces cornes, précisément au dessus de la bouche, une trompe qui renferme une sorte de langue longue & ronde, à-peu-près comme celle du pic-vert. La bouche du bernacle est composée de six lames qui peuvent s'écarter les unes des autres, & qui sont dentelées comme une scie sur leur bord convexe ; ces lames sont disposées en cercles, & fixées par l'une de leurs extrémités ; leur arrangement est tel qu'en s'élevant & s'abaissant alternativement, leurs dents se correspondent ; elles sont appliquées les unes contre les autres, de façon qu'elles forment une ouverture plissée. Le corps du bernacle est assez ressemblant à une petite huître.
En l'ouvrant, M. Needham a trouvé dans plusieurs une excroissance bleue, placée de chaque côté & immédiatement au-dessous du grouppe des cornes. Ces excroissances, vûes au microscope, ont paru être un sac membraneux rempli de petits globules bleus d'une figure ovoïde & uniforme, & assez semblables au frai des autres poissons. M. Needham soupçonne que les bernacles se multiplient comme les polypes, c'est-à-dire par une sorte de végétation : mais il ne l'assûre pas, parce qu'il n'a pas pû acquérir des preuves convaincantes sur ceux qu'il a vû morts : cependant il en a trouvé six ou sept en grouppe intimement joints ensemble par leur extrémité, & qui ressembloient plûtôt à des rejettons que produit une même racine, qu'à des branches qui naissent d'un même tronc, ou à des petits qui sortent du corps de la mere ; mais il n'a pas pû déterminer si cette sorte d'union vient de ce que la multiplication de cet animal est analogue à celle du polype, ou simplement de ce que différentes portions de frai se touchent & croissent sans s'écarter les unes des autres.
M. Needham fait mention d'une autre espece de bernacles plus petite que la précédente. " On les trouve aussi adhérentes aux rochers & aux vaisseaux ; ils different principalement des autres, en ce que la coquille qui renferme immédiatement leur corps avec le pédicule sur lequel il est fixé, est logée dans une autre coquille univalve, qui a la forme d'un cone tronqué, qui s'attache contre le fond des vaisseaux, comme celle d'un gland de mer avec laquelle il est aisé de la confondre, page 125 ". Au reste ces petits bernacles sont assez ressemblans aux grands.
M. Needham fait observer qu'il y a beaucoup d'analogie entre ces bernacles & les animalcules à roues, dont M. Leuwenhoeck a découvert deux especes, & les polypes à pennaches de M. Trembley. On a appellé le bernacle concha anatifera, parce qu'on croyoit autrefois qu'il sortoit de ce coquillage une espece de canard. Voyez CRAVANT. (I)
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BERNAGE | S. m. (Econom. rustiq.) On entend par ce mot, dans les campagnes où il est en usage, des mélanges de grains, qui se font pour la nourriture des bestiaux, & qui se sement avant l'hyver.
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BERNARD | (LE GRAND SAINT) Géog. montagne de Suisse & de Savoie, entre le Vallais & le val d'Aost, à la source de la Drance & de la Doria.
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BERNARD-L'HERMITE | cancellus, animal du genre des crustacées, aussi appellé le soldat. Il n'est pas recouvert en entier d'une taie comme les autres crustacées, ayant par conséquent des parties molles à découvert. Il se réfugie dans les coquilles vuides qu'il rencontre, & c'est toûjours dans celles qui sont tournées en vis ; il se loge aussi dans les zoophytes qui ont des cavités propres à le recevoir, ou dans d'autres choses qu'il trouve convenables pour le mettre à l'abri de tout ce qui pourroit le blesser, & assez legeres pour qu'il puisse se déplacer avec sa loge lorsqu'il veut changer de lieu. Il vit solitaire, c'est pourquoi on a lui a donné le nom de bernard-l'hermite ; celui de soldat vient sans-doute de ce qu'il se tient dans sa coquille comme un sentinelle dans son poste, ou de ce qu'il se revêt & qu'il s'arme, pour ainsi dire ; d'une coquille étrangere.
Le corps de cet animal est allongé comme celui des langoustes ; il a deux cornes longues & menues de couleur jaune, celle du reste du corps est mêlée de rouge & de jaune. Ses yeux sont assez élevés ; sa bouche est entourée de petits filamens : il a deux longues pattes qui ont des serres courtes ; l'une de ces pattes est presque toûjours plus grosse que l'autre. Rondelet prétend que la gauche est toûjours la plus grosse : mais il y en a aussi qui ont au contraire la patte droite plus grosse que la gauche. Le bernard-l'hermite a de chaque côté deux autres jambes longues, courbes & pointues ; ce qui fait en tout six jambes, qu'il allonge en sortant à demi de sa coquille, & qu'il accroche quelque part lorsqu'il veut changer de lieu ; c'est aussi par le moyen de ces pattes, qu'il saisit les petits poissons ou les insectes dont il se nourrit. Cet animal a, outre ces six jambes, trois prolongemens de chaque côté au-delà de la poitrine ; ces prolongemens n'ont chacun que le tiers de la longueur de chaque jambe ; ils sont mous, & ils tiennent à la partie du corps qui n'est recouverte que par une peau très-mince. Le reste a une espece d'écaille plus molle que celle des écrevisses. Rondelet a distingué les mâles des femelles par les oeufs qu'il a vû attachés au-dehors du corps de la femelle pendant l'été, lorsque le bernard-l'hermite sort au-dehors de sa coquille. Voy. Rondelet, lib. XVIII. des poissons, & les Mém. de l'Académie royale des Sciences, année 1710, pag. 465.
Il y a dans les îles de l'Amérique des bernard-l'hermite qui ont trois ou quatre pouces de longueur. On rapporte que cet animal vient une fois chaque année sur le bord de la mer, pour y jetter ses oeufs & changer de coquille ; car il est obligé de quitter la coquille dans laquelle il s'étoit logé, parce qu'ayant grossi pendant l'année, il se trouve gêné dans cette coquille. Alors il se transporte sur le rivage, & il cherche une nouvelle coquille qui puisse lui convenir. Dès qu'il en a rencontré une, il sort de l'ancienne, il essaye son nouveau logement ; & s'il est convenable, il s'en empare & y reste : mais il est souvent obligé d'entrer dans plusieurs coquilles avant que d'en trouver une qui lui soit proportionnée. S'il arrive que deux bernard-l'hermite s'arrêtent à la même coquille, ils se la disputent ; le plus foible est contraint de la céder au plus fort. Cet animal fait un petit cri lorsqu'on le prend. Il faut éviter qu'il ne saisisse le doigt avec sa serre ; car il fait beaucoup de mal, & ne lâche que très-difficilement. Les habitans du pays le mangent, & le trouvent très-bon : mais on dit qu'il est pernicieux pour les étrangers. Voyez Hist. gén. des Antilles, par le P. du Tertre. Voyez CRUSTACEES. (I)
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BERNARDIA | (Hist. nat. bot.) plante ainsi appellée par M. Guillaume Houstoun, du nom de M. Bernard de Jussieu, démonstrateur en Botanique au Jardin-royal de Paris. Elle est mâle & femelle : la plante mâle produit de petits chatons qui tombent quand ils sont mûrs. La femelle a des fleurs dont le pétale est couleur de vermillon : ces fleurs sont suivies d'un fruit à trois coques, semblables à celles du ricin. On en compte de quatre especes.
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BERNARDINS | S. m. pl. (Hist. ecclés.) religieux fondés par S. Robert, abbé de Molesme, & ensuite de Cîteaux en Bourgogne, d'où ils sont nommés Religieux de Cîteaux. Leur ordre est une réforme de celui de S. Benoit : mais parce qu'il a été fort étendu par S. Bernard, abbé de Clairvaux, on les appelle Bernardins, nom sous lequel ils sont plus connus en France, que sous celui de Cisterciens. Voyez CISTERCIENS. Ils portent une robe blanche avec un scapulaire noir par-dessus, & hors du cloître une robe noire avec un capuce de même couleur, dont la pointe leur descend par-derriere jusqu'à la ceinture. Au choeur ils sont vêtus d'une large robe blanche à grandes manches, avec un chaperon blanc.
On compte en France cinq abbayes de Bernardins, chefs d'ordres : savoir, Cîteaux, Clairvaux, Pontigny, la Ferté, & Morimont. Les ordres d'Alcantara & de Calatrava en Espagne, sont compris dans l'ordre de S. Bernard, aussi-bien que les Feuillans, nouvelle réforme commencée au XVIe. siecle. Les religieuses, appellées Bernardines suivent la regle de saint Benoît, & sont vêtues de blanc comme les Bernardins. (G)
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BERNAUDOIR | S. m. (Bonnetterie) c'est un grand panier d'osier, à claire voie, rond & oblong, dont l'usage est pour nettoyer les brins de laine que l'on ramasse dessous la claie, après que la laine est battue : on prend ces brins, on les met dans le bernaudoir, & avec une baguette on les agite circulairement jusqu'à ce qu'ils soient ouverts & assez nets pour être ajoûtés au reste de la laine battue. Voyez Planche du Bonnetier, fig. 1. un bernaudoir.
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BERNAW | (Géog.) petite ville d'Allemagne, dans l'électorat de Brandebourg, à deux lieues de Berlin. Il y en a encore deux autres de même nom, l'une dans l'évêché de Ratisbonne ; & l'autre dans le haut Palatinat.
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BERNBOURG | (Géog.) petite ville d'Allemagne, du cercle de la haute Saxe, & dans la principauté d'Anhalt, sur la riviere de Sara. Long. 30. lat. 51. 55.
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BERNE | (Marine) mettre le pavillon en berne, c'est hisser le pavillon au haut du bâton du pavillon, & le tenir ferlé. On met ordinairement le pavillon en berne pour appeller la chaloupe, & c'est en général un signal que les vaisseaux pavillons donnent aux inférieurs, pour les avertir de venir à bord de leur pavillon ; on s'en sert aussi pour divers autres signaux. Voyez HISSER & FERLER. (Z)
* BERNE, (CANTON DE) Géog. le second & le plus grand des treize cantons Suisses, d'environ soixante lieues de long, sur trente dans sa plus grande largeur. Il se divise en deux parties principales : l'une qu'on appelle le pays Allemand ; & l'autre, le pays Romand, ou plus communément le pays de Vaud. Le pays Allemand se partage en trente-cinq gouvernemens, & le pays de Vaud en treize. Les Bernois ont encore quatre gouvernemens par indivis avec les Fribourgeois. Berne est la capitale du canton.
BERNE, (Géog.) ville de Suisse, capitale du canton de même nom, dans une longue presqu'île formée par l'Aar. Long. 25. 10. lat. 47.
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BERNÉEK | (Géog.) il y a deux villes de ce nom : l'une, dans la Franconie, l'autre dans la Stirie.
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BERNEZO | (Géog.) petite ville du Piémont.
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BERNN | (Géog.) petite ville de la Poméranie.
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BERNSTADT | (Géog.) petite ville de Silésie, sur le Weida.
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BERNSTEIN | (Géog.) ville de la nouvelle marche de Brandebourg.
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BERNTHALER | (Commerce) écu du canton de Berne. Il vaut quelque chose de moins que les écus d'Empire, appellés ryxdalers ; c'est-à-dire, qu'il ne vaut pas tout-à-fait cinq livres de notre monnoie.
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BEROE | (Myth.) une des nymphes, qui accompagne dans Virgile, Cyrene mere d'Aristée.
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BERRE | (Géog.) petite ville de France, en Provence, avec titre de baronie, au diocèse d'Arles. Long. 22. 52. lat. 43. 32.
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BERRI | (Géog.) province de France, avec titre de duché, bornée au septentrion par l'Orléanois, le Blaisois & le Gatinois, à l'orient par le Nivernois & le Bourbonnois, au midi par le Bourbonnois & la Marche, & à l'occident par la Touraine & le Poitou. Elle se divise en haut & bas Berri. Bourges en est la capitale.
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BERRUYERS | S. m. pl. (LES) Géog. anc. mod. & Hist. peuples du Berri. Ils occupoient jadis toute la Celtique, & y formoient la plus puissante monarchie des Gaules. Bourges en étoit la capitale.
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BERS | (Pharmacie) électuaire des Egyptiens, qui leur excitoit un délire gai & momentané.
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BERSABÉ | ou BEERSEBA, (Géog. sainte) ville de la Palestine, vers Gaza, qu'on a prise depuis pour Gibelin. Bersabée signifie puits du serment. Elle fut ainsi appellée, parce qu'Abraham & Abimelech y jurerent l'alliance qu'Isaac confirma dans la suite, soit avec Abimelech, soit avec son successeur. Elle fut du partage de la tribu de Simeon. Ce n'est plus qu'un village qu'on nomme Gallyn ou Bethgeblin.
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BERSANIEN | ou SEMIDULITES, subst. m. pl. (Hist. ecclés.) hérétiques qui s'éleverent dans le vj. siecle. Ils soûtenoient les erreurs des Gadanaïtes, & faisoient consister leurs sacrifices à prendre du bout du doigt la fleur de farine, & à la porter à la bouche. S. Jean de Damas, des Hérés. Baronius, A. C. 535. n°. 74. (G)
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BERSARIEN | ou BEVERARIENS, sub. m. pl. (Hist. mod. & anc.) bas officiers de la cour de Charlemagne. Quelques-uns prétendent que les bersariens étoient aussi les mêmes que ceux que les anciens appelloient bestiarii. Voyez BESTIARII. Et ils entendent par beverariens, ceux qui chassoient le castor.
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BERSELL | ou BRESELLO, (Géog.) ville d'Italie, dans le Modénois, proche le confluent de la Linza & du Pô. Long. 28. lat. 44. 55.
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BERSIAMITES | (LES) s. m. pl. (Géog.) peuples de l'Amérique septentrionale, au Canada, sur les bords de la riviere de S. Laurent.
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BERSUIRE | (Géog.) petite ville de France, dans le bas Poitou. Long. 17. 3. lat. 46. 52.
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BERTINORO | (Géog.) ville d'Italie, dans la Romagne, sur une colline. Long. 27. 17. lat. 44. 8.
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BERTOIS | S. m. c'est ainsi qu'on appelle, dans les carrieres d'ardoises, les cordes qui sont attachées au bassicot, & qui servent à l'enlever hors de la carriere, par le moyen de l'engin. Voyez l'article ARDOISE.
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BERTONNEAU | poisson. Voyez TURBOT. (I)
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BERTRAND | (SAINT) Géog. ville de France, en Gascogne, sur la Garonne. Long. 18. 8. lat. 43. 3.
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BES | S. m. (Hist. anc.) une des pieces qui ne contenoient qu'une portion de l'as des Romains. Le bes étoit de huit parties de l'as divisé en douze, ou de 8/12 de l'as. Cette valeur du bes étoit la même, soit qu'il fût question de l'as pondéral, ou de l'as mensural, ou de l'as monnoie. Voyez AS.
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BESAIGUE | S. f. est un outil dont se servent les Charpentiers pour dresser & reparer leurs bois lorsqu'ils les ont refaits à la coignée, & à faire les tenons, les mortoises, &c. Elle est faite par un bout comme un ciseau à un tranchant, & par l'autre comme un bec-d'âne ; dans le milieu est une douille qui sert à l'ouvrier pour la tenir ; sa longueur est environ de trois piés & demi. Voyez la figure 6. Planche des outils du Charpentier.
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BESANçON | (Géog.) ville de France, capitale de la Franche-Comté ; elle est divisée en haute & basse ville. Long. 23. 44. lat. 47. 18.
Il y a à cinq lieues de Besançon une grande caverne creusée dans une montagne, couverte par le dessus de chênes & d'autres grands arbres, dont on trouve trois récits dans les Mémoires de l'Académie ; l'un dans les anciens Mémoires, tome II. le second dans le recueil de 1712, & le troisieme dans celui de 1726. Nous invitons les lecteurs crédules de les parcourir tous les trois ; moins pour s'instruire des particularités de cette grotte qui ne sont pas bien merveilleuses, que pour apprendre à douter. Quoi de plus facile que de s'instruire exactement de l'état d'une grotte ? Y a-t-il quelque chose au monde sur quoi il soit moins permis de se tromper, & d'en imposer aux autres ? Cependant la premiere relation est fort chargée de circonstances ; on nous assûre, par exemple, qu'on y accourt en été avec des chariots & des mulets qui transportent des provisions de glace pour toute la province ; que cependant la glaciere ne s'épuise point, & qu'un jour de grandes chaleurs y reproduit plus de glaces qu'on n'en enleve en huit jours ; que cette prodigieuse quantité de glace est formée par un petit ruisseau qui coule dans une partie de la grotte ; que ce ruisseau est glacé en été ; qu'il coule en hyver ; que quand il regne des vapeurs dans ce soûterrein, c'est un signe infaillible qu'il y aura de la pluie le lendemain ; & que les paysans d'alentour ne manquent pas de consulter cette espece singuliere d'almanach, pour savoir quel tems ils auront dans les différens ouvrages qu'ils entreprennent.
Cette premiere relation fut confirmée par une seconde ; & la grotte conserva tout son merveilleux, depuis 1699 jusqu'en 1712, qu'un professeur d'Anatomie & de Botanique à Besançon y descendit. Les singularités de la grotte commencerent à disparoître ; mais il lui en resta encore beaucoup : le nouvel observateur loin de contester la plus importante, la formation de la glace, d'autant plus grande en été, qu'il fait plus chaud, en donne une explication, & prétend que les terres du voisinage, & sur-tout celles de la voûte, sont pleines d'un sel nitreux, ou d'un sel ammoniac naturel ; & que ce sel mis en mouvement par la chaleur de l'été, se mêlant plus facilement avec les eaux qui coulent par les terres & les fentes du rocher, pénetre jusque dans la grotte ; ce mêlange, dit M. de Fontenelle, les glace précisément de la même maniere que se font nos glaces artificielles ; & la grotte est en grand, ce que nos vaisseaux à faire de la glace sont en petit. Voilà, sans contredit, une explication très-simple & très-naturelle ; c'est dommage que le phénomene ne soit pas vrai.
Un troisieme observateur descendit quatre fois dans la grotte, une fois dans chaque saison, y fit des observations, & acheva de la dépouiller de ses merveilles. Ce ne fut plus en 1726, qu'une cave comme beaucoup d'autres ; plus il fait chaud au-dehors, moins il fait froid au-dedans : non-seulement les eaux du ruisseau ne se glacent point en été, & ne se dégelent point en hyver, mais il n'y a pas même de ruisseau ; les eaux de la grotte ne sont que de neige ou de pluie ; & de toutes ses particularités, il ne lui reste que celle d'avoir presque sûrement de la glace en toute saison.
Qui ne croiroit sur les variétés de ces relations, que la grotte dont il s'agit étoit à la Cochinchine, & qu'il a fallu un intervalle de trente à quarante ans, pour que des voyageurs s'y succédassent les uns aux autres, & nous détrompassent peu-à-peu de ses merveilles ? cependant il n'est rien de cela ; la grotte est dans notre voisinage : l'accès en est facile en tout tems ; ce ne sont point des voyageurs qui y descendent ; ce sont des philosophes, & ils nous en rapportent des faits faux, des préjugés, de mauvais raisonnemens, que d'autres philosophes reçoivent, impriment & accréditent de leur témoignage.
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BESICLES | S. f. pl. (Lunetier) c'est ainsi qu'on appelloit autrefois les lunettes à mettre sur le nez. Il y en a de deux sortes ; les unes dont le verre est convexe ou plan convexe, servent pour les personnes qui ont la vûe longue, c'est-à-dire qui ne distinguent bien que les objets éloignés. Voyez PRESBYTE, CONVEXE, LENTILLE, VERRE, &c. les autres dont le verre est concave ou plan concave, servent pour ceux qui ont la vûe courte, c'est-à-dire qui ne distinguent bien que les objets fort proches, Voyez MYOPE, &c. Les premieres grossissent l'objet, parce qu'elles rendent les rayons plus convergens qu'ils n'étoient avant que de traverser le verre ; les autres le diminuent, parce qu'elles rendent les rayons moins convergens. Voyez CONVERGENT. Dans le premier cas, l'angle visuel est augmenté par la convergence augmentée des rayons ; dans le second il est diminué par la diminution de cette même convergence : mais ces deux especes de lunettes font voir l'objet plus distinctement qu'à la vûe simple. On en trouvera les raisons aux articles déjà cités, PRESBYTE, MYOPE, VISION, &c. (O)
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BESIGHEIM | (Géog.) ville d'Allemagne, en Soüabe, au duché de Wirtemberg, au confluent de l'Entz & du Neckre, entre Hailbron & Studgard.
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BESLERIE | S. f. besleria, (Hist. nat. bot.) genre de plante dont le nom a été dérivé de celui de Basile Besler, pharmacien de Nuremberg. La fleur des plantes de ce genre est monopétale irréguliere, à deux levres ou en masque ; il s'éleve du fond du calice un pistil qui est attaché comme un clou à la partie postérieure de la fleur, & qui devient dans la suite un fruit mou, charnu, ovoïde, & rempli de petites semences. Plumier, nova plant. Amer. gen. Voy. PLANTE. (I)
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BESLIS | S. m. (Hist. mod.) c'est ainsi qu'on appelle en Turquie les valets-de-pié des gouverneurs & des bachas ; on en prend souvent pour en faire des janissaires.
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BESOGNE | S. f. terme de Riviere usité dans les anciennes ordonnances par tous les officiers des ports, qui signifie exercice, travail. Les mouleurs de bois ne peuvent avoir qu'une besogne à-la-fois. Besogne se dit aussi d'une espece de bateau foncet.
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BESOIN | S. m. c'est un sentiment desagréable, occasionné par l'absence apperçûe & la présence desirée d'un objet. Il s'ensuit de-là, 1°. que nous avons deux sortes de besoins ; les uns du corps, qu'on nomme appétits ; les autres de l'esprit, qu'on appelle desirs : 2°. que puisqu'ils sont occasionnés par l'absence d'un objet ; ils ne peuvent être satisfaits que par sa présence : 3°. que puisque l'absence de l'objet qui occasionnoit le besoin étoit desagréable, la présence de l'objet qui le satisfait est douce : 4°. qu'il n'y a point de plaisir sans besoin : 5°. que l'état d'un homme qui auroit toûjours du plaisir sans avoir jamais éprouvé de peine, ou toûjours de la peine sans avoir connu le plaisir, est un état chimérique : 6°. que ce sont les alternatives de peines & de plaisirs qui donnent de la pointe aux plaisirs & de l'amertume aux peines : 7°. qu'un homme né avec un grand chatouillement qui ne le quitteroit point, n'auroit aucune notion de plaisir : 8°. que des sensations ininterrompues ne feroient jamais ni notre bonheur ni notre malheur : 9°. que ce n'est pas seulement en nous-mêmes que les besoins sont la source de nos plaisirs & de nos peines, mais qu'ils ont donné lieu à la formation de la société, à tous les avantages qui l'accompagnent, & à tous les desordres qui la troublent. Supposons un homme formé & jetté dans cet univers comme par hasard, il repaîtra d'abord ses yeux de tout ce qui l'environne ; il s'approchera ou s'éloignera des objets, selon qu'il en sera diversement affecté : mais au milieu des mouvemens de la curiosité qui l'agiteront, bientôt la faim se fera sentir, & il cherchera à satisfaire ce besoin. A peine ce besoin sera-t-il satisfait, qu'il lui en surviendra d'autres qui l'approcheront de ses semblables s'il en rencontre. La crainte, dit l'auteur de l'Esprit des lois, porte les hommes à se fuir ; mais les marques d'une crainte réciproque doivent les engager à se réunir. Ils se réunissent donc ; ils perdent dans la société le sentiment de leur foiblesse, & l'état de guerre commence. La société leur facilite & leur assûre la possession des choses dont ils ont un besoin naturel ; mais elle leur donne en même tems la notion d'une infinité de besoins chimériques qui les pressent mille fois plus vivement que des besoins réels, & qui les rendent peut-être plus malheureux étant rassemblés, qu'ils ne l'auroient été dispersés.
* BESOIN, NECESSITE, INDIGENCE, PAUVRETE, DISETTE, (Gram.) La pauvreté est un état opposé à celui d'opulence ; on y manque des commodités de la vie, on n'est pas maître de s'en tirer : ce n'est pas un vice en soi, mais il est pis devant les hommes. L'indigence n'est autre chose que l'extrème pauvreté ; on y manque du nécessaire. La disette est relative aux alimens. Le besoin & la nécessité sont des termes qui seroient entierement synonymes, l'un à pauvreté, & l'autre à indigence, s'ils n'avoient pas encore quelque rapport aux secours qu'on attend des autres : le besoin seulement presse moins que la nécessité ; on méprise les pauvres, on a pitié des indigens ; on évite ceux qui ont besoin, & l'on porte à ceux qui sont dans la nécessité. Un pauvre avec un peu de fierté, peut se passer de secours ; l'indigence contraint d'accepter ; le besoin met dans le cas de demander, la nécessité, dans celui de recevoir le plus petit don. Si l'on examine les nuances délicates de ces différens états, peut-être y trouvera-t-on la raison des sentimens bisarres qu'ils excitent dans la plûpart des hommes.
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BESON | S. m. (Comm.) mesure des liquides dont on se sert en quelques lieux d'Allemagne, & particulierement à Augsbourg. Douze besons font le jé, & huit masses le beson. Voyez JE & MASSE. (G)
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BESORCH | S. m. (Comm.) monnoie d'étain alliagée qui a cours à Ormus ; elle vaut trois deniers argent de France.
Le besorch est la dixieme partie d'un Pays. Voyez PAYS.
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BESSAN | (Géog.) petite ville de France en Languedoc, au diocèse d'Agde.
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BESSARABI | ou BUDZIAC, (Géog.) petite contrée entre la Moldavie, le Danube, la mer Noire & la petite Tartarie.
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BESSE | (Géog.) ville de France en Auvergne, élection de Clermont.
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BESSI | (Comm.) petite monnoie qui fait un demi-soldo ; il en faut quarante pour faire un lira.
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BESSIERES | (Géog.) ville de France dans le bas Languedoc, au diocèse de Toulouse.
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BESSIN | (LE) Géog. petit pays de France dans la basse Normandie, proche la mer. On le divise en haut & bas : Bayeux en est la capitale.
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BESSON | BOSSON, BOUCHE, BOUGE, (Marine) c'est la rondeur des baux & des tillacs, & proprement tout ce qui est relevé hors d'oeuvre & qui n'est pas uni. Voyez BAU & TILLAC. (Z)
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BESTIAIRES | S. m. pl. (Hist. anc.) chez les anciens Romains, étoient des hommes qu'on payoit pour combattre contre des bêtes sauvages, ou bien que la justice avoit condamnés à cette punition. Nous distinguons communément deux sortes de bestiaires ; les premiers étoient condamnés aux bêtes, soit comme ennemis faits prisonniers, ou comme esclaves & coupables de quelque crime énorme. On les exposoit les uns & les autres aux bêtes tout nuds & sans défense ; il ne leur servoit même de rien de vaincre les bêtes & de les tuer, car on en lâchoit toûjours de nouvelles sur eux, & le combat ne finissoit que par la mort des condamnés. Mais il arrivoit rarement qu'il en fallût deux pour le même homme ; deux hommes étoient souvent vaincus par une seule bête. Cicéron parle d'un lion qui en massacra lui seul deux cent. Les bestiaires qui succédoient aux premiers, s'appelloient , & les derniers, ; chez les Romains, meridiani. Voyez GLADIATEUR, AMPHITHEATRE, &c.
Les Chrétiens étoient des bestiaires de cette espece ; quelques-uns même d'entr'eux, bien que citoyens romains, n'en étoient pas exempts, quoiqu'ils dûssent l'être suivant les lois.
La seconde espece des bestiaires étoit composée, ainsi que l'observe Seneque, de jeunes gens qui pour acquérir de l'expérience au maniement des armes, combattoient quelquefois contre les bêtes, & quelquefois les uns contre les autres ; ou des braves qui vouloient bien s'exposer à ces dangereux combats, pour montrer leur courage & leur adresse. Auguste excita les jeunes gens de la premiere qualité à ce genre d'exercice ; Néron s'y exposa ; & Commode, pour en être sorti vainqueur, acquit le titre d'Hercule romain.
Vigenere ajoûte deux autres especes de bestiaires ; les premiers, qui l'étoient par état, combattoient pour de l'argent ; les seconds, qui se présentoient armés & plusieurs ensemble, combattoient en liberté contre un certain nombre de bêtes. (G)
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BESTIALITÉ | (en Droit) est le crime d'un homme ou d'une femme qui auroit un commerce charnel avec une bête. Ce crime se punit par le feu : on brûle même l'animal qui a été l'instrument du crime. (H)
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BESTIAUX | voyez BETAIL.
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BESTIO | ou LION, s. m. (Marine) c'est le bec ou la pointe de l'éperon à l'avant des portes-vergues. Les matelots donnent ce nom à la figure qu'on y met, & qui communément représente quelqu'animal. Quelques-uns le nomment le lion, parce qu'autrefois la plûpart des vaisseaux hollandois portoient à la pointe de l'éperon la figure de cet animal : aujourd'hui l'on y met différentes sortes de figures. V. Pl. I. en N, la figure d'un centaure qui est à la pointe de l'éperon du vaisseau le centaure. Les Espagnols y mettent assez souvent la figure de quelque saint ou sainte dont le vaisseau porte le nom. (Z)
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BETAIL | S. m. (Econom. rust.) On comprend sous ce terme toutes les bêtes à quatre piés qui servent à la nourriture de l'homme & à la culture des terres. On les distribue en bêtes à cornes & en bêtes à laine. Les bêtes à cornes sont les boeufs & les vaches ; & les bêtes à laine sont les moutons & les brebis : on peut y ajoûter les boucs & les chevres. Il est inutile de s'étendre sur les secours & sur les revenus qu'on tire des bestiaux. Voyez les articles BOEUF, VACHE, MOUTON, BREBIS, BOUC, CHEVRE, AGNEAU, ce qui concerne ces animaux. Voyez aussi BERGER & BERGERIE.
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BETANCOS | (Géogr.) petite ville d'Espagne dans la Galice, sur le Mandéo. Longit. 9. 40. latit. 43. 21.
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BETE | ANIMAL, BRUTE, (Gramm.) Bête se prend souvent par opposition à homme ; ainsi on dit : l'homme a une ame, mais quelques philosophes n'en accordent point aux bêtes. Brutes est un terme de mépris qu'on n'applique aux bêtes & à l'homme qu'en mauvaise part. Il s'abandonne à toute la fureur de son penchant, comme la brute. Animal est un terme générique qui convient à tous les êtres organisés vivans : l'animal vit, agit, se meut de lui-même, &c. Si on considere l'animal comme pensant, voulant, agissant, réfléchissant, &c. on restraint sa signification à l'espece humaine ; si on le considere comme borné dans toutes les fonctions qui marquent de l'intelligence & de la volonté, & qui semblent lui être communes avec l'espece humaine, on le restraint à bête. Si on considere la bête dans son dernier degré de stupidité, & comme affranchie des lois de la raison & de l'honnêteté, selon lesquelles nous devons régler notre conduite, nous l'appellons brute.
On ne sait si les bêtes sont gouvernées par les lois générales du mouvement, ou par une motion particuliere : l'un & l'autre sentiment a ses difficultés. V. l'art. AME DES BETES. Si elles agissent par une motion particuliere, si elles pensent, si elles ont une ame, &c. qu'est-ce que cette ame ? On ne peut la supposer matérielle : la supposera-t-on spirituelle ? Assûrer qu'elles n'ont point d'ame & qu'elles ne pensent point, c'est les réduire à la qualité de machines ; à quoi l'on ne semble guere plus autorisé, qu'à prétendre qu'un homme dont on n'entend pas la langue est un automate. L'argument qu'on tire de la perfection qu'elles mettent dans leurs ouvrages, est fort ; car il sembleroit, à juger de leurs premiers pas, qu'elles devroient aller fort loin : cependant toutes s'arrêtent au même point, ce qui est presque le caractere machinal. Mais celui qu'on tire de l'uniformité de leurs productions, ne me paroît pas tout-à-fait aussi bien fondé. Les nids des hirondelles & les habitations des castors ne se ressemblent pas plus que les maisons des hommes. Si une hirondelle place son nid dans un angle, il n'aura de circonférence que l'arc compris entre les côtés de l'angle ; si elle l'applique au contraire contre un mur, il aura pour mesure la demi-circonférence. Si vous délogez des castors de l'endroit où ils sont, & qu'ils aillent s'établir ailleurs comme il n'est pas possible qu'ils rencontrent le même terrein, il y aura nécessairement variété dans les moyens dont ils useront, & variété dans les habitations qu'ils se construiront.
Quoi qu'il en soit, on ne peut penser que les bêtes ayent avec Dieu un rapport plus intime que les autres parties du monde matériel ; sans quoi, qui de nous oseroit sans scrupule mettre la main sur elles & répandre leur sang ? qui pourroit tuer un agneau en sûreté de conscience ? Le sentiment qu'elles ont, de quelque nature qu'il soit, ne leur sert que dans le rapport qu'elles ont entr'elles, ou avec d'autres êtres particuliers, ou avec elles-mêmes. Par l'attrait du plaisir elles conservent leur être particulier, & par le même attrait elles conservent leur espece. J'ai dit attrait du plaisir, au défaut d'une autre expression plus exacte ? car si les bêtes étoient capables de cette même sensation que nous nommons plaisir, il y auroit une cruauté inoüie à leur faire du mal : elles ont des lois naturelles, parce qu'elles sont unies par des besoins, des intérêts, & c. mais elles n'en ont point de positives, parce qu'elles ne sont point unies par la connoissance. Elles ne semblent pas cependant suivre invariablement leurs lois naturelles ; & les plantes en qui nous n'admettons ni connoissance ni sentiment, y sont plus soûmises.
Les bêtes n'ont point les suprèmes avantages que nous avons, elles en ont que nous n'avons pas : elles n'ont pas nos espérances, mais elles n'ont pas nos craintes : elles subissent comme nous la mort, mais c'est sans la connoître ; la plûpart même se conservent mieux que nous, & ne font pas un aussi mauvais usage de leurs passions. Voyez les articles AME & ANIMAL.
* BETES, (Combat des) Histoire anc. Les combats des bêtes se faisoient dans les amphithéatres, les cirques, & autres édifices publics. Les bêtes qui y servoient étoient ou domestiques & privées, comme le taureau, le cheval, l'éléphant, &c. ou sauvages, comme le lion, l'ours, le tigre, la panthere, &c. elles combattoient ou contre d'autres de la même espece, ou contre des bêtes de différentes especes, ou contre des hommes, ces hommes étoient ou des criminels, ou des gens gagés, ou des athletes. On tenoit les bêtes enfermées dans des cachots ou caveaux rangés circulairement au rez de chaussée des arenes ; on les appelloit caveae : les plus furieuses étoient attachées par les jambes avec des instrumens de fer. Les criminels qui sortoient vainqueurs du combat des bêtes étoient quelquefois renvoyés absous ; mais pour l'ordinaire ce combat étoit regardé comme le dernier supplice. Voyez BESTIAIRES. Les profanes condamnoient au supplice des bêtes les premiers Chrétiens, qui loin de se défendre, se laissoient massacrer comme des agneaux.
Mais les bêtes féroces ne servoient pas seulement dans les amphithéatres ; il y avoit chez les Grecs & les Romains des gens qui les apprivoisoient, leur apprenoient des tours de souplesse, & les rendoient dociles au joug si l'on en croit les monumens & les Poëtes. On voit dans plusieurs morceaux antiques des léopards, des lions, des pantheres, des cerfs, &c. attelés. On lit dans Martial que les léopards ont été subjugués, les tigres conduits avec le foüet, les cerfs bridés, les ours emmuselés, les sangliers conduits au licou, les bisontes ou taureaux sauvages, mis aux chars, &c.
Les Grecs, dit le savant pere de Montfaucon, l'emportoient sur les Romains dans cet art, ainsi qu'en plusieurs autres : on vit dans la seule pompe de Ptolomée Philadelphe, vingt-quatre chars tirés par des éléphans, soixante par des boucs, douze par des lions, sept par des orix, cinq par des bufles, huit par des autruches, & quatre par des zebres.
L'empereur Eliogabale fit tirer son char par quatre chiens d'une grandeur énorme ; il parut en public traîné par quatre cerfs ; il fit une autre fois atteler des lions & des tigres : dans ces occasions il prenoit les habits des dieux auxquels ces animaux étoient consacrés. Voyez AMPHITHEATRE, CIRQUE, THEATRE, GYMNASE, GYMNASTIQUE, ATHLETE, LUTTE, LUTTEUR.
BETES, (Chasse) Les chasseurs distribuent les bêtes en fauves, en noires, & en rousses ou carnacieres : les fauves sont les cerfs, les dains, les chevreuils, avec leurs femelles & faons ; les noires sont les sangliers & les marcassins. Les bêtes fauves & noires composent la grande venaison. Les bêtes rousses ou carnacieres, sont le loup, le renard ; le blaireau, la fouine, le putois, &c. il est permis à tout le monde de les chasser & tuer. Voyez VENAISON.
BETE CHEVALINE, (Manége) c'est la même chose que cheval ; mais cela ne se dit que d'un cheval de paysan, ou de peu de valeur. Bête bleue, est une expression figurée & proverbiale, qui signifie un cheval qui n'est propre à rien. (V)
BETE, jeu de la bête ou de l'homme, (Jeu) Il se joüe à trois, quatre, cinq, six, & même sept : mais dans ce dernier cas il faut que le jeu soit composé de trente-six cartes, & que la tourne soit la derniere du jeu de celui qui mêle : mais le mieux c'est de la jouer à cinq & à trois. Le jeu de cartes, quand on n'est que cinq, ne doit contenir que trente-deux cartes ; & à quatre & à trois on ôte les sept. Le roi est la principale carte du jeu de la bête ; la dame le suit & emporte le valet, qui leve l'as, celui-ci le dix, & ainsi des autres. Celui à qui il écheoit de mêler les cartes, les fait couper à l'ordinaire au premier de sa gauche, & en distribue cinq à chaque joüeur, en tel nombre à la fois qu'il lui plaît. Il y a de l'avantage à joüer en premier. Quand les cartes sont ainsi données, l'on tourne la premiere du talon que l'on y laisse retournée, parce qu'elle est la triomphe pendant tout le coup.
En commençant, chaque joüeur met devant soi une fiche & deux jettons, l'un pour le jeu, & l'autre pour le roi de triomphe, quoique celui qui l'a ne joue pas ; suffisant pour cela que le coup se joue ; & celui qui mêle y en ajoûte un troisieme, qui le fait reconnoître pour avoir mêlé les cartes. Celui qui gagne tire les jettons & une fiche, & ainsi des autres à tous les coups, jusqu'à ce que toutes les fiches soient gagnées ; après quoi chacun en remet une autre, & l'on recommence comme auparavant. Celui qui fait jouer, & a toutes les mains, gagne tous les jettons, tout ce qui est sur jeu, fût-ce des bêtes qui n'y auroient pas été mises pour le coup, & même les fiches ; & outre cela chaque joüeur est encore obligé de lui payer un jetton : s'il ne fait pas toutes les mains, il n'a pour l'avoir entrepris, que la peine & le chagrin de ne les avoir pas faites. Mais lorsque celui qui fait jouer ne leve pas trois mains ; ou les deux premieres, lorsqu'elles sont partagées entre les joüeurs, il fait la bête, c'est-à-dire, qu'il met autant de jettons qu'il en auroit tiré s'il eût gagné. Ainsi si le coup étoit simple, c'est-à-dire qu'il n'y eût pas sur le jeu des bêtes faites précédemment, & si l'on étoit cinq, celui qui feroit la bête ne la feroit que de onze jettons, parce que la fiche & le jetton que chacun met devant soi en fait dix, & celui qui mêle met le onzieme. Cependant il peut avoir été réglé entre les joüeurs de mettre moins devant soi ; alors la bête seroit proportionnée au nombre de jettons fixé.
L'on voit que dans les onze jettons dont nous venons de parler plus haut, nous ne comprenons pas celui qui est destiné pour le roi de triomphe, qu'il laisseroit cependant, si faisant joüer il perdoit le coup : mais quand le roi les tire, chaque joüeur en met de nouveaux pour le coup suivant. Toute bête simple doit aller sur le coup où elle a été faite ; & s'il y en avoit plusieurs simples faites d'un même coup, elles iroient toutes ensemble. Mais les bêtes doubles doivent aller les unes après les autres dans les coups suivans, & toûjours les plus grosses les premieres.
Lorsqu'il y a une bête sur le jeu, les autres joüeurs ne mettent point de jettons, excepté celui qui mêle, qui donne le sien à l'ordinaire. Celui qui gagne lorsqu'il y a une bête double au jeu, leve outre la bête une fiche, & tous les jettons qui sont au jeu ; & fait la bête proportionnellement au gain, lorsqu'il perd. Quand nous avons dit que pour gagner il falloit au moins faire les deux premieres mains, c'est bien entendu qu'aucun des joüeurs n'en fait trois ; puisqu'alors on perd comme si on les eût faites le dernier.
Il arrive assez souvent dans ce jeu que deux joüeurs se disputent le gain du coup, parce que celui qui a fait jouer d'abord, n'empêche point de jouer aussi quiconque se trouve un assez beau jeu pour l'emporter sur lui & sur tous les joüeurs qui se liguent contre lui en faveur du premier joüeur ; parce que le second risque de perdre le double de ce qui est au jeu : ce qui fait voir qu'on ne dit point contre, sans un très-beau jeu. On n'est plus reçû à le dire, quand une fois la premiere carte est jettée. Toute l'habileté des joüeurs consiste à forcer celui qui fait joüer à surcouper, ou à se défaire de leurs bonnes cartes à propos, pour donner plus de force à ceux qui sont en état de le faire perdre ; ce qui cependant n'est de loi que dans le cas où il n'y a point de vole à craindre. On doit au contraire garder tout ce qui peut l'empêcher, lorsqu'on en est menacé. On doit encore fournir de la couleur joüée ; couper si l'on n'en a point ; & si quelque autre avoit déjà coupé, il faudroit le faire d'une triomphe plus haute que la premiere, si l'on pouvoit.
Lorsque tous les joüeurs ont vû leur jeu & passé, chacun peut aller en curieuse, en mettant un jetton au jeu. Voyez CURIEUSE & ALLER EN CURIEUSE. La curieuse est également avantageuse pour tous les joüeurs, & n'est pas un moindre agrément du jeu de bête : mais on doit se contenter d'en avoir une. Nous avons déjà dit, que celui qui avoit le roi de triomphe retiroit les jettons qui lui sont destinés ; celui qui retourne ce roi a le même privilége, pourvû toutefois, en l'un & l'autre cas, que le jeu se joue : celui qui fait la dévole, double tout ce qui est au jeu ; fait autant de bêtes qu'il auroit pû en gagner, & donne un jetton à chaque joüeur.
Pour faire joüer au jeu, il faut avoir en main un jeu dont on puisse faire trois mains, ou deux tout au moins, que l'on doit se hâter de faire le premier pour gagner. L'expérience apprendra bientôt quels sont les jeux qu'on peut joüer.
Celui qui renonce fait la bête ; celui qui donne mal en est quitte pour un jetton à chacun, & refait : lorsque le jeu de cartes est faux, le coup où il est trouvé tel est nul ; mais les précédens sont bons.
BETE, (au jeu de) La bête désigne la perte que fait un joüeur qui ne fait pas trois mains ou les deux premieres, quand un autre joüeur en fait trois.
BETE simple ; c'est une bête faite en premier lieu, simplement sur l'enjeu de chaque joüeur.
BETE double ; se dit d'une bête faite sur une autre bête, non-seulement de l'enjeu de chaque joüeur, mais encore de la bête qui étoit au jeu, & qu'on se proposoit de tirer.
BETE de renonce ; c'est le double payement qu'on est obligé de faire de tout ce qui s'enleve du jeu dans un coup ordinaire, pour n'avoir pas fourni de la couleur qu'on demandoit.
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BETELE | betela codi, Hort. Malab. BETRE ou TEMBOUL ; plante qui grimpe & qui rampe comme le lierre. Planche XXIX. Hist. nat. figure 3. Ses feuilles sont assez semblables à celles du citronnier, quoique plus longues & plus étroites à l'extrémité : elles ont des petites côtes qui s'étendent d'un bout à l'autre, comme il y en a dans celles du plantain. Le fruit A du betele est assez semblable à la queue d'un lésard ou d'un loir : ce fruit est rare, & on le préfere à la feuille. On cultive cette plante comme la vigne, & on lui donne des échalas pour la soûtenir ; quelquefois on la joint à l'arbre qui porte l'areque, ce qui fait un ombrage fort agréable. Le bétele croît dans toutes les Indes orientales, & sur-tout sur les côtes de la mer. Il n'y en a point dans les terres, à moins qu'on ne l'y ait planté.
Les Indiens mâchent des feuilles de bétele à toute heure du jour, & même de la nuit : mais comme ces feuilles sont ameres, ils corrigent cette amertume en les mêlant avec de l'areque & un peu de chaux, qu'ils enveloppent dans la feuille. D'autres prennent avec le bétele des trochisques qui portent le nom de câte : ceux qui sont plus riches, y mêlent du camfre de Borneo, du bois d'aloès, du musc, de l'ambre gris, &c. Le bétele, ainsi préparé, est d'un si bon goût, & a une odeur si agréable, que les Indiens ne peuvent pas s'en passer ; presque tous en usent, au moins ceux qui peuvent s'en procurer. Il y en a aussi qui mâchent de l'areque avec de la canelle & du girofle : mais c'est ordinairement de l'areque avec un peu de chaux enveloppée dans la feuille de bétele, comme nous l'avons déjà dit. Ils crachent après la premiere mastication une liqueur rouge, qui est teinte par l'areque. Ils ont par l'usage du bétele, l'haleine fort douce & d'une très-bonne odeur, qui se répand au point de parfumer la chambre où ils sont. On prétend que sans l'usage du bétele ou d'autres aromates, ils auroient naturellement l'haleine fort puante : mais cette mastication gâte leurs dents, les noircit, les carie & les fait tomber : il y a des Indiens qui n'en ont plus à 25 ans, pour avoir fait excès du bétele.
Lorsqu'on se quitte pour quelque tems, on se fait présent de bétele, que l'on offre dans une bourse de soie ; & on ne croiroit pas avoir son congé, si on n'avoit reçû du bétele. On n'ose pas parler à un homme élevé en dignité, sans avoir la bouche parfumée de bétele : il seroit même impoli de parler à son égal sans avoir pris cette précaution, qui empêche la mauvaise odeur qui pourroit venir de la bouche ; & si par hasard un homme se présente sans avoir mâché du bétele, il a grand soin de mettre sa main devant sa bouche en parlant, pour intercepter toute odeur desagréable ; ce qui prouve bien que les Indiens sont suspects de mauvaise haleine. Les femmes, & sur-tout les femmes galantes, font grand usage du bétele, & le regardent comme un puissant attrait pour l'amour. On prend du bétele après le repas pour ôter l'odeur des viandes ; on le mâche tant que durent les visites ; on en tient à la main ; on s'en offre en se saluant & à toute heure : enfin toûjours du bétele. Cela ne vaudroit-il pas mieux que notre tabac, au moins pour l'odeur ; & si les dents s'en trouvoient mal, l'estomac en seroit plus sain & plus fort. Il y a dans ce pays-ci plus de gens qui manquent par l'estomac que par les dents. Ray, hist. pl. app. p. 1913.
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BETELFAGU | ou BETHELSAKI, (Géog.) ville d'Asie dans l'Arabie heureuse, environ à dix lieues de la mer Rouge. Long. 65. lat. 15. 40.
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BETHLÉEM | (Géog. sainte) en Palestine, ville fameuse par la naissance de Jesus-Christ, n'est plus aujourd'hui qu'un village sur une montagne, à deux lieues de Jérusalem.
* BETHLEEM, (Notre-Dame de) Hist. mod. ordre militaire institué par Pie II. le 18 Janvier 1459. Mahomet II. ayant pris Lemnos, Calixte III. la fit reprendre par le cardinal d'Aquilée ; & son successeur Pie II. pour la conserver, créa l'ordre de Notre-Dame de Bethléem. Les chevaliers devoient demeurer à Lemnos, & s'opposer aux courses que les Turcs faisoient dans l'Archipel & le détroit de Gallipoli : mais peu de tems après l'institution, Lemnos fut reprise par les Turcs ; & ce grand dessein s'évanoüit.
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BETHLÉÉMITES | (LES FRERES) Hist. ecclés. c'est un ordre qui a été fondé dans les îles Canaries par un gentilhomme françois nommé Pierre de Betencourt, pour servir les malades dans les hôpitaux. Le pape Innocent XI. approuva cet ordre en 1687, & lui prescrivit de suivre la regle de Saint Augustin. L'habit est semblable à celui des Capucins, hormis que leur ceinture est de cuir ; qu'ils portent des souliers, & qu'ils ont au cou une médaille représentant la naissance de Jesus-Christ à Bethléem.
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BETHULIE | (Géog. sacrée) ville de la tribu de Zabulon dans la Terre-Sainte : elle est fameuse par l'histoire de Judith.
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BETHUNE | (Géog.) ville de France au comté d'Artois, sur la petite riviere de Biette. Long. 20. 18. 8. lat. 50. 31. 66.
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BETLI | (Géog.) ville d'Asie, capitale du Curdistan, sur la riviere de Bendmahi. Long. 60. 10. lat. 37. 20.
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BETOINE | S. f. betonica, (Hist. nat. bot.) genre de plante à fleur en gueule ; dont la levre supérieure est relevée, pliée en gouttiere, & échancrée pour l'ordinaire : l'inférieure est divisée en trois parties, dont la moyenne est fort grande & échancrée. Il sort du calice un pistil qui est attaché comme un clou à la partie postérieure de la fleur, & entouré de quatre embryons, qui deviennent dans la suite autant de semences oblongues, enfermées dans une espece de capsule qui a servi de calice à la fleur : ajoûtez au caractere de la bétoine, que ses fleurs sont verticillées, & forment des épis au bout des tiges. Tournefort, Inst. rei herb. Voyez PLANTE. (I)
Elle est céphalique, hépatique, vulnéraire, bonne contre les convulsions, les affections des nerfs : on en prend en guise de tabac. Les feuilles fraîches de bétoine broyées, s'appliqueront avec succès sur les blessures récentes. Elle est pleine de soufre, avec un peu de sel volatil huileux, & de terre. La tisane faite avec ses feuilles, la conserve, & l'eau des fleurs, le sirop des fleurs & des feuilles, le suc & l'extrait conviennent dans les vapeurs, la sciatique, la goutte, la jaunisse, la paralysie. Ils procurent l'expectoration, & font cracher les matieres purulentes ; ils consolident les ulceres intérieurs ; rétablissent les fonctions des premieres voies, poussent par les urines le vent, les obstructions. Les Chirurgiens la font entrer dans les emplâtres & cataplasmes céphaliques.
Emplâtre de bétoine. Prenez bétoine verte, pimprenelle, aigremoine, sauge, pouliot, petite centaurée, orvale, de chaque six onces ; d'encens, de mastic, de chaque deux gros ; d'iris, d'aristoloche ronde, de chaque six gros ; de cire, de térébenthine, de résine de pin, de chaque six onces ; de gomme élemi, de goudron, de chaque deux onces ; de vin blanc, trois livres. Broyez bien d'abord dans un mortier toutes les plantes ; laissez-les en macération pendant une semaine dans le vin ; remuez-les ensuite, & les faites bouillir : tirez ensuite le suc par expression, passez-le, & le faites bouillir jusqu'à la diminution d'un tiers : ajoûtez le goudron, la cire fondue, la résine, les gommes, & enfin le dernier de tous les ingrédiens, la térébenthine ; faites bouillir doucement le tout ; retirez-le de dessus le feu, & le laissez refroidir ; alors répandez dessus l'iris & l'aristoloche réduite en poudre très-fine : battez bien le tout ensemble, ensorte qu'il soit de la consistance d'un emplâtre. Cet emplâtre est résolutif, fondant, détersif & incarnatif : on l'employe beaucoup dans les maladies de la tête. (N)
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BETOIRES | S. m. pl. (Economie rustiq.) On entend par ce mot, dans les campagnes où l'on s'en sert, des trous creusés en terre d'espace en espace, comme des puits, qu'on remplit ensuite de pierrailles. On y détermine le cours des eaux par des rigoles, afin qu'elles se perdent dans les terres. Dans les grandes basse-cours on les fait de pierre ; on les place de maniere que la saumure du fumier n'y pénetre pas ; on les couvre d'une grille de fer à mailles serrées ; on ne laisse à cette grille qu'une petite ouverture, afin que les eaux passent seules, & que les grosses ordures soient arrêtées.
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BETSCHAW | (Géog.) ville de Boheme, abondante en mines d'étain.
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BETSKO | (Géog.) petite ville de la haute Hongrie.
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BETTE | S. f. (Hist. nat. bot.) On distingue trois sortes de bettes ; la blanche, la rouge, & la bette-rave.
La bette ou poirée blanche, beta alba, a la racine cylindrique, ligneuse, de la grosseur du petit doigt, longue, blanche ; la feuille grande, large, lisse, épaisse, succulente, quelquefois d'un verd blanc, quelquefois d'un verd plus foncé ; la saveur nitreuse, une côte épaisse & large, la tige haute de deux coudées, grêle, cannelée, branchue ; la fleur placée à l'aisselle des feuilles sur des longs épis, petite, composée de plusieurs étamines garnies de sommets jaunâtres, & dans un calice à cinq feuilles un peu verd, qui se change en un fruit presque sphérique, inégal & bosselé, qui contient deux ou trois petites graines oblongues, anguleuses, rougeâtres, & inégalement arrondies.
La bette ou poirée rouge, beta rubra vulgaris, a la racine blanche ; la feuille plus petite que la précédente, fort rouge : c'est par là qu'on la distingue de la bette blanche.
La bette-rave, beta rubra radice rapae : elle a la tige plus haute que la bette ou poirée rouge ; sa racine est grosse de deux ou trois pouces, renflée, & rouge comme du sang en-dehors & en-dedans.
On cultive toutes ces especes dans les jardins. La premiere donne les cardes dont on fait usage en cuisine : on fait cas des racines de bette-rave ; qu'on mange en salade & autrement : on se sert en Medecine de la bette blanche.
On trouve par l'analyse, que la bette est composée d'un sel essentiel, ammoniacal, nitreux, mêlé avec une terre astringente & de l'huile, & délayé dans beaucoup de phlegme. Ses feuilles dessechées & jettées sur les charbons ardens, fusent comme le nitre. On compte la bette blanche entre les plantes émollientes.
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BETUW | ou BETAW, (Géog.) est une des trois parties qui composent la Gueldre Hollandoise : c'est le pays qui se trouve entre le Rhin & le Leck.
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BETYLES | S. m. pl. (Hist. anc.) pierres fameuses dans l'antiquité, dont on fit les plus anciennes idoles, qu'on croyoit animées, auxquelles même on attribuoit des oracles. Bochart tire l'origine des bétyles de cette pierre mystérieuse de Jacob, sur laquelle ce patriarche reposant pendant la nuit, eut une vision, & qu'à son réveil il oignit d'huile ; d'où le lieu fut appellé Bethel. Les bétyles étoient d'une grosseur très-médiocre, de figure ronde, avec des cannelures sur leur surface ; & on les croyoit descendus du ciel. On leur attribuoit mille vertus singulieres, & entre autres celles de faire prendre des villes & gagner des batailles navales aux généraux qui les portoient. Voyez dans les Mém. de l'Acad. des Belles-Lettres, les savantes recherches qu'a faites sur cette partie de la Mythologie M. Falconet, un des plus illustres membres de cette Académie. (G)
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BEURATH | (Géog.) ville de Boheme au comté de Glatz.
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BEURICHON | oiseau. Voyez ROITELET. (I)
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BEURRE | (Hist. & Econom. rustiq.) substance grasse, onctueuse, préparée ou séparée du lait, en le battant. Voyez LAIT.
Le beurre se fait en Barbarie, en mettant le lait ou la creme dans une peau de bouc, suspendue d'un côté à l'autre de la tente, & en le battant des deux côtés uniformément. Ce mouvement occasionne une promte séparation des parties onctueuses d'avec les parties séreuses. Voyages de Shaw, page 241. Ce n'a été que tard, que les Grecs ont eu connoissance du beurre : Homere, Théocrite, Euripide, & les autres poëtes, n'en font aucune mention ; cependant ils parlent souvent du lait & du fromage : Aristote qui a recueilli beaucoup de choses sur le lait & le fromage, ne dit rien du tout du beurre. On lit dans Pline, que le beurre étoit un mets délicat chez les nations barbares, & qui distinguoit les riches des pauvres.
Les Romains ne se servoient du beurre qu'en remede, & jamais en aliment ; Scockius observe que c'est aux Hollandois que les habitans des Indes orientales doivent la connoissance du beurre ; qu'en Espagne on ne s'en servoit de son tems qu'en médicament contre les ulceres ; & il ajoûte qu'il n'y a rien de meilleur pour blanchir les dents, que de les frotter avec du beurre.
Clement d'Alexandrie remarque que les anciens Chrétiens d'Egypte brûloient du beurre dans leurs lampes, sur leurs autels, au lieu d'huile ; & les Abyssiniens, suivant Godignus, conservent cette pratique. Dans les églises romaines il étoit permis anciennement pendant les fêtes de Noël, de servir de beurre au lieu d'huile, à cause de la grande consommation qui se faisoit de cette derniere dans d'autres usages.
Scockius écrivit un volume assez gros, de butiro & aversione casei, sur le beurre & sur l'aversion du fromage, où il traite de l'origine & des phénomenes du beurre. Il a recherché si le beurre étoit connu du tems d'Abraham, & si ce n'étoit pas le mets avec lequel il traita les Anges ; il examine comment on le préparoit chez les Scythes, d'où viennent ses différentes couleurs ; il enseigne comment il lui faut donner sa couleur naturelle, le battre, le saler, le garder, &c. La partie du Suffolk, en Angleterre, qu'on appelle le haut Suffolk, est un terrein riche, tout employé à des laiteries ; elle passe encore pour fournir le meilleur beurre, & peut-être le plus mauvais fromage d'Angleterre : le beurre est mis en barrils, ou assaisonné dans de petites caques, & vendu à Londres, ou même envoyé aux Indes occidentales, d'où les voyageurs nous disent qu'on l'a quelquefois rapporté aussi bon qu'au départ.
Voici la maniere dont on fait le beurre dans nos campagnes : quand le lait est refroidi & un peu reposé, on en va lever la creme avec une grande cuillere bien nette, & on la met dans un pot jusqu'à ce qu'on l'employe. Pour faire le beurre, on jette la creme dans une baratte. Voyez BARATTE. Il faut que la baratte soit bien lavée : on bat cette creme avec la batte-beurre, jusqu'à ce qu'elle s'épaississe. S'il arrive que les grandes chaleurs l'empêchent de prendre promtement, alors tirez une vache, & jettez de son lait chaud une juste quantité dans la baratte ; ou, si vous êtes en hyver, approchez un peu la baratte du feu tandis que vous battrez. Il y en a qui pensent que la creme prend plus promtement, si l'on met dans la baratte une piece d'argent. Quand le beurre sera bien fait & bien lavé avec de l'eau, on le serrera dans un lieu propre & frais.
Le beurre du mois de Mai est le plus estimé & le meilleur, celui qu'on fait en été entre les deux Notre-Dame, vient après : celui du commencement de l'automne est moins bon que les précédens ; mais il vaut mieux que celui qui se fait plus tard. Il faut le choisir d'une odeur & d'une saveur douce : quant à la couleur, il faut qu'elle soit jaune, mais d'un jaune peu foncé.
On a deux sortes de beurre : le salé & le fondu. Pour saler le beurre, prenez-en deux livres à la fois ; étendez-le avec un rouleau sur une table bien nette ; saupoudrez-le de sel bien égrugé ; pliez-le en trois ou quatre ; pétrissez-le bien ; étendez-le de nouveau ; salez une seconde fois & pétrissez ; goûtez-le ensuite, & s'il vous paroît assez salé, prenez un pot de grès, couvrez le fond de sel, mettez y votre beurre, & fermez votre pot avec un autre lit de sel ; ou faites une saumure de sel fondu dans l'eau, & versez-la dessus ; renouvellez de tems en tems cette saumure ; mettez sur cette saumure quelques doubles de papier, & placez votre pot dans un lieu frais.
Pour faire fondre le beurre, il faut le mettre dans un chauderon, sur un feu clair & moderé ; le faire bouillir jusqu'à ce qu'il soit cuit ; l'écumer, & le verser dans des pots de grès. Il se gardera pendant deux ans entiers, quoiqu'on n'y ait pas mis de sel.
La Bretagne est celle de nos provinces qui passe pour fournir le meilleur beurre. Il nous vient dans de petits pots de terre grise, couvert d'un lit de sel blanc.
BEURRE, en Chimie ; les Chimistes employent ce mot pour signifier plusieurs de leurs préparations, comme le beurre d'antimoine, celui d'arsenic, de cire, de saturne, &c. par rapport à la consistance de ces substances, qui approchent de celle du beurre.
Le beurre d'antimoine se fait avec une partie d'antimoine crud qu'on met en poudre dans un mortier ; ensuite on le broye sur le porphyre, en y mêlant peu-à-peu deux parties de sublimé corrosif. On met ce mêlange dans une cornue de verre qui est lutée, & dont la moitié reste vuide. On laisse la cornue en cet état dans un lieu humide, sans la boucher, pendant deux ou trois jours ; ensuite on la place dans un bain de sable ; on y ajuste un récipient, & après avoir luté les jointures, on donne un feu doux, qu'on augmente peu, mais qu'on continue long-tems, c'est-à-dire, jusqu'à ce qu'il ne paroisse plus couler rien par le bec de la cornue. En laissant le mélange dans la cornue, avant que de la mettre au feu, la matiere s'humecte un peu à l'air, & l'acide qui est dans le sublimé corrosif, commence à agir sur l'antimoine, & s'y joint plus intimement. Par cette précaution, on a aussi un beurre moins épais. Si malgré cela, il venoit assez épais pour s'amasser dans le cou de la cornue, il faudroit en approcher un charbon allumé, qui fera fondre le beurre, & le fera tomber plus promtement dans le récipient. On voit aussi que pour prévenir cet inconvénient de l'embarras du beurre dans le cou de la cornue, ce qui la feroit casser, & donneroit des vapeurs fort dangereuses, il est nécessaire d'employer pour faire cette opération, une cornue dont le col soit large & court. On doit avertir l'artiste qu'il faut qu'il évite soigneusement de respirer de la poudre qui s'éleve en broyant le sublimé corrosif avec l'antimoine ; il lui suffit pour cela de détourner la tête, & de broyer doucement & également.
Le beurre d'antimoine exposé à l'air, y prend de l'humidité & se liquéfie. Lorsque le beurre d'antimoine ressemble plus par sa consistance à l'huile qu'au beurre, on le nomme l'huile glaciale d'antimoine. Il faut avoir soin de mettre dans la cornue le mélange, de façon qu'il ne reste rien dans le col, parce que s'il y restoit quelque chose du mêlange, cela saliroit le beurre.
Si on a un beurre d'antimoine qui soit brun & épais, on le rectifie pour l'éclaircir & l'avoir plus coulant, & on le rectifie dans une cornue à feu doux ; c'est ce qu'on nomme beurre d'antimoine rectifié.
Basile Valentin rectifioit trois fois le beurre d'antimoine avec de l'esprit-de-vin ; il les mettoit digérer ensemble pendant trois mois avant que de redistiller, & il ajoûtoit de nouvel esprit-de-vin à chaque distillation. Le beurre d'antimoine devient par ce moyen liquide & rouge comme du sang.
Duchesne qui appelloit antidote polychreste, le beurre d'antimoine, le rectifioit trois fois aussi, laissant chaque fois le résidu, & il cohoboit sur ce beurre d'antimoine de l'esprit d'hydromel vieux, jusqu'à ce qu'il fût doux. Enfin il tiroit l'esprit par la distillation, jusqu'à ce que ce qui restoit fût en consistance d'huile ; & il le faisoit prendre comme fébrifuge ; depuis une goutte jusqu'à six.
La quantité du beurre d'antimoine qu'on retire est le tiers du mêlange qu'on a employé pour le faire, c'est-à-dire, que si on a employé quatre onces d'antimoine & huit onces de sublimé corrosif, on en retire quatre onces de beurre d'antimoine ; on doit même en tirer quatre onces & demie.
Il faut observer que le récipient qu'on met pour recevoir le beurre, doit être sec ; s'il étoit humide, le beurre s'y mettroit en poussiere.
Dans cette opération, le beurre d'antimoine distille plus aisément que le mercure, parce que l'esprit de sel en divisant l'antimoine, multiplie ses surfaces : & au contraire, en quittant le mercure, les globules de celui-ci se rapprochent, & de cette maniere le mercure devient moins volatil, & l'antimoine moins pesant.
L'esprit de sel marin est le dissolvant propre de l'antimoine ; c'est une des convenances que les Alchimistes trouvent qu'il a avec l'or ; l'acide du sel marin ayant plus de rapport avec l'antimoine qu'avec le mercure, il quitte celui-ci pour dissoudre l'antimoine.
Le beurre d'antimoine est la partie métallique de ce minéral, divisée & réduite en une consistance molle, par le moyen de l'acide du sel marin : c'est pourquoi on peut le faire avec quelque préparation d'antimoine que ce soit, pourvû qu'elle contienne la partie métallique de l'antimoine, & sous quelque forme qu'elle la contienne : mais on n'employe plus présentement, pour faire le beurre d'antimoine, que l'antimoine crud, parce qu'on ne fait plus le beurre d'antimoine, que pour faire le cinabre d'antimoine. Voyez CINABRE D'ANTIMOINE.
On compte jusqu'à sept manieres différentes de faire le beurre d'antimoine ; & on peut dire qu'il y en a autant qu'on peut trouver de moyens d'unir l'acide du sel marin avec la partie métallique de l'antimoine. On peut, par exemple, se servir de la chaux d'argent, c'est-à-dire, de l'argent dissous dans l'eau forte, & précipité par l'acide du sel marin : on est assuré que le beurre d'antimoine préparé par ce moyen, ne contient ni mercure, ni soufre grossier. Il faut prendre trois parties de chaux d'argent & une de régule.
Le beurre d'antimoine fait avec le régule est moins épais que celui qu'on fait avec l'antimoine crud, & il est plus pur lorsqu'on le fait avec l'antimoine crud ; il passe presque toûjours dans le beurre un peu de soufre de l'antimoine.
Le beurre d'antimoine a été employé autrefois pour ronger les mauvaises chairs des ulceres ; c'est un caustique plus convenable que n'est le précipité, parce que l'antimoine par lui-même est bon à mondifier les ulceres. Il n'y a que dans le cas d'ulceres vénériens, pour lesquels le précipité de mercure est plus propre.
On fait la poudre d'algaroth avec le beurre d'antimoine. Voyez ALGAROTH, ANTIMOINE. (M)
* BEURRE DE ZINC, (Chimie) on entend par beurre de zinc, la masse jaunâtre qui reste au fond de la cornue, lorsqu'on veut faire la concentration de l'esprit de sel, en redistillant une dissolution des fleurs de zinc, dans cet acide.
BEURRE, (en Pharmacie) se dit de plusieurs préparations qui ont la consistance d'un onguent, & qui se préparent de différens ingrédiens. Le beurre d'antimoine préparé par la Chimie est fort différent de ceux dont nous parlons ; car c'est un violent caustique. Les beurres se préparent dans la Pharmacie galénique de la façon suivante.
Beurre de cacao : prenez des amandes douces ou de cacao quantité suffisante ; faites-les rotir dans une poële de fer ; nettoyez-les de leur peau ou écorce ; broyez-les ensuite sur le porphyre chauffé ; prenez cette pâte, & faites-la bouillir dans l'eau au bain-marie, jusqu'à ce que vous voyez la graisse ou l'huile se séparer & surnager : laissez ensuite refroidir votre eau ; ramassez la graisse ou l'huile qui sera figée. Comme cette graisse est un peu rousse, on peut la faire fondre plusieurs fois de suite dans l'eau au bain-marie. On en peut préparer de même de toutes les semences qui ont beaucoup d'huile, comme les beurres de noix, de noisettes, de noyaux de pêche, d'abricot. Ces beurres ne sont que des huiles figées ; ils nous paroissent meilleurs que les huiles par expression. (N)
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BEUTHEN | (Géog.) il y a deux villes de ce nom en Silésie ; l'une est fameuse par une mine d'argent.
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BEUTHNITZ | (Géog.) petite ville de l'électorat de Brandebourg.
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BEUVANTE | S. f. on nomme ainsi dans le commerce de mer un droit qu'un maître de barque ou de navire se réserve lorsqu'il donne son vaisseau à fret : ce droit se regle suivant la grandeur & le port du vaisseau. Aux maîtres de barque on retient la place pour mettre deux ou trois barriques de vin, & aux maîtres de navire quatre ou cinq barriques. Au lieu de ce droit de réserve, les marchands chargeurs donnent ordinairement aux maîtres de barque ou de vaisseau une demi-barrique ou une barrique entiere de vin, pour empêcher que lui ni ses matelots ne boivent le vin du chargement. On convient aussi quelquefois pour la beuvante depuis cinq sous jusqu'à huit sous par tonneau. (G)
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BEVA | ou BIVEAU, s. m. du mot Latin bivium ; chemin fourchu : c'est le modele d'un angle quelconque rectiligne, curviligne, ou le plus souvent mixte, pour former l'angle que font deux surfaces qui se rencontrent. Lorsqu'elles sont planes, on se sert pour biveau d'une fausse équerre à branches mobiles, ou d'une sauterelle : lorsqu'une des deux surfaces est courbe ou toutes les deux, le biveau est un instrument de bois fait exprès en forme d'équerre stable, dont les branches ne s'ouvrent ni ne se ferment. (D)
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BEVELAND | (Géog.) île des Provinces-Unies en Zélande : l'Escaut la divise en deux parties, dont l'une s'appelle Zuyd-Beveland, & l'autre Noort-Beveland.
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BEVERGEN | (Géog.) ville d'Allemagne dans le cercle de Westphalie, au duché de Munster, à neuf lieues de cette ville.
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BEVERLAY | (Géog.) ville d'Angleterre dans la province dYorck. Long. 17. lat. 53. 48.
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BEVERUNGEN | (Géog.) ville d'Allemagne au diocese de Paderborn, & au confluent de la Beve & du Weser. Long. 27. lat. 51. 40.
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BEWDLEY | (Géog.) ville d'Angleterre, dans la province de Worcester, sur la Saverne. Long. 15. 10. lat. 52. 24.
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BEXUGO | (Hist. nat. bot.) racine du Pérou, sarmenteuse, de la grosseur du doigt, semblable à la viorne dans ses endroits les plus déliés ; on lui attribue la vertu purgative, & l'on dit que les Indiens la préferent au méchoacan.
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BE | ou BEG, s. m. (Hist. mod.) est le gouverneur d'un pays ou d'une ville dans l'empire des Turcs : les Turcs écrivent begh ou bek ; mais ils prononcent bey, qui signifie proprement seigneur, & s'applique en particulier suivant l'usage à un seigneur d'un étendard qu'ils appellent dans la même langue sangiakbeg ou bey : sangiasek, qui chez eux signifie étendard ou banniere, marque celui qui commande en quelque partie considérable d'une province, & qui a un grand nombre de spahis ou de cavalerie sous ses ordres.
Chaque province de Turquie est divisée en sept sangiackis ou bannieres, dont chacune qualifie un bey, & tous ces beys sont commandés par le gouverneur de la province, que l'on appelle aussi beghiler, beghi, ou beyler bey, c'est-à-dire seigneur des seigneurs ou beys de la province. Voyez BEGLER-BEG. Ces beys ont beaucoup de rapport aux bannerets que l'on avoit autrefois en Angleterre : le bey de Tunis en est le prince ou le roi ; & ce titre équivaut à ce que l'on appelle à Alger le dey.
Dans le royaume d'Alger, chaque province est gouvernée par un bey ou vice-roi, que le souverain établit & dépose à son gré ; mais dont l'autorité dans son département est despotique, & qui dans la saison de recueillir le tribut des Arabes, est assisté d'un corps de troupes qui lui est envoyé d'Alger. Voyages des Shaw.
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BEYUPURA | (Hist. nat. Ichthyol.) poisson de la mer du Bresil, qui a le dos noir, le ventre blanc, & la forme d'esturgeon de Portugal ; il est long de six ou sept paumes : on le pêche à l'hameçon dans la pleine mer. Il est gras, sain, & de bon goût.
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BEZA | (Myth.) divinité adorée à Abyde, à l'extremité de la Thébaïde. Ses oracles se consultoient par des billets cachetés. On porta à l'empereur Constance quelques-uns de ces billets, qui occasionnerent des perquisitions très-rigoureuses, & l'emprisonnement de beaucoup de monde. On y consultoit apparemment l'oracle sur la durée de l'empire, ou sur le succès de quelque conspiration contre l'empereur.
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BEZAN | ou BIZANT, s. m. (Hist. & Comm.) une sorte de monnoie frappée à Bysance dans le tems des empereurs Chrétiens. Voyez MONNOYAGE & MONNOIE.
Le bezant est d'un or pur & fin à vingt-quatre karats ; mais on n'est pont d'accord sur sa valeur : delà vient que l'or offert à l'autel par le roi d'Angleterre les jours de fêtes, s'appelle encore bezant ou bizant.
Du Peyrat dit que les bezants n'ont été reçûs en France que sous la troisieme race de nos rois, depuis Louis le jeune qui apporta des bezants d'or pris sur les Arabes & autres infideles qu'il avoit vaincus ; desorte que les rois commencerent à s'en servir au jour de leur sacre & couronnement, où l'on en présentoit treize à l'offrande. Henri II. en fit forger exprès pour cette cérémonie, valant environ un double ducat la piece. Un double ducat étoit alors ce que nous appellons un louis. Il est encore fait mention dans notre histoire de huit cent mille bezants d'or payés aux Sarrasins pour la rançon de S. Louis & des seigneurs faits prisonniers avec lui. M. l'abbé Goujet, dans son supplément de Moréri, prouve par des chartes & d'autres monumens de notre histoire, que sous Philippe le hardi, en 1282, le bezant fut évalué à huit sous tournois, & sous Philippe le bel, en 1297, à neuf sous. (G)
BEZANT, s. m. on appelle ainsi dans le Blason une piece d'or ou d'argent sans marque : elle est ronde & plate ; & les paladins François en mirent de semblables sur leur écu, pour faire connoître qu'ils avoient fait le voyage de la Terre-sainte. (V)
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BEZANTÉ | adj. terme de Blason ; il se dit d'une piece chargée de bezants, comme une bordure bezantée de huit pieces. Voyez BEZANT.
Rochefort en Angleterre, écartelé d'or & de gueules, à la bordure bezantée d'or. (V)
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BEZESTAN | S. m. (Commerce) on nomme ainsi à Andrinople, & dans quelques autres principales villes des états du grand-seigneur, les lieux où les marchands ont leurs boutiques, & étalent leurs marchandises. Chaque sorte de marchand a le sien ; ce qui s'entend aussi des ouvriers qui travaillent tous dans le même endroit. Ce sont ordinairement de grandes galeries voûtées, dont les portes se ferment tous les soirs. Quelquefois les concierges ou gardiens de ces bezestans, répondent des marchandises pour un droit assez modique qu'on leur paye pour chaque boutique.
Les bezestans d'Andrinople sont très-beaux, surtout celui où se vendent les étoffes, & un autre où sont les boutiques des cordonniers.
A Constantinople on donne le même nom, ou celui de bezestin, à des especes de halles couvertes, où se vendent les plus riches & les plus précieuses marchandises.
Il y a deux bezestins dans cette capitale de l'empire Ottoman ; le vieux & le nouveau : le vieux a été bâti en 1461, sous le regne de Mahomet II. Il y a peu de marchandises fines : on y vend des armes, & des harnois de chevaux assez communs.
Le bezestin neuf est destiné pour toutes sortes de marchandises ; on n'y voit guere cependant que les marchandises les plus belles & les plus riches, comme de l'orfévrerie, des fourrures, des vestes, des tapis, & des étoffes d'or, d'argent, de soie, & de poil de chevre. Les pierres précieuses & la porcelaine n'y manquent pas non plus.
Ce dernier, qu'on nomme aussi le grand bezestin, est bâti en rond, tout de pierre de taille : il y a quatre portes, qui ne sont ouvertes que pendant le jour ; on y enferme pendant la nuit des gardes pour la sûreté des boutiques. Chaque corps de métier a sa place assignée, hors de laquelle personne ne peut vendre ni même exposer en vente les mêmes sortes de marchandises. C'est dans ce bezestin que les marchands François, Anglois, Hollandois, ont leurs boutiques de draperies.
Les marchandises sont en grande sûreté dans ces lieux, & les portes en sont fermées de bonne heure. Les marchands Turcs qui y ont des boutiques, vont coucher chez eux dans la ville : pour les marchands Chrétiens ou Juifs, ils se retirent au-delà de l'eau, & reviennent le lendemain matin. Voyez BAZAR. (G)
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BEZET | au jeu de Trictrac, est la même chose que deux as.
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BEZETTA | (Comm.) c'est ainsi qu'on nomme du crêpon ou du linon très-fin teint avec de la cochenille. Les meilleurs viennent de Constantinople, & sont d'un rouge très-vif : on le contrefait à Strasbourg. Les dames s'en servent quelquefois pour se farder, après l'avoir un peu trempé dans l'eau : on peut aussi l'employer pour colorer les liqueurs à l'esprit-de-vin. La laine de Portugal, qui n'est autre chose que du coton coloré avec de la cochenille, sert aussi aux mêmes usages.
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BEZIERS | (Géog.) ville de France au bas Languedoc, sur une colline près de l'Orbe. Long. 20. 52. 53. lat. 43. 20. 41.
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BEZOARD | S. m. (Hist. nat.) pierre qui se trouve dans le corps de certains animaux. Les premieres pierres connues sous le nom de bézoard, furent apportées de l'Orient. Il en vint ensuite d'autres de l'Amérique, auxquelles on donna le même nom : mais comme elles n'étoient pas absolument semblables aux premieres, on les nomma bézoards occidentaux, pour les distinguer des bézoards orientaux. Les uns & les autres sont polis à l'extérieur ; cependant il y en a qui sont inégaux & rudes. Les bézoards sont assez tendres, & ils teignent en couleur jaune, verdâtre, ou olivâtre le papier frotté de craie, de céruse ou de chaux, lorsqu'on les frotte dessus : ils s'imbibent d'eau & d'esprit-de vin, & troublent ces liqueurs. Leur substance est pierreuse & composée de couches concentriques. Ils sont de grosseur & de figure différentes. Il y en a qui ressemblent à un rein ou à une féve ; d'autres sont ronds, oblongs, ou ovoïdes, &c. Les lames formées par les couches concentriques des bézoards, sont de couleur verdâtre ou olivâtre, tachetée de blanc dans leur épaisseur. On les écrase facilement sous la dent ; elles sont glutineuses, & teignent légerement la salive. Toutes les lames n'ont pas la même couleur, ni la même épaisseur. Lorsqu'on casse un bézoard, ou lorsqu'on lui donne un certain degré de chaleur, il se trouve des lames qui s'écartent & se séparent les unes des autres. Il y a au centre de la plûpart des bézoards, une masse dure, graveleuse & assez unie : on y trouve des pailles, du poil, des marcassites, des caillous, des matieres graveleuses unies ensemble, & aussi dures que la pierre ; du talc, du bois, des noyaux, presque semblables à ceux des cerises, des noyaux de myrobolans, &c. des féves revêtues d'une sorte de membrane formée par la matiere du bézoard, sous laquelle l'écorce de la féve se trouve séchée après avoir été gonflée. Quelques bézoards, sonnent comme des pierres d'aigle, parce que la premiere enveloppe de la féve ayant été desséchée, le noyau devient mobile. Les fruits qui servent de noyau se pourrissent quelquefois, & se réduisent en poussiere. Il y a des auteurs qui ont vanté, je ne sai pourquoi, l'efficacité de cette poussiere. On a crû que les noyaux de matiere étrangere devoient indiquer que les bézoards avoient été apprêtés, & qu'ils étoient factices : mais cette opinion n'est pas fondée. Il seroit aussi aisé de faire un noyau de matiere semblable à celle du reste du bézoard, que d'employer pour noyau des corps étrangers, qui pourroient décéler l'art : il est même très-naturel que des noyaux de fruits ou d'autres corps qui se trouvent dans l'estomac des animaux qui produisent les bézoards, y occasionnent leur formation. On prétend que pour reconnoître les bézoards factices, il faut les éprouver avec une aiguille rougie au feu ; si elle entre facilement dans la substance du bézoard, c'est une marque qu'il est faux : au contraire si elle brunit seulement l'endroit où elle est appliquée, sans pénétrer, c'est une preuve que le bézoard est bon. On croit que les bons sont de médiocre grosseur, de couleur brune, qu'ils jaunissent la chaux vive, qu'ils verdissent la craie, qu'ils ne se dissolvent point dans l'eau, qu'ils sont composés de lames fines & disposées par couches, &c. mais toutes ces marques sont fort équivoques ; il est très-possible de donner les mêmes qualités à des bézoards falsifiés avec du plâtre ou d'autres matieres semblables : cependant on peut distinguer les bézoards naturels des factices. Les premiers sont très-reconnoissables pour les gens qui en ont vû beaucoup ; leur couleur n'est ni trop pâle, ni trop foncée : ils ont le grain fin, leur surface est polie, & leur tissu serré ; desorte que les lames dont ils sont composés, ne se séparent pas trop aisément les unes des autres. On juge par le poids du bézoard, s'il a pour noyau un caillou ou une matiere légere, telle que du poil ou des substances végétales. Le bézoard occidental est d'une couleur pâle, & quelquefois gris-blanc : il s'en trouve dont les lames sont épaisses & striées dans leur épaisseur.
On ne sait pas précisément quels sont les animaux qui portent les bézoards d'Orient & d'Occident. Il paroît que ceux qui viennent d'Egypte, de Perse, des Indes & de la Chine, sont produits par une espece de bouc, que les Persans nomment pazan ; ou par une chevre sauvage plus grande que la nôtre, que Clusius nomme capricerva, parce qu'elle a autant d'agilité que le cerf. Le bézoard d'Amérique vient aussi d'une chevre.
Comme on a donné le nom de bézoard à plusieurs choses très-différentes les unes des autres, on pourroit en faire plusieurs classes. La premiere comprendroit les bézoards d'Orient & d'Occident. On mettroit dans la seconde toutes les pierres qui sont tirées des animaux, & qui approchent des bézoards par leur structure & leur vertu : tels sont les bézoards de singe, de cayman, &c. les yeux d'écrevisses, & toutes les différentes sortes de perles. La troisieme classe comprendroit les matieres qui sont figurées comme le bézoard, sans en avoir les vertus : telles sont la pierre tirée de la vessie de l'homme, celles des reins, de la vésicule du fiel, & celles qui se trouvent dans la vésicule du fiel des boeufs & des autres animaux. Les égagropiles seroient dans la quatrieme classe. Voyez EGAGROPILES. Et dans la cinquieme, les bézoards fossiles. Voyez BEZOARD FOSSILE. Mém. de l'Acad. royale des Sciences, ann. 1710. page 235. par M. Geoffroy le jeune. (I)
BEZOARD MINERAL, pierre de couleur blanche ou cendrée, de figure irréguliere, & le plus souvent arrondie : elle est composée de différentes couches friables, placées successivement les unes sur les autres. Il y a quelquefois au centre de la pierre un petit noyau pierreux, un grain de sable, une petite coquille, ou un morceau de charbon de terre. Ces pierres sont de la grosseur d'une aveline, d'une noix, ou même d'un oeuf d'oie. On en trouve en plusieurs endroits : en France, auprès de Montpellier ; en Sicile, autour du mont Madon ; en Italie, dans le territoire de Tivoli ; en Amérique, dans la nouvelle Espagne, dans le fleuve de Detzhuatland ; d'où on en tire de fort grosses ; & en bien d'autres endroits : car le bézoard fossile ne doit pas être plus rare que la pierre Ammite. (I)
BEZOARD MINERAL, (Chimie) c'est un remede connu dans la Pharmacie : il se fait avec le beurre d'antimoine dont on prend trois onces, sur lesquelles on verse bien doucement égale quantité d'esprit de nitre, qu'on en retire par la distillation au feu de sable ; on reverse ensuite cet esprit de nitre dessus le résidu avec une once de plus ; on réitere ces distillations & cohobations trois ou quatre fois ; cela fait, on réduit en poudre le résidu, & on le calcine dans un creuset ; on le lave ensuite dans plusieurs eaux, ou on brûle de l'esprit-de-vin par-dessus. Cette préparation de l'antimoine est un très-grand sudorifique, qui a même plus d'efficacité que l'antimoine diaphorétique. Voyez l'article ANTIMOINE. (-)
BEZOARD MARTIAL, (Chim.) se fait en mettant dans le creuset une partie de limaille de fer, avec deux parties d'antimoine ; on y ajoûte un peu de nitre, qu'on allume pour faciliter la fonte, qui doit être liquide : on a soin de remuer doucement avec une baguette de fer qui puisse aller jusqu'au fond du creuset ; par ce moyen le régule qui est en fusion ronge la baguette, & tourne en scories avec elle. Pour faciliter l'opération, il est bon d'y jetter de tems en tems du nitre. Après avoir tenu le mélange en fusion pendant une demi-heure, il faudra retirer la baguette de fer. Si on voit qu'il n'en part plus d'étincelles, & qu'elle ne diminue plus par le bout, on y jettera encore un peu de nitre ; & la matiere étant devenue très liquide, il faudra la verser, & la réduire en poudre après qu'elle sera refroidie : on prend une cuillerée de cette poudre, qu'on jette dans deux fois sa quantité de nitre mise en fonte dans un autre creuset ; on vuide de nouveau la matiere, on la lave dans de l'eau chaude, on l'édulcore & la seche. On dit que ce bezoard martial est un excellent remede pour la jaunisse, les hypochondres, &c. (-)
BEZOARD SOLAIRE ou D'OR, (Chimie) se fait en versant une solution d'or faite dans l'eau régale, ou la solution d'une chaux d'or dans l'esprit de sel sur huit fois, ou suivant Zwelfer, sur quatre fois autant de beurre d'antimoine ; on les laisse en digestion pendant quelque tems ; on fixe alors la matiere avec de l'esprit de nitre, & on tire le dissolvant par la distillation : ce n'est autre chose que le bezoard minéral uni à une chaux d'or.
BEZOARD LUNAIRE, (Chimie) se fait ainsi : pour chaque once de beurre d'antimoine, on dissout une dragme d'argent dans l'esprit de nitre, & on s'en sert pour précipiter la poudre ; ce qui donne un bezoard minéral mêlé avec la lune cornée. (-)
BEZOARD JOVIAL ou D'ETAIN. (Chimie) Voici le procédé de Stahl. On fait fondre ensemble parties égales de régule d'antimoine & d'étain bien pur, on broye ensuite & pulvérise le mélange, qu'on fait fulminer par parties avec trois fois autant de nitre à grand feu pendant une demi-heure ; pendant ce tems on a soin de remuer avec un bâton ; cela étant fait, on vuide le creuset, on laisse refroidir la matiere, on la fait dissoudre dans l'eau, ou à l'air par deliquium ; l'on aura par-là une poudre grise qui est le bezoard d'étain. Voyez l'article ANTI-HECTIQUE. (-)
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BÉZOLE | S. f. bezola, (Hist. nat. Ichthyol.) poisson qui se trouve dans le lac de Lausanne ; il est assez ressemblant au lavaret, voyez LAVARET : cependant sa couleur est moins blanche, & un peu teinte de bleu ; la tête est plus petite, le museau plus pointu, le ventre plus large & plus saillant ; la chair est plus molle & de moindre qualité : aussi ce poisson n'est-il pas recherché. Rondelet. Voyez POISSON. (I)
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BHAVAM | S. f. (Hist. mod.) déesse des indiens ; c'est la puissance à laquelle ils donnent pour époux le puissant. Il paroît que ce n'est là qu'une maniere mysterieuse de désigner ou la matiere & la forme, ou les causes & les effets. Voyez Kircher, Chin. illust. pag. 161.
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BI-QUINTILE | adj. (Astron.) c'est un aspect de deux planetes quand elles sont à 144 degrés de distance l'une de l'autre. Voyez ASPECT.
On appelle cet aspect bi-quintile, parce que les planetes sont alors éloignées l'une de l'autre de deux fois la cinquieme partie de 360 degrés, c'est-à-dire de deux fois 72 degrés, ou 144. (O)
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BIA | S. m. (Commerce) coquille blanche qui sert de monnoie aux Indes. Les Siamois lui donnent ce nom à la Chine : mais dans le reste des Indes, on l'appelle coris. Voyez CORIS. Neuf bia ou coris valent un denier argent de France.
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BIAFARA | (Géog.) royaume d'Afrique, dans la basse Ethiopie, dont les habitans sont idolâtres. Long. 35. 50. lat. 6. 10.
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BIAFARES | S. m. pl. (Géog.) peuples d'Afrique, sur la côte de Guinée, vis-à-vis les îles de Bisagos.
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BIAIS | S. m. en Architecture, on entend par ce nom les obliquités ou angles saillans, qu'on ne peut éviter dans un mur de face ou mitoyen, à cause du coude que forment souvent les rues d'une ville ou d'un grand chemin, ou le terrein de son voisin avec le sien, par une suite des partages qui ont été faits avant l'acquisition. (P)
BIAIS, BIAISER, (Jardinage) c'est à l'art qu'il appartient de racheter les biais d'un jardin, qui forment des alignemens irréguliers & des formes bisarres ; & c'est ce qu'on appelle sauver un biais.
Dans les pieces couvertes, comme sont les bosquets, une ligne droite que forme une palissade, redresse un biais qui se perd dans les quarrés de bois.
Dans les lieux découverts, tels qu'un parterre, un boulingrin, le biais paroît un peu plus ; mais il se sauve dans l'étendue, & on ne peut juger que par le plan, de l'irrégularité du terrein.
On rejette le biais sur les plates-bandes dans les petits jardins, en régularisant la piece du milieu, & on redresse les plates bandes par un trait de buis ; des lisieres de bois & de brossailles rachettent le biais des murs ; & les coudes des allées qui ne peuvent s'aligner, se corrigent par le moyen d'un berceau ou d'un banc placés à propos dans l'angle.
Pour rendre le biais plus tolérable d'un quarré long dont deux côtés opposés sont inégaux, entrez par le petit côté, la perspective raccourcira le grand. (K)
BIAIS, (Manége) aller en biais, c'est-à-dire les épaules avant la croupe. Faire aller un cheval en biais. La leçon du biais au passager. Si les épaules sont avant la croupe, le cheval est en biais, & a la croupe un peu en-dehors. Mettre le cheval en biais tantôt à une main, & puis le pousser en avant ; tantôt à l'autre, & puis le pousser de même en-avant, & réitérer cela de main en main & en-avant, lui fait obéir la main & le talon, est une excellente leçon ; mais d'autant qu'il est mis en biais, il faut que les parties de devant aillent toujours avant celles de derriere. La maniere de faire aller un cheval en biais ; de lui faire faire des courbettes en biais ; de le mettre au pas en biais, & en courbettes en biais, est fort détaillée dans Newcastle. Pour aller en biais, il faut aider aussi à toutes mains le cheval de la rêne de dehors, & soûtenir, c'est-à-dire le tenir ferme, sans lui donner aucun tems : car le cheval le prend mieux qu'on ne peut le lui donner. Il faut aussi l'aider de la jambe de dehors ; c'est-à-dire, qu'il faut que la rêne & la jambe soient d'un même côté, & toujours en dehors. (V)
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BIALA | (Géog.) ville du palatinat de Rava, dans la grande Pologne.
* BIALA, (Géog.) ville du palatinat de Briescia, dans le grand duché de Lithuanie.
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BIALOGROD | (Géog.) ville de la Bessarabie, sur le Niester, appartenante aux Turcs ; cette ville s'appelle aussi Akerman. Long. 49. 20. lat. 46. 24.
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BIALOGRODKO | (Géog.) ville capitale de l'Ukraine, située en Wolhinie, sur la riviere d'Onetz, qui se jette dans le Don ; elle appartient aux Moscovites.
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BIALOZERKIEW | (Géog.) ville du palatinat de Kiovie en Pologne, sur la riviere de Rost.
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BIALY-KAMEN | (Géog.) petite ville de la Russie, sur la riviere de Bug.
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BIAN | est un terme usité dans les coûtumes d'Anjou, de Poitou, d'Angoumois, & de Saint Jean d'Angely, pour signifier ce que nous appellons corvée. Voyez CORVEE. (H)
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BIANA | (Géog.) ville d'Asie, dans les états du Mogol ; on y trouve d'excellent indigo ; elle est à 20 lieues d'Agra. Long. 95. 30. lat. 46. 24.
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BIANDR | ou BIANDRATE, (Géog.) petite ville du Milanois, sur les frontieres du comté de Verceil.
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BIARQUE | S. m. (Hist. anc.) intendans des vivres, à la cour des empereurs de Constantinople. Sa charge s'appelloit biarchie, de vie, & chef ; c'étoit le même dans le palais de l'empereur, que celle du praefectus annonae dans Rome.
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BIATHANATES | du grec suicides, ou ceux qui se tuent eux-mêmes. Voyez SUICIDE.
Le doyen de S. Paul de Londres a composé, sous le titre de Biathanatus, un ouvrage imprimé à Londres, in 4°. dans lequel il entreprend de prouver cette proposition, ou plutôt cet étrange paradoxe : que le suicide n'est pas si essentiellement un péché, qu'il ne puisse jamais cesser de l'être. (G)
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BIBA | (Hist. nat. bot.) c'est le nom qu'on donne à l'arbre qui produit l'anacardium. Voyez l'article ANACARDE. (I)
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BIBBY | (Hist. nat. bot.) arbre qui croît dans la terre-ferme de l'Amérique, dont il sort beaucoup d'un jus auquel les Anglois donnent aussi le nom de bibby ; son tronc est droit, de la grosseur de la cuisse, de soixante à soixante-dix piés de haut, sans branches ni feuilles jusqu'au sommet, & chargé de pointes ; le fruit croît au-dessous, & tout au-tour de l'endroit où les branches commencent à pousser : le bois en est très-dur, & noir comme de l'encre. Les Indiens ne sont pas dans l'usage de le couper : mais ils le brûlent pour en avoir le fruit, qui est blanchâtre, huileux, & de la grosseur d'une noix de muscade, on le pile dans des mortiers de bois : on le fait cuire, & on le passe à la chausse : lorsque ce jus est refroidi, on en ôte une huile limpide très-amere, qui nage à la surface, les sauvages s'en servent pour se frotter, & y mêlent des couleurs pour se peindre le corps. Lorsque cet arbre est encore jeune, ils y font une incision ; il en sort beaucoup de jus qui ressemble à du petit-lait : il a un goût aigrelet, mais assez agréable : les Indiens le boivent après l'avoir laissé reposer pendant quelques jours.
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BIBEN | (Géog.) ville de l'Istrie, dans le comté de Mitterburg.
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BIBER | (Géog.) petite riviere, dans le duché de Magdebourg.
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BIBERACH | (Géog.) ville libre & impériale de la Soüabe, à quatre lieues d'Ulm, sur la riviere de Russ, & le ruisseau de Biber. Long. 27. 32. lat. 48. 4.
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BIBERISCH | (Géog.) petite riviere de la Misnie, qui tombe dans la Moldave à Nossen.
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BIBERTEICH | (Géog.) petite ville de Silésie, dans la principauté de Crossen.
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BIBESIE | BIBESIE
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BIBLE | S. f. (Théol.) , pluriel de , livre, c'est-à-dire les écritures ou livre par excellence. Voyez ECRITURE. C'est le nom que les Chrétiens donnent à la collection des livres sacrés, écrits par l'inspiration du Saint-Esprit. La bible se divise généralement en deux parties ; savoir, l'ancien & le nouveau Testament. On appelle livres de l'ancien Testament, ceux qui ont été écrits avant la naissance de Jesus-Christ, & qui contiennent, outre la loi & l'histoire des Juifs, les prédictions des prophetes touchant le Messie, & divers livres ou traités de morale. Le nouveau Testament contient les livres écrits depuis la mort de Jesus-Christ par ses apôtres ou ses disciples.
Suivant la décision du concile de Trente, sess. 4. les livres de l'ancien Testament sont le Pentateuque, qui comprend les cinq livres de Moyse, savoir la Genese, l'Exode, le Lévitique, les Nombres, & le Deuteronome : viennent ensuite les livres de Josué, des Juges, de Ruth, les quatres livres des Rois, les deux des Paralipomenes, le premier & le second d'Esdras, ceux de Tobie, de Judith, d'Esther, de Job ; le Pseautier de David, contenant cent cinquante pseaumes ; les Proverbes, l'Ecclésiaste, la Sagesse, l'Ecclésiastique, le Cantique des cantiques, Isaïe, Jérémie, & Baruch ; Ezéchiel, Daniel, les douze petits Prophetes, & les deux livres des Macchabées, ce qui fait en tout quarante-cinq livres.
Le nouveau Testament en contient vingt-sept, qui sont les quatre Evangiles, le livre des Actes des Apôtres, les quatorze épitres de S. Paul, l'épitre de S. Jacques, les deux épitres de S. Pierre, les trois épitres de S. Jean, l'épitre de S. Jude, & l'Apocalypse. Tel est à-présent le canon ou catalogue des Ecritures reçû dans l'Eglise catholique, mais qui n'est pas admis par toutes les sectes ou sociétés qui se sont séparées d'elle. Voyez CANON.
Quand à l'ancien Testament, il y a une grande partie des livres qu'il contient, qui ont été reçus comme sacrés & canoniques par les Juifs & par tous les anciens Chrétiens, mais aussi il y en a quelques-uns que les Juifs n'ont pas reconnus, & que les premiers Chrétiens n'ont pas toûjours reçus comme canoniques, mais qui depuis ont été mis par l'Eglise dans le canon des livres sacrés. Ces derniers sont les livres de Tobie, de Judith, le livre de la Sagesse, l'Ecclésiastique, & les deux livres des Maccabées : quelques-uns même ont douté de l'authenticité des livres de Baruch & d'Ester. Tous ces livres ont été écrits en langue hébraïque, à l'exception de ceux que les Juifs ne reconnoissoient point. Les anciens caracteres étoient les Samaritains : mais depuis la captivité on s'est servi des nouveaux caracteres Chaldéens. Ils ont été traduits plusieurs fois en grec ; la version la plus ancienne & la plus authentique, est celle des Septante, dont les apôtres mêmes se sont servis. Voyez SEPTANTE & VERSION.
Quoique la plûpart des livres du nouveau Testament ayent aussi été reçus pour canoniques dès les premiers tems de l'Eglise, on a douté cependant de l'authenticité de quelques-uns, comme de l'épitre aux Hébreux, de celle de S. Jude, de la seconde de S. Pierre, de la seconde & de la troisieme de S. Jean, & de l'Apocalypse. Tous les livres du nouveau Testament ont été écrits en grec, à l'exception de l'évangile de S. Matthieu & de l'épitre aux Hébreux, qu'on croit avoir été originairement écrits en hébreu. C'est le sentiment de S. Jérôme, contre lequel quelques critiques modernes ont soûtenu que tout le nouveau Testament avoit été écrit en syriaque : mais cette opinion est également destituée de preuves & de vraisemblance.
Les exemplaires de la bible s'étant extrèmement multipliés, soit par rapport aux textes originaux, soit par rapport aux versions qu'on en a faites dans la plûpart des langues mortes ou vivantes, cette division est la plus commode pour en donner une idée nette au lecteur. On distingue donc les bibles selon la langue dans laquelle elles sont écrites en hébraïques, grecques, latines, chaldaïques, syriaques, arabes, cophtes, arméniennes, persiennes, moscovites, &c. & celles qui sont en langues vulgaires : nous allons traiter par ordre & séparément de chacune.
Les BIBLES HEBRAIQUES sont ou manuscrites ou imprimées. Les meilleures bibles manuscrites sont celles qui ont été copiées par les Juifs d'Espagne ; celles qui l'ont été par les Juifs d'Allemagne étant moins exactes, quoiqu'en plus grand nombre. Il est facile de les distinguer au coup-d'oeil. Les premieres sont en beaux caracteres bien quarrés, comme les bibles hébraïques de Bomberg, d'Etienne, & de Plantin. Les autres en caracteres semblables à ceux de Munster & de Gryphe. M. Simon observe que les plus anciennes bibles hébraïques n'ont pas 6 ou 700 ans. Le rabbin Menahem, dont on a imprimé quelques ouvrages à Venise en 1618 sur les bibles hébraïques, en cite pourtant un grand nombre, dont l'antiquité (à compter de son tems) remontoit déjà au-delà de 600 ans. On trouve plusieurs de ces bibles manuscrites dans la bibliotheque du Roi, dans celle des Jésuites de Paris, & dans celle des PP. de l'Oratoire de la rue Saint-Honoré.
Les plus anciennes bibles hébraïques imprimées, sont celles qui ont été publiées par les Juifs d'Italie, sur-tout celles de Pesaro & de Bresce. Ceux de Portugal avoient commencé d'imprimer quelques parties de la Bible à Lisbonne, avant qu'on les chassât de ce royaume. On peut remarquer en général, que les meilleures bibles hébraïques sont celles qui sont imprimées sous les yeux même des Juifs, si soigneux à observer jusqu'aux points & aux virgules, qu'il est impossible qu'on les surpasse en exactitude. Au commencement du xvj. siecle, Daniel Bomberg imprima plusieurs bibles hébraïques in-folio & in -4°. à Venise, dont quelques-unes sont très-estimées des Juifs & des Chrétiens. La premiere fut imprimée en 1517 : elle porte le nom de son éditeur, Felix Pratenni ; & c'est la moins exacte. La seconde le fut en 1526 ; on y joignit les points des Massoretes, les commentaires de différens rabbins, & une préface hébraïque de Rabbi Jacob Benchajim. En 1548, le même Bomberg imprima la bible in-fol. de ce dernier rabbin ; c'est la meilleure & la plus parfaite de toutes : elle est distinguée de la premiere bible du même éditeur, en ce qu'elle contient le commentaire de Rabbi D. Kimchi sur les chroniques ; ce qui n'est pas dans l'autre. Ce fut sur cette édition que Buxtorf le pere imprima à Bâle en 1618 sa bible hébraïque des rabbins : mais il se glissa, sur-tout dans les commentaires de ceux-ci, plusieurs fautes ; car Buxtorf altéra un assez grand nombre de leurs passages, peu favorables aux Chrétiens. La même année parut à Venise une nouvelle édition de la bible rabbinique de Léon de Modene, rabbin de cette ville, qui prétendit avoir corrigé un grand nombre de fautes répandues dans la premiere édition. Mais outre que cette bible est fort inferieure & pour le papier & pour le caractere aux autres bibles de Venise, elle passa par les mains des Inquisiteurs, qui ne la laisserent pas en son entier, quant aux commentaires des rabbins.
La bible hébraïque de R. Etienne est estimée pour la beauté des caracteres : mais elle est trop infidele. Plantin a aussi imprimé à Anvers différentes bibles hébraïques fort belles, dont la meilleure est celle de 1566 in -4°. Manassé Ben Israel, savant Juif Portugais, donna à Amsterdam deux éditions de la bible en hébreu, l'une in -4°. & l'autre in -8°. La premiere est en deux colonnes, & par-là plus commode pour le lecteur. En 1634, Rabbi Jacob Lombroso en publia à Venise une nouvelle édition in -4°. avec de petites notes littérales au bas des pages, où les mots hébreux sont expliqués par des mots espagnols. Cette bible est fort estimée des Juifs de Constantinople. On y a distingué dans le texte par une petite étoile, les endroits où il faut lire le point camés par un camés hatouph, c'est-à-dire par un o & non par un a. De toutes les éditions des bibles hébraïques in 8°. les plus belles & les plus correctes sont les deux de Joseph Athias, Juif d'Amsterdam ; la premiere de 1661, préférable pour le papier ; l'autre de 1667, plus fidele : néanmoins Vander Hoogt en a publié une en 1705, qui l'emporte encore sur ces deux-là.
Après Athias, trois protestans qui savoient l'hébreu, s'engagerent à revoir & à donner une bible hébraïque : ces trois auteurs étoient Claudius, Jablons, & Opitius. L'édition de Claudius fut publiée à Francfort en 1677, in -4°. On trouve au bas des pages les différentes leçons des premieres éditions : mais l'auteur ne paroît pas assez profond dans la maniere d'accentuer, sur-tout pour les livres de poésie ; & d'ailleurs cette édition n'ayant pas été faite sous ses yeux, fourmille de fautes. Celle de Jablonski parut à Berlin in -4°. en 1699. L'impression en étoit fort nette, & les caracteres très-beaux : mais quoique l'auteur prétendit s'être servi de l'édition d'Athias & de celle de Claudius, plusieurs critiques trouverent néanmoins la sienne trop ressemblante à l'édition in -4°. de Bomberg, pour ne le soupçonner pas de l'avoir suivie peut-être trop servilement. Celle d'Opitius fut aussi imprimée in -4°. à Keill en 1709 : mais la beauté du papier ne répondoit pas à celle des caracteres ; d'ailleurs l'éditeur ne fit usage que de manuscrits allemands, négligeant trop ceux qui sont en France, défaut qui lui étoit commun avec Claudius & Jablons. Ces bibles ont pourtant cet avantage, qu'outre les divisions, soit générales, soit particulieres, en paraskes & pemkim, selon la maniere des Juifs, elles ont encore les divisions en chapitres & en versets, suivant la méthode des Chrétiens ; aussi bien que les keri ketib, ou différentes façons de lire, & les sommaires en latin ; ce qui les rend d'un usage très-commode pour les éditions latines & les concordances. La petite bible in-seize de Robert Etienne est fort estimée par la beauté du caractere : on doit observer qu'il y en a une autre édition à Geneve qui lui est pareille, excepté que l'impression en est mauvaise, & le texte moins correct. On peut ajoûter à ce catalogue quelques autres bibles hébraïques sans points in -8°. & in -24. fort estimées des Juifs, non qu'elles soient plus exactes, mais parce que la petitesse du volume les leur rend plus commodes dans leurs synagogues & dans leurs écoles. Il y en a deux éditions de cette sorte, l'une de Plantin in -8°. à deux colonnes, & l'autre in -24 imprimée par Raphalengius à Leyde en 1610. On en trouve aussi une édition d'Amsterdam en grands caracteres, par Laurent, en 1631 ; & une autre in -12 de Francfort, en 1694, avec une préface de Leusden : mais elle est pleine de fautes.
BIBLES GREQUES. Le grand nombre de bibles que l'on a publiées en grec, peut être réduit à trois ou quatre classes principales ; savoir celle de Complute ou d'Alcala de Henarès, celle de Venise, celle de Rome, & celle d'Oxford. La premiere parut en 1515 par les ordres du cardinal Ximenès, & fut insérée dans la bible polyglotte, qu'on appelle ordinairement la bible de Complute : cette édition n'est pas exacte, parce qu'en plusieurs endroits on y a changé la version des Septante, pour se conformer au texte hébreu. On l'a cependant réimprimée dans la Polyglotte d'Anvers, dans celles de Paris, & dans l'in -4°. connu sous le nom de bible de Vatable. V. POLYGLOTTE. La seconde bible grecque est celle de Venise qui parut en 1518, où le texte grec des Septante a été réimprimé conformément à ce qu'il étoit dans le manuscrit. Cette édition est pleine de fautes de copistes, mais aisées à corriger. On l'a réimprimée à Strasbourg, à Bâle, à Francfort, & en d'autres lieux, en l'altérant toutefois en quelques endroits pour suivre le texte hébreu. La plus commode de ces bibles est celle de Francfort, à laquelle on a ajoûté de courtes scholies dont l'auteur ne s'est pas nommé, mais qu'on attribue à Junius : elles servent à marquer les différentes interprétations des anciens traducteurs grecs. La troisieme est celle de Rome en 1587, dans laquelle on a inséré des scholies tirées des manuscrits grecs des bibliotheques de Rome, & recueillies par Pierre Morin. Cette belle édition fut réimprimée à Paris en 1628 par le P. Morin de l'Oratoire, qui y joignit l'ancienne version latine de Nobilius, laquelle dans l'édition de Rome étoit imprimée séparément avec les commentaires. L'édition greque de Rome se trouve dans la Polyglotte de Londres ; & on y a ajoûté en marge les différentes leçons tirées du manuscrit d'Alexandrie. On l'a aussi donnée en Angleterre in -4°. & in -12. avec quelques changemens. Bos l'a encore publiée en 1709 à Francker avec toutes les différentes leçons qu'il a pû recouvrer. Enfin la quatrieme bible greque est celle qu'on a faite en Angleterre d'après un exemplaire très ancien, connu sous le nom de manuscrit d'Alexandrie ; parce qu'il avoit été envoyé de cette ville. Elle fut commencée à Oxford par le docteur Grabe en 1707. Dans cette bible, le manuscrit d'Alexandrie n'est pas imprimé tel qu'il étoit, mais tel qu'on a cru qu'il devoit être ; c'est-à-dire, qu'on l'a changé aux endroits qui ont paru être des fautes de copistes, & que l'on a aussi changé les mots qui étoient de différens dialectes : quelques-uns ont applaudi à cette liberté ; d'autres l'ont condamnée, prétendant que le manuscrit étoit exact, & que les conjectures ou les diverses leçons avoient été rejettées dans les notes dont il étoit accompagné. Voyez SEPTANTE.
BIBLES LATINES. Quoique leur nombre soit encore plus grand que celui des bibles greques, on peut les réduire toutes à trois classes ; savoir, l'ancienne vulgate, nommée aussi Itala, traduite du grec des Septante ; la vulgate moderne, dont la plus grande partie est traduite du texte hébreu ; & les nouvelles versions latines faites sur l'hébreu dans le xvj. siecle. De l'ancienne vulgate dont on se servoit dans la primitive Eglise, & sur-tout en occident, jusqu'après le tems du pape S. Grégoire le grand, il ne reste de livres entiers que les Pseaumes, le livre de la Sagesse, & l'Ecclésiaste, & des fragmens épars dans les écrits des Peres, d'où Nobilius a tâché de la tirer toute entiere ; projet qui a été exécuté par le P. Sabathier, bénédictin. On trouve un grand nombre d'éditions différentes de la vulgate moderne, qui est la version de S. Jérôme faite sur l'hébreu. Le cardinal Ximenès en fit insérer dans la bible de Complute, une qui est altérée & corrigée en plusieurs endroits. La meilleure édition de la vulgate de Robert Etienne, est celle de 1540, réimprimée en 1545, où l'on trouve en marge les différentes leçons des divers manuscrits dont il avoit pû avoir connoissance. Les docteurs de Louvain l'ont revûe, y ont ajoûté de nouvelles leçons inconnues à Robert Etienne : leur meilleure édition est celle qui contient à la fin les notes critiques de François Lucas de Bruges. Toutes ces corrections de la bible latine furent faites avant le tems de Sixte V. & de Clément VIII. depuis lesquels personne n'a osé faire un changement au texte de la vulgate, si ce n'est dans des commentaires & des notes séparées. Les corrections de Clément VIII. en 1592, sont celles que l'on suit dans toute l'Eglise catholique ; car de deux réformations qu'a fait ce pontife, on s'en est toûjours tenu à la premiere. Ce fut d'après elle que Plantin donna son édition, & toutes les autres furent faites d'après celle de Plantin ; desorte que les Bibles communes sont d'après les corrections de Clément VIII. Il y a un très-grand nombre de Bibles latines de la troisieme classe, faites depuis deux siecles, & comprenant les versions des originaux des Livres sacrés : la premiere est celle de Sanctez Pagninus, dominicain ; elle fut imprimée à Lyon in -4°. en 1528, & est fort estimée des Juifs. L'auteur la perfectionna, & l'on en fit à Lyon une belle édition in-fol. en 1542, avec des scholies sous le nom de Michael Villanovanus, auteur de ces scholies, que M. Chambers croit être Michel Servet, brûlé depuis à Geneve. Servet prit ce nom parce qu'il étoit né à Villa-nueva en Aragon. Ceux de Zurich donnerent aussi une édition in -4°. de la Bible de Pagninus, & Robert Etienne la réimprima in-fol. avec la vulgate en 1557. On en trouve encore une version de 1586 en quatre colonnes, sous le nom de Vatable, qu'on a insérée dans la Bible en quatre langues, de l'édition d'Hambourg. On range aussi au nombre des Bibles latines la version de Pagninus, corrigée ou plûtôt rendue littérale par Arias Montanus, avec l'approbation des docteurs de Louvain, insérée par ordre de Philippe II. dans la Polyglotte de Complute, & ensuite dans celle de Londres. Il y en a eu différentes éditions in-fol. in -4°. & in -8°. auxquelles on a ajoûté le texte hébreu de l'ancien Testament, & le grec du nouveau : la meilleure est celle de 1571, in-fol. Depuis la réformation les Protestans ont aussi donné plusieurs versions latines de la Bible : les plus estimées parmi eux, sont celles de Munster, de Léon Juda, de Castalion, & de Tremellius ; les trois dernieres ont été souvent réimprimées, & celle de Castalion l'emporte pour la beauté du latin, que quelques critiques trouvent pourtant trop affecté : sa meilleure édition est celle de 1573. La version de Léon Juda, corrigée par les théologiens de Salamanque, a été jointe à l'ancienne édition publiée par Robert Etienne, avec des notes de Vatable. Celles de Junius & de Tremellius sont préférées, sur-tout par les Calvinistes ; & il y en a un très-grand nombre d'éditions. On pourroit ajoûter pour quatrieme classe des Bibles latines, comprenant l'édition de la Vulgate corrigée sur les originaux, la Bible d'Isidore Clarius ou Clario, écrivain catholique, & évêque de Fuligno dans l'Ombrie. Cet auteur, peu content des corrections de l'ancien latin, a reformé cette derniere traduction aux endroits qu'il a crû mal rendus : son ouvrage, imprimé à Venise en 1542, fut d'abord mis à l'index, ensuite permis, & réimprimé à Venise en 1564, à l'exception de la préface & des prolégomenes. Plusieurs protestans ont suivi cette méthode. André & Luc Osiander entr'autres ont publié chacun une nouvelle édition de la Vulgate, corrigée sur les originaux.
BIBLES ORIENTALES. On peut mettre à la tête des Bibles orientales la version samaritaine, qui n'admet de l'Ecriture que le Pentateuque. Cette version est faite sur le texte hébreu-samaritain, un peu différent du texte hébreu des Juifs, & dans une langue qui est à peu-près la même que la chaldaïque. Le pere Morin, de l'Oratoire, est le premier qui ait fait imprimer ce Pentateuque hébreu des Samaritains avec la version ; l'un & l'autre se trouvent dans les Polyglottes de Londres & de Paris. Les Samaritains ont outre cela une version arabe du Pentateuque, qui n'a point été imprimée, & qui est même fort rare. On en trouve deux exemplaires dans la bibliotheque du roi. L'auteur se nomme Abusaïd, & a ajoûté en marge quelques notes littérales. Ils ont aussi l'histoire de Josué, mais différente du livre de Josué que nous reconnoissons pour canonique, titre qu'ils n'accordent pas au livre qu'ils ont sous le même nom.
BIBLES CHALDEENNES. Ce sont seulement des gloses ou des expositions que les Juifs ont faites lorsqu'ils parloient la langue chaldaïque. Ils les nomment targumim ou les paraphrases, parce qu'en effet ce ne sont point de pures versions de l'Ecriture. Les meilleures sont celle d'Onkelos, qui n'est que sur le Pentateuque, & celle de Jonathan, sur tous les livres que les Juifs appellent Prophetes, c'est-à-dire sur Josué, les Juges, les livres des Rois, les grands & les petits Prophetes. Les autres paraphrases chaldéennes sont la plûpart remplies de fables, on les a insérées dans la grande Bible hébraïque de Venise & de Bâle, mais on les lits plus aisément dans les Polyglottes, où l'on a mis à côté la traduction latine. Voy. TARGUM.
BIBLES SYRIAQUES. En 1562 Jean Albert Widmanstadius fit imprimer à Vienne en Autriche tout le nouveau Testament en très-beaux caracteres syriaques ; & cette version a été insérée dans la Bible de Philippe II. avec la traduction latine. Gabriel Sionite a publié aussi à Paris en 1525 une très-belle édition des pseaumes en syriaque, avec une version latine. Quant à l'ancien Testament, les Syriens en ont deux sortes de versions : la premiere, faite sur le grec des Septante, n'a jamais été imprimée ; l'autre, qui a été prise sur le texte hébreu, a été imprimée pour la premiere fois dans la grande Bible de le Jay, & ensuite dans la Polyglotte d'Angleterre. Elle est en usage chez les chrétiens d'Orient, qui suivent le rit syrien.
BIBLES ARABES, il y a un très-grand nombre de Bibles arabes, dont les unes sont à l'usage des Juifs dans les pays où ils parlent l'arabe, les autres à l'usage des chrétiens du Levant qui parlent cette langue. Les premieres ont toutes été faites sur l'hébreu, les autres sur d'autres versions, comme celles des Syriens sur le syriaque, lorsque cette derniere langue n'a plus été entendue du peuple ; celles des Cophtes sur leur langue naturelle, quoiqu'elle fût aussi bien entendue du peuple que des prêtres. En 1516 Augustin Justiniani, évêque de Nebis donna à Genes une version arabe du Pseautier, avec le texte hébreu & la paraphrase chaldaïque, en y ajoûtant les interprétations latines. La version arabe de toute l'Ecriture se trouve dans les Polyglottes de Paris & de Londres. Il y a une édition entiere de l'ancien Testament, imprimée à Rome en 1671 par ordre de la congrégation de propagandâ fide ; mais qu'on a voulu faire quadrer avec la Vulgate, & qui par conséquent n'est pas toûjours exactement conforme aux texte hébreu. Les Bibles arabes de l'Europe ne sont pas non plus tout-à-fait les mêmes que celles de l'Orient : plusieurs savans pensent que la version arabe du vieux Testament qui est imprimée dans les Polyglottes, est au moins en grande partie celle de Saadias Gaon, rabbin, qui vivoit au commencement du dixieme siecle ; & la raison qu'ils en donnent est qu'Aben Ezra, grand antagoniste de Saadias, cite quelques passages de cette version que l'on trouve dans les versions arabes des Polyglottes : mais d'autres pensent que la version arabe de Saadias ne subsiste plus. En 1622 Erpenius imprima un Pentateuque arabe, que l'on appelloit aussi le Pentateuque de Mauritanie, parce qu'il étoit à l'usage des Juifs de Barbarie ; la version en est très-littérale, & passe pour fort exacte. On a aussi publié les quatre Evangélistes en arabe, avec une version latine, in-fol. à Rome en 1591. Cette version a été réimprimée depuis dans les Polyglottes de Paris & de Londres, avec quelques changemens faits par Gabriel Sionite. Erpenius donna aussi à Leyde en 1616 un nouveau Testament arabe en entier, tel qu'il l'avoit trouvé dans un manuscrit.
BIBLES COPHTES. Ce sont les Bibles des Chrétiens d'Egypte, qu'on appelle Cophtes ou Coptes, & qui sont écrites dans l'ancien langage de ce pays-là. Il n'y a aucune partie de la Bible imprimée en cophte ; mais il y en a plusieurs manuscrits dans les grandes bibliotheques, & sur-tout dans celle du roi. Cette ancienne langue cophte n'étant plus entendue depuis très-longtems par les Cophtes mêmes, ils lisent l'Ecriture dans une version arabe, comme on le voit par les Bibles cophtes manuscrites qui sont à la bibliotheque du roi.
BIBLES ETHIOPIENNES. Les Ethiopiens ont aussi traduit quelques parties de la Bible en leur langue, comme les Pseaumes, les Cantiques, quelques chapitres de la Genese, Ruth, Joël, Jonas, Malachie, & le nouveau Testament ; qui ont été imprimés d'abord séparément, puis recueillis dans la Polyglotte d'Angleterre. Cette version a été faite sur le grec des Septante, peut-être même sur le cophte, qui a lui même été pris des Septante. Le nouveau Testament éthiopien, imprimé d'abord à Rome en 1548, est très-inexact : on n'a pas laissé que de le faire passer avec toutes ses fautes dans la Polyglotte de Londres.
BIBLES ARMENIENNES. Il y a une très-ancienne version arménienne de toute la Bible, qui a été faite d'après le grec des Septante par quelques docteurs de cette nation dès le tems de S. Jean Chrysostome. Comme les exemplaires manuscrits coûtoient beaucoup, Oschan ou Uscham, évêque d'Uschouanch, un de leurs prélats, la fit imprimer en entier in -4°. à Amsterdam en 1664, avec le nouveau Testament in -8°. on avoit cependant imprimé long-tems auparavant le Pseautier arménien.
BIBLES PERSANES. Quelques-uns des Peres semblent dire que toute l'Ecriture fut d'abord traduite en langue persane, mais il ne reste rien de cette ancienne version, qu'on suppose faite d'après celle des Septante. Le Pentateuque persan, imprimé dans la Polyglotte de Londres, est l'ouvrage de Rabbi Jacob, Juif persan. Dans la même Polyglotte se trouvent les quatre Evangélistes en persan, avec la traduction latine ; mais cette version paroît être très-moderne, peu exacte, & ne méritoit pas d'être publiée.
BIBLES GOTHIQUES. On croit généralement que Ulphilas ou Gulphilas, évêque des Goths qui habitoient dans la Moesie, & qui vivoit dans le jv. siecle, fit une version de la Bible entiere pour ses compatriotes, à l'exception toutefois des livres des Rois ; qu'il ne voulut pas mettre entre les mains de cette nation assez belliqueuse par elle-même, craignant que les guerres & les combats dont il y est fait mention, ne l'excitassent à avoir toûjours les armes à la main, & à justifier cette conduite par l'exemple des anciens Hébreux. Quoiqu'il en soit on n'a plus rien de cette ancienne version que les quatre Evangélistes, qui furent imprimés in -4°. à Dordrecht en 1665, d'après un très-ancien manuscrit.
BIBLES MOSCOVITES. La Bible moscovite est une Bible entiere en langue sclavone, faite sur le grec ; elle fut imprimée à Ostravie en Volhinie aux dépens de Constantin Basile duc d'Ostravie, pour l'usage des Chrétiens qui parlent le sclavon, dont la langue moscovite est un dialecte : on la nomme communément la Bible moscovite.
Le nombre des Bibles en langue vulgaire est si prodigieux, & d'ailleurs elles sont si connues, que nous n'avons pas jugé nécessaire d'en traiter expressement, Voyez le livre de Kortholtus, Allemand, intitulé de variis Bibliorum editionibus. R. Elias Levita ; le P. Morin ; Simon, Hist. critiq. du vieux & du nouv. Testam. Bibliot. des aut. ecclés. des trois prem. siec. par M. Dupin, tom. I. Bibliot. sacr. du P. le Long, & celle que dom Calmet a jointe à son dictionn. de la Bible. (G)
* Comme nous ne nous sommes pas proposés seulement de faire un bon ouvrage, mais encore de donner des vûes aux auteurs pour en publier sur plusieurs matieres de meilleurs que ceux qu'on a, nous allons finir cet article par le plan d'un traité qui renfermeroit tout ce qu'on peut désirer sur les questions préliminaires de la Bible. Il faudroit diviser ce traité en deux parties : la premiere seroit une critique des livres & des auteurs de l'Ecriture sainte : on renfermeroit dans la seconde certaines connoissances générales qui sont nécessaires pour une plus grande intelligence de ce qui est contenu dans ces livres.
On distribueroit la premiere partie en trois sections : on parleroit dans la premiere, des questions générales qui concernent tout le corps de la Bible : dans la seconde, de chaque livre en particulier, & de son auteur : dans la troisieme, des livres cités, perdus, apocryphes, & des monumens qui ont rapport à l'Ecriture.
Dans la premiere de ces sections on agiteroit six questions. La premiere seroit des différens noms qu'on a donnés à la Bible, du nombre des livres qui la composent, & des classes différentes qu'on en a faites. La seconde, de la divinité des Ecritures, on la prouveroit contre les payens & les incrédules : de l'inspiration & de la prophétie ; on y examineroit en quel sens les auteurs sacrés ont été inspirés ; si les termes sont également inspirés comme les choses ; si tout ce que ces livres contiennent est de foi, même les faits historiques & les propositions de physique. La troisieme seroit de l'authenticité des Livres sacrés, du moyen de distinguer les livres véritablement canoniques d'avec ceux qui ne le sont pas ; on y examineroit la fameuse controverse des Chrétiens de la communion romaine & de ceux de la communion protestante, savoir si l'Eglise juge l'Ecriture ; on expliqueroit ce que c'est que les livres deutérocanoniques ; dans quel sens & par quelles raisons ils sont ou doivent être nommés deutérocanoniques. La quatrieme seroit des différentes versions de la Bible, & des diverses éditions de chaque version : on y parleroit par occasion de l'ancienneté des langues & des caracteres ; on en rechercheroit l'origine, on examineroit quelle a été la premiere langue du monde ; si l'hébraïque mérite cette préférence. S'il n'étoit pas possible de porter une entiere lumiere sur ces objets, on détermineroit du moins ce qu'on en voit distinctement ; on rechercheroit jusqu'où l'on peut compter sur la fidélité des copies, des manuscrits, des versions, des éditions, & sur leur intégrité ; s'il y en a d'authentiques outre la vulgate, ou si elle est la seule qui le soit ; on n'oublieroit pas les versions en langues vulgaires ; on examineroit si la lecture en est permise ou défendue, & ce qu'il faut penser de l'opinion qui condamne les traductions des Livres sacrés. La cinquieme seroit employée à l'examen du style de l'Ecriture, de la source de son obscurité, des différens sens qu'elle souffre, & dans lesquels elle a été citée par les auteurs ecclésiastiques ; de l'usage qu'on doit faire de ces sens, soit pour la controverse, soit pour la chaire ou le mistique ; on y discuteroit le point de conscience, s'il est permis d'en faire l'application à des objets profanes. La sixieme & derniere question de la section premiere de la premiere partie, traiteroit de la division des livres en chapitres & en versets, des différens commentaires, de l'usage qu'on peut faire des rabbins, de leur talmud, de leur gemare & de leur cabale ; de quelle autorité doivent être les commentaires & les homélies des peres sur l'Ecriture ; & de quel poids sont ceux qui sont venus depuis, & quels sont les plus utiles pour l'intelligence des Ecritures.
La seconde section seroit divisée en autant de petits traités qu'il y a de livres dans l'Ecriture : on en feroit l'analyse & la critique ; on en éclairciroit l'histoire ; on donneroit des dissertations sur les auteurs, les tems précis, & la maniere dont ils ont écrit.
La troisieme section comprendroit trois questions : la premiere, des livres cités dans l'Ecriture ; on examineroit quels étoient ces livres, ce qu'ils pouvoient contenir, qui en étoient les auteurs, enfin tout ce que les preuves & les conjectures en pourroient indiquer : la seconde, des livres apocryphes qu'on a voulu faire passer pour canoniques, soit qu'ils subsistent encore, ou qu'ils ayent été perdus, soit qu'ils ayent été composés par des auteurs Chrétiens, ou des ennemis de la religion : la troisieme, des monumens qui ont rapport à l'Ecriture, comme les ouvrages de Philon, de Josephe, de Mercure Trismegiste, & de plusieurs autres ; tels sont aussi les oracles des sibylles, le symbole des apôtres, & leurs canons.
Tel seroit l'objet & la matiere de la premiere partie ; la seconde comprendroit huit traités : le premier seroit de la Géographie sacrée : le second, de l'origine & de la division des peuples ; ce seroit un beau commentaire sur le chapitre X. de la Genese : le troisieme, de la chronologie de l'Ecriture, où par conséquent on travailleroit à éclaircir l'ancienne chronologie des empires d'Egypte, d'Assyrie, & de Babylone, qui se trouve extrèmement mêlée avec celle des Hébreux : le quatrieme, de l'origine & de la propagation de l'idolatrie ; celui-ci ne seroit, ou je me trompe fort, ni le moins curieux, ni le moins philosophique, ni le moins savant : le cinquieme, de l'histoire naturelle relative à l'Ecriture, des pierres précieuses dont il y est fait mention, des animaux, des plantes, & autres productions ; on rechercheroit quels sont ceux de nos noms auxquels il faudroit rapporter ceux sous lesquels elles sont désignées : le sixieme, des poids, des mesures, & des monnoies qui ont été en usage chez les Hébreux, jusqu'au tems de Notre-Seigneur, ou même après les apôtres : le septieme, des idiomes différens des langues principales, dans lesquels les livres saints ont été écrits ; des phrases poëtiques & proverbiales, des figures, des allusions, des paraboles ; en un mot, de ce qui forme une bonne partie de l'obscurité des prophéties & des évangiles : le huitieme seroit un abregé historique, qui exposeroit rapidement les différens états du peuple Hébreu jusqu'au tems des apôtres ; les différentes révolutions survenues dans son gouvernement, ses usages, ses opinions, sa politique, ses maximes.
Voilà une idée qui me paroît assez juste & assez étendue pour exciter un savant à la remplir. Tout ce qu'il diroit là-dessus ne seroit peut-être pas nouveau : mais ce seroit toûjours un travail estimable & utile au public, que de lui présenter dans un seul ouvrage complet, sous un même style, selon une méthode claire & uniforme, & avec un choix judicieux, des matériaux dispersés, & la plûpart inconnus, recueillis d'un grand nombre de savans.
Qu'il me soit permis de m'adresser ici à ceux qui n'ont pas de l'étendue de la Théologie, toute l'idée qu'ils en doivent avoir. Le plan que je viens de proposer a sans-doute de quoi surprendre par la quantité de matieres qu'il comprend ; ce n'est pourtant qu'une introduction à la connoissance de la religion : le théologien qui les possede ne se trouve encore qu'à la porte du grand édifice qu'il a à parcourir ? une seule these de licence contient toutes les questions dont je viens de parler. On se persuade faussement aujourd'hui qu'un théologien n'est qu'un homme qui sait un peu mieux son catéchisme que les autres ; & sous prétexte qu'il y a des mysteres dans notre religion, on s'imagine que toutes sortes de raisonnemens lui sont interdits. Je ne vois aucune science qui demande plus de pénétration, plus de justesse, plus de finesse, & plus de subtilité dans l'esprit, que la Théologie ; ses deux branches sont immenses, la scholastique & la morale ; elles renferment les questions les plus intéressantes. Un théologien doit connoître les devoirs de tous les états ; c'est à lui à discerner les limites qui séparent ce qui est permis d'avec ce qui est défendu : lorsqu'il parle des devoirs de notre religion, son éloquence doit être un tonnerre qui foudroye nos passions, & en arrête le cours ; ou doit avoir cette douceur qui fait entrer imperceptiblement dans notre ame des vérités contraires à nos penchans. Quel respect & quelle vénération ne méritent pas de tels hommes ! Et qu'on ne croye pas qu'un théologien, tel que je viens de le peindre, soit un être de raison. Il est sorti de la faculté de Théologie de Paris plusieurs de ces hommes rares. On lit dans ses fastes les noms célebres & à jamais respectables des Gersons, des Duperrons, des Richelieux, & des Bossuets. Elle ne cesse d'en produire d'autres pour la conservation des dogmes & de la morale du Christianisme. Les écrivains qui se sont échappés d'une maniere inconsidérée contre ce qui se passe sur les bancs de Théologie, méritent d'être dénoncés à cette faculté, & par elle au clergé de France : que pensera-t-il d'un trait lancé contre ce corps respectable, dans la continuation obscure d'un livre destiné toutefois à révéler aux nations la gloire de l'Eglise Gallicane, dont la faculté de Théologie est un des principaux ornemens ? Ce trait porte contre une these qui dure douze heures, & qu'on nomme Sorbonique : on y dit plus malignement qu'ingénieusement, que malgré sa longueur elle n'a jamais ruiné la santé de personne. Cette these ne tua point l'illustre Bossuet : mais elle alluma en lui les rayons de lumiere qui brillent dans ses ouvrages sur le mérite, sur la justification, & sur la grace. Elle ne se fait point, il est vrai, avec cet appareil qu'on remarque dans certains colléges : on y est plus occupé des bons argumens & des bonnes réponses, que de la pompe & de l'ostentation, moyen sûr d'en imposer aux ignorans : on n'y voit personne posté pour arrêter le cours d'une bonne difficulté ; & ceux qui sont préposés pour y maintenir l'ordre, sont plus contens de voir celui qui soûtient un peu embarrassé sur une objection très-forte qu'on lui propose, que de l'entendre répondre avec emphase à des minuties. Ce n'est point pour ébloüir le vulgaire que la faculté fait soûtenir des theses ; c'est pour constater le mérite de ceux qui aspirent à l'honneur d'être membres de son corps : aussi ne voit-on point qu'elle s'empresse à attirer une foule d'approbateurs ; tous les Licenciés y disputent indifféremment : c'est que ce sont des actes d'épreuve & non de vanité. Ce n'est point sur un ou deux traités qu'ils soûtiennent, les seuls qu'ils ayent appris dans leur vie ; leurs theses n'ont d'autres bornes que celles de la Théologie. Je sai que l'auteur pourra se défendre, en disant qu'il n'a rien avancé de lui-même ; qu'il n'a fait que rapporter ce qu'un autre avoit dit : mais excuseroit-il quelqu'un qui dans un livre rapporteroit tout ce qu'on a écrit de vrai ou de faux contre son corps ? Nous espérons que ceux à qui l'honneur de notre nation & de l'église de France est cher, nous sauront gré de cette espece de digression. Nous remplissons par-là un de nos principaux engagemens ; celui de chercher & de dire, autant qu'il est en nous, la vérité. Voyez FACULTE, LICENCE, THEOLOGIE.
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BIBLIO | (Géog.) ville & château de Portugal, à peu de distance de Bragance.
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BIBLIOGRAPHE | S. m. ce mot vient du grec, & signifie une personne versée dans la connoissance & le déchiffrement des anciens manuscrits sur l'écorce des arbres, sur le papier, & sur le parchemin. Scaliger, Saumaise, Casaubon, Sirmond, Petau, & Mabillon, étoient habiles dans cette sorte de science, à laquelle on donne le nom de bibliographie.
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BIBLIOMANE | S. m. c'est un homme possédé de la fureur des livres. Ce caractere original n'a pas échappé à la Bruyere. Voici de quelle maniere il le peint dans le chap. xiij. de son livre des Caracteres, où il passe en revûe bien d'autres originaux. Il feint de se trouver avec un de ces hommes qui ont la manie des livres ; & sur ce qu'il lui a fait comprendre qu'il a une bibliotheque, notre auteur témoigne quelqu'envie de la voir. " Je vais trouver, dit-il, cet homme, qui me reçoit dans une maison, où dès l'escalier je tombe en foiblesse d'une odeur de maroquin noir dont ses livres sont tous couverts. Il a beau me crier aux oreilles, pour me ranimer, qu'il sont dorés sur tranche, ornés de filets d'or, & de la bonne édition, me nommer les meilleurs l'un après l'autre, dire que sa galerie est remplie à quelques endroits près, qui sont peints de maniere, qu'on les prend pour de vrais livres arrangés sur des tablettes, & que l'oeil s'y trompe ; ajoûter qu'il ne lit jamais, qu'il ne met pas le pié dans cette galerie ; qu'il y viendra pour me faire plaisir : je le remercie de sa complaisance, & ne veux, non plus que lui, visiter sa tannerie, qu'il appelle bibliotheque " Un bibliomane n'est donc pas un homme qui se procure des livres pour s'instruire : il est bien éloigné d'une telle pensée, lui qui ne les lit pas seulement. Il a des livres pour les avoir, pour en repaître sa vûe ; toute sa science se borne à connoître s'ils sont de la bonne édition, s'ils sont bien reliés : pour les choses qu'ils contiennent, c'est un mystere auquel il ne prétend pas être initié ; cela est bon pour ceux qui auront du tems à perdre. Cette passion qu'on appelle bibliomanie, est souvent aussi dispendieuse que l'ambition & la volupté. Tel homme n'a de bien que pour vivre dans une honnête médiocrité, qui se refusera le simple nécessaire pour satisfaire cette passion.
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BIBLIOMANIE | S. f. fureur d'avoir des livres, & d'en ramasser.
M. Descartes disoit que la lecture étoit une conversation qu'on avoit avec les grands hommes des siecles passés, mais une conversation choisie, dans laquelle ils ne nous découvrent que les meilleures de leurs pensées. Cela peut être vrai des grands hommes : mais comme les grands hommes sont en petit nombre, on auroit tort d'étendre cette maxime à toutes sortes de livres & à toutes sortes de lectures. Tant de gens médiocres & tant de sots même ont écrit, que l'on peut en général regarder une grande collection de livres dans quelque genre que ce soit, comme un recueil de mémoires pour servir à l'histoire de l'aveuglement & de la folie des hommes ; & on pourroit mettre au-dessus de toutes les grandes bibliotheques cette inscription philosophique : Les petites maisons de l'esprit humain.
Il s'ensuit de-là que l'amour des livres, quand il n'est pas guidé par la Philosophie & par un esprit éclairé, est une des passions les plus ridicules. Ce seroit à-peu-près la folie d'un homme qui entasseroit cinq ou six diamans sous un monceau de cailloux.
L'amour des livres n'est estimable que dans deux cas ; 1°. lorsqu'on sait les estimer ce qu'ils valent, qu'on les lit en philosophe, pour profiter de ce qu'il peut y avoir de bon, & rire de ce qu'ils contiennent de mauvais ; 2°. lorsqu'on les possede pour les autres autant que pour soi, & qu'on leur en fait part avec plaisir & sans réserve. On peut sur ces deux points proposer M. Falconet pour modele à tous ceux qui possedent des bibliotheques, ou qui en posséderont à l'avenir.
J'ai oüi dire à un des plus beaux esprits de ce siecle ; qu'il étoit parvenu à se faire, par un moyen assez singulier, une bibliotheque très-choisie, assez nombreuse, & qui pourtant n'occupe pas beaucoup de place. S'il achete, par exemple, un ouvrage en douze volumes, où il n'y ait que six pages qui méritent d'être lûes, il sépare ces six pages du reste, & jette l'ouvrage au feu. Cette maniere de former une bibliotheque m'accommoderoit assez.
La passion d'avoir des livres est quelquefois poussée jusqu'à une avarice très-sordide. J'ai connu un fou qui avoit conçû une extrème passion pour tous les livres d'Astronomie, quoiqu'il ne sût pas un mot de cette science ; il les achetoit à un prix exorbitant, & les renfermoit proprement dans une cassette sans les regarder. Il ne les eût pas prêté ni même laissé voir à M. Haller ou à M. Monnier, s'ils en eussent eu besoin. Un autre faisoit relier les siens très-proprement ; & de peur de les gâter, il les empruntoit à d'autres quand il en avoit besoin, quoiqu'il les eût dans sa bibliotheque. Il avoit mis sur la porte de sa bibliotheque, ite ad vendentes : aussi ne prêtoit-il de livres à personne.
En général, la bibliomanie, à quelques exceptions près, est comme la passion des tableaux, des curiosités, des maisons ; ceux qui les possedent n'en joüissent guere. Ainsi un philosophe en entrant dans une bibliotheque, pourroit dire de presque tous les livres qu'il y voit, ce qu'un philosophe disoit autrefois en entrant dans une maison fort ornée, quam multis non indigeo, que de choses dont je n'ai que faire ! (O)
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BIBLIOTAPHE | S. m. (Littérature) enterreur de livres. Quoique ce mot composé de , livre, & de , j'ensevelis, ne se trouve pas dans les dictionnaires ordinaires, il doit avoir place dans celui-ci, parce qu'il mérite autant le droit de bourgeoisie que bibliographe, & sur-tout parce que les bibliotaphes n'amassent des livres que pour empêcher les autres d'en acquérir & d'en faire usage.
La bibliotaphie est la bibliomanie de l'avare ou du jaloux, & par conséquent les bibliotaphes sont de plus d'une façon la peste des lettres ; car il ne faut pas croire que ces sortes de personnes soient en petit nombre : l'Europe en a toujours été infectée, & même aujourd'hui il est peu de curieux qui n'en rencontrent de tems-en-tems en leur chemin. Casaubon s'en plaint amerement dans une lettre à Hoeschelius : Non tu imitaris, lui dit-il, ineptos quosdam homines, quibus nulla adeò gloriatio placet, quàm si quid rari habent, id ut soli habere, & sibi tantum dicantur. Odiosum, importunum, , & a musis alienum genus hominum. Tales memini me experiri aliquoties magno cum stomacho meo. Il y a une tradition non interrompue sur cet article, que l'on pourroit commencer à Lucien, & finir au P. le Long. Le citoyen de Samosate a fait une sortie violente contre un de ces ignorans qui croyent passer pour habiles, parce qu'ils ont une ample bibliothèque, & qu'ils en ont exclu un galant homme ; il conclut en le comparant au chien qui empêche le cheval de manger l'orge qu'il ne peut manger lui-même, , &c.
Depuis Lucien, nous ne trouvons que de semblables plaintes. Si vous lisez les lettres d'Ambroise Camaldule, ce bon & docte religieux, qui non-seulement a passé sa vie à procurer l'avancement des sciences, par ses ouvrages, mais qui prêtoit volontiers ses manuscrits les plus précieux, vous verrez qu'il a souvent rencontré des bibliotaphes qui, incapables de faire usage des manuscrits qu'ils avoient entre les mains, en refusoient la communication à ceux qui ne la demandoient que pour en gratifier le public. Philelphe s'est aussi vu dans les mêmes circonstances, & ses lettres sont remplies de malédictions contre les gens de cette espece.
En n'imaginant pas que des savans du caractere du P. le Long aient été exposés à leurs duretés ; il l'a été néanmoins, & n'a pu, malgré la douceur qui lui étoit naturelle, retenir son chagrin contre ces enterreurs de livres ; après avoir remercié ceux qui lui avoient ouvert leurs bibliothèques. Si le P. le Long, qui étoit toujours prêt à faire voir la belle & nombreuse bibliothèque dont il disposoit, a essuyé des refus de cette espece ; que l'on juge de ce qui doit arriver à des gens de lettres de moindre considération.
Mais en général, il y a des pays où cette dureté est rare. En France, par exemple, où l'on a plusieurs bibliothèques pour la commodité du public, on y est toujours parfaitement bien reçu, & les étrangers ont tout lieu de se louer de la politesse qu'on a pour eux. Gronovius mandoit au jeune Heinsius, que son ami Vincent Fabricius lui avoit écrit de Paris, que rien n'égaloit l'humeur obligeante des François à cet égard.
Vossius éprouva tout le contraire en Italie. Ce n'est pas seulement à Rome que l'entrée des bibliothèques est difficile, c'est la même chose dans les autres villes. La bibliotheque de S. Marc à Venise est impénétrable. Dom Bernard de Montfaucon raconte que le religieux Augustin du couvent de la Carbonnaria à Naples, qui lui avoit ouvert la bibliotheque de ce monastere, avoit été mis en pénitence pour récompense de cette action.
M. Mencken est un des modernes qui a déclamé avec le plus d'indignation contre les bibliotaphes ; c'est ce qui paroît par sa préface à la tête de l'édition qu'il a procurée du traité de Bartholin, de libris legendis. Ceux qui sont en état de former des bibliotheques, ne feront pas mal de le consulter & de suivre les maximes qu'il y donne, pour s'en servir utilement ; la principale est d'en faire usage pour soi, & pour les autres, tant en leur fournissant de bonne grace les recueils qu'on peut avoir sur les matieres qui font l'objet de leur travail, qu'en leur prêtant tous les livres dont ils ont besoin. Disons à l'honneur des lettres & des lettrés, que la plus grande partie des gens à bibliotheques sont de cette humeur bienfaisante, & que pour un Saldierre on compte plusieurs Pinelli, Peiresc & de Cordes. Ce dernier poussa l'envie de rendre sa bibliotheque utile jusqu'à ordonner par son testament qu'elle ne fût pas vendue en détail, mais en gros, & mise en un lieu où le public fût à portée de la consulter.
M. Bigot avoit pris la précaution d'ordonner la même chose ; mais il a été moins heureux que M. de Cordes, dont la bibliotheque passa toute entiere à M. le cardinal Mazarin, qui n'épargna pas les dépenses pour y mettre tous les bons livres qui y manquoient. Naudé, qui étoit chargé du détail de cette bibliotheque, fit exprès plusieurs voyages en Allemagne & en Italie pour y acheter ce qu'il y avoit de plus rare, & il est aisé de concevoir qu'elle reçut dans ses mains des accroissemens considérables. Tant de soins devinrent cependant inutiles par les guerres de la fronde pendant la minorité de Louis XIV. Le parlement qui ne cherchoit qu'à signaler sa colere contre le premier ministre, fit saisir sa bibliotheque, & ordonna par un arrêt du 8 Février 1652 qu'elle fût vendue à l'encan. Naudé au désespoir de voir toutes ses peines perdues, représenta vainement à la cour le tort que causoit aux lettres le démembrement de cette bibliotheque. Le parlement resta inflexible, & ses ordres furent exécutés.
Les savans ont peint avec de vives couleurs le procédé du parlement. L'abbé de Marolles en dit ce qu'il en pense dans les remarques qu'il joignit à la traduction de Virgile, mais la violence des tems l'obligea de supprimer ses réflexions chagrines. " Cela n'empêcha pas néanmoins, ajoute-t-il, que dans l'une de mes épîtres dédicatoires (à M. le duc de Valois) je ne disse que S. A. étant un jour touchée de cet esprit délicat des muses, qui produit dans l'ame tant de douceurs, elle aimeroit un jour nos ouvrages auxquels elle destineroit de grandes bibliotheques en la place de celles qui venoient d'être détruites ; & certes les Vandales & les Goths n'ont rien fait autrefois de plus barbare ; ce qui devroit porter quelque rougeur sur le front de ceux qui y donnerent leurs suffrages ".
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BIBLIOTHECAIRE | S. m. celui qui est préposé à la garde, au soin, au bon ordre, à l'accroissement des livres d'une bibliotheque. Il y a peu de fonctions littéraires qui demandent autant de talens. Celle de bibliothécaire d'une grande bibliotheque, telle, par exemple, que celle du Roi, suppose la connoissance des langues anciennes & modernes, celle des livres, des éditions, & de tout ce qui a rapport à l'histoire des Lettres, au commerce de la Librairie, & à l'Art typographique.
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BIBLIOTHEQUE | S. f. ce nom est formé de , livre, & de , theca, repositorium ; ce dernier mot vient de , pono, & se dit de tout ce qui sert à serrer quelque chose. Ainsi bibliotheque, selon le sens littéral de ce mot, signifie un lieu destiné pour y mettre des livres. Une bibliotheque est un lieu plus ou moins vaste, avec des tablettes ou des armoires où les livres sont rangés sous différentes classes : nous parlerons de cet ordre à l'article CATALOGUE.
Outre ce premier sens littéral, on donne aussi le nom de bibliotheque à la collection même des livres. Quelques auteurs ont donné, par extension & par métaphore, le nom de bibliotheque à certains recueils qu'ils ont faits, ou à certaines compilations d'ouvrages. Telles sont la bibliotheque rabbinique, la bibliotheque des auteurs ecclésiastiques, bibliotheca patrum, &c.
C'est en ce dernier sens que les auteurs ecclésiastiques ont donné par excellence le nom de bibliotheque au recueil des livres inspirés, que nous appellons encore aujourd'hui la bible, c'est-à-dire, le livre par excellence. En effet, selon le sentiment des critiques les plus judicieux, il n'y avoit point de livres avant le tems de Moyse, & les Hébreux ne purent avoir de bibliotheque qu'après sa mort : pour lors ses écrits furent recueillis & conservés avec beaucoup d'attention. Par la suite on y ajoûta plusieurs autres ouvrages.
On peut distinguer les livres des Hébreux, en livres sacrés, & livres profanes : le seul objet des premiers étoit la religion ; les derniers traitoient de la philosophie naturelle, & des connoissances civiles ou politiques.
Les livres sacrés étoient conservés, ou dans des endroits publics, ou dans des lieux particuliers : par endroits publics, il faut entendre toutes les synagogues, & principalement le temple de Jérusalem, où l'on gardoit avec un respect infini les tables de pierre sur lesquelles Dieu avoit écrit ses dix commandemens, & qu'il ordonna à Moyse de déposer dans l'arche d'alliance.
Outre les tables de la loi, les livres de Moyse & ceux des prophetes furent conservés dans la partie la plus secrette du sanctuaire, où il n'étoit permis à personne de les lire, ni d'y toucher ; le grand-prêtre seul avoit droit d'entrer dans ce lieu sacré, & cela seulement une fois par an : ainsi ces livres sacrés furent à l'abri des corruptions des interprétations ; aussi étoient-ils dans la suite la pierre de touche de tous les autres, comme Moyse le prédit au xxxij. chapitre du Deutéronome, où il ordonna aux Lévites de placer ses livres au-dedans de l'arche.
Quelques auteurs croyent que Moyse étant prêt à mourir, ordonna qu'on fît douze copies de la loi, qu'il distribua aux douze tribus : mais Maimonides assûre qu'il en fit faire treize copies, c'est-à-dire douze pour les douze tribus, & une pour les Lévites, & qu'il leur dit à tous, en les leur donnant, recevez le livre de la loi que Dieu lui-même nous a donné. Les interpretes ne sont pas d'accord si ce volume sacré fut déposé dans l'arche avec les tables de pierre, ou bien dans un petit cabinet séparé.
Quoi qu'il en soit, Josué écrivit un livre qu'il ajoûta ensuite à ceux de Moyse. Josué XIV. Tous les prophetes firent aussi des copies de leurs sermons & de leurs exhortations, comme on peut le voir au chapitre xv. de Jérémie, & dans plusieurs autres endroits de l'Ecriture : ces sermons & ces exhortations furent conservés dans le temple pour l'instruction de la postérité.
Tous ces ouvrages composoient une bibliotheque plus estimable par sa valeur intrinseque, que par le nombre des volumes.
Voilà tout ce qu'on sait de la bibliotheque sacrée qu'on gardoit dans le temple : mais il faut remarquer qu'après le retour des Juifs de la captivité de Babylone, Néhémie rassembla les livres de Moyse, & ceux des Rois & des Prophetes, dont il forma une bibliotheque ; il fut aidé dans cette entreprise par Esdras, qui, au sentiment de quelques-uns, rétablit le Pentateuque, & toutes les anciennes écritures saintes qui avoient été dispersées lorsque les Babyloniens prirent Jérusalem, & brûlerent le temple avec la bibliotheque qui y étoit renfermée : mais c'est surquoi les savans ne sont pas d'accord. En effet, c'est un point très-difficile à décider.
Quelques auteurs prétendent que cette bibliotheque fut de nouveau rétablie par Judas Macchabée, parce que la plus grande partie en avoit été brûlée par Antiochus, comme on lit chap. j. du premier livre des Macchabées. Quand même on conviendroit qu'elle eût subsisté jusqu'à la destruction du second temple, on ne sauroit cependant déterminer le lieu où elle étoit déposée : mais il est probable qu'elle eut le même sort que la ville. Car quoique Rabbi Benjamin affirme que le tombeau du prophete Ezéchiel avec la bibliotheque du premier & du second temple, se voyoient encore de son tems dans un lieu situé sur les bords de l'Euphrate ; cependant Manassés de Groningue, & plusieurs autres personnes, dont on ne sauroit révoquer en doute le témoignage, & qui ont fait exprès le voyage de Mésopotamie, assûrent qu'il ne reste aucun vestige de ce que prétend avoir vû Rabbi Benjamin, & que dans tout le pays il n'y a ni tombeau ni bibliotheque hébraïque.
Outre la grande bibliotheque, qui étoit conservée religieusement dans le temple, il y en avoit encore une dans chaque synagogue. Actes des apôtres, xv. Luc jv. 16. 17. Les auteurs conviennent presqu'unanimement que l'académie de Jérusalem étoit composée de quatre cent cinquante synagogues ou colléges, dont chacune avoit sa bibliotheque, où l'on alloit publiquement lire les écritures saintes.
Après ces bibliotheques publiques qui étoient dans le temple & dans les synagogues, il y avoit encore des bibliotheques sacrées particulieres. Chaque Juif en avoit une, puisqu'ils étoient tous obligés d'avoir les livres qui regardoient leur religion, & même de transcrire chacun de sa propre main une copie de la loi.
On voyoit encore des bibliotheques dans les célébres universités ou écoles des Juifs. Ils avoient aussi plusieurs villes fameuses par les sciences qu'on y cultivoit, entr'autres celle que Josué nomme la ville des Lettres, & qu'on croit avoir été Cariatsepher, située sur les confins de la tribu de Juda. Dans la suite celle de Tiberiade ne fut pas moins fameuse par son école ; & il est probable que ces sortes d'académies n'étoient point dépourvûes de bibliotheques.
Depuis l'entiere dispersion des Juifs à la ruine de Jérusalem & du temple par Tite, leurs docteurs particuliers ou rabbins ont écrit prodigieusement, & comme l'on sait, un amas de rêveries & de contes ridicules : mais dans les pays où ils sont tolérés, & où ils ont des synagogues, on ne voit point dans ces lieux d'assemblées, d'autres livres que ceux de la loi : le talmud & les paraphrases, non plus que les recueils de traditions rabbiniques, ne forment point de corps de bibliotheque.
Les Chaldéens & les Egyptiens étant les plus proches voisins de la Judée, furent probablement les premiers que les Juifs instruisirent de leurs sciences, à ceux-là nous joindrons les Phéniciens & les Arabes.
Il est certain que les Sciences furent portées à une grande perfection par toutes ces nations, & sur-tout par les Egyptiens, que quelques auteurs regardent comme la nation la plus savante du monde, tant dans la théologie payenne que dans la physique.
Il est donc probable que leur grand amour pour les Lettres avoit produit de savans ouvrages & de nombreuses collections de livres.
Les auteurs ne parlent point des bibliotheques de la Chaldée ; tout ce qu'on en peut dire, c'est qu'il y avoit dans ce pays des savans en plusieurs genres, & sur-tout dans l'Astronomie, comme il paroît par une suite d'observations de 1900 ans, que Calisthenes envoya à Aristote après la prise de Babylone par Alexandre. Voyez ASTRONOMIE.
Eusebe, de praep. evangel. dit que les Phéniciens étoient très-curieux dans leurs collections de livres, mais que les bibliotheques les plus nombreuses & les mieux choisies étoient celles des Egyptiens, qui surpassoient toutes les autres nations en bibliotheques aussi-bien qu'en savoir.
Selon Diodore de Sicile, le premier qui fonda une bibliotheque en Egypte, fut Osymandias, successeur de Prothée & contemporain de Priam roi de Troie. Pierius dit que ce prince aimoit tant l'étude, qu'il fit construire une bibliotheque magnifique, ornée des statues de tous les dieux de l'Egypte, & sur le frontispice de laquelle il fit écrire ces mots, le Thrésor des remedes de l'ame : mais ni Diodore de Sicile ni les autres historiens ne disent rien du nombre de volumes qu'elle contenoit ; autant qu'on en peut juger elle ne pouvoit pas être fort nombreuse, vû le peu de livres qui existoient pour lors, qui étoient tous écrits par les prêtres ; car pour ceux de leurs deux mercures qu'on regardoit comme des ouvrages divins, on ne les connoît que de nom, & ceux de Manethon sont bien postérieurs au tems dont nous parlons. Il y avoit une très-belle bibliotheque à Memphis, aujourd'hui le grand Caire, qui étoit déposée dans le temple de Vulcain : c'est de cette bibliotheque que Naucrates accuse Homere d'avoir volé l'Iliade & l'Odyssée, & de les avoir ensuite donnés comme ses propres productions.
Mais la plus grande & la plus magnifique bibliotheque de l'Egypte, & peut-être du monde entier, étoit celle des Ptolomées à Alexandrie ; elle fut commencée par Ptolomée Soter, & composée par les soins de Demetrius de Phalere, qui fit rechercher à grands fraix des livres chez toutes les nations, & en forma, selon S. Epiphane, une collection de 54800 volumes. Josephe dit qu'il y en avoit 200 mille, & que Demetrius espéroit en avoir dans peu 500 mille ; cependant Eusebe assûre qu'à la mort de Philadelphe, successeur de Soter, cette bibliotheque n'étoit composée que de cent mille volumes. Il est vrai que sous ses successeurs elle s'augmenta par degrés, & qu'enfin on y compta jusqu'à 700000 volumes : mais par le terme de volumes, il faut entendre des rouleaux beaucoup moins chargés que ne sont nos volumes.
Il acheta de Nelée, à des prix exorbitans, une partie des ouvrages d'Aristote, & un grand nombre d'autres volumes, qu'il fit chercher à Rome & à Athenes, en Perse, en Ethiopie.
Un des plus précieux morceaux de sa bibliotheque étoit l'Ecriture sainte, qu'il fit déposer dans le principal appartement, après l'avoir fait traduire en grec par les soixante-douze interpretes, que le grand-prêtre Eléazar avoit envoyés pour cet effet à Ptolomée, qui les avoit fait demander par Aristée, homme très-savant, & capitaine de ses gardes. Voyez SEPTANTE.
Un de ses successeurs, nommé Ptolomée Phiscon, prince d'ailleurs cruel, ne témoigna pas moins de passion pour enrichir la bibliotheque d'Alexandrie. On raconte de lui, que dans un tems de famine il refusa aux Athéniens les blés qu'ils avoient coûtume de tirer de l'Egypte, à moins qu'ils ne lui remissent les originaux des tragédies d'Eschyle, de Sophocle, & d'Euripide, & qu'il les garda en leur en renvoyant seulement des copies fideles, & leur abandonna quinze talens qu'il avoit consignés pour sûreté des originaux.
Tout le monde sait ce qui obligea Jules César, assiégé dans un quartier d'Alexandrie, à faire mettre le feu à la flotte qui étoit dans le port : malheureusement le vent porta les flammes plus loin que César ne vouloit ; & le feu ayant pris aux maisons voisines du grand port, se communiqua de-là au quartier de Bruchion, aux magasins de blé & à la bibliotheque qui en faisoient partie, & causa l'embrasement de cette fameuse bibliotheque.
Quelques auteurs croyent qu'il n'y en eut que 400000 volumes de brûlés, & que tant des autres livres qu'on put sauver de l'incendie, que des débris de la bibliotheque des rois de Pergame, dont 200000 volumes furent donnés à Cléopatre par Antoine, on forma la nouvelle bibliotheque du Serapion, qui devint en peu de tems fort nombreuse. Mais après diverses révolutions sous les empereurs romains, dans lesquelles la bibliotheque fut tantôt pillée & tantôt rétablie, elle fut enfin détruite l'an 650 de Jesus-Christ, qu'Amry, général des Sarrasins, sur un ordre du calife Omar, commanda que les livres de la bibliotheque d'Alexandrie fussent distribués dans les bains publics de cette ville, & ils servirent à les chauffer pendant six mois.
La bibliotheque des rois de Pergame dont nous venons de parler, fut fondée par Eumenes & Attalus. Animés par un esprit d'émulation, ces princes firent tous leurs efforts pour égaler la grandeur & la magnificence des rois d'Egypte, & sur-tout en amassant un nombre prodigieux de livres, dont Pline dit que le nombre étoit de plus de deux cent mille. Volaterani dit qu'ils furent tous brûlés à la prise de Pergame : mais Pline & plusieurs autres nous assûrent que Marc Antoine les donna à Cléopatre ; ce qui ne s'accorde pourtant pas avec le témoignage de Strabon, qui dit que cette bibliotheque étoit à Pergame de son tems, c'est-à-dire sous le regne de Tibere. On pourroit concilier ces différens historiens, en remarquant qu'il est vrai que Marc Antoine avoit fait transporter cette bibliotheque de Pergame à Alexandrie, & qu'après la bataille d'Actium, Auguste, qui se plaisoit à défaire tout ce qu'Antoine avoit fait, la fit reporter à Pergame. Mais ceci ne doit être pris que sur le pié d'une conjecture, aussi-bien que le sentiment de quelques auteurs, qui prétendent qu'Alexandre-le-Grand en fonda une magnifique à Alexandrie, qui donna lieu par la suite à celle des Ptolomées.
Il y avoit une bibliotheque considérable à Suze en Perse, où Métosthenes consulta les annales de cette monarchie, pour écrire l'histoire qu'il nous en a laissée. Diodore de Sicile parle de cette bibliotheque : mais on croit communément qu'elle contenoit moins les livres de Sciences, qu'une collection des lois, des chartes, & des ordonnances des rois. C'étoit un dépôt semblable à nos chambres des comptes.
Nous ne savons rien de positif sur l'histoire de Grece, avant les guerres de Thebes & de Troie. Il seroit donc inutile de chercher des livres en Grece avant ces époques.
Les Lacédémoniens n'avoient point de livres ; ils exprimoient tout d'une façon si concise & en si peu de mots, que l'écriture leur paroissoit superflue, puisque la mémoire leur suffisoit pour se souvenir de tout ce qu'ils avoient besoin de savoir.
Les Athéniens, au contraire, qui étoient grands parleurs, écrivirent beaucoup ; & dès que les Sciences eurent commencé à fleurir à Athenes, la Grece fut bien-tôt enrichie d'un grand nombre d'ouvrages de toutes especes. Val. Maxime dit que le tyran Pysistrate fut le premier de tous les Grecs qui s'avisa de faire un recueil des ouvrages des savans, en quoi la politique n'eut peut-être pas peu de part ; il vouloit en fondant une bibliotheque pour l'usage du public, gagner l'amitié de ceux que la perte de leur liberté faisoit gémir sous son usurpation. Cicéron dit que c'est à Pysistrate que nous avons l'obligation d'avoir rassemblé en un seul volume les ouvrages d'Homere, qui se chantoient auparavant par toute la Grece par morceaux détachés & sans aucun ordre. Platon attribue cet honneur à Hipparque fils de Pysistrate. D'autres prétendent que ce fut Solon ; & d'autres rapportent cette précieuse collection à Lycurgue & à Zenodote d'Ephese.
Les Athéniens augmenterent considérablement cette bibliotheque après la mort de Pysistrate, & en fonderent même d'autres : mais Xerxès, après s'être rendu maître d'Athenes, emporta tous leurs livres en Perse. Il est vrai que si on en veut croire Aulugelle, Seleucus Nicator les fit rapporter en cette ville quelques siecles après.
Zuringer dit qu'il y avoit alors une bibliotheque magnifique dans l'île de Cnidos une des Cyclades ; qu'elle fut brûlée par l'ordre d'Hippocrate le medecin, parce que les habitans refuserent de suivre sa doctrine. Ce fait au reste n'est pas trop avéré.
Cléarque, tyran d'Héraclée & disciple de Platon & d'Isocrate, fonda une bibliotheque dans sa capitale ; ce qui lui attira l'estime de tous ses sujets, malgré toutes les cruautés qu'il exerça contr'eux.
Camérarius parle de la bibliotheque d'Apamée comme d'une des plus célebres de l'antiquité. Angelus Rocha, dans son catalogue de la bibliotheque du vatican, dit qu'elle contenoit plus de 20000 volumes.
Si les anciens Grecs n'avoient que peu de livres, les anciens romains en avoient encore bien moins, Par la suite ils eurent, aussi bien que les Juifs, deux sortes de bibliotheques, les unes publiques, les autres particulieres. Dans les premieres étoient les édits & les lois touchant la police & le gouvernement de l'état : les autres étoient celles que chaque particulier formoit dans sa maison, comme celle que Paul Emile apporta de Macédoine après la défaite de Persée.
Il y avoit aussi des bibliotheques sacrées qui regardoient la religion des Romains, & qui dépendoient entierement des pontifes & des augures. Pour les livres dont elles étoient composées, voyez LIVRE.
Voilà à-peu-près ce que les auteurs nous apprennent touchant les bibliotheques publiques des Romains. A l'égard des bibliotheques particulieres, il est certain qu'aucune nation n'a eu plus d'avantages ni plus d'occasions pour en avoir de très-considérables, puisque les Romains étoient les maîtres de la plus grande partie du monde connue pour lors.
L'histoire nous apprend qu'à la prise de Carthage le sénat fit présent à la famille de Regulus de tous les livres qu'on avoit trouvés dans cette ville, & qu'il fit traduire en latin vingt-huit volumes, composés par Magon carthaginois, sur l'Agriculture.
Plutarque assûre que Paul Emile distribua à ses enfans la bibliotheque de Persée, roi de Macédoine, qu'il mena en triomphe à Rome. Mais Isidore dit positivement, qu'il la donna au public. Asinius Pollion fit plus, car il fonda une bibliotheque exprès pour l'usage du public, qu'il composa des dépouilles de tous les ennemis qu'il avoit vaincus, & de grand nombre de livres de toute espece qu'il acheta ; il l'orna de portraits de savans ; & entr'autres de celui de Varron.
Varron avoit aussi une magnifique bibliotheque. Celle de Cicéron ne devoit pas l'être moins, si on fait attention à son érudition, à son goût, & à son rang : mais elle fut considérablement augmentée par celle de son ami Atticus, qu'il préféroit à tous les thrésors de Crésus.
Plutarque parle de la bibliotheque de Lucullus comme d'une des plus considérables du monde, tant par rapport au nombre de volumes, que par rapport aux superbes monumens dont elle étoit décorée.
La bibliotheque de Cesar étoit digne de lui ; & rien ne pouvoit contribuer davantage à lui donner de la réputation, que d'en avoir confié le soin au savant Varron.
Auguste fonda une belle bibliotheque proche du temple d'Apollon, sur le mont Palatin. Horace, Juvénal, & Perse, en parlent comme d'un endroit où les Poëtes avoient coûtume de réciter & de déposer leurs ouvrages :
Scripta Palatinus quaecunque recepit Apollo,
dit Horace.
Vespasien fonda une bibliotheque proche le temple de la Paix, à l'imitation de César & d'Auguste.
Mais la plus magnifique de toutes ces anciennes bibliotheques, étoit celle de Trajan, qu'il appella de son propre nom, la bibliotheque Ulpienne : elle fut fondée pour l'usage du public ; & selon le cardinal Volaterani, l'empereur y avoit fait écrire toutes les belles actions des princes & les decrets du sénat, sur des pieces de belle toile, qu'il fit couvrir d'ivoire. Quelques auteurs assûrent que Trajan fit porter à Rome tous les livres qui se trouvoient dans les villes conquises, pour augmenter sa bibliotheque. Il est probable que Pline le jeune, son favori, l'engagea à l'enrichir de la sorte.
Outre celles dont nous venons de parler, il y avoit encore à Rome une bibliotheque considérable, fondée par Simonicus, précepteur de l'empereur Gordien. Isidore & Boece en font des éloges extraordinaires, ils disent qu'elle contenoit 8000 volumes choisis ; & que l'appartement qui la renfermoit, étoit pavé de marbre doré, les murs lambrissés de glaces & d'ivoire ; & les armoires & pupitres, de bois d'ébene & de cedre.
Les premiers Chrétiens occupés d'abord uniquement de leur salut, brûlerent tous les livres qui n'avoient point de rapport à la religion. Actes des Apôtres... Ils eurent d'ailleurs trop de difficultés à combattre pour avoir le tems d'écrire & de se former des bibliotheques. Ils conservoient seulement dans leurs églises les livres de l'ancien & du nouveau Testament, auxquels on joignit par la suite les actes des martyrs. Quand un peu plus de repos leur permit de s'adonner aux Sciences, il se forma des bibliotheques. Les auteurs parlent avec éloge de celles de S. Jérôme, & de George évêque d'Alexandrie.
On en voyoit une célebre à Césarée, fondée par Jules l'Africain, & augmentée dans la suite par Eusebe évêque de cette ville, au nombre de 20000 volumes. Quelques-uns en attribuent l'honneur à saint Pamphile prêtre de Laodicée, & ami intime d'Eusebe ; & c'est ce que cet historien semble dire lui-même. Cette bibliotheque fut d'un grand secours à saint Jérôme, pour l'aider à corriger les livres de l'ancien Testament ; c'est là qu'il trouva l'évangile de S. Matthieu en hébreu. Quelques auteurs disent que cette bibliotheque fut dispersée, & qu'elle fut ensuite rétablie par S. Grégoire de Nazianze & Eusebe.
S. Augustin parle d'une bibliotheque d'Hippone. Celle d'Antioche étoit très-célebre : mais l'empereur Jovien, pour plaire à sa femme, la fit malheureusement détruire. Sans entrer dans un plus grand détail sur les bibliotheques des premiers Chrétiens, il suffira de dire que chaque église avoit sa bibliotheque pour l'usage de ceux qui s'appliquoient aux études. Eusebe nous l'atteste : & il ajoûte, que presque toutes ces bibliotheques, avec les oratoires où elles étoient conservées, furent brûlées & détruites par Diocletien.
Passons maintenant à des bibliotheques plus considérables que celles dont nous venons de parler, c'est à-dire à celles qui furent fondées après que le Christianisme fut affermi sans contradiction. Celle de Constantin-le-Grand, fondée, selon Zonaras, l'an 336, mérite attention. Ce prince voulant réparer la perte que le tyran son prédécesseur avoit causée aux Chrétiens, porta tous ses soins à faire trouver des copies des livres qu'on avoit voulu détruire ; il les fit transcrire, & y en ajoûta d'autres, dont il forma à grands frais une nombreuse bibliotheque à Constantinople. L'empereur Julien voulut détruire cette bibliotheque, & empêcher les Chrétiens d'avoir aucuns livres, afin de les plonger dans l'ignorance. Il fonda cependant lui-même deux grandes bibliotheques, l'une à Constantinople, & l'autre à Antioche, sur les frontispices desquelles il fit graver ces paroles : Alii quidem equos amant, alii aves, alii feras ; mihi verò à puerulo mirandum acquirendi & possidendi libros insedit desiderium.
Théodose le jeune ne fut pas moins soigneux à augmenter la bibliotheque de Constantin-le-Grand : elle ne contenoit d'abord que 6900 volumes : mais par ses soins & sa magnificence, il s'y en trouva en peu de tems 100000. Léon l'Isaurien en fit brûler plus de la moitié, pour détruire les monumens qui auroient pû déposer contre son hérésie sur le culte des images. C'est dans cette bibliotheque que fut déposée la copie authentique du premier concile général de Nicée. On prétend que les ouvrages d'Homere y étoient aussi écrits en lettres d'or, & qu'ils furent brûlés lorsque les Iconoclastes détruisirent cette bibliotheque. Il y avoit aussi une copie des évangiles, selon quelques auteurs, reliée en plaque d'or du poids de 15 livres, & enrichie de pierreries.
Les nations barbares qui inonderent l'Europe, détruisirent les bibliotheques & les livres en général, leur fureur fut presque incroyable, & a causé la perte irréparable d'un nombre infini d'excellens ouvrages.
Le premier de ces tems-là qui eut du goût pour les lettres, fut Cassiodore, favori & ministre de Théodoric roi des Goths qui s'établirent en Italie, & qu'on nomma communément Ostrogots. Cassiodore fatigué du poids du ministere, se retira dans un couvent qu'il fit bâtir, où il consacra le reste de ses jours à la priere & à l'étude. Il y fonda une bibliotheque pour l'usage des moines, compagnons de sa solitude. Ce fut à-peu-près dans le même tems que le pape Hilaire premier du nom, fonda deux bibliotheques dans l'église de saint Etienne ; & que le pape Zacharie I. rétablit celle de saint Pierre, selon Platine.
Quelque tems après, Charlemagne fonda la sienne à l'Isle-barbe près de Lyon. Paradin dit, qu'il l'enrichit d'un grand nombre de livres magnifiquement reliés ; & Sabellicus, aussi bien que Palmerius, assûrent qu'il y mit entr'autres un manuscrit des oeuvres de S. Denys, dont l'empereur de Constantinople lui avoit fait présent. Il fonda encore en Allemagne plusieurs colléges avec des bibliotheques, pour l'instruction de la jeunesse : entr'autres une à Saint-gall en Suisse, qui étoit fort estimée. Le roi Pepin en fonda une à Fulde par le conseil de S. Boniface, l'apôtre de l'Allemagne : ce fut dans ce célebre monastere que Raban-Maur & Hildebert vécurent & étudierent dans le même tems. Il y avoit une autre bibliotheque à la Wrissen près de Worms, mais celle que Charlemagne fonda dans son palais à Aix-la-Chapelle, surpassa toutes les autres ; cependant il ordonna avant de mourir qu'on la vendit, pour en distribuer le prix aux pauvres. Louis le Débonnaire son fils, lui succéda à l'empire & à son amour pour les Arts & les Sciences, qu'il protégea de tout son pouvoir.
L'Angleterre & encore plus l'Irlande, possédoient alors de savantes & riches bibliotheques, que les incursions fréquentes des habitans du Nord détruisirent dans la suite : il n'y en a point qu'on doive plus regretter que la grande bibliotheque fondée à York par Egbert, archevêque de cette ville ; elle fut brûlée avec la cathédrale, le couvent de Sainte-Marie, & plusieurs autres maisons religieuses, sous le roi Etienne. Alcuin parle de cette bibliotheque dans son épitre à l'église d'Angleterre.
Vers ces tems, un nommé Gauthier ne contribua pas peu par ses soins & par son travail, à fonder la bibliotheque du Monastere de Saint-Alban qui étoit très considérable, elle fut pillée aussi bien qu'une autre par les pirates danois.
La bibliotheque formée dans le xij. siecle par Richard de Burg évêque de Durham, chancelier & thrésorier de l'Angleterre, fut aussi fort célebre. Ce savant prélat n'omit rien pour la rendre aussi complete que le permettoit le malheur des tems ; & il écrivit lui-même un traité intitulé Philobiblion, sur le choix des livres & sur la maniere de former une bibliotheque. Il y représente les livres comme les meilleurs précepteurs, en s'exprimant ainsi : Hi sunt magistri, qui nos instruunt, sine virgis & ferulis, sine cholera, sine pecunia : si accedis, non dormiunt ; si inquiris, non se abscondunt ; non obmurmurant, si oberres ; cachinnos nesciunt, si ignores.
L'Angleterre possede encore aujourd'hui des bibliotheques très-riches en tout genre de littérature, & en manuscrits fort anciens. Celle dont on parle le plus, est la célebre bibliotheque Bodleiene d'Oxford, élevée, si l'on peut se servir de ce terme, sur les fondemens de celle du duc Humphry. Elle commença à être publique en 1602, & a été depuis prodigieusement augmentée par un grand nombre de bienfaiteurs. On assûre qu'elle l'emporte sur celles de tous les souverains & de toutes les universités de l'Europe, si l'on en excepte celle du Roi à Paris, celle de l'empereur à Vienne, & celle du Vatican.
Il semble qu'au xj. siecle les Sciences s'étoient réfugiées auprès de Constantin Porphyrogenete, empereur de Constantinople. Ce grand prince étoit le protecteur des muses, & ses sujets à son exemple cultiverent les Lettres. Il parut alors en Grece plusieurs savans ; & l'empereur toujours porté à chérir les Sciences, employa des gens capables à lui rassembler de bons livres, dont il forma une bibliotheque publique, à l'arrangement de laquelle il travailla lui-même. Les choses furent en cet état, jusqu'à ce que les Turcs se rendirent maîtres de Constantinople ; aussitôt les Sciences forcées d'abandonner la Grece, se réfugierent en Italie, en France, & en Allemagne, où on les reçut à bras ouverts ; & bientôt la lumiere commença à se répandre sur le reste de l'Europe, qui avoit été ensevelie pendant long-temps dans l'ignorance la plus grossiere.
La bibliotheque des empereurs Grecs de Constantinople n'avoit pourtant pas péri à la prise de cette ville par Mahomet II. Au contraire ce sultan avoit ordonné très-expressément qu'elle fût conservée, & elle le fut en effet dans quelques appartemens du serrail jusqu'au regne d'Amurat IV. que ce prince, quoique mahométan peu scrupuleux, dans un violent accès de dévotion, sacrifia tous les livres de la bibliotheque à la haine implacable dont il étoit animé contre les Chrétiens. C'est-là tout ce qu'en put apprendre M. l'abbé Sevin, lorsque par ordre du roi il fit en 1729 le voyage de Constantinople, dans l'espérance de pénétrer jusque dans la bibliotheque du grand-seigneur, & d'en obtenir des manuscrits pour enrichir celle du roi.
Quant à la bibliotheque du serrail, elle fut commencée par le sultan Selim, celui qui conquit l'Egypte, & qui aimoit les Lettres : mais elle n'est composée que de trois ou quatre mille volumes, turcs, arabes, ou persans, sans nul manuscrit grec. Le prince de Valachie Maurocordato avoit beaucoup recueilli de ces derniers, & il s'en trouve de répandus dans les monasteres de la Grece : mais il paroît par la relation du voyage de nos académiciens au Levant, qu'on ne fait plus guere de cas aujourd'hui de ces morceaux précieux, dans un pays où les Sciences & les beaux Arts ont fleuri pendant si long-tems.
Il est certain que toutes les Nations cultivent les Sciences les unes plus, les autres moins ; mais il n'y en a aucune où le savoir soit plus estimé que chez les Chinois. Chez ce peuple on ne peut parvenir au moindre emploi qu'on ne soit savant, du moins par rapport au commun de la nation. Ainsi ceux qui veulent figurer dans le monde sont indispensablement obligés de s'appliquer à l'étude. Il ne suffit pas chez eux d'avoir la réputation de savant, il faut l'être réellement pour pouvoir parvenir aux dignités & aux honneurs ; chaque candidat étant obligé de subir trois examens très-séveres, qui répondent à nos trois degrés de bachelier, licencié, & docteur.
De cette nécessité d'étudier il s'ensuit, qu'il doit y avoir dans la Chine un nombre infini de livres & d'écrits, & par conséquent que les gens riches doivent avoir formé chez eux de grandes bibliotheques.
En effet, les historiens rapportent qu'environ deux cent ans avant J. C. Chingius ou Xius, empereur de la Chine, ordonna que tous les livres du royaume (dont le nombre étoit presque infini) fussent brûlés, à l'exception de ceux qui traitoient de la Médecine, de l'Agriculture, & de la Divination, s'imaginant par-là faire oublier les noms de ceux qui l'avoient précédé, & que la postérité ne pourroit plus parler que de lui. Ses ordres ne furent pas exécutés avec tant de soin, qu'une femme ne pût sauver les ouvrages de Mentius, de Confucius surnommé le Socrate de la Chine, & de plusieurs autres, dont elle colla les feuilles contre le mur de sa maison, où elles resterent jusqu'à la mort du tyran.
C'est par cette raison que ces ouvrages passent pour être les plus anciens de la Chine, & sur-tout ceux de Confucius, pour qui ce peuple a une extrème vénération. Ce philosophe laissa neuf livres, qui sont pour ainsi dire la source de la plûpart des ouvrages qui ont paru depuis son tems à la Chine, & qui sont si nombreux, qu'un seigneur de ce pays (au rapport du P. Trigault) s'étant fait chrétien, employa quatre jours à brûler ses livres, afin de ne rien garder qui sentît les superstitions des Chinois. Spizellius, dans son livre de re litteraria Sinensium, dit qu'il y a une bibliotheque sur le mont Lingumen de plus de 30 mille volumes, tous composés par des auteurs chinois, & qu'il n'y en a guere moins dans le temple de Venchung, proche l'école royale.
Il y a plusieurs belles bibliotheques au Japon, car les voyageurs assûrent qu'il y a dans la ville de Narad un temple magnifique qui est dédié à Xaca, le sage, le prophete & le législateur du pays ; & qu'auprès de ce temple les bonzes ou prêtres ont leurs appartemens, dont un est soûtenu par 24 colonnes, & contient une bibliotheque remplie de livres du haut en bas.
Tout ce que nous avons dit est peu de chose en comparaison de la bibliotheque qu'on dit être dans le monastere de la Sainte-Croix, sur le mont Amara en Ethiopie. L'histoire nous dit qu'Antoine Brieus & Laurent de Cremone furent envoyés dans ce pays par Grégoire XIII. pour voir cette fameuse bibliotheque, qui est divisée en trois parties & contient en tout dix millions cent mille volumes, tous écrits sur de beau parchemin, & gardés dans des étuis de soie. On ajoûte que cette bibliotheque doit son origine à la Reine de Saba, qui visita Salomon, & reçut de lui un grand nombre de livres, particulierement ceux d'Enoch sur les élémens & sur d'autres sujets philosophiques, avec ceux de Noé sur les sujets de Mathématique & sur le rit sacré ; & ceux qu'Abraham composa dans la vallée de Mambré, où il enseigna la Philosophie à ceux qui l'aiderent à vaincre les rois qui avoient fait prisonnier son neveu Lot, avec les livres de Job, & d'autres que quelques-uns nous assûrent être dans cette bibliotheque, aussi-bien que les livres d'Esdras, des Sibylles, des Prophetes & des grands-prêtres des Juifs, outre ceux qu'on suppose avoir été écrits par cette reine & par son fils Mémilech, qu'on prétend qu'elle eut de Salomon. Nous rapportons ces opinions moins pour les adopter, que pour montrer que de très-habiles gens y ont donné leur créance, tels que le P. Kircher. Tout ce qu'on peut dire des Ethiopiens, c'est qu'ils ne se soucient guere de la littérature profane, & par conséquent qu'ils n'ont guere de livres grecs ni latins sur des sujets historiques ou philosophiques ; car ils ne s'appliquent qu'à la littérature sacrée, qui fut d'abord extraite de livres grecs, & ensuite traduite dans leur langue. Ils sont schismatiques, & sectateurs d'Eutychès & de Nestorius. Voyez EUTYCHIENS & NESTORIENS.
Les Arabes d'aujourd'hui ne connoissent nullement les Lettres ; mais vers le x. siecle, & surtout sous le regne d'Almanzor, aucun peuple ne les cultivoit avec plus de succès qu'eux.
Après l'ignorance qui régnoit en Arabie avant le tems de Mahomet, le calife Almamon fut le premier qui fit revivre les Sciences chez les Arabes ; il fit traduire en leur langue un grand nombre des livres qu'il avoit forcé Michel III. empereur de Constantinople, de lui laisser choisir de sa bibliotheque & par tout l'empire, après l'avoir vaincu dans une bataille.
Le roi Manzor ne fut pas moins assidu à cultiver les Lettres. Ce grand prince fonda plusieurs écoles & bibliotheques publiques à Maroc, où les Arabes se vantent d'avoir la premiere copie du code de Justinien.
Eupennas dit que la bibliotheque de Fez est composée de 32 mille volumes ; & quelques-uns prétendent que toutes les décades de Tite-Live y sont, avec les ouvrages de Pappus d'Alexandrie, fameux mathématicien ; ceux d'Hippocrate, de Galien & de plusieurs autres bons auteurs, dont les écrits ou ne sont pas parvenus jusqu'à nous, ou n'y sont parvenus que très-imparfaits.
Selon quelques voyageurs, il y a à Gaza une autre belle bibliotheque d'anciens livres, dans la plûpart desquels on voit des figures d'animaux & des chiffres, à la maniere des Egyptiens ; ce qui fait présumer que c'est quelque reste de la bibliotheque d'Alexandrie.
Il y a une bibliotheque à Damas, où François Rosa, de Ravenne, trouva la philosophie mystique d'Aristote en arabe, qu'il publia dans la suite.
On a vû par ce que nous avons déjà dit, que la bibliotheque des empereurs grecs n'a point été conservée, & que celle des sultans est très-peu de chose ; ainsi ce qu'on trouve à cet égard dans Baudier & d'autres auteurs qui en racontent des merveilles, ne doit point prévaloir sur le récit simple & sincere qu'ont fait sur le même sujet les savans judicieux qu'on avoit envoyés à Constantinople, pour tenter s'il ne seroit pas possible de recueillir quelques lambeaux de ces précieuses bibliotheques. D'ailleurs le mépris que les Turcs en général ont toûjours témoigné pour les Sciences des Européens, prouve assez le peu de cas qu'ils feroient des auteurs grecs & latins ; mais s'ils les avoient eus en leur possession, on ne voit pas pourquoi ils auroient refusé de les communiquer à la requisition du premier prince de l'Europe.
Il y avoit anciennement une très-belle bibliotheque dans la ville d'Ardwil en Perse, où résiderent les Mages, au rapport d'Oléarius dans son Itinéraire. La Boulaye le Goux dit que les habitans de Sabea ne se servent que de trois livres, qui sont le livre d'Adam, celui du Divan, & l'Alcoran. Un écrivain jésuite assûre aussi avoir vû une bibliotheque superbe à Alger.
L'ignorance des Turcs n'est pas plus grande que n'est aujourd'hui celle des chrétiens grecs, qui ont oublié jusqu'à la langue de leurs peres, l'ancien grec. Leurs évêques leur défendent la lecture des auteurs payens, comme si c'étoit un crime d'être savant ; desorte que toute leur étude est bornée à la lecture des actes des sept synodes de la Grece, & des oeuvres de S. Basile, de S. Chrysostome, & de S. Jean de Damas. Ils ont cependant nombre de bibliotheques, mais qui ne contiennent que des manuscrits, l'impression n'étant point en usage chez eux. Ils ont une bibliotheque sur le mont Athos, & plusieurs autres où il y a quantité de manuscrits, mais très-peu de livres imprimés. Ceux qui voudront savoir quels sont les manuscrits qu'on a apportés de chez les Grecs en France, en Italie & en Allemagne, & ceux qui restent encore à Constantinople entre les mains des particuliers, & dans l'île de Pathmos & les autres îles de l'Archipel ; dans le monastere de Sainte Basile à Caffa, anciennement Théodosia ; dans la Tartarie Crimée, & dans les autres états du grand-Turc, peuvent s'instruire à fond dans l'excellent traité du P. Possevin ; intitulé apparatus sacer ; & dans la relation du voyage que fit M. l'abbé Sevin à Constantinople en 1729 : elle est insérée dans les mémoires de l'académie des Belles-Lettres, tome VII.
Le grand nombre des bibliotheques, tant publiques que particulieres, qui font aujourd'hui un des principaux ornemens de l'Europe, nous entraîneroit dans un détail que ne nous permettent pas les bornes que nous nous sommes prescrites dans cet ouvrage. Nous nous contenterons donc d'indiquer les plus considérables, soit par la quantité, soit par le choix des livres qui les composent.
De ce nombre sont à Copenhague la bibliotheque de l'université, & celle qu'y a fondée Henri Rantzau, gentilhomme danois.
Celle que Christine, reine de Suede, fonda à Stockholm, dans laquelle on voit, entr'autres curiosités, une des premieres copies de l'Alcoran : quelques-uns veulent même que ce soit l'original qu'un des sultans Turcs ait envoyé à l'empereur des Romains ; mais cela ne paroît guere probable.
La Pologne ne manque pas de bibliotheques : il y en a deux très-considérables ; l'une à Vilna, fondée par plusieurs rois de Pologne, selon Cromer & Bozuis ; & l'autre à Cracovie.
Quant à la Russie, il est certain qu'à l'exception de quelques traités sur la religion en langue sclavone, il n'y avoit aucun livre de Sciences, & même presque pas l'ombre de Littérature avant le Czar Pierre I. qui au milieu des armes faisoit fleurir les Arts & les Sciences, & fonda plusieurs académies en différentes parties de son empire. Ce grand prince fit un fonds très-considérable pour la bibliotheque de son académie de Petersbourg, qui est très-fournie de livres dans toutes sortes de Sciences.
La bibliotheque royale de Petershof est une des plus belles de l'Europe, & le cabinet de bijoux & de curiosités est inestimable.
La bibliotheque publique d'Amsterdam seroit beaucoup plus utile, si les livres y étoient arrangés avec plus d'ordre & de méthode ; mais le malheur est qu'on ne sauroit les trouver sans une peine extrème : la collection est au reste très-estimable.
Il y en a dans les Pays-Bas plusieurs autres fort curieuses, telles que celles des Jésuites & des Dominicains à Anvers ; celle des moines de saint Pierre à Gand ; celle de Dunkerque, celle de Gemblours, abondante en anciens manuscrits, auxquels Erasme & plusieurs autres savans ont souvent eu recours ; celles d'Harderwick, d'Ypres, de Liége, de Louvain, de Leyde, &c.
Il y a deux bibliotheques publiques à Leyde ; l'une fondée par Antoine Thisius ; l'autre, qui est celle de l'université, lui a été donnée par Guillaume I. prince d'Orange : elle est fort estimée par les manuscrits grecs, hébraïques, chaldéens, syriaques, persans, arméniens & russiens, que Joseph Scaliger laissa à cette école, où il avoit professé pendant plusieurs années. La bible Complutensienne n'est pas un de ses moindres ornemens ; elle fut donnée par Philippe II. roi d'Espagne, au prince d'Orange, qui en fit présent à l'université de cette ville. Cette bibliotheque a été augmentée par celle de Holmannus, & sur-tout du célebre Isaac Vossius. Cette derniere contenoit un grand nombre de manuscrits précieux, qui venoient, à ce qu'on croit, du cabinet de la reine Christine de Suede.
L'Allemagne honore & cultive trop les Lettres, pour n'être pas fort riche en bibliotheques. On compte parmi les plus considérables celles de Francfort sur l'Oder, de Leypsic, de Dresde, d'Augsbourg, de Bâle en Suisse, où l'on voit un manuscrit du nouveau Testament en lettres d'or, dont Erasme fit grand usage pour corriger la version de ce saint livre. Il y a encore à Bâle les bibliotheques d'Erasme, d'Amesbach, & de Feche.
La bibliotheque du duc de Wolfembutel est composée de celles de Marquardus Freherus, de Joachim Cluten, & d'autres collections curieuses. Elle est très-considérable par le nombre & la bonté des livres, & par le bel ordre qu'on y a mis : on assûre qu'elle contient 116 mille volumes, & 2 mille manuscrits latins, grecs & hébraïques.
Celle du roi de Prusse à Berlin est encore plus nombreuse que celle du duc de Wolfembutel, & les livres en sont aussi mieux reliés : elle fut fondée par Fréderic Guillaume, électeur de Brandebourg ; & elle a été considérablement augmentée par l'accession de celle du célebre M. Spanheim. On y trouve entr'autres raretés, plusieurs manuscrits ornés d'or & de pierreries, du tems de Charlemagne.
Il y a encore en Allemagne un fort grand nombre d'autres bibliotheques très-curieuses, mais dont le détail nous meneroit trop loin. Nous finirons par celle de l'empereur à Vienne, qui contient 100 mille volumes. Il y a un nombre prodigieux de manuscrits grecs, hébraïques, arabes, turcs & latins. Lambatius a publié un catalogue du tout, & a gravé les figures des manuscrits, mais elles ne sont pas fort intéressantes. Cette bibliotheque fut fondée par l'empereur Maximilien en 1480. La bibliotheque remplit huit grands appartemens, auprès desquels en est un neuvieme pour les médailles & les curiosités où, ce qu'il y a de plus remarquable, est un grand bassin d'émeraude. Cette bibliotheque fut bien enrichie par celle du feu prince Eugene, qui étoit fort nombreuse.
Venise a une célebre bibliotheque, qu'on nomme communément la bibliotheque de S. Marc, où l'on conserve l'évangile de ce saint, écrit, à ce qu'on prétend, de sa propre main ; & qui après avoir été long-tems à Aquilée où il prêcha la foi, fut porté à Venise : mais dans le vrai il n'y en a que quelques cahiers, & encore d'une écriture si effacée, qu'on ne peut distinguer si c'est du grec ou du latin. Cette bibliotheque est d'ailleurs fort riche en manuscrits : celles que le cardinal Bessarion & Pétrarque léguerent à la république, sont aussi dans la même ville, & unies à celle que le sénat a fondée à l'hôtel de la monnoie.
Padoue est plein de bibliotheques : en effet, cette ville a toûjours été célebre par son université, & par le grand nombre de savans qui lui doivent la naissance. On y voit la bibliotheque de S. Justin, celle de S. Antoine, & celle de S. Jean de Latran. Sixte de Sienne dit qu'il a vû dans cette derniere une copie de l'épître de S. Paul aux peuples de Laodicée, & qu'il en fit même un extrait.
La bibliotheque de Padoue fut fondée par Pignorius ; Thomazerius nous en a donné un catalogue dans sa Bibliotheca.
Il y en a une magnifique à Ferrare, où l'on voit grand nombre de manuscrits anciens & d'autres monumens curieux de l'antiquité, comme des statues, des tableaux, & des médailles de la collection de Pierre Ligorius, célebre architecte, & l'un des plus savans de son siecle.
On prétend que dans celle des Dominicains à Bologne, on voit le Pentateuque écrit de la main d'Esdras. Tissard, dans sa grammaire hébraïque, dit l'avoir vû souvent, & qu'il est très-bien écrit sur une seule grande peau ; mais Hottinger prouve clairement que ce manuscrit n'a jamais été d'Esdras.
A Naples les Dominicains ont une belle bibliotheque, où sont les ouvrages de Pontanus, que sa fille Eugénie donna pour immortaliser la mémoire de son illustre pere.
La bibliotheque de S. Ambroise à Milan, fut fondée par le cardinal Fréderic Borromée : elle a plus de dix mille manuscrits, recueillis par Antoine Oggiati. Quelques-uns prétendent qu'elle fut enrichie aux dépens de celle de Pinelli : on peut dire qu'elle n'est inférieure à aucune de celles dont nous avons parlé, puisqu'elle contenoit il y a quelques années 46 mille volumes & 12 mille manuscrits, sans compter ce qu'on y a ajoûté depuis. Elle est publique.
La bibliotheque du duc de Mantoue peut être mise au nombre des bibliotheques les plus curieuses du monde. Elle souffrit à la vérité beaucoup pendant les guerres d'Italie qui éclaterent en 1701 ; & sans-doute elle a été transportée à Vienne. C'est là qu'étoit la fameuse plaque de bronze, couverte de chiffres égyptiens & d'hiéroglyphes, dont le savant Pignorius a donné l'explication.
La bibliotheque de Florence contient tout ce qu'il y a de plus brillant, de plus curieux, & de plus instructif ; elle renferme un nombre prodigieux de livres & de manuscrits les plus rares en toutes sortes de langues, quelques-uns sont d'un prix inestimable : les statues, les médailles, les bustes & d'autres monumens de l'antiquité, y sont sans nombre. Le musaeum Florentinum peut seul donner une juste idée de ce magnifique cabinet ; & la description de la bibliotheque mériteroit seule un volume à part. Il ne faut pas oublier le manuscrit qui se conserve dans la chapelle de la cour ; c'est l'évangile de S. Jean, qui, à ce qu'on prétend, est écrit de sa propre main.
Il y a deux autres bibliotheques à Florence, dont l'une fut fondée en l'église de S. Laurent par le pape Clément VII. de la famille de Medicis, & est ornée d'un grand nombre de manuscrits hébraïques, grecs, & latins.
L'autre fut fondée par Cosme de Medicis, dans l'église de S. Marc qui appartient aux Jacobins.
Il y a une très-belle bibliotheque à Pise, qu'on dit avoir été enrichie de 8000 volumes, qu'Alde Manuce légua à l'académie de cette ville.
La bibliotheque du roi de Sardaigne à Turin est très-curieuse par rapport aux manuscrits du célebre Pierre Ligorius, qui dessina toutes les antiquités de l'Italie.
Le pape Nicolas V. fonda une bibliotheque à Rome composée de six mille volumes des plus rares : quelques-uns disent qu'elle fut formée par Sixte-Quint, parce que ce pape ajoûta beaucoup à la collection commencée par le pape Nicolas V. Il est vrai que les livres de cette bibliotheque furent dispersés sous le pontificat de Calixte III. qui succéda au pape Nicolas ; mais elle fut rétablie par Sixte IV. Clément VII. & Léon X. Elle fut presqu'entierement détruite par l'armée de Charles V. sous les ordres du connétable de Bourbon & de Philibert prince d'Orange, qui saccagerent Rome avant le pontificat de Sixte-Quint.
Ce pape qui aimoit les savans & les lettres, non-seulement rétablit la bibliotheque dans son ancienne splendeur, mais il l'enrichit encore d'un grand nombre de livres & d'excellens manuscrits. Elle ne fut pas fondée au Vatican par Nicolas V. mais elle y fut transportée par Sixte IV. & ensuite à Avignon, en même tems que le saint-siége, par Clément V. & de-là elle fut rapportée au Vatican sous le pontificat de Martin V. où elle est encore aujourd'hui.
On convient généralement que le Vatican doit une grande partie de sa belle bibliotheque à celle de l'électeur Palatin, que le comte de Tilly prit avec Heidelberg en 1622. D'autres cependant prétendent, & ce semble avec raison, que Paul V. qui étoit pour lors pape, n'eut qu'une très-petite & même la plus mauvaise partie de la bibliotheque palatine : tous les ouvrages les plus estimables ayant été emportés par d'autres, & principalement par le duc de Baviere.
La bibliotheque du Vatican, que Baronius compare à un filet qui reçoit toutes sortes de poissons tant bons que mauvais, est divisée en trois parties : la premiere est publique, & tout le monde peut y avoir recours pendant deux heures de certains jours de la semaine : la seconde partie est plus secrette ; & la troisieme ne s'ouvre jamais que pour certaines personnes, desorte qu'on pourroit la nommer le sanctuaire du Vatican. Sixte-Quint l'enrichit d'un très-grand nombre d'ouvrages, soit manuscrits, soit imprimés, & la fit orner de peintures à fresque par les plus grands maîtres de son tems. Entr'autres figures emblématiques dont le détail seroit ici trop long, on voit toutes les bibliotheques célebres du monde représentées par des livres peints, & au-dessous de chacune une inscription qui marque l'ordre du tems de leur fondation.
Cette bibliotheque contient un grand nombre d'ouvrages rares & anciens, entr'autres deux copies de Virgile qui ont plus de mille ans ; elles sont écrites sur du parchemin, de même qu'une copie de Térence, faite du tems d'Alexandre Sévere & par son ordre : on y voit les actes des apôtres en lettres d'or. Ce manuscrit étoit orné d'une couverture d'or enrichie de pierreries, & fut donné par une reine de Chypre au pape Alexandre VI. mais les soldats de Charles V. le dépouillerent de ces riches ornemens lorsqu'ils saccagerent Rome. Il y a aussi une bible greque très-ancienne ; les épigrammes de Pétrarque écrites de sa propre main, les ouvrages de S. Thomas d'Aquin traduits en grec par Démétrius Cydonius de Thessalonique ; une copie du volume que les Perses ont fait des fables de Locman, que M. Huet a prouvé être le même qu'Esope : on y voit aussi les premieres copies des ouvrages de Tacite, qui ne furent découvertes que sous le pontificat de Léon X.
Outre le grand nombre d'excellens livres qui sont l'ornement de la bibliotheque du Vatican, il y a encore plus de dix mille manuscrits dont Angelus de Rhocca a publié le catalogue.
Quelques-uns rapportent que Clément VIII. augmenta considérablement cette bibliotheque, tant en livres imprimés qu'en manuscrits ; en quoi il fut aidé par Fulvius Ursinus ; que Paul V. l'enrichit des manuscrits du cardinal Alteni, & d'une partie de la bibliotheque palatine ; & qu'Urbain VIII. fit apporter du collége des Grecs de Rome un grand nombre de livres grecs au Vatican, dont il fit Léon Allatius bibliothécaire.
Il y avoit plusieurs autres belles bibliotheques à Rome, particulierement celle du cardinal François Barberini, qui contenoit, à ce qu'on prétend, vingt-cinq mille volumes imprimés, & cinq mille manuscrits. Il y a aussi les bibliotheques du palais Farnese, de sainte-Marie in ara coeli, de sainte-Marie sur la Minerve, des Augustins, des PP. de l'Oratoire, des Jésuites, du feu cardinal Montalte, du cardinal Sforza ; celles des églises de la Sapienza, de la Chiezanova, de san-Isidore, du collége romain, du prince Borghese, du prince Pamphili, du connétable Colonna, & de plusieurs autres princes, cardinaux, seigneurs, & communautés religieuses, dont quelques-unes sont publiques.
La premiere & la plus considérable des bibliotheques d'Espagne, est celle de l'Escurial au couvent de S. Laurent, fondée par Charles V. mais considérablement augmentée par Philippe II. Les ornemens de cette bibliotheque sont fort beaux ; la porte est d'un travail exquis, & le pavé de marbre ; les tablettes sur lesquelles les livres sont rangés, sont peintes d'une infinité de couleurs, & toutes de bois des Indes : les livres sont superbement dorés ; il y a cinq rangs d'armoires les unes au-dessus des autres, où les livres sont gardés ; chaque rang a cent piés de long. On y voit les portraits de Charles V. de Philippe II. Philippe III. & Philippe IV. & plusieurs globes, dont l'un représente avec beaucoup de précision le cours des astres, eu égard aux différentes positions de la terre. Il y a un nombre infini de manuscrits dans cette bibliotheque, & entr'autres l'original du livre de S. Augustin sur le baptême. Quelques-uns pensent que les originaux de tous les ouvrages de ce pere sont à la bibliotheque de l'Escurial, Philippe II. les ayant achetés de celui au sort de qui ils tomberent lors du pillage de la bibliotheque de Muley Cydam, roi de Fez & de Maroc, quand les Espagnols prirent la forteresse de Larache où étoit cette bibliotheque. C'est du moins ce qu'assûre Pierre Daviti, dans sa généalogie des rois de Maroc, où il dit que cette bibliotheque contenoit plus de quatre mille volumes arabes sur différens sujets, & qu'ils furent portés à Paris pour y être vendus ; mais que les Parisiens n'ayant pas de goût pour cette langue, ils furent ensuite portés à Madrid, où Philippe II. les acheta pour sa bibliotheque de l'Escurial.
Il y a dans cette bibliotheque près de trois mille manuscrits arabes, dont Hottinger a donné le catalogue. Il y a aussi nombre de manuscrits grecs & latins ; en un mot c'est une des plus belles bibliotheques du monde.
Quelques-uns prétendent qu'elle a été augmentée par les livres du cardinal Sirlet, archevêque de Sarragosse, & d'un ambassadeur espagnol ; ce qui l'a rendue beaucoup plus parfaite : mais la plus grande partie fut brûlée par le tonnerre en 1670.
Il y avoit anciennement une très-magnifique bibliotheque dans la ville de Cordoue, fondée par les Maures, avec une célébre académie où l'on enseignoit toutes les Sciences en arabe. Elle fut pillée par les Espagnols lorsque Ferdinand chassa les Maures d'Espagne, où ils avoient régné plus de 600 ans.
Ferdinand Colomb fils de Christophe Colomb, qui découvrit le premier l'Amérique, fonda une très-belle bibliotheque, en quoi il fut aidé par le célebre Clénard.
Ferdinand Nonius, qu'on prétend avoir le premier enseigné le grec en Espagne, fonda une grande & curieuse bibliotheque, dans laquelle il y avoit beaucoup de manuscrits grecs, qu'il acheta fort cher en Italie. D'Italie il alla en Espagne, où il enseigna le grec & le latin à Alcala de Henares, & ensuite à Salamanque, & laissa sa bibliotheque à l'université de cette ville.
L'Espagne fut encore enrichie de la magnifique bibliotheque du cardinal Ximenès à Alcala, où il fonda aussi une université qui est devenue très-célebre. C'est au même cardinal qu'on a l'obligation de la version de la Bible, connue sous le nom de la Complutensienne.
Il y a aussi en Espagne plusieurs particuliers qui ont de belles bibliotheques ; telles étoient celles d'Arias Montanus, d'Antonius Augustinus, savant archevêque de Tarragone, de Michel Tomasius, & autres.
Le grand nombre de savans & d'hommes versés dans les différens genres de littérature, qui ont de tout tems fait regarder la France comme une des nations les plus éclairées, ne laisse aucun lieu de douter qu'elle ait été aussi la plus riche en bibliotheques : on ne s'y est pas contenté d'entasser des livres, on les a choisis avec goût & discernement. Les auteurs les plus accrédités ont rendu ce témoignage honorable aux bibliotheques de nos premiers Gaulois : ceux qui voudroient en douter, en trouveront des preuves incontestables dans l'histoire littéraire de la France par les RR. PP. Bénédictins, ouvrage où regne la plus profonde érudition. Nous pourrions faire ici une longue énumération de ces anciennes bibliotheques ; mais nous nous contenterons d'en nommer quelques-unes, pour ne pas entrer dans un détail peu intéressant pour le plus grand nombre de nos lecteurs. La plus riche & la plus considérable de ces anciennes bibliotheques, étoit celle qu'avoit Tonance Ferréol dans sa belle maison de Prusiane, sur les bords de la riviere du Gardon, entre Nîmes & Clermont en Auvergne. Le choix & l'arrangement de cette bibliotheque, faisoient voir le bon goût de ce seigneur, & son amour pour le bel ordre. Elle étoit partagée en trois classes avec beaucoup d'art : la premiere étoit composée des livres de piété à l'usage du sexe dévot, rangés aux côtés des siéges destinés aux dames : la seconde contenoit des livres de littérature, & servoit aux hommes : enfin dans la troisieme classe étoient les livres communs aux deux sexes. Il ne faut pas s'imaginer que cette bibliotheque fût seulement pour une vaine parade ; les personnes qui se trouvoient dans la maison en faisoient un usage réel & journalier : on y employoit à la lecture une partie de la matinée, & on s'entretenoit pendant le repas de ce qu'on avoit lû, en joignant ainsi dans le discours l'érudition à la gaieté de la conversation.
Chaque monastere avoit aussi dans son établissement une bibliotheque, & un moine préposé pour en prendre soin. C'est ce que portoit la regle de Tarnat & celle de S. Benoît. Rien dans la suite des tems ne devint plus célebre que les bibliotheques des moines : on y conservoit les livres de plusieurs siecles, dont on avoit soin de renouveller les exemplaires ; & sans ces bibliotheques, il ne nous resteroit guere d'ouvrages des anciens. C'est de-là en effet que sont sortis presque tous ces excellens manuscrits qu'on voit aujourd'hui en Europe, & d'après lesquels on a donné au public, depuis l'invention de l'Imprimerie, tant d'excellens ouvrages en tout genre de Littérature.
Dès le vj. siecle on commença dans quelques monasteres à substituer au travail pénible de l'agriculture, l'occupation de copier les anciens livres, & d'en composer de nouveaux. C'étoit l'emploi le plus ordinaire, & même l'unique, des premiers cénobites de Marmoutier. On regardoit alors un monastere qui n'auroit pas eu de bibliotheque, comme un fort ou un camp dépourvû de ce qui lui étoit le plus nécessaire pour sa défense : claustrum sine armario, quasi castrum sine armamentario. Il nous reste encore de précieux monumens de cette sage & utile occupation dans les abbayes de Cîteaux & de Clairvaux, ainsi que dans la plus grande partie des abbayes de l'ordre de S. Benoît.
Les plus célebres bibliotheques des derniers tems ont été celles de M. de Thou ; de M. le Tellier, archevêque de Rheims ; de M. Butteau, fort riche en livres sur l'histoire de France ; de M. de Coislin, abondante en manuscrits grecs ; de M. Baluse dont il sera parlé tout-à-l'heure à l'occasion de celle du roi ; de M. Dufay, du cardinal Dubois, de M. Colbert, du comte d'Hoym, de M. le maréchal d'Etrées, de MM. Bigot, de M. Danty d'Isnard, de M. Turgot de Saint-Clair, de M. Burette, & de M. l'abbé de Rothelin. Nous n'entrons dans aucun détail sur le mérite de ces différentes bibliotheques, parce que les catalogues en existent, & qu'ils ont été faits par de fort savans hommes. Nous avons encore aujourd'hui des bibliotheques qui ne le cedent point à celles que nous venons de nommer : les unes sont publiques, les autres sont particulieres.
Les bibliotheques publiques sont celles du Roi, dont nous allons donner l'histoire ; celles de S. Victor, du collége Mazarin, de la Doctrine-Chrétienne, des Avocats, & de S. Germain-des-Prés : celle-ci est une des plus considérables, par le nombre & par le mérite des anciens manuscrits qu'elle possede ; elle a été augmentée en 1718 des livres de M. L. d'Etrées, & en 1720 de ceux de M. l'abbé Renaudot. M. le Cardinal de Gesvres légua sa bibliotheque à cette abbaye en 1744, sous la condition que le public en joüiroit une fois la semaine. M. l'évêque de Mets, duc de Coislin, lui a aussi légué un nombre considérable de manuscrits, qui avoient appartenu ci-devant au chancelier Seguier.
Les bibliotheques particulieres qui joüissent de quelque réputation, soit pour le nombre, soit pour la qualité des livres, sont celle de sainte Génevieve, à laquelle vient d'être réuni, par le don que lui en a fait M. le duc d'Orléans, le riche cabinet des médailles que feu M. le Régent avoit formé ; celles de Sorbonne, du collége de Navarre, des Jésuites de la rue S. Jacques & de la rue S. Antoine, des prêtres de l'Oratoire, & des Jacobins. Celle de M. Falconet, infiniment précieuse par le nombre & par le choix des livres qu'elle renferme, mais plus encore par l'usage qu'il en sait faire, pourroit être mise au rang des bibliotheques publiques, puisqu'en effet les gens de lettres ont la liberté d'y aller faire les recherches dont ils ont besoin, & que souvent ils trouvent dans la conversation de M. Falconet, des lumieres qu'ils chercheroient vainement dans ses livres.
Celle de M. de Boze est peut-être la plus riche collection qui ait été faite de livres rares & précieux dans les différentes langues ; elle est encore recommandable par la beauté & la bonté des éditions, ainsi que par la propreté des reliures. Si cette attention est un luxe de l'esprit, c'en est un au moins qui fait autant d'honneur au goût du propriétaire, que de plaisir aux yeux du spectateur.
Après avoir parlé des principales bibliotheques connues dans le monde, nous finirons par celle du Roi, la plus riche & la plus magnifique qui ait jamais existé. L'origine en est assez obscure : formée d'abord d'un nombre peu considérable de volumes, il n'est pas aisé de déterminer auquel de nos rois elle doit sa fondation. Ce n'est qu'après une longue suite d'années & diverses révolutions, qu'elle est enfin parvenue à ce degré de magnificence & à cette espece d'immensité, qui éterniseront à jamais l'amour du Roi pour les Lettres, & la protection que ses ministres leur ont accordée.
Quand on supposeroit qu'avant le xjv. siecle les livres de nos rois ont été en assez grand nombre pour mériter le nom de bibliotheques, il n'en seroit pas moins vrai que ces bibliotheques ne subsistoient que pendant la vie de ces princes ; ils en disposoient à leur gré ; & presque toûjours dissipées à leur mort, il n'en passoit guere à leurs successeurs, que ce qui avoit été à l'usage de leur chapelle. S. Louis qui en avoit rassemblé une assez nombreuse, ne la laissa point à ses enfans ; il en fit quatre portions égales, non compris les livres de sa chapelle, & la légua aux Jacobins & aux Cordeliers de Paris, à l'abbaye de Royaumont, & aux Jacobins de Compiegne. Philippe-le-Bel & ses trois fils en firent de même. Ce n'est donc qu'aux regnes suivans que l'on peut rapporter l'établissement d'une bibliotheque royale, fixe, permanente, destinée à l'usage du public, en un mot comme inaliénable & comme une des plus précieuses portions des meubles de la couronne. Charles V. dont les thrésors littéraires consistoient en un fort petit nombre de livres qu'avoit eu le roi Jean, son prédécesseur, est celui à qui l'on croit devoir les premiers fondemens de la bibliotheque royale d'aujourd'hui. Il étoit savant ; son goût pour la lecture lui fit chercher tous les moyens d'acquérir des livres ; aussi sa bibliotheque fut-elle considérablement augmentée en peu de tems. Ce prince toûjours attentif au progrès des Lettres ; ne se contenta pas d'avoir rassemblé des livres pour sa propre instruction ; il voulut que ses sujets en profitassent, & logea sa bibliotheque dans une des tours du Louvre, qui pour cette raison fut appellée la tour de la librairie : afin que l'on pût y travailler à toute heure, il ordonna qu'on pendît à la voûte trente petits chandeliers & une lampe d'argent. Cette bibliotheque étoit composée d'environ 910 volumes ; nombre remarquable dans un tems où les Lettres n'avoient fait encore que de médiocres progrès en France, & où par conséquent les livres devoient être assez rares.
Ce prince tiroit quelquefois des livres de sa bibliotheque du Louvre, & les faisoit porter dans ses différentes maisons royales. Charles VI, son fils, & son successeur, tira aussi de sa bibliotheque plusieurs livres qui n'y rentrerent plus ; mais ces pertes furent réparées par les acquisitions qu'il faisoit de tems en tems. Cette bibliotheque resta à-peu-près dans le même état jusqu'au regne de Charles VII. que par une suite des malheurs dont le royaume fut accablé, elle fut totalement dissipée, du moins n'en parut-il de long-tems aucun vestige.
Louis XI. dont le regne fut plus tranquille, donna beaucoup d'attention au bien des Lettres ; il eut soin de rassembler, autant qu'il le put, les débris de la librairie du Louvre ; il s'en forma une bibliotheque qu'il augmenta depuis des livres de Charles de France son frere, & selon toute apparence de ceux des ducs de Bourgogne, dont il réunit le duché à la couronne.
Charles VIII. sans être savant eut du gout pour les livres ; il en ajoûta beaucoup à ceux que son pere avoit rassemblés, & singulierement une grande partie de la bibliotheque de Naples, qu'il fit apporter en France après sa conquête. On distingue encore aujourd'hui, parmi les livres de la bibliotheque du Roi, ceux des rois de Naples & des seigneurs napolitains, par les armoiries, les souscriptions, les signatures, ou quelques autres marques.
Tandis que Louis XI. & Charles VIII. rassembloient ainsi le plus de livres qu'il leur étoit possible, les deux princes de la maison d'Orléans, Charles, & Jean comte d'Angoulème, son frere, revenus d'Angleterre après plus de 25 ans de prison, jetterent le premier à Blois, & le second à Angoulème, les fondemens de deux bibliotheques, qui devinrent bientôt royales, & qui firent oublier la perte qu'on avoit faite par la dispersion des livres de la tour du Louvre, dont on croit que la plus grande partie avoit été enlevée par le duc de Betfort. Charles en racheta en Angleterre environ soixante volumes, qui furent apportés au château de Blois, & réunis à ceux qui y étoient déjà en assez grand nombre.
Louis XII. fils de Charles, duc d'Orléans, étant parvenu à la couronne, y réunit la bibliotheque de Blois, au milieu de laquelle il avoit été, pour ainsi dire élevé ; & c'est peut-être par cette considération qu'il ne voulut pas qu'elle changeât de lieu. Il y fit transporter les livres de ses deux prédécesseurs Louis XI. & Charles VIII. & pendant tout le cours de son regne il s'appliqua à augmenter ce thrésor, qui devint encore bien plus considérable lorsqu'il y eut fait entrer la bibliotheque que les Viscomti & les Sforce, ducs de Milan, avoient établie à Pavie, & en outre les livres qui avoient appartenu au célebre Pétrarque. Rien n'est au-dessus des éloges que les écrivains de ce tems-là font de la bibliotheque de Blois ; elle étoit l'admiration non-seulement de la France, mais encore de l'Italie.
François premier, après avoir augmenté la bibliotheque de Blois, la réunit en 1544 à celle qu'il avoit commencé d'établir au château de Fontainebleau plusieurs années auparavant ; une augmentation si considérable donna un grand lustre à la bibliotheque de Fontainebleau, qui étoit déja par elle-même assez riche. François premier avoit fait acheter en Italie beaucoup de manuscrits grecs par Jérôme Fondule, homme de lettres, en grande réputation dans ce tems-là ; il en fit encore acheter depuis par ses ambassadeurs à Rome & à Venise. Ces ministres s'acquiterent de leur commission avec beaucoup de soin & d'intelligence ; cependant ces différentes acquisitions ne formoient pas au-delà de 400 volumes, avec une quarantaine de manuscrits orientaux. On peut juger delà combien les livres étoient encore peu communs alors, puisqu'un prince qui les recherchoit avec tant d'empressement, qui n'épargnoit aucune dépense, & qui employoit les plus habiles gens pour en amasser, n'en avoit cependant pû rassembler qu'un si petit nombre, en comparaison de ce qui s'en est répandu en France dans la suite.
La passion de François premier pour les manuscrits grecs, lui fit négliger les latins & les ouvrages en langues vulgaires étrangeres. A l'égard des livres françois qu'il fit mettre dans sa bibliotheque, on en peut faire cinq classes différentes : ceux qui ont été écrits avant son regne ; ceux qui lui ont été dédiés ; les livres qui ont été faits pour son usage, ou qui lui ont été donnés par les auteurs ; les livres de Louise de Savoie sa mere ; & enfin ceux de Marguerite de Valois sa soeur : ce qui ne fait qu'à-peu-près 70 volumes.
Jusqu'alors il n'y avoit eu pour prendre soin de la bibliotheque royale, qu'un simple garde en titre. François premier créa la charge de bibliothécaire en chef, qu'on appella long-tems, & qui dans ses provisions s'appelle encore, maître de la librairie du Roi.
Guillaume Budé fut pourvû le premier de cet emploi, & ce choix fit également honneur au prince & à l'homme de lettres. Pierre du Chastel ou Chatellain lui succéda ; c'étoit un homme fort versé dans les langues greque & latine. Il mourut en 1552 ; & sa place fut remplie, sous Henri II. par Pierre de Montdoré, conseiller au grand-conseil, homme très-savant, sur-tout dans les Mathématiques. La bibliotheque de Fontainebleau paroît n'avoir reçu que de médiocres accroissemens sous les regnes des trois fils de Henri II. à cause, sans-doute, des troubles & des divisions que le prétexte de la religion excita alors dans le royaume. Montdoré, ce savant homme, soupçonné & accusé de donner dans les opinions nouvelles en matiere de religion, s'enfuit de Paris en 1567, & se retira à Sancerre en Berri, où il mourut de chagrin trois ans après. Jacques Amyot, qui avoit été précepteur de Charles IX. & des princes ses freres, fut pourvû, après l'évasion de Montdoré, de la charge de maître de la librairie. Le tems de son exercice ne fut rien moins que favorable aux Arts & aux Sciences : on ne croit pas, qu'excepté quelques livres donnés à Henri III. la bibliotheque royale ait été augmentée d'autres livres que de ceux de privilége. Tout ce que put faire Amyot, ce fut d'y donner entrée aux Savans, & de leur communiquer avec facilité l'usage des manuscrits dont ils avoient besoin. Il mourut en 1593, & sa charge passa au président Jacques-Auguste de Thou, si célebre par l'histoire de son tems qu'il a écrite.
Henri IV. ne pouvoit faire un choix plus honorable aux lettres : mais les commencemens de son regne ne furent pas assez paisibles, pour lui permettre de leur rendre le lustre qu'elles avoient perdu pendant les guerres civiles. Sa bibliotheque souffrit quelque perte de la part des factieux. Pour prévenir de plus grandes dissipations, Henri IV. en 1595, fit transporter au collége de Clermont à Paris la bibliotheque de Fontainebleau, dont aussi-bien le commun des Savans n'étoit pas assez à portée de profiter. Les livres furent à peine arrivés à Paris, qu'on y joignit le beau manuscrit de la grande Bible de Charles-le-Chauve. Cet exemplaire, l'un des plus précieux monumens littéraires du zele de nos rois de la seconde race pour la religion, avoit été conservé depuis le regne de cet empereur, dans l'abbaye de S. Denis. Quelques années auparavant, le président de Thou avoit engagé Henri IV. à acquérir la bibliotheque de Catherine de Medicis, composée de plus de 800 manuscrits grecs & latins ; mais différentes circonstances firent que cette acquisition ne put être terminée qu'en 1599. Quatre ans après l'acquisition des manuscrits de la reine Catherine de Médicis, la bibliotheque passa du collége de Clermont chez les Cordeliers, où elle demeura quelques années en dépôt. Le président de Thou mourut en 1617, & françois de Thou son fils aîné, qui n'avoit que neuf ans, hérita de la charge de maître de la librairie.
Pendant la minorité du jeune bibliothécaire, la direction de la bibliotheque du Roi fut confiée à Nicolas Rigault, connu par divers ouvrages estimés. La bibliotheque royale s'enrichit peu sous le regne de Louis XIII. elle ne fit d'acquisitions un peu considérables, que les manuscrits de Philippe Hurault évêque de Chartres, au nombre d'environ 418 volumes, & 110 beaux manuscrits syriaques, arabes, turcs, & persans, achetés, aussi-bien que des caracteres syriaques, arabes, & persans, avec les matrices toutes frappées, des héritiers de M. de Breves, qui avoit été ambassadeur à Constantinople. Ce ne fut que sous le regne de Louis XIII. que la bibliotheque royale fut retirée des cordeliers, pour être mise dans une grande maison de la rue de la Harpe, appartenant à ces religieux.
François de Thou ayant été décapité en 1642, l'illustre Jérôme Bignon, dont le nom seul fait l'éloge, lui succéda dans la charge de maître de la librairie. Il obtint en 1651, pour son fils aîné, nommé Jérôme comme lui, la survivance de cette charge. Quelques années après, M. Colbert, qui méditoit déjà ses grands projets, fit donner à son frere, Nicolas Colbert, la place de garde de la librairie, vacante par la mort de Jacques Dupuy. Celui-ci légua sa bibliotheque au Roi. Louis XIV. l'accepta par lettres patentes, registrées au parlement le 16 Avril 1657.
Hippolite, comte de Bethune, fit présent au Roi, à-peu-près dans le même tems, d'une collection fort curieuse de manuscrits modernes, au nombre de 1923 volumes, dont plus de 950 sont remplis de lettres & de pieces originales sur l'histoire de France.
A un zele également vif pour le progrès des Sciences & pour la gloire de son maître, M. Colbert joignoit une passion extraordinaire pour les livres ; il commençoit alors à fonder cette célebre bibliotheque, jusqu'à ces derniers tems la rivale de la bibliotheque du Roi : mais l'attention qu'il eut aux intérêts de l'une, ne l'empêcha pas de veiller aux intérêts de l'autre. La bibliotheque du Roi est redevable à ce ministre des acquisitions les plus importantes. Nous n'entrerons point ici dans le détail de ces diverses acquisitions : ceux qui voudront les connoître dans toute leur étendue, pourront lire le mémoire historique sur la bibliotheque du Roi, à la tête du catalogue, pag. 26. & suiv. Une des plus précieuses est celle des manuscrits de Brienne ; c'est un recueil de pieces concernant les affaires de l'état, qu'Antoine de Lomenie secrétaire d'état, avoit rassemblées avec beaucoup de soin en 340 volumes.
M. Colbert trouvant que la bibliotheque du Roi étoit devenue trop nombreuse pour rester commodément dans la maison de la rue de la Harpe, la fit transporter en 1666 dans deux maisons de la rue Vivienne qui lui appartenoient. L'année suivante le cabinet des médailles, dans lequel étoit le grand recueil des estampes de l'abbé de Marolles, & autres raretés, fut retiré du Louvre & réuni à la bibliotheque du Roi, dont ils font encore aujourd'hui une des plus brillantes parties. Après la disgrace de M. Fouquet, sa bibliotheque, ainsi que ses autres effets, fut saisie & vendue. Le Roi en fit acheter un peu plus de 1300 volumes, outre le recueil de l'histoire d'Italie.
Il n'étoit pas possible que tant de livres imprimés joints aux anciens, avec les deux exemplaires des livres de privilége que fournissoient les Libraires, ne donnassent beaucoup de doubles : ce fonds seroit devenu aussi embarrassant qu'inutile, si on n'avoit songé à s'en défaire par des échanges. Ce fut par ce moyen qu'on fit en 1668 l'acquisition de tous les manuscrits & d'un grand nombre de livres imprimés qui étoient dans la bibliotheque du cardinal Mazarin. Dans le nombre de ces manuscrits, qui étoit de 2156, il y en avoit 102 en langue hébraïque, 343 en arabe, samaritain, persan, turc, & autres langues orientales ; le reste étoit en langue grecque, latine, italienne, françoise, espagnole, &c. Les livres imprimés étoient au nombre de 3678. La bibliotheque du Roi s'enrichit encore peu après par l'acquisition que l'on fit à Leyde d'une partie des livres du savant Jacques Golius, & par celle de plus de 1200 volumes manuscrits ou imprimés de la bibliotheque de M. Gilbert Gaumin, doyen des maîtres des requêtes, qui s'étoit particulierement appliqué à l'étude & à la recherche des livres orientaux.
Ce n'étoit pas seulement à Paris & chez nos voisins que M. Colbert faisoit faire des achats de livres pour le Roi ; il fit rechercher dans le Levant les meilleurs manuscrits anciens en grec, en arabe, en persan, & autres langues orientales. Il établit dans les différentes cours de l'Europe des correspondances, au moyen desquelles ce ministre vigilant procura à la bibliotheque du Roi des thrésors de toute espece.
L'année 1670 vit établir dans la bibliotheque royale un fonds nouveau bien capable de la décorer, & d'éterniser la magnificence de Louis XIV. ce sont les belles estampes que Sa Majesté fit graver, & qui servent encore aujourd'hui aux présens d'estampes que le Roi fait aux princes, aux ministres étrangers, & aux personnes de distinction qu'il lui plaît d'en gratifier. La bibliotheque du Roi perdit M. Colbert en 1683. M. de Louvois, comme surintendant des bâtimens, y exerça la même autorité que son prédécesseur, & acheta de M. Bignon, conseiller d'état, la charge de maître de la Librairie, à laquelle fut réunie celle de garde de la Librairie, dont s'étoient démis volontairement MM. Colbert. Les provisions de ces deux charges réunies, furent expédiées en 1684 en faveur de Camille le Tellier, qu'on a appellé l'abbé de Louvois.
M. de Louvois fit pour procurer à la bibliotheque du Roi de nouvelles richesses, ce qu'avoit fait M. Colbert ; il y employa nos ministres dans les cours étrangeres, & en effet on en reçut dans les années 1685, 1686, 1687, pour des sommes considérables. Le P. Mabillon qui voyageoit en Italie, fut chargé par le Roi d'y rassembler tout ce qu'il pourroit de livres ; il s'acquitta de sa commission avec tant de zele & d'exactitude, qu'en moins de deux ans il procura à la bibliotheque royale près de 4000 volumes imprimés.
La mort de M. de Louvois arrivée en 1691, apporta quelque changement à l'administration de la bibliotheque du Roi. La charge de maître de la Librairie avoit été exercée jusqu'alors sous l'autorité & la direction du surintendant des bâtimens ; mais le Roi fit un reglement en Juillet 1691, par lequel il ordonna que M. l'abbé de Louvois joüiroit & feroit les fonctions de maître de la Librairie, intendant & garde du cabinet des livres, manuscrits, médailles, &c. & garde de la bibliotheque royale, sous l'autorité de Sa Majesté seulement.
En 1697, le P. Bouvet, jésuite-missionnaire, apporta 49 volumes chinois que l'empereur de la Chine envoyoit en présent au Roi. C'est ce petit nombre de volumes qui a donné lieu au peu de littérature chinoise que l'on a cultivée en France ; mais il s'est depuis considérablement multiplié. Nous ne finirions pas si nous voulions entrer dans le détail de toutes les acquisitions de la bibliotheque royale, & des présens sans nombre qui lui ont été faits. A l'avenement de Louis XIV. à la couronne, sa bibliotheque étoit tout au plus de 5000 volumes, & à sa mort il s'y en trouva plus de 70000, sans compter le fonds des planches gravées & des estampes ; accroissement immense, & qui étonneroit, si l'on n'avoit vû depuis, la même bibliotheque recevoir à proportion des augmentations plus considérables.
L'heureuse inclination du Roi à protéger les Lettres & les Sciences, à l'exemple de son bisayeul ; l'empressement des ministres à se conformer aux vûes de Sa Majesté ; l'attention du bibliothécaire & de ceux qui sont sous ses ordres à profiter des circonstances, en ne laissant, autant qu'il est en eux, échapper aucune occasion d'acquérir ; enfin la longue durée de la paix ; tout ensemble avoit conspiré dans le cours du présent regne, à accumuler richesses sur richesses dans un thrésor qui déjà du tems du feu Roi n'avoit rien qui lui fût comparable.
Parmi les livres du cabinet de Gaston d'Orléans, légués au Roi en 1660, il s'étoit trouvé quelques volumes de plantes & d'animaux que ce prince avoit fait peindre en mignature sur des feuilles détachées de vélin, par Nicolas Robert, dont personne n'a égalé le pinceau pour ces sortes de sujets. Ce travail a été continué sous M. Colbert & jusqu'en 1728, tems auquel on a cessé d'augmenter ce magnifique recueil. Depuis quelques années il a été repris avec beaucoup de succès, & forme aujourd'hui une suite de plus de deux mille cinq cent feuilles, représentant des fleurs, des oiseaux, des animaux, & des papillons.
La bibliotheque du Roi perdit en 1728 M. l'abbé de Louvois, & M. l'abbé Bignon lui succéda. Les Sciences & les Lettres ne virent pas sans espérance un homme qu'elles regardoient comme leur protecteur, élevé à un poste si brillant. M. l'abbé Bignon, presqu'aussi-tôt après sa nomination, se défit de sa bibliotheque particuliere, pour ne s'occuper plus que de celle du Roi, à laquelle il donna une collection assez ample & fort curieuse de livres chinois, tartares & indiens qu'il avoit. Il signala son zele pour la bibliotheque du Roi dès les premiers jours de son exercice, par l'acquisition des manuscrits de M. de la Marre, & ceux de M. Baluse, au nombre de plus de mille. Le grand nombre de livres dont se trouvoit composée la bibliotheque du Roi, rendoit comme impossible l'ordre qu'on auroit voulu leur donner dans les deux maisons de la rue Vivienne ; M. l'abbé de Louvois l'avoit représenté plusieurs fois, & dès le commencement de la régence il avoit été arrêté de mettre la bibliotheque dans la grande galerie du Louvre ; mais l'arrivée de l'infante dérangea ce projet, parce qu'elle devoit occuper le Louvre.
M. l'abbé Bignon en 1721 profita de la décadence de ce qu'on appelloit alors le système, pour engager M. le régent à ordonner que la bibliotheque du Roi fût placée à l'hôtel de Nevers rue de Richelieu, où avoit été la banque. Sur les ordres du prince, on y transporta sans délai tout ce que l'on put de livres ; mais les différentes difficultés qui se présenterent, furent cause qu'on ne put obtenir qu'en 1724 des lettres patentes par lesquelles Sa Majesté affecta à perpétuité cet hôtel au logement de sa bibliotheque. Personne n'ignore la magnificence avec laquelle ont été décorés les vastes appartemens qu'occupent aujourd'hui les livres du Roi : c'est le spectacle le plus noble & le plus brillant que l'Europe offre en ce genre. M. l'abbé Sallier, professeur royal en langue hébraïque, de l'académie royale des Inscriptions & Belles-Lettres, l'un des quarante de l'académie Françoise, & nommé en 1726 commis à la garde des livres & manuscrits, ainsi que M. Melot, aussi membre de l'académie des Belles-Lettres, sont de tous les hommes de Lettres attachés à la bibliotheque du Roi, ceux qui lui ont rendu les plus grands services. La magnificence des bâtimens est dûe, pour la plus grande partie, à leurs sollicitations : le bel ordre que l'on admire dans l'arrangement des livres, ainsi que dans l'excellent catalogue qui en a été fait, est dû à leurs connoissances ; les accroissemens prodigieux qu'elle a reçûs depuis 25 ans, à leur zele ; l'utile facilité de puiser dans ce thrésor littéraire, à leur amour pour les Lettres, & à l'estime particuliere qu'ils portent à tous ceux qui les cultivent. C'est du mémoire historique que ces deux savans hommes ont mis à la tête du catalogue de la bibliotheque du Roi, que nous avons extrait tout ce qui la concerne dans cet article. Nous invitons à le lire ceux qui voudront connoître dans un plus grand détail les progrès & les accroissemens de cette immense bibliotheque.
Pendant le cours de l'année 1728 il entra dans la bibliotheque du Roi beaucoup de livres imprimés : il en vint de Lisbonne, donnés par MM. les comtes d'Ericeira ; il en vint aussi des foires de Leipsic & de Francfort pour une somme considérable. La plus importante des acquisitions de cette année, fut faite par M. l'abbé Sallier à la vente de la bibliotheque Colbert : elle consistoit en plus de mille volumes. Mais de quelque mérite que puissent être de telles augmentations, elles n'ont pas l'éclat de celle que le ministere se proposoit en 1728.
L'établissement d'une imprimerie turque à Constantinople, avoit fait naître en 1727 à M. l'abbé Bignon l'idée de s'adresser, pour avoir les livres qui sortiroient de cette imprimerie, à Zaïd Aga, lequel, disoit-on, en avoit été nommé le directeur, & pour avoir aussi le catalogue des manuscrits grecs & autres qui pourroient être dans la bibliotheque du grand-seigneur. M. l'abbé Bignon l'avoit connu en 1721, pendant qu'il étoit à Paris à la suite de Mehemet Effendi son pere, ambassadeur de la Porte. Zaïd Aga promit les livres qui étoient actuellement sous la presse ; mais il s'excusa sur l'envoi du catalogue, en assûrant qu'il n'y avoit personne à Constantinople assez habile pour le faire. M. l'abbé Bignon communiqua cette réponse à M. le comte de Maurepas, qui prenoit trop à coeur les intérêts de la bibliotheque du Roi, pour ne pas saisir avec empressement & avec zele cette occasion de la servir. Il fut arrêté que la difficulté d'envoyer le catalogue demandé, n'étant fondée que sur l'impuissance de trouver des sujets capables de le composer, on envoyeroit à Constantinople des savans qui, en se chargeant de le faire, pourroient voir & examiner de près cette bibliotheque.
Ce n'est pas qu'on fût persuadé à la cour que la bibliotheque tant vantée des empereurs grecs existât encore ; mais on vouloit s'assûrer de la vérité ou de la fausseté du fait. D'ailleurs le voyage qu'on projettoit, avoit un objet qui paroissoit moins incertain ; c'étoit de recueillir tout ce qui pouvoit rester des monumens de l'antiquité dans le Levant, en manuscrits, en médailles, en inscriptions, &c.
M. l'abbé Sevin & M. l'abbé Fourmont, tous deux de l'Académie des inscriptions & Belles-Lettres, furent chargés de cette commission. Ils arriverent au mois de Décembre 1728 à Constantinople ; mais ils ne purent obtenir l'entrée de la bibliotheque du grand-seigneur ; ils apprirent seulement par des gens dignes de foi, qu'elle ne renfermoit que des livres turcs & arabes, & nul manuscrit grec ou latin ; & ils se bornerent à l'autre objet de leur voyage. M. l'abbé Fourmont parcourut la Grece, pour y déterrer des inscriptions & des médailles ; M. l'abbé Sevin fixa son séjour à Constantinople. Là, secondé de tout le pouvoir de M. le marquis de Villeneuve, ambassadeur de France, il mit en mouvement les consuls & ceux des Echelles qui avoient le plus de capacité, & les excita à faire chacun dans son district quelques découvertes importantes. Avec tous ces secours & les soins particuliers qu'il se donna, il parvint à rassembler en moins de deux ans plus de six cent manuscrits en langue orientale ; mais il perdit l'espérance de rien trouver des ouvrages des anciens grecs, dont on déplore tant la perte. M. l'abbé Sevin revint en France, après avoir établi des correspondances nécessaires pour continuer ce qu'il avoit commencé ; & en effet la bibliotheque du Roi a reçû presque tous les ans depuis son retour plusieurs envois de manuscrits, soit grecs, soit orientaux. On est redevable à M. le comte de Maurepas, de l'établissement des enfans ou jeunes de langue qu'on éleve à Constantinople aux dépens du Roi ; ils ont ordre de copier & de traduire les livres turcs, arabes & persans ; usage bien capable d'exciter parmi eux de l'émulation. Ces copies & ces traductions sont adressées au ministre, qui après s'en être fait rendre compte, les envoye à la bibliotheque du Roi. Les traductions ainsi jointes aux textes originaux, forment déjà un recueil assez considérable, dont la république des Lettres ne pourra par la suite que retirer un fort grand avantage.
M. l'abbé Bignon, non content des thrésors dont la bibliotheque du Roi s'enrichissoit, prit les mesures les plus sages pour faire venir des Indes les livres qui pouvoient donner en France plus de connoissance qu'on n'en a de ces pays éloignés, où les Sciences ne laissent pas d'être cultivées. Les directeurs de la compagnie des Indes se prêterent avec un tel empressement à ses vûes, que depuis 1729 il a été fait des envois assez considérables de livres indiens, pour former dans la bibliotheque du Roi un recueil en ce genre, peut-être unique en Europe.
Dans les années suivantes, la bibliotheque du Roi s'accrut encore par la remise d'un des plus précieux manuscrits qui puisse regarder la monarchie, intitulé registre de Philippe Auguste, qu'avoit légué au Roi M. Rouillé du Coudray, conseiller d'état ; & par diverses acquisitions considérables : telles sont celles des manuscrits de S. Martial de Limoges, de ceux de M. le premier président de Mesmes ; du cabinet d'estampes de M. le marquis de Beringhen ; du fameux recueil des manuscrits anciens & modernes de la bibliotheque de M. Colbert, la plus riche l'Europe, si l'on en excepte celle du Roi & celle du Vatican ; du cabinet de M. Cangé, collection infiniment curieuse, dont le catalogue est fort recherché des connoisseurs.
Pour ne pas donner à cet article trop d'étendue, nous avons crû devoir éviter d'entrer dans le détail des différentes acquisitions ; & nous renvoyons encore une fois au mémoire historique qui se trouve à la tête du catalogue de la bibliotheque du Roi.
M. Bignon, maître des requêtes, l'un des quarante de l'académie Françoise, & descendant de MM. Bignon à qui nous avons eu occasion de donner les plus grands éloges, héritier de leur amour pour les Lettres, comme il l'est des autres grandes qualités qui les ont rendus célebres, exerce aujourd'hui avec beaucoup d'intelligence & de distinction la charge de maître de la Librairie du Roi.
On a vû par ce que nous avons dit, avec combien de zele plusieurs ministres ont concouru à mettre la bibliotheque du Roi dans un état de splendeur & de magnificence qui n'a jamais eu d'exemple. M. de Maurepas est un de ceux sans-doute à qui elle a eu les plus grandes obligations. M. le comte d'Argenson, dans le département de qui elle est aujourd'hui, ami des Lettres & des Savans, regarde la bibliotheque du Roi comme une des plus précieuses parties de son administration ; il continue par goût & par la supériorité de ses lumieres, ce qui avoit été commencé par son prédécesseur : chose bien rare dans les grandes places. Qu'il soit permis à notre reconnoissance d'élever la voix, & de dire : Heureuse la nation qui peut faire d'aussi grandes pertes, & les réparer aussi facilement !
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BIBLISTES | S. m. pl. (Hist. ecclés. & Théol.) nom donné par quelques auteurs aux hérétiques qui n'admettant que le texte de la Bible ou de l'Ecriture sainte, sans aucune interprétation, rejettent l'autorité de la tradition & celle de l'Eglise pour décider les controverses de religion. Voyez TRADITION, EGLISE. (G)
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BIBR | ou BEBRA, (Géog.) petite ville de Thuringe, à deux lieues de Naumbourg.
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BIBRACTE | (Géog. anc. mod. & Myth.) ancienne ville des Eduens, qu'on croit être aujourd'hui Autun. Il paroît par une inscription trouvée à Autun même, qu'il y a eu aussi une déesse de ce nom.
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BICANER | (Géog.) ville d'Asie dans les états du Mogol, sur le Gange ; c'est la capitale de la province de Bacar. Long. 100. 20. lat. 28. 40.
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BICARS | S. m. pl. (Hist. mod.) pénitens Indiens qui passoient toute leur vie nuds, laissoient croître scrupuleusement leurs cheveux & leurs ongles, & portoient par-tout une écuelle de terre pendue à leur cou : lorsqu'ils étoient pressés de la faim ils s'arrêtoient aux portes, & on remplissoit leur écuelle de riz cuit. Ces especes de gueux étoient très-communs dans l'Inde pendant le jx. siecle.
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BICCARI | (Géog. anc. & mod.) petite ville de la vallée de Mazara en Sicile, entre la source du Biccari & celle de la Belice. Quelques géographes prétendent que c'est l'ancienne Hyccarum.
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BICEPS | adj. nom que les Anatomistes ont donné aux muscles qui sont divisés par l'une de leurs extrémités en deux portions distinctes qu'ils ont appellées têtes.
Le biceps du coude est situé le long de la partie interne du bras ; une de ses têtes vient de la partie supérieure de la cavité glénoïde, & passe dans la sinuosité de l'humerus, entre les tendons du grand pectoral & du grand dorsal, comme dans une gaîne ; l'autre tête vient de l'apophyse coracoïde, & s'unit avec la premiere vers le milieu de la partie interne du bras : ce muscle va ensuite s'insérer par un fort tendon à une tubérosité qui se remarque un peu au-dessous de la tête du radius, après avoir fourni quelques fibres tendineuses, qui par leur épanouissement forment une aponévrose qui s'étend sur la partie supérieure & interne des muscles qui sont situés sur le cubitus.
Le biceps de la jambe est situé le long de la partie postérieure de la cuisse ; la plus longue tête vient de la tubérosité de l'ischium ; la seconde de la ligne âpre, au-dessous du tendon du grand fessier ; il s'insere à la partie supérieure & postérieure du tibia & du péroné. (L)
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BICHE | S. f. (Hist. nat. Zool.) femelle du cerf. Voyez CERF. (I)
BICHE, s. f. (Hist. nat. Ichthyol.) glaucus primus Rond. poisson de mer qui a le ventre blanc & le dos bleu, d'où lui vient son nom latin ; le corps est long, le ventre plat, & le dos voûté : il a une ligne droite qui s'étend depuis les oüies jusqu'à la queue ; ses écailles sont si petites, qu'elles ne paroissent bien distinctement qu'après qu'il a été desséché. La bouche est petite ; les mâchoires sont garnies de petites pointes ; les yeux sont de médiocre grandeur : il a deux nageoires auprès des oüies qui sont courtes & larges, & qui semblent être dorées, & deux autres nageoires en-dessous. Ce poisson a sur le dos, du côté de la tête, six aiguillons courts & pointus, dont le premier est dirigé en avant, les autres sont tournés en arriere. Il s'en trouve sous le ventre près de l'anus deux autres, que ce poisson abaisse & renferme dans une gaîne. Il a sur le dos une nageoire qui s'étend depuis le dernier aiguillon jusqu'à la queue ; la partie antérieure de cette nageoire est plus élevée que le reste, & marquée par une tache noire : il y a une autre nageoire sous le ventre, qui occupe l'espace qui est depuis l'anus jusqu'à la queue ; cette nageoire est semblable à celle du dos. La queue est terminée par deux nageoires ; l'ouverture de l'anus est en forme de fente. On donne aussi à ce poisson le nom de derbio. Il a jusqu'à trois coudées de longueur. Sa chair est blanche, & de bon goût. Rond. Voyez POISSON. (I)
* BICHE, (Myth.) symbole de Junon conservatrice. Les payens croyoient (car quelles fables ne fait-on pas croire aux hommes) que des cinq biches aux cornes d'or, & plus grandes que des taureaux, que Diane poursuivit dans les forêts de Thessalie, elle n'en prit que quatre qu'elle attacha à son char, & que Junon sauva la cinquieme. La biche aux piés d'airain & aux cornes d'or du mont Menale étoit consacrée à Diane ; & c'eût été un sacrilége que de la tuer. Euristhée ordonna à Hercule de la lui amener. Le héros la pour suivit pendant un an, l'atteignit enfin sur les bords du Ladon, la porta à Mycenes, & accomplit le quatrieme de ses travaux.
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BICHET | S. m. (Comm.) quantité ou mesure de grains, qui est différente suivant les lieux où elle est en usage. Le bichet n'est pas une mesure réelle, telle que peut être le minot à Paris ; c'est une mesure factice composée de plusieurs autres mesures.
A Tournus le bichet est de seize mesures ou boisseaux du pays, qui font dix-neuf boisseaux de Paris & un peu plus.
Le bichet de Beaune aussi-bien que celui de Tournus, se divise en seize mesures ou boisseaux du pays, mais qui ne rendent à Paris que dix-huit boisseaux.
Celui de Verdun, composé de huit mesures ou boisseaux, rend quinze boisseaux de Paris ; & le bichet de Châlons-sur-Saône, qui contient huit mesures du pays, est égal à quatorze boisseaux de Paris.
En quelques autres endroits de France, & notamment à Lyon, le boisseau se nomme bichet, quoique fort différent des autres bichets dont on vient de parler.
On se sert aussi du bichet dans quelques endroits de l'Alsace & des trois évêchés : mais presque partout il varie pour la capacité & le poids, selon la nature des grains : ainsi à Sarebourg le bichet de froment pese 23 livres poids de marc, celui de meteil 22, celui de seigle 21, & celui d'avoine 146 livres ; & à Toul le bichet de froment pese 134, de meteil 129, de seigle 119, & celui d'avoine seulement 80 livres.
Bichet se dit aussi en quelques endroits d'une mesure de terre qui s'estime par celle d'un bichet de grain qu'on y peut semer. Voyez ARPENT. (G)
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BICHOW | (Géog.) forteresse dans le Palatinat de Meislau en Pologne, sur le fleuve Nieper.
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BICIOS | (Hist. nat. Insectol.) l'on appelle ainsi dans le Bresil un insecte fort petit & fort incommode qui entre par les pores, s'insinue entre cuir & chair, & cause des douleurs très-considérables.
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BICONGE | (Hist. anc.) c'étoit une mesure usitée chez les anciens Romains ; elle contenoit douze sextiers. Voyez CONGE.
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BICOQUE | S. f. c'est ainsi qu'on appelle, dans l'Art militaire, une petite place mal fortifiée & sans défense. (Q)
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BICORNIGER | adj. (Myth.) c'est ainsi qu'on a surnommé Bacchus, qu'on trouve quelquefois représenté avec deux cornes, symbole des rayons du soleil, ou de la force que donne le vin.
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BICQUETER | ce mot se dit (en Venerie) des chevres qui font leurs petits.
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BICURE | (Géog.) petite riviere de l'île de France, dont les eaux sont très-bonnes pour les teintures en écarlate.
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BIDACHE | (Géog.) petite ville de France, dans la basse Navarre, proche le pays de Labour.
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BIDASSOA | (Géog.) riviere d'Espagne sur les frontieres de France, qui prend sa source dans les Pyrénées, & se jette dans la mer entre Andaye & Fontarabie. Cette riviere est commune à la France & à l'Espagne, depuis la convention de Louis XII. & Ferdinand le catholique ; c'est elle qui forme l'île des Faisans, appellée île de la Conférence, depuis celle que Louis XIV. & Philippe IV. y eurent ensemble.
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BIDAUX | S. m. pl. (Hist. mod.) terme de l'ancienne milice françoise, pour designer un corps d'infanterie, dont on faisoit assez peu de cas. La chronique de Flandre en parle au sujet de la bataille & de la prise de Furnes en 1297. Jean de Gaure, qui s'étoit retiré dans cette ville, ne vouloit point se rendre ; mais les bidaux lui saillirent au col par-derriere, l'abattirent & le tuerent. Guillaume Guyart, qui en fait aussi mention sous les années 1298, 1302 & 1304, semble faire entendre qu'ils tiroient leur origine des frontieres d'Espagne.
De Navarre & devers Espagne
Reviennent bidaux à grans routes.
Il paroît par le même auteur, que ces soldats portoient pour armes deux dards & une lance, & un coutel à la ceinture. M. de Caseneuve prétend après Joan. Hocsemius, dans ses gestes des évêques de Tongres, liv. I. chap. xxjv. que les bidaux étoient ainsi appellés a binis dardis, de deux dards qu'ils portoient. Ne pourroit-t-on point croire que ce nom leur étoit donné à cause du pays d'où ils sortoient, des environs de la riviere de Bidassoa ? Il est certain du moins que les auteurs les appellent plus ordinairement bidaux, bidaldi, que bidarii ; & Hocsemius est le seul qui leur ait donné ce second nom latin, pour l'approcher davantage de sa prétendue étymologie. Il paroît que les bidaux n'étoient pas de fort bonnes troupes ; souvent ils lâchoient pié, & lançoient leurs dards en s'enfuyant. Bidaux retraient, c'est-à-dire s'enfuyent, & dards ruent, dit le même poëte que nous avons déjà cité ; & le continuateur de Nangis rend à-peu-près le même témoignage à leur bravoure à la bataille de Cassel, où il dit que les bidaux s'étant mis à fuir selon leur coûtume, causerent quelque desordre dans l'armée françoise : ce qui fait voir que ces bidaux étoient des troupes legeres ; plus propres à harceler l'ennemi qu'à l'attendre de pié-ferme. Ménage a parlé de ces bidaux dans son étymologie au mot pitaux. Mémoire de l'acad. tom. X. dans une note. (G)
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BIDBUR | ou BIEDBURG, (Géog.) petite ville du duché de Luxembourg.
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BIDEN | ou TESTE CORNUE, (Hist. nat. bot.) genre de plante dont la fleur est ordinairement composée de fleurons, c'est-à-dire de plusieurs pétales posés sur des embryons & soûtenus par le calice ; il y a quelquefois des demi-fleurons à la circonférence. Les embryons deviennent dans la suite des semences qui sont terminées par deux pointes. Tournefort, Inst. rei herb. Voyez PLANTE. (I)
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BIDENTALES | S. m. pl. (Hist. anc.) prêtres chez les anciens Romains. Les bidentales étoient des prêtres institués pour faire certaines cérémonies, lorsque la foudre étoit tombée quelque part & les expiations prescrites. Voy. TONNERRE. La premiere & la principale de leurs fonctions, étoit le sacrifice d'une brebis de deux ans, qui en latin s'appelle bidens. De-là le lieu frappé de la foudre s'appelloit bidental ; il n'étoit point permis d'y marcher : on l'entouroit de murailles ou de palissades : on y dressoit un autel ; & les prêtres qui faisoient ces cérémonies étoient nommés bidentales, du même mot bidens. Ce nom se trouve dans les inscriptions antiques. Semoni sancto deo Fidio sacrum Sex. Pompeius sp. f. col. Mussianus quinquennalis de cur. bidentalis donum dedit. (G)
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BIDERT-CAPP | (Géog.) petite ville sur la Lohn, à 3 lieues de Marpurg, à la maison de Hesse-Darmstadt.
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BIDET | S. m. (Manége) on appelle ainsi un cheval de la plus petite taille. Bidet de poste, est un petit cheval de poste sur lequel on monte, & qu'on n'attelle point à la chaise de poste. Bidet pour la bague est un petit cheval destiné dans une académie à monter pour courre la bague. Un bidet ne passe guere trois piés & demi de haut. Double bidet, est un cheval entre le bidet & la taille ordinaire : il ne passe guere quatre piés & demi de haut. Les chevaux de cette taille servent ordinairement pour la promenade, l'arquebuse, & aux messageries. Les meilleurs bidets viennent de France. (V)
BIDET, (en terme de Cirier) c'est un instrument de boüis, à-peu-près fait comme un fuseau, taillé à plusieurs pans par un bout pour former les trous d'un cierge pascal, où l'on met des clous d'encens : de l'autre il est rond pour former les creux & les angles des flambeaux. Voyez la fig. Pl. du Cirier.
BIDET, ou charger le bidet (au trictrac) se dit de l'action par laquelle un joüeur met un grand nombre de dames sur une même fleche. Ce terme autrefois assez usité, n'est plus d'usage à présent.
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BIDGOST | ou BYDGOSTY ou BROMBERG, ville de la grande Pologne.
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BIDIMA | (Géog.) l'une des îles des Larrons dans l'Océan oriental.
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BIDON | S. m. (Commerce) mesure des liquides qui tient environ cinq pintes de Paris ; ce terme n'est guere d'usage que parmi les équipages de marine, où ce vase sert à mettre le vin qu'on donne à chaque plat de matelots. C'est une espece de broc de bois relié de cercles de fer. Voyez BROC. (G)
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BIDOURLE | (Géog.) petite riviere du bas Languedoc, qui se jette dans la mer Méditerranée.
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BIDOUZE | (Géog.) riviere de la Gascogne, qui se jette dans la Gave près de Bayonne.
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BIECZ | (Géog.) petite ville de Pologne, dans le Palatinat de Cracovie, sur la riviere de Wiseloke ; elle est remarquable par ses mines de vitriol. Long. 38. 53. lat. 49. 50.
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BIE | ou BIEN, (Géog.) ville de Suisse sur la Schufs, entre Soleure & Neufchâtel, dans le voisinage d'un lac, qui porte le même nom.
* BIEL, (Géog.) petite ville d'Espagne, dans le royaume d'Aragon.
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BIELA | (Géog.) ville de l'empire Russien, capitale de la province de même nom, sur la riviere d'Opska. Long. 52. 25. lat. 55.
* BIELA, (Géog.) ville de Boheme, à & lieues de Prague.
* BIELA, (Géog.) il y a deux rivieres de ce nom, l'une en Boheme, & l'autre en Silésie, & qui tombe dans la Vistule.
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BIELA-OZERO | (Géog.) c'est un duché de la Moscovie, entre ceux de Novogrod-Weliki & du Wologda, avec la capitale de même nom, près d'un lac qui a 22 lieues de long & 12 de large. Long. 56. 40. lat. 58. 55.
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BIELEFELD | (Géog.) capitale du comté de Ravensberg en Westphalie, à 5 lieues de Minden.
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BIELICA | (Géog.) petite ville du Palatinat de Troki en Lithuanie.
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BIELL | ou BIELA, (Géog.) petite ville d'Italie dans le Piémont, capitale du Bellesse, près de la riviere de Cerva. Long. 25. 33. lat. 45. 22.
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BIELLE | S. f. (dans les Arts méchaniques) c'est une piece de fer tournante dans l'oeil d'une manivelle, laquelle à chaque tour fait faire un mouvement de vibration à un valet sur son essieu, en le tirant à soi ou le poussant en avant : il y a des bielles pendantes attachées aux extrémités d'une piece de bois, lesquelles sont accrochées par une des extrémités à un varlet, & par l'autre à un des bouts d'un balancier. (K)
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BIELSKO | (Géog.) grande ville de la Pologne, dans le Palatinat, & sur la riviere de même nom. Long. 41. 41. lat. 52. 40.
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BIELSKY | (Géog.) ville forte & principauté de Moscovie, sur l'Opska, entre Reschow, Smolensko, Novogrod, & la Lithuanie.
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BIEN | S. m. (en Morale) est équivoque : il signifie ou le plaisir qui nous rend heureux, ou la cause du plaisir. Le premier sens est expliqué à l'article PLAISIR ; ainsi dans l'article présent nous ne prendrons le mot bien que dans le second sens.
Dieu seul, à proprement parler, mérite le nom de bien ; parce qu'il n'y a que lui seul qui produise dans notre ame des sensations agréables. On peut néanmoins donner ce nom à toutes les choses, qui, dans l'ordre établi par l'auteur de la nature, sont les canaux par lesquels il fait pour ainsi dire couler le plaisir jusqu'à l'ame. Plus les plaisirs qu'elles nous procurent sont vifs, solides, & durables, plus elles participent à la qualité de bien.
Nous avons dans Sextus Empiricus l'extrait d'un ouvrage de Crantor sur la prééminence des différens biens. Ce philosophe célebre feignoit qu'à l'exemple des déesses qui avoient soûmis leur beauté au jugement de Paris, la richesse, la volupté, la santé, les vertus, s'étoient présentées à tous les Grecs rassemblés aux jeux olympiques, afin qu'ils marquassent leur rang, suivant le degré de leur influence sur le bonheur des hommes ; la richesse étala sa magnificence, & commençoit à ébloüir les yeux de ses juges, quand la volupté représenta que l'unique mérite des richesses étoit de conduire au plaisir. Elle alloit obtenir le premier rang, la santé le lui contesta ; sans elle la douleur prend bientôt la place de la joie : enfin la vertu termina la dispute, & fit convenir tous les Grecs, que dans le sein de la richesse, du plaisir, & de la santé, l'on seroit bientôt, sans le secours de la prudence & de la valeur, le joüet de tous ses ennemis. Le premier rang lui fut donc adjugé, le second à la santé, le troisieme au plaisir, le quatrieme à la richesse. En effet, tous ces biens n'en méritent le nom, que lorsqu'ils sont sous la garde de la vertu ; ils deviennent des maux pour qui n'en sait pas user. Le plaisir de la passion n'est point durable ; il est sujet à des retours de dégoût & d'amertume : ce qui avoit amusé, ennuie : ce qui avoit plû, commence à déplaire : ce qui avoit été un objet de délices, devient souvent un sujet de repentir & même d'horreur. Je ne prétens pas nier aux adversaires de la vertu & de la morale, que la passion & le libertinage n'ayent pour quelques-uns des momens de plaisir : mais de leur côté ils ne peuvent disconvenir qu'ils éprouvent souvent les situations les plus fâcheuses par le dégoût d'eux-mêmes & de leur propre conduite, par les autres suites naturelles de leurs passions, par les éclats qui en arrivent, par les reproches qu'ils s'attirent, par le dérangement de leurs affaires, par leur vie qui s'abrege ou leur santé qui dépérit, par leur réputation qui en souffre, & qui les expose souvent à tomber dans la misere. " L'empereur Vinceslas, nous dit l'auteur de l'Essai sur le mérite & la vertu, " trouvoit du goût aux voluptés indignes qui faisoient son occupation, & à l'avarice qui le dominoit. Mais quel goût put-il trouver dans l'opprobre avec lequel il fut déposé, & dans la paralysie où il languit à Prague, & que ses débauches avoient attirée ! Ouvrons les annales de Tacite, ces fastes de la méchanceté des hommes, parcourons les regnes de Tibere, de Claude, de Caligula, de Néron, de Galba, & le destin rapide de tous leurs courtisans ; & renonçons à nos principes, si dans la foule de ces scélérats insignes qui déchirerent les entrailles de leur patrie, & dont les fureurs ont ensanglanté tous les passages, toutes les lignes de cette histoire, nous rencontrons un heureux. Choisissons entr'eux tous. Les délices de Caprée nous font-elles envier la condition de Tibere ? Remontons à l'origine de sa grandeur, suivons sa fortune, considérons-le dans sa retraite, appuyons sur sa fin ; & tout bien examiné, demandons-nous, si nous voudrions être à présent ce qu'il fut autrefois, le tyran de son pays, le meurtrier des siens, l'esclave d'une troupe de prostituées, & le protecteur d'une troupe d'esclaves. Ce n'est pas tout : Néron fait périr Britannicus son frere, Agrippine sa mere, sa femme Octavie, sa femme Poppée, Antonia sa belle-soeur, ses instituteurs Séneque & Burrhus. Ajoûtez à ces assassinats une multitude d'autres crimes de toute espece ; voilà sa vie. Aussi n'y rencontre-t-on pas un moment de bonheur ; on le voit dans d'éternelles horreurs ; ses transes vont quelquefois jusqu'à l'aliénation de l'esprit ; alors il apperçoit le Ténare entr'ouvert ; il se croit poursuivi des furies ; il ne sait où ni comment échapper à leurs flambeaux vengeurs ; & toutes ces fêtes monstrueusement somptueuses qu'il ordonne, sont moins des amusemens qu'il se procure, que des distractions qu'il cherche ". Rien, ce semble, ne prouve mieux, que les exemples qu'on vient d'alléguer, qu'il n'y a de véritables biens que ceux dont la vertu regle l'usage : le libertinage & la passion sement notre vie de quelques instans de plaisirs : mais pour en connoître la valeur, il faut en faire une compensation avec ceux que promettent la vertu & une conduite reglée ; il n'est que ces deux partis. Quand le premier auroit encore plus d'agrément qu'on ne lui en suppose, il ne pourroit sensément être préféré au second ; il faut peser dans une juste balance lequel des deux nous porte davantage au but commun auquel nous aspirons tous, qui est de vivre heureux, non pour un seul moment, mais pour la partie la plus considérable de notre vie. Ainsi quand un homme sensuel offusque son esprit de vapeurs grossieres que le vin lui envoye, & qu'il s'enivre de volupté, la morale n'entreprendra pas de l'en détourner, en lui disant simplement que c'est un faux plaisir, qu'il est passager & contraire aux lois de l'ordre : il répondroit bien-tôt, ou du moins il se diroit à lui-même, que le plaisir n'est point faux, puisqu'il en éprouve actuellement la douceur ; qu'il est sans-doute passager, mais dure assez pour le réjoüir ; que pour les lois de la tempérance & de l'honnêteté, il ne les envie à personne, dès qu'elles ne conviennent point à son contentement, qui est le seul terme où il aspire. Cependant lorsque je tomberois d'accord de ce qu'il pourroit ainsi répliquer, si je pouvois l'amener à quelques momens de réflexions, il ne seroit pas long-tems à tomber d'accord d'un autre point avec moi. Il conviendroit donc que les plaisirs auxquels il se livre sans mesure, & d'une maniere effrénée, sont suivis d'inconvéniens beaucoup plus grands que les plaisirs qu'il goûte : alors pour peu qu'il fasse usage de sa raison, ne conclura-t-il pas que même par rapport à la satisfaction & au contentement qu'il recherche, il doit se priver de certaines satisfactions & de certains plaisirs ? Le plaisir payé par la douleur, disoit un des plus délicats Epicuriens du monde, ne vaut rien & ne peut rien valoir : à plus forte raison, un plaisir payé par une grande douleur, ou un seul plaisir payé par la privation de mille autres plaisirs ; la balance n'est pas égale. Si vous aimez votre bonheur ; aimez-le constamment ; gardez-vous de le détruire par le moyen même que vous employez afin de vous le procurer. La raison vous est donnée pour faire le discernement des objets, où vous le devez rencontrer plus complet & indivisibilité plus constant. Si vous me dites que le sentiment du présent agit uniquement dans vous & non pas la pensée de l'avenir, je vous dirai qu'en cela même vous n'êtes pas homme : vous ne l'êtes que par la raison & par l'usage que vous en faites, or cet usage consiste dans le souvenir du passé & dans la prévoyance de l'avenir, aussi-bien que dans l'attention au présent.
Ces trois rapports du tems sont essentiels à notre conduite : elle doit nous inspirer de choisir dans le tems présent pour le tems à venir, les moyens que dans le tems passé nous avons reconnus les plus propres à parvenir au bonheur ; ainsi pour y arriver, il ne s'agit pas de regarder précisément en chaque action que l'on fait, ou en chaque parti que l'on embrasse, ce qui s'y trouve de plaisir ou de peine. Dans les partis opposés de la vertu ou du vice, il se trouve de côté & d'autre de l'agrément & du desagrément : il faut en voir le résultat dans la suite générale de la vie, pour en faire une juste compensation. Il faut examiner, par exemple, ce qui arriveroit à deux hommes de même tempérament & de même condition, qui se trouveroient d'abord dans les mêmes occasions d'embrasser le parti de la vertu ou de la volupté : au bout de soixante ans, de quel côté y aura-t-il eu moins de peine ou moins de repentir, plus de vraie satisfaction & de tranquillité ? S'il se trouve que c'est du côté de la sagesse ou de la vertu, ce sera conduire les hommes à leur véritable bonheur, que d'attirer leur attention sur un traité de morale qui contribue à cette fin. Si la plûpart des hommes, malgré le desir empreint dans leur ame de devenir heureux, manquent néanmoins à le devenir, c'est que volontairement séduits par l'appas trompeur du plaisir présent, ils renoncent, faute de prévoir l'avenir & de profiter du passé, à ce qui contribueroit davantage à leur bonheur dans toute la suite de leur vie. Il s'ensuit de tout ce que nous venons de dire, que la vertu est plus féconde en sentimens délicieux que le vice, & par conséquent qu'elle est un bien plus grand que lui, puisque le bien se mesure au plaisir, qui seul nous rend heureux.
Mais ce qui donne à la vertu une si grande supériorité sur tous les autres biens, c'est qu'elle est de nature à ne devenir jamais mal par un mauvais usage. Le regret du passé, le chagrin du présent, l'inquiétude sur l'avenir, n'ont point d'accès dans un coeur que la vertu domine ; parce qu'elle renferme ses desirs dans l'étendue de ce qui est à sa portée, qu'elle les conforme à la raison, & qu'elle les soûmet pleinement à l'ordre immuable qu'a établi une souveraine intelligence. Elle écarte de nous ces douleurs, qui ne sont que les fruits de l'intempérance ; les plaisirs de l'esprit marchent à sa suite, & l'accompagnent jusque dans la solitude & dans l'adversité : elle nous affranchit, autant qu'il est possible, du caprice d'autrui & de l'empire de la fortune ; parce qu'elle place notre perfection, non dans une possession d'objets toûjours prêts à nous échapper, mais dans la possession de Dieu même, qui veut bien être notre recompense. La mort, ce moment fatal qui desespere les autres hommes, parce qu'il est le terme de leurs plaisirs & le commencement de leurs douleurs, n'est pour l'homme vertueux qu'un passage à une vie plus heureuse. L'homme voluptueux & passionné ne voit la mort que comme un fantôme affreux, qui à chaque instant fait un nouveau pas vers lui, empoisonne ses plaisirs, aigrit ses maux, & se prépare à le livrer à un Dieu vangeur de l'innocence. Ce qu'il envisage en elle de plus heureux, seroit qu'elle le plongeât pour toûjours dans l'abysme du néant. Mais cette honteuse espérance est bien combattue dans le fond de son ame par l'autorité de la révélation, par le sentiment intérieur de son indivisibilité personnelle, par l'idée d'un Dieu juste & tout-puissant. Le sort de l'homme parfaitement vertueux est bien différent : la mort lui ouvre le sein d'une intelligence bienfaisante, dont il a toûjours respecté les lois & ressenti les bontés. Voyez SAGESSE & VERTU. (X)
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BIENFAITEUR | BIENFAITEUR
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BIENHEUREUX | ce terme a diverses acceptions. En Théologie, il signifie ceux à qui une vie pure & exempte de toutes souillures, ouvre le royaume des cieux. Qui pourroit peindre l'étonnement de l'ame, lorsque la mort venant à déchirer tout-à-coup le voile qui l'environne dans un corps mortel, & à rompre tous les biens qui l'y attachent, elle est admise à la vision claire & intuitive de la divinité ! là se dévoilent à ses yeux les profondeurs incompréhensibles de l'Etre divin, la grandeur ineffable de son unité, & les richesses infinies de son essence : là disparoissent les contradictions apparentes des mysteres dont la hauteur étonne notre raison, & qui sont enveloppés & comme scellés pour nous dans les Ecritures : là s'allume dans l'ame cet amour immense, qui ne s'éteindra jamais, parce que l'amour divin sera son aliment éternel. V. PARADIS, VISION INTUITIVE.
Le terme de bienheureux est aussi pris pour ceux à qui l'Eglise décerne dans ses temples un culte, subordonné néanmoins à celui qu'elle rend à ceux qu'elle a canonisés. La béatification est un degré pour arriver à la canonisation. Voyez ces articles.
Bienheureux se dit, en Morale, de ceux qui coulent dans une heureuse tranquillité, des jours purs & exempts de nuages & de tempêtes, voy. BONHEUR : ou plûtôt bienheureux s'applique à des évenemens particuliers ; heureux à tout le système de la vie. On est bienheureux d'avoir échappé à tel danger ; on est heureux de se bien porter. (X)
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BIENS | en termes de Jurisprudence, & sur-tout dans le Droit civil, sont toutes sortes d'effets, richesses, terres, possessions, &c. Voyez EFFET.
1°. Il y a deux sortes de biens ; les meubles, & les immeubles. Voyez MEUBLE & IMMEUBLE.
Les droits incorporels qui en effet ne sont ni meubles ni immeubles, se rapportent eux-mêmes à l'une ou l'autre de ces deux classes, suivant les divers rapports qu'ils ont avec les meubles ou les immeubles corporels : ainsi la faculté de reméré est une action immobiliaire, parce qu'elle tend à l'acquisition d'un immeuble ; au lieu qu'un billet ou une obligation est réputée meuble, parce qu'elle a pour objet une somme de deniers qui est mobiliaire.
2°. Les biens se divisent encore en propres, paternels, héréditaires, ou de patrimoine ; en acquêts, ou biens acquis, & en conquêts. Voyez PROPRE, ACQUET & CONQUET.
Les biens se divisent encore en corporels & incorporels, voyez CORPOREL, & INCORPOREL, & enfin en biens nobles, & en roturiers. Voyez NOBLE, ROTURIER, &c.
BIENS adventices, sont tous ceux qui procedent d'ailleurs que de succession de pere ou de mere, d'ayeul, ou d'ayeule. Voyez ADVENTICE.
BIENS dotaux, dotalia, sont ceux qui procedent de la dot, & dont l'aliénation n'est pas permise au mari. Voyez DOT.
BIENS de fugitifs, sont les biens propres d'un homme qui se sauve pour crime, & qui après sa fuite dûement prouvée & constatée, appartiennent au roi, ou au seigneur du manoir. Voyez FUGITIF.
BIENS paraphernaux, sont ceux desquels la femme donne la joüissance à son mari, à condition de les retirer quand il lui plaît. Voyez PARAPHERNAUX.
BIENS profectices, sont ceux qui viennent de la succession directe. Voyez PROFECTICE.
BIENS vacans, sont ceux qui se trouvent abandonnés, soit parce que les héritiers y renoncent, ou que le défunt n'a point d'héritier. Voyez VACANT. (H)
* On distribue encore les biens en biens de ville & biens de campagne : les biens de ville sont les maisons de ville, les marchandises, les billets, l'argent, &c. Les biens de campagne sont les rentes seigneuriales, les champarts, les dixmes inféodées, les rentes foncieres, &c. les terres labourables, les vignes, les prés, les bois, & les plants. Voyez MAISON, MARCHANDISE, &c. Voyez RENTE, CHAMPART, &c. Voyez TERRES LABOURABLES, VIGNES, &c. (H)
* BIEN, (homme de) homme d'honneur, honnête homme. (Gramm.) Il me semble que l'homme de bien est celui qui satisfait exactement aux préceptes de sa religion ; l'homme d'honneur, celui qui suit rigoureusement les lois & les usages de la société ; & l'honnête homme, celui qui ne perd de vue dans aucune de ses actions les principes de l'équité naturelle : l'homme de bien fait des aumônes ; l'homme d'honneur ne manque point à sa promesse ; l'honnête homme rend la justice, même à son ennemi. L'honnête homme est de tout pays ; l'homme de bien & l'homme d'honneur ne doivent point faire des choses que l'honnête homme ne se permet pas.
* BIEN, TRES, FORT, (Gramm.) termes qu'on employe indistinctement en françois, pour marquer le degré le plus haut des qualités des êtres, ou ce que les Grammairiens appellent le superlatif : mais ils ne désignent ce degré ni de la même maniere, ni avec la même énergie. Très me paroît affecté particulierement au superlatif, & le représenter comme idée principale ; comme on voit dans le Très-haut, pris pour l'Etre suprème. Fort, marque moins le superlatif, mais affirme davantage : ainsi quand on dit il est fort équitable, il semble qu'on fasse autant au-moins d'attention à la certitude qu'on a de l'équité d'une personne, qu'au degré ou point auquel elle pousse cette vertu. Bien, marque encore moins le superlatif que très ou fort : mais il est souvent accompagné d'un sentiment d'admiration, il est bien hardi ! Dans cette phrase, on désigne moins peut-être le degré de la hardiesse, qu'on n'exprime l'étonnement qu'elle produit. Ces distinctions sont de M. l'abbé Girard. Il remarque de plus que très est toûjours positif ; mais que fort & bien peuvent être ironiques ; comme dans, c'est être fort sage que de quitter ce qu'on a pour courir après ce qu'on ne sauroit avoir ; c'est être bien patient que de souffrir des coups de bâton sans en rendre : mais je crois que très n'est point-du-tout incompatible avec l'ironie, & qu'il est même préférable à bien & à fort en ce qu'il la marque moins. Lorsque fort & bien sont ironiques, il n'y a qu'une façon de les prononcer ; & cette façon étant ironique elle-même, elle ne laisse rien à deviner à celui à qui l'on parle. Très, au contraire, pouvant se prononcer quand il est ironique, comme s'il ne l'étoit pas, enveloppe davantage la raillerie, & laisse dans l'embarras celui qu'on raille.
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BIENSÉANCE | S. f. en Morale. La bienséance en général consiste dans la conformité d'une action avec le tems, les lieux, & les personnes. C'est l'usage qui rend sensible à cette conformité. Manquer à la bienséance, expose toûjours au ridicule, & marque quelquefois un vice. La crainte de la gêne fait souvent oublier les bienséances. Bienséance ne se prend pas seulement dans un sens moral ; on dit encore dans un sens physique, cette piece de terre est à ma bienséance, quand son acquisition arrondit un domaine, embellit un jardin, &c. Malheur à un petit souverain dont les états sont à la bienséance d'un prince plus puissant.
BIENSEANCE, s. m. terme d'Architecture. On se sert de ce nom d'après Vitruve, pour exprimer l'aspect d'un édifice dont la décoration est approuvée, & l'ordonnance fondée sur quelque autorité : c'est ce que nous appellons convenance. Voyez CONVENANCE ; voyez aussi ASPECT. (P)
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BIENTENANT | terme de Palais, synonyme à possesseur ou détenteur. Voyez l'un & l'autre. (H)
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BIENVEILLANCE | S. f. (Morale) La bienveillance est un sentiment que Dieu imprime dans tous les coeurs, par lequel nous sommes portés à nous vouloir du bien les uns aux autres. La société lui doit ses liens les plus doux & les plus forts. Le principal moyen dont s'est servi l'auteur de la nature pour établir & conserver la société du genre humain, a été de rendre communs entre les hommes leurs biens & leurs maux, toutes les fois que leur intérêt particulier n'y met point obstacle. Il est des hommes en qui l'intérêt, l'ambition, l'orgueil, empêchent qu'il ne s'éleve de ces mouvemens de bienveillance. Mais il n'en est point qui n'en portent dans le coeur les semences prêtes à éclorre en faveur de l'humanité & de la vertu, dès qu'un sentiment supérieur n'y fait point d'obstacle. Et s'il étoit quelqu'homme qui n'eût point reçû de la nature ces précieux germes de la vertu, ce seroit un défaut de conformation, semblable à celui qui rend certaines oreilles insensibles au plaisir de la musique. Pourquoi ces pleurs que nous versons sur des héros malheureux ? avec quelle joie les arracherions-nous à l'infortune qui les poursuit ! leur sommes-nous donc attachés par les liens du sang ou de l'amitié ? Non certainement ; mais ce sont des hommes & des hommes vertueux. Il n'en faut pas davantage pour que ce germe de bienveillance que nous portons en nous-mêmes, se développe en leur faveur. (X)
BIENVEILLANCE, (Hist. mod.) terme usité dans les statuts & dans les chroniques d'Angleterre, pour signifier un présent volontaire que les sujets sont à leur souverain, chacun y contribue à proportion de sa fortune. Voyez SUBSIDE & TAXE.
La bienveillance prise dans ce sens, équivaut à ce que les autres nations appellent subsidium charitativum, que les tenanciers payent quelquefois à leur seigneur, le clergé aux évêques.
En France on appelle ce secours don gratuit. Dans les besoins de l'état, le clergé assemblé soit ordinairement, soit extraordinairement, accorde au roi un don gratuit indépendamment des décimes & autres impositions dont il est chargé, & le recouvrement de ces sommes est reparti sur les provinces ecclésiastiques. Dans les provinces d'états, outre les subsides ordinaires, à la tenue des états on accorde aussi au roi un don gratuit plus ou moins fort, selon les circonstances. Voyez AIDES. (G)
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BIERE | S. f. espece de boisson forte ou vineuse, faite, non avec des fruits, mais avec des grains farineux. On en attribue l'invention aux Egyptiens. On prétend que ces peuples, privés de la vigne, chercherent dans la préparation des grains dont ils abondoient, le secret d'imiter le vin, & qu'ils en tirerent la biere. D'autres en font remonter l'origine jusqu'aux tems des fables, & racontent que Cerès ou Osiris en parcourant la terre, Osiris pour rendre les hommes heureux en les instruisant, Cerès pour retrouver sa fille égarée, enseignèrent l'art de faire la biere aux peuples à qui, faute de vignes, elles ne purent enseigner celui de faire le vin : mais quand on laisse-là les fables pour s'en tenir à l'histoire, on convient que c'est de l'Egypte que l'usage de la biere a passé dans les autres contrées du monde. Elle fut d'abord connue sous le nom de boisson pélusienne, du nom de Peluse, ville située proche l'embouchure du Nil, où l'on faisoit la meilleure biere. Il y en a eu de deux sortes : l'une que les gens du pays nommoient zythum, & l'autre carmi. Elles ne différoient que dans quelque façon, qui rendoit le carmi plus doux & plus agréable que le zythum. Elles étoient, selon toute apparence, l'une à l'autre, comme notre biere blanche à notre biere rouge. L'usage de la biere ne tarda pas à être connu dans les Gaules, & ce fut pendant long-tems la boisson de ses habitans. L'empereur Julien, gouverneur de ces contrées, en a fait mention dans une assez mauvaise épigramme. Au tems de Strabon, la biere étoit commune dans les provinces du Nord, en Flandre, & en Angleterre. Il n'est pas surprenant que les pays froids où le vin & le cidre même manquent, ayent eu recours à une boisson faite de grain & d'eau ; mais que cette liqueur ait passé jusqu'en Grece, ces beaux climats si fertiles en raisin, c'est ce qu'on auroit de la peine à croire, si des auteurs célebres n'en étoient garans. Aristote parle de la biere & de son ivresse ; Théophraste l'appelle , vin d'orge ; Eschyle & Sophocle, . Les Espagnols bûvoient aussi de la biere au tems de Polybe. Les étymologies qu'on donne au mot biere sont trop mauvaises pour être rapportées ; nous nous contenterons seulement de remarquer qu'on l'appelloit aussi cervoise, cervitia. Quant à ses propriétés, ses especes, & la maniere de la faire, voyez l'article BRASSERIE.
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BIERNEBURG | (Géog.) ville de la Livonie.
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BIERVLIET | (Géog.) forteresse avec port dans une île de la Flandre hollandoise, à peu de distance de l'Ecluse. Long. 21. 12. lat. 51. 25.
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BIES-BOS | (Géog.) on nomme ainsi une grande étendue d'eau formée autrefois par une inondation de la mer ; elle est entre Dordrecht & Gertruydemberg, dans la Hollande méridionale.
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BIES-SCAD | (Géog.) c'est une partie des monts Krapacks, qui séparent la Russie d'avec la Transylvanie.
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BIESE | (Géog.) riviere d'Allemagne, dans la vieille marche de Brandebourg, qui se jette dans l'Aland.
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BIESENTHAL | (Géog.) petite ville entre Berlin & Bernau.
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BIESSEN | (Géog.) ville de la haute Alsace, à peu de distance du Rhin.
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BIETALA | (Géog.) ville & forteresse de la grande Tartarie, sur les frontieres du royaume de Barantola ; c'est le lieu de la résidence du grand lama, ou pontife des Tartares.
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BIETIGHEIM | (Géog.) petite ville avec un château, sur l'Ens, dans le duché de Wirtemberg.
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BIEVRE | Voyez CASTOR.
BIEVRE, oiseau. Voyez HARLE. (I)
* BIEVRE, (Géog.) petite riviere de l'île de France, qui se jette dans la Seine près de Paris.
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BIEZ | S. m. (Arts méchaniq. & hydrauliq.) est un canal élevé & un peu biaisé, qui conduit les eaux pour les faire tomber sur la roue d'un moulin ; sa figure qui approche d'une biere, fait croire que son nom en est tiré.
On appelle arriere-biez, les canaux qui sont au-delà en remontant. (K)
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BIFERNO | (Géog.) riviere du royaume de Naples, dans le comté de Molise ; elle se jette dans le golfe de Venise.
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BIFFER | en termes de Palais, & même dans le langage ordinaire, est synonyme à rayer ou effacer. (H)
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BIFORMIS | adj. (Mythol.) épithete que l'on donnoit à Bacchus, parce qu'on le représentoit tantôt jeune tantôt vieux, avec de la barbe ou sans barbe ; à moins qu'on n'aime mieux la faire venir des effets du vin, qui rend les uns tristes & furieux, les autres aimables & gais.
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BIFRE | Voyez CASTOR. (I)
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BIGAME | adj. pris subst. (Droit canoniq.) qui a été marié deux fois, du grec , dont la racine est , se marier.
Selon la discipline la plus constante de l'Eglise, les bigames sont irréguliers & inhabiles à être promûs aux ordres sacrés ; ils ne peuvent pas même exercer les fonctions des ordres mineurs, selon le concile de Girone.
On a quelquefois donné le nom de bigames à ceux qui ont épousé une veuve, une femme publique ou une femme répudiée ; & ils n'étoient pas moins censés irréguliers, que ceux qui avoient épousé successivement deux femmes, parce qu'on pensoit qu'une espece d'incontinence dans une veuve qui convole, ou le deshonneur certain de la femme, rejaillissoit sur le mari. Harmenopule met au nombre des bigames, ceux qui après s'être fiancés à une fille, contractent mariage avec une autre, ou épousent la fiancée d'un autre homme. S. Thomas décide que l'évêque peut dispenser de la bigamie pour les ordres mineurs & les bénéfices simples : mais Sixte V. & le concile de Trente ont décidé le contraire. Les clercs qui contractent un mariage après avoir reçû les ordres sacrés, sont aussi appellés bigames par ressemblance, quoiqu'il n'y ait point de véritable mariage. Le pape Alexandre III. permet de rétablir dans les fonctions de leur ordre ceux qui sont tombés dans cette faute, après la leur avoir fait expier par une longue & rigoureuse pénitence. Thomass. discipl. de l'égl. part. I. liv. II. ch. viij. & part. IV. liv. II. ch. xx. Le terme bigame se prend encore dans un autre sens. Voy. BIGAMIE. (G)
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BIGAMIE | S. f. (Jurisp.) est la possession de deux femmes vivantes en même tems, contractée par le mariage. Voyez MARIAGE.
Ceux qui étoient convaincus de bigamie chez les Romains, étoient notés d'infamie ; & anciennement ils étoient punis de mort en France. V. POLYGAMIE.
Ce terme, en Droit, s'entend aussi de deux mariages successifs, ou du mariage de celui qui épouse une veuve. Ce sont, selon les canonistes, deux empêchemens de parvenir aux ordres ou à un évêché, à moins qu'on n'en ait dispense. Ce point de discipline est fondé sur ce que dit S. Paul, qu'un évêque n'ait qu'une seule femme. I. Timoth. iij. 2. Apost. const. 17. 18.
Il y a deux sortes de bigamie ; la réelle, quand un homme se marie deux fois ; & l'interprétative, quand un homme épouse une veuve ou une femme débauchée ; ce qui est regardé comme un second mariage. C'est pourquoi le P. Doucine distingue & remarque qu'Irenée ayant été marié deux fois, doit avoir été en ce sens coupable de bigamie, & qu'il fut évêque de Tyr, contre la disposition expresse des canons. Il montre, avec S. Jérôme, que ceux qui épousent deux femmes, après qu'ils ont été baptisés, sont bigames : mais S. Ambroise & S. Augustin disent expressément que celui-là est bigame, qui épouse une femme qui avoit déjà été mariée, soit avant, soit après le baptême. Hist. du Nestorianisme.
Les canonistes prétendent même qu'il y a bigamie qui opere l'irrégularité, si un homme, après que sa femme est tombée en adultere, a commerce avec elle, ne fût-ce qu'une fois.
Il y a une autre sorte de bigamie par interprétation, comme quand une personne, qui est dans les ordres sacrés, ou qui s'est engagée dans quelque ordre monastique, se marie. Le pape en peut dispenser, du moins y a-t-il des occasions où il le fait. Il y a aussi une sorte de bigamie spirituelle, comme quand une personne possede deux bénéfices incompatibles, comme deux évêchés, deux cures, deux chanoineries, sub eodem tecto, &c. (H)
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BIGARRADIER | S. m. (Jardinage) est une espece d'oranger, dont les fruits d'un goût amer, que l'on appelle bigarrades, sont chargés de cornes & d'excroissances : la maniere de les élever & de les cultiver est la même que pour les orangers. (K)
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BIGARRÉ | adj. en termes de Blason, se dit du papillon & de tout ce qui a diverses couleurs.
Ranerolles en Picardie, de gueules à un papillon d'argent, miraillé & bigarré de sable. (V)
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BIGARREAU | BIGARREAUTIER, cerasa duracina ; c'est une espece de cerisier. Voyez CERISIER. (K)
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BIGARRURE | DIVERSITE, VARIéTé, DIFFéRENCE, (Gramm.) tous ces termes supposent pluralité de choses comparées entr'elles. La différence suppose une comparaison de deux ou plusieurs choses, entre lesquelles on apperçoit des qualités communes à toutes, par lesquelles elles conviennent, & des qualités particulieres à chacune & même peut-être opposées, qui les distinguent. Diversité, marque assemblage ou succession d'êtres differens & considérés sans aucune liaison entr'eux. Cet univers est peuplé d'êtres divers. Variété, se dit d'un assemblage d'êtres différens, mais considérés comme parties d'un tout, d'où leur différence chasse l'uniformité, en occasionnant sans-cesse des perceptions nouvelles. Il regne entre les fleurs de ce parterre une belle variété. Bigarrure ne differe de variété, que comme le bien & le mal ; & il se dit d'un assemblage d'êtres différens, mais considérés comme des parties d'un tout mal assorti & de mauvais goût. Quelle différence entre un homme & un autre homme ! Quelle diversité dans les goûts ! quelle bigarrure dans les ajustemens !
BIGARRURES, s. f. (en Fauconnerie) sont des taches rousses ou noires, ou des diversités de couleur, qui rendent le pennage d'un oiseau de proie bigarré ; on dit ce faucon a beaucoup de bigarrures.
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BIGE | S. m. (Hist. anc.) chariot à deux chevaux de front. Les Romains le nommoient bijuga, parce que les deux chevaux y étoient unis par le même joug. La course des chars à deux chevaux fut introduite dans les jeux olympiques en la XCIII. olympiade ; mais l'invention en étoit beaucoup plus ancienne : puisque dans l'Iliade les héros combattent sur ces sortes de chars. (G)
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BIGEN | (Géog.) royaume & ville dépendans de l'empire du Japon, dans l'île de Niphon.
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BIGENIS | (Géog.) ville de Sicile, dans le val de Démona, sur la riviere de Castro-réale.
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BIGNE | ou BEIGNET, s. m. (Pâtissier) sorte de pâtisserie friande qui se fait de la maniere suivante. Prenez un litron de fleur de farine, six oeufs, de l'eau, ou de la biere ou du lait, la valeur d'un demi-septier ; délayez le tout ensemble ; ajoûtez du sel convenablement ; prenez des pommes de reinette, une demi-douzaine des plus belles ; pelez les ; coupez-les par ruelles ; ôtez les pepins & la pépiniere ; trempez vos ruelles dans la pâte, ayez du sain-doux fondu tout prêt ; jettez vos ruelles de pommes enduites de pâte dans le sain-doux ; faites cuire ; saupoudrez de sucre, & servez. Il y en a qui mettent le sucre dans la pâte.
On peut se passer de pommes, & faire des beignets avec la pâte seule, dont on enduit les tranches de pommes. Au reste, il y a une infinité de façons de faire des beignets.
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BIGNONE | S. f. (Hist. nat.) bignonia, genre de plante, dont le nom a été dérivé de celui de M. l'abbé Bignon, bibliothécaire du roi. La fleur des plantes de ce genre est monopétale irréguliere en forme de tuyau ouvert par les deux bouts, & ressemblante aux fleurs labiées. Le pistil sort du calice & est attaché comme un clou à la partie postérieure de la fleur. Ce pistil devient dans la suite un fruit ou une silique partagée en deux loges par une cloison mitoyenne, & remplie de semences applaties pour l'ordinaire, & garnie de deux aîles membraneuses. Tournefort, Inst. rei herb. Voyez PLANTE. (I)
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BIGONZO | (Hist. mod. Commerce) on nomme ainsi à Venise une mesure de vin qui y est en usage ; le bigonzo contient 4 quarti ou 16 secchi, ou environ 63 livres de liquide : mais lorsqu'il s'agit d'eau-de vie, un bigonze ne vaut que 14 secchi ou 56 livres.
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BIGORNE | S. f. (dans les Arts méchaniques en métaux, comme fer, cuivre, argent, or, acier, &c.) c'est tantôt la partie d'une enclume, tantôt une enclume dont le corps est long & menu ; à sa partie supérieure sont deux branches qui font une espece de T avec le corps ; une de ces branches ou bras est en cone, & l'autre en pyramide. Son pié dont la partie supérieure est en embase, se termine en pointe & se fiche dans un billot sur lequel la bigorne est posée. Le milieu d'entre les branches forme une table quarrée, qui fait la fonction d'enclume. Il y a des bigornes de différentes grosseurs. Les grosses servent à tourner & contourner à chaud les grosses pieces de fer, qui ne peuvent recevoir la forme circulaire sur la bigorne de l'enclume ; parce que le corps de l'enclume qui lui sert de base est trop gros. Les petites bigornes qui se posent sur les établis servent à tourner & contourner à froid les petites pieces. Voyez nos Pl. d'Orfévre, de Coutelier, de Serrurier, de Taillandier, & vous y trouverez des enclumes à bigornes, & des bigornes séparées en cent endroits.
BIGORNE de Charron : cette bigorne n'a rien de particulier ; elle est placée sur un billot de bois, & sert aux Charrons pour former les têtes de vis, quand ces têtes sont percées, & d'autres ouvrages de la même nature.
BIGORNE à chantepure, outil de Ferblantier ; c'est une bigorne qui n'a qu'une gouge longue d'environ quatorze ou quinze pouces, grosse à la base d'un bon pouce, & finissant en pointe ; cette bigorne sert aux Ferblantiers pour arrondir & former en cone la queue d'une chantepure. Voyez la fig. 7. Pl. du Ferblantier.
BIGORNE grosse, autre outil de Ferblantier. Cette bigorne n'a qu'une gouge : mais cette gouge est ainsi que la précédente, grosse de six pouces, longue de deux piés, & sert aux Ferblantiers pour forger en cone les marmites & les grosses caffetieres. Voyez Pl. du Ferblantier fig. 9.
BIGORNE, autre outil de Ferblantier ; c'est un morceau de fer monté par le milieu sur un pivot aussi de fer, de façon que la bigorne forme deux bras, dont l'un est rond, & l'autre est à vive quarre, c'est-à-dire plat. Les Ferblantiers s'en servent à différens usages de leur métier : au milieu de cette bigorne est aussi percé un trou qui sert pour river ; & il y a vers la partie quarrée plusieurs entailles un peu creuses faites dans le large de la bigorne, du côté plat ou à vive quarre, qui servent pour plier les bords d'une piece de fer-blanc. Voyez les fig. 5. 6. & 7. Pl. du Ferblantier, qui représentent trois sortes de bigornes.
La bigorne des Fourbisseurs est aussi une enclume à deux longs bras, finissant en pointe, & servant à tourner en rond les grosses pieces.
BIGORNE, Pl. XII. de l'Horlogerie, espece d'enclume, dont les Horlogers, les Orfévres & d'autres artistes se servent. La partie C de cet outil se met dans l'étau, & les cornes A B servent à forger des viroles ou des pieces courbées.
BIGORNE à noeuds, (en terme d'Orfévrerie) sont des bigornes sur lesquelles on restraint les noeuds d'une piece, voyez NOEUDS ; ses deux bras se terminent par un bouton recourbé en haut, sur lequel s'appuie la partie de la piece où l'on veut former le noeud.
BIGORNE à pot à l'eau & autres vaisseaux de la même espece ; c'est parmi les Orfévres en grosserie, une bigorne dont une des extrémités est un peu arrondie sur le dessus seulement, & forme un petit coude pour s'insinuer plus aisément dans le vaisseau pendant qu'on en retraint le ventre. L'autre extrémité est recourbée environ d'un pouce ; c'est sur celle-ci qu'on place les bouges qui sont trop petites pour être planées au marteau.
BIGORNE à tourner, (en terme d'Orfévre en grosserie) c'est une bigorne, dont l'extrémité de la même grosseur que le milieu, est arrondie à sa surface sur laquelle on courbe les dents des fourchettes, & autres ouvrages dont la concavité doit être uniforme. Il y a une infinité d'autres bigornes, & dont les noms varient selon les usages qu'on en fait : mais ce sont presque toutes des cones de fer ou d'acier, dont la base & la hauteur sont entr'eux dans une proportion déterminée par la nature de l'ouvrage qu'on doit travailler sur elles.
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BIGORNER | verb. act. c'est finir de préparer les pieces sur la bigorne, comme un anneau de clef, après qu'il a été percé. Cet anneau s'ouvre sur la bigorne ; ainsi des autres pieces semblables, ouvertes & circulaires.
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BIGORRE | (Géog.) comté en Gascogne, au pié des monts Pyrénées, qui le séparent de l'Aragon. Tarbe en est la capitale.
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BIGOT | adj. pris sub. (Hist. & Mor.) nom qu'on donnoit à une personne opiniâtrement attachée à une opinion. Ce mot vient de l'Allemand bey-Gott, ou de l'Anglois by-God, qui signifient également par Dieu.
Cambden rapporte une origine assez singuliere de ce mot : il dit que les Normands furent appellés bigots, à l'occasion du duc Raoul ou Rollon, qui recevant en mariage la princesse Gissa ou Giselle, fille de Charles le simple, roi de France, & avec elle l'investiture du duché de Normandie, refusa de baiser les piés du roi en signe de vasselage, à moins que le roi lui même ne l'aidât à faire cette action ; & que pressé de rendre l'hommage en la forme ordinaire, il répondit : no by God, non par Dieu ; & que de-là le roi prit occasion de l'appeller bigod ou bigot ; nom qui passa ensuite à ses sujets.
Dans un sens moral bigot est un terme odieux, qui signifie un faux dévot, une personne qui scrupuleusement attachée aux pratiques extérieures de la Religion, en viole les devoirs essentiels. (G)
BIGOT, en Marine, c'est une petite piece de bois percée de deux ou trois trous, par où l'on passe le bâtard pour la composition du racage : il y en a de différentes longueurs. Quelques-uns prononcent vigots ; & d'autres les appellent versaux ou berceaux. (Z)
BIGOT, (Commerce) en Italien bigontia ; mesure pour les liquides dont on se sert à Venise. Le bigot est la quatrieme partie de l'amphora, & la moitié de la botte. Il faut quatre quartes ou quartoni pour le bigot, & quatre trichaufera pour la quarte. Voyez AMPHORA. (G)
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BIGUBA | (Géog.) royaume de la Nigritie en Afrique, arrosée par le fleuve Niger.
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BIGUE | S. f. en Marine, c'est une grosse & longue piece de bois que l'on passe dans les sabords aux côtés des vaisseaux, lorsqu'il y a quelque chose à faire, soit pour les soûlever, soit pour les coucher.
BIGUES ; ce sont aussi les mâts qui soûtiennent celui d'une machine à mâter. (Z)
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BIGUER | BIGUER
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BIHAC | ou WIHICZ, (Géog.) ville forte de la Croatie, appartenante aux Turcs, sur la riviere d'Unna. Long. 33. 52. lat. 44. 35.
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BIHOREAU | S. m. (Hist. nat. Ornith.) ardea cinerea minor ; cet oiseau a le dos, le dessus de la tête, & le bec noirs ; le cou est de couleur cendrée ; la gorge & le ventre sont jaunes : il a une ligne blanche qui s'étend depuis les yeux jusqu'au bec, & une hupe qui pend derriere la tête, & qui est composée de trois plumes qui ont cinq pouces de longueur. Les aîles & la queue sont de couleur cendrée, & les pattes d'un verd jaunâtre. Willughby croit avoir vû en Hollande un petit oiseau de cette espece qui avoit été pris dans le nid ; les pattes étoient vertes, & dégarnies de plumes jusqu'à un pouce au-dessus de l'articulation ; le doigt extérieur tenoit au doigt du milieu à sa naissance par une membrane ; l'ongle du doigt du milieu étoit dentelé seulement du côté intérieur, comme dans le héron gris ; l'iris des yeux étoit d'un beau jaune ; les grandes plumes de l'aile étoient noires, & avoient la pointe blanche ; les plumes de la queue étoient d'un brun cendré, & elles avoient la pointe blanche ; les plumes du dos & du cou étoient noirâtres, à l'exception du tuyau qui étoit roux ; il y avoit sur le cou des bandes rousses assez larges ; les petites plumes de l'aîle avoient la pointe mêlée de blanc & de roux ; le menton étoit blanc ; le ventre avoit la même couleur, & étoit parsemé de taches noires ; les plumes de la gorge étoient en partie noires & en partie blanches, il est à croire que les couleurs de cet oiseau changent avec l'âge, comme celles des autres. Ses oeufs sont blancs. On a appellé cet oiseau nycticorax, parce qu'il fait entendre pendant la nuit des sons très-desagréables & très-discordans. Willughby, Ornith. Voyez OISEAU. (I)
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BIIS | S. m. (Commerce) poids tout ensemble & mesure dont on se sert sur la côte de Coromandel, aux Indes orientales. C'est la huitieme partie du man. Un biis contient cinq céers, & un céer vingt-quatre tols. Voyez MAN. (G)
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BIJON | S. m. (Hist. nat.) si l'on perce jusqu'au coeur avec une tariere l'arbre appellé melche, il en sort une liqueur qu'on peut substituer à la térébenthine, parce qu'elle a les mêmes propriétés : c'est cette liqueur qu'on appelle bijon.
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BIJOUTIER | S. m. le Bijoutier s'appelle aussi Joüaillier ; & c'est celui qui trafique de toutes sortes de pierreries, de petits & de jolis tableaux, de vases de porcelaine, &c. Les Bijoutiers prennent la saint Louis pour le jour de leur fête, & ne font qu'un corps avec les Orfévres. On est reçû Joüaillier-Bijoutier au Châtelet devant le Procureur du Roi, après avoir fait trois ans d'apprentissage. Voyez ORFEVRE.
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BIJOUX | en Droit, voyez BAGUES & JOYAUX.
BIJOUX, s. m. pl. on entend par ce terme tous les ouvrages d'Orfévrerie qui ne servent que d'ornement à l'homme ; comme tabatiere, pomme de canne, étui, flacon, tablettes, navette, panier à ouvrage, &c. cette partie n'étant qu'un talent de mode & de goût, ne peut avoir aucune regle fixe, que le caprice de l'ouvrier ou du particulier qui commande.
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BI | ou BILL, terme de Droit usité en Angleterre, qui signifie la déclaration par écrit d'un grief ou préjudice que le complaignant a souffert de la partie qu'il dénonce, ou la dénonciation d'un délit commis envers lui, par contravention à quelque loi ou reglement de l'état.
Ce bil ordinairement se présente au mylord chancelier, sur-tout lorsqu'il s'agit d'injures atroces faites à des personnes ayant jurisdiction : ce qui est établi par les reglemens qui concernent cette matiere. Ce bil contient l'exposition du fait & des dommages qui en résultent, avec la supplique d'une permission de procéder contre le défenseur, pour en obtenir la réparation civile. Voyez CHANCELIER & CHANCELLERIE.
Le bil, en Parlement, signifie un projet d'acte ou d'arrêté, contenant des propositions que l'on présente d'abord aux chambres, afin qu'elles y soient approuvées, & puis au roi, pour leur donner force de loi. Voyez PARLEMENT.
BIL de proscription, BIL d'appel, voyez l'art. PROSCRIPTION, APPEL. (H)
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BILAN | S. m. (Commerce) livre dont les Marchands, négocians & banquiers se servent pour écrire leurs dettes actives & passives.
Ce livre est du nombre de ceux qu'on appelle livres d'aides ou livres auxiliaires ; & il se tient en débit & en crédit, ainsi que le grand livre. On lui donne divers autres noms, comme livre des échéances, livre des mois ou des payemens, carnet. Voyez CARNET, LIVRE DES éCHEANCES, &c.
Autrefois les marchands, négocians & banquiers de Lyon, portoient sur la place du change un petit livret qu'ils appelloient bilan des acceptations, sur lequel ils écrivoient toutes les lettres de change qui étoient tirées sur eux à mesure qu'elles leur étoient présentées.
On appelle dans la même ville l'entrée ou l'ouverture du bilan, le sixieme jour du mois des payemens, jusqu'au dernier jour duquel mois inclusivement on fait le virement des parties ; chaque négociant écrivant de son côté sur son bilan les parties qui ont été virées. Le bilan que les négocians portent sur la place du change pour ce virement, s'appelle aussi carnet. Voyez CARNET & VIREMENT.
Si un marchand ou négociant qui a coûtume de porter son bilan sur la place, ne s'y trouvoit pas au tems des payemens ordinaires, & sans cause légitime, il seroit réputé avoir fait faillite : & lorsqu'en cas de faillite il veut s'accommoder avec ses créanciers, il doit leur présenter son bilan, c'est-à-dire un état au vrai de ses affaires.
Bilan se dit encore de la solde du grand livre ou d'un compte particulier, ou de la clôture d'un inventaire, mais improprement ; on se sert mieux du terme de balance. Voyez BALANCE. (G)
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BILBAO | (Géog.) ville capitale & port de Biscaye, à l'embouchure du Nervio qui s'y jette dans l'Océan, appellé en cet endroit mer de Biscaye. Il s'y fait un très-grand commerce. Long. 14. 30. lat. 43. 23.
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BILBE | ou BERBER, (Géog.) ville de Perse dans la province de Segistan, à la source de la riviere d'Ilmentel.
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BILBOQUET | S. m. terme d'ouvrier de Bâtiment ; ils appellent ainsi les petits carreaux de pierre, qui ayant été sciés dans une pierre tendre, ou tranchés dans une pierre dure, restent dans le chantier, & ne sont propres qu'à faire du moilon.
Ils donnent encore ce nom aux moindres carreaux de pierre provenant des démolitions d'un vieux bâtiment. (P)
BILBOQUET, en terme de Doreur, est un morceau d'étoffe fine attaché à un petit morceau de bois quarré, pour prendre l'or & le mettre dans les endroits les plus difficiles, comme dans les filets quarrés, dans les gorges & les autres lieux creux. Voyez Pl. du Doreur, fig. 17.
BILBOQUET, à la monnoie, est un morceau de fer en forme d'ovale, très-allongé, comme on le voit en A B, Pl. V. fig. 2. au milieu duquel est un cercle en creux de la grandeur du flanc que l'on veut ajuster, & au centre un petit trou E, pour repousser le flanc en-dehors, lorsque le flanc se trouve trop attaché au bilboquet. Il est facile de concevoir le reste de cet instrument, qui n'a rien que de très-simple.
Il y a autour d'une longue table une quantité de bilboquets, où les tailleresses & les ajusteurs liment les flancs. Voyez AJUSTEUR & TAILLERESSES.
BILBOQUET, terme d'Imprimerie : on designe par ce mot certains petits ouvrages de ville qui s'impriment, tels que les billets de mariage, de bout-de-l'an, ou adresses de marchands, avis au public, &c.
BILBOQUET ; c'est chez les Paumiers la partie A de l'instrument appellé chevre, fig. 15. cette partie est fixée perpendiculairement sur le banc B : son sommet est tourné en globe, dont la partie supérieure est concave. C'est dans cette concavité que le paumier frappe sa balle, l'arrondit, & la forme quand il l'a faite. Voyez CHEVRE.
BILBOQUET ou MOULE ; c'est un instrument dont les Perruquiers se servent pour friser les cheveux qu'ils destinent à faire des perruques. Cet instrument est un morceau de bois tourné, long d'environ deux pouces, arrondi par les extrémités : il est de la grosseur du pouce par les deux bouts, & un peu plus menu par le milieu : c'est sur ce milieu qu'on roule les cheveux pour les friser. Voyez la Planche du Perruquier.
BILBOQUET, (jeu) petit bâton tourné, avec une cavité à chacun de ses bouts ; on jette en l'air une petite boule attachée à un fil qui tient au milieu du bilboquet, & on tâche de la faire retomber & rester dans une des deux cavités.
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BILE | dans l'économie animale, est une liqueur jaune & amere, séparée du sang dans le foie, & portée par les pores biliaires dans le conduit hépatique, & dans la vésicule du fiel, & ensuite déchargée par le conduit commun ou canal cholidoque, dans le duodenum. Voyez FOIE, &c. Ce mot vient du latin bilis, que quelques-uns font venir du grec , violence ; parce que les gens bilieux sont sujets à la colere ; d'autres le font venir du latin bullire, bouillir.
On distingue deux sortes de bile, l'hépatique & la cystique : la premiere, plus particulierement appellée bile, est séparée immédiatement dans le foie, d'où elle est rapportée dans le conduit hépatique : la seconde appellée fiel, est séparée pareillement dans le foie d'où elle coule par le conduit cystique dans la vésicule du fiel. Voyez FIEL, VESICULE, PORE, &c.
Voici ce qui a donné lieu à cette distinction. Malpighi regardoit comme une des sources de la bile, les glandes de la vésicule du fiel, & du conduit cystique & hépatique. Bartholin a aussi décrit ces glandes, mais Reverhorst n'en a point fait mention, & Ruisch n'a représenté que quelques lacunes semblables à des cryptes, &c. Sylvius avoit autrefois affirmé que la bile étoit produite dans la vésicule par l'artere hépatique ; d'autres ont pensé avec Malpighi, que cette bile étoit séparée par les glandes de la vésicule du fiel : mais Seger a fait voir par expérience, que la vésicule reste vuide dans un chien vivant dont on a lié le canal cystique, ou qu'on n'y trouve que du mucus ; que rien ne coule des arteres dans la capacité vuide de la vésicule, qui a été encore trouvée vuide, quand le canal cystique obstrué, ou le foie skirrheux, ont empêché qu'il ne se fît une aussi abondante secrétion de bile qu'à l'ordinaire : desorte qu'il est probable que ces glandes séparent plûtôt un mucus qui enduit le tissu réticulaire de la vésicule, & le met à l'abri de l'acrimonie mordicante que la bile acquiert en croupissant. Reste donc que la bile qui se trouve dans la vésicule du fiel soit apportée par des conduits particuliers ou par le canal cystique. Il n'est pas douteux que ces conduits qu'on nomme hépati-cystiques ne se découvrent dans la plûpart des animaux : mais quant à la distinction qu'en fait Bianchi en cyst-hépatique, venant des principales branches du conduit hépatique, & s'insérant autour du cou de la vésicule, pour y porter la bile, & en hépati-cystiques, venant des plus petits rameaux du canal hépatique pour s'ouvrir çà & là au fond de la vésicule, & y porter la bile ; cette distinction ne paroît pas avoir lieu dans l'homme & dans les animaux semblables à l'homme. En effet, il est démontré qu'il n'y a pas de canal intermédiaire entre le conduit hépatique & la vésicule dans l'homme ni dans le chien ; car le souffle poussé par le canal cholidoque, ne change rien dans la vésicule, le canal cystique étant lié ; au lieu que dans le boeuf on la voit sur le champ s'élever, &c. La bile hépatique passe donc dans la vésicule du fiel par le conduit cystique, comme on peut le déduire de ce que nous venons de dire : par conséquent la différence qui s'observe entre la bile hépatique & la cystique, ne peut provenir que de ce que celle-ci reçûe dans la vésicule du fiel y séjourne ; la partie la plus fine s'en exhale ; le reste, comme il arrive à une huile legerement alkaline dans un lieu chaud, devient acre, se rancit, s'épaissit, devient plus amer, & d'une couleur plus foncée.
La vésicule ne touche point à l'estomac, mais au commencement du duodenum en descendant. Lorsque l'estomac distendu vient à occuper dans le bas-ventre qui est déjà très-rempli, un plus grand espace, il presse le foie, & le duodenum comprime la vésicule du fiel, & en exprime le suc qu'elle contient. Ainsi la bile coule de la vésicule dans le canal cholidoque par un chemin libre, & avec plus de facilité si l'homme est debout ; parce qu'alors le fond de la vésicule est supérieur.
On a crû que la bile ne se séparoit pas du sang, mais du chyle ; il n'y a pas de raison qui prouve ce sentiment. Il peut se faire qu'une portion du chyle passe dans les veines mésaraïques ; cependant la plus grande partie passe dans le réservoir & dans le canal thorachique : de plus dans les animaux qui meurent de faim, il se sépare une grande quantité de bile.
La bile est filtrée par les ramifications de la veine-porte, ou par celles de l'artere hépatique : les auteurs qui ont soûtenu que c'étoit des arteres que la bile se séparoit, n'ont apporté aucune raison que celle de l'analogie de toutes les autres sécrétions qui se font par des arteres. Il est constant que la bile vient de la veine-porte : car 1°. les ligatures qu'on a faites à l'artere hépatique, n'ont pas supprimé la filtration de la bile : 2°. les injections faites dans le foie par la veine-porte, sortent par le pore biliaire : mais celles que l'on fait par l'artere hépatique passent plus difficilement ; cependant il faut avoüer que la même difficulté ne s'oppose pas au souffle : 3°. il y a une étroite liaison entre les ramifications du canal biliaire & de la veine-porte : 4°. il y a une grande disposition entre les ramifications du canal biliaire & celles de l'artere hépatique, lesquelles sont moins grosses qu'elles ne devroient l'être à l'égard de l'assemblage des pores biliaires : 5°. la veine-porte a une conformation artérielle. Toutes ces raisons font voir que la bile se filtre dans les extrémités de la veine porte ; on pourroit ajoûter à tout cela, qu'en gonflant par le souffle la veine-porte, toutes les vésicules crevent, & l'air se glisse entre la membrane commune & la propre.
Pour savoir pourquoi la filtration de la bile se fait par des veines & non par des arteres, il faut examiner tout ce qui arrive au sang autour des intestins. 1°. Le sang est en trop grande quantité dans le mésentere, dans les parois du ventricule, dans la rate, dans le pancréas, &c. 2°. Le sang perd sa partie la plus fluide, qui s'échappe par les couloirs ; reste donc la partie rouge, la lymphe grossiere, & la matiere huileuse la moins ténue. 3°. Par des observations réitérées, nous pouvons prouver que lorsque dans ces circonstances ainsi détaillées, le sang est échauffé dans quelque couloir par son long séjour & par la lenteur du mouvement, il s'y forme une matiere gommeuse, savonneuse, pénétrante : il faut donc que cette matiere étant formée dans les parties qui envoyent leurs veines à la veine-porte, elle se sépare des veines, ou qu'elle rentre dans le sang artériel : or il est nécessaire pour dépurer le sang & pour la digestion, que cela n'arrive pas, donc il faut que les veines fassent la secrétion de la bile.
Il y a différentes opinions sur la maniere dont la bile est séparée dans le foie : quelques-uns croyent que les pores des glandes secrétoires du foie ont une certaine configuration & une certaine grandeur, à laquelle les parties de la bile qui coulent avec le sang sont proportionnées, de maniere qu'elles y sont admises, tandis que toutes les autres glissent par-dessus. D'autres avec Sylvius & Heister, ne trouvant aucune différence dans la configuration, & croyant que les pores de tous les vaisseaux sont circulaires ; & que toutes sortes de particules peuvent passer au-travers, si elles ne sont pas d'un volume trop considérable, ont eu recours à une autre hypothèse ; ils ont donc supposé qu'il y avoit un ferment dans le foie, par le moyen duquel les particules du sang qui passent à travers les conduits secrétoires, prenoient la forme de la bile : mais c'est résoudre une question par une nouvelle. D'autres ont eu recours à une autre hypothèse, & ont assûré que les différentes parties dont le sang de la veine-porte est composé, sont toutes appliquées aux ouvertures des canaux secrétoires qui se trouvent aux extrémités de la veine-porte & à celles de l'extrémité des ramifications de la veine-cave ; que les pores de la veine-cave étant trop petits, & ceux de la veine-porte assez grands pour admettre certaines parties, elles sont par ce moyen séparées des autres, & qu'exposées alors à l'action des vaisseaux biliaires, il en résulte une humeur différente du sang, que l'on appelle bile &c. Le docteur Keill pense que la secrétion de la bile vient d'une attraction violente entre les parties dont elle est composée ; & il observe que si l'artere coeliaque avoit porté au foie tout le sang destiné à la secrétion de la bile, la vîtesse du sang dans cette artere, par rapport à son peu de distance du coeur, auroit empêché la secrétion d'une humeur visqueuse, comme la bile : c'est pourquoi la nature a destiné la veine-porte à cet usage ; & c'est par elle que le sang est porté des branches des arteres mésentériques & coeliaques au foie ; en conséquence de quoi le sang a beaucoup de chemin à faire à-travers les intestins, l'estomac, la rate, & le pancréas, avant que de parvenir au foie. Ainsi la vitesse est extrèmement diminuée ; & les particules qui doivent former la bile, ont un tems suffisant pour s'attirer les unes les autres, & pour s'unir avant que d'arriver aux vaisseaux qui les séparent. Mais la nature prévoyante a encore cherché à diminuer cette vîtesse du sang, en rendant les capacités de tous les rameaux d'une artere prises ensemble plus grandes que celle de cette artere : ainsi la somme des branches produites par l'aorte, est à l'aorte comme 102740 à 100000 ; & même comme si cette proportion étoit encore insuffisante, elle a encore pris soin d'augmenter le nombre des branches de l'artere mésentérique. En effet si on examine ces branches dans un cadavre, on trouvera que la somme des branches est plus que le double de celle du tronc : c'est pourquoi la vîtesse du sang est moindre de moitié dans les branches que dans le tronc. Cet auteur montre encore par un autre calcul, que le sang est au moins 26 minutes à passer de l'aorte au foie ; au lieu que dans l'artere qui va directement de l'aorte au foie, il n'est guere plus que la moitié d'une seconde à faire ce chemin ; savoir le 2437e du tems qu'il met à son autre passage : d'où il paroit que le sang n'est pas en état de former la bile quand il court directement de l'aorte au foie, & qu'il falloit plus de tems, & un mouvement plus lent, pour pouvoir séparer les parties bilieuses. Il ajoûte que si les humeurs avoient existé dans les glandes en même qualité qu'on les trouve après la secrétion, la nature n'auroit pas tant travaillé pour retarder la vîtesse du sang. D'ailleurs la bile tire un autre avantage de l'usage de la veine-porte ; car en traversant tant de parties avant que d'arriver au foie, elle dépose beaucoup de sa lymphe ; & par ce moyen les particules etant forcées d'être plus proches les unes des autres, sont plus vivement unies. Tout cela est bien systématique.
Quant à la qualité de la bile qui se sépare dans le foie, nous ignorons, comme l'observe très-bien le docteur Haller, la vîtesse avec laquelle le sang du mésentere circule ; nous ignorons les causes qui peuvent le retarder ou l'accélérer : nous n'avons pas pour nous guider des diametres assez exactement pris, & qui soient assez constamment vrais, & toûjours les mêmes ; & par conséquent nous ne pouvons rien prononcer en général sur la quantité de bile qui se filtre par le foie dans un espace donné, sans risquer de nous tromper dans tous nos calculs.
Voyons maintenant les expériences que l'on a faites sur la bile.
On sait par expérience que la bile mêlée avec des acides, change elle-même de nature avec eux. La plûpart des esprits acides minéraux & le mercure sublimé coagulent la bile & la font diversement changer de couleur. Elle se dissout par les sels acides, si ce n'est dans certains animaux herbivores, dans lesquels il doit naturellement se trouver beaucoup d'acide ; & c'est peut-être pour cette raison que l'huile de tartre par défaillance coagule la bile cystique du boeuf, suivant Haller ; seul cas, à la vérité, où cette humeur m'ait paru contenir en soi un acide, qu'aucune autre épreuve ne développe & ne manifeste, & qui est apparemment si peu considérable, que la bile n'en corrige guere moins les qualités acescentes des herbes dont vivent ces animaux ; car d'ailleurs c'est un fait constant, que les autres alkalis, & principalement les alkalis volatils, augmentent les propres qualités de la bile, son goût, sa couleur, sa fluidité ; indice évident de l'affinité qui se trouve généralement entre la bile & les matieres alkalines. Mais que la bile soit mêlée avec de l'eau, ou qu'elle soit pure, le mêlange des sels même simples, la fait passer à-peu-près par les mêmes changemens, & à son tour elle ne communique pas moins ses vertus aux autres sucs qui se mêlent avec elle dans les intestins. Au contraire, l'eau servant de dissolvant à la bile, la rend plus propre à atténuer les huiles, la térébenthine, & tant d'autres corps gras, résineux, ennemis de l'eau, & à les diviser en une si grande ténuité, que tous ces corps qui ne pouvoient auparavant se mêler à l'eau, s'y unissent ensuite parfaitement. Ce n'est donc que par cette faculté de mêler les huiles avec l'eau, que cette humeur peut les détacher des corps auxquels elle adhéroit, & que le fiel de boeuf fait tout ce que le meilleur savon pourroit faire. Le savon commun est fait d'huile tirée par expression, & de sel fixe ; le savon de Starkey est composé d'huile distillée & de sel fixe ; enfin ce savon qui est communément connu sous le titre de soupe de Vanhelmont, est fait de sel alkali volatil, & d'huile très-atténuée. Or la bile est composée d'huile humaine, telle que notre sang la donne, & du sel qu'il fournit, qui est une espece de sel ammoniac volatil ; & par conséquent cette humeur approche plus du dernier savon que des autres, & doit agir comme un vrai savon humain. C'est une vérité que les Teinturiers mêmes n'ignorent pas : il y a long-tems qu'ils ont observé qu'ils ne pourroient jamais faire prendre la teinture aux laines récentes, parce qu'elles sont fort grasses, s'ils n'avoient soin auparavant de les laisser tremper dans une lessive urineuse & bilieuse, jusqu'à ce que tous les pores de la laine soient purgés en quelque sorte des matieres poisseuses & rances qui les bouchent ; & ils s'y prennent aussi de la même maniere, avant que de teindre les étoffes tachées d'huile, & principalement ces fils de soie qu'on tire des capsules glutineuses qui se trouvent dans la bouche des vers-à-soie ; parce qu'en effet la glu qui se prépare dans les petits vaisseaux intestinaux de ces capsules, enduit ces fils d'un liniment visqueux qui ne se marie point avec l'eau. La myrrhe, la résine, les gommes bdellium, sagapenum, opopanax, la gomme lacque, les peintures, les fards, toutes les matieres gluantes broyées avec de la bile sur une pierre de porphyre, se détrempent facilement dans l'eau ; & bien des choses qui seroient inutiles autrement, deviennent par cet art propres à dessiner, à farder, &c. Il y a long-tems qu'on a vû que le fiel de boeuf pouvoit être employé au lieu de gomme gutte pour les peintures fines : mais pour le mêler, il faut toûjours une certaine agitation. L'huile & l'eau sont deux corps plus pesans que la bile : de-là vient que sans quelque trituration, il n'est pas possible de les mêler tous trois ensemble ; mais le moindre broyement suffit pour faire ce mélange ; & les intestins n'en manquent pas, puisqu'ils ont un mouvement péristaltique très-propre à procurer ce broyement. Drelincourt a tiré de la bile 5/6 d'eau, 1/24 d'huile & de sel volatil, 1/192 de sel fixe. Pechlin, 11/12 d'eau ; Verheyen 4/3 d'eau, empreinte d'1/11 d'huile, 10/327 d'huile empyreumatique, point ou très-peu de sel volatil, de sel fixe impur 2/327 = à 1/163, de terre 2/109 : d'autres disent avoir tiré de la bile des esprits inflammables, des sels volatils en assez grande quantité, du soufre, un peu de sel fixe, & de la terre ; & après la putréfaction, des sels volatils & des esprits. Pourquoi n'ont-ils pas donné les poids exacts de chacune de ces matieres ? Baglivi parle aussi de beaucoup de sels volatils & fixes. Boerhaave ayant exposé à une chaleur douce une certaine quantité de bile cystique, observa qu'il s'en évapora les 3/4 de son poids sous la forme d'une eau ou d'une lymphe à peine fétide ou acre. Le résidu formoit une masse gluante, luisante, d'un jaune tirant sur le verd, amere, qui ne fermentoit ni avec les acides, ni avec les alkalis. Cette espece de glu distillée donna beaucoup d'huile, mais peu de sel volatil. De douze onces de bile, il sortit neuf onces d'eau, deux onces 1/2 d'huile, & un ou deux gros de sel fixe : ce qui revient à 1/4 d'eau, plus d'1/6 d'huile, & un ou 2/96 de sel. Les expériences sur lesquelles l'on peut compter, sont ici précisement celles qui s'accordent le mieux ensemble, & nous apprennent clairement que l'eau fait toûjours la plus grande portion de la bile, que l'huile est environ 1/6 de l'eau, le sel volatil 1/20 dans une bile récente & non putréfiée, l'huile empyreumatique 1/24, le sel fixe 1/123. Voyons si le savon ordinaire n'offriroit pas à peu près les mêmes proportions. Il est beaucoup plus acre que la bile ; le sel lixiviel & l'huile, sont en partie égale dans le savon. Supposons qu'on mette partie égale d'huile d'olive, ou autre ; & d'huile de tartre par défaillance, pour faire ce savon commun : ce qui feroit suivant Dale, une proportion triple de celle qui se trouve dans la bile ; & suivant Boerhaave, une proportion plus considérable : car de trois onces d'huile, on met cinq scrupules de sel fixe ; desorte que dans le savon, l'huile est au sel comme 1920 à 100 : mais dans la bile de l'homme, l'eau & l'huile comme 10 à 2 ; au sel, comme 72 à un, ou un peu moins. La bile avoit sans-doute besoin d'une grande quantité d'eau, pour ne pas former un vrai savon solide qui se coupât au couteau comme le savon ordinaire & dont on eût pû se servir sans le détremper. C'est en effet un savon, mais fluide, & tel en un mot, qu'il n'a besoin ni d'eau, ni d'un délayement étranger, pour tous les usages auxquels il est destiné par la nature. Remarquez que dans tout ce que nous avons dit, il ne s'agit que d'une bile fraîche & bien conditionnée, que la maladie n'a aucunement altérée, & que la putréfaction n'a pas changée : car si toutes les parties du corps humain solides ou liquides une fois corrompues donnent beaucoup de sel volatil, est-il surprenant que la bile naturellement plus alcalescente qu'aucun autre suc, fournisse une grande abondance de ce même sel ? Je ne doute pas que tant de contradictions qui se trouvent dans les auteurs au sujet de l'analyse chimique de la bile, ne viennent souvent de ce que les uns auront opéré sur une bile fraîche, & les autres sur une bile vieille & comme pourrie ; souvent aussi de l'inexactitude ou de l'ignorance des artistes ; pour ne rien dire de la mauvaise foi de ceux qui ont des systèmes favoris à protéger.
Huile. Le résidu de l'évaporation de la distillation de la bile est si huileux, qu'il en est inflammable. Les calculs de la vésicule du fiel prennent feu, & même se consument tout entiers. J'ai observé la même chose sur d'autres calculs sortis par les selles à la suite des violentes coliques duodénales & hépatiques, & qui conséquemment étoient faits d'une bile hépatique plus aqueuse, épaissie & putréfiée, soit dans le méat cholidoque, soit dans l'intestin. Homberg n'a-t-il pas tiré de la bile une graisse verte & solide ? Hartman n'a-t-il pas vû dans les cochons un globe de graisse à l'endroit de la vésicule ? enfin l'origine de la bile, qui est constamment l'huile de l'épiploon fondue, n'est-elle pas la preuve évidente de ce que nous avançons, pour ne pas répéter ici les expériences précedentes ?
Sel. Il s'en trouve très-peu dans la bile, & toûjours de diverse nature. L'un, suivant la nature du sel humain, a de l'affinité avec le sel ammoniac, dont il ne differe qu'en ce qu'il s'alkalise par la distillation seule : l'autre est un sel fixe terrestre ou mêlé de terre, comme on l'a déjà insinué. On ne découvre au microscope ni l'un ni l'autre, suivant le témoignage vérifié de Leuwenhoeck. L'amertume de la bile ne vient point de son sel, mais de son huile, qui à force d'être broyée & échauffée dans les vaisseaux qui la préparent, dans le tamis qui la filtre, & le réservoir qui la garde, devient rance & amere : ce qui est confirmé par les deux faits suivans. La bile du lion & des autres animaux féroces est très-amere, parce qu'elle subit dans leurs vaisseaux l'action de ressorts très-violens ; au lieu que dans les personnes sédentaires, & qui ont le sang doux, on la trouve le plus souvent aqueuse & insipide.
Les esprits de la bile sont une huile si atténuée, qu'elle coule comme l'eau & avec l'eau, qu'elle rend laiteuse, comme on l'a vû dans les expériences de Vieussens & de Verheyen. En effet, la blancheur du lait vient de l'huile étroitement unie à ses parties : aussi cette blancheur diminue & disparoît avec l'huile, comme le fait voir clairement la coagulation du lait, dont la sérosité dépouillée des parties huileuses qui font le beurre & le fromage, devient enfin verdâtre. Il y a de plus beaucoup d'air dans la bile. Un calcul de la vésicule du fiel, donne 648 fois plus d'air que son volume ; ceux de la vessie urinaire, comme un peu moins rares, ou plus compactes, en contiennent un peu moins : cela ne passe pas 645, suivant les expériences de Halles.
La bile est une liqueur très-importante pour l'économie animale. Le docteur Woodward, qui a observé très-exactement ses effets par tout le corps, ne fait pas difficulté d'attribuer plusieurs maladies à la mauvaise disposition de la bile : il la regarde comme une des principales sources de la vie de l'animal ; d'où il conclut qu'elle est le principe essentiel de la bonne ou mauvaise disposition du corps : mais les anciens ne la regardoient que comme un excrément inutile. Plusieurs des modernes, à cause de la petite quantité de la bile, ont cru faussement que cette sécrétion n'étoit pas la seule fonction à quoi un viscere aussi considérable que le foie, fût destiné. Le docteur Keill observe que dans un chien, dont le canal cholidoque étoit presque aussi gros que celui de l'homme, il se filtra environ deux dragmes de bile par heure : ainsi il est à croire que dans un homme il s'en doit séparer une plus grande quantité.
Il se trouve de la bile dans tous les animaux, même dans les pigeons, &c. qui n'ont point de vésicule du fiel, puisque leur foie est toûjours très amer. M. Tauvry remarque que la bile devient une des causes principales de la soif, en se mêlant avec la salive. Voyez SOIF.
Quelquefois la bile devient verdâtre, de jaune qu'elle étoit ; quelquefois de couleur de verd-de-gris pâle, semblable au jaune d'oeuf, & cela sans aucune autre cause apparente, qu'une émotion, une convulsion, ou un mouvement violent des esprits. Ces émotions causent de grandes maladies, comme le vomissement, le dégoût, la mélancholie, les soûpirs, les cardialgies ; des vents, la diarrhée, la dissenterie, les maladies aiguës, & des fievres très-dangereuses. Quelquefois la bile devient noire, & alors elle prend le nom de choler, & elle a le goût d'un vinaigre très-acide ; quelquefois elle ressemble à du sang pourri, qui corrode, brûle, détruit, dissout, occasionne des inflammations, des gangrenes, des mortifications, des douleurs vives, & des fermentations violentes. Boerhaave distingue trois sortes de bile noire : savoir 1°. la plus douce, provenant d'un mouvement trop violent du sang, d'où elle prend son nom d'aduste, ou bile brûlée. La seconde est dans un degré d'altération plus grand que la premiere, & vient des mêmes causes qui agissent avec plus de force. La troisieme est une bile corrompue & brûlée, qui si elle devient de couleur verdâtre ou pâle, est la plus mauvaise de toutes.
La trop grande évacuation de bile, soit par haut, ou par bas, ôte à la chylification son principal instrument, & par-là empêche la digestion, la secrétion & l'éjection des excrémens, occasionne des aigreurs, des frissons, des foiblesses, la pâleur, l'évanouissement ; & si, lorsque la bile est préparée, elle ne se décharge pas comme il faut dans les intestins, elle cause la jaunisse. Voyez JAUNISSE. (L)
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BILEDULGERID | (Géog.) l'une des cinq grandes contrées de l'Afrique ; elle est bornée au septentrion par la Barbarie, à l'orient par l'Egypte, à l'occident par la mer Atlantique, & au midi par les déserts de Zara. Elle est fertile en riz, en dattes, en chameaux, & en chevaux. Les habitans sont Mahométans & Juifs, & leurs rois sont tributaires de Tunis, d'Alger, & de Tripoli.
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BILHO | ou BILLON, (Géog.) petite ville de France, dans l'Auvergne. Long. 21. lat. 45. 36.
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BILIAIRE | adj. en Anatomie, nom d'un conduit qu'on appelle aussi hépatique, voyez HEPATIQUE : il est enveloppé avec la veine-porte dans un faisceau commun de nerfs & de petites membranes. Il est fait de diverses tuniques, l'externe, ensuite la cellulaire, dans laquelle rampent de petits vaisseaux qui partent des petits troncs voisins des arteres & des veines. Les fibres transverses dont parle Glisson, se dérobent presqu'à la vûe. La membrane interne est veloutée & semblable en général à la tunique réticulaire de la vésicule du fiel. Son tronc droit & antérieur est placé auprès de la veine-porte. Il monte en-devant & au-delà de la division de la veine-porte ; il se divise lui-même en deux rameaux, dont l'un à droite, l'autre à gauche, accompagnent toûjours la veine-porte, & donnent des rejettons qui escortent ses petits rameaux jusqu'à la fin & jusque dans les membranes des ligamens & de la vésicule du fiel, toûjours enveloppés de la membrane de Glisson, de laquelle tous les vaisseaux du foie tirent une membrane propre & commune. C'est pourquoi s'il y a cinq branches de la veine-porte, il y en a autant des principaux rameaux des pores biliaires. Haller, comment. Boerh.
Les pores biliaires sont des canaux qui ont leur source dans les glandes du foie ; ils s'unissent en plusieurs troncs d'une grandeur égale aux branches hépatiques & les accompagnent toutes à-travers la substance entiere du foie, enveloppés dans la même capsule que la veine-porte.
Ces branches sont grandes comme une paille de froment ; les plus grandes le sont assez pour contenir le petit doigt : on les peut distinguer de la veine-porte par ce qu'elles contiennent ; elles sont toujours pleines de bile. Outre la capsule qui leur est commune avec la veine-porte, chacune d'elle a une tunique épaisse & blanche, qui lui est propre, comme l'enveloppe musculeuse d'une artere.
Sur le côté concave du foie se rencontrent diverses ramifications, dont un seul tronc est formé : on le nomme aussi le canal ou proprement le pore biliaire ; il est de la grosseur d'une plume d'oie : il rencontre à deux pouces en descendant le conduit cystique, & forme avec lui ce que nous appellons ductus communis, qui descendant en ligne perpendiculaire d'environ quatre pouces, va se décharger dans le duodenum au moyen d'une insertion oblique, & souvent par la même ouverture que le conduit pancréatique.
Le pore biliaire communique avec la vésicule du fiel par un conduit que le docteur Glisson a le premier décrit ; Blaise & Perrault en ont parlé dans la suite : le dernier l'a nommé le conduit cyst-hépatique ; Verheyen en remarqua deux, trois ou quatre en des boeufs, & l'on dit qu'on a trouvé pareille chose dans un chien. V. CONDUIT CYST-HEPATIQUE. Quant à l'homme, les plus habiles anatomistes avouent n'avoir jamais rien apperçu de pareil. (L)
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BILIBERTO | (Géog.) ville d'Esclavonie, sur le Danube, à peu de distance d'Esseck.
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BILIEUX | EUSE, adj. qui abonde en bile ; une humeur bilieuse, un tempérament bilieux.
Il est aussi subst. les bilieux sont sujets à de grandes maladies. Voyez BILE & TEMPERAMENT. (L)
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BILIMBI | S. m. (Hist. nat. bot.) nom d'un petit arbre de la hauteur de huit à dix piés, appellé par Bontius billingbing, & par les botanistes Européens, malus Indica fructu pentagono. Il est commun dans les jardins du malabar ; il porte fleur & fruit toute l'année ; il est fecond depuis la premiere année de sa plantation, jusqu'à la quinzieme, & par-delà.
Bontius dit qu'on en fait un sirop qui est bon dans les maladies chaudes du foie, & dans l'intempérie inflammatoire du sang. On l'employe aussi dans la décoction du riz non pelé, comme un remede excellent dans les fievres ardentes & continues ; car il contribue beaucoup à étancher la soif, & à calmer l'effervescence de la bile. Le fruit étanche la soif, la racine excite le vomissement, la décoction des feuilles excite la sueur & fait sortir la petite vérole ; elle donne un bain salutaire dans les douleurs des membres. Ray, hist. plant. (N)
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BILI | ou BELIN, (Géog.) petite ville du royaume de Boheme.
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BILINA | (Géog.) lac & riviere de Suede, dans la province de Helsingland.
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BILINLOKA | (Géog.) ville de Moldavie.
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BILITZ | (Géog.) petite ville & château dans la haute Silésie, au point de rencontre de la Pologne, de la Hongrie, & de la Silésie.
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BILL | Voyez BIL.
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BILLARD | S. m. jeu d'adresse & d'exercice, qui consiste à faire rouler une balle d'ivoire pour en frapper une autre & la faire entrer dans des trous appellés belouses.
BILLARD, se dit aussi de la table sur laquelle les joüeurs s'exercent. Le billard est composé de quatre parties principales ; sçavoir, la table, le tapis, le fer, & les bandes. La table est quarrée, oblongue, garnie de quatre bandes ou rebords de bois, rembourrés de lisieres de drap, & couvertes d'un drap verd, attachées en-dessus avec des clous de cuivre. Aux quatre coins de la table & au milieu des longues bandes sont pratiqués des trous ou des belouses pour recevoir les billes ; & aux deux tiers de la longueur de la table vers le haut, est un fer appellé passe. Voyez TABLE, TAPIS, BANDE, PASSE, BELOUSE, BILLE.
Il est inutile de donner ici les regles du billard ; celles qui sont établies aujourd'hui se trouvent partout, & la nature de ce jeu n'empêche point qu'on n'en puisse instituer de toutes autres.
BILLARD, se dit aussi de la masse ou du bâton recourbé avec lequel on pousse les billes. Il est ordinairement de bois de gayac ou de cormier, garni par le gros bout ou d'ivoire ou d'os simplement. On peut même se passer de ces garnitures. On tient cet instrument par le petit bout, & l'on pousse la bille avec l'autre bout.
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BILLARDER | terme de jeu de Billard, qui signifie pousser les deux billes en même-tems avec la masse. Le joüeur qui billarde perd un point, c'est-à-dire, qu'on marque un point pour son adversaire, & le coup est nul, supposé qu'on ait mis la bille de son adversaire dans la belouse : mais il perd deux points, s'il y met les deux billes.
BILLARDER, v. n. (Manege) se dit d'un cheval lorsqu'en marchant il jette ses jambes de devant en-dehors.
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BILLE | poisson de mer. Voyez TOURD. (I)
BILLE, (Marine) éguillette d'escoit ou de coüet ; c'est un bout de menu cordage, où il y a une boucle & un noeud ; son usage est de tenir le grand coüet aux premiers des grands haubans lorsqu'il ne sert pas. (Z)
BILLE, les Chamoiseurs & les Maroquiniers appellent bille un morceau de bois ou de fer rond, qui a ordinairement un pouce & demi de diametre, & un pié & demi de longueur, dont ils se servent pour tordre les peaux, & en faire sortir toute la graisse, la gomme & l'eau, & qu'ils employent dans les différentes façons qu'ils ont à donner aux peaux. Voyez CHAMOIS.
BILLES à moulures, (termes d'Orfevre en tabatieres) ce sont des morceaux de fer plat, d'une ligne d'épaisseur tout au-plus, modelés dans le milieu, entre lesquels on tire la matiere où l'on veut faire des moulures.
BILLES, s. pl. (Oeconom. rustiq.) on donne le nom de billes, à la campagne, aux rejettons qu'on trouve aux piés d'un grand nombre d'arbres, & qu'on enleve pour les mettre en pépiniere : la méthode en est fort bonne.
BILLES, terme de Paumier : ce sont des petites boules d'ivoire de deux pouces ou environ de diametre, faites au tour & de même grosseur, avec lesquelles on joue au billard. Ces billes sont distinguées par de petits points pratiqués vers un des poles de la bille ; ces points servent à les faire reconnoître pendant le jeu.
BILLE, est un terme de Paumier, qui signifie un coup du jeu de billard, par lequel on fait entrer dans une belouse la bille de son adversaire, sans lui faire frapper les bandes.
BILLE, terme de riviere, petit bachot ou nacelle, que l'on attache avec un bout de cincenelle à la tête d'un bateau marnois dans les rivieres d'Amont-Paris, & dans lequel on met trois ou quatre compagnons de riviere, qui n'ont chacun que deux avirons.
* BILLE, (Géog.) petite riviere qui prend sa source entre le duché de Holstein & de Lawembourg, & forme avec un des bras de l'Elbe l'île de Billwerder.
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BILLER | (Marine) c'est attacher la corde qui sert à tirer les bateaux sur les rivieres, à une piece de bois courbe qui est derriere le cheval.
BILLER, se dit de la façon que les Chamoiseurs & les Maroquiniers donnent à leurs peaux en les tordant avec la bille. Voyez CHAMOIS.
BILLER, en Charpenterie, c'est faire tourner en poussant à droite ou à gauche une piece de bois ou quelqu'autre grosse masse, après l'avoir mise en balance sur un chantier ou sur une pierre.
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BILLERBECK | (Géog.) petite ville de l'évêché de Munster en Westphalie.
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BILLE | (en Droit) est une promesse ou obligation sous signature privée, par laquelle on s'engage à faire ou payer quelque chose. Il faut pour en demander le payement en justice : 1°. qu'il soit contrôlé par un commis établi à cet effet : 2°. que l'écriture en soit reconnue par la partie qui l'a faite, ou vérifiée par experts ; à l'exception des billets de change pour lesquels il n'est besoin ni de reconnoissance ni de contrôle. Voyez CHANGE.
On appelle aussi billets, quantité d'autres petits actes faits sous signature privée, sans aucune formalité. (H)
Le mot billet se prend en différentes acceptions. Nous allons parcourir les principales.
BILLET de Banque, voyez BANQUE.
BILLETS de Marchandises, exposition de différentes especes de marchandises, & de leur prix, dont le vendeur donne le détail à l'acheteur.
BILLET de Cargaison ou connoissement, acte privé, que signe un maître de navire, en reconnoissant qu'il a reçu dans son bord les marchandises de quelqu'un, & s'obligeant de les remettre en bon état au lieu où elles sont destinées.
Il en est ordinairement de trois sortes. Le premier que garde le marchand ; le second, que l'on envoie au facteur à qui elles sont destinées ; & le troisieme, que retient le maître.
BILLET de Vente : lorsqu'une personne a besoin d'une somme d'argent, elle met des marchandises entre les mains d'un prêteur, en gage de l'emprunt, en lui donnant ce billet, qui l'autorise à vendre les choses ainsi livrées, si la somme qu'elle emprunte n'est point acquittée avec les intérêts dans le tems prescrit.
BILLETS de Provisions, liberté accordée par le bureau de la doüanne aux marchands, pour leur permettre de se munir, sans payer certains droits, de choses dont ils ne peuvent se passer dans leurs voyages.
BILLET de souffrance, privilége accordé par la doüanne d'Angleterre à un marchand de trafiquer d'un port d'Angleterre à l'autre sans payer les droits.
BILLET d'Entrée, détail de marchandises tant foraines qu'angloises passées au bureau.
Outre les différentes especes des billets dont nous venons de faire mention, il y en a un si grand nombre d'autres, que l'énumération en seroit infinie.
Il y a plusieurs especes de billets dont les marchands, banquiers, & négocians se servent dans le commerce, lesquels operent divers effets.
Les uns sont causés par valeur reçûe en lettres-de-change ; les autres portent promesses d'en fournir ; d'autres sont conçûs pour argent prêté, & d'autres pour marchandises vendues : mais de ces diverses sortes de billets, il n'y en a que deux qui soient réputés billets de change, les autres n'étant regardés que comme de simples promesses, qui cependant peuvent être négociées, ainsi que les billets de change, pourvû qu'ils soient payables à ordre ou au porteur.
La premiere espece de billets de change, sont ceux qui sont causés pour valeur reçûe en lettres-de-change, c'est-à-dire lorsqu'un marchand ou banquier fournit à un autre négociant des lettres-de-change pour les lieux dans lesquels il a besoin d'argent ; & que pour la valeur de ces lettres, il donne son billet de payer pareille somme au tireur.
Cette premiere sorte de billet doit faire mention de celui sur qui les lettres ont été tirées, & de celui qui en aura payé la valeur, & si le payement a été fait en deniers ou marchandises ou autres effets, à peine de nullité ; c'est-à-dire que faute d'être conçûs en ces termes, ils ne sont plus regardés comme billets de change, mais seulement comme simples billets pour argent prêté, qui n'ont pas les mêmes priviléges, art. 27 & 28. de l'Ordon. de 1673.
La deuxieme espece de billets de change, sont ceux qui portent pour laquelle somme je promets fournir lettre-de-change sur une telle ville. Ils sont très-utiles dans le commerce, & doivent aussi faire mention du lieu où les lettres-de-change doivent être tirées, si la valeur en a été reçûe, & de quelles personnes, à peine de nullité. Ceux au profit desquels sont faits ces billets de change, ou au profit desquels les ordres sont passés, peuvent contraindre les débiteurs à leur fournir les lettres-de-change, & au refus leur faire rendre l'argent qu'ils ont reçû, & leur faire payer ce qui leur en coûteroit pour avoir leur argent par lettres-de-change dans les lieux designés par leur billet.
Les billets que l'on nommoit autrefois billets en blanc, c'est-à-dire où on laissoit en blanc le nom de celui à qui ils devoient être payés pour être remplis toutes fois & quantes, & sous quel nom il plairoit à celui au profit duquel ils étoient faits, & dont la cause portoit simplement valeur reçûe sans exprimer la valeur, non-seulement ne sont plus en usage, mais sont absolument défendus ; car comme après avoir passé en plusieurs mains il n'étoit pas possible d'en découvrir l'origine, il étoit aisé de s'en servir pour un commerce usuraire.
On a tâché d'introduire dans le commerce d'autres billets, qui ne sont pas moins dangereux que les précédens pour couvrir l'usure ; ce sont les billets payables au porteur, sans faire mention ni de qui on a reçû la valeur, ni quelle sorte de valeur a été reçûe.
Les plus sûrs de tous les billets dans le commerce, sont ceux qui sont faits à une personne précise ou à son ordre, pourvû qu'ils portent ces mots essentiels, valeur reçûe d'un tel, & que la valeur y soit exprimée. En voici un modele conforme à l'ordonnance de 1673. Je payerai au 20 du mois prochain au sieur Pierre Doré, marchand de cette ville, ou à son ordre, la somme de douze cent livres, valeur reçûe de lui en deniers comptans. Fait, &c.
Endosser un billet, c'est le souscrire ou se charger du payement. Un billet négocié, est celui qui a passé en main tierce au moyen de l'ordre qui a été mis au dos : tout billet payable au porteur est aussi censé billet négocié. Faire courir un billet, c'est le négocier ou chercher à emprunter de l'argent par le moyen des agens de change ou autres personnes.
Sur les billets en général & la police actuelle du royaume à cet égard, voyez le dictionnaire du commerce, tom. I. pag. 997. & suiv.
Les marchands Persans font leurs billets & promesses, en mettant leur sceau au bas & leur nom en haut. Les témoins attestent le sceau du contractant en y joignant le leur. Il n'y a qu'entre marchands que ces sortes de billets soient valables, quoique non faits en justice.
BILLETS de l'Epargne, sont d'anciens billets, mandemens ou rescriptions, dont le payement avoit été autrefois assigné sur l'épargne du roi ; mais qui ayant été supprimés au commencement du ministere de M. Colbert, sont devenus depuis surannés & de nulle valeur dans le commerce.
BILLETS, sont encore des especes de passe-ports que l'on prend aux portes & barrieres des villes où il y a barrage, lorsqu'on veut faire passer de bout des vins & des bestiaux au-travers de ces villes. Voyez PASSE-DE-BOUT.
BILLETS LOMBARDS, ce sont des billets d'une figure & d'un usage extraordinaire, dont on se sert en Italie & en Flandre, & qui depuis l'année 1716 se sont aussi établis en France. Les billets lombards d'Italie, qui sont de parchemin coupé en angle aigu de la largeur d'un pouce ou environ par le haut, & finissant en pointe par le bas, servent principalement lorsque des particuliers veulent prendre intérêt à l'armement d'un vaisseau chargé pour quelque voyage de long cours ; ce qui se pratique ainsi. Celui qui veut s'intéresser à la cargaison du navire, porte son argent à la caisse du marchand armateur, qui enregistre sur son livre de caisse, le nom du prêteur & la somme qu'il prête ; ensuite il écrit sur un morceau de parchemin, de la largeur de douze ou quinze lignes, & de sept ou huit pouces de longueur, le nom & la somme qu'il a enregistrés, & coupant ce parchemin d'un angle à l'autre en ligne diagonale, il en garde une moitié pour son bureau, & délivre l'autre au prêteur pour le rapporter à la caisse au retour du vaisseau, & le confronter avec celui qui y est resté, avant que d'entrer en aucun payement, soit du prêt soit des profits. Ceux qui prêtent sur gages en Flandre font à-peu-près la même chose. Ils écrivent sur un pareil morceau de parchemin le nom de l'emprunteur & la somme qu'il a reçûe, & l'ayant coupé en deux, ils en donnent la moitié à l'emprunteur, & cousent l'autre moitié sur les gages, afin de les lui remettre en rendant la somme stipulée.
BILLETS de la caisse des emprunts. Voyez CAISSE DES EMPRUNTS.
BILLETS de la banque royale. Il y a peu de différence pour l'usage entre les billets lombards d'Italie & les billets de la banque royale de France : mais il y en a quelqu'une pour la forme, ces derniers n'étant que de papier, & se coupant de haut en-bas en deux parties égales ; ensorte néanmoins que la coupure reste dentelée : précaution sure contre la friponnerie de ceux qui voudroient les contrefaire. D'ailleurs les moitiés de ces billets, qui demeurent aux bureaux de la banque sont reliées en des registres ; & au bas de chaque partie du billet qui se délivre au porteur, est l'empreinte d'une espece de sceau.
BILLETS de monnoies. Billets occasionnés par la refonte générale des monnoies ordonnée par Louis XIV. en Juin 1700, & qui n'ayant pû se faire assez promtement pour payer toutes les vieilles especes qu'on portoit aux hôtels des monnoies, les directeurs ou changeurs en donnerent leurs billets particuliers qui devinrent dettes de l'état ; & en 1703, il fut ordonné qu'ils porteroient intérêt à huit pour cent : mais ces papiers s'étant trop multipliés par le trafic usuraire qu'en firent les agioteurs, ils furent supprimés ou convertis en rentes sur la ville, ou tirés du commerce par d'autres voies.
BILLETS de l'état, sont des billets qui ont commencé presqu'en même tems que le regne de Louis XV. pour acquiter les dettes immenses contractées sous le régne précédent. Ces dettes qui montoient à plusieurs centaines de millions ayant été payées en partie par divers moyens, le Roi les réduisit à un capital de 250 millions, qu'il se chargea de payer, & en fit pour ainsi dire ses billets aux intéressés. Ces nouveaux billets furent appellés billets de l'état ; par ce que le Roi en fit sa dette, & qu'il promit de les payer sur les revenus de l'état ; au lieu qu'auparavant ce n'étoient que des billets de particuliers, quoique faits pour des sommes fournies pour les besoins de l'état. La plupart de ces billets ont été depuis retirés, soit en taxes sur les gens d'affaire, soit en actions de la compagnie d'occident, soit en rentes viageres sur l'hôtel-de-ville de Paris, soit enfin par des loteries qui s'y tiroient tous les mois. Dictionnaire du Commerce, tom. I. pag. 952. &c.
BILLETS de l'échiquier. Voyez éCHIQUIER. (G)
* BILLET de santé, (Hist. mod. & Police) c'est une attestation de santé accordée dans les tems contagieux, par un conseil qu'on institue alors sous le nom de conseil de santé. Ce billet contient le lieu d'où le porteur est parti, son nom, sa qualité, sa demeure, la date de son départ, l'état de santé de la ville, du bourg ou village d'où il vient, & la permission de le recevoir où il se présentera avec ce billet ; au bas duquel il aura pris certificat de tous les lieux où il aura dîné, soupé & couché.
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BILLETER | v. act. (Commerce) attacher des étiquettes, mettre des billets aux étoffes : c'est sur ces billets que les marchands, particulierement ceux qui font le détail, mettent les numero & les aunages des pieces entieres, suivant les factures des commissionnaires qui leur en font les envois, & qu'ils écrivent chaque jour ce qui a été levé de celles qui ont été entamées. (G)
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BILLETIER | S. m. (Police) commis qui expédie & délivre les billettes. Voyez BILLETTE.
Ce terme est principalement en usage à Bordeaux, pour les commis des fermes du Roi qui ont la garde des portes. Il y a dans cette ville jusqu'à 24 billetiers, dispersés aux quatorze portes de la ville, pour les garder depuis six heures du matin jusqu'à six heures du soir ; après quoi elles sont abandonnées à la direction des portiers qui sont aux gages de la ville.
Les fonctions des billetiers sont de prendre garde à tout ce qui entre & sort, & de tenir des registres plus ou moins, suivant l'importance & la qualité de leurs postes. Voyez-en le détail dans le dictionnaire du Commerce, tom. I. page 955.
Il y a deux commis qu'on appelle contrôleurs des billetiers, dont les fonctions sont d'examiner le travail des billetiers, & de voir s'ils sont sédentaires à leur porte. (G)
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BILLETTE | S. f. nom qu'on donne dans la douanne de Bordeaux à l'acquit que le commis délivre aux marchands pour justifier du payement des droits de sortie, ou, comme on y parle, des droits d'issue de marchandises qu'il veut faire embarquer pour envoyer à l'étranger. Ces billets duroient autrefois un mois entier, après lequel il étoit permis de les renouveller si les marchandises n'avoient pû être envoyées : présentement le commis y ajoûte la clause, non valable après trois jours. (G)
BILLETTES, en Blason, pieces d'une figure quarrée, moins larges que longues.
On dit que les billettes sont couchées ou renversées, lorsque leur côté le plus long est parallele au haut de l'écusson, & que le plus court est perpendiculaire. On suppose qu'elles représentent des pieces de drap d'or ou d'argent plus longues que larges, placées à quelque distance par maniere d'ornement sur les habits, & de-là transportées dans les écussons, quoique Guillim pense que la billette représente une lettre cachetée. On dit qu'un écu est billetté lorsqu'il est semé de billettes. Il porte d'argent billetté à la croix de bruyere engrelée de gueules.
Bloom dit qu'il faut exprimer le nombre des billettes lorsqu'elles ne passent pas celui de dix.
BILLETTES, s. f. c'est ainsi qu'on appelle dans les Verreries à vitre le bois dont on se sert pour chauffer les fours ; il est fendu plus menu que le cotret, & n'a que dix-huit pouces de longueur.
BILLETTES, s. f. pl. termes de Forgeur d'enclumes. Voyez DEZ.
BILLETTE, en terme de Blason, se dit du champ semé de billettes. Voyez BILLETTE.
Conflans d'Auchy, & Brenne, d'azur, au lion d'or, l'écu billetté de même. (Y)
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BILLIGHEIM | (Géog.) petite ville du bas Palatinat, à deux lieues de Landau.
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BILLINGHAM | (Géog.) petite ville de la province de Northumberland, au nord de l'Angleterre.
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BILLION | S. m. (Arithmet.) on donne ce nom en Arithmétique au chiffre qui occupe la dixieme place d'une suite horisontale de chiffres, en commençant de la droite vers la gauche, ainsi qu'on en est convenu dans la numération. Voyez NUMERATION.
Dans le nombre 4320567827, composé de dix chiffres, le chiffre 4 qui est le dixieme en commençant par la droite, signifie quatre billions : or un billion vaut dix fois cent millions, de même qu'un million vaut dix fois cent mille, &c. suivant l'institution de la valeur locale des chiffres. (E)
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BILLON | S. m. (Monnoyage) c'est un composé de métal précieux & d'autres qui le sont moins, où la quantité du métal précieux est moindre que celle des autres métaux ; ainsi l'or dont le titre est au-dessous de douze karats, est billon ; l'argent qui est au-dessous de six deniers, est billon : l'un s'appelle billon d'or, l'autre billon d'argent. Il faut appliquer la même notion de billon, par-tout où le mot billon est employé.
On étoit autrefois si scrupuleux sur la pureté de l'or & de l'argent, que l'on donnoit le nom de billon à l'or au-dessous de l'étalon ou de 21 karats, & à l'argent au-dessous de dix deniers.
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BILLONAGE | S. m. à la Monnoie, est le crime de sur-achat des matieres d'or, d'argent, monnoies, soit pour les transporter hors du royaume, soit pour les changer de nature. Voyez BILLONEUR.
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BILLONEUR | à la monnoie ; on nomme ainsi ceux qui sans qualité sur-achetent les matieres d'or ou d'argent. Les lois prononcent des peines contre ceux qui sont convaincus du crime de billonage. Voyez BILLONAGE.
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BILLOS | droit d'aides qui se leve sur le vin en quelques provinces de France, particulierement en Bretagne ; il ne se paye que par les cabaretiers & autres qui vendent des vins. On n'employe guere ce terme sans le faire précéder par celui d'impôts ; ainsi l'on dit impôts & billos : il se leve aussi en quelques lieux sur la biere, le cidre, & autres boissons. Ce droit n'est pas par-tout un droit royal, & il y a des seigneurs & des villes qui en joüissent. (G)
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BILLOT | S. m. on donne ce nom dans plusieurs Arts méchaniques à un tronçon d'arbre plus ou moins gros, à piés & sans piés, mais dont le diametre est toûjours très-considérable relativement à la hauteur : quant à ses usages, voyez les articles qui suivent.
BILLOTS, (Marine) ce sont des pieces de bois courtes qu'on met entre les fourcats des vaisseaux pour les garnir en les construisant ; c'est ce qu'on appelle pieces de remplissage. Voyez Pl. IV. fig. 1. n °. 16. & 17. les fourcats, & n °. 18. les pieces de remplissage.
Billot d'appui du mât de beaupré, voyez sa figure & sa situation, Pl. IV. fig. 1. n °. 94. (Z)
BILLOT, (Manége) morceau de bois rond de cinq à six pouces de long, sur un pouce de diametre, & muni à chaque bout d'un anneau de fer pour y attacher un cuir. On met pour l'ordinaire de l'assa foetida autour du billot ; & après l'avoir couvert d'un linge, on le met comme un mors dans la bouche du cheval, & l'on passe le cuir par-dessus ses oreilles comme une têtiere. L'assa foetida se fond dans la bouche avec la salive, & réveille l'appétit au cheval dégoûté. Le billot sans assa foetida, est la bride des chevaux de charrette. On appelle aussi billots les barres de bois rondes qu'on attache aux chevaux que l'on couple, & qui coulent tout le long de leurs flancs. (V)
BILLOT à charger, c'est un instrument d'Artificier qui tient lieu d'enclume pour soûtenir les moules ou culots des fusées, que l'on y charge à grands coups de maillets, pour éviter le retentissement qui en résulteroit sur un plancher ou un corps creux.
BILLOT, terme de Ceinturier : c'est un morceau de bois quarré de la longueur de dix-huit pouces, sur six pouces de haut & autant de large, qui porte leur enclume, & dont la surface du dessus est creusée un peu, & forme plusieurs petites cases où ces ouvriers mettent leurs rivets & boutons. Voyez la fig. 5. Plan. du Ceinturier.
BILLOT de Chaînetier ; c'est un morceau de bois rond de la hauteur de deux piés & demi, sur trois piés ou environ de circonférence ; ils s'en servent au lieu d'enclume, parce qu'ils n'ont jamais rien à forger au feu, ni rien de trop gros.
BILLOT de Charron avec son marchepié ; c'est un petit treteau de la hauteur d'un pié, & environ de deux piés de long, qui sert aux Charrons à différens usages. Voyez la fig. 3. Pl. du Charron.
BILLOT de Cordonnier, tronçon d'arbre sur quoi les Cordonniers battent les semelles. Voyez BUISSE.
BILLOT de Ferblantier, c'est un gros cylindre de bois de la hauteur de trois piés, sur trois piés de circonférence, qui a la face de dessus & de dessous plate ; la face de dessous est percée de plusieurs trous ronds & quarrés, dans lesquels ces ouvriers placent les bigornes & les tas, pour les assujettir & les rendre stables. Voyez Pl. d'Orfévrerie.
BILLOT, instrument de Gazier. Voy. CHEVILLON.
BILLOT, partie de la presse des Imprimeurs en taille-douce. Voyez IMPRIMERIE EN TAILLE-DOUCE.
BILLOT, dans l'Orgue, sont de petits morceaux de bois plats qui ont une queue : au milieu de la face plate de ces petits morceaux de bois est un petit trou rond, qui sert à recevoir les pointes ou pivots des rouleaux de l'abregé. La queue des billots sert à les attacher sur la table de l'abregé, en la faisant entrer dans des trous pratiqués à cet effet, & les y retenant avec de la colle-forte. Voyez l'article ABREGE, & la fig. A A. n °. 21.
BILLOT, est aussi un morceau de bois cubique d'environ 14 pouces de dimension, à la face de dessus duquel on perce un trou qui ne doit pas traverser d'outre-en-outre. A la face du billot qui regarde le dedans de l'orgue, est un autre trou qui va rejoindre le premier. Le trou de la face de dessus sert à recevoir le pié du tuyau de montre des grandes tourelles ; & celui de la face latérale sert à recevoir le porte-vent qui porte le vent du sommier au tuyau. Voy. la fig. 1. Pl. d'Orgue.
BILLOT d'Orfevre, est un morceau de tronc d'arbre de deux à trois piés de haut, & qui porte plus ou moins de diametre, à proportion de l'enclume ou du tas qu'on veut y placer. Il est ordinairement d'orme ; & quand il fatigue beaucoup on prend une souche que l'on met debout, l'on y fait un trou de la profondeur que l'on veut qu'entre l'enclume, que l'on assujettit avec des coins de peur qu'il ne se fende ; l'on y met des cercles de nerfs de boeufs frais, qui en se sechant le serrent fortement : l'on cloue encore autour des lanieres assez lâches pour contenir les manches des marteaux, & les tenir à la portée de la main de l'ouvrier.
BILLOT de Rubaniers, est à-peu-près fait comme l'ensuple, excepté qu'il n'a point de moulures au bout comme elle ; il n'y a qu'une petite éminence à chaque bout pour contenir la soie que l'on met dessus : il sert à relever les pieces ourdies de dessus l'ourdissoir ; lesquelles pieces y restent jusqu'à ce qu'on les ploye sur les ensuples.
BILLOT à refouler des Tabletiers-Cornetiers ; c'est une grosse piece de bois au milieu de laquelle on a fait une encoche, de la grandeur des plaques entre lesquelles on refoule les cornets. Voyez REFOULER.
BILLOT à redresser, des Tabletiers-Cornetiers, est une partie de tronc d'arbre plantée debout, au milieu de laquelle on a percé un trou propre à recevoir les ouvrages sur le mandrin. Voyez MANDRIN. Il est aisé de concevoir que les cornets qui ne sont encore que dolés, voyez DOLES, se redressent en effet contre les parois du billot, en frappant à grands coups de marteau sur le mandrin qui est dans le cornet, & plus haut que lui. Voyez la Pl. II. fig. 3.
BILLOT de Tailleur, c'est un petit cube de bois dont ils se servent pour mettre sous les emmanchures qu'ils veulent repasser. Voyez EMMANCHURE & REPASSER.
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BILLY | (Géogr.) petite ville de France dans le Bourbonnois.
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BILSEN | (Géogr.) petite ville de l'évêché de Liége, entre Mastricht & Hasselt. Long. 23. 12. lat. 50. 48.
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BILZIER | (Géogr.) ville de la Romanie dans la Turquie en Europe, à dix lieues d'Andrinople.
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BIMATER | (Myth.) épithete que l'on donnoit à Bacchus, & par laquelle on faisoit entendre que Jupiter l'ayant porté deux mois dans sa cuisse, lui avoit servi de mere pendant ce tems, & qu'il en avoit eu deux.
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BIMBLOTERIE | S. f. (Comm.) c'est l'art de faire des colisichets d'enfans & de les vendre. Bimbloterie vient de bimblot, colifichet. Il y a deux sortes de bimblots : les uns qui consistent en petits ouvrages fondus d'un étain de bas aloi, ou de plomb ; ce sont des assiettes, des aiguieres & autres pieces de petits ménages d'enfant ; des encensoirs, des calices, des burettes, &c. les autres consistent dans toutes ces bagatelles, tant en bois qu'en linge, étoffe & autres matieres dont on fait des joüets, comme poupées, chevaux, carrosses, &c. Ce sont les Merciers qui font le trafic des derniers bimblots, les maîtres Miroitiers-lunettiers Bimbelotiers ont le privilége des autres. Pour savoir jusqu'où va le commerce de ces bagatelles, il ne faut que se rappeller la prodigieuse quantité qui s'en vend depuis le commencement de l'année jusqu'à la fin, & sur-tout la consommation qui s'en fait dans les premiers jours de l'an.
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BIMBLOTIER | S. m. (Commerce) marchand de bimbloterie. Voyez BIMBLOTERIE.
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BIMÉDIAL | en Mathématiques. Quand deux lignes, comme A B & B C (fig. 5 de Géomét.) commensurables seulement en puissance, sont jointes ensemble, la route A C est irrationnelle par rapport à l'une des deux A B ou B C, & on l'appelle ligne premiere bimédiale. Euclide, liv. X. propos. 38. Voyez COMMENSURABLE, IRRATIONNEL, PUISSANCE. (E)
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BIMILIPATAN | (Géogr.) ville de la peninsule de l'Inde en-deçà du Gange, dans le royaume de Golconde, sur le golfe de Bengale.
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BIMINI | (Géogr.) une des îles Lucayes dans l'Amérique septentrionale, au midi de l'île de Bahama. Lat. 25. long. 298.
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BINAGE | S. m. (Agric.) c'est ainsi qu'on appelle le second labour que l'on donne aux terres à grains. Si celles à blé ont eu leur premier labour avant l'hyver, elles reçoivent le binage après que les froids sont passés & que les eaux sont écoulées, & quand la terre commence à s'ouvrir & à se renouveller. Si elles n'ont eu leur premiere façon qu'après l'hyver, on leur donnera le deuxieme, ou le binage, un mois ou six semaines après. Voyez AGRICULTURE.
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BINAIRE | L'ARITHMETIQUE binaire est une nouvelle sorte d'Arithmétique que M. Leibnitz fondoit sur la progression la plus courte & la plus simple : c'est celle qui se termine à deux chiffres. Le fondement de toute notre Arithmétique ordinaire étant purement arbitraire, il est permis de prendre une autre progression qui nous donne une autre Arithmétique. On a voulu que la suite premiere & fondamentale des nombres allât jusqu'à dix, &c. que la suite infinie des nombres fût une suite infinie de dixaines ; mais il est visible que d'avoir étendu la suite fondamentale des nombres jusqu'à dix, ou de ne l'avoir pas étendue plus loin, c'est une institution qui eût pû être différente ; & même il paroît qu'elle a été faite assez au hasard par les peuples, & que les Mathématiciens n'ont pas été consultés, car ils auroient pû aisément établir quelque chose de plus commode. Par exemple, si l'on eût poussé la suite des nombres jusqu'à douze, on y eût trouvé sans fraction des tiers & des quarts, qui ne sont pas dans dix. Les nombres ont deux sortes de propriétés, les unes essentielles, les autres dépendantes d'une institution arbitraire, & de la maniere de les exprimer. Que les nombres impairs toûjours ajoûtés de suite, donnent la suite naturelle des quarrés ; c'est une propriété essentielle à la suite infinie des nombres, de quelque maniere qu'on l'exprime. Mais que dans tous les multiples de 9, les caracteres qui les expriment additionnés ensemble, rendent toûjours 9, ou un multiple de 9, moindre que celui qui a été proposé, c'est une propriété qui n'est nullement essentielle au nombre 9, & qu'il n'a que parce qu'il est le pénultieme nombre de la progression décuple qu'il nous a plû de choisir.
Si l'on eût pris la progression de douze, le nombre 11 auroit eu la même propriété ; ainsi dans toute l'arithmétique binaire il n'y auroit que deux caracteres, 1 & 0. Le zéro auroit la puissance de multiplier tout par deux, comme dans l'Arithmétique ordinaire il multiplie tout par dix : 1 seroit un ; 10, deux ; 11, trois ; 100, quatre ; 101, cinq ; 110, six ; 111, sept ; 1000, huit ; 1001, neuf ; 1010, dix, &c. ce qui est entierement fondé sur les mêmes principes que les expressions de l'Arithmétique commune. Il est vrai que celle-ci seroit très incommode par la grande quantité de caracteres dont elle auroit besoin, même pour de très-petits nombres. Il lui faut, par exemple, quatre caracteres pour exprimer huit, que nous exprimons par un seul. Aussi M. Leibnitz ne vouloit-il pas faire passer son arithmétique dans un usage populaire ; il prétendoit seulement que dans les recherches difficiles elle auroit des avantages que l'autre n'a pas, & qu'elle conduiroit à des spéculations plus élevées. Le P. Bouvet, jésuite, célebre missionnaire de la Chine, à qui M. Leibnitz avoit écrit l'idée de son arithmétique binaire, lui manda qu'il étoit très-persuadé que c'étoit-là le véritable sens d'une ancienne énigme chinoise laissée il y a plus de 4000 ans par l'empereur Fohi, fondateur des Sciences à la Chine, aussi-bien que de l'empire, entendue apparemment dans son siecle, & plusieurs siecles après lui, mais dont il étoit certain que l'intelligence s'étoit perdue depuis plus de 1000 ans, malgré les recherches & les efforts des plus savans lettrés, qui n'avoient vû dans ce monument que des allégories puériles & chimériques. Cette énigme consiste dans les différentes combinaisons d'une ligne entiere & d'une ligne brisée, répetées un certain nombre de fois, soit l'une, soit l'autre. En supposant que la ligne entiere signifie 1, & la brisée 0, on trouve les mêmes expressions des nombres que donne l'arithmétique binaire. La conformité des combinaisons des deux lignes de Fohi, & des deux uniques caracteres de l'arithmétique de M. Leibnitz, frappa le P. Bouvet, & lui fit croire que Fohi & M. Leibnitz avoient eu la même pensée.
Nous devons cet article à M. Formey, qui l'a tiré de l'histoire de l'académie des Sciences de Paris, année 1702. Voyez ECHELLES ARITHMETIQUES, au mot ARITHMETIQUE.
Cette arithmétique seroit, comme on vient de le dire, peu commode ; il faudroit trop de caracteres pour exprimer d'assez petits nombres : cependant si le lecteur est curieux d'avoir une méthode pour trouver dans cette arithmétique la valeur d'un nombre donné, ou pour exprimer un nombre quelconque, la voici en peu de mots.
On commencera par faire une table des différentes puissances de 2 ; savoir 2° ou 1, 2, 4, 8, 16, 32, 64, 128, &c. que l'on poussera le plus loin qu'il sera possible. Cela posé,
Soit donné, par exemple, le nombre 110101, dont on veut savoir la valeur ; comme ce nombre a six chiffres, je prends la sixieme puissance de 2, qui est 32, & qui sera représenté par le chiffre 1, qui est le plus à gauche : le chiffre suivant 1 indiquera la 5e puissance 16 ; le chiffre suivant 0 ne donnera rien ; le chiffre suivant 1 indiquer a la 3e puissance, c'est-à-dire 4 ; le chiffre suivant 0 ne donnera rien ; enfin le dernier chiffre 1 donnera 1 : ainsi le nombre proposé équivaut à la somme des nombres 32, 16, 4, 1, c'est-à-dire 53, & ainsi des autres.
Présentement je suppose qu'on veuille exprimer le nombre 230 par l'arithmétique binaire ; je cherche d'abord la plus grande puissance de 2 contenue dans 230, c'est 128 ; & comme 128 est la 8e puissance de 2, je vois que le nombre 230 exprimé comme on le desire, aura huit chiffres. Je mets donc
1 pour le premier chiffre à gauche :
j'ôte 128 de 230, il me reste 102 ; & comme 64, qui est la puissance de 2 qui suit immédiatement 128, se trouve dans 102, cela me fait voir que je dois encore mettre
1 à la seconde place à gauche :
je retranche 64 de 102, il me reste 38 ; or 32, qui est la puissance de 2 après 64, est encore dans 38 ; ainsi je mets
1 à la 3e place à gauche :
je retranche 32 de 38, il me reste 6 ; or 16, qui est la puissance après 32, n'est point dans 6 : je mets donc
0 à la 4e place :
je retranche 8 de 6 ; & comme il n'y est pas, je mets encore
0 à la 5e place :
je retranche 4 de 6, ce qui me donne
1 à la 6e place :
enfin il me reste 2, qui s'exprimera par
1 à la 7e place :
& comme il ne reste rien, on aura
0 à la 8e place :
donc 230 sera exprimé par
11100110
Il est visible qu'à l'imitation de cette arithmétique on peut en imaginer une infinité d'autres où les nombres seront exprimés par plus ou moins de chiffres. Voyez ARITHMETIQUE & ECHELLES ARITHMETIQUES.
Soit en général n le nombre de caracteres d'une arithmétique quelconque, ensorte que 0, 1, 2, 3,.... n -1 soient ces caracteres ; & soit proposé de trouver la valeur d'un nombre quelconque, par exemple, b c d e f, exprimé avec les caracteres de cette arithmétique, on aura b c d e f = b x n4 + c x n3 + d x n2 + e x n + f, & ainsi des autres.
Si on veut exprimer un nombre quelconque A par cette même arithmétique, soit np la plus grande puissance de n contenue dans A, soit divisé A par np ; soit a le quotient & le reste r, soit ensuite divisé r par np -1, b le quotient & le reste s ; soit ensuite divisé s par np-2, le quotient c, & le reste q : & ainsi de suite, jusqu'à ce qu'on arrive à un reste K, qui soit ou 0 ou moindre que n, on aura A = a b c.... K, & le nombre des chiffres sera p + 1, &c. Voyez mém. acad. 1741, une méthode de M. de Buffon pour faire ce calcul par les logarithmes. (O)
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BINARD | S. m. (Maçonnerie) chariot fort à quatre roues, où les chevaux sont attelés deux à deux, & qui sert à porter de gros blocs de pierre.
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BINAROS | (Géog.) petite ville du royaume de Valence en Espagne, sur les frontieres de Catalogne Long. 17. 55. lat. 42. 24.
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BINASCO | (Géog.) petite ville du duché de Milan, entre Pavie & Milan.
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BINCHE | (Géog.) ville ancienne du Hainaut sur la riviere de Haine, à trois lieues de Mons. Long. 21. 50. lat. 50. 23.
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BINDHAVEN | (Géog.) ville d'Angleterre, dans le comté de Carlingford.
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BINDON | (Géog.) ville d'Angleterre, dans la province de Dorset.
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BINETTE | (Jardin.) Voyez SERFOUETTE. (K)
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BINGASI | (Géog.) ville maritime d'Afrique, au royaume de Tripoli, Long. 37. 40. lat. 32. 20.
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BINGEN | (Géog.) ville d'Allemagne, dans l'électorat de Mayence, sur le bord du Rhin. Long. 25. 18. lat. 50. 3.
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BINGLEY | (Géogr.) ville d'Angleterre, dans la province d'York.
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BINNENLANDSE | BINNENLANDSE
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BINOCLE | ou TéLESCOPE BINOCULAIRE, c'est un télescope par lequel on peut voir les objets avec les deux yeux en même tems. Voyez TELESCOPE. Il est composé de deux tuyaux, qui contiennent chacun des verres de même force. On a crû qu'il représentoit les objets plus clairs & plus grands que le télescope monoculaire, & cette raison a engagé plusieurs auteurs à en traiter assez au long, entre autres le P. Antoine-Marie de Réita, capucin, dans son oculus Enoch & Eliae ; & après lui le P. Chérubin d'Orléans aussi capucin, dans le tome XI. de sa Dioptrique oculaire, qui a pour titre de la vision parfaite ; mais on a reconnu que ces sortes de télescopes étoient plus embarrassans qu'utiles, aussi la plûpart des meilleurs auteurs qui ont traité de la Dioptrique, n'en ont fait aucune mention.
On fait aussi des microscopes binocles ; mais comme ils ont les mêmes inconvéniens que les télescopes de cette espece, ils sont fort rares & très-peu en usage. (O-T)
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BINOCULAIRE | voyez BINOCLE.
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BINOME | S. m. (Algebre) c'est une quantité composée de deux parties, ou de deux termes liés par les signes + ou-(voyez MONOME) ; ainsi a + e & 5-3 sont des binomes.
Si une quantité algébrique a trois parties, comme a + b + c, on l'appelle trinome ; si elle en a davantage, on la nomme quadrinome, &c. & en général multinome. Voyez TRINOME.
M. Newton a donné une méthode pour élever en général un binome a + b à une puissance quelconque m, dont l'exposant soit un nombre entier ou rompu, positif ou négatif.
Voici en quoi cette formule consiste,
(a + b)m = am + ma b + m. m-1/2 am-2 b2 + (m. m-1. m-2)/2. 3 (am-3 b3 + &c.)
La seule inspection des termes en fait voir la loi mieux qu'un long discours.
Il est visible que lorsque m est un nombre entier, cette suite se réduit à un nombre fini de termes ; car soit par exemple m = 2 ; donc m-2 = 0 donc tous les termes qui suivront les trois premiers seront = 0, puisqu'ils seront multipliés chacun par m-2.
M. le marquis de l'Hôpital, dans son traité des Sections coniques, livre X. a démontré cette formule pour le cas où m est un nombre entier. M. l'abbé de Molieres l'a démontré aussi dans ses élémens de Mathématiques. Enfin l'on en trouve encore une démonstration par les combinaisons dans les élémens d'Algebre de M. Clairaut.
Lorsque m est un nombre négatif ou une fraction, la suite est infinie, & pour lors elle ne représente la valeur de (a + b)m que dans le cas où elle est convergente, c'est-à-dire où chaque terme est plus grand que le suivant. Voyez SERIE ou SUITE ; voyez aussi CONVERGENT, DIVERGENT, &c.
Soit, par exemple, un quarré imparfait a a + b, dont il faille extraire la racine quarrée ; il n'y aura qu'à élever a a + b à la puissance 1/2 ; car tirer la racine quarrée, ou élever à la puissance 1/2, c'est la même chose. Voyez EXPOSANT. Ainsi on aura (aa + b)1/2 = aa1/2 + 1/2 x b x aa1/2 -1 + 1/2 x 1/2 -1 x (b2 x aa1/2-2)/2, &c.
= a + b/2a-bb/8 a3, &c. formule ou suite infinie qui approchera de plus en plus de la racine cherchée.
De même si on veut extraire la racine cube de a3 + b, il faudra élever cette quantité à l'exposant 1/3 ; & on trouvera
(a3 + b)1/3 = a + (b/3 a2)-(b2/9 a5), &c.
& ainsi des autres. Mais ces series infinies ne sont bonnes qu'autant qu'elles sont convergentes.
Soit n le rang qu'occupe un terme quelconque dans la suite du binome a + b élevé à la puissance quelconque m, on trouvera que ce terme est au suivant comme 1 est à b/a x (m-n +1)/ n ; où il s'ensuit que pour que la série soit convergente, c'est-à-dire que les termes aillent toûjours en diminuant, il faut que b x (m-n + 1) soit toûjours plus petit que n a.
Ainsi pour pouvoir trouver la racine approchée de a a + b par la formule précédente, il faut que b x (1/2-n + 1), pris positivement, soit plus petit que n a a, n étant un nombre entier quelconque.
De même pour extraire par cette formule la racine de a3 + b, il faut que b x (1/3-n + 1), pris positivement, soit toûjours plus petit que n a3. (O)
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BINOT | S. m. (Agric.) c'est ainsi qu'on appelle dans quelques campagnes, une sorte de charrue sans coutre & sans oreilles, avec laquelle on écorche la terre, ou on lui donne quelques demi-labours pour la retourner & la disposer aux labours pleins. Voyez AGRICULTURE.
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BINOTIS | S. m. (Agriculture) demi-labours ou premiere façon legere que l'on donne aux terres à grains, pour les disposer aux labours pleins. Ces demi-labours se donnent avec le binot, d'où ils ont été appellés binotis. Voyez LABOUR, AGRICULTURE, & BINOT.
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BINSDORFF | (Géogr.) petite ville de la basse Stirie, dans la seigneurie de Hohenberg.
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BINTAN | (Géog.) île d'Asie dans les Indes Orientales, au sud de la presqu'île de Malaca. Long. 121. 20. lat. 1.
BINTAN ou VINTANE, contrée de l'île de Ceylan, sur la riviere de Trinquilimal, remplie de forets, & habitée par des sauvages.
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BINTENGAPORT | (Géog.) petite ville, avec un port dans l'île d'Yla en écosse.
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BIOGRAPHE | S. m. (Littérat.) terme formé du Grec , vie, & de , j'écris. Il est consacré dans la Littérature pour exprimer un auteur qui a écrit la vie particuliere d'un ou de plusieurs personnages célebres : tels sont parmi les anciens, Plutarque & Cornélius Népos, qui ont écrit les vies des hommes illustres, Grecs & Romains ; & parmi les modernes Léti, qui nous a donné les vies d'Elisabeth, de Charles V. de Sixte V. de Cromwel ; M. Flechier, M. Marsollier, M. de Voltaire, M. l'abbé de la Bletterie, &c.
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BIOPHIO | ou BIOBIO, (Géog.) riviere du Chili, dans l'Amérique méridionale, qui se jette dans la mer du Sud.
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BIORKO | (Géog.) île dans le golfe de Finlande, vis-à-vis de l'embouchure de la Niera.
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BIORNEBORG | (Géog.) ville de Suede dans la Finlande, sur la riviere de Kum près de son embouchure, dans le golfe de Bothnie. Long. 40. 5. latit. 62. 6.
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BIORNO | (Géog.) ville de la Finlande méridionale avec port, sur le golfe de Finlande.
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BIPARTITION | voyez BISSECTION.
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BIQUADRATIQUE | adj. (Algebre) on donne ce nom à la puissance qui est immédiatement au-dessus du cube, c'est-à-dire au quarré-quarré, ou à la quatrieme puissance. Voyez PUISSANCE, RACINE, QUARRE-QUARRE, &c. (E)
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BIR | (Géog.) ville de la Turquie Asiatique dans le Diarbeck, avec un château sur l'Euphrate. Long. 55. 36. lat. 36. 10.
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BIRCKENFELD | ville & principauté d'Allemagne dans le Hundsruck, appartenante au prince Palatin, Duc de Deux-ponts. Longit. 24. 39. latit. 49. 35.
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BIREME | S. f. (Hist. & Mar. anc.) sorte de navire à l'usage des anciens, appellée bireme, parce qu'elle étoit à deux rangs de rames. Les savans sont fort partagés sur la disposition de ces rangs de rames, & sur le nombre des rames de chaque rang. Voyez là-dessus l'excellent ouvrage de M. Deslandes sur la Marine des anciens ; & dans les antiquités expliquées du savant P. Montfaucon, vol. IV. pag. 242 des figures de biremes ; où il paroit qu'il régnoit quelquefois une balustrade sur les deux côtés du vaisseau, & qu'une partie des rames du même côté étoit plus élevée que l'autre partie ; les unes partant des vuides de la balustrade, les autres d'ouvertures pratiquées fort au-dessous. On ne compte à l'une de ces biremes que six rames dessus & six rames dessous. Il paroît démontré par quelques endroits de Thucydide, que la bireme n'étoit pas encore inventée au tems de la guerre de Troie ; & selon Dymaste, cité par Pline, que les Erythréens construisirent la premiere. Scheffer a fort bien remarqué que le mot bireme a deux sens différens dans les anciens, & qu'il se prend ou pour un petit esquif à deux rames, ou pour un grand bâtiment à deux rangs de rames. Les biremes s'appelloient aussi selon quelques-uns, dicrotes.
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BIRGI | (Géog.) petite riviere de Sicile qui se jette dans la mer près du cap de Coco.
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BIRGI-ACILINO | (Géog.) petite riviere de Sicile dans le Val-di-Mazara.
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BIRITAMBARU | (Hist. nat. bot.) espece de convolvulus qui croit dans le Malabar, l'île de Ceylan, & d'autres contrées des îles orientales. La phrase botanique est toute la description qu'on nous en donne ; voici cette phrase : convolvulus maritimus zeylanicus, folio crasso, cordiformi, pes caprae Lusitanis. On dit qu'une dragme de résine de sa racine donnée dans un jaune d'oeuf, ou dans quelqu'émulsion appropriée, évacue les eaux dans l'hydropisie ; effet que l'extrait de sa racine préparé avec l'esprit-de-vin produit aussi. Malgré cette vertu cathartique de la racine, on assûre que les lapins, les dains & les boucs, tant privés que sauvages, mangent les feuilles. Ray. Hist. plant.
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BIRK | ou BIRTOXIN, (Géog.) ville du royaume de Suede, capitale de la province de Ost-Gothie ou Gothie orientale.
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BIRMINGHAM | (Géog.) ville d'Angleterre dans la province de Warwick, remarquable par son commerce en fer. Long. 16. lat. 52. 35.
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BIROT | ou BIROTUM, (Hist. anc.) chariot à deux roues qu'on atteloit de trois mulets, & sur lequel on pouvoit charger environ le poids de deux cent livres. Constantin le Grand en ordonna l'usage pour la commodité du public, & fit défense d'y mettre plus de deux quintaux pesant. Valentinien, par une autre ordonnance, régla que quand on voudroit se servir de cette voiture pour voyager, on ne pourroit la charger que de deux personnes, ou de trois au plus. Pancirol. not. Imper. Orient. (G)
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BIRR | (Géog.) petite ville du comté de Marr au nord de l'Ecosse, sur la Dée.
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BIRSE | ou BIRTZE, (Géog.) ville de la Samogitie dans le grand duché de Lithuanie.
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BIRVIESCA | (Géog.) ville d'Espagne dans la vieille Castille, capitale du pays de Bureva.
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BIS | dans le Commerce, est un terme usité particulierement lorsque par mégarde on a coté dans un livre deux feuillets du même nombre : en ce cas on met bis à côté du chiffre qui marque le nombre de l'un des deux feuillets, pour faire connoître qu'il est employé doublement ; parce que bis en Latin signifie deux fois. La même chose s'observe à l'égard des numeros que l'on met sur les pieces d'étoffe, lorsque l'on en a mis deux fois un même, pour n'être pas dans l'obligation de réformer toute une suite de cottes & de numéros. (G)
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BISACCIA | (Géog.) petite ville d'Italie dans le royaume de Naples. Long. 33. 5. lat. 41. 3.
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BISACRAMENTAUX | adj. pris subst. (Hist. eccl.) nom donné par quelques théologiens à ceux des hérétiques qui ne reconnoissent que deux sacremens, le baptême & l'eucharistie ; tels que sont les Calvinistes. (G)
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BISAGE | S. m. (Teinture) façon qu'on donne à une étoffe, & qui consiste à la faire passer d'une premiere couleur dans une autre. Le bisage est permis aux Teinturiers du petit teint.
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BISAGOS | (Géog.) îles d'Afrique proche de la côte de Guinée, dont la principale est celle de Formosa. Long. 2. lat. 11.
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BISALTES | S. m. pl. (Hist. & Géog. anc.) peuples de Scythie sans aucune demeure fixe, & vivant de lait mêlé avec du sang de cheval. Virgile en a fait mention au III. livre des Géorgiques.
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BISANTAGAN | (Géog.) ville d'Asie dans l'Indostan ; au royaume de Cambaye.
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BISBAL | (Géog.) petite ville de la Catalogne en Espagne.
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BISCACHO | S. m. (Hist. nat.) animal du Pérou, qui a la queue de l'écureuil & la chair du lapin, & dont il faut attendre du tems & des observateurs une meilleure description.
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BISCARA | (Géog.) ville d'Afrique au royaume d'Alger, dans la province de Labez. Long. 23. 20. lat. 35. 10.
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BISCAYE | (Géog.) province d'Espagne, qui a au nord la mer de Biscaye, à l'occident les Asturies, au midi la Castille vieille, & à l'orient le territoire d'Avala : elle est riche en mines de fer, & contient 21 villes enfermées de murailles. On prétend que le langage qu'on y parle est l'ancienne langue Celtique, qui est commune aux Biscayens avec les Bas-Bretons, & ceux qui habitent la province de Galles en Angleterre. Bilbao en est la capitale.
BISCAYE, (la nouvelle) Géog. province du Mexique dans l'Amérique septentrionale, dans l'audience de Guadalaxara, aux Espagnols.
BISCAYE, (mer de) Géog. c'est une partie de l'Océan qui environne la partie septentrionale de l'Espagne.
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BISCHBURG | (Géog.) petite ville de la Prusse Ducale ou Polonoise.
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BISCHMARCK | (Géog.) petite ville de la Poméranie, près de Stargard.
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BISCHOFFS-HEIM | (Géog.) ville d'Allemagne dans le cercle du bas Rhin, dans l'électorat de Mayence. Long. 27. 7. lat. 49. 40. Il y a deux autres villes de ce nom, l'une en Franconie, l'autre en Soüabe.
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BISCHOFFS-LACK | (Géog.) ville de la haute Carinthie, entre les rivieres de Pollent & de Zaher.
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BISCHOFFS-TEIN | (Géog.) petite ville & château de la Prusse.
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BISCHOFFS-WERDA | (Géog.) petite ville d'Allemagne dans le cercle de la haute-Saxe en Misnie, à une lieue de Dresde.
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BISCHOFFS-ZELL | (Géog.) ville de Suisse dans le Turgaw. Long. 26. 53. lat. 47. 33.
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BISCHWEILER | (Géog.) ville & château de la basse-Alsace, proche de Strasbourg.
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BISCITE | (Hist. mod.) c'est un lieu couvert à Constantinople où sont une infinité de boutiques, remplies de toutes sortes de marchandises, & surtout d'équipages pour les chevaux.
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BISCOTINS | S. m. (Pâtisserie) sorte de pâtisserie friande qui se fait de la maniere suivante. Prenez du sucre selon la quantité de biscotins que vous voudrez faire, faites le cuire à la plume ; prenez une demi-livre de farine, poussez-la dans le sucre ; remuez, faites une pâte ; parsemez une table de sucre en poudre ; étendez dessus votre pâte, pétrissez-la ; quand elle sera dure, pilez-la dans un mortier avec un blanc d'oeuf, de la fleur d'orange, un peu d'ambre ; incorporez bien le tout ; divisez votre masse en petites boules ; jettez ces boules dans de l'eau bouillante ; enlevez-les avec l'écumoire quand elles nageront à la surface ; laissez-les égoutter : posez-les ensuite sur du papier, & les faites cuire à four ouvert. Cela fait, vous aurez ce qu'on appelle des biscotins.
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BISCUIT | S. m. (terme d'ouvriers de bâtiment) ce sont des cailloux qui se trouvent dans les pierres à chaux, & qui restent dans le bassin après que la chaux est détrempée. (P)
BISCUIT : (Marine) c'est du pain qu'on cuit deux fois pour les petits voyages, & quatre fois pour les voyages de long cours, afin qu'il se conserve mieux. On le fait un mois avant l'embarquement ; & sur les vaisseaux du roi, il est de farine de froment épurée de son, & de pâte bien levée. Le biscuit écrasé & en miettes s'appelle machemoure. Voy. MACHEMOURE. Pour conserver le biscuit, il faut de tems en tems le faire sécher & lui faire prendre l'air.
Faire du biscuit, aller faire du biscuit ; c'est en termes de Marine, en aller faire provision lorsqu'on craint d'en manquer. (Z)
* Ce biscuit se pétrit de la maniere suivante. On prend du froment de trois ou quatre mois, on le fait moudre ; on n'employe la farine que quinze jours après qu'elle est venue du moulin. Quand on veut l'employer, le boulanger sépare de la masse environ vingt livres de levain : le levain est un morceau de pâte pris du levain de la derniere fournée faite entre onze heures & midi. A quatre heures il met ce levain dans le pétrin ; il verse dessus environ dix pots d'eau plus que tiede, sur-tout en hyver ; il délaye le tout en y ajoûtant une quantité de farine suffisante, pour en obtenir une pâte qui ne soit ni dure ni molle ; il ramasse cette pâte dans un coin du pétrin, & l'environne de farine pour l'empêcher de s'affaisser ; il la laisse lever dans cet état pendant cinq ou six heures, puis il recommence à ajoûter de l'eau, de la farine, & à délayer derechef. A une heure après minuit, il ajoûte une troisieme fois de l'eau & de la farine, à la concurrence de trente livres : toutes ces préparations donnent une masse de cent vingt livres. Il divise cette masse en deux parts : l'une servira pour le levain à la seconde fournée : l'autre servira pour faire le biscuit de la premiere. A chaque fournée il augmente toûjours la masse de levain de soixante livres, excepté à la derniere, où la part de pâte destinée pour faire le biscuit, est de cent livres ; & l'autre destinée au levain, n'est que de vingt. Il faut un huitieme plus de levain en hyver qu'en été. Le boulanger prend la masse de pâte destinée pour le biscuit ; il y verse de l'eau chaude, la délaye, la met en eau blanche & épaisse, y pousse de la farine à deux ou trois reprises, remue, pétrit, agite en tout sens, frappe à coups de plat de main, manie, remanie, ramasse toute la pâte en un tas, la divise en quatre, continue de la travailler, rassemble ces quatre parties en un seul tas, travaille, divise encore en quatre parties, qu'il rejoint derechef en un tas, travaille, tire la pâte du pétrin, & la jette sur une table, où un autre boulanger la tourne, & manie jusqu'à ce qu'elle soit ferme & bien ressuyée. Alors on la met en galette. On donne à la galette quatorze onces de pâte, qui se réduisent par la cuisson à huit ou neuf onces. On divise toute la pâte en petites masses de quatorze onces, propres à faire autant de galettes ; on tourne & retourne ces petites masses à mesure qu'on les sépare, pour achever de les affermir ; on les applatit ensuite avec un billot, dont le milieu est un peu plus gros que les bouts, ce qui rend les galettes un peu concaves, & ne leur laisse que quatre à cinq lignes d'épaisseur par les bords. On les marque en croix avec un instrument qu'on appelle croisoire ou peigne ; on les retourne ; on les couche à côté les unes des autres ; on les laisse reposer une demi-heure ; & lorsque le four est chaud, on les pique de cinq à six coups d'un instrument de fer à trois pointes, qu'on appelle piquet ; & on les enfourne quand on s'est apperçû qu'elles ont assez levé. C'est l'habitude de travailler qui apprendra quand le four est assez chaud, & que les galettes auront assez levé.
Le four est construit de brique ; sa forme n'est pas différente des autres fours à boulanger. Il a deux piés & demi de haut, depuis la clé de la voûte jusqu'à la sole ; sa bouche, deux piés de haut sur deux de base ; la sole, neuf piés de large sur neuf & demi de profondeur ; l'hostil, trois piés de hauteur ; le feu, deux piés de distance depuis la hauteur de la bouche du four jusqu'au manteau de la cheminée ; le manteau, huit pouces au-dessus de la bouche.
Après avoir tiré les braises & écouvillonné, le boulanger enfourne les galettes à côté les unes des autres ; ferme le four, & jette quelques pelletées de braise contre la porte. Au bout d'un quart-d'heure il examine si son biscuit a pris couleur : s'il le trouve assez jaune, il laisse le four ouvert pendant un quart-d'heure ; il écarte les braises qui étoient contre la porte, puis il la referme : au bout d'un quart-d'heure ou environ, il tire quelques galettes des premieres enfournées, & les rompt ; si elles sont cuites, elles seront roussâtres en-dedans par les bords ; & le peu de mie contenu entre les croûtes, sera spongieux & sec : on presse cette mie ; si on la trouve résistante & seche, la galette est cuite.
Lorsque la galette est cuite, on la porte à la soute qu'on a bien nettoyée, & qu'on fait chauffer pendant quatre jours : les soutes sont des lieux pratiqués sur les fours, boisés haut & bas, & bien calfatés. On l'y laisse un mois pour le ressuyer, & autant pour le rasseoir. On se contente en Provence, au lieu de l'enfermer dans une soute, de l'étaler à l'air dans un grenier, dont on observe de fermer les fenêtres dans les tems humides. Il ne faut par jour qu'un gindre ou maître de pelle, & deux pétrisseurs, qui font chacun leurs trois fournées par jour.
Le biscuit se transporte dans les vaisseaux par un tems sec ; on l'enferme aussi dans des soutes doublées, calfatées, nattées & échauffées pendant six jours & six nuits : on les laisse ensuite reposer pendant trois ou quatre jours après quoi on les remplit.
* BISCUIT, s. m. (Pâtissier) sorte de pâtisserie friande qui se fait de la maniere suivante. Prenez huit oeufs, cassez-les dans un vaisseau plat, battez-les, jettez-y une demi-livre de sucre en poudre, autant de farine, plûtôt moins que plus, délayez ; faites une pâte blanche, bien battue, & sans aucun pâton ; arrosez cette pâte d'un peu d'eau de fleur d'orange en la battant ; ayez des moules en losanges ou quarrés longs de fer blanc, enduisez-les de beurre légerement ; versez votre pâte dans ces moules, saupoudrez-la de sucre, mettez au four, faites cuire à four ouvert ; après la cuisson, glacez avec du sucre en poudre, & laissez refroidir.
* BISCUIT, (terme commun aux Fayenciers, aux Potiers de terre, & ouvriers en Porcelaine) c'est le nom qu'ils donnent à la pâte qu'ils employent à faire leurs vaisseaux, & sur laquelle ils appliquent ensuite la couverte. Voyez COUVERTE, & POTERIE DE TERRE, FAYENCE, & PORCELAINE.
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BISE | S. f. (Marine) vent de nord-est ; c'est un vent sec & froid qui souffle dans l'hyver, entre l'est & le septentrion. (Z)
BISE, ou BIZE, s. f. (Commerce) c'est un poids qui sert dans le royaume de Pégu à peser les marchandises : il revient à deux livres cinq onces, poids de Venise, ou trois livres neuf onces du poids leger de la même ville : chaque bise pese cent teccalis. Voyez TECCALI. Au-dessous de la bise le plus petit poids est l'aboccho, qui ne pese que douze teccalis & demi : l'agito pese deux abocchi, & deux agiti la demi- bise, c'est-à-dire cinquante teccalis. (G)
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BISÉ | adj. (Teinture) on dit d'une étoffe qui a repassé une seconde fois à la teinture, qu'elle est bisée.
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BISEAU | S. m. chez presque tous les ouvriers en fer & en acier, se dit d'un petit talud que l'on pratique soit à la lime, soit à la meule, soit à la polissoire ; mais plus ordinairement à la meule, tout le long du tranchant d'un instrument qui doit couper. On dit lever un biseau ; & cette opération précede presque toûjours la formation du tranchant ; il y a même des instrumens où le tranchant reste en biseau plus ou moins court, selon que la matiere qu'ils ont à couper est plus ou moins dure ; telles sont les forces, les cisailles, &c. On ne le laisse pas aux petits ciseaux, ou du moins il y est presque insensible.
BISEAU, (en terme de Diamant aire) sont les principales faces qui environnent la table d'un brillant ; ces biseaux sont encore recoupés par en bas en plusieurs petites facettes qu'on appelle indifféremment biseaux recoupés ou facettes recoupées.
BISEAU, (Jardinage & Architecture) Voyez CHAMFRAIN.
BISEAU, (ustensile d'Imprimerie) c'est un morceau de bois long, large de douze à quinze lignes dans sa partie la plus large, sur sept à huit lignes d'épaisseur, très-uni d'un côté & de l'autre, qui va en diminuant depuis sa tête jusqu'à son extrémité. Il y en a de taillés pour la couche droite, & d'autres pour la couche gauche ; ainsi ils ne peuvent être changés de côté ; ils sont plus ou moins longs, suivant la grandeur de l'ouvrage. Le côté uni du biseau soûtient une des extrémités des lignes, & l'autre côté donne la facilité de serrer la forme avec les coins. Voyez Planche XI. fig. 5. lettres K L, fig. 6. lettres L M, fig. 7. lettre M N.
BISEAUX, (dans l'orgue) c'est le diaphragme qui est placé entre le corps du tuyau & son pié. Voyez les articles BOURDON de 16 piés ou 8 piés bouché, & MONTRE de 16 piés, où les deux sortes de biseaux sont décrits.
BISEAU, outil dont les Tourneurs se servent : il est d'acier ; le tranchant en est formé par un plan incliné en angle aigu à la longueur de l'outil, & dont l'arrête est aussi oblique à cette même longueur : il y en a de droits, de gauches, de ronds, de revers. Voyez-en les figures, Planche I. du Tour. Tous ces outils sont emmanchés dans des manches de bois garnis de viroles.
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BISEGLIA | (Géog.) ville d'Italie, au royaume de Naples, dans la terre de Bari, près le golfe de Venise. Long. 34. 19. lat. 41. 18.
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BISENTINA | (Géog.) petite île dans le lac de Bolsena, dans l'état de l'Eglise.
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BISER | v. n. (Agriculture) c'est baisser, noircir, dégénérer d'année en année ; les Laboureurs prétendent que le froment le meilleur bise & finit par devenir meteil & seigle, même dans les terres les plus fortes ; aussi recommandent-ils de les réveiller par la nouveauté du grain, & d'en aller chercher au loin pour cet effet, au moins tous les trois ou quatre ans. Mais le froment, quoique plus sujet à biser que les autres grains, ne bise pas seul ; la même chose arrive aux avoines dans les terres froides, où l'on n'obtient qu'une avoine folle, qui donne beaucoup d'épis & de paille, & point de grain. Voyez l'article AVOINE.
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BISERTE | (Géog. anc. & mod.) ville maritime d'Afrique, dans le royaume de Tunis ; c'étoit autrefois la même qu'Utique. Long. 28. 10. lat. 37. 20.
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BISET | S. m. (Hist. nat. Ornith.) columba livia, oiseau qui ressemble beaucoup à notre pigeon, mais il est un peu plus petit, les piés sont rougeâtres, & le bec blanchâtre ; il y a un peu de couleur pourpre auprès des narines ; les plumes sont par tout le corps de couleur cendrée, à l'exception du bout de la queue qui est noirâtre, & des plumes du milieu qui sont un peu roussâtres ; le dessous du cou & les côtés paroissent de couleur de pourpre & de couleur verdâtre à différens aspects, le dessus du cou est de couleur cendrée teinte de pourpre ; les quatre plus longues plumes de l'aîle sont noirâtres & légerement teintes de roux ; les plus petites sont cendrées ; celles du milieu sont à moitié de couleur cendrée, & l'autre moitié qui est celle du dessus, est noirâtre, & les plumes qui sont les plus proches du corps sont roussâtres. Cet oiseau a près de quatorze pouces de longueur depuis la pointe du bec jusqu'à l'extrémité de la queue ; il differe du pigeon ramier en ce qu'il est beaucoup plus petit, & qu'il n'a point comme celui-ci de taches blanches autour du cou & dans les aîles. Willughbi, Ornith. Voyez OISEAU. (I)
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BISETTE | S. f. (Commerce) espece de dentelle de fil de lin blanc, très-basse, de peu de valeur ; elle se travaille sur le coussin, à l'épingle & au fuseau, comme les autres dentelles.
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BISEURS | S. m. (Teinture) c'est ainsi qu'on appelloit autrefois les maîtres Teinturiers du petit-teint, parce qu'il n'étoit permis qu'à eux de faire le bisage & réparage.
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BISHOPS-CASTLE | (Géog.) petite ville d'Angleterre, de l'évéché de Hereford, dans le Shropshire.
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BISIGNANO | (Géog.) ville d'Italie, au royaume de Naples, dans la Calabre, avec titre de principauté. Long. 34. 10. lat. 39. 37.
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BISMARCK | (Géog.) petite ville d'Allemagne, dans la vieille marche de Brandebourg, sur la Biese.
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BISMUTH | (Chimie & Minéralogie) c'est un demi métal ou métal imparfait, qui paroît être un assemblage de cubes assez grands, formés par de petites lames minces appliquées les unes sur les autres : sa couleur ressemble assez à celle de l'étain & de l'argent ; mais lorsqu'il a été exposé quelque tems à l'air, il devient bleuâtre ; il a beaucoup de ressemblance avec le régule d'antimoine & avec le zinc : le bismuth est très-cassant & facile à réduire en poudre ; il n'est point de demi-métal si aisé à fondre ; en effet il suffit de l'approcher d'une chandelle pour qu'il se mette à couler.
On trouve beaucoup de bismuth en Saxe, dans les mines de Sneeberg & de Freyberg, ainsi que dans presque toutes les mines d'où on tire du cobalt ; il est ordinairement lié à une pierre dure dans sa mine, qui est pesante, d'une fonte tantôt dure tantôt aisée, brillante comme de l'argent, & dont les signes distinctifs sont d'être de couleurs très-variées, comme jaune, verdâtre, rougeâtre, & de couleur de gorge de pigeon ; il s'en trouve de blanche ou de couleur d'argent sans aucun autre mélange : les Allemands l'appellent misspickel, mais c'est un minéral purement arsénical. La vraie mine de bismuth contient, 1°. beaucoup d'arsenic ; 2°. une partie semi-métallique ou réguline ; 3°. une terre pierreuse & vitrifiable, qui donne une couleur bleue au verre. M. Henckel n'y veut point admettre de soufre.
Il paroît que les anciens n'ont eu aucune connoissance du bismuth ; Agricola l'a confondu avec une espece de mine de plomb, qu'il nomme pyrites plumbi cinereus ; d'autres l'ont appellé étain cendré, stannum cinereum : on le trouve souvent désigné par étain de glace. On l'a souvent qualifié de marcassite par excellence, & de tectum argenti, parce que l'on soupçonne assez ordinairement une mine d'argent dans son voisinage. Quelques naturalistes ont prétendu qu'il ne se trouvoit que dans les mines d'étain : mais cette opinion est mal fondée, attendu qu'il est certain qu'il est très-souvent pur & sans mélange d'aucun étain ou autre métal. Lazare Ercker croît que le bismuth n'est qu'une mine d'argent qui n'a pu parvenir à maturité. Il paroît qu'on ne lui a donné tant de noms différens, & qu'on n'a eu sur son compte des opinions si variées, qu'à cause des rapports & de la ressemblance qu'il a avec plusieurs autres métaux.
Il est vrai en effet que le bismuth contient ordinairement de l'argent, mais c'est en si petite quantité, qu'il est plus avantageux de le travailler pour d'autres usages.
Le bismuth a beaucoup de rapport avec le plomb ; si on le dissout dans du vinaigre, il l'adoucit comme lui, & produit un sucre tout-à-fait semblable à celui de saturne : mais il se dissout beaucoup plus facilement que le plomb dans l'esprit de nitre, & y produit une effervescence considérable, ce qu'on ne remarque pas dans le plomb.
Le bismuth a la propriété de se mêler très-facilement à tous les métaux, même les plus durs ; c'est ce qui lui a mérité quelquefois le nom d'aimant des métaux : mais il les rend plus legers & plus cassans en raison de la quantité qu'on y en a ajoûtée. Si on en mêle au cuivre dans la fonte, il le blanchit ; si on le joint à l'étain, il le rend plus sonore, plus blanc, & lui donne une consistance approchante de celle de l'argent : c'est ce qu'on peut remarquer visiblement dans l'étain d'Angleterre, qui se fait, dit-on par le mêlange d'une certaine quantité de bismuth, de régule d'antimoine & d'étain, & même une portion de cuivre. Nonobstant la facilité qu'a le bismuth de se mêler avec tous les métaux, une singularité bien remarquable, c'est qu'à la fonte, quelque chose qu'on fasse, on ne peut venir à bout de l'unir au zinc, tandis qu'il paroît avoir tant d'affinité & de rapport avec ce demi-métal, que quelques naturalistes les ont confondus & les ont pris l'un pour l'autre.
Le bismuth facilite considérablement la fonte des métaux, qu'il pénetre & qu'il divise ; c'est ce qui a donné lieu de croire qu'on pourroit s'en servir avec succès au lieu de plomb pour coupeller. C'est cette même qualité qui fait que lorsqu'il a été fondu avec de l'argent, de l'étain ou du plomb, ces métaux sont rendus par-là plus propres à s'amalgamer avec le vif-argent ; & si on vient ensuite à passer l'amalgame au chamois, on remarque que le vif-argent entraîne visiblement avec lui beaucoup plus de métal qu'il n'auroit fait sans cela.
On dit que les Droguistes, lorsqu'ils sont de mauvaise foi, savent tirer avantage de la connoissance qu'ils ont de cette derniere propriété du bismuth, dont ils se servent pour falsifier leur mercure & en augmenter le poids.
Pour tirer le bismuth de sa mine, il ne faut pas plus de travail que pour tirer l'antimoine de la sienne : lorsque la mine est riche, il suffit de la casser en morceaux ; de la mettre dans un pot de terre ou de fer, & d'allumer un feu de bois tout autour ; si elle est pauvre & d'une fonte plus dure, il faut y joindre du flux noir, du sel commun, & du fiel de verre, & la traiter comme on fait l'étain ou le plomb, en observant de donner un feu modéré ; car il n'en faut que peu pour réduire en scories les matieres hétérogenes qui y sont mêlées, outre qu'il se réduit en chaux & se volatilise aisément au grand feu.
Lorsque le bismuth est en fonte, l'arsenic, dont il abonde, s'en sépare par sublimation, & c'est en quoi ce minéral ressemble beaucoup au cobalt, à qui il est quelquefois si étroitement uni dans la mine, qu'il est très-difficile de les séparer. Voyez l'article COBALT.
En effet, ils contiennent l'un & l'autre non-seulement beaucoup d'arsenic, mais encore ils ont tous les deux pour base une terre bleue, propre à faire le bleu d'émail ; on la voit même dans quelques mines de bismuth toute formée avant que de les travailler. Cette terre bleue que le bismuth dépose à la fonte, & que les Allemands appellent Wismuth graupen (farine de bismuth) en fait la base ; c'est suivant M. Henckel, une terre fixe, essentielle au bismuth & au cobalt, à qui elle est intimement unie ; cette terre est non-métallique, attendu que quelque peine qu'on se soit donnée, on n'a jamais pû en tirer la moindre partie de métal. Encore une chose qui est commune à ces deux minéraux, c'est que s'ils demeurent pendant quelque tems entassés tels qu'ils sortent de la mine, soit qu'ils soient exposés à l'air, soit qu'on les mette à couvert, ils produisent des vapeurs d'une odeur arsénicale très-sensible & très dangereuse, & fleurissent de couleur de fleurs de pêcher. Le même M. Henckel dit qu'on en peut faire des cristaux ou du vitriol, non-seulement verds, mais encore d'un beau rouge pourpre ; ce qui se fait, suivant M. Pott, en versant de l'eau sur la mine du bismuth, ou en la laissant exposée à la rosée ou à la pluie. On tire aussi du bismuth un magistere & des fleurs qui sont un bon cosmétique. Voyez l'article BLANC DE BISMUTH. Le bismuth dissous dans l'esprit de nitre & précipité par l'eau, donne une poudre blanche qu'on recommande pour les maladies inflammatoires. Mais il paroît qu'attendu l'arsenic dont ce demi-métal abonde, l'usage interne en doit être regardé comme fort suspect. Voyez l'excellente dissertation de M. Pott sur le bismuth, imprimée à Berlin en 1739. (-)
L'on peut aussi, suivant M. Pott, faire du vitriol de bismuth d'une autre façon : c'est en prenant 1 1/2 partie de bismuth en poudre, & une partie d'huile de vitriol : on les met en distillation ; on en tire tour le flegme à feu modéré, on calcine le résidu qu'on pulvérise ensuite ; on renverse dessus le flegme qui en a été distillé la premiere fois, en y joignant autant ou même plus d'eau commune ; on filtre le produit ; on le fait évaporer, & on laisse la crystallisation se faire.
Le bismuth dissous dans l'esprit de nitre, donne une encre de sympathie fort curieuse, qui est de l'invention de M. Hellot, de l'Académie royale des Sciences. Voyez l'article ENCRE DE SYMPATHIE.
Les Alchimistes font très-grand cas du bismuth, & le regardent comme une matiere très-digne de leurs recherches, ils ont cru pouvoir en tirer l'alkahest ou leur dissolvant de tous les métaux, & même le remede universel. On le trouve désigné dans les livres des adeptes, sous les noms de mine brillante de saturne ; de dragon de montagne, de fleur des métaux, d'electrum immaturum, & de saturne philosophique. (-)
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BISNAGAR | (Géog.) grande ville d'Asie, dans les Indes, capitale d'un royaume de même nom, appellée aussi Carnate. Long. 95. 30. lat. 13. 20.
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BISNOW | (Hist. mod.) nom d'une secte de banjans, dans les Indes. Ils appellent leur dieu ram-ram, & lui donnent une femme. Ils parent leurs idoles de chaînes d'or, de colliers de perles, & de toutes sortes de pierreries. Ils chantent dans leurs agoges ou mosquées des hymnes en l'honneur de ces divinités, accompagnant leurs chants de danses, du son des tambours, des flageolets, des bassins de cuivre, & d'autres instrumens, dont ils jouent pendant leurs prieres. Ce dieu n'a point de lieutenant comme celui de la secte de Samarath, mais il fait tout par lui-même. Ces banjans ne vivent ordinairement que d'herbes & de légumes, de beurre frais, & de lait.
Le meilleur mets est l'atschia, qui est composé de citrons confits au sel avec du gingembre, de l'ail, & de la graine de moutarde. Ceux de cette secte se mêlent la plûpart de marchandise, & entendent merveilleusement bien le commerce. Leurs femmes ne se brûlent point sur le bucher de leurs maris, comme celles de la secte de Samarath : mais elles demeurent toûjours veuves. Mandesto, tom. II. d'Olearius (G)
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BISON | S. m. (Hist. nat. Zoolog.) boeuf sauvage, dont les anciens ont fait mention : on l'a comparé au boeuf ordinaire pour la forme principale du corps & pour la grandeur, & au cheval & au lion pour la criniere. On a prétendu qu'il est indomptable & plus promt à la course que le taureau. Selon le rapport des différens auteurs qui ont parlé du bison, il a les cornes pointues & recourbées à l'extrémité comme un hameçon, la langue rude comme une rape, la tête courte, les yeux grands, ardens & menaçans, le front large, & les cornes assez éloignées l'une de l'autre pour que trois gros hommes puissent s'asseoir entre les deux, le dos bossu, le poil noirâtre, & non rouge ni roux, à ce que prétend Aldrovande.
On a donné le nom de bison aux taureaux sauvages d'Amérique, que les habitans de la Floride nomment butrons. Ces bisons ont les cornes longues d'un pié, le dos bossu comme le chameau, le poil long & roussâtre, & la queue semblable à celle du lion. Il paroît que ces taureaux d'Amérique sont de la même espece que ceux dont les anciens ont fait mention sous le nom de bison, & qu'ils ont dit être fréquens in tractu saltûs Hercynii & dans tout le nord. Les Amériquains se vêtissent de la peau de leurs boeufs, & s'en font des couvertures pour se défendre de la rigueur du froid. Voyez Aldrov. de Quad. bisul. pag. 353. & suiv. Ray, Quad. synop. pag. 71. Voyez TAUREAU. (I)
Les cornes du bison sont estimées sudorifiques & propres pour résister au venin, si on les prend en poudre, depuis un scrupule jusqu'à un gros ; la fiente en est fort résolutive. (N)
BISON, en termes de Blason, est la même chose que buste. Tête de bison couronné. (V)
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BISQUAINS | S. f. plur. (Commerce) ce sont des peaux de mouton garnies de leur laine, qui ont été passées & préparées chez les Mégissiers. C'est avec ces peaux que les Bourreliers font des couvertures aux colliers des chevaux de tirage. Voyez HOUSSE.
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BISQUE | S. m. terme de Paumier, qui signifie l'avantage qu'un joüeur fait à un autre, en lui donnant un quinze pour toute chose ; & le joüeur qui reçoit cet avantage, peut prendre ce quinze dans tel endroit de la partie que bon lui semble. Ainsi prendre bien sa bisque, signifie placer à propos ce quinze.
BISQUE, s. f. (Cuisine) sorte de potage en ragoût ; on en fait de gras & de maigres ; aux écrevisses, en légumes, comme lentilles, &c. c'est toûjours une purée qu'on répand sur le potage, ou sur d'autres mets, & cette purée ne se fait pas autrement que les autres. Voyez PUREE.
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BISSE | S. f. terme de Blason, espece particuliere de serpent, qu'on appelle biscia en Italie. Quelques-uns veulent que ce soit de son sifflement qu'on lui ait donné ce nom. D'autres disent qu'il vient du mot françois bis, qui signifie gris cendré, à cause que ces sortes de serpens sont presque tous de cette couleur. (V)
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BISSEAUX | (Géog.) île d'Afrique, sur la côte de Nigritie, habitée par des Negres. Il y a neuf rois dans cette île qui a quarante lieues de circuit.
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BISSECTION | S. f. en Géometrie, est la division d'une étendue quelconque, comme un angle, une ligne, &c. en deux parties égales ; c'est ce qu'on nomme autrement bipartition. Voyez DIVISION, &c. (E)
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BISSEXTILE | adj. année bissextile en Chronologie, est une année composée de trois cent soixante-six jours ; elle arrive une fois en quatre ans par l'addition d'un jour dans le mois de Février, pour retrouver les six heures que le soleil employe dans un an au-delà des trois cent soixante-cinq jours qu'il met ordinairement dans son cours annuel, lesquelles six heures en quatre ans, font vingt-quatre heures, & par conséquent un jour entier. Par cette addition la longueur de l'année est à-très-peu-près la même que celle de la révolution de la terre autour du soleil. Voyez AN.
Le jour ajoûté de la sorte se nomme aussi bissextil, César l'ayant fixé au jour qui précede le 24 Février, qui chez les Romains étoit le six des calendes de Mars.
Le 24 Février se comptoit deux fois cette année, & on disoit par conséquent deux fois (bis) le sixieme des calendes de Mars, sexto calendas Martii ; c'est pour cette raison que le jour intercalaire & l'année où il est inseré, sont l'une & l'autre nommés bissextiles. Comme dans cette année Février a 29 jours, le jour de S. Matthias, qui est le 24 de ce mois dans l'année ordinaire, se célebre alors le 25 ; & l'année bissextile a deux lettres dominicales, dont l'une sert jusqu'à la vigile de S. Matthias, l'autre jusqu'au reste de l'année. Voyez LETTRE DOMINICALE.
Si l'année solaire étoit véritablement & exactement de 365 jours, 6 heures, l'année commune se retrouveroit exactement au bout de quatre ans avec l'année solaire ; mais l'année solaire étant de 365 jours 5 heures 49 minutes, il s'en faut 44 minutes que ces deux années ne s'accordent au bout de quatre ans.
Les Astronomes chargés par Gregoire XIII. de la réformation du calendrier, observant donc que le bissextil en quatre ans ajoûtoit 44 minutes à l'espace de tems que met le soleil à retourner au même point du zodiaque, & trouvant que ces minutes surnuméraires formeroient un jour en 133 ans, résolurent de prevenir le changement qui s'introduiroit ainsi peu-à-peu dans les saisons, & pour cela ils ordonnerent, que dans le cours de 400 ans, on retrancheroit trois bissextiles ; ce fut pour cette raison que l'année 1700 ne le fut point ; 1800 & 1900 ne le seront pas non plus : mais 2000 le sera, & ainsi du reste. Voyez CALENDRIER GREGORIEN. (O)
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BISSUS | S. m. (Hist. nat. anc.) matiere propre à l'ourdissage, & plus précieuse que la laine. Les plus habiles critiques n'ont pas encore bien éclairci ce que les anciens entendoient par le bissus. Ils en ont seulement distingué de deux sortes : celui du Grec, qui ne se trouvoit que dans l'Elide, & celui de Judée qui étoit le plus beau. L'auteur nous apprend que celui-ci servoit aux ornemens sacerdotaux, & même que le mauvais riche en étoit vêtu : mais comme sous les noms de bissus, les anciens ont confondu les cotons, les ouates, en un mot tout ce qui se filoit & étoit plus précieux que la laine, il n'est pas aisé de dire au juste ce que c'étoit, & s'il ne s'en tiroit pas du pinna marina, coquillage ou espece de grande moule de deux pieces, larges, arrondies par en-haut, pointues par en-bas, fort inégales en dehors, d'une couleur brune & lisse en-dedans, tirant vers la pointe sur la couleur de nacre de perles, longues depuis un pié jusqu'à deux & demi, portant à l'endroit le plus large environ le tiers de leur longueur ; & garnies vers la pointe du côté opposé à la charniere, d'une houppe longue d'environ six pouces, plus ou moins, selon la grandeur du coquillage, composée de plusieurs filamens d'une soie fort déliée & brune, qui regardés au microscope, paroissent creux ; qui donnent quand on les brûle, une odeur urineuse comme la soie ; & qu'Aristote qui les nomme bissus, ou soie, des coquilles qui les portent, nous dit qu'on peut filer : il n'y a donc guere de doute que cette soie n'ait été employée pour les habits des hommes riches dans un tems où la soie n'étoit que peu connue, & que les anciens ne l'ayent nommée bissus, soit par sa ressemblance avec le bissus dont ils filoient des étoffes précieuses, soit qu'elle fût elle-même le bissus dont ils faisoient ces étoffes. Ce qu'il y a de certain, c'est que le bissus du pinna marina, quoique filé grossierement, paroît beaucoup plus beau que la laine, & approche assez de la soie : on en fait encore à présent des bas, & d'autres ouvrages qui seroient plus précieux, si la soie étoit moins commune. Pour filer le bissus, on le laisse quelques jours dans une cave, afin de l'amollir & de l'humecter ; puis on le peigne pour en séparer la bourre & les autres ordures ; après quoi on le file comme la soie.
Les poissons qui donnent le bissus, s'en servent pour attacher leurs coquilles aux corps voisins ; car, comme ils sont plantés tous droits sur la pointe de leur coquille, ils ont besoin de ces filamens qu'ils étendent tout autour, comme les cordages d'un mât, pour se soûtenir dans cette situation.
De quelque maniere que le pinna marina forme ses filamens, Rondelet nous dit qu'ils sont plus beaux & plus soyeux que ceux des moules, & qu'ils en different autant que la soie differe de l'étoupe. V. PINNA MARINA, & les mémoires de l'académie des Sciences, année 1712. pag. 204.
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BISTI | voyez BEISTI.
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BISTOQUET | S. m. (Paumier) instrument pour joüer au billard : c'est une espece de masse fort pesante & épaisse, dont la queue est plate & recourbée. On s'en sert pour frapper la bille d'un coup sec, lorsqu'elle est avancée sur le tapis, & qu'on s'est interdit l'usage de la masse ordinaire.
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BISTORTE | S. f. bistorta, (Hist. nat. bot.) genre de plante dont la fleur n'a point de pétales ; elle est composée de plusieurs étamines qui sortent d'un calice découpé. Le pistil devient une semence ordinairement triangulaire, & renfermée dans une enveloppe qui a servi de calice à la fleur. Ajoûtez au caractere de ce genre, que les fleurs sont disposées en épi, & que les racines sont charnues, tortues, repliées ordinairement les unes sur les autres, & garnies de chevelu. Il se trouve des especes de ce genre, qui, outre les fleurs & les semences, portent des tubercules qui poussent de petites feuilles & de petites racines. Tournefort, Inst. rei herb. Voyez PLANTE. (I)
Bistorta radice minus intorta, J. B. 3. 538. Ses racines sont seules en usage ; elles sont dessicatives, astringentes, bonnes dans toutes les especes de pertes & de flux, dans le pissement de sang & l'incontinence d'urine ; on les croit alexipharmaques, salutaires dans les fievres pestilentielles ; elles résistent au poison, & l'on peut s'en servir dans les morsures & piquures d'animaux venimeux. (N)
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BISTOURI | S. m. instrument de Chirurgie, en forme de petit couteau, destiné à faire des incisions : on en a de droits & de courbes. On considere deux parties à cet instrument ; la lame & le manche : la lame doit être d'un bon acier bien trempé. La partie de la lame qui est opposée à la pointe, se nomme le talon ; c'est un quarré allongé percé dans son milieu pour y passer un clou. L'extrémité postérieure du talon se termine par une queue fort courte, qui finit par un petit rouleau ou par une petite lentille de deux lignes de diametre, pour s'arrêter sur la châsse avec fermeté, & empêcher que la lame ne tourne comme celle d'un rasoir. La partie tranchante du bistouri droit est perpendiculaire, & son dos forme une ligne oblique, & a une ligne d'épaisseur à sa base ; il va insensiblement en diminuant jusqu'à la pointe. On considere en outre à la lame d'un bistouri le biseau & l'évuidé. Le biseau est une petite surface plate qui commence à la base de la lame, & qui accompagne le dos de chaque côté dans presque toute la longueur. Cette surface se fait par la meule ; elle a environ une ligne de diametre, & va insensiblement se perdre avant d'être arrivée à la pointe. On appelle l'évuidé l'espace qui est compris depuis le biseau jusqu'au tranchant, il est un peu cave ; il s'étend depuis le talon jusqu'à la pointe ; il est fait par la rondeur de la meule ; son utilité est de rendre le tranchant plus fin, en diminuant de la matiere. Fig. 1. Pl. II.
Le bistouri courbe doit avoir les mêmes qualités : la courbure n'en doit pas être fort grande ; il faut qu'elle commence dès sa base, qu'elle se continue insensiblement jusqu'à la pointe, & que dans tout le trajet, la courbure n'excede pas trois lignes. Le tranchant est dans la courbure. Fig. 1. Pl. II.
Je me sers dans plusieurs cas, & sur-tout dans l'extirpation des cancers, d'un bistouri courbe, tranchant sur sa convexité. Cet instrument a beaucoup d'avantage, parce que le tranchant agit tout-à-la-fois dans toute sa longueur ; & dans les bistouris ordinaires, il n'y a presque que la pointe qui soit d'usage.
Le manche des bistouris est composé de deux lames d'écaille de la même configuration que la lame. Elles sont percées à leur base d'un trou qui doit être moins large que celui du talon sur lequel elles s'appliquent, & auquel elles sont unies par un clou de fil de laiton rivé sur deux rosettes d'argent. L'extrémité de la chasse est aussi percée, & les deux pieces sont jointes par un clou rivé pareillement.
Les dimensions des bistouris peuvent varier ; ils ont communément deux pouces au plus de tranchant, & les autres parties sont proportionnées à celle-ci.
Il y a des bistouris boutonnés par leur extrémité ; on s'en sert dans les cas où l'on craint de piquer les parties par la pointe de l'instrument : on se sert aussi de bistouris à deux tranchans, pour l'ouverture des abcès, l'opération du séton, &c. Fig. 3. Pl. II.
BISTOURI A LA LIME, est un instrument de l'invention de M. Petit ; c'est un couteau dont la lame a deux pouces & demi de longueur, dont le tranchant est mousse, & qui n'a été trempé qu'après avoir été fabriqué. La pointe de ce bistouri est terminée par un petit bouton. Il est monté sur un manche d'ivoire taillé à pans. L'usage de ce bistouri est de dilater les étranglemens dans différentes opérations, comme dans les hernies, &c. ce qu'il exécute sans aucun danger, parce que son tranchant qui est mousse, ne coupe que les parties qui résistent. Pl. III. fig. 17.
BISTOURI gastrique, est un instrument inventé par M. Morand pour dilater les plaies du bas-ventre, afin de réduire les parties qui en sont sorties. Cet instrument est composé de deux pieces ; une fixe, & une mobile : la piece fixe est semblable à un manche de ciseau, excepté qu'elle est plus longue ; elle est terminée d'un côté par un anneau, & de l'autre par un stilet ou une sonde boutonnée, & un peu recourbée : la piece mobile est plus courte ; elle est composée d'une lame dont le tranchant est extérieur, & d'un petit manche au bout duquel est un anneau semblable à celui de la piece fixe ; la partie antérieure de la lame est jointe à la piece fixe par une petite charniere à jonction passée ; l'union de la piece mobile à l'immobile est à deux pouces de distance du bout du stilet. Voyez fig. 4. Pl. IV. Pour se servir de cet instrument, on le tient par les anneaux comme des ciseaux ; on porte perpendiculairement le stilet dans l'endroit où l'on veut dilater, & lorsqu'il est entré aussi avant qu'il est nécessaire, on éloigne la partie mobile de l'immobile, afin de couper avec le tranchant les parties qui font l'étranglement. Cet instrument réunit la sonde & le bistouri qui occupoient les deux mains du chirurgien. C'est un grand avantage, puisque l'opérateur en se servant du bistouri gastrique, peut ranger de l'autre main les intestins, & se dispenser d'emprunter le secours d'une main étrangere, qui n'est jamais si sûre que la sienne.
BISTOURI herniaire, est un bistouri courbe caché dans une cannule qui n'est plus en usage, pour dilater l'anneau du muscle oblique externe dans l'opération de la hernie. Feu M. de la Peyronie, premier chirurgien du Roi, a changé la destination de cet instrument, lequel, au moyen de quelques corrections qu'il y a faites, est fort convenable pour l'opération du phymosis.
Cet instrument est composé de deux pieces principales ; d'une cannule d'argent ou d'acier, & d'un bistouri. Voyez fig. 15. & 16. Pl. III.
La cannule est arrondie, longue de quatre pouces, épaisse de quatre lignes à sa partie postérieure ; elle va insensiblement en diminuant pour se terminer par une pointe un peu mousse. Cette cannule est un peu courbe dans toute sa longueur ; sa partie supérieure & postérieure est plate depuis le manche, à la longueur de quatorze lignes : on observe dans le plus large de cette surface un trou taraudé pour recevoir une vis qui sert à attacher un ressort : cette surface plate est bornée par une éminence olivaire qui s'éleve du corps de la cannule à la hauteur de trois lignes, & qui peut avoir trois lignes & demie d'épaisseur, sur cinq lignes de longueur.
La cannule est fendue à jour, suivant l'épaisseur de son corps ; de maniere que cette fente regne supérieurement, depuis la fin de la surface plate jusqu'à l'extrémité antérieure de la cannule, coupant dans ce chemin l'éminence olivaire en deux ; & inférieurement elle se termine à quatre ou cinq lignes de l'extrémité antérieure ; desorte que ce qui reste de la cannule est coupé en talud, & ne paroît point du côté de sa convexité.
L'éminence olivaire qui est coupée en deux par la fente que nous venons d'observer, est percée diamétralement & dans son milieu, ayant une de ses aîles tournée en écrou pour recevoir une vis saillante.
La partie postérieure de la cannule se termine par une soie mastiquée dans un manche d'ébene ou d'ivoire tourné en pommette ; il doit être assez gros, & de la longueur de deux pouces quatre lignes.
Il y a en outre une petite lame d'acier battue à froid pour faire ressort ; sa figure est pyramidale ; elle est très-mince, large de deux lignes & demie vers sa base, & d'une bonne ligne & demie à sa pointe, qui est mousse & arrondie ; sa longueur est de quatorze lignes ; elle est recourbée dans son milieu, de maniere que la pointe s'éloigne de l'axe. Ce ressort est percé à sa base pour le passage d'une vis qui s'engage dans l'écrou qui est pratiqué à l'endroit le plus large de la surface plate de la cannule, pour fixer & attacher une extrémité du ressort sur la cannule, tandis que son autre extrémité éloignée de l'axe de la cannule, pousse la piece de pouce dont nous allons parler.
La seconde piece principale de cet instrument est le bistouri ou la lame : on y considere deux parties ; la lame tranchante & le talon : la lame est fort étroite, elle n'a point de biseau, tout est évuidé ; sa pointe est fort allongée & fort aiguë, ce qui est fort utile pour l'opération du phymosis. La seconde partie de la lame est le talon ; on y observe une crête arrondie de trois lignes de haut, sur cinq lignes de longueur, située perpendiculairement sur la partie supérieure du talon : cette crête est percée dans son milieu par un trou qui la traverse : sur le sommet de cette crête est attachée horisontalement une piece de pouce, ou petite plaque legerement convexe, longue d'un pouce cinq lignes, & large d'environ sept à huit lignes à sa base.
La jonction de la lame avec la cannule est telle, que la premiere est entierement cachée dans la fente de la cannule ; & la crête se trouvant entre les deux pieces de l'éminence olivaire, elle y est arrêtée par une vis saillante qui traverse les deux pieces & la crête de la lame : cette jonction forme une charniere ; lorsqu'on appuie sur la piece de pouce, on l'approche du manche en forçant le ressort ; le tranchant de la lame fait en même tems la bascule, & il sort de dedans la fente de la cannule : dès qu'on cesse d'appuyer sur la piece de pouce, la pointe du ressort s'éleve avec vîtesse, & fait rentrer la lame dans la cannule.
La vis qui attache le ressort sur la surface plate de la cannule doit avoir une petite rainure ou échancrure sur le milieu de la tête, afin de pouvoir être démontée par le moyen d'un tourne-vis. Mais la vis saillante qui fait l'essieu de la charniere doit avoir un manche en forme de petite aîle, pour pouvoir séparer aisément dans le besoin la lame, & retirer la cannule.
Cet instrument, qu'on a nommé bistouri herniaire, parce qu'il a été imaginé pour faire la dilatation des étranglemens dans les hernies, n'est point propre à cet usage, parce que ces obstacles sont extérieurs (Voyez HERNIE), & que ce bistouri couperoit intérieurement beaucoup au-delà des obstacles ; inconvénient qui l'a fait proscrire de l'usage auquel il avoit été destiné.
M. de la Peyronie qui a fait ajoûter la vis ailée, qui a beaucoup de prise, & qu'on peut facilement ôter, au lieu d'une vis perdue qui tenoit la lame montée sur la cannule, s'est servi de cet instrument pour l'opération du phymosis ; il introduisoit ce bistouri avec la cannule au-delà de la couronne du gland, sans courir risque de piquer le malade : il ôtoit ensuite la vis & retiroit doucement la cannule, desorte que la lame restoit seule entre le prépuce & le gland ; il la prenoit par sa petite plaque avec la main droite, & le pouce & le doigt index de la main gauche étant appliqués aux deux côtés de l'endroit où il jugeoit que la pointe de l'instrument sortiroit, il perçoit le prépuce, passoit aussi-tôt le doigt index derriere le dos du bistouri, & achevoit l'opération en retirant à lui le bistouri avec les deux mains. Voyez PHYMOSIS.
M. le Dran a imaginé un bistouri herniaire, dont la lame est cachée dans une sonde creuse ; le talon de la lame est relevé & retiré en arriere en sortant de la sonde creuse, lorsqu'on appuie le pouce sur la plaque ; & cela sans que la pointe puisse sortir de la sonde, au moyen d'une queue d'aronde qui termine la lame, & qui coule dans deux rainures. Voyez fig. 5. Pl. VI. deux petites aîles qui sont aux parties latérales du corps de cet instrument, & qui assujettissent & défendent l'intestin, lorsqu'on a introduit dans l'anneau la sonde creuse où la lame est renfermée. (L)
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BISTOURNER | BISTOURNER
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BISTOW | (Géog.) petite ville du duché de Meklembourg.
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BISTRE | terme de Peinture, couleur brune & un peu jaunâtre dont les Dessinateurs se servent pour faire le lavis, voyez LAVIS. On s'en sert encore pour peindre en mignature. Pour faire le bistre, on prend de la suie de cheminée ; on la broye avec de l'urine d'enfant sur l'écaille de mer, jusqu'à ce qu'elle soit parfaitement affinée ; on l'ôte de dessus la pierre pour la mettre dans un vaisseau de verre de large encolure, & on remue la matiere avec une spatule de bois, après avoir rempli le vaisseau d'eau claire : on la laisse ensuite reposer pendant une demi-heure ; le plus gros tombe au fond du vaisseau, & l'on verse doucement la liqueur par inclinaison dans un autre vaisseau ; ce qui reste au fond est le bistre le plus grossier, que l'on jette : on fait de même de ce qui est dans le second vaisseau ; on remet la liqueur dans un troisieme, & on en retire le bistre le plus fin, après l'avoir laissé reposer pendant trois ou quatre jours. On doit procéder de la même maniere pour faire toutes les couleurs dont on doit se servir en lavis, afin d'avoir des couleurs qui ne fassent point corps sur le papier ; ce qui feroit un mauvais effet à l'oeil ; car la propreté que demande le dessein ne souffre que les couleurs transparentes.
On prépare encore le bistre en faisant bouillir la suie de cheminée cinq ou six gros bouillons avec de l'eau à discrétion, dans un chauderon exposé sur un grand feu ; on la remue de tems en tems avec un petit bâton ; au reste on s'en sert comme ci-dessus. (R)
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BISTRICKZ | (Géog.) ville forte de la Transilvanie, capitale du comté de même nom, sur la riviere de Bistricz, Long. 42. 33. lat. 47. 33.
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BISTRIKZ | (Géog.) comté dans la haute Hongrie, dont la capitale porte le même nom, sur le Gran.
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BISZESTI | ou BECZESTIE, (Hist. mod.) on nomme ainsi en Russie la punition imposée à ceux qui ont injurié quelqu'un : elle consiste dans une amende pécuniaire proportionnée au rang de celui qui a reçû l'injure ; si c'est un boyard, l'amende va quelquefois à deux mille roubles : si celui qui a fait l'injure est insolvable, on l'envoye à celui qu'il a lésé, qui est maître d'en faire un esclave, ou de lui faire donner le knoute.
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BITBOURG | (Géog.) ville du duché de Luxembourg, sur les frontieres de l'électorat de Treves. Long. 24. 13. lat. 50.
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BITC | ou BICHE, (Géog.) ville fortifiée & comté du pays de Vauge, qui a au nord & à l'orient le duché des Deux-ponts, l'Alsace au midi, & le comté de Sanverden au couchant. Long. 25. 14. lat. 49. 5.
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BITCH | ou BITCOU, (Géog.) ville de l'île de Niphon au Japon, & capitale d'un petit royaume de même nom, situé sur le golphe de Méaco.
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BITETTO | (Géog.) petite ville du royaume de Naples, dans le territoire de Bari. Long. 34. 26. lat. 41. 8.
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BITHIES | S. m. pl. (Géog. & Hist.) peuples de Thrace ainsi nommés du fleuve Bithis. Il y a eu dans la Scythie des femmes de ce nom qui avoient, dit-on, à un des yeux la prunelle double, la figure d'un cheval à l'autre, & le regard si dangereux, qu'elles tuoient ou ensorceloient ceux sur qui elles l'attachoient. Voyez cette fable dans Pline. liv. VII. c. ij.
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BITHYNARQUES | S. m. pl. (Hist. anc.) Les payens avoient des prêtres qui faisoient les fonctions sacerdotales dans plusieurs villes à la fois, & quelquefois dans toute une province : ces hommes joüissoient d'une grande autorité, & portoient le nom de la province dans laquelle ils exerçoient ; ainsi les Bithynarques étoient les souverains pontifes de la Bithynie.
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BITHYNIE | (Géog. anc. & mod.) c'étoit autrefois un royaume de l'Asie mineure, & il fait aujourd'hui partie de la Natolie.
BITHYNIE, (Géog. anc. & mod.) contrée de l'Asie mineure voisine du Pont & de la Troade, & située vis-à-vis la Thrace. Elle s'est appellée Bebrycie, Mygdonie, & s'appelle aujourd'hui le Becsangil.
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BITILISE | (Géog.) ville d'Asie dans la Georgie, sur les frontieres de la Perse. Elle appartient aux Turcs.
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BITO | (Géog.) ville & royaume d'Afrique dans la Nigritie, arrosé par le Niger.
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BITONTO | (Géog.) petite île assez peuplée du territoire de Bari, dans le royaume de Naples. Long. 34. 22. lat. 41. 13.
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BITORD | S. m. menue corde de deux fils. Voyez l'article CORDERIE.
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BITTE | S. f. terme de Riviere, piece de bois ronde sur le devant d'un bateau foncet, servant à fermer le bateau.
BITTES grandes & petites, en Marine ; on nomme ainsi une machine composée de deux fortes pieces de bois longues & quarrées nommées piliers, qui sont posées de bout sur les varangues, l'une à stribord & l'autre à babord, & d'une autre piece qui les traverse, & que l'on appelle traversin, qui les affermit & les entretient l'une avec l'autre ; & encore de courbes qui les appuient & les fortifient. Voyez Pl. VI. n° 27. & 29. la figure des bittes, & la disposition des pieces qui les composent. Voyez leur situation Planc. IV. fig. 1. n °. 86. 87. 88. 89. & l'explication qui contient le nombre, l'arrangement & les proportions des pieces dont les bittes sont composées : se trouvant jointes à la figure, il est inutile de les répéter ici ; il suffit d'y renvoyer. Pl. VI. n°. 27. 28. & 29.
Bittes se prend aussi quelquefois en particulier pour les piliers. Voyez PILIERS DE BITTES.
L'usage des bittes est de tenir les cabales lorsqu'on mouille les ancres, ou qu'on amarre le vaisseau dans le port.
Il y a de grandes & de petites bittes : les grandes sont à l'arriere du mât de misene, & ne s'élevent que jusqu'entre deux ponts, où elles servent à amarrer le cable. Voyez Pl. IV. fig. 1. n°. 86.
Les petites bittes, qui sont les unes vers le mât de misene, & les autres vers le grand mât, s'élevent jusque sur le dernier point, & elles y servent à amarrer les écoutes des deux huniers. (Z)
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BITTEN | (Géog.) c'est un certain district dans le duché de Courlande.
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BITTER le cable | (Marine) c'est lui faire faire un tour sur les bittes & l'y arrêter. Filer le cable sur les bittes, est le contraire de le bitter, & signifie le lâcher.
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BITTERFELD | (Géog.) ville de Saxe sur la Moldave.
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BITTON | (Marine) c'est une piece de bois ronde & haute de deux piés & demi, par où l'on amarre une galere à terre. (Z)
BITTON, terme de Riviere, piece de bois ronde près le gouvernail, servant à former un bateau foncet.
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BITTONNIERES | BITTONNIERES
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BITUME | S. m. (Hist. nat.) matieres qui appartiennent toutes au regne minéral : elles sont inflammables ; on les trouve dans la terre & dans les eaux sous diverses formes : on les divise en solides & en liquides. Les liquides sont le naphte ou pétrole, le pissasphalte ou poix minérale, &c. les solides sont le bitume de Judée, l'ambre gris, l'ambre-jaune, le jayet, & le charbon de terre. Le pétrole & le pissasphalte se trouvent dans les eaux. Voyez PETROLE & PISSASPHALTE. On tire les autres du sein de la terre. Voy. AMBRE, JAYET, ASPHALTE, &c. Quoiqu'ils soient tous d'une consistance assez dure, il est prouvé qu'ils ont commencé par être liquides, & qu'ils ne se sont durcis que par succession de tems. Il n'y a que les huiles qui puissent dissoudre les bitumes solides, & se mêler avec les bitumes liquides. Ils sont formés pour la plûpart naturellement, & presque sans aucun mêlange : quand il leur arrive d'être enveloppés de matieres étrangeres, il faut employer le secours de l'art pour les tirer des corps qui les contiennent. On met au rang des bitumes le soufre & les sucs arsénicaux, parce qu'ils en ont presque toutes les propriétés, & qu'ils sont d'une nature plus analogue au bitume qu'à tout autre corps. Voyez ARSENIC & ASPHALTE.
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BITURIGES | S. m. pl. (Geog. & Hist. anc.) peuples de l'ancienne Gaule : il y avoit les Bituriges Vibisciens, qui occupoient ce qu'on appelle aujourd'hui la Guienne propre, & les Bituriges cubiens, qui habitoient le Berry, ou leur nom s'est conservé.
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BIUTHERE | (Géog.) petite riviere de la Romanie, dans la Turquie, en Europe, qui se jette dans la mer de Marmara.
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BIVALVE | adj. (Hist. nat. Conchiliog.) c'est par ce mot que l'on désigne les coquilles qui sont composées de deux pieces, pour les distinguer des univalves & des multivalves. Voyez COQUILLE. (I)
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BIVAR | (Géog.) ville d'Esclavonie dans l'île Metabar, formée par la Save.
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BIVONA | (Géog.) petite ville de Sicile, avec titre de duché.
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BIVOUAC | ou BIOUAC, ou BIHOUAC, (terme de Guerre) c'est une garde qui est sur pié pendant la nuit lorsqu'on est proche de l'ennemi, pour s'opposer à ses entreprises. Cette garde se fait quelquefois par toute l'armée lorsque l'ennemi est proche. Lorsque le prince Eugene s'approcha des lignes de Philisbourg en 1734, toute l'armée coucha au bivouac pendant plus de quinze jours, pour être en état de s'opposer à ses attaques, que la proximité de son camp lui permettoit de faire de moment en moment. Lorsque les troupes couchent au bivouac, elles n'ont pas de tentes ; les soldats sont armés & habillés, pour être prêts au premier commandement. Lever le bivouac, c'est renvoyer l'armée dans ses tentes.
On fait aussi le bivouac lorsqu'on assiége une place, pour empêcher les ennemis de faire entrer quelque chose dans la ville, ou pour prévenir les surprises & les attaques du camp.
Ce mot vient, à ce qu'on prétend, de l'Allemand Wey-Wach, qui signifie double garde. (Q)
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BIXA | (Hist. nat. bot.) arbrisseau qui croît au Bresil, de la grandeur à-peu-près d'un citronnier ; on l'appelle aussi changuarica ou pamaqua. Sa feuille est verte & hérissée, & ressemble à celle de l'orme ; l'écorce du tronc & des branches est d'un jaune rougeâtre ; le bois en est blanc & armé de pointes. Cet arbre porte des fleurs composées de cinq feuilles, d'un rouge pâle comme les roses, sur lesquelles se forment des gousses de la grosseur d'une amande verte, qui s'ouvrent lorsque le fruit est mûr ; il y a dedans des grains d'un beau rouge, semblables à des grains de raisin, excepté qu'ils sont plus arrondis ; en ne faisant que les laver dans l'eau, ils lui donnent une couleur de carmin. La racine est d'un goût fort, mais agréable ; les Indiens s'en servent au lieu de safran. Cet arbre est verd pendant toute l'année, il porte son fruit au printems, c'est alors qu'on le coupe ; on prétend qu'il en sort du feu comme d'un caillou lorsqu'on le frappe. Son écorce sert à faire des cordes aussi bonnes que celles de chanvre ; la graine prise intérieurement arrête le cours de ventre, & calme les ardeurs de la fievre.
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BIZA | S. m. (Commerce) monnoie d'argent du Pégu, qui a cours pour un demi-ducat & quelque chose de plus ; le biza vaut cinq livres cinq sous cinq deniers, argent de France. Il y a aussi des doubles biza qui sont d'or, mais très-rares, & le plus souvent altérés.
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BIZACEN | (LA) Géogr. ancienne contrée de l'Afrique, bornée à l'orient par le fleuve Triton, à l'occident par la Numidie, au midi par la Libye intérieure ; c'est aujourd'hui une partie du royaume de Tunis.
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BIZARRE | FANTASQUE, CAPRICIEUX, QUINTEUX, BOURRU, (Gramm.) termes qui marquent tous un défaut dans l'humeur ou l'esprit ; par lequel on s'éloigne de la maniere d'agir ou de penser du commun des hommes. Le fantasque est dirigé dans sa conduite & dans ses jugemens par des idées chimériques qui lui font exiger des choses une sorte de perfection dont elles ne sont pas susceptibles, ou qui lui font remarquer en elles des défauts que personne n'y voit que lui : le bizarre, par une pure affectation de ne rien dire ou faire que de singulier : le capricieux, par un défaut de principes qui l'empêche de se fixer : le quinteux, par des révolutions subites de tempérament qui l'agitent : & le bourru, par une certaine rudesse qui vient moins de fond que d'éducation. Le fantasque ne va point sans le chimérique ; le bizarre, sans l'extraordinaire ; le capricieux, sans l'arbitraire ; le quinteux, sans le périodique ; le bourru, sans le maussade, & tous ces caracteres sont incorrigibles.
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BIZE | sarda, s. f. (Hist. nat. Ichthyologie) poisson de mer ressemblant à la pélamyde : il est lisse & sans écailles, à l'exception des endroits qui sont sous les nageoires placées auprès des oüies : c'est-là seulement qu'il a des écailles qui font distinguer la bize de la pélamyde, qui n'en a nulle part. Au reste ces deux poissons sont si semblables, que l'on prendroit aisément l'un pour l'autre. Cependant la chair de la bize n'est pas si tendre que celle de la pélamyde, & ses dents sont plus grandes & plus courbées au-dedans de la bouche. Rondelet. Voyez PELAMYDE, POISSON. (I)
BISE à deux têtes, (outil de Cordonnier) il est de buis, & sert à régler la trépointe du derriere du soulier. Voyez la fig. 4. Pl. du Cordonnier-Bottier.
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BIZEBAN | ou BIZEHAMI, (Hist. mod.) on nomme ainsi à la cour du grand-seigneur un certain nombre de sourds & muets : ils sont en état non seulement de se faire entendre par signes, mais encore de tenir un discours suivi de cette façon. Au reste l'usage de parler par signes est si commun dans le serrail, que presque tout le monde y entend ce langage. On choisit quelques-uns de ces bizebanis pour servir de bouffons à amuser sa hautesse.
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BIZEGLE | (chez les Cordonniers) est un morceau de buis qui sert à lisser le devant des semelles. Voyez la fig. 5. Planche du Cordonnier-bottier.
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BIZU | (Géog.) ville d'Afrique, en Barbarie, au royaume de Maroc, capitale de la province d'Eskur.
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BLABE | (Géog. anc.) île du bosphore de Thrace, vers l'Asie & la Chalcédoine, proche du promontoire appellé Lembus.
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BLACKBORN | (Géog.) petite ville de la province de Lancastre en Angleterre.
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BLACKWATER | (Géog.) il y a deux rivieres de ce nom en Irlande, & une en Angleterre dans le comté d'Essex.
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BLADNOCK | (Géog.) riviere de l'Ecosse méridionale dans le comté de Galloway.
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BLAFFER | ou PLAPPERT, (Commerce) petite monnoie usitée en Allemagne dans l'électorat de Cologne. Le blaffert vaut 4 albus, & 45 albus font un écu d'Empire ou ryxdaller : nous évaluons le blaffert à trois sous 12/13 de deniers de notre argent.
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BLAINVILLE | (Géog.) ville de Lorraine, sur la rive méridionale de la Meurthe, proche Lunéville.
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BLAIREAU | TAISSON, s. m. (Hist. nat. Zoolog.) taxus, meles ; animal quadrupede. On en a distingué deux especes, dont l'une ressemble par le museau à un chien, taxus caninus ; & l'autre à un cochon, taxus suillus : on a aussi prétendu que celui-ci avoit le pié fourchu, au contraire de l'autre qui a des doigts.
Aldrovande a donné des gravures de ces deux especes : si elles existent réellement toutes les deux, il est certain que celle qui ressemble au porc, est bien plus rare que l'autre qui est bien connue & fort fréquente. Le blaireau qui ressemble au chien par le museau, a le corps gros & raccourci, le cou court, le poil rude & long à-peu-près comme des soies de cochon ; la couleur des poils du dos est d'un jaune fort pâle à leur racine, brun ou noir dans le milieu, & jaune blanchâtre à l'extrémité ; desorte que le dos de cet animal est mêlé de noir & de blanc : c'est pourquoi on lui a donné le nom de grisart. Le poil des côtés & du ventre est d'un jaune pâle ; celui de la gorge, des épaules & des pattes est presque noir. Il y a une bande blanche qui s'étend depuis le sommet de la tête jusqu'au bout du museau : de chaque côté de cette bande, on en voit une autre qui est noire & de figure pyramidale, dont la pointe est en-avant ; ces deux bandes s'étendent depuis les narines jusqu'aux oreilles, en passant par-dessus les yeux : au-dessous de ces bandes noires, le poil est blanchâtre sur les levres. La queue est courte, grosse, & garnie de poils longs & forts. Les oreilles sont courtes, arrondies, & assez semblables à celles du rat domestique. Les yeux sont petits. Les dents de ce blaireau sont semblables à celles du chien. Il a le museau fort pointu, & le derriere de la tête large, à-peu-près comme le renard. Les pattes sont courtes ; les ongles des piés de devant sont plus longs que ceux des piés de derriere : c'est à l'aide de ces grands ongles que le blaireau creuse en terre comme les lapins, & y fait des terriers qu'il habite. Il est carnassier ; il se nourrit de lapins, des oiseaux qu'il peut attraper, &c. Cet animal a sous la queue au-dessus de l'anus un assez grand orifice, qui communique dans une sorte de bourse ou de sac assez peu profond. Cette cavité est garnie de poils, & enduite d'une matiere grasse qui a une odeur desagréable. Lorsque le blaireau est attaqué par d'autres animaux ; il se couche sur le dos, & ne présente à son ennemi que les griffes & les dents. Sa morsure est très-forte. On dit que les femelles de cet animal portent pendant environ trois mois ; qu'elles mettent bas en autonne, lorsque les feuilles des arbres tombent ; & qu'il y a deux ou trois petits à chaque portée. Ray. synop. quad. pag. 185. Aldrovande, de quad. digitatis, lib. II. cap. xj. Voyez QUADRUPEDE. (I)
La chasse du blaireau se peut faire avec des bassets : si le terrier est sur un lieu élevé, on y doit faire entrer le chien par l'ouverture d'en-bas, afin d'obliger l'animal à sortir par celle d'en-haut ; alors les chiens se jettent sur lui, & les chasseurs doivent l'assommer, & prendre garde de n'en pas être mordus. Les blaireaux se prennent aussi avec des collets.
On donne avec succès les cendres de cet animal dans les maladies des poumons, dans les crachemens de sang. Son sang séché & mis en poudre, est estimé bon contre la lepre, & passe pour un préservatif contre la peste. Sa graisse calme les douleurs de reins qui proviennent du calcul : elle appaise l'ardeur des fievres, & remédie aux contractions & aux foiblesses des articulations & des nerfs. On l'employe dans les douleurs de rhûmatisme. (N)
BLAIREAU, en terme de Doreur sur bois, est une espece de pinceau dont le poil est dur, qui sert à épousseter les pieces dorées, & à en faire tomber l'or inutile.
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BLAIRIE | (DROIT DE) c'est celui qu'ont quelques seigneurs de permettre à leurs habitans de mener paître leurs bestiaux sur les chemins publics, les terres à grains, & les prés de leurs terres, après l'entiere dépouille. On appelle encore ce droit, droit de vaine pâture.
Il semble que la vaine pâture soit de droit commun : il y a même des cantons où l'on ne peut mettre ses prairies en regain, & en empêcher la vaine pâture après l'enlevement de la premiere herbe, qu'en bâtissant & en habitant sur le terrein de la prairie : mais il y a d'autres cantons où la vaine pâture ou le droit de blairie suit la haute justice, & où les justiciables sont obligés de l'acquérir par une redevance qu'ils payent au seigneur.
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BLAISOIS | (LE) Géog. province de France, bornée au nord par la Beauce, à l'orient par l'Orléanois, au midi par le Berri, à l'occident par la Touraine : Blois en est la capitale.
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BLAME | S. m. en Droit, est un jugement qui prononce une correction verbale contre l'accusé. Cette correction est infamante, & toûjours accompagnée d'amende. Il se prononce en ces termes. N. (le juge nomme le coupable par son nom) la cour te blâme, & te rend infâme.
BLAME, en Jurisprudence féodale, est l'improbation que fait le seigneur de l'aveu & dénombrement que son nouveau vassal lui a fourni. Ce blâme consiste en deux points : à marquer ce que le vassal a mis de trop dans son dénombrement : par exemple ; s'il y a compris la justice qu'il n'a pas, & qui appartient au seigneur dominant ; s'il a mis au nombre des arriere-fiefs des terres qui sont mouvantes en plein fief, c'est-à-dire immédiatement du seigneur dominant, & autre chose de cette nature : le second point consiste à marquer ce que le vassal a omis dans son dénombrement. Voyez ADVEU (H).
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BLAMMUYSER | S. m. (Comm.) c'est une monnoie usitée dans les Pays-Bas ; on l'appelle aussi plaquette ou demi escalin : elle valoit ci-devant environ six sous & demi de notre argent. Depuis quelques années, cette monnoie a été mise au billon dans les pays soûmis à la république des Provinces-Unies, & l'usage y en est absolument défendu. Pour les Pays-Bas Autrichiens, on s'est contenté d'en fixer la valeur à environ la moitié de celle qu'elle avoit auparavant.
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BLAMONT | (Géog.) petite ville de Lorraine sur la riviere de Vezaize. Long. 24. 20. lat. 48. 35.
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BLANC | adj. pris subst. (Physique) l'une des couleurs des corps naturels. Voyez COULEUR.
On ne peut pas dire exactement que le blanc soit une couleur simple & unique, car c'est le composé de toutes les couleurs, ainsi que l'a prouvé M. Newton, qui a fait voir que les corps ne paroissent blancs qu'autant qu'ils refléchissent des rayons de toutes les couleurs. Voyez COULEUR.
Les corps noirs s'échauffent plus aisément que les blancs, par la raison qu'ils absorbent les rayons de toutes les couleurs, au lieu que les blancs en renvoyent de toute espece. Voyez NOIR.
C'est ce qui fait qu'un papier noir est plûtôt enflammé qu'un papier blanc, lorsqu'on le présente au miroir ardent, & que les étoffes noires que les teinturiers exposent au soleil, sont bien plûtôt seches que les blanches. Voyez CHALEUR. (O)
* BLANC, (couleur en peinture) Le plus commun est celui qu'on appelle blanc d'Espagne, ou de Roüen : on le trouve chez les épiciers-droguistes par gros pains. Ce n'est qu'une terre ou marne blanche qui se fond très-facilement dans l'eau. Pour la purifier & lui ôter tout le gravier qui y est mêlé, on la fait fondre ou dissoudre dans de l'eau claire, dans quelque vaisseau bien net ; ce qui se fait très-facilement sans aucune manipulation. Quand elle est dissoute avec beaucoup d'eau, on la remue bien, & on la laisse reposer un peu de tems, pour que tout le gravier tombe au fond du vaisseau : alors on verse toute l'eau blanche dans des vaisseaux bien nets, & on la laisse reposer jusqu'à ce que l'eau soit devenue claire, & que tout le blanc soit tombé au fond du vaisseau : on ôte ensuite toute l'eau du vaisseau sans agiter le fond ; & quand elle est presque seche, on la met en pains, qu'on laisse sécher à l'air. Ce blanc est d'un grand usage pour la détrempe, mais il ne peut servir à l'huile, parce qu'il manque de corps quand il est mêlé.
Le blanc qu'on appelle craie, est à-peu-près de la même nature, à la réserve qu'il est plus dur, & qu'on s'en sert en quelques lieux pour bâtir : mais on peut le réduire comme la marne. Ce blanc s'appelle blanc de craie.
Il y a un troisiéme blanc fort commun ; c'est du marbre blanc bien pulvérisé : on ne l'employe que dans la peinture à fresque.
BLANC DE PLOMB ou CERUSE, est une sorte de rouille que donne le plomb, ou plûtôt c'est du plomb dissous par le vinaigre. Cette couleur est d'un grand usage pour les Peintres. Voyez PLOMB.
Le blanc de plomb ou blanc de céruse, est un blanc parfaitement beau. Dans les ouvrages à détrempe, où il y a plusieurs teintes ou nuances à faire, on mêle le blanc de plomb avec le blanc de Roüen, car il a plus de corps, & se travaille plus facilement. Mais pour la peinture à l'huile, on n'employe que du blanc de plomb.
On a deux manieres de faire le blanc de plomb : dans la premiere on réduit le plomb en lames minces qu'on trempe dans du vinaigre fort, & qu'on gratte tous les jours pour en ôter la rouille formée sur la surface ; répetant cette opération jusqu'à ce que le plomb ait entierement disparu : dans la seconde, on forme avec les petites lames de plomb des rouleaux semblables à des rouleaux de papier, en observant seulement de laisser un peu d'espace entre chaque feuille du rouleau ; on suspend ces lames dans le milieu d'un pot de terre, au fond duquel est du vinaigre ; on ferme ensuite exactement ce pot, & on l'enferme dans du fumier pendant trente jours, après quoi on l'ouvre, & on y trouve le plomb comme calciné & réduit en ce qu'on appelle céruse ou blanc de plomb ; on le divise en monceaux, & on le fait sécher au soleil.
On se sert du blanc de plomb dans la peinture à l'huile & dans la peinture en détrempe. La couleur qu'il donne est belle, mais il est un peu dangereux pour ceux qui le broyent & pour ceux qui l'employent, parce qu'il peut être mis au rang des poisons : il leur occasionne une maladie appellée colique de plomb. Voyez COULEUR.
Le blanc de plomb est aussi un cosmétique : les femmes s'en servent pour se blanchir la peau ; on en fait le fard. Les revendeuses à la toilette font ce blanc de plomb en mettant du vinaigre & de l'orge perlé le plus beau, dans un vaisseau qui ait un couvercle de plomb. Elles placent le tour dans cet état dans un lieu chaud : la vapeur du vinaigre calcine le plomb, & fait un blanc que ces femmes détachent pour leur commerce : elles prétendent que l'orge qu'elles joignent au vinaigre, empêche que le blanc de plomb n'ait de mauvais effets. Celles qui n'ont pas le moyen d'avoir cette espece d'orge perlé ; qui est la plus chere, y substituent le riz. (M)
La céruse ne doit être autre chose que le blanc de plomb broyé, si elle est bien pure : mais elle peut être mélangée avec une partie de blanc de Roüen ou de craie, sans qu'on puisse s'en appercevoir facilement, si ce n'est par la suite ; car après qu'elle a été employée à l'huile, elle noircit. On peut absolument reconnoître si elle est mélangée, parce que si l'huile avec laquelle on l'a broyée n'est pas vieille, & que le blanc soit gras, cela vient de la craie. C'est pourquoi ceux qui veulent avoir de beau blanc de plomb pour la peinture à l'huile, doivent toûjours le faire broyer quand il est en écaille.
BLANC ou MAGISTERE DE BISMUTH, (Chimie) Voici, suivant M. Pott, la meilleure façon de le faire : on prend une partie de régule de bismuth pulvérisé, on verse par-dessus bien doucement & à plusieurs reprises deux parties d'esprit de nitre bien pur & bien dégagé de l'acide vitriolique, pour que le magistere soit bien blanc ; car sans cela il prendroit une couleur grise ; on prend garde qu'il n'arrive point d'effervescence. Peu de tems après la solution, il se formera des crystaux blancs ; ou si on ne veut pas attendre la formation de ces crystaux, on n'aura qu'à précipiter la solution avec huit parties d'eau claire toute pure ; on fait par-là tomber une chaux blanche, qu'on lave dans plusieurs eaux pour l'édulcorer ; on la fait sécher ensuite à l'ombre : car si on le faisoit au soleil ou au feu, la chaux perdroit de sa blancheur. Si on met cette chaux calciner, elle devient blanche & brillante comme du talc folié (c'est ce qu'on appelle blanc de bismuth, blanc d'Espagne, ou blanc de perles. Cette chaux est regardée comme un grand cosmétique ; on s'en sert comme d'un fard pour cacher les difformités du visage, & on prétend qu'elle blanchit le teint.
Lorsqu'on veut employer cette chaux pour des usages de medecine, on la met en distillation avec de l'eau-forte affoiblie par moitié ou plus d'eau commune, ou bien l'on en fait plusieurs cohobations avec l'esprit-de-vin. Cela produit, suivant quelques-uns, un bon remede pour les maladies inflammatoires ; mais il vaut mieux s'en défier à cause de l'arsénic qui est toûjours attaché au bismuth, & qui ne peut guere produire de bons effets dans le corps humain. Lorsqu'on applique extérieurement cette chaux, on trouve qu'elle est dessicative, astringente, & propre à nettoyer les ulceres ; on en vante aussi beaucoup l'usage pour les maladies de la peau, comme gale, rougeurs, dartres & boutons, après avoir préalablement préparé le corps par des purgations. On la mêle pour cet effet avec des pommades ou du beurre de cacao, ou de l'eau-rose ; mais ce remede ne laisse pas d'endommager la peau à la longue, c'est pourquoi il vaut mieux en bannir entierement l'usage même extérieur.
Les fleurs de bismuth se tirent, suivant M. Lemery, en réduisant le bismuth en poudre, & y mêlant partie égale de sel ammoniac : on met ces deux matieres sur le feu, & il se fait une sublimation ; on prend ce qui a été sublimé, on le dissout dans de l'eau, on précipite la solution avec de l'esprit de sel ammoniac, ou de l'huile de tartre ; il tombe au fond une poudre blanche qu'on appelle fleur ou sucre de bismuth ; on s'en sert pour les mêmes usages que le magistere précédent. (-)
BLANC DES CARMES : ce blanc n'est autre chose que de la chaux de Senlis fort blanche & passée dans un tamis très-fin. Quand elle est claire comme du lait, on en donne cinq ou six couches : mais il faut que chacune de ces couches soit bien seche avant que d'en appliquer une nouvelle ; il faut aussi les bien frotter avec la brosse ; après cela on frotte l'ouvrage avec une brosse de poil de sanglier, ou avec la paume de la main, c'est ce qui lui donne ce luisant qui en fait tout le prix.
On fait dans les Indes un blanc plus pur encore & plus luisant avec de la chaux vive mêlée avec du lait & du sucre, dont on enduit les murailles que l'on polit avec une pierre d'agate. Cet enduit les rend d'un poli qui imite la glace, & dont le plus beau blanc des Carmes n'approche pas.
BLANC, (chez les Batteurs d'or) ce n'est autre chose que de l'argent dont ils allient quelquefois l'or, malgré l'infidélité qu'il y a & le danger de ne pouvoir plus le travailler & le mettre en feuilles. Voyez BATTEUR D'OR.
BLANC, (en terme de Doreur sur bois) se fait avec du plâtre bien battu qu'on sasse à un tamis très-fin, & qu'on affine à force de le noyer dans l'eau. On en forme ensuite des pains qu'on laisse sécher ; on le délaye avec de l'eau pour s'en servir, & on l'applique à plusieurs couches sur les ouvrages destinés à être dorés, afin de remplir les traits des outils, & rendre la dorure égale & unie. Voyez BLANCHIR.
BLANC, donner le blanc, (chez les Fayenciers) c'est couvrir le biscuit de l'émail de la fayence. Voyez FAYENCE.
BLANC, (chez les Fondeurs en lettres d'Imprimerie) les blancs font partie du moule à fondre les caracteres d'Imprimerie, & en sont les deux principales pieces ; elles forment le corps du caractere : par exemple, si c'est un moule pour fondre du cicero, les blancs sont juste de l'épaisseur du corps de cicero. Voyez CORPS. Ces blancs sont égaux entr'eux & arrêtés sur la longue piece d'un bout par une vis, & de l'autre par une piece qu'on nomme potence, qui traverse ce blanc, la longue piece & la platine par un trou quarré, pratiqué égal dans ces trois pieces, dont cette potence remplit les vuides, & est fortement arrêtée par-dessous la platine avec une vis & un écrou qui les unit ensemble ; toutes ces parties sont de fer. Voyez LONGUE PIECE, PLATINE.
Blanc a encore une autre acception, chez les mêmes ouvriers : on dit des lettres en fonte qu'elles ont blanc dessus, dessous, ou dessus & dessous : une m, par exemple a blanc dessus & dessous, & le corps de cette lettre doit être coupé de ces deux côtés ; un b n'a blanc que dessous, parce que le trait s'éleve au-dessus de ceux de l'm, on ne le coupe par conséquent que dessous : le q dont le trait occupe la partie inférieure du corps a blanc dessus, & se coupe de ce côté. Ainsi des autres lettres, dont les traits occupent les parties supérieures ou inférieures du corps ; les places vuides s'appellent blancs, & se coupent pour laisser l'oeil isolé, & que rien ne nuise à l'impression. Voyez COUPER.
On appelle encore blanc, des reglettes minces de fonte ou de bois, que l'on met à l'Imprimerie entre chaque ligne de caractere, pour les éloigner un peu les unes des autres, & laisser par-là plus de blanc entr'elles ; ce qui se fait ordinairement pour la Poésie.
On dit une fonte portant son blanc, lorsqu'un caractere est fondu sur un corps plus fort qu'il n'a coûtume d'être ; comme lorsqu'on fond le caractere de petit-romain sur le corps de cicero. Cet oeil de petit-romain qui se trouve par-là sur un corps plus fort qu'il n'a coûtume d'être, laisse entre les lignes plus de blanc que s'il étoit fondu sur son corps naturel : cela évite d'ajoûter des choses étrangeres pour écarter les lignes, & est beaucoup plus propre & plus sûr. Voyez CORPS.
BLANC, chez les Facteurs d'orgue, est une composition dont ils se servent pour blanchir les parties qu'ils veulent souder ; c'est un mélange de colle, d'eau & de blanc d'Espagne. Pour faire le blanc propre à blanchir les soudures, on met de l'eau dans une terrine, dans laquelle on jette du blanc d'Espagne réduit en poudre. Voyez l'article BLANC. On met ensuite la terrine sur le feu, qui ne doit point échauffer la composition jusqu'à la faire bouillir, ce qui la rendroit inutile. On verse ensuite dedans un peu de colle fondue, que l'on mêle bien avec la composition, qui se trouve ainsi achevée. Pour en faire l'essai, on en met un peu sur une bande d'étain poli ; si le blanc s'écaille, c'est une marque qu'il est trop collé ; s'il s'efface, on connoît qu'il n'a pas assez de colle. Il vaut mieux mettre de la colle petit-à-petit, que d'en mettre trop, parce qu'il faudroit remettre de l'eau & du blanc, & faire réchauffer le mélange, que l'on connoît être bon, lorsqu'en tortillant le morceau d'étain sur lequel on fait l'essai, il ne s'écaille ni ne s'efface point.
Autrement, prenez du blanc d'Espagne réduit en poudre dans une terrine de terre vernissée ; versez dessus du vinaigre en quantité suffisante pour détremper le blanc, vous aurez une composition qui n'a point besoin d'épreuve. Pour employer ce blanc, qui ne s'écaille ni ne s'efface jamais, il faut en prendre avec un pinceau, & passer ce pinceau sur les vives ou arêtes des pieces que l'on veut souder, ensorte qu'elles en soient couvertes. On met une seconde couche sur l'étain, après que la premiere est séchée ; ensuite on gratte, avec la pointe à gratter, le blanc & même la surface des pieces à souder, dans tout l'espace que l'on veut que la soudure occupe. Après que les pieces sont soudées, on fait chauffer de l'eau dans un chauderon, dans laquelle on trempe un linge, avec lequel on lave la soudure & le blanc, que l'on ôte par ce moyen. Lorsque ce sont des tuyaux d'étain que l'on soude, ils faut qu'ils soient blanchis en-dedans pour empêcher la soudure d'y entrer. Lorsqu'on veut ôter le blanc qui est dedans les tuyaux où l'on ne peut pas fourrer la main, on attache au bout d'une baguette un linge, avec lequel on emporte le blanc que l'on veut ôter.
BLANC, en termes de Pratique, se dit en quelques phrases pour l'endroit d'un acte qui est resté non-écrit. C'est en ce sens qu'on dit qu'on a laissé deux, trois ou quatre lignes de blanc, qu'on a laissé un nom en blanc. (H)
BLANC, s. f. (Commerce) petite monnoie de cuivre qui avoit autrefois cours en France, de la valeur de cinq deniers. Selon le prix réel du marc d'argent, le billon dont on fabriquoit les blancs avoit plus ou moins de titre. Le blanc n'a pas de cours dans le commerce ; il n'y a plus que le bas peuple qui se sert de l'expression six-blancs, pour marquer le prix de trente deniers.
BLANC, (Jardinage) maladie qui survient aux concombres ? on la remarque aussi dans l'oeillet. Ce n'est autre chose qu'une altération dans les fibres de leurs fannes ou de leurs bras, qui n'étant plus en état de recevoir le suc qui les nourrit, les fait périr sans qu'on puisse y remédier. C'est une espece de rouille blanche, telle qu'on en voit sur les laitues, les chicorées, les melons, & les blés. Cette maladie vient d'une trop grande sécheresse, d'une mauvaise exposition, d'un arrosement fait mal-à-propos, de brouillards, & des nuits froides ; une grande attention peut en garantir ces plantes. (K)
* BLANC-BOIS, (Econom. rustiq.) on comprend sous ce nom tous les arbres qui ont non-seulement le bois blanc, mais encore leger & peu solide ; tels sont le saule, le bouleau, le tremble, l'aune. Mais le châtaigner, le tilleul, le frêne, le sapin, &c. sont bois-blancs & non blancs-bois, parce que, quoique blanchâtres, ils sont fermes & propres aux grands ouvrages. Les blancs-bois viennent vîte, même en des terreins mauvais ; mais ils n'ont point de consistance, ne sont bons qu'à de petits ouvrages, & ne peuvent entrer que pour un tiers au plus dans les bois à brûler.
* BLANC-EN-BOURRE, (Economie rustiq.) espece d'enduit fort en usage à la campagne ; il est fait de terre, & recouvert de chaux mêlée de bourre. On l'applique aux murs des granges, des bergeries, &c.
* BLANC-ETOC ou BLANC-ETRE, (Econ. rustiq.) Couper une forêt à blanc-étoc ou blanc-être, c'est l'abattre sans y laisser ni baliveaux ni autres arbres retenus, ce qui est défendu sous peine de trois cent livres d'amende, à moins qu'on n'ait fait déclaration des baliveaux qu'on veut couper, au greffe de la maîtrise des eaux & forêts, dont les bois sont ressortissans, afin que les officiers puissent reconnoître avant la coupe, l'âge & la qualité des baliveaux qu'on veut abattre. Cette loi s'étend aux taillis comme aux futaies.
BLANC-MANGER, (Pharmacie) espece de gelée, dont Fuller donne la préparation suivante. Prenez quatre pintes de lait, les blancs d'un chapon bouilli, amandes douces blanchies, deux onces, battez le tout ensemble, & faites-en une forte expression : faites bouillir l'extrait sur le feu, avec trois onces de farine de riz ; lorsque le tout commencera à se coaguler, ajoûtez sucre blanc, huit onces, eau de roses rouges, dix cuillerées : mêlez bien le tout ensemble.
Cette composition est salutaire dans les consomptions, dans les gonorrhées, & dans d'autres maladies où l'on doit se proposer de corriger les humeurs, & d'en tempérer l'acrimonie. (N)
BLANCS-MANTEAUX, s. m. pl. (Hist. ecclés.) c'est le nom qu'on donna aux religieux de l'ordre des Servites ou Serviteurs de la sainte Vierge mere de Jesus-Christ, à cause qu'ils avoient des habits & des manteaux blancs. Cet ordre avoit été institué à Marseille, & fut confirmé par le pape Alexandre IV. l'an 1257 ; & comme ils s'établirent à Paris dans la rue de la vieille Parcheminerie, cette rue & le monastere ont depuis retenu le nom de Blancs-manteaux, quoique ce monastere ait été donné, dès l'an 1298, aux religieux Guillelmites qui avoient des manteaux noirs, & que les religieux Bénédictins de Cluni, qui sont habillés de noir, y soient entrés en 1618, par la cession que leur en firent les Guillelmites de France, non sans opposition de la part de leur général. Les Bénédictins de Cluni l'ont encore cedé depuis aux Bénédictins de la congrégation de saint Maur, qui en sont présentement en possession. Du Breuil, antiquit. de Paris. (G)
* Cette maison est aujourd'hui remplie de religieux très-savans & d'un grand mérite, auteurs d'ouvrages fort estimables & fort utiles ; comme l'art de vérifier les dates, qui a été si bien reçû du public ; la nouvelle diplomatique, la collection des historiens de France, &c. Nous saisissons avec plaisir cette occasion de célébrer leurs talens & leurs travaux.
BLANC DE BALEINE, (Medecine) matiere grasse & onctueuse, qui se tire de la tête & d'autres parties d'une espece de baleine. C'est un très-bon expectorant. Voyez BALEINE & CACHALOT.
BLANC DE L'OEIL, en Anatomie, c'est la premiere tunique ou enveloppe de l'oeil ; on l'appelle aussi l'albuginée, & on lui donne encore le nom de conjonctive, à cause qu'elle sert à unir les paupieres aux globes de l'oeil. Voyez CONJONCTIVE & OEIL. (L)
BLANC D'OEUF, c'est cette partie visqueuse & blanchâtre qui enveloppe le jaune quand l'oeuf est crud, & qui est consistante & blanche quand il est cuit : on l'employe en Medecine, en qualité de glutineux & d'astringent. Dans cette vûe on le mêle souvent avec le bol d'Arménie, &c. pour empêcher l'enflure des parties qui ont souffert quelque violence, & pour rendre aux fibres leur ressort & leur élasticité ; c'est ce qu'on appelle un défensif. Il entre aussi dans quelques mélanges pour consolider les plaies récentes & prévenir l'hémorrhagie. (N)
On se sert du blanc d'oeuf chez les Relieurs-doreurs, pour englairer deux ou trois fois avec une éponge très-fine, les dos & les autres endroits, avant d'y appliquer l'or, lorsque le blanc d'oeuf est sec. On dit passer au blanc d'oeuf. On se sert encore du blanc d'oeuf pour donner du lustre aux couvertures. Quand le livre est entierement achevé, on passe legerement une éponge fine trempée dans le blanc d'oeuf sur toute la couverture, & quand il est sec on y passe le fer à polir. Voyez FER A POLIR, & POLIR.
BLANC-SIGNE ou BLANC-SEING, s. m. en termes de Commerce, est un papier sur lequel on n'a mis que sa signature. Les blancs-signés ne se confient ordinairement qu'à des arbitres ou à des amis, pour les remplir de ce qu'ils jugeront à-propos pour terminer quelque contestation ou procès, ou à des personnes de la probité desquelles on est entierement sûr. (G)
* BLANC, (le) Géog. petite ville de France, en Berri, sur la Creuse. Longitude 18. 43. latitude 46. 38.
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BLANCA | (LA) Géog. île inhabitée de l'Amérique, au nord de la Marguerite, proche Terre-ferme. Long. 11. 50. lat. 313.
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BLANCARDS | S. m. pl. (Commerce) toiles de lin, ainsi appellées de ce que le fil a été à demi blanchi avant que d'être employé à leur fabrication. Elles viennent toutes de Normandie : elles ne sont ni grosses ni fines : leur chaîne est de deux mille fils ; leur largeur en écru, de quinze seiziemes, & la piece de soixante à soixante-six aulnes.
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BLANCHE | adj. f. pris subst. nom d'une note de Musique, qui se fait ainsi & qui vaut deux noires ou la moitié d'une ronde. Voyez MESURE & VALEUR DES NOTES. (S)
BLANCHES, (Fermes) terme de la coûtume de Normandie, sont celles dont le fermage se paye en argent. Voyez FERME. (H)
* BLANCHE, (la mer) Géog. grand golfe de l'Océan septentrional, qui baigne les côtes de la Lapponie moscovite au nord & à l'occident : on donne encore ce nom à une partie de l'Archipel, par opposition à la mer Noire.
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BLANCHET | S. m. est un morceau de drap blanc, dont on se sert en Pharmacie, pour passer les sirops & les décoctions ; il s'étend sur le carrelet. Voyez CARRELET, FILTRATION.
BLANCHET ; les Imprimeurs nomment ainsi un gros drap blanc, qu'ils employent pour garnir le grand tympan d'une presse ; ils en font usage pour faciliter le foulage de l'impression, & garantir en même tems l'oeil de la lettre. Un blanchet entier est un morceau de ce drap d'une aulne environ, plié en deux ; un demi- blanchet est simple : par ce moyen on a la facilité de garnir le tympan d'un blanchet ou d'un demi- blanchet, pour raccourcir ou allonger le coup de la presse.
BLANCHET, en termes de Raffineur, est une piece de gros drap contenant vingt aulnes ou environ, bordé tout autour d'une double bande de toiles. Elle s'étend par un bout dans le panier à clairée, où il vaut mieux qu'elle soit lâche & aisée que tendue, parce que le poids de la clairée qui y coule à flots de la dale, la déchireroit. Voyez DALE & CLAIREE. Si j'ai dit étendue par un bout, c'est que le même endroit ne sert jamais qu'une fois. On laisse tomber à mesure le bout qui a servi, en tirant au-dessus du panier celui qui n'a point encore servi. Quand toute la piece a été chargée, on la lave avec soin, en battant avec force dans la riviere, pour la dégraisser ; & quand elle est seche on la bat avec des baguettes, pour en faire sortir toute la poussiere. La même piece sert jusqu'à ce qu'elle soit bien usée. On retient le blanchet sur les bords du panier, par des crochets qui pressent étroitement l'étoffe de chaque côté du bord & au-dessus. Voyez CROCHET.
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BLANCHEUR | S. f. (Physiq.) est la qualité qui distingue les corps blancs. V. BLANC & COULEUR.
M. Newton a prouvé par l'expérience, que la blancheur consiste dans le mélange de toutes les couleurs, & que la lumiere du soleil n'est blanche, que parce qu'elle est composée de toutes les couleurs. Voyez COULEUR, PRISME, RAYON.
Le même auteur fait voir que la blancheur la plus forte & la plus éclatante, doit être mise au premier rang des couleurs ; & que les blancheurs qui sont au-dessous, sont des mélanges de couleurs de différens ordres. Les métaux blancs donnent cette blancheur du premier ordre ; l'écume, le papier, le linge, & les autres substances blanches, sont de la blancheur du second ordre. M. Newton conjecture que les métaux blancs sont plus blancs que les autres corps, parce qu'ils sont plus denses, & composés de parties plus serrées. Selon le même auteur, les particules des métaux blancs, comme l'argent, l'étain, &c. doivent avoir plus de surface que celles de l'or ou du cuivre. Ces deux derniers métaux, amalgamés avec du mercure, où mêlés par la fusion avec de l'étain, de l'argent, ou du régule d'antimoine, deviennent blancs. (O)
BLANCHEUR, se dit, en Medecine, du teint, des urines, des déjections, du pus, des crachats. Quand la blancheur du visage est extrème, elle se nomme pâleur. C'est dans les femmes le symptome de la suppression des regles, ou de la maladie dite dans les auteurs, febris alba amatoria, pâles couleurs. Voyez PASLES COULEURS.
Elle est aussi ordinaire dans la sécheresse, dans la convalescence, dans les pertes ; dans ceux qui ont le frisson ; dans ceux qui ont peur, ou qui sont agités de passions semblables.
La pâleur dénote que la circulation est diminuée, que le sang est épais, & qu'il ne peut aborder dans les petits vaisseaux lymphatiques, ou mieux, dans les arteres capillaires extrèmement fines, qui rampent dans le tissu de la peau. Voyez PASLEUR.
Les urines pâles & blanches, sont un signe de resserrement dans les conduits urinaires. Voyez URINE.
Les déjections blanches & grises, marquent ou la lienterie, ou les obstructions du foie. Voyez LIENTERIE, OBSTRUCTION.
Le pus d'un blanc terne & mat, est un pus benin & loüable.
Les crachats blancs & mousseux sont assez équivoques, &c. (N)
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BLANCHIMENT | S. m. à la Monnoie, est une préparation que l'on donne aux flancs, pour qu'ils ayent de l'éclat & du brillant au sortir du balancier. Le blanchiment se faisoit autrefois à l'eau-forte : mais ce procédé, outre qu'il altéroit un peu les especes, étoit plus coûteux que celui que l'on suit à-présent. Les flancs que l'on veut blanchir se mettent dans une espece de poele sur un fourneau de reverbere ; les flancs ayant été ainsi chauffés, on les laisse refroidir, puis on les met bouillir successivement dans d'autres poeles appellées bouilloires, dans lesquelles il y a de l'eau, du sel commun, & du tartre de Montpellier ou gravelle ; & lorsqu'ils ont été essorés de cette premiere eau dans un crible de cuivre, on y jette du sablon & de l'eau fraîche, ensuite on les essuie.
BLANCHIMENT, les Orfevres appellent ainsi un baquet, où il y a de l'eau-forte affoiblie par de l'eau, pour blanchir la vaisselle ; ils donnent aussi le même nom à l'opération même.
BLANCHIMENT, (Doreur) Voyez BLANC & BLANCHIR.
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BLANCHIR | v. act. c'est, en Maçonnerie, donner une ou plusieurs couches de blanc à colle sur un mur sale, après y avoir passé un lait de chaux, pour rendre quelque lieu plus clair & plus propre. (P)
BLANCHIR, terme de Boyaudier, c'est tremper les boyaux dans une tinette ou chauderon, immédiatement après qu'ils ont été dégraissés ; pour achever de les nettoyer : c'est de cette tinette où on les met blanchir, que des femmes les retirent pour les coudre.
BLANCHIR, en terme de Chaudronnier ; c'est donner le lustre aux chauderons, chaudieres, poellons, &c. sur le tour avec une paroire. Voyez PAROIRE.
BLANCHIR, la cire, c'est lui faire perdre la couleur jaune qu'elle a, après qu'on en a séparé le miel. Voyez CIRE, MIEL, &c.
La cire séparée du miel, & fondue en gros pain, est ce que l'on appelle de la cire brute. C'est en cet état qu'on l'apporte dans les blanchisseries, où elle passe par les préparations suivantes.
Premierement, un ouvrier la coupe par morceaux gros comme le poing, afin qu'elle fonde plus facilement lorsqu'elle est portée dans les chaudieres A, A, A (Pl. du blanchissage des cires, vignette) où on la remue jusqu'à parfaite fusion avec la spatule de bois, fig. 4. Après qu'elle est fondue, on la laisse couler au moyen des robinets adaptés aux chaudieres, dans les cuves B & C qui sont de bois, & placées de façon que le fond des chaudieres est de quelques pouces plus élevé que la partie supérieure des cuves. On la laisse reposer dans les cuves environ cinq ou six heures, tant pour qu'elle n'ait plus qu'un médiocre degré de chaleur, sans toutefois cesser d'être fluide, que pour donner le tems aux ordures ou feces dont elle est chargée de se précipiter dans l'eau, dont le bas de la cuve est rempli à cinq ou six pouces de hauteur.
Au-dessous des cuves B, C, en sont d'autres D, E, de forme oblongue, qu'on appelle baignoires, posées sur le pavé de l'attellier. Ces baignoires qui sont de bois & cerclées de fer, sont revêtues intérieurement de plomb, pour qu'elles tiennent mieux l'eau dont on les remplit, en ouvrant le robinet X, par lequel l'eau vient d'un réservoir. Chaque baignoire a de plus sur le devant & à la partie inférieure, un robinet F, F, par le moyen duquel on vuide l'eau qu'elles contiennent dans le puisart ou égoût soûterrein dont G est l'ouverture recouverte d'une grille.
Toutes choses ainsi disposées, on place les cylindres de bois H, H en travers des baignoires. Ces cylindres qui ont un pié de diametre, en occupent toute la largeur. Ils sont traversés par un arbre de fer, dont une des extrémités est courbée en manivelle : ensorte que les cylindres peuvent tourner librement sur les tourillons de ces arbres, auxquels des échancrures pratiquées dans les bords des baignoires, servent de collet. Les cylindres doivent être placés dans les baignoires, ensorte que leur centre ou axe soit directement à plomb au dessous de l'extrémité des canelles K, K, par lesquelles la cire contenue dans les cuves doit sortir. On place ensuite au-dessus du cylindre, une espece de banquette de fer a b, ou a b, a c, b c, fig. 2. qu'on appelle chevrette, qui a quatre piés qui appuient sur les bords de la baignoire, comme on voit en C, fig. 2. ensorte que les tourillons du cylindre soient au milieu entre les piés de la chevrette. Cette chevrette a vers chacune de ces extrémités deux lames de fer élastiques 1, 2 ; 1, 2, entre lesquelles on place un vaisseau de cuivre L L, de forme oblongue, qu'on appelle greloire. Cette greloire est plus large par le haut que par le bas. Sa longueur L L qui est égale à celle du cylindre, est divisée en trois parties : celle du milieu qui est la plus grande, est percée d'une cinquantaine de petits trous, plus ou moins, d'une ligne de diametre, distans les uns des autres d'un demi pouce ou environ. Les deux autres parties servent à placer des réchauds pleins de braise, dont l'usage est d'entretenir un médiocre degré de chaleur dans la greloire, dont la fraîcheur ne manqueroit pas de faire figer la cire que l'on y laisse couler.
On met une plaque de fer blanc ou de cuivre 3 3, fig. 2. inclinée vers la canelle K, pour rejetter la cire dans l'auge ou greloire LL. La plaque 3, 4, posée de l'autre sens, sert au même usage. Par dessus ces deux plaques on met une passoire 5 toute criblée de trous. C'est dans cette passoire que coule la cire après qu'on a repoussé dans la cuve le tampon qui bouche la canelle K, au moyen de la cheville 6 qu'on laisse dans la cannule plus ou moins enfoncée, pour modérer selon le besoin, la vîtesse de l'écoulement,
La cire, après avoir passé dans la passoire ou crible 5, tombe sur les plaques 4, 3 ; 3, 3, & de-là dans la greloire L L, d'où elle sort par les petits trous que nous avons dit être au fond de cette greloire, & tombe sur la surface du cylindre en d. Si en même tems un ouvrier assis en 1, fait tourner le cylindre à l'aide de la manivelle qui est de son côté, de d par e vers f, il est évident que le filet de cire qui tombe sur le cylindre doit s'étendre, & former une bande qui sera d'autant moins épaisse, que le cylindre se sera mû avec plus de vîtesse : mais comme il est mouillé, étant immergé dans l'eau au quart de sa surface, la cire ne s'y attachera point. Mais après avoir descendu en f, elle passera par g, pour aller se rassembler en E, fig. 1. Ce mouvement est encore facilité par celui de l'eau qui est dans la baignoire, laquelle se porte vers E, pour sortir à mesure qu'il en vient d'autre du réservoir par le robinet X ; ensorte que l'écoulement par le robinet F, soit égal à celui par le robinet X. On rechange continuellement d'eau, non seulement pour qu'elle soit plus propre, mais aussi afin qu'elle soit toûjours fraîche, & qu'elle puisse faire congeler les rubans de cire à mesure qu'ils tombent dans la baignoire.
Par cette opération, la baignoire ne tarde pas d'être remplie de rubans ; un ouvrier placé en M les enleve avec une fourche à trois dents, & les jette de la baignoire dans la manne N qui est un grand panier d'osier revétu intérieurement de toile ; lorsque le panier est plein, un autre ouvrier à l'aide de celui qui a empli la manne, la place sur une broüette O, sur laquelle il la transporte près des quarrés ou chassis sur lesquels sont des toiles tendues & exposées à l'air. Voyez QUARRE. Il vuide sa manne sur ces toiles, en un seul tas, que des femmes qui sont autour des quarrés ou toiles, éparpillent sur toute leur surface : pendant que cet ouvrier conduit sa broüette, le tireur remplit une autre manne ; ainsi alternativement jusqu'à ce que la cuve soit épuisée.
En réduisant la cire en rubans, les surfaces en sont prodigieusement multipliées, ce qui donne plus de prise à l'action de l'air & du soleil à laquelle on les expose sur les quarrés pour dissiper l'huile volatile qui fait la couleur jaune de la cire.
Les quarrés sont de grands chassis de charpente de dix piés de large sur une longueur telle que le lieu le permet, élevés d'un pié & demi au-dessus du terrein. Sur les chassis sont tendues horisontalement des toiles soûtenues dans le milieu de leur largeur par une piece de bois horisontale qui se trouve dans le plan du chassis. C'est sur cet assemblage de charpente & de toile qu'on étend ou éparpille également la cire mise en rubans ou en pain, ainsi qu'il sera dit ci-après. On entoure encore le quarré d'une bande de toile verticale accrochée à des piquets, dont l'usage est d'empêcher que le vent n'emporte la cire & ne la jette par terre. Lorsque la cire a été exposée un tems convenable sur les quarrés, on la retourne, ensorte que la partie qui étoit dessous paroisse dessus. Et lorsque l'on juge que la cire a acquis un premier degré de blancheur, on la reporte à la fonderie, où on lui fait subir la même suite d'opérations que nous venons de détailler ; c'est-à-dire qu'on la remet en rubans, & qu'on l'expose encore sur les quarrés à l'action du soleil & de l'air : mais comme il ne peut pas manquer d'arriver à cette seconde fonte que les parties intérieures des premiers rubans ne se trouvent à la surface des seconds, il suit que toutes les parties de la cire auront été successivement exposées à l'action de l'air & du soleil. On réitere une troisieme fois cette opération, si on juge que la cire n'ait pas encore acquis le degré de blancheur que l'on desire qu'elle ait.
La cire exposée pour la derniere fois au soleil sous la forme de rubans, est encore remise dans une chaudiere, d'où, après qu'elle a été fondue, on la laisse couler dans la cuve : au lieu de la faire passer par la greloire, comme dans les opérations précedentes, on la laisse couler dans le coffre représenté fig. 7, que l'on substitue à la place de la greloire.
Ce coffre est une caisse de cuivre étamé, portée sur quatre piés de fer semblables à ceux de la chevrette. Aux deux longs côtés de ce coffre sont deux auges de même métal, dans lesquelles on place des réchauds de braise dont l'usage est d'entretenir dans l'état de fluidité la cire dont le coffre est rempli : on tire la cire de ce coffre par le robinet A, dans l'écuellon fig. 5. qui est un vase de cuivre ayant deux anses A A, & deux goulettes B B, avec lequel on verse la cire dans les planches à pains.
Les planches à pains, ainsi appellées parce que c'est dans ces planches que l'on fait prendre à la cire la figure de pains, sont de chêne d'un pouce d'épaisseur, creusées de deux rangées de trous ronds, chacun d'un demi-pouce de profondeur sur 4 pouces de diametre ; on remplit deux de ces moules à la fois ; au moyen de deux goulettes de l'écuellon, observant de mouiller la planche auparavant, afin que la cire ne s'y attache point. Après que les pains sont figés, on les jette dans l'eau de la baignoire pour les affermir : on les porte ensuite sur les quarrés ; on les y laisse jusqu'à ce qu'ils ayent acquis tout le degré du blancheur que l'on desire qu'ils ayent, ou dont ils sont capables, observant de les retourner quand ils sont assez blancs d'un côté, ce qui se fait avec une main de bois qui est une planche de bois mince représentée fig. 3. cette planche a 3 piés ou environ de longueur sur un demi-pié de large ; elle est percée d'un grand trou vers une de ses extrémités qui est traversée d'une poignée par laquelle on tient cette machine, avec laquelle on retourne les pains comme on feroit avec une pelle plate ; ce qui est plus expéditif que de les retourner les uns après les autres.
La cire blanchie & réduite en pains passe entre les mains du cirier, qui l'employe aux différens usages de sa profession. Voyez CIRIER.
BLANCHIR ou FAIRE BLANCHIR, (en terme de Confiseur) c'est enlever de dessus les abricots, amandes, &c. cette espece de bourre ou de duvet dont ils sont chargés, en faisant passer ces fruits par une lexive préparée pour cela. Voyez AMANDE, ABRICOTS, &c.
BLANCHIR, (chez les Couteliers) c'est quand la piece est forgée & dressée à la lime, la passer sur la meule pour la premiere fois ; c'est sur la seconde meule qu'on la dégrossit, & sur la troisieme qu'on la met à tranchant : la polissoire succede à la meule.
BLANCHIR, (en terme de Cuisine) c'est faire revenir une piece, quelle qu'elle soit, dans de l'eau tiede : il ne faut l'y laisser qu'un demi-quart d'heure ou environ.
BLANCHIR, (en terme de Doreur) s'entend d'une opération par laquelle on enduit de plusieurs couches de blanc une piece qu'on veut dorer. Voyez DORER. C'est par-là qu'on remplit les inégalités du bois, qui empêcheroient l'or de s'étendre par-tout. La figure 5. Planche du Doreur, représente un ouvrier qui blanchit.
BLANCHIR, (en terme de Cloutier d'épingle) c'est étamer les clous de cuivre. Voyez éTAMER.
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BLANCHISSERIES | BLANCHISSERIES
La blanchisserie doit être située sur le bord d'une riviere environnée de prés ; elle est composée de cinq bâtimens ou atteliers séparés, qui sont le moulin, la buerie, proprement dite le frottoir, la laiterie, & la ployerie ou le magasin.
Les trois blanchisseries de Senlis sont situées sur la riviere de Nonnette, entre Senlis & Chantilly, vis-à-vis Courteuil. Les eaux de cette riviere, qui sont bordées de prés, sont au dire des gens du pays, les plus propres que l'on connoisse pour servir à blanchir les toiles.
La premiere préparation que l'on donne aux toiles, lorsqu'elles sont arrivées à la blanchisserie, consiste à en ôter le parou, qui est l'apprêt que le Tisserand leur donne. Voyez PAROU & l'article TISSERAND ; ce qui se fait en les laissant tremper dans l'eau pure : on les y laisse en Flandre pendant 8 à 10 jours, même dans les chaleurs. Au bout de ce tems, on les repame, on les étend, & on les seche. Ici, on les fait fouler dans le moulin : ce moulin est en tout semblable à celui des foulons. Voyez FOULON, MOULIN A FOULON ; il n'en differe qu'en ce que les maillets n'ont point de dents, mais sont arrondis par la partie qui tombe sur les toiles : au reste la méchanique de ces moulins est exactement la même que celle des foulons en laine. Ceux qui ne se servent point de moulin, dégorgent les toiles, à force de les arroser, après les avoir laissé tremper pendant huit ou dix jours, comme nous avons dit.
Cette opération achevée, on repame les toiles. Repamer, c'est battre les toiles dans une eau courante, en les y jettant de dessus un petit pont qui traverse la riviere, & qui n'est élevé que d'un pié ou deux au-dessus de la surface de l'eau ; ce pont s'appelle repamoir, conjointement avec la partie du lit de la riviere ; dans laquelle les toiles trempent & sont battues. On étend ensuite les toiles pour les faire sécher, & on coule la premiere lessive.
Le lieu où on coule les lessives s'appelle particulierement buerie ou blanchisserie, parce que ce n'est que par des lessives réitérées que l'on parvient à rendre les toiles blanches. Ce lieu, dis-je, est une salle plus ou moins grande selon le nombre des cuviers & des bacs que l'on y veut placer ; c'est dans le même lieu que l'on prépare & que l'on coule les lessives. L'eau y est conduite par des rigoles placées à une hauteur convenable au-dessus des chaudieres ; cette eau est élevée par des pompes ou une roue à pots, ou par tout autre moyen que l'hydraulique enseigne.
Préparation de la lessive. Après avoir pulvérisé par le moyen d'une meule tournante, mûe par un cheval ou par l'équipage du moulin, les cendres de cassoude & les avoir tamisées dans un tamis de cuivre, dont les trous n'excedent point la grosseur d'un grain de chenevi ; on les met tremper dans les bacs D, E, F, qui sont des coffres de charpente, revêtus intérieurement de planches bien étanchées. On laisse écouler, quand on le juge à propos, l'eau chargée des sels desdites cendres, dans les autres bacs G, H, I, qui sont au-dessous, dont on ne voit qu'une petite partie. Ces derniers bacs sont de briques ou tuileaux maçonnés avec du ciment, comme les bassins des jardins faits avec les mêmes matieres.
Les trois bacs D, E, F, contiennent trois différentes sortes de cendres, dans le premier, on met tremper les cendres cassoudes ; dans le second, les cendres vecdasses, & dans le troisieme, les cendres communes de bois neuf : ces trois sortes de cendres employées séparément ou mêlées ensemble dans différentes proportions, forment les différentes sortes de lessives qui sont en usage dans ces manufactures. Lorsque l'on veut faire une lessive, on prend dans un des bacs G, H, I, autant d'eau chargée des sels de la cendre du bac qui est au-dessus, qu'il en est besoin, ou de plusieurs bacs, s'il est nécessaire, pour faire une lessive composée : on met ces eaux qu'on doit avoir laissé reposer jusqu'à ce qu'elles soient claires & limpides, dans un autre bac de ciment C, où on les tient en réserve pour s'en servir au besoin.
Les cendres par cette premiere lotion à l'eau froide n'ont pû être épuisées totalement de leurs sels : pour en tirer le reste, on les met dans le bac B, qui est aussi de ciment. Ce bac s'appelle bac à brasser. Il reçoit l'eau chaude de la chaudiere de fer A, qui est assise sur un fourneau de brique semblable à celui des Teinturiers. Cette eau chaude acheve de détremper les sels que l'eau froide n'avoit pû dissoudre. Cette opération est encore accélérée par le travail des ouvriers, qui remuent continuellement les cendres dans l'eau avec des pelles de bois ; c'est ce qui a fait donner à ce bac le nom de bac à brasser. La lessive qu'on retire par ce moyen est jettée après qu'elle a été éclaircie dans le bac C, d'où on la tire pour la jetter dans des rigoles qui la conduisent dans les chaudieres P, Q, R, S, établies chacune sur un fourneau, dont les ouvertures Y, Y, Y, Y, répondent sous une hotte de cheminée ; ensorte que la fumée du bois qui entretient le feu sous les chaudieres, puisse trouver par-là une issue. Ces chaudieres qui sont de fonte ou fer fondu, ont trois piés de diametre.
Les cuviers K, L, M, N, sont placés vis-à-vis des chaudieres : ils sont de brique maçonnée avec chaux & ciment ; leur diametre est d'environ six piés, & leur profondeur à-peu-près la même. Chaque cuvier est garni dans son fond d'un plancher ou grillage de planches de chêne, élevé d'environ un pié au-dessus du fond des cuviers, qui est de maçonnerie comme tout le reste. Chaque cuvier à de plus deux tuyaux que l'on ferme avec des tampons ou des robinets. Un de ces deux tuyaux X qui sont placés au-dessous du plancher de planches, le plus près qu'il est possible du fond du cuvier, sert à couler la lessive du cuvier dans la chaudiere ; l'autre placé à l'opposite du premier derriere le cuvier, & qu'on ne voit pas, sert à lâcher dans une rigole ou égoût caché aussi par les cuviers, au derriere desquels il est placé, la lessive contenue dans les cuviers après qu'on en a tiré tout le service qu'on peut en espérer, elle sort par cette rigole, pour s'aller perdre dans la riviere ou dans la campagne.
Pour couler la lessive, on puise avec un seau dans les chaudieres P, Q, R, S, & on jette dans les cuviers K, L, M, N, O, remplis des toiles proposées à blanchir. Les cuviers de Flandre contiennent chacun quarante aunes de trois quarts, & on y met cent livres de cassoude. L'eau après avoir traversé les toiles retourne dans la chaudiere, d'où on la reprend pour la jetter de nouveau sur les toiles ; ainsi alternativement pendant plusieurs heures.
La premiere lessive est composée de moitié de cendres de casseau, & de cendres du pays. Les toiles sortant de cette lessive doivent être étendues sur le pré & arrosées.
Pour étendre les toiles sur le pré, on se sert de plusieurs chevilles de bois qu'on fait passer dans des anneaux de ficelle qui sont cousus tout au-tour de la toile, & qu'on enfonce dans la terre, ensorte que la toile soit bien tendue.
La disposition des prés favorise l'opération d'arroser : ils sont coupés comme on voit Pl. I. en a, b, c, d, e, f, g, h, i, k, l, m, n, o, p, q, de dix toises en dix toises par des canaux dans lesquels on a détourné le lit de la riviere. On prend l'eau dans ces canaux avec des écopes de forme singuliere, représentées fig. 1. pl. II. de Blanchisserie. (V. ECOPE), & on la jette sur les toiles étendues, ensorte qu'elles se trouvent par-tout également mouillées : on réitere cette opération jusqu'à ce que les toiles soient entierement dégorgées de cette premiere lessive.
Lorsque les toiles sont seches, on peut les retirer du pré, & les mettre à une seconde lessive.
La seconde lessive sera augmentée d'un tiers de cassoude. Les toiles seront ainsi coulées la troisieme, quatrieme & cinquieme lessive, avec cette augmentation de cassoude, observant à chaque lessive ce qui a été prescrit ci-dessus.
Il faut observer que si après la premiere lessive on ne pouvoit pas retirer les toiles seches de dessus le pré à cause des pluies, en ce cas, après avoir repamé les toiles, on pourroit les mettre à la lessive à la sortie du repamoir.
La sixieme & septieme lessive sera coulée avec la même quantité de cassoude que les précédentes, & avec les mêmes attentions ; c'est-à-dire, que les toiles doivent être seches.
La huitieme & neuvieme lessive sera faite avec les toiles qu'on aura repamées sortant du pré ; elles seront mises dans les cuviers étant mouillées.
On doit observer pour les lessives suivantes, dont le nombre est indéterminé, qu'il faut les encuveter seches une lessive, & les repamer, & les encuveter mouillées à la lessive suivante, ainsi alternativement.
On doit aussi observer pour les lessives où les toiles ont été encuvetées seches, qu'il faut que la lessive soit seulement à demi-chaude ; au lieu que quand les toiles sont écrues ou mouillées, elle peut être bouillante.
A l'égard de la quantité de cendres cassoudes, pour cent vingt pieces de Toile de Flandre de trente-six aunes de longueur & de trois quarts de large, on met cent livres de cendres ; quant aux deux ou trois premieres lessives, seulement quatre-vingt-livres.
Lorsque les toiles sont à demi blanches, on met un tiers de cendres vecdasses ; & lorsqu'elles sont tout-à-fait blanches, & prêtes à entrer au lait, les lessives sont seulement composées de cendres blanches ou de bois commun ; cette derniere donne un fond beaucoup plus clair, & un blanc plus parfait.
Lorsque les toiles sont blanches, il faut les retirer du pré, les repamer pour les mettre au lait, après qu'elles sont égouttées.
La laiterie est une salle plus ou moins grande, dans laquelle sont plusieurs grandes cuves de bois enterrées de toute leur hauteur dans le sol de la salle. La grandeur de ces cuves est à-peu-près égale à celle des cuviers. On jette les toiles encore moites dans ces cuves, & par-dessus une quantité suffisante de lait écrêmé, pour qu'elles soient entierement plongées : on les laisse en cet état pendant vingt-quatre heures ; on les retire du lait pour les porter au repamoir, où elles sont repamées. Lorsque les toiles sont repamées, elles vont toutes mouillées à la frotterie ou frottoir. Le frottoir est une autre salle où des femmes sont occupées à savonner les lisieres des toiles, qui n'ont pû être autant blanchies que le milieu de l'étoffe par les opérations précédentes.
Cette salle contient plusieurs baquets A, B, C, Pl. I. au bas, de trois piés de large, & d'environ quatre pouces d'épaisseur, & de quinze ou dix-huit de profondeur : le bord supérieur de ces baquets, qu'on appelle plateaux, est incliné en-dedans, ensorte que l'eau puisse retomber : ils sont portés sur deux pieces de bois D D, E E, soûtenues par des piés scellés dans le plancher, qu'on appelle chantiers.
Chacun de ces plateaux contient un autre vase de bois X X X, dont le diametre est à-peu-près le tiers de celui du plateau, qu'on appelle tinette ; cette tinette contient de l'eau chaude qui sert à détremper le savon noir contenu dans les écuelles de bois F F, posées sur les piliers G G, qui sont placés entre chaque plateau X.
Les autres ustenciles que cet attelier contient, sont un fourneau garni de sa chaudiere, pour faire chauffer l'eau nécessaire aux tinettes ; quelques tables pour poser les toiles & les visiter, c'est-à-dire, examiner si les lisieres ont été assez savonnées ; & une machine qu'on appelle chaise, représentée fig. premiere, Pl. I.
Ces chaises ne sont autre chose qu'une caisse à jour composée de quatre montans ou piliers, de quelques bâtons qui les unissent, & d'un fond de planches ; le tout a assez de ressemblance avec un tabouret commun renversé. Cet instrument sert à égoutter les toiles au sortir des mains des frotteuses.
Pour savonner les lisieres, les toiles étant ployées en deux suivant leur longueur, & en plusieurs doubles, ensorte que toutes les lisieres soient rassemblées dans l'étendue d'un pié & demi ou environ, la frotteuse prend un peu de savon dans l'écuelle F, l'applique sur l'endroit qui ne paroît pas assez blanc ; elle frotte ensuite deux parties de lisiere l'une contre l'autre jusqu'à ce que la tache soit effacée, observant de mouiller de tems en tems avec l'eau chaude contenue dans la tinette du plateau sur le bord duquel elle travaille. Deux ouvrieres peuvent travailler en même tems sur le même plateau sans s'incommoder ; l'une est d'un côté des chantiers, & l'autre du côté opposé.
Après que les toiles ont été suffisamment frottées, elles vont à la lessive douce, de-là sur le pré pour être arrosées : au sortir du pré, il faut les repamer & les remettre au lait, d'où elles sortent pour être portées pour la seconde fois au frottoir, d'où elles passent à la lessive legere.
Cette lessive legere est composée d'un quart seulement de cassoude, si on a de la vecdasse, on peut couler les toiles avec la même quantité de cette derniere matiere sans cassoude.
Lorsque les toiles sortent du frottoir pour la seconde fois, elles sont portées humides à la lessive : il faut en mettre seulement deux lits dans le cuvier, avoir la lessive chaude, & en jetter dessus environ la quantité qu'une chaudiere en peut contenir ; cela fait, il faut en mettre deux autres lits, & les arroser avec la même lessive, & continuer de la sorte jusqu'à ce que toutes les toiles qui doivent passer par cette lessive soient entrées dans le cuvier ; alors on les arrosera avec la même lessive bouillante, que l'on aura augmentée d'eau pour que la chaudiere soit pleine.
Après avoir laissé couler la lessive trois fois, on sortira les toiles ainsi chaudes, on les étendra sur le pré, où on les fera arroser deux ou trois fois.
Après le troisieme arrosage, il faut retirer les toiles du pré, les porter mouillées au repamoir, & étant égouttées, on les remettra au lait ; continuant ainsi la même suite d'opérations jusqu'à ce qu'elles ayent acquis tout le degré de blancheur dont elles sont capables, ou celui que l'on veut leur donner.
Cette suite d'opérations n'est pas si bien démontrée la meilleure, qu'on ne puisse s'en écarter dans bien des occasions : mais c'est la plus ordinaire. Il y a des qualités de toiles qui résistent à tous les efforts que l'on fait pour les blanchir parfaitement ; il faut se contenter alors d'un demi-blanc, ou davantage si on le peut atteindre : il y en a d'autres qui résistent à toutes ces opérations, & dont on vient facilement à bout en variant le procédé de quelques-unes, soit pour la dose ou pour l'ordre ; c'est où paroît l'intelligence du manufacturier : c'est pourquoi il observe soigneusement si la blancheur de ses toiles fait du progrès en passant par les opérations que nous venons de décrire ; si elle s'arrête en chemin, il varie un peu le procédé, & par ce moyen il détruit ou diminue l'obstacle qui s'opposoit au progrès de la blancheur de sa toile. Il ne faut quelquefois pour cela que deux lessives bouillantes de suite, au lieu que nous avons prescrit ci-devant de les donner alternativement bouillantes sur les toiles mouillées, & tiedes sur celles qui sont mises seches dans les cuviers ; ainsi de toutes les variétés dont ces opérations sont susceptibles.
Lorsque les toiles sont blanches, il faut les porter au repamoir ; mouillées du repamoir, il faut leur donner un premier bleu, & les faire secher sur les pieux.
Le bleu dont on se sert dans les manufactures est le bleu d'Inde appellé indigo, ou le bleu de Prusse qui a un plus bel oeil. On plonge les pieces de toile dans un baquet rempli d'eau chargée plus ou moins de cette couleur ; on l'y retourne pour qu'elle s'en charge également ; ensuite on retire par un bout la piece de toile, & on la roule en l'exprimant sur un bâton placé au-dessus du baquet à trois ou quatre piés de hauteur, ensorte que la piece de toile a la figure d'un écheveau de fil ouvert, & suspendu par le bouton placé au-dessus du baquet. Après qu'elle est égouttée, on la tord pour exprimer la quantité d'eau superflue. Cette opération est très délicate ; car si on tord trop, toute la teinture bleue sort, & les toiles restent à peu près comme elles étoient avant que d'avoir été plongées dans le baquet : si au contraire on ne tord pas assez, on a à craindre que les toiles ne soient plus chargées de couleur dans un endroit que dans un autre.
L'opération de donner le bleu aux toiles, est suivie de celle de les étendre sur les pieux pour les faire sécher. Les pieux sont placés dans la campagne ou le pré ; ce sont des bâtons enfoncés fermement dans la terre, & qui en sortent d'environ quatre piés : ils sont rangés sur des lignes droites comme les arbres d'un jardin. Sur les têtes de ces pieux, qui doivent se trouver en ligne droite, on étend une toile grossiere, ou une toile qui n'a pas encore été blanchie, ensorte que le milieu de la largeur de la toile porte sur la tête des pieux, & qu'elle pende de chaque côté. On affermit & on tire cette toile pour qu'elle soit bien tendue ; & sur celle-ci on étend de même celle qui a été mise au bleu pour la faire sécher : elle doit être bien tendue, pour empêcher qu'elle ne s'étrécisse & se raccourcisse en séchant.
Lorsqu'elles seront seches on leur donnera l'apprêt qui suit : prenez de l'amydon, faites-le bouillir dans de l'eau, retirez-le de dessus le feu quand il sera cuit, & le passez par un linge.
Vous mettrez dans un autre pot ou vase un tiers d'amydon crud, que vous détremperez dans de l'eau sans le faire bouillir, & le passerez à-travers un linge. Cela fait, vous mettrez dans un troisieme vase deux tiers d'amydon bouilli, avec un tiers d'amydon crud ; vous y ajoûterez votre bleu ; ayant bien mêlé le tout, vous y plongerez vos toiles, & après les avoir bien trempées dans cette composition, vous les retirerez pour les faire sécher.
Après que les toiles sont seches, on les porte à la ploierie ou magasin, d'où elles ne sortent que pour retourner chez ceux à qui elles appartiennent, ou à qui elles sont destinées.
Mais comme les toiles après avoir passé par toutes les opérations dont on vient de parler, ont un grand nombre de faux plis, on leur donne dans la ploierie diverses préparations qui les effacent.
La premiere de ces préparations consiste à les faire passer dans le rouloir, qui est une espece de calendre ou de presse en taille-douce. Le rouloir représenté fig. 2. Pl. III. est composé de deux jumelles, des montans C A, F B, fendus de D en A, d'une longue mortoise, de quatre montans K H, I G, F E, L M ; toutes ces pieces sont assemblées dans une plate-forme ou chassis I K L ; chacun des quatre montans est assemblé avec les jumelles par des traverses G D, H D, M E ; & les jumelles le sont l'une avec l'autre par le sommier A B : entre les deux jumelles au-dessous du sommier, on place sept rouleaux de bois de six à sept pouces de diametre, & d'environ quatre piés de longueur. Ces rouleaux dont les tourillons entrent dans les mortoises des jumelles, portent les uns sur les autres, ensorte que le mouvement d'un de ces rouleaux se communique à tous les autres, qui tournent alternativement en sens contraire.
Le rouleau marqué 6 dans le profil, porte un carré qui reçoit une manivelle, au moyen de laquelle on le fait tourner, & on communique le mouvement à tous les autres.
Sur les deux montans de devant est encore un autre rouleau, que l'on fait tourner avec une manivelle M. voyez aussi 9 le profil. A la partie opposée, c'est-à-dire derriere, est un autre rouleau 8 ; mais qui est fixé & percé de plusieurs trous pour recevoir des chevilles a, entre lesquelles la piece de toile est conduite. Enfin, au-dessous des rouleaux est une table de bois qui occupe tout le vuide du chassis I K L, dont l'usage est d'empêcher la toile de toucher le plancher. La toile est posée sur cette table, comme on le voit dans la figure, & le trait noir représente le profil de la toile, qui est ployée en zig-zag. On prend le bout supérieur de cette toile, on le passe sous le rouleau 8, on le ramene entre les deux chevilles aa sur le rouleau 1 ; on fait tourner ensuite la manivelle du rouleau 6 du sens convenable, pour que le chef de la toile passe entre les rouleaux 1 & 2 ; continuant de tourner, on le fait passer entre les rouleaux 2 & 3, & successivement entre tous les autres, jusqu'à ce qu'il sorte entre les rouleaux 6 & 7 du coté de G. Lorsqu'il en est sorti une longueur convenable 7, 9, on reçoit le chef sur le rouleau 9, où on l'assujettit par le moyen d'une envergeure ou petite baguette, qui se cache & se fixe ensuite dans une cavité de l'ensuple ; ce qui fait qu'en tournant la manivelle du rouleau 9, on amene toute la toile sur lui sans craindre qu'elle se déroule ; cette opération redresse les fils de la trame & de la chaîne, que les opérations par lesquelles la toile avoit passé pour être blanchie, avoient beaucoup dérangés ; de plus elle efface les principaux plis.
Cette opération achevée ; on ôte le rouleau 9 de dessus ses supports I G, L M, & on le porte sur un autre A B, fig. 4. Planc. II. qu'on appelle par cette raison porte-rouleau. C'est une espece de banc à quatre piés, aux deux extrémités duquel sont deux montans, sur lesquels on pose les tourillons du rouleau. Cette machine se place au bout d'une table, auprès de laquelle les ployeuses sont assises. Elles ployent la toile en botte, ainsi qu'il est d'usage. Lorsque les toiles sont ployées, on les met en presse avec des ais entre-deux comme les livres que l'on relie. Les presses dont on se sert pour cet effet, sont en tout semblables à celles des manufactures de papier, auxquelles nous renvoyons à cet égard.
Les toiles dûement pressées, pour leur faire perdre les plis qu'elles ont, sont enveloppées de papier ; c'est ce qu'on appelle mettre en papier, & aussi la derniere préparation qu'on leur donne dans les manufactures.
Il y a des toiles que l'on fait passer au mailloir, Planc. II. fig. 5. c'est-à-dire, que l'on les bat sur une pierre de marbre avec des maillets de bois, pour en applatir les fils & leur donner une plus belle apparence : mais c'est une charlatanerie ; car au premier blanchissage, les fils qui avoient été applatis reprennent leur rondeur ordinaire, & on est tout étonné de voir de la toile qu'on a achetée pour de la toile fine, devenir grossiere ; d'ailleurs cette opération use plus les toiles que ne feroient deux ans de service.
Il y en a d'autres que l'on fait passer à la calendre ; cette méthode n'altere point tant les toiles : mais à l'égard de l'apparence de finesse & de perfection qu'elle leur donne, elle est comme l'autre sujette à l'inconvénient, que le premier blanchissage la fait évanoüir.
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BLANCK | S. m. (Commerce) c'est une monnoie fictive, par laquelle on compte en Hollande. Le blanck vaut 6 duites ou 1 1/2 sou argent de France.
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BLANCKENBERG | (Géog.) petite ville de la Flandre Espagnole, sur la mer, entre Ostende & l'Ecluse. Il y a une ville de ce nom dans le duché de Bergue, sur la riviere de Seig.
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BLANCKENBURG | (Géog.) principauté d'Allemagne, dans la basse Saxe. Il y a encore une ville de ce nom dans la Thuringe.
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BLANCKENHAYN | (Géog.) petite ville d'Allemagne, à 4 lieues d'Erford.
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BLANCKENHEIM | (Géograph.) petite ville & comté d'Allemagne, sur la riviere d'Ahr.
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BLANDICES | S. f. (terme de Palais) signifie des flateries ou cajoleries artificieuses, par où l'on surprend le consentement de quelqu'un. (H)
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BLANKA | (Géog.) petite île du golfe de Mexique, près la côte de Tlascala, à peu de distance de la Vera-Crux.
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BLANKIL | S. m. (Commerce) petite monnoie d'argent de billon, qui est en usage dans les royaumes de Fez & de Maroc : elle vaut environ deux sous six deniers de notre argent.
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BLANOS | (Géog.) petite ville maritime d'Espagne, en Catalogne, près de la riviere de Tordera, au nord de son embouchure.
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BLANZAC | (Géog.) petite ville de France, dans l'Angoumois, sur la riviere de Nay, aux frontieres de la Saintonge.
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BLARE | S. f. (Commerce) petite monnoie de cuivre, avec mélange d'un peu d'argent : elle se fabrique à Berne en Suisse, au même titre que les ratzes de Soleure & de Fribourg, & elle a à peu près la même valeur. Voyez RATZE. Le blare est évalué en France à deux sous un denier.
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BLASIA | genre de plante à fleur monopétale, campaniforme, tubulée, & ressemblante en quelque façon à la trompe d'un éléphant. Cette fleur est stérile & n'a point de calice : les fruits sont des capsules qu'on trouve le long des bords des feuilles, & où il y a pour l'ordinaire dix semences arrondies & très-petites. Nova plantarum genera, par M. Micheli. (I)
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BLASON | S. m. l'Art héraldique ou l'Art de blasonner les armoiries des maisons nobles, ou d'en expliquer toutes les parties dans les termes qui leur conviennent. Voyez ARMOIRIES.
Des diverses étymologies du mot blason, la plus probable est celle qui le fait venir du mot Allemand blasen, qui signifie sonner du cor, parce que c'étoit autrefois la coûtume de ceux qui se présentoient pour entrer en lice dans les tournois, de notifier ainsi leur arrivée. Ensuite les héraults sonnoient de la trompette, blasonnoient les armes de ces chevaliers, les décrivoient à haute voix, & se répandoient quelquefois en éloges, au sujet des exploits de ces braves.
Il y a cette différence entre les armes & le blason, que les premieres sont des devises ou des figures dont est chargé l'écusson, & que le blason est la description que l'on en fait verbalement. Voyez ARMOIRIES & DEVISE.
Les regles de cet Art sont 1° de nommer d'abord le métal ou la couleur du champ, comme d'or, d'argent, ou de gueules : 2° de spécifier la maniere ou la division de l'écu par lignes, soit de haut en-bas, ou en bandes, & de même la différence de la ligne, c'est à savoir si elle est endentée, engrelée, &c. 3° dire ensuite ce que porte le champ : 4° après avoir exprimé de la sorte le champ, sa division & son port, s'il y a plus d'une piece dans le champ, il faut commencer par la principale : 5° s'il y a plus d'une sorte de pieces dans le champ, il faut nommer la premiere celle qui est dans la principale partie : 6° éviter la répétition des termes en blasonnant, & sur-tout celle de ces mots de, ou, &, avec : 7° les trois formes de blason consistent en métaux, en pierres précieuses, & en planetes : la premiere convient aux simples gentilshommes ; la seconde aux nobles qualifiés ducs, comtes, &c. la troisieme aux empereurs, aux rois, aux princes, quoique cette variété soit improuvée des François, ainsi que des autres nations qui n'usent que de métaux & de couleurs pour tous les degrés de noblesse, & quoique nous tenions d'eux l'Art héraldique : 8°. c'est mal blasonner, que de mettre couleur sur couleur, & métal sur métal ; ce qui souffre une seule exception en faveur des armes de Jérusalem, qui sont d'argent à la croix potencée de gueules entre quatre petites croix d'or. Ajoûtez que des lions debout sont dénommés rampans ; s'ils marchent, passans, gardans ; on les nomme encore saillans, regardans, &c. Les loups & les ours se qualifient comme les lions ; les griffons, au lieu de rampans & de saillans, sont dits segreans ; les lions, les griffons, & les aigles sont dénommés aussi langués & armés ; les cygnes, membrés ; les faucons, chaperonnés ; les coqs, armés, crêtés, barbetés, c'est-à-dire, lorsque les langues, les becs, & les serres de ces animaux sont d'une couleur différente de leur corps.
Lorsqu'un enfant ou un animal sort du fond de l'écu, on l'appelle issant ; lorsqu'il est dessus, on le dit gisant ; s'il part du milieu, il se qualifie naissant, &c. Voyez ces articles. (V)
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BLASPHÉMATEUR | S. m. celui qui blasphème ou qui prononce un blasphème. Les blasphémateurs ont toûjours été séverement punis par la justice humaine, tant dans l'ancienne loi que dans le Christianisme. Ils étoient punis de mort chez les Juifs : Qui blasphemaverit nomen Domini, morte moriatur. Levitic. cap. xxjv. & ce fut sur cette loi mal appliquée que l'on condamna Jesus-Christ à la mort. Blasphemavit : quid adhuc egemus testibus ? ecce nunc audistis blasphemiam, quid vobis videtur ? at illi respondentes dixerunt, reus est mortis. Matth. cap. xxvj. vers. 66. Nous avons des lois de S. Louis & de plusieurs autres de nos rois, qui condamnent les blasphémateurs à être mis au pilori & à avoir la langue percée avec un fer chaud par la main du bourreau. Pie V. dans des réglemens faits sur la même matiere en 1566, condamne les blasphémateurs à la même peine ; & aux galeres, si c'est la troisieme fois qu'ils retombent dans ce crime : car il n'inflige qu'une amende pour la premiere fois, & le foüet par les carrefours pour la seconde, si le criminel est un laïc ; s'il est ecclésiastique, ce pontife veut qu'à la troisieme fois il soit dégradé & envoyé aux galeres. La peine la plus ordinaire aujourd'hui, est l'amende honorable & le bannissement. (G)
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BLASPHEMATOIRE | ce qui contient ou exprime un blasphème. C'est une qualification que les souverains pontifes & les théologiens donnent quelquefois à certaines propositions injurieuses à Dieu, ou qui lui attribuent des choses contraires ou répugnantes à sa souveraine perfection ; ainsi la cinquieme proposition de Jansenius, c'est une erreur semipelagienne que de dire que Jesus-Christ est mort ou a répandu son sang pour tous les hommes, entendue en ce sens, que Jesus-Christ n'est mort que pour le salut des prédestinés, est déclarée blasphématoire dans la condamnation qu'en porta Innocent X. Le cardinal de Lugo distingue deux sortes de propositions blasphématoires ; les unes simples, qui contiennent quelque chose de contraire à la foi, mais qui n'est pas clairement énoncé ; les autres héréticales, qui au blasphème ajoûtent l'hérésie formelle & clairement exprimée. Disp. XX. de Fide, sect. iij. n°. 100. (G)
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BLASPHEME | S. m. se dit en général de tout discours ou écrit injurieux à la majesté divine : mais dans l'usage ordinaire, on entend plus spécialement par blasphèmes, les juremens ou impiétés contre le saint nom de Dieu, proferés de vive voix. (H)
Les Théologiens disent que le blasphème consiste à attribuer à Dieu quelque qualité qui ne lui convient pas, ou à lui ôter quelqu'attribut qui lui convient. Selon saint Augustin toute parole mauvaise, c'est-à-dire, injurieuse à Dieu, est un blasphème : Jam verò blasphemia non accipitur nisi mala verba de Deo dicere. De morib. Manich. lib. II. cap. xj. Ainsi ce seroit un blasphème, que dire que Dieu est injuste & cruel parce qu'il punit le péché originel dans les enfans qui meurent sans baptême. Le blasphème est une suite ordinaire de l'hérésie : puisque celui qui croit mal, parle indignement de Dieu & des mysteres qu'il méprise. C'est ce qui s'appelle proprement blasphème. (G)
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BLATIER | S. m. (Comm. & Police) marchand qui achete le blé sur les greniers de campagne, pour le revendre dans les marchés des villes. Ce mot vient du vieux terme latin bladus, fruit ou semence. Il y avoit une communauté de blatiers à Paris du tems de S. Louis, & ce prince leur donna des statuts. Il y a plus de trois siecles que ceux de cette ancienne communauté sont réduits à vendre à petite mesure, & ont été nommés regrattiers ou grainiers ; ceux qui font ce grand commerce se nomment marchands de grains. Le nom de blatiers n'est donc resté qu'à une cinquantaine de petits marchands forains qui vont avec des chevaux ou des ânes chercher le blé dans les campagnes, & qui l'amenent à somme dans les marchés des grandes villes.
Ce commerce a son avantage & son inconvénient pour le public. Les blatiers facilitent la vente des grains à ceux qui n'en ont qu'une petite quantité ; mais aussi ce grain qu'ils achetent, & sur lequel ils gagnent, revient plus cher entre les mains de celui qui doit le consommer. Il est de la bonne police d'avoir l'oeil sur ces petits commerçans, & de les empêcher de mêler les grains, de les falsifier & de les faire renfler ; ce qu'ils appellent blatrer.
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BLATRER | v. act. c'est apprêter le grain, le rendre frais, & lui donner de la couleur & de la main par des préparations dangereuses. Ce secret est employé par les petits marchands de grains, & même par les gros marchands : mais la police y veille ; & quand ils sont surpris elle les punit.
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BLATTA | BLATTA
Le savant Lyster prétend que la blatta byzantina connue aujourd'hui, n'est point la même chose que l'unguis odoratus des anciens, dont l'usage s'est perdu parmi nous. Il se fonde sur ce que cette coquille n'a point les qualités de l'unguis odoratus, & qu'on n'y trouve point du tout l'odeur aromatique qu'on lui attribuoit : il conjecture plûtôt que ce pourroit être la même chose que le petoncle qui se trouve dans la Tamise & dans d'autres rivieres, qui est ordinairement de la grandeur & de l'épaisseur de l'ongle du pouce. En effet il paroît avoir, à cause de son odeur aromatique, des vertus que nous ne trouvons ni dans ce qu'on appelle blatta byzantina, ni dans nos coquilles de riviere.
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BLATTE | blatta, (Hist. nat.) On a donné ce nom à plusieurs insectes de nature très-différente ; comme les vers qui naissent dans les oreilles, & ceux qui rongent les étoffes & les livres ; ceux des intestins, de la farine, &c. Aujourd'hui, selon M. Linnaeus, on ne doit reconnoître sous ce nom de blatte, que les insectes dont les antennes sont longues & menues, dont les enveloppes ou fourreaux des aîles sont membraneuses, & qui ont la poitrine applatie, arrondie & bordée. Le même auteur rapporte la description de deux especes de ce genre. La premiere est de couleur brune, tirant sur la couleur de la rouille de fer. Les enveloppes des aîles portent l'empreinte d'un sillon tracé en ovale. Les femelles de cette espece n'ont que quelques rudimens & quelqu'apparence des aîles, & des enveloppes des aîles, qui sont bien entieres dans les mâles. M. Linnaeus comprend sous cette espece la blatta mollis, & la blatte des moulins, blatta molendinaria, qui sont distinguées dans Mousset. Celui-ci dit que l'on trouve la premiere sur les lunettes des latrines & dans les bains, &c. Le nom de l'autre espece désigne assez les lieux où elle est fréquente. Mousset ajoûte que les blattes se trouvent aussi dans les boulangeries, les étuves, &c. qu'elles craignent la lumiere ; que si elles sont obligées de s'y exposer, elles reviennent au plus vîte se cacher dans les ténebres, & qu'elles se couvrent de poussiere. M. Linnaeus rapporte qu'elles se trouvent dans les poëles des Finlandois, où elles rongent leur pain & leurs bottes, &c. pendant la nuit, & qu'elles se retirent dès qu'on allume de la chandelle.
Le seconde espece de blatte de M. Linnaeus est jaunâtre, & les enveloppes des ailes sont tachées de noir. On trouve cet insecte dans les cases des Lapons ; il se loge entre les écailles des poissons que l'on fait dessécher sans être salés. Mousset, insect. theatrum. pag. 137. Linnaei syst. nat. & Fauna suaecica. Voyez INSECTE.
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BLATTENBURG | (Géogr.) ville du duché de Gueldre, sur la Meuse.
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BLAU-STROM | (Géog.) riviere dans la Soüabe, qui se jette dans le Danube près d'Ulm.
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BLAUBEUREN | (Géogr.) petite ville d'Allemagne dans le duché de Wirtemberg, sur la riviere d'Ach.
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BLAY | ou BLAIE, (Géog.) ville de France dans le Bourdelois en Guienne, sur la Gironde. Long. 16. 53. lat. 45. 6.
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BLAYER | S. m. terme de Coûtumes, est un seigneur haut justicier qui a droit de blairie. (H)
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BLÉ | S. m. plante qui produit un grain dont on fait le pain, qui est la principale nourriture de l'homme. Voyez PAIN.
On donne aussi le nom de blé au grain ou semence de cette plante, après qu'elle est séparée de son épi. Voyez GRAIN, & SEMENCE.
Dans le commerce des blés on n'en distingue que de trois sortes : le blé proprement dit, qu'on nomme autrement froment, voyez FROMENT : le seigle qui est une espece bien différente, & d'une qualité bien inférieure, voyez SEIGLE : & un troisieme blé qui résulte du mélange des deux autres, qu'on appelle blé méteil, voyez METEIL.
A l'égard des laboureurs, ils mettent encore au nombre des blés plusieurs de ces grains que l'on seme au mois de Mars : comme l'orge, l'avoine, les pois, la vesce, &c. voyez ces mots ; mais pour les distinguer ils les qualifient de petits blés.
Le maïs & le sarasin sont encore des grains auxquels on donne le nom de blé ; l'un s'appelle blé de Turquie & blé d'Inde, & l'autre blé noir. Voyez BLE DE TURQUIE & BLE NOIR.
Il n'y a que l'Europe, mais non pas par-tout, l'Egypte, & quelques autres cantons de l'Afrique, le long des côtes de Barbarie, & peu d'endroits de l'Amérique défrichés & cultivés par les Européens, comme la nouvelle France, la nouvelle Angleterre & l'Acadie, qui produisent du blé.
Les autres parties du monde ont en place le maïs & le riz ; & même en quelques lieux des îles & du grand continent de l'Amérique, de simples racines, telles que sont les patates & le manioc. Voy. PATATE & MANIOC.
L'Egypte passoit autrefois pour le pays le plus fertile en blé. On sait par l'histoire sainte, en quelle réputation elle étoit sur ce point dès les premiers tems ; & l'on apprend par l'histoire profane, qu'elle en fournissoit à une partie des peuples soûmis à l'empire romain, & qu'on la nommoit la mere nourrice de Rome & de l'Italie. La France, l'Angleterre & la Pologne semblent avoir pris la place de l'Egypte, & c'est de leur abondance & de leur superflu que la plûpart des autres nations de l'Europe subsistent.
L'opinion commune est que dans les premiers siecles du monde on ne vivoit que des fruits de la terre & de gland : quelques-uns ajoûtent cette espece de noisette que produit le hêtre, qu'ils prétendent avoir été appellé pour cela fagus en latin, du mot grec , je mange. Ils disent qu'on n'avoit ni l'usage du blé, ni l'art de le préparer & de le rendre mangeable. Voyez BOULANGER.
On dit que c'est Cerès qui a fait connoître le blé aux hommes, ce qui la fit mettre au rang des dieux. D'autres attribuent cet honneur à Triptoleme, fils de Celée, roi des Eleusiniens. D'autres veulent que Cerès ait trouvé le blé, & que Triptoleme ait inventé l'art de le semer & de le cultiver.
Diodore de Sicile dit que ce fut Isis ; sur quoi Polydore Virgile observe qu'il ne differe point des autres, parce qu'Isis & Cerès sont la même. Les Athéniens prétendoient que c'étoit chez eux que cet art avoit commencé. Les Crétois & les Siciliens aspiroient à la même gloire, aussi-bien que les Egyptiens. Quelques-uns croyent que les Siciliens sont mieux fondés, parce que la Sicile étoit la patrie de Cerès, & que cette déesse n'enseigna ce secret aux Athéniens, qu'après l'avoir appris aux Siciliens.
D'autres prétendent que Cerès passa d'abord dans l'Attique, de là en Crete, & enfin en Sicile. Il est cependant des savans qui soûtiennent que c'est en Egypte que l'art de cultiver les blés a commencé ; & certainement il y avoit des blés en Egypte & dans l'Orient long-tems avant Cerès. Voyez aux articles FROMENT, SEIGLE, EPAUTRE, METEIL, &c. le choix de la terre, la culture, & les autres parties de l'agriculture qui leur conviennent.
Pour conserver le blé, il faut le bien secher & le tenir net. Le grenier doit avoir ses ouvertures au septentrion ou à l'orient, & des soupiraux au haut. Il faut avoir soin de le travailler de quinze en quinze jours tout au moins, les six premiers mois : dans la suite il suffit de le cribler tous les mois. Après deux années il ne s'échauffe plus, & il n'a plus rien à craindre que de l'air & de l'humidité étrangere. Voyez GRENIER.
Peu de tems après le siege que soûtint Metz sous Henri II. le duc d'Epernon fit faire de grands amas de grains dans la citadelle, qui se sont conservés jusqu'en 1707. Quoique la citadelle eût été bâtie sous Henri III. il y en avoit un tas dans le magasin, avec lequel on fit du pain, dont le roi, le dauphin, & les seigneurs qui passerent dans cette ville, mangerent.
Une des choses qui contribue le plus à la conservation du blé, c'est la croûte qui se forme sur toute la superficie par la germination des grains extérieurs, jusqu'à l'épaisseur d'un pouce & demi. On se promenoit sur celui de Metz, sans que cette croûte obéît. On a vû à Sedan un magasin taillé dans le roc & assez humide, dans lequel il y avoit un tas de blé très-considérable depuis 110 ans : il étoit revêtu d'une forte croute épaisse d'un pié.
Il y a des greniers à Châlons où l'on conserve le blé 30 ou 40 ans.
On choisit le plus beau blé, & du meilleur crû qu'il est possible. Après l'avoir travaillé, on en fait un tas aussi gros que le plancher le peut permettre : on met ensuite dessus un lit de chaux vive en poudre de trois pouces d'épaisseur ; puis avec des arrosoirs on humecte cette chaux, qui forme avec le blé une croûte. Les grains de la superficie germent, & poussent une tige d'environ un pié & demi de haut, que l'hiver fait périr : on n'y touche point que quand la nécessité y oblige.
BLE DE TURQUIE, maïs, genre de plante dont la fleur n'a point de pétales : elle est composée de plusieurs étamines qui sortent d'un calice. Cette fleur est stérile ; les embryons naissent séparément des fleurs : ils sont rassemblés en épis, & terminés par un long filet. Les épis sont enveloppés dans des feuilles qui leur servent de gaines. Chaque embryon devient une semence arrondie, anguleuse, & enchâssée dans l'un des chatons du poinçon qui soûtient l'épi du fruit. Tournefort, Inst. rei herb. Voyez PLANTE.
Il y a du blé de Turquie en Bourgogne, en Franche-Comté & ailleurs. Il vient facilement, & c'est toûjours un secours dans les famines. On en fait du pain assez sain. On en consomme considérablement dans l'Amérique, aux Indes & en Turquie. Il aime la terre grasse bien remuée, & les sillons larges : le froid lui est très-contraire. Quant à sa culture, Voyez AGRICULTURE.
BLE NOIR ou SARASIN, fagopyrum ; genre de plante dont la fleur n'a point de pétales : elle est composée de plusieurs étamines qui sortent d'un calice divisé en cinq parties. Le pistil devient dans la suite une semence triangulaire, renfermée dans une enveloppe qui a servi de calice à la fleur. Ajoutez aux caracteres de ce genre, que les fleurs naissent en grappe ou en épi, & que les racines sont chevelues. Tournefort, Inst. rei herb. Voyez PLANTE. (I)
* Le sarrasin est plus commun en France que le blé de Turquie. Il ne sert qu'à nourrir la volaille. Les faisans en sont friands ; c'est pourquoi l'on en seme dans les bois & par-tout où l'on veut attirer ces oiseaux. Le pain & la bouillie qu'on en fait, sont noirs & amers, à moins qu'on n'y mêle d'autres grains. Le fourrage en est bon pour les vaches. Il vient dans toutes sortes de terres, & aime la sécheresse. Les labours lui sont avantageux, & on le seme en sillons. Les pierres & les cailloux ne l'empêchent pas de pousser. En semant de bonne-heure dans les pays chauds, on en fera jusqu'à deux récoltes par an. Quant à sa culture, c'est la même que celle des autres grains. Voyez AGRICULTURE.
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BLECKINGEN | (Géog.) contrée de Suede dans la Gothie méridionale, bornée au nord par la Gothie, & au couchant par la Scandinavie.
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BLEIBURG | (Géog.) ville & château sur la riviere de Feistritz dans la Carinthie.
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BLEICHFELD | (Géog.) petite ville de l'évêché de Wurtzburg en Franconie.
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BLEICHRODA | (Géog.) petite ville du comté de Hohenstein en Thuringe.
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BLEIDERSTADT | (Géog.) petite ville du comté de Nassau, à la source de la riviere d'Aar.
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BLEMMYE | ou BLEMYES, s. m. plur. (Hist. anc. & Géog.) Les anciens géographes font mention d'un peuple de ce nom (fabuleux sans-doute), qui n'avoit point de tête, & qui avoit les yeux & la bouche dans la poitrine : on dit qu'ils habitoient une partie de l'Ethiopie.
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BLENDA | (Géog.) petite île de l'Archipel.
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BLENDE | (Minéralogie) ce mot est allemand : on s'en sert dans les mines pour désigner un minéral qui n'est bon à rien ; on l'appelle en latin pseudo-galena, galena inanis, mica. Henckel, dans sa Pyritologie, dit que c'est une pierre martiale, stérile, composée de parties arsénicales, & d'une terre qui résiste à l'action du feu. Il y entre aussi du souffre. On la trouve sur-tout dans les mines de plomb & d'argent. Hoffman regarde les blendes comme la matrice de ces métaux. Il y en a de plusieurs especes & couleurs ; les plus ordinaires sont noires, luisantes, & ressemblantes à la mine de plomb, quoiqu'elles ne soient point si brillantes ; on les appelle sterile nigrum & en allemand pech blende. Il y en a, outre cela, de brunes, de rouges, de jaunes, de cendrées, & de blanchâtres. Celles qui sont jaunes ou de couleur d'or, se nomment katsen gold, or de chat ; celles qui sont blanches s'appellent katsen silber, argent de chat. A la simple inspection & au poids, on est tenté de croire que ce minéral contient du métal : mais il ne s'y en trouve jamais que peu ou point-du-tout. Ces blendes déplaisent souverainement aux Fondeurs ; car non-seulement elles ne fournissent rien de bon, mais elles sont affamées des autres minéraux, & les rendent réfractaires. Le savant M. Pott a fait une dissertation très-étendue sur ce minéral.
Nonobstant toutes ces mauvaises qualités des blendes, M. Marggraf a observé qu'il s'en trouve quelquefois qui contiennent une terre métallique propre à produire du zinc, & M. Pott a remarqué le premier que le cuivre mêlé avec la pseudo-galene ou blende pulvérisée, & des charbons pilés mis au creuset, prenoit une couleur fort approchante de celle du laiton ; d'où il conclut que la blende a de l'affinité avec la pierre calaminaire.
M. Marggraf a poussé ses recherches plus loin, & a tiré du zinc d'une espece de blende choisie, qui venoit de Freyberg en Saxe. Voici comme il en donne le procédé : il faut la purifier de la pyrite arsénicale jaune qui y est attachée, & après l'avoir pulvérisée on la brûle petit-à-petit, en observant de pousser le feu sur la fin de l'opération ; ce qu'on continue pendant plusieurs heures, jusqu'à ce qu'on ne sente plus aucune odeur, & que la matiere ait perdu tout brillant : la blende ainsi brûlée, on en prend quatre onces mêlées avec deux drachmes de charbon ; on met ce mêlange au feu dans des vaisseaux fermés ; on aura de véritable zinc 6 à 8 grains, & autour de 4 à 5 grains de fleurs de zinc.
" Ou bien on prend la même quantité de blende brûlée ; on verse dessus 4 onces d'esprit de vitriol bien rectifié : le mélange s'échauffe ; & la digestion, suivant la matiere du zinc, se mettra en solution avec quelques particules de fer : il faut précipiter cette solution par une lessive de cendres gravelées jusqu'à ce qu'il n'aille plus rien au fond ; après que cette chaux aura été souvent édulcorée dans l'eau chaude & desséchée, vous en prendrez un peu plus de 3 drachmes ; vous les mêlerez avec une demi-drachme de charbon ; vous y joindrez 2 drachmes & 2 scrupules de petites lames de cuivre, arrangeant le tout couche sur couche dans le creuset, que vous couvrirez de poussiere de charbon, & que vous mettrez au feu de fusion ; après quoi, quand tout sera refroidi, vous trouverez le plus beau laiton. Si vous le voulez aussi, ce précipité mis dans des vaisseaux fermés de la maniere susdite, peut être réduit en zinc ". Voyez ZINC.
Ces deux procédés sont de M. Marggraf, & se trouvent dans le 11. vol. des Mémoires de l'Académie royale de Prusse, année 1748, à la fin d'un mémoire sur le zinc du même auteur. (-)
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BLESNEAU | (Géog.) petite ville de France, dans le gouvernement d'Orléanois, dans la Puisaye, sur le Loin.
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BLESS | (Géog.) petite ville de la Weteravie, appartenante à l'électeur de Treves.
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BLETE | S. f. blitum, (Hist. nat. bot.) genre de plante à fleur sans pétale, composée ordinairement de trois étamines qui sortent d'un calice découpé en trois parties ; le pistil devient dans la suite une semence oblongue pour l'ordinaire, renfermée dans une capsule qui a servi de calice à la fleur, & ressemblante à une vessie. Tournefort, Inst. rei herb. Voyez PLANTE. (I)
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BLEU | adj. Un corps paroît bleu, parce que ses parties ont une situation & une contexture qui les rend propres à réfléchir les rayons bleus en plus grande quantité que les autres. Voyez COULEUR.
Pour expliquer la couleur bleue du firmament, Newton remarque que toutes les vapeurs, quand elles commencent à se condenser & à s'assembler, deviennent d'abord capables de réfléchir des rayons bleus avant qu'elles puissent former des nuages d'aucune autre couleur. Le bleu est donc la premiere couleur que commence à réflechir l'air le plus net & le plus transparent lorsque les vapeurs ne sont pas parvenues à la grosseur suffisante pour réflechir d'autres couleurs.
M. de la Hire remarque, après Léonard de Vinci, qu'un corps noir quelconque vû à-travers un autre corps blanc & transparent, paroît de couleur bleue ; & c'est par-là qu'il explique la couleur azurée du firmament, dont l'immense étendue étant entierement dépourvûe de lumiere, est apperçûe à-travers l'air qui est éclairé & comme blanchi par la lumiere du soleil. Il ajoûte que par la même raison la suie mêlée avec du blanc forme du bleu. Il explique par le même principe la couleur bleue des veines sur la surface de la peau, quoique le sang dont elles sont remplies soit d'un rouge foncé : car, dit-il, à moins que la couleur rouge ne soit vûe au grand jour, elle paroît un rouge obscur & qui approche du noir, & comme elle se trouve dans une sorte d'obscurité dans les veines, elle peut avoir l'effet de la couleur noire, qui considérée à-travers la membrane de la veine & la blancheur de la peau, produit la sensation du bleu. Voyez NOIRCEUR. (O)
BLEU D'AZUR, (Chimie) On peut tirer cette couleur de l'argent : mais le savant Boyle & Henckel prétendent avec raison que cela n'arrive qu'en raison du cuivre qui se trouve ordinairement mêlé à ce métal. Voici la façon la plus courte de le faire : faites fondre dans de fort vinaigre distillé, du sel gemme, du sel alkali, & de l'alun de roche ; suspendez au-dessus de ce vinaigre des lames d'argent fort minces, enterrez le vase où vous aurez fait fondre ces matieres dans du marc de raisin : vous pourrez tous les trois jours ôter de dessus les lames d'argent la couleur bleue qui s'y sera formée.
Autre maniere. Mettez dans une livre de fort vinaigre des lames d'argent aussi minces que du papier ; joignez-y deux onces de sel ammoniac bien pulvérisé ; mettez le tout dans un pot de terre vernissé, que vous boucherez avec soin ; enterrez ce pot dans du fumier de cheval pendant 15 ou 20 jours, vous trouverez au bout de ce tems les lames d'argent chargées d'un très beau bleu d'azur.
Autre maniere. Prenez une once d'argent dissous dans l'esprit de nitre, 2 1/2 scrupules de sel ammoniac, autant de vinaigre qu'il en faut pour précipiter l'argent, décantez le vinaigre, mettez la matiere précipitée dans un matras bien bouché ; laissez reposer le tout pendant un mois, vous aurez un beau bleu d'azur.
On tire aussi le bleu d'azur du cuivre, du mercure & du plomb : pour le tirer du cuivre, on prend de verd de gris & de sel ammoniac de chacun 3 onces ; on mêle ces deux matieres avec de l'eau où l'on a fait fondre du tartre ; on en fait une pâte molle ; on met le tout dans un vase bien bouché qu'on laisse en repos pendant quelques jours, & l'opération est faite.
Autre ; Aes ustum & lie de vin, de chacun 2 onces, de soufre une once ; réduisez en poudre l'aes ustum & le soufre ; versez par-dessus du vinaigre ou de l'urine ; mettez le mélange dans un pot vernissé, & laissez-le bien bouché pendant 15 jours.
On peut tirer le bleu d'azur du vif-argent & du plomb de la maniere suivante : c'est Agricola qui la donne telle qu'il suit. On prend 3 parties de vif-argent, 2 parties de soufre, & une partie de sel ammoniac : on met au fond d'un plat de la litharge, & l'on fait fondre par-dessus le soufre pulvérisé ; on y jette ensuite le sel ammoniac en poudre & le vif-argent ; on remue toutes ces matieres avec un petit bâton, afin qu'elles se mêlent exactement : on laisse refroidir le mêlange qu'on réduit en poudre ; on met cette poudre dans un matras bien luté qu'on laissera un peu ouvert, lorsque le lut sera séché, on mettra le matras sur un trépié & sur un feu moderé, on couvrira l'ouverture d'une lame de fer ; & on en regardera de tems en tems le dessous pour voir s'il ne s'y forme plus d'humidité. Il faut alors boucher l'ouverture avec du lut ; on pousse le feu pendant une heure ; on l'augmente encore jusqu'à ce qu'il s'éleve une fumée bleue : cela fait on trouvera un beau bleu au fond du matras. (-)
BLEU D'EMAIL, (Chimie) appellé quelquefois smalte bleue, est une couleur d'un grand usage pour les Emailleurs : voici la façon de la préparer suivant Neri, dans son Art de la Verrerie. On prend quatre livres de la fritte ou matiere dont on fait l'émail ; V. l'article EMAIL ; 4 onces de saffre réduit en poudre, qui n'est autre chose qu'une préparation du cobalt, voyez l'article COBALT ; & 48 grains d'aes ustum, ou de cuivre calciné par trois fois : on mêle exactement ces trois matieres ; on les met au fourneau de verrerie, dans un pot vernissé en blanc. Lorsque le mêlange est bien entré en fonte, il faut le verser dans de l'eau claire pour le bien purifier ; on le remet ensuite fondre de nouveau ; on réitere l'extinction dans l'eau & la fonte deux ou trois fois ; l'on obtient de cette façon un très-beau bleu d'émail.
Kunckel, dans ses remarques sur Neri, observe qu'il n'est guere possible de prescrire exactement la dose de saffre qu'on doit employer pour faire le bleu d'émail ; il est bon de commencer par en faire des épreuves en petit, suivant les différentes nuances qu'on cherche : si on trouve le bleu trop clair, il faut augmenter petit-à-petit la dose du saffre : si au contraire elle est trop foncée, il faut remettre plus de la fritte de l'émail. C'est en suivant ainsi certaines proportions, qu'on peut produire dans l'émail les différentes nuances du bleu. Si par exemple, on vouloit un bleu d'émail céladon ou de couleur d'aigue-marine, il faudroit renverser les doses données ci-dessus, & l'on prendroit alors 4 livres de la fritte d'émail : 2 onces d'aes ustum, & seulement 48 grains de saffre ; on mêleroit bien ces trois matieres, du reste on suivroit exactement la méthode précedente, pour leur fonte & leur purification. Il faut bien observer que toutes ces opérations sont fort délicates, & demandent une attention toute particuliere : car pour peu qu'on ne fasse point d'attention aux circonstances, il se produit des effets tous différens de ceux qu'on veut chercher ; c'est ce que Kunckel avoue lui être arrivé dans l'opération du bleu d'émail céladon que nous venons de donner. Il avoit éprouvé cette méthode qui est de Neri : mais comme elle ne put pas d'abord lui réussir, il crut que cet auteur s'étoit trompé : ayant ensuite réitéré l'opération, & regardé la chose de plus près, il découvrit qu'elle n'avoit manqué la premiere fois, que parce qu'il n'avoit pas bien pris son tems pour retirer la matiere du fourneau, qu'il avoit laissée trop long-tems au feu. (-)
* Plus le grain d'émail est gros, & plus le bleu est vif, & tire un peu sur le violet comme l'azur : mais l'émail est d'un plus beau bleu céleste. Le grain d'azur à poudrer est si gros, qu'on ne peut l'employer que très-difficilement, & seulement en détrempe ou à fresque, ou pour mettre dans l'empois ou amydon, avec lequel il se lie fort bien. On l'appelle azur à poudrer, parce que pour faire un beau fond d'un bleu turquin, on le poudre sur un blanc à l'huile couché médiocrement épais & le plus gras qu'on peut. On l'y étend aussi-tôt avec une plume : mais il faut l'avoir bien fait sécher auparavant sur un papier au-dessus du feu. On y en met assez épais, & on l'y laisse jusqu'à ce que le fond soit bien sec, & ainsi le blanc en prend autant qu'il peut. Ensuite on le secoue, & on en ôte tout ce qui ne tient pas au blanc, en le frottant legerement avec une plume ou une brosse douce. C'est une couleur très-vive & qui dure long-tems, quoiqu'exposée à l'air & à la pluie.
L'émail qui est d'autant plus pâle qu'il est plus fin, sert dans la détrempe & à fresque : mais on ne s'en sert guere à l'huile, parce qu'il noircit, à moins qu'il ne soit mêlé avec beaucoup de blanc.
* BLEU D'INDE & INDIGO : l'Inde est plus claire & plus vive que l'indigo, ce qui vient seulement du choix de la matiere dont on les fait ; car au fond c'est la même : c'est la feuille de l'anil, voyez ANIL. On en fait tremper les feuilles dans l'eau pendant deux jours ou environ ; ensuite on sépare l'eau qui a une legere teinture de bleu verdâtre : on bat cette eau avec des palettes de bois durant deux heures, & l'on cesse de battre quand elle mousse. On y jette alors un peu d'huile d'olive, en aspergeant. On voit aussi-tôt la matiere de l'inde qui se sépare de l'eau par petits grumeaux, comme quand le lait se tourne ; & l'eau étant bien reposée, elle devient claire, & l'eau se trouve au fond comme de la lie, qu'on ramasse après avoir ôté l'eau, & qu'on fait sécher au soleil. L'inde se fait avec les jeunes feuilles & les plus belles, & l'indigo avec le reste de la plante. Cette plante croit dans les Indes orientales & occidentales. L'inde est ordinairement par petites tablettes de deux à trois lignes d'épaisseur & d'un bleu assez beau : mais l'indigo est par morceaux irréguliers d'un bleu brun, tirant sur le violet. Cette couleur est excellente pour la peinture à détrempe, tant pour le brun des bleux, que des verds, en y mêlant pour le verd, de la teinture de graine d'Avignon, ou du verd de vessie. On pourroit se servir de l'inde à l'huile, & elle a beaucoup de corps avec le blanc : mais elle se décharge en séchant, & perd la plus grande partie de sa force ; c'est pourquoi on n'en use pas, à moins que ce ne soit en draperie, qu'on glace d'outremer par-dessus. Voyez GLACER.
Il y a un bleu de tournesol qui peut être d'usage dans la peinture à détrempe & dans l'enluminure. Le tournesol est une pâte qu'on forme ordinairement en pains quarrés avec le fruit de la plante appellée heliotropium tricoccon. Cette plante croît en France ; on met tremper cette pâte dans l'eau ; & il vient une assez belle teinture bleue. Il arrive aussi qu'elle est rouge, ce qui est occasionné par le mêlange d'acide : mais on lui rend sa couleur bleue, en y mêlant de l'eau de chaux.
BLEU D'OUTRE-MER, (Chimie) la base de cette couleur est le lapis lazuli ; c'est aussi ce qui la rend fort chere, indépendamment des opérations qu'il faut pour en tirer le bleu, qui ne laissent pas d'être longues & pénibles : on en jugera par ce qui suit.
Pour connoître si le lapis lazuli dont on veut tirer la couleur, est d'une bonne qualité, & propre à donner un beau bleu, il faut en mettre des morceaux sur des charbons ardens, & les y faire rougir : s'ils ne se cassent point par la calcination, & si après les avoir laissé refroidir, ils ne perdent rien de l'éclat de leur couleur, c'est une preuve de leur bonté. On peut encore les éprouver d'une autre façon, c'est en faisant rougir des morceaux de lapis sur une plaque de fer, & les jettant ensuite tout rouges dans du vinaigre blanc très-fort ; si la pierre est d'une bonne espece, cette opération ne lui fera rien perdre de sa couleur. Après s'être assûré de la bonté du lapis, voici comme il faut le préparer pour en tirer le bleu d'outremer. On le fait rougir plusieurs fois, & on l'éteint chaque fois dans de l'eau ou dans de fort vinaigre, ce qui vaut encore mieux ; plus on réitere cette opération plus il est facile de le réduire en poudre : cela fait on commence par piler les morceaux de lapis ; on les broye sur un porphyre, en les humectant avec de l'eau, du vinaigre, ou de l'esprit-de-vin ; on continue à broyer jusqu'à ce que tout soit réduit en une poudre impalpable ; car cela est très essentiel : on fait sécher ensuite cette poudre après l'avoir lavée dans l'eau, & on la met à l'abri de la poussiere pour en faire l'usage qu'on va dire.
On fait une pâte avec une livre d'huile de lin bien pure ; de cire jaune, de colophone, & de poix résine, de chacune une livre ; de mastic blanc, deux onces. On fait chauffer doucement l'huile de lin, on y mêle les autres matieres, en remuant le mêlange qu'on fait bouillir pendant une demi-heure, après quoi on passe ce mélange à-travers d'un linge, & on le laisse refroidir. Sur 8 onces de cette pâte, on mettra 4 onces de la poudre de lapis indiquée ci-dessus, on pétrira long-tems & avec soin cette masse ; quand la poudre y sera bien incorporée, on versera de l'eau chaude par-dessus, & on la pétrira de nouveau dans cette eau, qui se chargera d'une couleur bleue ; on la laissera reposer quelques jours, jusqu'à ce que la couleur soit tombée au fond du vase ; ensuite de quoi on decantera l'eau, en laissant sécher la poudre, on aura du bleu d'outremer.
Il y a bien des manieres de faire la pâte dont nous venons de parler : mais nous nous contenterons d'indiquer encore celle-ci. C'est avec de la poix résine, térebenthine, cire vierge, & mastic, de chacun six onces : d'encens & d'huile de lin, deux onces, qu'on fera fondre dans un plat vernissé, le reste comme dans l'opération précédente. Voici la méthode que Kunckel nous dit avoir suivie avec succès pour faire le bleu d'outremer.
Après avoir cassé le lapis lazuli en petits morceaux de la grosseur d'un pois, on le fait calciner, & on l'éteint dans du vinaigre distillé à plusieurs reprises, ensuite on le réduit en une poudre extrèmement déliée : on prend de cire vierge & de colophone de chacune moitié du lapis réduit en poudre ; on les fait fondre dans une poele ou plat de terre vernissé : on y jette petit-à-petit la poudre, en remuant & mêlant avec soin les matieres ; l'on verse le mélange ainsi fondu dans de l'eau claire, & on l'y laisse pendant huit jours ; au bout de ce tems, on remplit de grands vases de verre, d'eau aussi chaude que la main peut la souffrir : on prend un linge bien propre, on pétrit la masse, & lorsque cette premiere eau sera bien colorée on retirera la masse pour la mettre dans de nouvelle eau chaude : on procédera de la même façon jusqu'à ce que toute la couleur soit exprimée ; c'est cependant la couleur qui s'est déchargée dans la premiere eau, qui est la plus précieuse ; on laisse ensuite reposer l'eau colorée pendant trois ou quatre jours, au bout desquels on voit que la couleur s'est précipitée au fond du vase. Une même masse fournit trois ou quatre sortes de bleu d'outremer : mais on n'en retire que fort peu de la plus belle.
Il y a encore bien des manieres de tirer du bleu d'outremer : mais comme leur différence ne consiste que dans la pâte à laquelle on mêle le lapis pulvérisé, on a cru inutile d'en dire davantage. On reconnoît si le bleu d'outremer a été falsifié, non-seulement au poids, qui est moindre que celui du véritable, mais encore parce qu'il perd sa couleur au feu (-)
BLEU DE MONTAGNE, (Hist. nat. & Mineralogie) lapis armenus ou coeruleum montanum en Allemand, berg-blau. C'est un minéral ou pierre fossile bleue, tirant un peu sur le verd d'eau. Elle ressemble assez au lapis lazuli, mais avec cette différence qu'elle est plus tendre, plus legere & plus cassante que lui, & que sa couleur ne résiste point au feu comme la sienne. Lorsqu'on fait usage du bleu de montagne dans la peinture, il est à craindre que par la suite la couleur n'en devienne verdâtre. Cette pierre se trouve en France, en Italie, en Allemagne, & sur-tout dans le Tirol. On dit que celle qui vient de l'Orient ne perd point sa couleur dans le feu. Le bleu de montagne contient beaucoup de cuivre ; celui qui est leger en fournit moins que celui qui est pesant ; le premier contient un peu de fer, suivant M. Cramer. On dit qu'on contrefait le bleu de montagne en Hollande, en faisant fondre du soufre, & en y mêlant du verd-de-gris pulvérisé. Pour employer le bleu de montagne dans la peinture, il faut le broyer, le laver ensuite, & en séparer les petites pierres qui y sont quelquefois mêlées.
Dans la Medecine on s'en est servi quelquefois, il a une vertu purgative & émétique ; il paroît cependant qu'il est à propos de s'en défier, attendu le cuivre qui en est la base. (-)
BLEU DE PRUSSE, est une matiere utile pour la peinture. On l'appelle bleu de Prusse, parce que c'est en Prusse que sa préparation a été trouvée. Voyez le premier volume des Miscellanea Berolinensia, 1710 ; & les Transactions philosophiques en ont publié la composition, dans les mois de Janvier & Fevrier 1724. Depuis, M. Geoffroy, de la faculté de Medecine & de l'académie des Sciences de Paris, en a donné la préparation dans les Mémoires de l'académie de 1725.
La préparation du bleu de Prusse est une suite de plusieurs procédés difficiles. On a plusieurs raisons pour croire que ce bleu vient du fer. On sait que les dissolutions de fer prennent dans l'eau une couleur bleue par la noix de galle. L'acier bien poli & échauffé à un feu moderé, prend une couleur bleue ; & il paroît par cette expérience que cette couleur bleue vient d'une substance grasse, que le feu éleve à la surface du fer. On sait qu'il y a dans le fer une matiere bitumineuse, qui n'est pas parfaitement unie avec les autres principes, ou qui y est en trop grande quantité.
C'est ce bitume qui doit être la base du bleu qu'on veut faire, mais certainement il est trop compact ; il faut le subtiliser : or les alkalis sont les dissolvans naturels des bitumes.
Il y a apparence qu'on a essayé, pour faire le bleu de Prusse, plusieurs huiles végétales, & que ç'a été sans succès : on a aussi éprouvé les huiles animales ; & le sang de boeuf calciné & réduit en poudre a rempli l'attente ; & pour l'alkali, on y a employé le plus puissant, qui est celui du tartre.
Le bitume du fer est attaché à une terre métallique jaune ; cette terre altéroit la couleur bleue du bitume, quelque raréfié qu'il fût : on le transporte de dessus la terre jaune sur une terre blanche qui est celle de l'alun ; & alors la couleur bleue non-seulement n'est plus altérée par le fond qui la soûtient, mais de sombre & trop foncée qu'elle étoit, elle devient plus claire & plus vive.
Il faut observer que ce bitume qu'on veut avoir, on ne le cherche pas dans du fer en substance, mais dans du vitriol où le fer est dejà très-divisé.
Il y a donc trois liqueurs nécessaires pour faire le bleu de Prusse : une lessive de sang de boeuf calciné avec le sel alkali ; une dissolution du vitriol, & une dissolution d'alun.
De toutes ces opérations, il résulte une espece de fécule d'une couleur de verd de montagne, & qui par l'esprit de sel devient dans l'instant d'une belle couleur bleue foncée ; & c'est-là le bleu de Prusse. Cet article est de M. FORMEY, secrétaire perpétuel de l'académie royale de Prusse.
M. Maloüin, dans un mémoire qu'il a donné à l'académie en 1745, dit qu'il a tiré un bleu de Prusse du mélange de la creme de chaux, & du sel alkali du tartre ; que ce bleu étoit semblable à celui qui lui a donné l'eau-mere du sel de Seignette par l'esprit de vitriol.
Il faut remarquer que M. Maloüin avoit trouvé aussi du fer dans la chaux ; & il dit que la noix de galle épineuse peut tirer de l'eau de chaux une teinture bleue.
Le même auteur rapporte aussi dans ce mémoire, qu'ayant fait mettre dans un creuset entre les charbons ardens, de la chaux vive & du sel marin mêlés ensemble, il sortit de la matiere contenue dans le creuset, une flamme bleue qui répandit une odeur aromatique. Il apperçut cette flamme lorsqu'il découvrit le creuset ; & il y avoit un quart-d'heure que le creuset étoit rouge lorsqu'il le découvrit. (M)
Le bleu entre dans presque toutes les parties fuyantes d'un tableau ; l'on s'en sert aussi dans les ciels, la mer, &c.
On distingue différentes nuances de bleu ; le bleu blanc, bleu mourant, bleu céleste, bleu turquin foncé, bleu de Perse entre le verd & le bleu, bleu d'enfer ou noirâtre, bleu de forge, bleu artificiel. Il n'y a guere que les Teinturiers qui différencient ainsi leurs bleus ; les Peintres ne les distinguent que par ces expressions ce bleu est plus tendre que celui-ci ; ces bleus sont de différent ton, ne sont pas du même ton.
Bleu tenant lieu d'outremer dans le lavis. Pour suppléer à l'outremer qui est d'un trop grand prix, & qui a trop de corps pour être employé en lavis, on recueille en été une grande quantité de fleurs de bluets qui viennent dans les blés ; on en épluche bien les feuilles en ôtant ce qui n'est point bleu : puis en met dans de l'eau tiede de la poudre d'alun bien subtile. On verse de cette eau imprégnée d'alun dans un mortier de marbre, on y jette les fleurs : & avec un pilon de marbre ou de bois, on pile jusqu'à ce que le tout soit réduit de maniere qu'on puisse aisément en exprimer tout le suc, que l'on passe à-travers une toile neuve, faisant couler la liqueur dans un vase de verre, où on a mis auparavant de l'eau gommée, faite avec de la gomme arabique bien blanche. Remarquez qu'il ne faut guere mettre d'alun pour conserver l'éclat, parce qu'en en mettant trop on obscurcit le coloris. On peut de même faire des couleurs de toutes les fleurs qui ont un grand éclat, observant de les piler avec de l'eau d'alun, qui empêche que la couleur ne change ; pour rendre ces couleurs portatives, on les fait sécher à l'ombre, dans des vaisseaux de verre ou de fayence bien couverts. (R)
BLEU, officier bleu (Marine) lieutenant ou enseigne bleu ; c'est un officier que le capitaine d'un vaisseau crée dans son bord pour y servir, faute d'officier major. (Z)
BLEU, METTRE AU BLEU, (en terme de Cuisine) c'est une façon d'accommoder le poisson en le faisant cuire avec ses écailles dans du vin blanc, avec de l'oignon, des feuilles de laurier, du clou de girofle, sel & poivre, & autres épices : on le sert ainsi préparé, avec de l'huile & du vinaigre dans un vase à part.
* BLEUES, (CENDRES) sont d'un très-grand usage dans la peinture à détrempe ; il y en a qui sont très-vives en couleur : mais à l'huile elles noircissent & deviennent verdâtres ; car elles tiennent de la nature du verd-de gris ; & de plus quand on les met à l'huile, elles ne paroissent pas plus brunes ou foncées en couleur. On les trouve en pierre tendre dans les lieux où il y a des mines de cuivre ou de rosette, & l'on ne fait que les broyer à l'eau pour les réduire en poudre fine. Cette espece de bleu doit être employée sur-tout dans la peinture en détrempe, qu'on ne voit qu'aux lumieres, comme les décorations de théatre ; car quoiqu'on y mêle beaucoup de blanc, il ne laisse pas de paroître fort beau. Il tire pourtant un peu sur le verd ; tout au contraire de l'émail qui est fort vif au jour, & qui paroît gris aux lumieres.
On trouve quelquefois des cendres bleues, qui paroissent aussi belles que l'outremer : mais on connoît bien-tôt que ce ne sont que des cendres, si on les mêle avec un peu d'huile ; car elles ne deviennent guere plus brunes qu'auparavant, au contraire de l'outremer qui devient fort brun. Au feu elles deviennent noires.
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BLEUIR un métal | c'est l'échauffer jusqu'à ce qu'il prenne une couleur bleue ; ce qui est pratiqué par les Doreurs, qui bleuissent leurs ouvrages d'acier avant que d'y appliquer les feuilles d'or ou d'argent. Voyez DOREUR, & la fig. 9. Pl. du Doreur. Vignette.
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BLEUISSOIR | S. m. outil d'Horlogerie. Voyez REVENOIR.
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BLEY-GLANTZ | (Minéralogie) ou en Latin galena tessulata ; c'est le nom allemand d'une mine de plomb ainsi décrite, par M. Cramer, dans sa Docimasie : " c'est une mine de plomb fort riche, composée d'un assemblage de petits cubes équilatéraux & de parallelepipedes oblongs, formés par de petites lames minces, polies & brillantes : cette mine est fort pesante, & se casse aisément. La fonte en est aisée ; cependant elle demande un feu plus fort que le plomb même : la raison en est l'abondance du soufre, qui est caché dans cette mine & qui en fait presque un quart. Si on s'y prend comme il faut, un quintal de cette mine doit donner 65 à 70 livres de plomb ". Il s'en tire aussi quelquefois 3 ou 4 onces d'argent ; s'il s'y en trouvoit davantage, on auroit lieu de soupçonner une veine d'argent dans le voisinage. (-)
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BLEY-SACK | (Métallurgie & Minéralogie) on appelle ainsi en allemand une partie de plomb, qui n'a pas été séparée de l'argent à la coupelle, parce que le régule est venu à se durcir trop tôt : ce défaut vient de ce que le feu n'a pas été assez fort pour réduire tout le plomb en litharge. M. Cramer observe, dans sa Docimasie, que lorsqu'on purifie l'argent à la coupelle, le plomb agit comme dissolvant sur ce métal ; c'est pourquoi il est nécessaire d'augmenter le feu à mesure que le plomb se détruit & se réduit en litharge. (-)
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BLEY-STADT | (Géog.) petite ville du royaume de Bohème.
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BLEY-SWEIFF | (Minéralog.) on donne ce nom dans les mines d'Allemagne, à une espece de mine de plomb sulphureuse & arsénicale ; elle est jaune, mêlée de taches cendrées & noirâtres, & grasse au toucher : elle se trouve à l'entrée des Gangues. Ce minéral ressemble assez au plomb pur : mais il est très-difficile d'en tirer du métal par la fonte. (-)
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BLEYME | S. f. (Maréchallerie) maladie ou inflammation de la partie antérieure du sabot vers le talon, entre la sole & le petit pié.
Il y a trois sortes de bleymes ; de seches, d'encornées, qui ne sont fort souvent qu'une suite des premieres, & de foulées.
On connoît les bleymes en général par une petite rougeur pareille à du sang extravasé, qui se trouve entre la sole & le petit pié ; on ne les distingue que lorsqu'on blanchit le pié en le parant : cette rougeur n'est autre chose qu'un sang extravasé.
Les bleymes seches sont ainsi nommées à raison de leur cause, laquelle est intérieure ; car elles proviennent de la trop grande sécheresse du pié.
Les bleymes foulées ont une cause extérieure ; car elles proviennent de ce qu'il se sera enfermé de petites pierres ou du gravier entre le fer & la sole, ou bien de ce que le fer aura porté sur la sole, qu'il aura foulée & meurtrie en quelque endroit : les piés plats sont sujets à ces sortes de bleymes, car le gravier & le sable s'enferment aisément entre le fer & la sole.
Le remede est de parer le pié pour découvrir la bleyme, & d'ôter toute la sole meurtrie, si la matiere n'y est pas encore formée ; si elle y est formée, il faut l'évacuer, puis panser le trou ou la plaie comme une enclouure : le mal dans son commencement sera bientôt guéri ; s'il est grand, les remedes que nous proposons en viendront à-bout avec le tems. Il y a dans les manéges des chevaux long-tems de séjour pour ces bleymes ; mais l'huile de merveilles & l'emmiellure rouge, quand on a donné jour à la bleyme par-dessous, guérissent bien-tôt ce mal. (V)
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BLIESS | (Géog.) petite riviere qui se jette dans la Saar.
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BLIN | BELIN, s. m. (Marine) c'est une piece de bois quarrée où plusieurs barres sont cloüées en-travers & à angle droit ; ensorte que plusieurs hommes en la maniant ensemble, peuvent agir de concert pour faire entrer des coins de bois sous la quille d'un vaisseau lorsqu'on veut le mettre à l'eau. On se sert aussi du blin pour assembler des mâts de plusieurs pieces. Il y a des blins qui ont des cordes passées au lieu de barres, afin de pousser les coins dans l'enfoncement du dessous du vaisseau ; à quoi le blin à barres ne seroit pas propre. (Z)
BLIN, chez les Passementiers & autres ouvriers en soie, est une piece de l'ourdissoir échancrée dans toute sa hauteur, juste à l'épaisseur du pilier de la lanterne dans laquelle elle doit entrer. Voyez LANTERNE DE L'OURDISSOIR. Cette échancrure est garnie de deux petites arêtes, pour entrer juste dans les rainures du pilier de devant de la lanterne, & pouvoir par ce moyen descendre & monter le long de ce pilier sans sautiller ; ce qui ne pourroit arriver sans causer de grands inconvéniens, que l'on évite encore en frottant de savon les rainures qui lui servent de conduite. Les boutons qui sont sur l'un des bouts du blin, & qui peuvent tourner, servent à donner plus de facilité pour le passage des soies à mesure qu'elles s'enroulent sur l'ourdissoir. Ce blin porte encore sur l'extrémité de devant, une petite verge de bouis ou d'émail, surquoi passent aussi les soies que l'on ourdit ; par ce secours elles ne sont point en danger de s'écorcher contre la vive arrête du blin. Le blin est chantourné & évuidé par l'un de ses bouts, & quarré par l'autre ; ce qui n'est point ici pour l'ornement. Comme ce bout chantourné est plus long que l'autre, puisqu'il faut qu'il reçoive toutes les soies qui passent sur lui, il peseroit trop s'il étoit en plein comme l'autre bout, & conséquemment il inclineroit de ce côté ; ce qui nuiroit notablement à sa descente : on a donc été obligé de le chantourner ainsi pour le rendre de poids égal à l'autre bout, & conserver par là le parfait équilibre qui lui est absolument nécessaire. Après avoir donné sa description, il faut expliquer la façon de le mettre en état de servir. Il porte une petite poulie qui répond vis-à-vis celle du haut du pilier de devant de la lanterne : une ficelle dont un bout est fixé sur la broche de l'arbre du moulin, & qui est assez longue pour faire plus de deux fois la hauteur de l'ourdissoir ; cette ficelle, dis-je, vient passer sur la poulie du pilier de devant de la lanterne, ensuite elle passe sous la poulie du blin, & se termine par son autre bout près de la poulie du pilier, où ce bout est fixé par le moyen d'une boucle que l'on fait à la ficelle, & qui s'attache à un petit clou qui est sur l'extrémité de ce pilier. En faisant tourner le moulin, il faut que ce blin descende à mesure que la corde se déroule de dessus la broche ; & en le tournant en sens contraire, il remonte de même. Le blin arrange par ces différentes montées & descentes les soies que l'on ourdit ; & cela sans confusion, puisque pendant que le moulin fait un tour, le blin monte assez pour donner de l'éloignement à ces soies, & leur faire prendre la figure spirale qu'elles doivent avoir nécessairement par ce mouvement du blin ; & c'est à quoi il est uniquement destiné. Il faut observer que la ficelle du blin partant de la broche d'en-haut, doit entrer sous la poulie du blin du côté du pilier ; ce qui aide encore à la direction de son mouvement ascendant & descendant. Si l'on vouloit ourdir à claire voie, c'est-à-dire que les tours en spirale fussent plus écartés les uns des autres, il n'y auroit qu'à fixer le bout de la ficelle à la brochette de la poulie du blin, qui seroit alors hors d'état de mouvoir : alors cette corde n'étant plus double, doit se dérouler ou s'enrouler de même qu'elle faisoit auparavant ; mais le blin descendra ou montera avec une vîtesse double de la premiere, ce qui produira l'effet desiré. Voyez OURDIR & OURDISSOIR.
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BLINDE | S. f. en terme de Fortification, est une sorte de défense faite communément d'osier ou de branches d'arbres entrelacées, & plissées de travers entre deux rangs de bâtons d'environ la hauteur d'un homme, plantés en terre à la distance de quatre ou cinq piés l'un de l'autre. On s'en sert particulierement à la tête de la tranchée, lorsqu'elle s'étend de front vers les glacis. Les blindes servent à mettre les travailleurs à couvert. & empêchent l'ennemi de voir leurs ouvrages.
On en couvre aussi le dessus des sappes dans les endroits dangereux, c'est-à-dire à portée des grenades & des pierriers de l'assiégé. (Q)
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BLITUM-ALBUM | offic. Park. (Medecine) Les feuilles qui sont la seule partie dont on fasse usage, encore très-rarement, sont de la classe de l'arroche & de sa nature : elles se mangent parmi les autres légumes ; elles lâchent le ventre, sans être pour cela purgatives ; elles rafraîchissent & amollissent, & on les fait entrer dans les clysteres. L'usage de cette plante est fort rare. (N )
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BLOC | S. m. signifie un grand morceau de marbre ou de pierre tel qu'il sort de la carriere, avant que la main de l'ouvrier lui ait donné aucune forme. Voyez MARBRE.
BLOC d'échantillon, est celui qui étant commandé à la carriere, y est taillé de certaine forme & grandeur.
BLOC, en terme de Commerce, se prend pour plusieurs pieces ou sortes de marchandises considérées & estimées toutes ensemble. Ainsi l'on dit qu'un marchand a acheté toutes les marchandises d'une boutique ou d'un magasin en bloc.
On dit aussi, faire un marché en bloc & en tâche, lorsque sans entrer dans le détail de ce que chaque chose doit coûter en particulier, on convient d'un certain prix pour un ouvrage, ou une entreprise ; ainsi l'on dit : j'ai fait marché en bloc & en tâche avec ce voiturier, pour m'amener mes marchandises franches de tous droits. (G)
BLOC, BLOT, TETE DE MORT, CHOUQUET, en Marine ; voyez CHOUQUET.
BLOC, ROC-D'ISSAS, SEP-DE-DRISSE, en Marine ; voyez SEP-DE-DRISSE. (Z)
BLOC, s. m. en Fauconnerie, c'est ainsi qu'on nomme la perche sur laquelle on met l'oiseau de proie : elle doit être couverte de drap.
BLOC, terme d'Argenteur, se dit d'un cercle ou boulet de canon, &c. chargé de ciment, sur lequel on monte une petite piece pour la brunir plus à son aise. Voyez Planche I. fig. 1.
BLOC de branche, en termes de Fourbisseur, c'est un mandrin de bois formant un demi-cercle, à l'extrémité duquel sont deux passages pris sur le bois pour y introduire l'étrier, qui resserre la branche sur le bloc tant & si peu qu'on veut. Voyez figure 1. Planche du Fourbisseur.
BLOC de plaque, en termes de Fourbisseur, est un mandrin de bois, large, rond, creux, ou convexe, & percé dans le milieu, pour recevoir une branche de fer vissée qui y affermit l'ouvrage plus ou moins par le moyen d'un écrou. Voyez Planche I. figure 9. du Fourbisseur.
BLOC, en termes de Raffineur de sucre, n'est autre chose qu'un billot de bois élevé sur trois ou quatre piés, sur lequel on frappe doucement la forme pour en faire sortir le pain, & considérer l'état où est la tête. Voyez PLAMOTER, PAIN, TETE, SUCRE.
BLOC, en termes de Tabletiers-Cornetiers, est une espece d'auge dont le dedans est taillé de maniere à pouvoir contenir des plaques, entre lesquelles on applatit les ergots à coups de maillet. Le bloc ne differe de la presse, qu'en ce qu'il n'a ni vis ni boulon de fer. Voyez Planche I. fig. 5.
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BLOCAGES | S. m. pl. en Architecture, ce sont de menues pierres ou petits caillous & moëllons qu'on jette à bain de mortier pour garnir le dedans des murs, ou fonder dans l'eau à pierres perdues ; c'est ce que Vitruve appelle caementa, ainsi que toute pierre qu'on employe sans être équarrie. (P)
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BLOCHET | S. m. c'est, en Charpenterie, une piece de bois qui se met sur les plates-formes, entaillée dedans, de l'épaisseur du mur sur lequel elle est posée, sur lequel passe le pié des formes, & où elles sont assemblées.
BLOCHETS de recrue ; ce sont ceux qui sont droits dans les angles.
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BLOCKZIEL | (Géog.) petite ville fortifiée de la province d'Overissel, sur la riviere d'Aa.
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BLOCUS | S. m. (Art milit.) maniere d'assiéger une place qu'on veut prendre par famine, en bouchant tous les passages, & se saisissant de toutes les avenues, de façon qu'aucun renfort, ni provisions, ni autre chose, ne puissent passer. Voyez SIEGE.
Ce mot vient de l'allemand blochus, ou blockhause, boulevard, ou maison de bois ; ou du gaulois blocal, barricade, quoique d'autres le dérivent du latin buculare, boucher un passage.
Le blocus n'est point un siége régulier ; car on n'y fait pas d'attaque, & on n'ouvre pas de tranchée, c'est la cavalerie qui forme le blocus.
L'objet du blocus est d'obliger ceux qui sont enfermés dans une ville de consommer toutes leurs provisions de bouche, pour les contraindre de se rendre faute de subsistance.
On voit par-là qu'un blocus doit être fort long, lorsqu'une place est bien munie : aussi ne prend-t-on guere le parti de réduire une place par ce moyen, qu'on ne soit informé que ses magasins sont dégarnis, ou bien lorsque la nature & la situation de la place ne permettent pas d'en approcher pour faire les attaques à l'ordinaire.
Les blocus se forment de deux manieres : simplement, en fortifiant ou occupant des postes à quelque distance de la place, principalement sur les bords des rivieres au-dessus & au-dessous, & sur les grands chemins & les avenues ; dans tous ces postes on tient de l'infanterie & des corps de cavalerie, lesquels se communiquent entr'eux pour veiller à ce qu'il n'entre point de vivres dans la place bloquée, où les besoins augmentant tous les jours, en font deserter la garnison, y causent des murmures & des soulevemens, qui souvent forcent le gouverneur à se rendre par capitulation.
Le succès de cette espece de blocus se fait longtems attendre ; parce qu'il est presqu'impossible qu'il n'entre toûjours quelques vivres, qui font au moins prendre un peu de patience aux assiégés. Son avantage est bien plus sensible, quand après avoir ainsi bloqué une place de loin pendant un tems considérable, on en forme ensuite le siége, parce qu'on la trouve plus aisément dépourvûe de bien des choses nécessaires à sa défense.
L'autre espece de blocus se fait de plus près, par des lignes de circonvallation & contrevallation dans lesquelles l'armée se place, lorsque, par exemple, après le gain d'une bataille, l'ennemi se seroit retiré dans une ville qu'on sauroit n'être pas bien pourvûe de vivres, & qu'on présume de pouvoir affamer en peu de jours.
Ce cas n'arrive pas ordinairement ; parce qu'il seroit trop imprudent à un général battu de s'exposer à perdre le reste de son armée ; en s'enfermant ainsi dans une mauvaise place. Ainsi l'usage des blocus se trouve beaucoup plus souvent dans la premiere espece, que dans la seconde. Mémoires de M. de Feuquieres. (Q)
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BLOIS | (Géog.) ville de France, capitale du Blaisois, sur la Loire. Long. 18. 59. 50. lat. 47. 35. 19.
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BLONDE | S. f. (Commerce) ouvrage de soie fait à l'oreiller par le moyen des fuseaux, de la même maniere que la dentelle à laquelle il ressemble beaucoup, la blonde travaillée n'en différant souvent que par la matiere. Voy. BLONDE TRAVAILLEE. La soie qui entre dans les blondes est de deux especes, par rapport à sa qualité : la premiere est la plus grosse, & s'employe dans les fonds. Voyez FONDS. La seconde est la plus fine, & sert à faire les grillages. Voyez GRILLAGE. Celle-ci se double toûjours, celle-là presque jamais, ou du moins qu'en deux fils. On employe quelquefois encore de la soie montée, qui n'est autre chose qu'une soie ou deux entortillées au roüet sur une autre, comme l'or & l'argent sur la soie. Cette opération se fait à Lyon : les Blondiers sont obligés d'y envoyer leur soie, ou d'en tirer toute montée. J'ai dit quelquefois ; & c'est en effet très-rarement qu'on se sert de soie montée, parce que cordonnée comme elle est, les ouvrages qu'elle produiroit seroient lourds, cordonnés eux-mêmes, & n'auroient point d'oeil : d'ailleurs, ces soies coûtant une pistole de plus que les autres, les ouvriers n'en mettent point en oeuvre qu'on ne le leur commande. Il faut remarquer encore que les soies qui entrent dans la blonde sont d'une qualité bien inférieure à celles dont on fait les étoffes : celles-ci auroient le même inconvénient que les soies montées, toutefois dans un degré proportionnel à la nature particuliere de la soie.
Les Blondiers achetent leurs soies en moches, (V. MOCHE), composées de trois parties égales, chacune desquelles l'est de cinq écales (Voy. ECALES), qui elles-mêmes ont encore leurs centaines, pour en faciliter la division ou découpure. Les moches séparées, chaque tiers en cinq parties, on met celles-ci sur des tournettes (Voyez TOURNETTE) pour les découper. Cette opération est la plus difficile de tout l'apprêtage. Elle consiste à trouver les différentes centaines, qui sont à la vérité dans une écale, mais indistinctes, & sans ligature comme on en voit dans un écheveau de fil ou de soie retordue. Le meilleur moyen d'y parvenir, c'est de prendre d'abord peu de soie, en la tournant autour des tournettes, d'aller toujours en augmentant jusqu'à l'entiere division. On ne se fait point une peine de casser quelques brins de soie qui y feroient obstacle : cela ne porte point un grand préjudice, attendu que dans le dévidage on noue tous les bouts, & que les noeuds n'empêchent point de travailler la soie. Dès en commençant, on voit à la séparation plus ou moins nette qui se fait, si l'on a rencontré la centaine ; ce qui n'empêche pas qu'on ne soit quelquefois obligé de recommencer, quoique les premiers tours n'ayent eû que peu d'embarras. Les centaines enfin trouvées par cette découpure, on les lie chacune à part vers leur milieu, de peur qu'elles ne se mêlent, & on les couvre afin qu'elles ne s'éventent point : on les dévide ensuite autour des tournettes ou d'un dévidoir, au choix du fabriquant, sur des bobines montées sur un roüet à la main. Ceci n'a rien de difficile, & ne demande que de la patience. Un ouvrier, quand la soie est bonne, peut en dévider cinq onces, & gagner quarante sous par jour ; souvent aussi quand elle est bien pleine de morvolant (Voyez MORVOLANT), il ne gagne que huit sous. Cela fait, on double seulement celle qui est destinée à faire le toilé, en quatre, cinq, six ou sept brins, selon que la soie est plus ou moins fine. (Voyez DOUBLER) Enfin le fabriquant la donne aux ouvriers qui en chargent leurs fuseaux (V. CHARGER), & exécutent les desseins qu'on leur a fournis, les uns sur un oreiller plat, les autres sur un oreiller à roue (Voyez OREILLER A ROUE). Les fuseaux chargés de filets sont plus gros, afin qu'on les reconnoisse plus aisément. (Voyez FILET.) Le reste de l'ouvrage s'acheve en fixant la soie aux angles, aux bords, & aux autres parties du dessein où il est nécessaire de la fixer, par des épingles jaunes. Cette couleur n'est pas essentielle à l'ouvrage, mais à l'ouvriere, qui paye ces sortes d'épingles moins cher que les autres. La texture & le jeu des fuseaux se font l'une & l'autre comme dans la dentelle de fil. (Voyez DENTELLE) On distingue dans la blonde trois parties ; le reseau, le grillage ou plein, & le toilé. Voyez ces mots à leurs articles. Dans tout cela on imite les différentes dentelles d'Angleterre, de Malines, de Valenciennes, &c. Les blondes sont parfaites & imparfaites en deux manieres : parfaites, par une texture réguliere, fine & qui a de l'éclat, & par la propreté & la blancheur qu'on a sû conserver à la soie ; imparfaites, par les deux contraires. Le défaut de propreté & de textures égales diminue la moitié du prix d'un ouvrage : parce qu'il n'en est pas des blondes comme des dentelles, qui se blanchissent. Il y a des blondes de fantaisie, & des blondes travaillées : les blondes de fantaisie en général, sont celles d'un moindre prix, & qui sont sujettes au caprice de la mode & des goûts : celles-ci se divisent encore en différentes branches particulieres, qui tantôt reçoivent leur dénomination de la ressemblance qu'elles ont avec certains objets naturels ou imités, plantes, animaux, ouvrages, &c. tantôt des événemens & des saisons où elles paroissent ; tantôt enfin de la réputation & de la vogue seules que s'est acquis le fabriquant. Mais pour découvrir cette ressemblance, quand il y en a, il faut toûjours regarder le toilé ou les fleurs dont elle dépend uniquement.
Nous en allons nommer quelques unes qui serviront d'exemples.
Berg-op-zoom, ce sont des blondes dont le dessein commença à paroître dans le tems que cette ville fut prise ; & le bruit que fit ce succès de nos armes, suffit pour donner ce nom à une infinité de choses.
Chenille, est une blonde dont le principal toilé est environné d'un brin de chenille. Voyez CHENILLE.
Persil, est une blonde composée d'une infinité de petits toilés, assez approchans de la figure d'une feuille de persil.
Points à la reine, est une blonde qui forme plusieurs quadrilles pleins & vuides, dont les premiers sont composés de trois petites branches distinctes, & à plusieurs brins, qui montent & descendent obliquement en se traversant dessus & dessous vers leur milieu, & soûtenues en-haut & en bas sur deux points transversaux qui regnent dans toute la piece.
Pouce du roi, est une blonde dont le grand toilé représente un éventail ouvert & fendu à la base par le milieu.
Privure, est un toilé continué qui serpente entre deux rangs de grillages ou de pleins : on l'appelle encore la couleuvre.
Enfin la blonde travaillée, est celle dont le dessein correct & bien choisi, joint à une exécution délicate, forme une piece dont la beauté permanente est avoüée indépendamment du caprice, de la mode & des circonstances. Les blondes travaillées imitent fort les dentelles, & sont aussi cheres qu'estimées.
Quand toutes ces différentes sortes de blondes n'ont pas assez de lustre en sortant des mains de l'ouvriere, on les repasse avec une bouteille de verre semblable à celles dont se servent les blanchisseuses de bas de soie, en observant d'y aller fort legerement, trop de pesanteur & de répétitions les rendant trop lisses & trop luisantes.
Nous finirons cet article par deux remarques : l'une concernant le dessein, surquoi nous dirons que celui qui a paru le plus agréable, même après en avoir fait des essais, fournit souvent des pieces bien moins belles que celles qu'on en attendoit ; aussi les marchands ont-ils soin de ne pas monter une grande quantité de pieces sur un dessein nouveau, avant que le goût du public ait confirmé & fixé le leur. La seconde remarque que nous ayons à faire, est que quoique les blondes soient ordinairement d'une seule couleur, c'est-à-dire blanches, on ne laisse pas d'en faire qui sont mêlées de noir, de rouge, &c. pour garnir des robes de dames, &c. Voyez DENTELLE.
Les marchands de modes employent beaucoup de blonde pour garnir les robes, les coëffures, les manchettes, & les palatines des femmes.
Il y en a deux sortes relativement à la matiere ; la blonde de fil, qui ressemble beaucoup à la dentelle ; & la blonde de soie, qui n'est pas à beaucoup près si bonne à l'usé, mais qui sied beaucoup mieux.
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BLONITSA | (Géog.) petite riviere de Silésie, dans la principauté d'Oppeln : elle se jette dans l'Oder.
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BLONY | ou BLONICZ, (Géog.) grande ville de la grande Pologne, dans le palatinat de Rava.
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BLOQUER | en termes de rivieres, c'est remplir une fondation de moëllons sans ordre, comme dans l'eau quand on rétablit le dégravoyement d'une pile, qu'on a entourée auparavant de pilotis & de pals à planches.
BLOQUER, faire un blocus. Voyez BLOCUS.
BLOQUER, est en Architecture, construire & lever des murs de moilon d'une grande épaisseur le long des tranchées, sans les aligner au cordeau, comme on fait les murs de pierres seches : c'est aussi remplir les vuides de moilon & de mortier sans ordre, comme on le pratique dans les ouvrages qui sont fondés dans l'eau. (P)
BLOQUER, BLOCQUER, en Marine ; c'est mettre de la bourre sur du goudron, entre deux bordages, quand on souffle ou que l'on double un vaisseau. (Z)
BLOQUER, terme d'Imprimerie ; c'est en composant mettre à dessein dans sa composition une lettre renversée, & exactement de la même épaisseur que celle qui devoit y être, mais qui manque dans la casse, parce qu'elle court beaucoup dans l'ouvrage.
* BLOQUER en Fauconnerie, se prend en deux sens différens : il se dit de l'oiseau qui a remis la perdrix & la tient à son avantage : il se dit aussi de son vol, lorsqu'il reste suspendu en l'air sans battre de l'aîle ; ce qui s'appelle aussi planer.
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BLOUSER | v. n. au billard ; c'est mettre la bille de son adversaire dans une blouse quelconque : on gagne deux points pour ce coup, comme on en perd deux également pour avoir blousé la sienne seule, ou avec celle de son adversaire.
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BLOUSES | S. f. au billard ; ce sont des trous d'un billard dans lesquels on pousse les billes ; & la grande adresse du billard est de pousser la bille de son adversaire dans la blouse. Voyez BILLARD.
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BLUE | ou BARBEAU, s. m. cyanus, (Hist. nat. bot.) genre de plante dont la fleur est composée de deux sortes de fleurons. Ceux qui occupent le centre de la fleur, sont plus petits, découpés en lanieres égales. Ceux qui sont à la circonférence sont beaucoup plus grands & plus apparens ; ils semblent être partagés en deux levres. Les uns & les autres portent sur des embryons de graines, & sont soûtenus par un calice écailleux qui n'a point de piquans. Lorsque la fleur est passée, les embryons deviennent des semences garnies d'aigrettes. Tournefort, Inst. rei herb. Voyez PLANTE. (I)
BLUET, cyanus segetum flore coeruleo. (Mat. med.) Les auteurs, & sur-tout les Allemands, ont donné de grandes vertus au bluet. La plûpart des medecins en font cependant assez peu de cas ; & si l'on en croit Geoffroy, les vertus qu'on lui attribue sont tout-à-fait incertaines & précaires.
L'huile de bluet se fait de la façon suivante. Prenez des fleurs de bluet cueillies avant le lever du soleil, autant qu'il vous plaira ; pilez-les dans un mortier de marbre ; renfermez-les dans un vaisseau de verre dont l'ouverture soit fort large ; fermez exactement ce vaisseau, & l'exposez au soleil pendant un mois entier : on peut luter ce vaisseau avec du levain.
Cette huile est un excellent ophthalmique, selon Timaeus, dans les fluxions chaudes, acres & salines.
Eau de bluet, selon M. Geoffroy. Prenez une certaine quantité de fleurs de bluet avec leur calice ; broyez-les, & faites-les macérer pendant vingt-quatre heures dans une suffisante quantité d'eau de neige ; distillez ensuite à un feu de sable modéré : c'est l'eau que les François appellent eau de casse-lunette.
On assûre que cette eau & celle d'eufraise sont un excellent remede contre l'inflammation des yeux ; & on la recommande avec le musc, le benjoin, & la fleur d'orange, pour donner au visage un teint fleuri, sur-tout si l'on y ajoûte le lait virginal.
Tournefort conseille l'eau de casse-lunette dans les ophthalmies avec rougeur, dans la chassie, & toutes les fois qu'il est question d'éclaircir la vûe & de la fortifier, avec une quantité suffisante de camphre & de safran, lorsqu'il s'agira de calmer une inflammation. (N)
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BLUTEAU | S. m. instrument dont les Boulangers se servent pour séparer le son d'avec la farine. Voyez la fig. A A, Planche du Boulanger.
Il y a deux principales parties dans un bluteau ; la caisse, & le bluteau proprement dit. La caisse est un coffre de bois proportionné à la longueur & à la grosseur du bluteau qu'il renferme & soûtenu sur deux, quatre ou six piés aussi de bois ; à l'un des bouts de cette caisse est un trou par lequel le grain moulu ou la farine entre dans le bluteau ; le son en sort par un autre trou fait à l'autre extrémité de la caisse : enfin sur le devant sont deux ou plusieurs guichets, qui se ferment avec des targettes, qu'on ouvre pour tirer les différentes sortes de farines qui y ont été blutées.
Chez les Boulangers, la caisse du bluteau peut n'être pas toute entiere de bois ; souvent il n'y a que les deux bouts & le dessus qui en soient : ils placent le bluteau de façon que le mur sert de derriere, le plancher de fond, & une toile attachée le long du dessus, & qui pend jusque sur le carreau de devant à la caisse.
Le bluteau proprement dit, est un gros & long cylindre fait de plusieurs cerceaux environnés d'étamine de soie, de laine, & souvent de l'une & de l'autre ensemble, à-travers laquelle passe le plus fin du grain moulu.
Ce cylindre est divisé en trois ou quatre parties de différente finesse ; ce qu'il y a de plus fin étant toûjours à la tête du bluteau : d'où l'on voit qu'il peut y avoir autant de degrés de finesse dans les farines, qu'il y a de divisions différentes dans les bluteaux.
Il faut que le bluteau soit un peu incliné par un bout, afin que lorsqu'il est agité par la manivelle, le grain moulu tombant successivement par ces divisions, laisse sous chacune d'elles la farine qui lui convient ; & que le son ne trouvant point de passage par où il puisse s'échapper, tombe au bout du bluteau par le trou qu'on y a ménagé.
Cependant comme ces divisions sont très-peu sensibles, & qu'il n'y a presque point de difference entre les degrés de finesse des trois ou quatre premieres, non plus qu'entre ceux des trois ou quatre dernieres, on n'en fait pour l'ordinaire que deux parts, & l'on mêle ensemble les farines qui ont passé par les divisions qui sont à-peu-près égales en finesse.
Outre ces divers degrés de finesse qui sont dans le même bluteau, il y a encore différentes sortes de bluteaux propres à chaque espece de farine, mais qui ne different des autres qu'en ce qu'ils sont plus ou moins gros.
Au-dessus du bluteau est une tremie dans laquelle on verse la farine, ou toute autre chose qu'on veut bluter : au bas de cette tremie est une ouverture recouverte par une planchette qui se hausse & se baisse selon la quantité de grain qu'on veut donner au bluteau. De la tremie le grain tombe dans l'auget, d'où il passe dans le bluteau.
BLUTEAU, terme de Courroyeur ; c'est un paquet de laine fait de vieux chiffons ou bas d'estame, avec lequel les Courroyeurs essuient les cuirs des deux côtés après les avoir chargés de biere aigre. Voyez COURROYER ; voyez la fig. 5. Pl. du Courroyeur.
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BLUTER | en terme de Boulanger ; c'est séparer la farine d'avec le son par le moyen du bluteau. On appelle farine blutée, celle qui a passé par le bluteau.
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BLUTERI | c'est parmi les Boulangers, le lieu où sont placés les bluteaux, & où l'on blute la farine.
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BOA | (Hist. nat.) c'est le nom d'un serpent aquatique, d'une grandeur demesurée, & qui s'attache particulierement aux boeufs, dont il aime beaucoup la chair : c'est ce qui lui a fait donner le nom qu'il porte. Il aime aussi beaucoup le lait. S'il est vrai, ainsi que le dit Duncan, qu'il ne puisse vivre d'autre chose, l'espece en doit être peu nombreuse ; & si l'on en trouve quelquefois dans la Calabre, ainsi qu'on nous l'assûre, il est étonnant que nous n'en ayons pas une description plus exacte. On tua un boa sous le regne de l'empereur Claude, dans lequel on trouva un enfant entier. Ceux qui ont avancé qu'il pouvoit avaler un boeuf, ne méritent qu'on rapporte leur sentiment que pour montrer jusqu'où peut aller l'exagération. Les historiens font assez ordinairement le contraire de la montagne en travail : s'agit-il d'une souris ? leur plume enfante un éléphant.
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BOACRES | (Géog. anc.) lieu d'Italie sur la voie Aurélienne, & sur la route de Rome à Arles par la Toscane & les Alpes : on croit que c'est la même chose que Boacte. Voyez BOACTE.
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BOACTE | (Géog. anc. & mod.) riviere d'Italie dans la Ligurie. Quelques-uns croyent que c'est la Vera ou Vella. Cluvier l'explique de la Brignole.
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BOAE | (Géog. anc. & mod.) ville du Péloponnèse dans la Laconie, près d'un golfe qui en étoit appellé Boetiacus sinus. Les Géographes prétendent que c'est le Vasica d'aujourd'hui, ou Batica, ou Vatica.
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BOAVISTA | (Géog. mod.) petite île, la plus orientale de celles du cap-Verd.
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BOBAQUE | S. m. (Hist. nat.) sorte d'animal assez ressemblant au lapin, qui se trouve sur les bords du Nieper, ayant deux dents en-haut & autant en-bas, & le poil de la couleur du blaireau ; il se terre comme le lapin ; il fait ses provisions pour l'hyver depuis le mois d'Avril jusqu'au mois d'Octobre ; alors il se retire sous terre, & n'en sort qu'au printems : il est facile à apprivoiser, & donne beaucoup de plaisir lorsqu'il a été instruit. On dit que cet animal est hermaphrodite.
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BOBECHE | BOBECHE
* BOBECHE, s. f. Les ouvriers en fer, mais surtout les Couteliers, donnent ce nom à un petit morceau d'acier fin & trempé, d'un pouce de long & un peu plus, & portant 3 à 4 lignes d'épaisseur d'un côté, sur une ligne ou environ de l'autre, ce qui lui donne la forme d'un coin oblong. Quand les Couteliers forgent un rasoir, ils prennent un morceau d'étoffe ou de gros acier ; ils l'étirent, le recourbent par un bout, inserent la bobeche entre les deux parties recourbées, la soudent, & elle forme le tranchant de l'ouvrage. On n'use de bobeches que pour épargner l'acier fin. Dans un rasoir, par exemple, le tranchant se trouve par ce moyen d'acier fin, & le dos de gros acier ; d'où il arrive que si la piece est mal forgée, le gros acier s'étendant beaucoup sur l'acier fin, le rasoir ne peut servir qu'en très-peu de tems il ne devienne mauvais ; & que quelque bien que le rasoir soit forgé, on ne peut l'user entierement. On forge un grand nombre de bobeches à la fois : pour cet effet on choisit le meilleur morceau d'acier d'Angleterre ou d'Allemagne que l'on ait ; on l'étire, & on lui donne sur toute sa longueur la forme que nous avons décrite plus haut, on le divise sur la tranche par autant d'entailles obliques qu'il peut contenir de bobeches ; on le trempe, puis on frappe dessus avec un petit marteau, il se casse à toutes les divisions, & donne toutes les bobeches séparées ; on fait les entailles obliques, afin qu'il y ait à la partie supérieure de la bobeche une espece de bec qui s'étende sur l'épaisseur de la boucle du gros acier recourbé, & qui la recouvre : si la bobeche au lieu d'être en losange, étoit quarrée, il est évident que n'ayant point de bec, quand on l'insereroit entre les deux parties de l'acier recourbé, l'endroit du coude ne seroit pas couvert d'acier fin, & que par conséquent le haut de la piece forgée que ce coude formeroit, seroit de gros acier & mauvais ; à moins que l'ouvrier n'eût l'attention d'enlever sur la tranche cette portion, ce qu'il est quelquefois obligé de faire. Voyez COUTELIER.
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BOBENHAUSEN | (Géog.) petite ville d'Allemagne dans le comté de Hanau.
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BOBER | (Géog.) riviere de la basse Silésie, qui se jette dans l'Oder.
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BOBEREAU | (Géog.) petite ville de Silésie dans la principauté de Jagerndorff.
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BOBERSBERG | (Géog.) petite ville de la basse Silésie, sur les frontieres de la Lusace, sur la riviere de Bober.
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BOBINE | S. f. instrument à l'usage de tous les ouvriers qui ourdissent, & de plusieurs autres, Passementiers, Manufacturiers en soie, Rubaniers, Epingliers, Tireurs-d'or, Trifileurs, &c. C'est en général un cylindre de bois leger, qui a plus ou moins de diametre & de longueur, & qui est percé sur toute sa longueur d'un petit trou, dans lequel on fait passer une broche qui lui sert d'axe. Tantôt la broche mobile fait tourner la bobine ; tantôt la bobine tourne sur la broche immobile. La bobine n'est pas ordinairement de même diametre sur toute sa longueur : il y en a surtout de deux especes bien différentes ; les unes sont absolument faites en cone ; les autres en cylindre cavé sur toute sa longueur ; ensorte que dans celles-ci, tantôt le point le plus bas de la cavité tombe sur le milieu de la longueur, & tantôt la cavité étant la même par-tout, les extrémités du cylindre forment seulement des rebords. Toutes les bobines servent à devider ou de la laine, ou de la soie, ou du fil, &c. Les bobines coniques sont à l'usage des moulineurs & des tordeurs de laine, de soie, &c. Comme il faut que le fil se devide verticalement de dessus ces bobines, s'il y avoit un rebord il empêcheroit le devidage. Je ne sais si dans les moulins à tordre la soie, on ne parviendroit pas par la seule figure des bobines, à remédier à l'inégalité du tors : c'est à M. de Vaucanson à examiner ce méchanisme. La cavité des bobines cylindriques sert à recevoir le fil, & à le contenir de maniere qu'il ne s'éboule point.
La bobine des Epingliers est un assez gros cylindre de bois, traversé d'un arbre, dont un bout est soûtenu dans un collet, & dont l'autre est garni d'une manivelle : la manivelle fait tourner le cylindre, qui se charge en tournant du fil trifilé, qui doit servir à faire l'épingle.
Les Manufacturiers en soie ont de grandes bobines ou canons à deux têtes, un peu gros, qui leur servent à devider le fil de lac au sortir de la boutique du cordier ; & de petites bobines ou canons, qui portent la dorure.
La bobine du Rubanier, du Faiseur de bas au métier, &c. est une espece de rochet dont les rebords sont plats en-dehors, & la longueur concave, & d'un bois plus leger que le rochet ; sa grosseur & sa longueur varient. Elle sert, ainsi que le rochet, à recevoir les soies devidées. Voyez ROCHET.
La bobine du Tireur d'or est une espece de roue mobile, sur laquelle on devide le fil. Voyez TIREUR-D'OR. Cet instrument est long d'un demi-pié tout au plus, cylindrique, percé & mobile sur deux pivots, avec des rebords à chaque bout.
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BOBINER | v. act. c'est, chez les Tireurs-d'or, faire passer le trait de dessus le tambour sur une petite bobine, à laquelle on donne le nom de roquetin. Voyez TIREUR-D'OR.
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BOBINEUSES | S. f. plur. nom que l'on donne, dans les Manufactures, particulierement dans celles de laine, à des femmes employées à devider sur des bobines ou rochets, le fil destiné à former des chaînes.
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BOBINIERE | S. f. partie supérieure du moulin ou rouet à filer l'or, ainsi appellée de sa fonction. Voyez FILEUR-D'OR.
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BOBIO | (Géog.) ville d'Italie dans le Milanès, au territoire de Pavie, sur la Trébia. Long. 27. lat. 44. 48.
BOBIO, (Géog.) la plus grande de toutes les rivieres du Chili en Amérique, elle prend sa source dans les Cordelieres, & se jette dans la mer, au 37 degré de latitude.
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BOBROISKO | (Géog.) ville dans le palatinat de Minski en Lithuanie.
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BOBURES s | m. pl. (Géog.) peuple de Terre-Ferme, dans l'Amérique méridionale : ils habitent dans le gouvernement de Venezuela, au midi du lac de Macaraïbo.
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BOCAGE | S. m. (Jardinage) c'est un bouquet de bois non cultivé, planté dans la campagne pour se mettre à l'ombre. (K)
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BOCAL | S. m. en Italien boccale, (Commerce) mesure des liquides, en usage à Rome. Le bocal est proprement ce qu'on appelle en France une bouteille. Il contient un peu plus que la pinte de Paris. Il faut sept bocals & demi pour la rubbe ou rubbia, & treize rubbes & demie pour la brante, qui contient quatre-vingt-seize bocals. Voyez BRANTE & RUBBIA. (G)
BOCAL, instrument dont les Bijoutiers & plusieurs autres ouvriers se servent pour rassembler sur leur ouvrage la lumiere d'un flambeau placé derriere. Cet instrument consiste en une grosse bouteille de verre blanc fort mince, montée sur son pié de bois. Voyez la figure 2. Planc. du Bijoutier. On emplit cette bouteille d'eau de riviere ou de pluie, dans laquelle on fait dissoudre quelques sels, ou bien on y mêle un peu d'eau-forte pour l'empêcher de geler l'hyver, ce qui feroit rompre le vase.
Pour se servir de cette machine, on la pose montée sur son pié sur l'établi, la chandelle ou lampe placée derriere, ensorte que les rayons lumineux qui traversent la liqueur dont la bouteille est pleine, viennent se rassembler sur l'ouvrage que l'ouvrier voit, comme il le verroit en plein jour.
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BOCAMBRE | S. m. terme à l'usage des grosses Forges : il est synonyme à bocard. Voyez BOCARD.
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BOCANE | S. f. danse grave, ainsi nommée de Bocan maître à danser de la reine Anne d'Autriche, qui en fut l'inventeur. On commença à la danser en 1645 : elle n'est plus d'usage. (B)
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BOCARD | S. m. moulin à pilon dont on se sert pour broyer la mine avant que de la mettre au feu, sur-tout lorsqu'elle est mêlée de pierre & de parties métalliques : un autre avantage de la mine bocardée, c'est qu'étant réduite en poudre, elle présente plus de surface à l'action du feu. Il n'y a guere de lavoirs sans être accompagnés d'un bocard. Le bocard est une machine fort simple ; ce sont des poutres ferrées par un bout, tenues verticalement par des traverses de bois, entre lesquelles elles peuvent descendre & monter par le moyen d'un gros cylindre garni de cammes ou dents qu'une roue à eau fait mouvoir, & qui rencontrant en tournant des éminences pratiquées aux poutres ferrées ou pilons, les élevent & les laissent retomber lorsque les cammes viennent à s'échapper de dessous les éminences des poutres ferrées ou des pilons. Le bout ferré du pilon frappe dans une auge où l'on jette la mine à bocarder, & l'écrase. De cette mine écrasée, les parties métalliques étant les plus lourdes, tombent & restent au fond de l'auge, les parties pierreuses & plus legeres sont entraînées par un courant d'eau qu'on fait passer sous les pilons. Du bocard la mine est portée au lavoir, & du lavoir au fourneau à griller. Voyez dans nos Planches de Minéralogie, & dans celles des grosses-Forges, plusieurs figures de bocard.
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BOCARDO | (Logique) c'est une sorte d'argumentation, dans laquelle la majeure est particuliere négative, la mineure universelle affirmative, & la conclusion particuliere négative. V. SYLLOGISME.
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BOCCA D'INFERNO | (Physique) c'est un météore qui paroît souvent aux environs de Bologne en Italie, lorsqu'il fait obscur : ce sont des exhalaisons enflammées, auxquelles les peuples du pays attribuent la mauvaise volonté de chercher à égarer les voyageurs : accusation que les gens du peuple forment aussi parmi nous contre ce qu'on appelle feux follets. Voyez FEUX FOLLETS.
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BOCCA | BOCCA
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BOCCAL | l'on nomme ainsi un grand verre qui tient pinte, dont on se sert en Allemagne & dans les Pays-Bas pour célébrer des santés intéressantes à la fin des grands repas, & dans lesquels l'on force quelquefois impitoyablement les convives de noyer le peu de raison qui leur reste.
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BOCCONE | S. f. bocconia (Hist. nat. bot.) genre de plante dont le nom a été dérivé de celui de Boccone, noble Sicilien, connu par plusieurs ouvrages de Botanique & de Physique. La fleur des plantes de ce genre est composée de deux pétales : il s'éleve du milieu de la fleur un pistil qui devient dans la suite un fruit ovoïde pointu, applati & plein de suc ; ce fruit renferme une semence ronde. Plumier, nova plant. Amer. gener. Voyez PLANTE (I)
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BOCHET | S. m. (Pharmacie) décoction seconde du gayac & des autres bois sudorifiques, selon Castelli ; quoiqu'on puisse l'appliquer à la premiere décoction des bois ou racines ligneuses. Ces décoctions sont nécessaires dans tous les cas où il faut atténuer, diviser, & pousser par la sueur, & où les pores sont assez ouverts pour faciliter la sueur. L'usage de ces remedes convient dans les rhûmatismes froids, & aux constitutions froides & humides. (N)
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BOCINO | (Géog.) petite ville d'Italie au royaume de Naples, proche le confluent des rivieres de Selo & de Negro.
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BOCKARA | (Géog.) ville assez considérable dans le Zagatay en Asie, sur la riviere d'Albiamu.
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BOCKELEN | (Géog.) ville & château du comté de Woldenberg sur la Nette, à peu de distance d'Hildesheim.
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BOCKEM | S. m. (Commerce) On appelle en Hollande hareng bockem, ce que nous entendons en France par harengs fumés. Voyez HARENG.
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BOCKENHEIM | (Géog.) Il y a deux villes de ce nom, l'une dans le bas Palatinat, l'autre en Alsace sur la Saar.
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BOCKHOLT | (Géog.) ville & territoire dans l'évêché de Munster, sur la riviere d'Aa en Westphalie.
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BOCKNIA | (Géog.) ville de la petite Pologne dans le palatinat de Cracovie, renommée à cause qu'on y trouve beaucoup de sel gemme.
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BOCQUET | S. m. (Blason) terme qui dans quelques auteurs signifie un fer de pique.
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BOD | S. m. (Hist. mod.) idole des Indes à laquelle on s'adressoit pour avoir des enfans. Lorsqu'une femme avoit été exaucée, & qu'elle avoit mis au monde une fille, on présentoit cette fille au Bod, & on la laissoit dans son temple, où elle étoit élevée jusqu'à ce qu'elle eût atteint l'âge nubile : alors elle sortoit pour prendre place à la porte du temple entre les autres femmes voüées. Elles étoient toutes assises sur des tapis, prêtes à se livrer au premier venu. La seule chose dont le culte leur fit un cas de conscience, c'étoit de mettre à vil prix leurs faveurs, ou d'en retenir une partie. Elles étoient obligées sous peine de déplaire au Bod, de remettre tout l'argent qu'elles amassoient à son service, entre les mains de son prêtre, pour être employé aux bâtimens & à l'entretien du temple. Renaud, relat. des Indes.
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BODANETZ | (Géog.) petite ville de Boheme dans le cercle de Koniggratz, peu éloignée de Pardubitz.
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BOD | ou BUDE, (Géog.) riviere qui traverse les pays de Quidlimbourg, d'Halberstadt, & de Magdebourg, & se jette dans la Saale.
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BODENBURG | (Géog.) petite ville du duché de Brunswick-Wolfembutel.
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BODENDYCK | (Géog.) petite ville du duché de Lunebourg, à l'électeur de Hanovre.
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BODENHAUSEN | (Géog.) petite ville du Landgraviat de Hesse, sur la frontiere du duché de Brunswick.
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BODENZÉE | (Géog.) c'est ainsi que les Allemands nomment le lac de Constance, entre la Souabe & la Suisse.
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BODINERIE | S. f. (Commerce) espece de contrat qui est en usage sur les côtes de Normandie : c'est une sorte de prêt à la grosse aventure, qui est assigné sur la quille ou bodine du vaisseau, & où l'on hypotheque non-seulement le corps du vaisseau, mais encore les marchandises qui y sont chargées. Voyez AVENTURE.
La bodinerie differe du contrat d'assûrance, en ce qu'on ne paye point de prime, & qu'il n'est rien dû en cas de naufrage, prise d'armateurs, corsaires, &c. mais seulement quand le vaisseau arrive à bon port, on paye la somme principale avec l'intérêt ou profit maritime stipulé dans le contrat.
Il est encore différent du contrat d'assûrance en cas de contestation, en ce que c'est au créancier à prouver devant les juges de l'amirauté que le vaisseau est arrivé à bon port, pour rendre l'obligation de bodinerie exécutoire, & établir son droit de créance ; au lieu que dans les polices d'assûrance, c'est à l'assûré à justifier la perte, prise ou naufrage du vaisseau, pour son remboursement de la chose assûrée. (G)
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BODINURE | S. f. (Marine) cordelettes passées autour de la partie de l'ancre qu'on appelle arganeau, ou organeau. Voyez ANCRE.
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BODOWNICZY | (Hist. mod.) c'est le nom qu'on donne en Pologne à un magistrat dont la charge est de veiller sur les bâtimens : c'est ce qu'étoit un édile chez les Romains.
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BODROG | (Géog.) riviere de la haute Hongrie qui prend sa source vers les frontieres de Pologne, & se jette dans la Theiss à Tokay.
BODROG, (Géog.) comté de la haute Hongrie, & ville située sur un bras du Danube.
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BOEDROMIES | S. f. (Myth.) fêtes qu'on célébroit à Athenes, pendant lesquelles on couroit en jettant de grands cris, du grec , cri, & , course. Elles se célébroient vers le mois d'Août, d'où ce mois chez les Athéniens a été nommé Boedromion. Cette fête, selon Plutarque, fut instituée au sujet de la guerre contre les Amasones, ou, selon d'autres, en mémoire du secours qu'on donna aux Athéniens contre Eumolpe. (G)
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BOEN | (Géog.) petite ville de France dans le Forez, au pié des montagnes, sur une côte arrosée par le Lignon, à cinq lieues de Rouane.
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BOESJES | S. f. pl. (Comm. & Hist. mod.) coquilles de mer qui servent de monnoie parmi les habitans de la basse Ethiopie.
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BOESSER | v. act. à la Monnoie, c'est nettoyer les lames au sortir de la fonte avec la gratte-boesse. Voy. GRATTE-BOESSE ou GRATTE-BOSSE de Monnoyage.
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BŒUF | S. m. bos, (Hist. nat.) taureau coupé. Voyez TAUREAU.
Le boeuf ne differe du taureau, que comme un animal differe d'un autre de la même espece, lorsque celui-ci est plein de feu, vif, hardi, vigoureux, & même un peu farouche, & que l'autre est pesant, lâche, & timide ; il est constant que la castration seule met toutes ces différences entre le boeuf & le taureau.
Castration. Elle se fait à deux ans ; quelques personnes la risquent à six mois. On s'y prend le matin avant que le jeune boeuf ait sorti : les uns choisissent le mois de Mai, d'autres l'automne. Pour la faire, on prend les muscles des testicules avec de petites tenailles, on incise les bourses, on enleve les testicules, ne laissant que la portion qui tient aux muscles ; après quoi on frotte la blessure avec des cendres de sarment mêlées de litarge d'argent, & on y applique un emplâtre : ce jour on lui ménage la nourriture ; on ne lui donne point de boisson, & on lui en donne peu les jours suivans. Les trois premiers jours on le nourrit de foin haché, & d'un picotin de son mouillé qu'on lui laisse prendre en une fois. Le troisieme ou quatrieme jour on leve le premier appareil, & l'on met sur la plaie un emplâtre de poix fondue, & de cendres de sarment mêlées avec de l'huile d'olive. A mesure que l'appétit revient au jeune animal, on lui donne de l'herbe fraîche, & on lui augmente la boisson. On le garde jusqu'à trois ans ; c'est l'âge de la vente.
Choix du boeuf. Le boeuf est la plus estimée d'entre les bêtes à cornes : il se nourrit facilement & rend beaucoup de service. Il faut le choisir avec la tête courte & ramassée ; l'oreille grande, velue, & unie ; la corne forte, luisante, & de moyenne longueur ; le muffle gros & camus ; les naseaux ouverts, la dent blanche, longue & égale ; la levre noire ; le cou gros & charnu ; les épaules larges, grosses, fermes & charnues ; la poitrine large ; le fanon long & pendant ; les reins larges & forts ; les côtés étendus ; le ventre large & tombant ; les flancs proportionnés à la grosseur du ventre ; la hanche longue ; la croupe large & ronde ; la jambe forte & nerveuse ; la cuisse de même ; le dos droit & plein ; la queue longue, pendante, & garnie de poils déliés & touffus ; le pié ferme ; le cuir fort & doux ; le poil luisant & épais ; les muscles élevés ; l'ongle court & large ; le corps entier, membru, large & ramassé ; jeune, fort, docile, promt à l'aiguillon, obéissant à la voix, & facile à manier.
Poil du boeuf. Le boeuf sous poil noir trompe rarement ; le meilleur est sous poil rouge : il est tardif sous poil blanc : méfiez-vous du moucheté : on n'estime pas le gris ; le brun dure peu.
Age du boeuf. Le boeuf ne peut commencer à servir qu'à trois ans ; passé dix, il faut l'engraisser pour la boucherie : il vit jusqu'à quatorze ans. On connoît son âge à la dent & à la corne. A dix mois il jette les premieres dents de devant ; elles sont suivies d'autres plus larges & moins blanches : à seize mois les dents de lait des côtés tombent à leur tour, & sont aussi remplacées par d'autres moins blanches & plus fortes : à trois ans toutes les dents ont mué ; elles sont égales, blanchâtres & longues ; & à mesure que le boeuf vieillit, elles s'usent, se noircissent, & deviennent inégales & noires. Si l'on consulte les cornes sur l'âge, on comptera pour trois ans les annelets qui regnent depuis le bout des cornes jusqu'au premier noeud en descendant : passé trois ans, le boeuf perd ce qui lui est venu de cornes, & il lui en croît une nouvelle, nette, petite, unie, à laquelle il se forme chaque année un noeud semblable à un anneau relevé en bosses ; & pour juger de son âge au-delà de trois ans, on compte le nombre de ces noeuds.
On a remarqué que ceux qui mangent lentement, & qui ont été élevés sur les montagnes, sont de meilleur service. Si on les prend au loin, ils seront sujets à tomber malades ; & l'on ne les accoûtumera au climat qu'en les ménageant beaucoup la premiere année, surtout dans les chaleurs, & qu'en leur donnant du bon foin. On recommande au laboureur de ne point prêter ses boeufs, & de ne les point excéder de travail.
Maniere de dompter les boeufs. Pour les accoûtumer au joug, il faut d'abord les caresser de la main qu'on leur passe sur tout le corps, leur donner un peu de sel dans du vin, & les apprivoiser ; puis on leur lie les cornes ; quelques jours après leur mettre le joug ; une autre fois leur faire traîner des roues ; & finir par la charrue.
On les accouple dans le commencement avec un boeuf tout formé ; on ne les aiguillonne point : si malgré les ménagemens dont on use on les trouve fougueux, on les attelle entre deux boeufs faits & vigoureux ; ce travail les soûmet en moins de trois ou quatre jours.
On les dispose encore au joug en les accouplant à la mangeoire entre des boeufs formés, & les menant ainsi accouplés aux champs ; leur montrant d'autres boeufs au travail, & les faisant au bruit en les conduisant dans des endroits où il y a beaucoup de monde.
Il ne faut pas laisser passer trois ans sans les dompter : quand ils sont accoûtumés au joug, on y joint le timon, dont on laisse traîner la chaîne afin que le son ne les épouvante pas : au bout de trois ou quatre jours on attache une piece de bois à la chaîne, & on les attelle devant deux boeufs formés ; on leur allége la peine par les caresses, le peu de travail, & la bonne nourriture ; on ne leur laisse pas manquer de litiere ; on a soin au retour de l'exercice de les frotter & de les couvrir ; on les fortifie quand ils ont trop chaud, par de l'avoine ou du son.
Quand on accouple un boeuf, il faut lui donner son égal en force & en taille, sans quoi le plus fort portera toute la fatigue, & périra en peu de tems.
Défauts des boeufs. Le boeuf est sujet à des défauts ; il faut s'appliquer à les connoître & à les corriger : les jeûnes & les caresses valent mieux que les coups & l'aiguillon ; cependant s'il est rétif, on lui battra les fesses avec un bâton tiré chaud hors du feu ; s'il est ombrageux, on lui fera souvent du bruit, & l'on continuera jusqu'à ce qu'il ne s'épouvante plus ; s'il est violent, ce qui ne vient guere que de repos & d'embonpoint, on le liera par les quatre jambes, on le terrassera, & on lui épargnera la nourriture ; si on l'aime mieux, on le fatiguera de travail & de coups d'aiguillon. Les anciens mettoient du foin à la corne des boeufs qui l'avoient dangereuse. S'il est paresseux, il faut user de l'aiguillon.
Nourriture du boeuf. Le boeuf ne mange jamais trop ; quand il a pris son repas, il se couche & rumine. On le nourrit en hyver de paille & de foin ; quand il travaille il lui faut de bon foin : son repas dure ordinairement une heure. Avant que de l'atteler, il faut lui donner du son sec ou de l'avoine. En été on lui jette de l'herbe fraîche, des bourgeons de vigne, des feuilles d'orme, de frêne, d'érable, de chêne, de saule, & de peuplier.
La vesce verte ou seche lui est bonne, ainsi que le sainfoin, la luserne, la paille d'orge, &c. celle d'épautre ne lui convient guere qu'en litiere.
Il y en a qui nourrissent le boeuf avec le lupin trempé dans l'eau, les pois chiches, la rave, le navet, le jonc marin, l'écosse de pois, l'orge bouilli, &c.
Il ne faut le mettre au pâturage qu'à la mi-Mai, & aux fourrages en Octobre : mais observez de ne le faire passer du verd au sec, & du sec au verd, que peu-à-peu. Le boeuf ne mange pas autant qu'on le croiroit sur sa grosseur.
Soin du boeuf. Dans les tems de labour, si l'on a deux paires de boeufs, l'une travaillera depuis le matin jusqu'à onze heures, l'autre depuis midi jusqu'au soir. Il faut extrèmement ménager les jeunes boeufs.
On aura soin au retour du travail de frotter les boeufs avec des bouchons, sur-tout s'ils sont en sueur ; de les étriller le matin avant que de les mettre au joug ; de rembourrer de paille ce qui peut les incommoder ; de leur laver souvent la queue avec de l'eau tiede ; de les mener rarement aux champs & au labour dans les grandes chaleurs, les froids & les pluies ; de leur rafraîchir la bouche en été avec du vinaigre ou du vin imprégné d'un peu de sel ; de ne les attacher dans l'étable que quand leur sueur sera passée ; de leur laver les piés au retour des champs ; de leur donner à manger aux heures réglées ; de les faire boire deux fois le jour en été, & une fois en hyver ; enfin de prévenir leurs maladies & de panser leurs maux. Quant à l'étable, voyez ETABLE.
S'il y a plusieurs jours de fête de suite, il faudra leur graisser la corne & le dessous du paturon avec du surpoint, ou leur appliquer sur un morceau de linge un oignon bien cuit dans la braise ; les tenir en tout tems un peu éloignés les uns des autres ; veiller à ce que l'étable soit propre, pour les garantir de vermine, & leur donner toûjours de la belle eau claire.
Au reste tout ce qui précede n'est que pour le boeuf de charrue ou de harnois : celui qui ne travaille pas ne demande pas tant de soin ; il suffit de l'envoyer aux champs en été, & de lui donner du fourrage en hyver, à moins qu'il ne faille l'engraisser.
Engrais du boeuf. L'engrais des boeufs se fait de la maniere suivante. On ne se détermine guere à les engraisser que quand ils sont hors de service : c'est ordinairement à l'âge de dix ans ; alors on ne leur fait faire ni voitures ni labour. Si c'est en été qu'on en veut faire l'engrais, on s'y prend sur la fin de Mai : aussi-tôt que le jour paroit on les mene paître ; on les laisse au pâturage jusqu'au grand jour, alors on les ramene reposer dans l'étable ; quand la chaleur est passée, on les reconduit aux champs jusqu'à la nuit, on leur distribue des herbages, & on les parque par cantons : s'ils manquent d'appétit, on les fera boire trois ou quatre fois par jour, on leur lavera de tems en tems la langue avec du sel & du vinaigre, & on leur jettera dans la gorge une petite poignée de sel.
Pendant les huit premiers jours de l'engrais, en été on fait tiédir au soleil, en hyver sur le feu, de l'eau où l'on met de la farine d'orge ; on laisse reposer ce mêlange jusqu'à ce que le gros soit précipité, après quoi il reste une eau blanche qu'on fait boire aux boeufs pendant huit ou dix jours ; quant au gros ou sédiment, on le réserve pour le retour du pâturage.
Le soir on leur donne une bonne litiere, & on jette devant eux une botte d'herbe fraîche ; on continue ces soins pendant quatre mois : voilà l'engrais d'été.
En hyver on n'engraisse guere que dans les pays sans pâturage. On commence l'engrais par l'eau blanchie, qu'on donne aux boeufs soir & matin pendant huit jours ; on les tient chaudement dans l'étable ; on leur fait ample litiere ; on leur donne sans épargne du foin & des herbes seches ; le soir leur repas est de pelotes de farine de seigle, d'orge, d'avoine, mêlées ou séparées, pétries avec de l'eau tiede & un peu de sel ; on supprime la paille, à laquelle on substitue soir & matin un picotin & demi de son sec, & à midi une écuellée de seigle ; c'est le moyen d'avoir des boeufs gras en trois mois : dans le tems des raves, on leur en hache de crues dans leur auge ; quelques-uns ne négligent pas le marc de raisin cuit dans l'eau avec le son ; les lupins en farine, ou en pâte, entiers ; l'avoine en grain, la luserne & le gland. Il y en a qui commencent l'engrais par une once de poudre d'antimoine, dans une mesure d'avoine ou de son. Pour les empêcher de se lêcher (car on prétend que cela leur nuit) on leur frotte avec leur fiente tous les endroits du corps où ils peuvent atteindre.
Il y a encore d'autres manieres d'engraisser les boeufs : mais voilà la plus ordinaire.
Maladies des boeufs. Elles viennent presque toutes d'excès de travail. Les principales sont le dégoût, la langueur, le mal de coeur, la colique & les tranchées, l'enflure, le flux de ventre, l'avant-coeur, la paresse de ventre, l'indigestion, le pissement de sang, les barbillons, l'enflure du palet, la fievre, l'enflure du cou, les écorchures, les duretés au chignon, la maigreur, l'entorse, l'encloüure, les étranguillons, la gale, & une infinité d'autres dont on trouvera les principales à leurs articles.
Boeuf, (aliment) On employe presque toutes les parties du boeuf en nourriture : on mange le boeuf bouilli, roti, en ragoût, & fumé.
Le boeuf fumé se prépare de la maniere suivante. On commence par le dépecer en gros morceaux, qu'on saupoudre de sel blanc ; on le laisse dans le sel pendant deux ou trois jours, puis on le met en presse entre deux planches ; on le suspend ensuite dans une cheminée, assez éloignée de la flamme, pour que la graisse n'en soit pas fondue, & l'on fait dessous un feu qui donne beaucoup de fumée : pour cet effet on préfere le bois verd de genevrier, qui donne au boeuf fumé un goût aromatique. Le meilleur se fait à Hambourg & dans le duché de Gueldres. Quand il est fumé, on le coupe en tranches fort minces, & on le mange crud ou cuit sur des beurrées.
Le boeuf à la mode se fait avec des rouelles de boeuf, qu'on bat, qu'on larde, qu'on passe au roux, & qu'on met ensuite entre deux terrines sur un feu modéré, avec du sel, du poivre, du laurier, un verre de vin blanc, & deux verres d'eau.
Il y a une infinité d'autres manieres de préparer le boeuf, en aliment.
BOEUF, remede ; la chair de boeuf est un très-bon aliment, sur-tout pour ceux qui travaillent beaucoup, parce que le suc que l'on en tire est très-propre à réparer la déperdition de substance qu'occasionne le violent exercice ; ce dont on pourra s'assûrer par la quantité d'extrait qu'il a fourni à M. Geoffroi le jeune, & dont il a rendu compte à l'académie des Sciences, dans un mémoire qu'il a lû en 1730.
On attribue, avec raison, au boeuf salé & aux alimens de cette espece, le scorbut auquel sont sujets les marins lorsqu'ils font des voyages de long cours. Voyez SCORBUT.
L'usage ordinaire de la chair du boeuf est de le faire bouillir dans une suffisante quantité d'eau, avec un peu de sel marin, & de l'écumer afin d'en ôter certaines parties qui pourroient être nuisibles, on en tire par ce moyen un suc que l'on appelle bouillon, & qui est le seul aliment qu'on accorde pour l'ordinaire aux malades. On a encore soin de le proportionner à leurs forces, & à la nécessité qu'ils ont de prendre plus ou moins de nourriture, c'est-à-dire qu'on le mêle dans certains cas avec une plus grande quantité d'eau ; on joint au boeuf le veau & la volaille, enfin on y joint aussi des plantes appropriées à leurs maladies.
L'odeur de la peau du boeuf brûlée est recommandée dans la passion hystérique : le poil a le même effet. Le suif en est bon, lorsqu'il est question d'amollir. La graisse fondue avec le sabot est plus pénétrante & plus émolliente, parce que ces parties sont plus déliées. La moelle est un excellent anodyn & calmant dans les douleurs de goutte & de rhûmatisme. Les os calcinés arrêtent les dévoiemens, tuent les vers, surtout s'il y a trop d'acide & d'humide dans le corps, & qu'il soit besoin d'employer des dessicatifs & des absorbans. La rapure de la corne est bonne, selon quelques-uns, dans l'épilepsie ; le sabot a la même propriété. Le membre génital ou le nerf du boeuf pulvérisé, ou pris en décoction, passe pour exciter dans les hommes le désir du coït, & dans les femmes l'aversion de cet acte. Le bézoard de la vésicule du boeuf est alexipharmaque & anti-épileptique. Le bulithe ou boule qu'on trouve dans les intestins & l'estomac du boeuf, est composé de poils que cet animal détache de son corps en se lêchant, qu'il avale, & qui se ramassant peu-à-peu forment une boule qui est de la couleur du poil de l'animal ; cette boule est quelquefois enduite d'une croute luisante : des medecins l'ordonnent à la dose d'un demi-gros en poudre en qualité d'astringent. Le fiel a les mêmes vertus que la bile en général, c'est-à-dire qu'il est détersif, savonneux, résolutif, & fondant. La fiente est discussive ; on l'employe récente en cataplasme comme un anodyn propre à calmer les inflammations & la goutte : on l'applique sur le bas-ventre avec les vers de terre pour dissiper les vents, les douleurs & duretés du bas-ventre. Elle doit son énergie à l'extrait des plantes dont l'animal se nourrit : on la recommande dans la rétention d'urine, appliquée sur le périnée & sur les os pubis. Le suc exprimé est employé par le petit peuple dans la colique ; Etmuller prétend que ce remede est bon dans ce cas & dans la pleurésie. Le zibetum occidentale se tire de cette siente par la sublimation. Voyez ZIBETUM. Quelques-uns font grand cas de la fiente de boeuf dans la gangrene : mais Heister conseille de la laisser à ceux qui ne peuvent pas employer de meilleurs remedes, & pense qu'il est aussi foible que sordide. Le sang du boeuf a les mêmes vertus que le sang des autres animaux ; en conséquence de sa chaleur naturelle & de sa qualité savonneuse, il est fondant & apéritif, il résout & déterge.
Toutes ces parties du boeuf ont la vertu des alkalis volatils tirés du regne animal, & n'ont d'efficacité qu'à raison de cette volatilité ; la différence est que ceux du boeuf ont plus d'énergie, parce que les sels & les huiles sont plus exaltés par l'exercice & l'action continuels de ces animaux, de même que par l'usage des différentes herbes dont ils se nourrissent. (N)
Entre beaucoup de sortes de marchandises qu'on tire du boeuf, sa peau est très utile pour le commerce. Les peaux de boeuf se vendent en poil, vertes, ou salées, ou seches, & sans poil lorsqu'elles ont été préparées par les tanneurs ou par les hongrieurs, qui en font du cuir fort & du cuir de Hongrie, qui s'employe ensuite à différens usages. Voyez CUIR & TANNERIE.
Les rognures de sa peau servent à faire de la colle-forte. Voyez COLLE.
Le poil de leur queue, après avoir été cordé & bouilli, fournit une partie du crin que les tapissiers & autres artisans employent. Le poil du reste de la peau sert à faire la bourre, dont on garnit les selles des chevaux, les bâts de mulet, &c. La pellicule qui s'enleve de la surface de ses boyaux, sert aux Batteurs d'or. Voyez BAUDRUCHE & BATTEUR D'OR.
BOEUF MARIN. Voyez VEAU MARIN.
BOEUF DE DIEU, oiseau. Voyez ROITELET. (I)
BOEUF ; éparvin de boeuf. (Maréch.) Voy. EPARVIN.
BOEUF ROTI ; (Hist. anc.) cérémonie en usage chez les Scythes : voici ce qu'en dit Lucien au dialogue intitulé Toxaris ou de l'amitié : lorsqu'un des anciens Scythes avoit reçû quelqu'injure, & qu'il étoit trop foible par lui-même pour en tirer vengeance, il faisoit rôtir un boeuf, le coupoit par pieces ; & les mains liées derriere le dos comme un prisonnier, il s'asseyoit sur la peau au milieu de tout cet amas de viande ; ceux qui passoient auprès de lui & qui vouloient le secourir, en prenoient un morceau & s'engageoient à lui amener, l'un cinq cavaliers, l'autre dix, chacun selon son pouvoir, & ceux qui ne pouvoient disposer que d'eux mêmes, promettoient de venir en personne. Par ce moyen ils assembloient des troupes plus considérables encore par la valeur que par le nombre ; l'amitié étoit intéressée dans leur vengeance, & la religion du serment la rendoit terrible. (G)
* BOEUF (Oeil de), Architecture, fenêtre ronde qui se pratique dans les grands bâtimens au-dessous du dernier entablement, & dans les grands & petits bâtimens aux toits, pour éclairer les greniers.
* BOEUF, s. m. c'est ainsi qu'on appelle dans les Salines, l'ouvrier qui décharge le bois des charrettes, le jette sous la poele, & fait les autres menus services de cette nature.
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BOG | (Géog.) riviere de Pologne, qui va se jetter dans le Nieper à Oczakow.
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BOGARMILE | S. m. & f. (Hist. ecclés.) c'est le nom qu'on donnoit autrefois à une secte d'hérétiques, qui se firent connoître à Constantinople sous l'empire d'Alexis Comnene : leur chef étoit un nommé Basile ; il renouvella les erreurs des Antropomorphites, des Audiens, & d'autres, qui avoient attribué à Dieu une forme corporelle. Basile fut condamné à être brûlé, & sa secte n'eut que très-peu ou point de suite. Voyez BOGOMILES ou BONGOMILES.
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BOGDOI | S. m. pl. (Géog.) peuples de la grande Tartarie. Les Chinois les appellent Tartares orientaux, & les Monguls leur donnent le nom de Niouchi ou Nuchi. Ils ont les Monguls au couchant, la Chine au midi, & l'Océan oriental au levant. On fait habiter le pays par les Tartares Dieuchari ou Diourschi, par qui la Chine a été conquise & qui y regnent. Ce sont apparemment les mêmes que Witsen appelle Coejari.
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BOGESUND | (Géog.) petite ville de la province de West-Gothie en Suede.
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BOGLIASCO | (Géog.) petite ville sur le golfe de Genes.
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BOGNA | (Géog.) riviere du Milanois, dans un petit pays appellé Val Bognasca.
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BOGOMILE | ou BONGOMILES, subst. m. pl. (Hist. eccl.) secte d'hérétiques sortis des Manichéens, ou selon d'autres des Massiliens, mais qui ne s'éleverent que dans le xiij. siecle, & dont le chef nommé Basile fut brûlé vif, par ordre de l'empereur Alexis Comnene.
Ducange prétend que leur nom est dérivé de deux mots de la langue Bulgare, savoir, Bog, Deus, & milvi, miserere, ensorte que ce nom signifie à la lettre celui qui implore la misericorde de Dieu.
Sous ce titre imposant, les Bogomiles enseignoient une doctrine très impie. Ils assûroient que Dieu avoit une forme humaine, & que l'archange saint Michel s'étoit incarné. Ils nioient la résurrection, & n'en admettoient d'autre que la résurrection spirituelle par la pénitence. Ils rejettoient aussi le mystere de l'eucharistie, les livres de Moyse, & ne recevoient comme canoniques que sept livres de l'Ecriture. Selon eux la messe étoit un sacrifice de démons. L'oraison dominicale, qui étoit leur seule priere, étoit aussi la seule eucharistie. Ils croyoient concevoir le Verbe & l'enfanter comme la Vierge ; ils méprisoient les croix & les images, & assûroient que le baptême des Catholiques étoit le baptême de saint Jean, & qu'eux seuls administroient celui de Jesus-Christ. On leur attribue aussi des erreurs capitales sur la Trinité. Baronius, ad annum 1118. Sander. heres. 138. (G)
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BOGUE | BOOPS, BOX, subst. f. (Hist. nat. Ichthyolog.) poisson de mer qui vit près des rivages : il est de la longueur d'un pié ; il a le corps renflé, la tête courte & petite, & les yeux si grands qu'ils occupent presque toute la tête. La bogue a différentes couleurs, & des traits qui s'étendent depuis la tête jusqu'à la queue : les uns semblent être dorés & les autres argentés ; mais ils sont tous peu apparens : on n'en voit aucun sur le ventre, qui est de couleur d'argent. Ce poisson a comme la dorade, deux nageoires auprès des ouies & deux au-dessus ; une autre qui s'étend depuis l'anus presque jusqu'à la queue, & une autre sur le dos, qui va presque d'un bout à l'autre. La queue semble être composée de deux nageoires triangulaires. Rondelet. Willughby dit qu'il n'a jamais vû de bogues qui eussent un pié de longueur ; que la chair de ce poisson est de bon goût, & qu'elle ne fait jamais de mal de quelque façon qu'on la prépare. On a de ces poissons à Gènes, à Livourne, à Naples, à Messine, &c. Voyez DORADE.
BOGUE-RAVEL, poisson qui ressemble beaucoup au précédent, & qui a cependant le bec plus pointu & le corps plus large & plus court ; on croit qu'il a été nommé bogue-ravel, parce qu'on le vend ordinairement avec tous les petits poissons que l'on appelle ravaille, à Montpellier. Rondelet. Voyez POISSON. (I)
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BOHADE | S. f. (Hist. mod.) c'est un droit de corvée qui appartient aux seigneurs dans quelques provinces ; leurs vassaux sont en vertu de ce droit, obligés de leur fournir deux boeufs ou une charrette, pour aller pour eux au vin, ou en leurs vignobles, dans le tems de la vendange.
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BOHEME | (Géog.) royaume de l'Europe ; il est borné à l'occident par la Franconie & le haut Palatinat, à l'orient par la Moravie & la Silésie, au nord par la Lusace & la Misnie, & au sud par l'Autriche & la Baviere ; ce royaume est divisé en 14 cercles ou districts, & Prague en est la capitale. Le terrein est fertile & rempli de montagnes & de mines très-abondantes ; il s'y trouve aussi des pierres précieuses de plusieurs especes : il y a un grand nombre de verreries, dont les ouvrages s'envoyent par toute l'Europe. Le roi de Boheme est le premier des électeurs séculiers, & a le titre de grand maître d'hôtel (Archi-pincerna) de l'Empire dont il est feudataire. Ce royaume appartient à la maison d'Autriche. Les Bohémiens sont fort industrieux, leur langue est une dialecte de l'Esclavon.
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BOHEMIENS | S. m. pl. (Hist. mod.) c'est ainsi qu'on appelle des vagabonds qui font profession de dire la bonne aventure, à l'inspection des mains. Leur talent est de chanter, danser, & voler. Pasquier en fait remonter l'origine jusqu'en 1427. Il raconte que douze pénanciers ou pénitens, qui se qualifioient chrétiens de la basse Egypte, chassés par les Sarrasins, s'en vinrent à Rome, & se confesserent au pape, qui leur enjoignit pour pénitence d'errer sept ans par le monde, sans coucher sur aucun lit. Il y avoit entr'eux un comte, un duc, & dix hommes de cheval ; leur suite étoit de cent vingt personnes : arrivés à Paris, on les logea à la Chapelle, où on les alloit voir en foule. Ils avoient aux oreilles des boucles d'argent, & les cheveux noirs & crêpés ; leurs femmes étoient laides, voleuses, & diseuses de bonne aventure : l'évêque de Paris les contraignit de s'éloigner, & excommunia ceux qui les avoient consultés ; depuis ce tems le royaume a été infecté de vagabonds de la même espece, auxquels les états d'Orléans tenus en 1560, ordonnerent de se retirer sous peine des galeres. Les Biscayens & autres habitans de la même contrée ont succédé aux premiers bohémiens, & on leur en a conservé le nom. Ils se mêlent aussi de voler le peuple ignorant & superstitieux, & de lui dire la bonne aventure. On en voit moins à présent qu'on n'en voyoit il y a 30 ans, soit que la police les ait éclaircis, soit que le peuple devenu ou moins crédule ou plus pauvre, & par conséquent moins facile à tromper, le métier de bohémiens ne soit plus aussi bon.
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BOHITI | S. m. pl. (Hist. mod.) prêtres de l'île Espagnole en Amérique. Les Espagnols les trouverent en grande vénération dans le pays quand ils y arriverent. Leurs fonctions principales étoient de prédire l'avenir & de faire la Medecine. Ils employoient à l'une & à l'autre une plante appellée cohoba : la fumée du cohoba respirée par le nez leur causoit un délire qu'on prenoit pour une fureur divine ; dans cette fureur ils débitoient avec enthousiasme un galimathias, moitié inintelligible, moitié sublime, que le peuple recevoit comme des inspirations. La maniere dont ils traitoient les maladies étoit plus singuliere. Quand ils étoient appellés auprès d'un malade, ils s'enfermoient avec lui, faisoient le tour de son lit trois ou quatre fois, lui mettoient de leur salive dans la bouche ; & après plusieurs mouvemens de tête & autres contorsions, souffloient sur lui & lui suçoient le cou du côté droit. Ils avoient grand soin auparavant de mettre dans leur bouche un os, une pierre, ou un morceau de chair ; car ils en tiroient après l'opération quelque chose de semblable, qu'ils donnoient pour la cause de la maladie, & que les parentes du malade gardoient avec soin afin d'accoucher heureusement. Pour soulager le malade fatigué de ces cérémonies, ils lui imposoient légerement les mains depuis la tête jusqu'aux piés, ce qui ne l'empêchoit pas de mourir ; alors ils attribuoient sa mort à quelque pêché récent dont elle étoit le châtiment.
Ils n'avoient d'autre part aux sacrifices que celle de recevoir les pains d'offrande, de les bénir, & de les distribuer aux assistans ; mais ils étoient chargés de la punition de ceux qui n'observoient pas les jeûnes prescrits par la religion. Ils portoient un vêtement particulier, & ils pouvoient avoir plusieurs femmes. Voyez Lop. de Gomar. hist. des ind. occid.
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BOHMISCH-BROD | (Géogr.) c'est une ville de Boheme, peu éloignée de Prague.
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BOHMISCH-WEYER | (Géog.) ville de Boheme, dans le cercle de Pilsen sur un lac.
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BOHMISTES | S. m. pl. (Hist. ecclés.) on appelle ainsi en Saxe les sectateurs d'un nommé Jacob Bohm, qui est mort en 1624 ; il a laissé plusieurs écrits mystiques, & a donné dans une théologie obscure & inintelligible.
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BOHOL | Géog.) une des îles Philippines, dans l'océan oriental en Asie.
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BOHUSLAW | (Géog.) ville de Pologne, dans le palatinat de Kiovie.
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BOIANO | (Géog.) petite ville d'Italie, au pié de l'Appennin, au royaume de Naples, dans le comté de Molise, près du Biferno. Long. 32. 8. lat. 41. 30.
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BOIARD | sub. m. (Commerce) terme usité par ceux qui pêchent la morue pour désigner une civiere à bras ; sur laquelle on charge ce poisson, pour le transporter d'un lieu dans un autre.
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BOIBI | (Hist. nat.) c'est un serpent du Bresil, que les Portugais appellent cobre verde, serpent verd ; il est ordinairement d'environ trois piés de long, & gros comme le pouce : sa couleur est verdâtre. Il a la gueule grande & la langue noire ; il se tient entre les pierres & dans les masures ; sa morsure est très-dangereuse : l'on attribue à sa chair les mêmes qualités qu'à celle de la vipere.
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BOICININGA | (Hist. nat.) en Portugais cascavel, c'est un grand serpent du Bresil, qui a quatre ou cinq piés de long ; il est de la grosseur du bras, sa couleur est d'un rouge tirant sur le jaune ; sa tête est longue & mince & sa langue fourchue : il a de petits yeux, mais ses dents sont longues & pointues. On voit attaché à sa queue vers l'extrémité, un corps parallelepipede, de trois à quatre doigts de long, large d'un demi-doigt, & composé de petits chaînons entrelacés les uns avec les autres, secs, unis, luisans, de couleur cendrée, tirant sur le rouge. Ce corps croît à chaque année d'un anneau ou chaînon ; il fait le même bruit qu'une sonnette : il annonce de loin la présence du serpent qui se tient dans les chemins écartés. Il est fort venimeux & attaque les passans ; les Indiens, à ce qu'on prétend, portent pour s'en garantir au bout d'un bâton un morceau de la racine dite vipérine, dont l'odeur arrête sa furie. On prépare un remede singulier contre sa morsure ; c'est son fiel imbibé dans une quantité convenable de chaux réduite en poudre ou de farine de maïs. On dit que ce fiel est de couleur d'azur & si spiritueux, qu'il s'évapore & disparoît à l'air. On ajoûte que la vésicule en est vuide en été ; d'où l'on conjecture qu'elle est portée aux gencives de l'animal & qu'elle est la source de son poison. On raconte de la virulence de ce poison des choses étonnantes ; comme de se transmettre à-travers le bois & le fer, & de rendre dangereux l'attouchement des corps que le serpent a mordus.
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BOIE | S. f. (Commerce) espece de revêche que les Sayetteurs d'Amiens fabriquent. Il y en a de trois largeurs ; les grandes ont trois quartiers de large sur vingt aunes de long : les moyennes ont la même longueur sur un peu moins de largeur ; les étroites n'ont qu'une demi-aune de large, sur vingt de long.
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BOIENS | sub. m. pl. (Géog. anc.) il y a eu plusieurs peuples de ce nom : les uns en Germanie, les autres dans les Gaules, en Italie, & même en Asie.
Ceux de Germanie habitoient la forêt Hercynienne, & ce sont eux qui ont donné le nom à la Boheme.
Ceux de la Gaule habitoient entre la Loire & l'Allier, jadis le pays des Æduens, aujourd'hui le Bourbonnois.
Ceux des Gaules résidoient vers les confins de la Novempopulanie & dans le pays de Bordeaux. On les appelle aujourd'hui Bujes, & leur canton Buch, Burtz, & Buch ; il est situé sur la Loire.
Les Boiens de la Gaule Cisalpine firent partie des Gaulois qui entrerent en Italie en 364, & s'emparerent de l'Umbrie, & de l'Etrurie. Près de l'Apennin, dit Polybe, on trouve les Ananes : ensuite les Boiens.
Les Boiens de l'Asie, Gaulois d'origine, s'avancerent, sous la conduite de Brennus, jusqu'à Bisance, & pénétrerent jusque dans l'Eolie & l'Ionie, où ils s'établirent.
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BOIER | (Marine) Voyez BOYER.
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BOINITZ | (Géog.) ville de la haute Hongrie, au comté de Zoll, remarquable par ses bains & son safran. Long. 36. 40. lat. 48. 42.
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BOIOARIENS | sub. m. pl. (Géog. anc.) peuples de la Germanie, connus dans les auteurs modernes sous le nom de Bavarois, & leur pays sous celui de Baviere.
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BOIRE | v. act. & n. (Physiologie) action par laquelle on fait entrer des liqueurs dans la bouche, puis dans le gosier pour les conduire à l'estomac. Voyez GOSIER & ESTOMAC. Il y a deux moyens pour cet effet, sans compter ceux que nous pourrions mettre en usage, si nous voulions imiter les façons de boire des animaux : celles qui sont les plus ordinaires à l'homme, sont de pomper les liquides, ou de les verser dans la bouche.
On boit en pompant, en suçant, quand on boit avec un chalumeau : les enfans tetent leurs nourrices en suçant. On suce de même en buvant dans un verre, dans un biberon, ou lorsque l'on boit dans une riviere ou au bassin d'une fontaine. On peut pomper ou sucer de différentes manieres, avec la bouche seulement, ou avec la bouche & la poitrine ensemble. Quand on suce avec la bouche seulement, on fait d'elle-même une pompe aspirante, les levres se ferment en rond, & laissent une ouverture que je compare à celle du bout de la pompe qui est dans l'eau ; le corps de la pompe est fait par les joues, les mâchoires & le palais ; la langue fait le piston. Quoique cette comparaison soit exactement juste quant au fond, il y a pourtant quelques différences de la pompe ordinaire à celle que nous faisons avec notre bouche : ces différences consistent en ce que l'ouverture de la pompe, son corps & son piston, ne changent point leur grosseur ni leur diametre, & que les levres peuvent former une ouverture plus ou moins grande, suivant le desir que nous avons de pomper plus ou moins de liqueur à la fois, ou que nous voulons les faire entrer avec plus ou moins de vîtesse : la bouche devenue corps de pompe, s'augmente ou diminue, soit pour contenir la liqueur pompée, soit pour s'ajuster à la langue : celle-ci qui fait le piston, se grossit ou devient petite pour se proportionner aux différens diametres de la bouche : elle prend aussi différentes figures pour s'accommoder aux inégalités des dents, auxquelles elle doit être appliquée avec autant de justesse qu'un piston le doit être au corps de sa pompe. Ainsi on peut dire que la bouche fait tout ce que peut faire une pompe, & que de plus ses parties étant capables d'un nombre infini de modifications, elles multiplient les fonctions de la bouche, & en font une pompe d'une structure particuliere. Pour mettre en usage cette pompe, il faut que quelque liquide soit présent à l'ouverture des levres, & qu'il la bouche entierement ; on approche les joues des mâchoires pour diminuer la capacité de la bouche : on retire la langue en arriere, & le liquide vient occuper la place que tenoit la langue : mais pour faire entrer la boisson plus promtement & en plus grande quantité, on écarte la mâchoire inférieure de la supérieure, & la bouche occupant plus d'espace au-dehors, presse l'air extérieur qui comprime la liqueur, & la fait entrer dans la cavité de la bouche augmentée par l'éloignement des mâchoires. Si l'on met le bout d'un biberon plein d'eau dans l'ouverture des levres, & que l'on fasse les mêmes mouvemens des joues, des levres, de la langue & des mâchoires, le liquide entrera de même. Un syphon, un biberon, & autres vaisseaux de pareille espece, ne sont que l'ouverture des levres prolongée. Lorsque l'on a rempli la bouche, il faut la vuider, si l'on veut pomper ou sucer de nouveau. Elle se vuide en-dedans quand on avale, ou en-dehors quand on seringue, pour ainsi dire, ce que l'on avoit pompé ; c'est ce que font les Cabaretiers quand ils goûtent leurs vins. Dans l'un & dans l'autre cas la langue fait le piston ; elle s'avance en-devant, elle presse le liquide qu'elle jette en-dehors, si les levres sont ouvertes, ou qu'elle chasse du côté du gosier, si la valvule est levée, & que les levres soient exactement fermées. La seconde maniere de faire entrer des liqueurs dans la bouche en pompant, dépend de la dilatation de la poitrine ; par cette dilatation l'air extérieur pousse l'eau & la fait entrer dans l'ouverture des levres ; cela se fait, en inspirant. On inspire de l'eau ou de l'air ensemble ou séparément : quand on inspire du liquide seul, cela se nomme sucer ; & lorsque l'on inspire l'un & l'autre, cela s'appelle humer : dans cette façon de boire, l'air prend la route de la trachée-artere, pendant que l'eau reste dans la bouche. Pour humer on forme ordinairement une ouverture aux levres plus grande que pour pomper. On éloigne les levres des mâchoires ; on leve le bout de la langue du côté du palais ; on releve la valvule du gosier, & on inspire. L'ouverture des levres doit être plus grande, pour que l'air extérieur qui presse l'eau que l'on veut humer, ait moins de peine à la faire entrer dans la bouche. On éloigne des levres les mâchoires pour former un espace capable de contenir l'eau ; on releve le bout de la langue, qui, comme un rampart, retient l'eau, l'empêche de suivre l'air qui entre dans la trachée-artere ; on releve la valvule du gosier pour que l'air puisse passer ; & enfin en dilatant la poitrine, on inspire pour que l'air extérieur presse le liquide, & l'oblige d'entrer dans la bouche avec lui. C'est ainsi que l'on prend un bouillon, du thé, du caffé & autres liqueurs chaudes.
On peut verser les liquides dans la bouche de trois manieres : dans la premiere on verse doucement à mesure que la langue conduit la boisson dans le gosier ; c'est une façon assez ordinaire de boire. Dans la seconde on verse brusquement tout-à-la-fois, & la langue conduit le tout dans le gosier avec la même vîtesse ; c'est ce que l'on appelle sabler : & la troisieme est de verser dans la bouche ayant la tête renversée ; c'est ce que l'on appelle boire au galet. Quand on boit de la premiere façon, la langue peut prendre deux situations différentes ; elle peut avoir son bout appliqué à la partie du palais qui est la plus proche des dents de devant, sans quitter cette place, quoiqu'elle se meuve pour avaler, parce qu'il suffit qu'elle se baisse pour son milieu, en décrivant une ligne courbe qui laisse deux espaces sur les côtés par où l'eau monte dans le vuide que la courbure de la langue laisse entr'elle & le palais ; après quoi la langue pousse l'eau dans le gosier, en approchant son milieu au palais, sans que son bout quitte sa premiere place, & pour lors le milieu de la langue ne fait que se baisser pour recevoir, & se hausser pour pousser les liquides dans le gosier jusqu'à ce qu'on ait tout avalé. La seconde situation que peut prendre la langue est d'avancer au-delà des dents, & placer son bout au-dessous du bord du verre qui répand sur elle sa liqueur, laquelle est poussée de même dans le gosier lorsque la langue se releve, & qu'elle s'applique au palais. Les actions de sabler & de boire au galet demandent d'autres mouvemens, dans le détail desquels nous n'entrerons pas ici. Voyez Mém. de l'académie royale des Sciences, année 1715, pag. 188. & suivantes. (L)
BOIRE, faire boire les peaux, terme de Chamoiseur & de Mégissier, qui signifie jetter à la riviere les peaux de chevre, de mouton, ou autres animaux semblables, pour les y faire tremper, après qu'elles ont passé sur le chevalet, & qu'elles y ont été préparées avec le couteau de riviere du côté de la chair. On les y laisse plus ou moins de tems, selon la chaleur de la saison. Cette façon se donne quand on est prêt à les travailler de fleur pour la seconde fois. Voyez CHAMOIS.
BOIRE dans son blanc ; (Manége) expression figurée qui signifie qu'un cheval bay alzan, &c. a le nez tout blanc. Boire la bride, se dit lorsque les montans de la bride, n'étant pas assez allongés, le mors force les coins de la bouche du cheval, & les fait rider. Faire boire un cheval au seau, c'est lui apporter un seau d'eau pour le faire boire dans l'écurie sans le déranger de sa place. (V)
BOIRE, terme de papier ; on dit que du papier boit, lorsque l'encre pénetre à travers, & paroît de l'autre côté de la feuille ; le papier, qui boit ne vaut rien pour écrire, parce que dans ce cas l'encre s'étend & brouille l'écriture. Ce défaut arrive au papier faute d'avoir été bien collé, & quand il est trop humide.
BOIRE, terme de Tailleur ; les tailleurs disent qu'une étoffe boit, lorsque de deux lisieres qui sont jointes ensemble par une couture, l'une plisse un peu, & est cousue plus lâche que l'autre.
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BOIS | S. m. (Oeconomie rustiq.) ce terme a deux grandes acceptions : ou il se prend pour cette substance ou matiere dure & solide que nous tirons de l'intérieur des arbres & arbrisseaux ; ou pour un grand canton de terre planté d'arbres propres à la construction des édifices, au charronage, au sciage, au chauffage, &c.
Si l'on jette un coup d'oeil sur la consommation prodigieuse de bois qui se fait par la charpente, la menuiserie, d'autres Arts, & par les feux des forges, des fonderies, des verreries, & des cheminées, on concevra facilement de quelle importance doivent avoir été en tout tems, & chez toutes les nations, pour le public & pour les particuliers, la plantation, la culture, & la conservation des forêts ou des bois, en prenant ce terme selon la seconde acception. Comment se peut-il donc que les hommes soient restés si long-tems dans les préjugés sur ces objets, & qu'au lieu de tendre sans-cesse à la perfection, ils se soient au contraire de plus en plus entêtés de méthodes qui les éloignoient de leur bût ? Car c'est-là qu'ils en étoient ; c'est-là qu'ils en sont encore pour la plûpart, comme nous pourrions le démontrer par la comparaison des regles d'agriculture qu'ils ont prescrites, & qu'on suit sur les bois, & par celles que l'expérience & la philosophie viennent d'indiquer à M. de Buffon. Mais notre objet est d'exposer la vérité, & non pas de l'associer à l'erreur : l'erreur ne peut être trop ignorée, & la vérité trop connue, sur-tout quand elle embrasse un objet aussi considérable que l'aliment du feu, & le second d'entre les matériaux qui entrent dans la construction des édifices. Nous observerons seulement que l'extrait que nous allons donner des différens mémoires que M. de Buffon a publiés, non seulement pourra éclairer, sur la culture, l'amélioration & la conservation des bois, mais pourra même devenir une grande leçon pour les philosophes de se méfier de l'analogie ; car il paroît que l'ignorance dans laquelle il semble qu'on aime encore à rester, malgré le grand intérêt qu'on a d'en sortir, ne vient dans son origine que d'avoir transporté les regles de l'agriculture des jardins à l'agriculture des forêts. La nature a ses lois, qui ne nous paroissent peut-être si générales, & s'étendre uniformément à un si grand nombre d'êtres, que parce que nous n'avons pas la patience ou la sagacité de connoître la conduite qu'elle tient dans la production & la conservation de chaque individu. Nous nous attachons au gros de ses opérations : mais les finesses de sa main d'oeuvre, s'il est permis de parler ainsi, nous échappent sans-cesse ; & nous persistons dans nos erreurs jusqu'à ce qu'il vienne quelqu'homme de génie, assez ami des hommes, pour chercher la vérité ; & j'ajoûterois volontiers, assez courageux pour la communiquer quand il l'a trouvée.
Le nom de bois, pris généralement, comprend les forêts, les bois, les haies, & les buissons ou bocages.
L'on entend vulgairement sous le nom de forêts, un bois qui embrasse une fort grande étendue de pays.
Sous le nom de bois, l'on comprend un bois de moyenne étendue.
Le parc est un bois enfermé de murs.
Les noms de haie & de buisson ou bocage, sont usités en quelques endroits pour signifier un bois de peu d'arpens.
Néanmoins l'usage fait souvent employer indifféremment les noms de forêt & de bois ; il y a même des bois de très-grande étendue, des forêts qui occupent peu d'espace, & des bois qui ne sont appellés que haies ou buissons, & chaumes ; comme les chaumes d'Avenay près Beligny-sur-Ouche, dans le bailliage de Dijon en France, qui contiennent autant d'arpens que des bois de moyenne grandeur.
Toutes ces sortes de bois sont plantées d'arbres, qui sont ou en futaie ou en taillis.
Futaies se dit des arbres qu'on laisse croître sans les couper que fort tard. Voyez FUTAIE.
Taillis, des arbres dont la coupe se fait de tems en tems, & plûtôt que celle de la futaie. V. TAILLIS.
Il y a des forêts qui sont toutes en futaie ; d'autres toutes en taillis : mais la plûpart sont mêlées de l'une & de l'autre sorte.
Quand on parle de bois de futaie & de taillis, on considere le bois debout & sur le canton même qui en est couvert, & formant des forêts, &c.
Dans les autres occasions, le terme bois s'entend du bois abattu & destiné aux usages de la vie civile : c'est sous ces deux points de vûe que nous allons considérer le bois.
BOIS sur pié, voyez FORET. Le bois qui étoit autrefois très-commun en France, maintenant suffit à peine aux usages indispensables, & l'on est menacé pour l'avenir d'en manquer absolument. Ceux qui sont préposés à la conservation des bois, se plaignent eux-mêmes de leur dépérissement : mais ce n'est pas assez de se plaindre d'un mal qu'on sent déjà, & qui ne peut qu'augmenter avec le tems, il en faut chercher le remede ; & tout bon citoyen doit donner au public les expériences & les réflexions qu'il peut avoir faites à cet égard.
Tous nos projets sur les bois doivent se réduire à tâcher de conserver ceux qui nous restent, & à renouveller une partie de ceux que nous avons détruits.
Tout le bois de service du royaume consiste dans les forêts qui appartiennent à sa Majesté, dans les réserves des ecclésiastiques & des gens de main-morte, & enfin dans les baliveaux, que l'ordonnance oblige de laisser dans tous les bois.
On sait par une expérience déjà trop longue, que le bois des baliveaux n'est pas d'une bonne qualité, & que d'ailleurs ces baliveaux font tort au taillis V. BALIVEAUX. M. de Buffon a observé les effets de la gelée du printems dans deux cantons voisins de bois taillis ; on avoit conservé dans l'un tous les baliveaux de quatre coupes successives, dans l'autre, on n'avoit réservé que les baliveaux de la coupe actuelle : M. de Buffon a reconnu que la gelée avoit fait un si grand tort au taillis surchargé de baliveaux : que l'autre taillis l'a devancé de près de cinq ans sur douze. L'exposition étoit la même : M. de Buffon a sondé le terrein en différens endroits ; il étoit semblable : ainsi il ne peut attribuer cette différence qu'à l'ombre & à l'humidité que les baliveaux jettoient sur le taillis, & à l'obstacle qu'ils formoient au desséchement de cette humidité, en interrompant l'action du vent & du soleil.
Les arbres qui poussent vigoureusement en bois, produisent rarement beaucoup de fruit ; les baliveaux se chargent d'une grande quantité de glands, & annoncent par-là leur foiblesse. On imagineroit que ce gland devroit repeupler & garnir les bois, mais cela se réduit à bien peu de chose ; car de plusieurs millions de ces graines qui tombent au pié de ces arbres, à peine en voit-on lever quelques centaines, & ce petit nombre est bientôt étouffé par l'ombre continuelle & le manque d'air, ou supprimé par le dégouttement de l'arbre, & par la gelée, qui est toûjours plus vive près de la surface de la terre, ou enfin détruit par les obstacles que ces jeunes plantes trouvent dans un terrein traversé d'une infinité de racines & d'herbes de toute espece. On trouve, à la vérité, quelques arbres de brin dans les taillis. Ces arbres viennent de graine ; car le chêne ne se multiplie pas par rejettons, & ne pousse pas de la racine : mais les arbres de brin sont ordinairement dans les endroits clairs des bois, loin des gros baliveaux, & sont dûs aux mulots ou aux oiseaux, qui en transportant les glands en sement une grande quantité. M. de Buffon a sû mettre à profit ces graines que les oiseaux laissent tomber. Il avoit observé dans un champ, qui depuis trois ou quatre ans étoit demeuré sans culture, qu'autour de quelques petits buissons, qui s'y trouvoient fort loin les uns des autres, plusieurs petits chênes avoient paru tout d'un coup. M. de Buffon reconnut bientôt par ses yeux que cette plantation appartenoit à des geais, qui en sortant des bois venoient d'habitude se placer sur ces buissons pour manger leur gland, & en laissoient tomber la plus grande partie, qu'ils ne se donnoient jamais la peine de ramasser. Dans un terrein que M. de Buffon a planté dans la suite, il a eu soin de mettre de petits buissons ; les oiseaux s'en sont emparé, & ont garni les environs d'une grande quantité de jeunes chênes.
Les réserves établies dans les bois des ecclésiastiques & des gens de main-morte, ne sont pas sujettes au défaut des baliveaux. Il faudroit établir un tems fixe pour la coupe de ces futaies en réserve ; ce tems seroit plus ou moins grand, selon la qualité du terrein. On pourroit en régler les coupes à 50 ans dans un terrein de 2 piés 1/2 de profondeur, à 70 dans un terrein de 3 piés 1/2, & à 100 ans dans un terrein de 4 piés 1/2 & au-delà de profondeur. M. de Buffon donne ces termes d'après les observations qu'il a faites au moyen d'une tariere haute de cinq piés, avec laquelle il a sondé quantité de terreins, où il a examiné en même tems la hauteur, la grosseur & l'âge des arbres : cela se trouve assez juste pour les terres fortes & pétrissables. Dans les terres legeres & sablonneuses, on pourroit fixer les termes des coupes à 40, 60 & 80 ans : on perdroit à attendre plus long-tems ; & il vaudroit infiniment mieux garder du bois de service dans des magasins, que de le laisser sur pié dans les forêts, où il ne peut manquer de s'altérer après un certain âge.
Tous ceux qui connoissent un peu les bois, savent que la gelée du printems est le fléau des taillis, c'est elle qui dans les endroits bas & dans les petits vallons, supprime continuellement les jeunes rejettons, & empêche le bois de s'élever ; en un mot, elle fait aux bois un aussi grand tort qu'à toutes les autres productions de la terre ; & si ce tort a jusqu'ici été moins connu, moins sensible, c'est que la joüissance d'un taillis étant éloignée, le propriétaire y fait moins d'attention, & se console plus aisément de la perte qu'il fait : cependant cette perte n'est pas moins réelle, puisqu'elle recule son revenu de plusieurs années. M. de Buffon a tâché de prévenir, autant qu'il est possible, les mauvais effets de la gelée, en étudiant la façon dont elle agit, & il a fait sur cela des expériences qui lui ont appris, que la gelée agit bien plus violemment à l'exposition du midi, qu'à l'exposition du nord ; qu'elle fait tout périr à l'abri du vent, tandis qu'elle épargne tout dans les endroits où il peut passer librement. Cette observation, qui est constante, fournit un moyen de préserver de la gelée quelques endroits des taillis, au moins pendant les deux ou trois premieres années, qui sont le tems critique, & où elle les attaque avec plus d'avantage. Ce moyen consiste à observer, quand on les abat, de commencer la coupe du côté du Nord : il est aisé d'y obliger les marchands de bois, en mettant cette clause dans son marché ; & M. de Buffon s'est déjà bien trouvé d'avoir pris cette précaution pour ses taillis.
Un pere de famille, un homme arrangé qui se trouve propriétaire d'une quantité un peu considérable de bois taillis, commence par les faire arpenter, borner, diviser, & mettre en coupe réglée, il s'imagine que c'est-là le plus haut point d'économie ; tous les ans il vend le même nombre d'arpens ; de cette façon ses bois deviennent un revenu annuel, il se sait bon gré de cette regle ; & c'est cette apparence d'ordre qui a fait prendre faveur aux coupes reglées : cependant il s'en faut bien que ce soit là le moyen de tirer de ses taillis tout le profit qu'on en peut tirer. Ces coupes réglées ne sont bonnes que pour ceux qui ont des terres éloignées qu'ils ne peuvent visiter ; la coupe réglée de leurs bois est une espece de ferme ; ils comptent sur le produit, & le reçoivent sans s'être donné aucun soin ; cela doit convenir à grand nombre de gens : mais pour ceux dont l'habitation se trouve fixée à la campagne, & même pour ceux qui vont y passer un certain tems toutes les années, il leur est facile de mieux ordonner les coupes de leurs bois taillis. En général, on peut assûrer que dans les bons terreins on gagnera à attendre, & que dans les terreins où il n'y a pas de fond, il faudra les couper fort jeunes : mais il seroit bien à souhaiter qu'on pût donner de la précision à cette regle, & déterminer au juste l'âge où l'on doit couper les taillis. Cet âge est celui où l'accroissement du bois commence à diminuer. Dans les premieres années, le bois croît de plus en plus, c'est-à-dire, la production de la seconde année est plus considérable que celle de la premiere, l'accroissement de la troisieme année est plus grand que celui de la seconde ; ainsi l'accroissement du bois augmente jusqu'à un certain âge, après quoi il diminue : c'est ce point, ce maximum qu'il faut saisir, pour tirer de son taillis tout l'avantage & tout le profit possible.
M. de Buffon a donné, dans les Mémoires de l'Académie, année 1738, le moyen qu'il a trouvé d'augmenter la force & la solidité du bois : rien n'est plus simple ; car il ne s'agit que d'écorcer les arbres, & les laisser ainsi sécher & mourir sur pié avant que de les abattre ; l'aubier devient par cette opération aussi dur que le coeur de chêne ; il augmente considérablement de force & de densité, comme M. de Buffon s'en est assûré par un grand nombre d'expériences, & le souches de ces arbres écorcés & séchés sur pié, ne laissent pas de repousser & de reproduire des rejettons : ainsi il n'y a pas le moindre inconvénient à établir cette pratique, qui, en augmentant la force & la durée du bois mis en oeuvre, doit en diminuer la consommation, & par conséquent doit être comptée au nombre des moyens de conserver les bois. Les Allemands, chez qui les Hollandois vont chercher leurs bois de menuiserie, n'ont point d'autre secret pour leur donner cette qualité qui les rend si propres à être travaillés. Au printems, lorsque l'écorce commence à se lâcher, on écorce l'arbre ; on lui laisse passer l'année : le printems suivant, l'arbre écorcé ne pousse plus que de petites feuilles, on lui laisse achever encore cette année sur pié ; on ne le coupe que dans la saison où l'on coupe les arbres.
Regles pour semer le bois. Pour semer une terre forte & glaiseuse, il faut conserver le gland pendant l'hyver dans de la terre, en faisant un lit de deux pouces de gland sur un lit de terre d'un demi-pié, puis un lit de terre & un lit de gland, toûjours alternativement, & enfin en couvrant le magasin d'un pié de terre, pour que la gelée ne puisse y pénétrer. On en tirera le gland au commencement de Mars, & on le plantera à un pié de distance. Ces glands qui ont germé, sont déjà autant de jeunes chênes, & le succès d'une plantation faite de cette façon n'est pas douteux ; la dépense même n'est pas considérable, car il ne faut qu'un seul labour. Si l'on pouvoit se garantir des mulots & des oiseaux, on réussiroit tout de même & sans aucune dépense, en mettant en autonne le gland sous l'herbe, car il perce & s'enfonce de lui-même, & réussit à merveille sans aucune culture dans les friches dont le gason est fin, serré & bien garni, & qui indique presque toujours un terrein ferme & mêlé de glaise.
Si l'on veut semer du bois dans les terreins qui sont d'une nature moyenne entre les terres fortes & les terres legeres, on fera bien de semer de l'avoine avec les glands, pour prévenir la naissance des mauvaises herbes, qui sont plus abondantes dans ces especes de terreins que dans les terres fortes & les terres legeres, car ces mauvaises herbes dont la plûpart sont vivaces, font beaucoup plus de tort aux jeunes chênes, que l'avoine qui cesse de pousser au mois de Juillet.
M. de Buffon a reconnu par plusieurs expériences, que c'est perdre de l'argent & du tems que de faire arracher de jeunes arbres dans les bois pour les transplanter dans des endroits où on est obligé de les abandonner & de les laisser sans culture, & que quand on veut faire des plantations considérables d'autres arbres que de chêne ou de hêtre, dont les graines sont fortes & surmontent presque tous les obstacles, il faut faire des pépinieres où on puisse élever & soigner les jeunes arbres pendant les deux premieres années, après quoi on les pourra planter avec succès pour faire des bois.
Dans les terreins secs, legers, mêlés de gravier, & dont le sol n'a que peu de profondeur, il faut faire labourer une seule fois, & semer en même tems les plants avant l'hyver. Si l'on ne seme qu'au printems, la chaleur du soleil fait périr les graines. Si on se contente de les jetter ou de les placer sur la terre, comme dans les terreins forts, elles se dessechent & périssent ; parce que l'herbe qui fait le gason de ces terres légeres, n'est pas assez garnie & assez épaisse pour les garantir de la gelée pendant l'hyver, & de l'ardeur du soleil au printems. Les jeunes arbres arrachés dans les bois, réussissent encore moins dans ces terreins que dans les terres fortes ; & si on veut les planter, il faut le faire avant l'hyver, avec de jeunes plants pris en pépiniere.
Le produit d'un terrein peut se mesurer par la culture : plus on travaille la terre, plus elle rapporte de fruits : mais cette vérité d'ailleurs si utile, souffre quelques exceptions ; & dans les bois une culture prématurée & mal entendue, cause la disette, au lieu de produire l'abondance. Par exemple, on imagine que la meilleure maniere de mettre un terrein en nature de bois, est de nettoyer ce terrein & de le bien cultiver avant que de semer le gland ou les autres graines qui doivent un jour le couvrir de bois ; & M. de Buffon n'a été désabusé de ce préjugé qui paroît si raisonnable, que par une longue suite d'observations. M. de Buffon a fait des semis considérables & des plantations assez vastes ; il les a faites avec précaution, il a souvent fait arracher les genievres, les bruyeres, & jusqu'aux moindres plantes qu'il regardoit comme nuisibles, pour cultiver à fond & par plusieurs labours les terreins qu'il vouloit ensemencer. M. de Buffon ne doutoit pas du succès d'un semis fait avec tous ces soins ; mais au bout de quelques années il a reconnu que ces mêmes soins n'avoient servi qu'à retarder l'accroissement des jeunes plants ; & que cette culture précédente qui lui avoit donné tant d'espérance, lui avoit causé des pertes considérables : ordinairement on dépense pour acquérir ; ici la dépense nuit à l'acquisition.
Si l'on veut donc réussir à faire croître du bois dans un terrein, de quelque qualité qu'il soit, il faut imiter la nature, & il faut y planter & y semer des épines & des buissons qui puissent rompre la force du vent, diminuer celle de la gelée, & s'opposer à l'intempérie des saisons. Ces buissons sont des abris qui garantissent les jeunes plants, & les protegent contre l'ardeur du soleil & la rigueur des frimats. Un terrein couvert, ou plûtôt à demi couvert, de genievre, de bruyeres, est un bois à moitié fait, & qui peut-être a dix ans d'avance sur un terrein net & cultivé.
Pour convertir en bois un champ, ou tout autre terrein cultivé, le plus difficile est de faire du couvert. Si l'on abandonne un champ, il faut vingt ou trente ans à la nature pour y faire croître des épines & des genievres : ici il faut une culture qui dans un an ou deux puisse mettre le terrein au même état où il se trouve après une non-culture de trente ans.
Le moyen de suppléer aux labours, & presqu'à toutes les autres especes de culture, c'est de couper les jeunes plantes jusqu'auprès de terre : ce moyen, tout simple qu'il paroît, est d'une utilité infinie ; & lorsqu'il est mis en oeuvre à propos, il accélere de plusieurs années le succès d'une plantation.
Tous les terreins peuvent se réduire à deux especes ; savoir, les terreins forts & les terreins legers ; cette division, quelque vague qu'elle paroisse, est suffisante. Si l'on veut semer dans un terrein leger, on peut le faire labourer ; cette opération fait d'autant plus d'effet, & cause d'autant moins de dépense, que le terrein est plus leger, il ne faut qu'un seul labour, & on seme le gland en suivant la charrue. Comme ces terreins sont ordinairement secs & brûlans, il ne faut point arracher les mauvaises herbes que produit l'été suivant ; elles entretiennent une fraîcheur bienfaisante, & garantissent les petits chênes de l'ardeur du soleil ; ensuite venant à périr & à se sécher pendant l'autonne, elles servent de chaume & d'abri pendant l'hyver, & empêchent les racines de geler. Il ne faut donc aucune espece de culture dans ces terreins sablonneux ; il ne faut qu'un peu de couvert & d'abri pour faire réussir un semis dans les terreins de cette espece. Mais il est bien plus difficile de faire croître du bois dans des terreins forts, & il faut une pratique toute différente, dans ces terreins les premiers labours sont inutiles, & souvent nuisibles ; la meilleure maniere est de planter les glands à la pioche, sans aucune culture précédente : mais il ne faut pas les abandonner comme les premiers au point de les perdre de vûe & de n'y plus penser ; il faut au contraire les visiter souvent ; il faut observer la hauteur à laquelle ils se sont élevés la premiere année, observer ensuite s'ils ont poussé plus vigoureusement à la seconde : tant que leur accroissement va en augmentant, ou même tant qu'il se soûtient sur le même pié, il ne faut pas y toucher. Mais on s'apperçoit ordinairement à la troisieme année que l'accroissement va en diminuant ; & si on attend la quatrieme, la cinquieme, la sixieme &c. on reconnoîtra que l'accroissement de chaque année est toujours plus petit : ainsi dès qu'on s'appercevra que sans qu'il y ait eû de gelées ou d'autres accidens, les jeunes arbres commencent à croître de moins en moins, il faut les faire couper jusqu'à terre au mois de Mars, & l'on gagnera un grand nombre d'années, Le jeune arbre livré à lui-même dans un terrein fort & serré, ne peut étendre ses racines ; la terre trop dure les fait refouler sur elles-mêmes ; les petits filets tendres & herbacées qui doivent nourrir l'arbre & former la nouvelle production de l'année, ne peuvent pénétrer la substance trop ferme de la terre ; ainsi l'arbre languit privé de nourriture, & la production annuelle diminue fort souvent jusqu'au point de ne donner que des feuilles & quelques boutons. Si vous coupez cet arbre, toute la force de la seve se porte aux racines, elle en développe tous les germes, & agissant avec plus de puissance contre le terrein qui leur résiste, les jeunes racines s'ouvrent des chemins nouveaux, & divisent par le surcroît de leur force cette terre qu'elles avoient jusqu'alors vainement attaquée ; elles y trouvent abondamment des sucs nourriciers ; & dès qu'elles s'y sont, pour ainsi dire, établies, elles poussent avec vigueur au-dehors la surabondance de leur nourriture, & produisent dès la premiere année un jet plus vigoureux & plus élevé, que ne l'étoit l'ancienne tige de trois ans.
Dans un terrein qui n'est que ferme, sans être trop dur, il suffira de couper une seule fois le jeune plan pour le faire réussir.
Les auteurs d'agriculture sont bien éloignés de penser comme M. de Buffon sur ce sujet ; ils répetent tous les uns après les autres que pour avoir une futaie, pour avoir des arbres d'une belle venue, il faut bien se garder de couper le sommet des jeunes plantes, & qu'il faut conserver avec grand soin le montant, c'est-à-dire, le jet principal. Ce conseil n'est bon que dans certains cas particuliers : mais il est généralement vrai, & M. de Buffon assûre, après un très-grand nombre d'expériences, que rien n'est plus efficace pour redresser les arbres, & pour leur donner une tige droite, que la coupe faite au pié. M. de Buffon a même observé souvent que les futaies venues de graine ou de jeunes plants, n'étoient pas si belles ni si droites que les futaies venues sur de jeunes souches : ainsi on ne doit pas hésiter à mettre en pratique cette espece de culture, si facile & si peu coûteuse.
Il n'est pas nécessaire d'avertir qu'elle est encore plus indispensable lorsque les jeunes plants ont été gelés ; il n'y a pas d'autre moyen pour les rétablir que de les couper. On auroit dû, par exemple, recéper tous les taillis de deux ou trois ans qui ont été gelés au mois d'Octobre 1740 : jamais gelée d'autonne n'a fait autant de mal. La seule façon d'y remédier, c'est de couper : on sacrifie trois ans pour n'en pas perdre dix ou douze.
Le chêne & le hêtre sont les seuls arbres, à l'exception des pins & de quelques autres de moindre valeur, qu'on puisse semer avec succès dans les terreins incultes. Le hêtre peut être semé dans les terreins legers ; la graine ne peut pas sortir dans une terre forte, parce qu'elle pousse au-dehors son enveloppe au-dessus de la tige naissante ; ainsi il lui faut une terre meuble & facile à diviser, sans quoi elle reste & pourrit. Le chêne peut être semé dans presque tous les terreins. M. de Buffon a donné en 1739, dans les Mémoires de l'Académie, les différens procédés suivant les différens terreins. Toutes les autres especes d'arbres peuvent être élevées en pépiniere, & ensuite transplantées à l'âge de deux ou trois ans.
Il faut éviter de mettre ensemble les arbres qui ne se conviennent pas : le chêne craint le voisinage des pins, des sapins, des hêtres, & de tous les arbres qui poussent de grosses racines dans la profondeur du sol. En général, pour tirer le plus d'avantage d'un terrein, il faut planter ensemble les arbres qui tirent la substance du fond en poussant leurs racines à une grande profondeur, & d'autres arbres qui puissent tirer leur nourriture presque de la surface de la terre, comme sont tous les arbres dont les racines s'étendent & courent à quelques pouces seulement de profondeur, sans pénétrer plus avant.
Lorsqu'on veut semer du bois, il faut attendre une année abondante en glands, non-seulement parce qu'ils sont meilleurs & moins chers, mais encore parce qu'ils ne sont pas dévorés par les oiseaux, les mulots & les sangliers, qui trouvant abondamment du gland dans les forêts, ne viendront pas attaquer votre semis : ce qui ne manque jamais d'arriver dans des années de disette.
BOIS ; accroissement du bois ; formation du bois ; texture du bois ; force & résistance du bois. Une semence d'arbre, un gland qu'on jette en terre au printems, produit au bout de quelques semaines un petit jet tendre & herbacée, qui augmente, s'étend, grossit, durcit, & contient déjà dès la premiere année un filet de substance ligneuse. A l'extrémité de ce petit arbre est un bouton qui s'épanoüit l'année suivante, & dont il sort un second jet semblable à celui de la premiere année, mais plus vigoureux, qui grossit & s'étend davantage, durcit dans le même tems, & produit aussi à son extrémité supérieure un autre bouton qui contient le jet de la troisieme année, & ainsi des autres, jusqu'à ce que l'arbre soit parvenu à toute sa hauteur : chacun de ces boutons est une semence qui contient le petit arbre de chaque année. L'accroissement des arbres en hauteur se fait donc par plusieurs productions semblables & annuelles ; desorte qu'un arbre de cent piés de haut est composé dans sa longueur de plusieurs petits arbres mis bout à bout ; le plus grand n'a pas souvent deux piés de longueur. Tous ces petits arbres de chaque année ne changent jamais de hauteur, ils existent dans un arbre de cent ans sans avoir grossi ni grandi ; ils sont seulement devenus plus solides. Voilà comment se fait l'accroissement en hauteur ; l'accroissement en grosseur en dépend. Ce bouton qui fait le sommet du petit arbre de la premiere année, tire sa nourriture à-travers la substance & le corps même de ce petit arbre : mais les principaux canaux qui servent à conduire la seve se trouvent entre l'écorce & le filet ligneux. L'action de cette seve en mouvement dilate ces canaux & les fait grossir, tandis que le bouton en s'élevant les tire & les allonge : de plus la seve en y coulant continuellement y dépose des parties fixes, qui en augmentent la solidité ; ainsi dès la seconde année un petit arbre contient déjà dans son milieu un filet ligneux en forme de cone fort allongé, qui est la production en bois de la 1re. année, & une couche ligneuse aussi conique, qui enveloppe ce premier filet & le surmonte, & qui est la production de la seconde année. La troisieme couche se forme comme la seconde ; il en est de même de toutes les autres, qui s'enveloppent successivement & continuellement ; desorte qu'un gros arbre est un composé d'un grand nombre de cones ligneux, qui s'enveloppent & se recouvrent tant que l'arbre grossit. Lorsqu'on vient à l'abattre, on compte aisément sur la coupe transversale du tronc le nombre de ces cones, dont les sections forment des cercles concentriques ; & on reconnoît l'âge de l'arbre par le nombre de ces cercles ; car ils sont distinctement séparés les uns des autres. Dans un chêne vigoureux l'épaisseur de chaque couche est de deux ou trois lignes ; cette épaisseur est d'un bois dur & solide : mais la substance qui unit ensemble ces cones ligneux n'est pas à beaucoup près aussi ferme ; c'est la partie foible du bois dont l'organisation est différente de celle des cones ligneux, & dépend de la façon dont ces cones s'attachent & s'unissent les uns aux autres, que M. de Buffon explique en deux mots. Les canaux longitudinaux qui portent la nourriture au bouton, non-seulement prennent de l'étendue & acquierent de la solidité par l'action & le dépôt de la seve, mais ils cherchent encore à s'étendre d'une autre façon ; ils se ramifient dans toute leur longueur, & poussent de petits fils, qui d'un côté vont produire l'écorce, & de l'autre vont s'attacher au bois de l'année précédente, & forment entre les deux couches du bois un tissu spongieux, qui coupé transversalement, même à une assez grande épaisseur, laisse voir des petits trous, à peu près comme on en voit dans la dentelle. Les couches du bois sont donc unies les unes aux autres par une espece de réseau ; ce réseau n'occupe pas à beaucoup près autant d'espace que la couche ligneuse ; il n'a que demi-ligne ou environ d'épaisseur.
Par cette simple exposition de la texture du bois, on voit que la cohérence longitudinale doit être bien plus considérable que l'union transversale : on voit que dans les petites pieces de bois, comme dans un barreau d'un pouce d'épaisseur, s'il se trouve quatorze ou quinze couches ligneuses, il y aura treize ou quatorze cloisons, & que par conséquent ce barreau sera moins fort qu'un pareil barreau qui ne contiendra que cinq ou six couches, & quatre ou cinq cloisons. On voit aussi que dans ces petites pieces, s'il se trouve une ou deux couches ligneuses qui soient tranchées, ce qui arrive souvent, leur force sera considérablement diminuée : mais le plus grand défaut de ces petites pieces de bois, qui sont les seules sur lesquelles on ait fait des expériences, c'est qu'elles ne sont pas composées comme les grosses pieces. La position des couches ligneuses & des cloisons dans un barreau est fort différente de la position de ces mêmes couches dans une poutre : leur figure est même différente, & par conséquent on ne peut pas estimer la force d'une grosse piece par celle d'un barreau. Un moment de réflexion fera sentir ce que je viens de dire. Pour faire une poutre il ne faut qu'équarrir l'arbre, c'est-à-dire enlever quatre segmens cylindriques d'un bois blanc & imparfait qu'on appelle aubier : le coeur de l'arbre, la premiere couche ligneuse reste au milieu de la piece ; toutes les autres couches enveloppent la premiere en forme de cercles ou de couronnes cylindriques ; le plus grand de ces cercles entiers a pour diametre l'épaisseur de la piece, au-delà de ce cercle tous les autres sont tranchés, & ne forment plus que des portions de cercle qui vont toûjours en diminuant vers les arêtes de la piece ; ainsi une poutre quarrée est composée d'un cylindre continu de bon bois bien solide, & de quatre portions angulaires tranchées d'un bois moins solide & plus jeune. Un barreau tiré du corps d'un gros arbre, ou pris dans une planche, est tout autrement composé : ce sont de petits segmens longitudinaux des couches annuelles, dont la courbure est insensible ; des segmens qui tantôt se trouvent posés parallelement à une des surfaces du barreau, & tantôt plus ou moins inclinés ; des segmens qui sont plus ou moins longs & plus ou moins tranchés, & par conséquent plus ou moins forts : de plus il y a toûjours dans un barreau deux positions, dont l'une est plus avantageuse que l'autre ; car ces segmens de couches ligneuses forment autant de plans paralleles : si vous posez le barreau ensorte que ces plans soient verticaux, il résistera davantage que dans une position horisontale ; c'est comme si on faisoit rompre plusieurs planches à la fois, elles résisteroient bien davantage étant posées sur le côté, que sur le plat. Ces remarques font déjà sentir combien on doit peu compter sur les tables calculées ou sur les formules que différens auteurs nous ont données de la force du bois, qu'ils n'avoient éprouvées que sur des pieces, dont les plus grosses étoient d'un ou deux pouces d'épaisseur, & dont ils ne donnent ni le nombre des couches ligneuses que ces barreaux contenoient, ni la position de ces couches, ni le sens dans lequel se sont trouvées ces couches lorsqu'ils ont fait rompre le barreau ; circonstances cependant essentielles, comme on le verra par les expériences de M. de Buffon, & par les soins qu'il s'est donnés pour découvrir les effets de toutes ces différences. Les Physiciens qui ont fait quelques expériences sur la force du bois, n'ont fait aucune attention à ces inconvéniens : mais il y en a d'autres, peut-être encore plus grands, qu'ils ont aussi négligé de prévoir & de prévenir. Le jeune bois est moins fort que le bois plus âgé ; un barreau tiré du pié d'un arbre, résiste davantage qu'un barreau qui vient du sommet du même arbre ; un barreau pris à la circonférence près de l'aubier, est moins fort qu'un pareil morceau pris au centre de l'arbre : d'ailleurs le degré de desséchement du bois fait beaucoup à la résistance ; le bois vert casse bien plus difficilement que le bois sec. Enfin le tems qu'on employe à charger les bois pour les faire rompre, doit aussi entrer en considération ; parce qu'une piece qui soûtiendra pendant quelques minutes un certain poids, ne pourra pas soûtenir ce même poids pendant une heure ; & M. de Buffon a trouvé que des poutres qui avoient chacune supporté sans se rompre, neuf milliers pendant un jour, avoient rompu au bout de cinq à six mois sous la charge de six milliers, c'est-à-dire qu'elles n'avoient pas pû porter pendant six mois les deux tiers de la charge qu'elles avoient portées pendant un jour. Tout cela prouve assez combien les expériences que l'on a faites sur cette matiere sont imparfaites ; & peut-être cela prouve aussi qu'il n'est pas trop aisé de les bien faire. M de Buffon, auteur des mémoires dont nous avons tiré tout ce que nous avons dit jusqu'ici, a fait une infinité d'expériences pour connoître la force du bois : la premiere remarque qu'il a faite, c'est que le bois ne casse jamais sans avertir, à moins que la piece ne soit fort petite. Le bois vert casse plus difficilement que le bois sec ; & en général le bois qui a du ressort résiste beaucoup plus que celui qui n'en a pas : l'aubier, le bois des branches, celui du sommet de la tige d'un arbre, tout le bois jeune est moins fort que le bois plus âgé. La force du bois n'est pas proportionnelle à son volume ; une piece double ou quadruple d'une autre piece de même longueur, est beaucoup plus du double ou du quadruple plus forte que la premiere : par exemple, il ne faut pas quatre milliers pour rompre une piece de dix piés de longueur, & de quatre pouces d'équarrissage ; & il en faut dix pour rompre une piece double ; & il faut vingt-six milliers pour rompre une piece quadruple, c'est-à-dire une piece de dix piés de longueur sur huit pouces d'équarrissage. Il en est de même pour la longueur : il semble qu'une piece de huit piés, & de même grosseur qu'une piece de seize piés, doit par les regles de la Méchanique porter juste le double ; & cependant elle porte beaucoup plus du double. M. de Buffon qui auroit pû donner des raisons physiques de tous ces faits, se borne à donner des faits : le bois qui dans le même terrein croît le plus vîte, est le plus fort ; celui qui a crû lentement, & dont les cercles annuels, autrement les couches ligneuses sont minces, est moins fort que l'autre.
M. de Buffon a trouvé que la force du bois est proportionnelle à sa pesanteur ; desorte qu'une piece de même longueur & grosseur, mais plus pesante qu'une autre piece, sera aussi plus forte à-peu-près en même raison. Cette remarque donne les moyens de comparer la force du bois qui vient de différens pays & de différens terreins, & étend infiniment l'utilité des expériences de M. de Buffon : car lorsqu'il s'agira d'une construction importante ou d'un ouvrage de conséquence, on pourra aisément au moyen de sa table, & en pesant les pieces, ou seulement des échantillons de ces pieces, s'assûrer de la force du bois qu'on employe ; & on évitera le double inconvénient d'employer trop ou trop peu de cette matiere, que souvent on prodigue mal-à-propos, & que quelquefois on ménage avec encore moins de raison.
Pour essayer de comparer les effets du tems sur la résistance du bois, & pour reconnoître combien il diminue de sa force, M. de Buffon a choisi quatre pieces de dix-huit piés de longueur sur sept pouces de grosseur ; il en a fait rompre deux, qui en nombre rond ont porté neuf milliers chacune pendant une heure ; il a fait charger les deux autres de six milliers seulement, c'est-à-dire des deux tiers, & il les a laissé ainsi chargées, résolu d'attendre l'évenement : l'une de ces pieces a cassé au bout de trois mois & vingt-six jours ; l'autre au bout de six mois & dix-sept jours. Après cette expérience il fit travailler deux autres pieces toutes pareilles, & il ne les fit charger que de la moitié, c'est-à-dire de quatre mille cinq cent ; M. de Buffon les a tenues plus de deux ans ainsi chargées ; elles n'ont pas rompu, mais elles ont plié assez considérablement. Ainsi dans des bâtimens qui doivent durer long-tems, il ne faut donner au bois tout au plus que la moitié de la charge qui peut le faire rompre ; & il n'y a que dans des cas pressans, & dans des constructions qui ne doivent pas durer, comme lorsqu'il faut faire un pont pour passer une armée, ou un échafaud pour secourir ou assaillir une ville, qu'on peut hasarder de donner au bois les deux tiers de sa charge.
Tous les auteurs qui ont écrit sur la résistance des solides en général, & du bois en particulier, ont donné comme fondamentale la regle suivante : La résistance est en raison inverse de la longueur, en raison directe de la largeur, & en raison doublée de la hauteur. Cette regle est celle de Galilée, adoptée par tous les Mathématiciens, & elle seroit vraie pour tous les solides qui seroient absolument inflexibles, & qui romproient tout-à-coup : mais dans les solides élastiques, tels que le bois, il est aisé d'apercevoir que cette regle doit être modifiée à plusieurs égards. M. Bernoulli a fort bien observé que dans la rupture des corps élastiques une partie des fibres s'allonge, tandis que l'autre partie se raccourcit, pour ainsi dire, en refoulant sur elle-même. Voyez son mémoire dans ceux de l'académie, année 1705. On voit par les expériences précédentes, que dans les pieces de la même grosseur, la regle de la résistance en raison inverse de la longueur, s'observe d'autant moins, que les pieces sont plus courtes. Il en est tout autrement de la regle de la résistance en raison directe de la largeur & du quarré de la hauteur. M. de Buffon a calculé la table septieme, à dessein de s'assûrer de la variation de cette regle ; on voit dans cette table les résultats des expériences, & au-dessous les produits que donne cette regle ; il a pris pour unités les expériences faites sur les pieces de cinq pouces d'équarrissage, parce qu'il en a fait un plus grand nombre sur cette dimension que sur les autres. On peut observer sur cette table, que plus les pieces sont courtes, & plus la regle approche de la vérité ; & que dans les plus longues pieces, comme celles de 18 & de 20 piés, elle s'en éloigne ; cependant, à tout prendre, on peut se servir de la regle générale avec les modifications nécessaires pour calculer la résistance des pieces de bois plus grosses & plus longues que celles dont M. de Buffon a éprouvé la résistance ; car en jettant les yeux sur cette septieme table, on voit un grand accord entre la regle & les expériences pour les différentes grosseurs, & il regne un ordre assez constant dans les différences par rapport aux longueurs & aux grosseurs, pour juger de la modification qu'on doit faire à cette regle. Voyez RESISTANCE.
TABLE DES EXPERIENCES.
SUR LA FORCE DU BOIS.
Premiere Table, pour les pieces de quatre pouces d'équarrissage.
Seconde Table, pour les pieces de cinq pouces d'équarrissage.
Troisieme Table, pour les pieces de six pouces d'équarrissage.
Quatrieme Table, pour les pieces de sept pouces d'équarrissage.
Cinquieme Table, pour les pieces de huit pouces d'équarrissage.
Sixieme Table, pour les charges moyennes de toutes les expériences précédentes.
Septieme Table. Comparaison de la résistance du bois, trouvée par les expériences précédentes, & de la résistance du bois suivant la regle que cette résistance est comme la largeur de la piece, multipliée par le quarré de sa hauteur, en supposant la même longueur.
Nota. Les astérismes marquent que les expériences n'ont pas été faites.
Le bois sur pié prend différentes dénominations selon ses différentes qualités. Il s'appelle :
BOIS ARSIN, lorsqu'il a été maltraité par le feu.
BOIS BLANC. Voyez BLANC-BOIS.
BOIS BOMBE, s'il a quelque courbure naturelle.
BOIS CARIE ou VICIE, s'il a des malandres ou noeuds pourris.
BOIS CHAMBLIS, quand il a été maltraité par les vents, soit qu'il ait été déraciné & renversé, soit que les branches seulement en ayent été rompues.
BOIS CHARME, lorsqu'il a reçû quelque dommage dont la cause n'est pas apparente, & qu'il menace de périr ou de tomber.
BOIS EN DEFENDS, lorsqu'il est défendu de le couper, & qu'ayant été reconnu de belle venue, on veut lui laisser perdre tout son accroissement. Ces défends ne sont gueres d'usage que dans les grandes forêts ou les bois dégradés ou trop jeunes, pour qu'on en puisse faire usage. Les taillis sont en défends de droit jusqu'à cinq & six ans. Le défends s'étend toujours aux chevres, cochons, moutons, & autres animaux mal-faisans, hormis le tems de la glandée pour les cochons.
BOIS DEFENSABLE, lorsqu'il est permis, par celui à qui il appartient de permettre de faire les coupes & paissons convenables, parce qu'il est en état de résister.
BOIS ENCROUE, lorsqu'il a été renversé sur d'autres en l'abattant, & que ses branches se sont entrelacées avec les branches des arbres sur lesquels il est tombé.
L'ordonnance défend d'abattre les bois sur lesquels d'autres sont encroüés.
BOIS EN ETANT, quand il est debout.
BOIS A FAUCILLON, lorsqu'il s'agit d'un petit taillis qu'on peut abattre à la serpette.
BOIS GELIF, s'il a des gerçures ou fentes causées par la gelée.
BOIS MARMENTAUX ou DE TOUCHE, lorsqu'ils entourent un château, une maison, un parterre, & qu'ils lui servent d'ornement. Les usufruitiers n'en peuvent disposer.
BOIS MORT, s'il ne végete plus soit qu'il tienne à l'arbre soit qu'il en ait été séparé. Voyez MORT BOIS.
BOIS MORT EN PIE, s'il est pourri sur pié, sans substance, & bon seulement à brûler.
BOIS EN PUEIL, si c'est un bois qui a été nouvellement coupé, & qui n'ait pas encore trois ans, il est défendu d'y laisser entrer aucun bétail.
BOIS RABOUGRI, s'il est malfait, tortu, & de mauvaise venue.
BOIS RECEPE, quand sur quelque défaut qu'on lui a remarqué, on l'a coupé par le pié pour l'avoir plus promtement & de plus belle venue.
BOIS SUR LE RETOUR, lorsqu'il est trop vieux, qu'il commence à diminuer de prix, & que les chênes ont plus de deux cent ans.
BOIS DE HAUT REVENU, s'il est de demi-futaie de 40 à 60 ans.
BOIS VIF, quand il porte fruit & qu'il vit, comme le chêne, le hêtre, le châtaigner, & autres qui ne sont point compris dans les morts-bois.
Le bois abattu ou pris selon la premiere acception du terme bois ou relativement aux usages qu'on en fait dans la société, peut se distribuer en bois de charpente, de sciage, de charronage, & de chauffage.
Des bois de charpente. La provision des bois de charpente, pour la fourniture de Paris, se fait par trois sortes de marchands, les forains domiciliés, les forains qui vendent en arrivant, & les regrattiers, qui ont leurs magasins dans la ville & les fauxbourgs, mais ailleurs que sur les ports. Ces marchands forment trois corps séparés, mais sans communauté ni entr'eux ni en particulier. C'est un commerce libre. L'île Louvier a été le lieu d'abordage des bois à bâtit. Tous les marchands ont eu le même droit d'y descendre. Chacun prenoit la place qui lui convenoit, sans payer de droit, observant seulement de ne pas occuper trop de terrein. Les forains domiciliés tiennent en tout tems leur chantier ouvert pour le service du bourgeois ; il n'est sujet à aucune visite de police : le forain non domicilié est obligé de tenir port pendant trois jours, afin de donner le tems au bourgeois de se pourvoir ; les charpentiers & menuisiers ont la préférence sur les regrattiers, & peuvent même rompre leur marché. Le regrattier peut faire exploiter pour son compte : mais il ne peut laisser son bois sur les ports ; il faut qu'il le fasse entrer dans ses chantiers immédiatement après l'achat.
Le commerce des bois, soit de chauffage, de charpente ou de menuiserie, pris en grand & dans la forêt, demande une grande expérience : on peut y perdre ou y gagner beaucoup ; le moindre mécompte sur l'étendue du terrein, la quantité des bois, leur qualité, l'exploitation & le transport, tirent à des conséquences immenses ; & tel marchand croit sa fortune faite, tant que son bois est sur pié, qui se trouve à moitié ruiné quand il est abattu.
Le bois de chêne est le meilleur de tous les bois pour la charpente, à cause qu'il ne pourrit point facilement quand il est employé sur terre & dans l'eau, & qu'il est plus fort que les autres bois.
Le bois de châtaigner est bon pour les mêmes ouvrages, pourvû qu'il soit à couvert. La plûpart des anciens édifices ont leur charpente de ce bois.
Le bois d'aune ne pourrit point non plus dans l'eau, ce qui fait qu'on en fait des tuyaux de pompes & de conduites d'eau.
Les chênes, pour pouvoir en faire du bois bon pour l'usage de la charpenterie, ne doivent point être abattus avant soixante ans, & plus tard que deux cent ans ; parce que passé deux cent ans, ce bois dépérit, & qu'avant soixante ans il est trop jeune.
Dans la charpente on employe de deux sortes de bois, le bois de brin & le bois de sciage.
Le bois de brin est celui qui se fait en ôtant les quatre dosses & le flache d'un arbre en l'équarrissant.
Le bois de sciage se tire ordinairement des bois courts & trop gros, ou des pieces moins saines. On en parlera plus au long ci-dessous.
Le bois de chêne qu'on nomme bois gras ou doux, est celui qui est moins poreux & sans fil, & a moins de noeuds que le bois ferme ; il n'est bon pour l'usage des menuisiers, que pour faire des panneaux & des assemblages qui ne fatiguent point ; car il ne vaut rien pour les bâtis de portes, & tout ce qui peut souffrir la moindre fatigue.
Le bois dur ou rustique, est celui qui a le fil gros. Il vient dans les terres fortes & fonds pierreux & sablonneux, & au bord des forêts.
Les bois legers sont les bois blancs, comme sapins, tilleuls, trembles, &c. Les charpentiers ne s'en servent que dans les cloisons au défaut du chêne.
BOIS, un cent de bois ; c'est, en terme de Charpentier, soixante-douze pouces de longueur sur six pouces d'équarrissage. Tout le bois de charpente se réduit à cette mesure, & une seule poutre est comptée pour autant d'autres, qu'elle contient de fois cette mesure, soit pour la vente, soit pour la voiture, soit pour le toisé.
Le bois de charpente prend différentes dénominations selon ses différentes qualités ; il s'appelle
BOIS AFFOIBLI, quand on a diminué considérablement la forme d'équarrissage, en le rendant difforme, courbe, ou rampant, pour laisser des bossages aux poinçons, ou des encorbellemens aux poteaux sous les poutres qui portent dans les cloisons. Au reste ce bois se toise dans le plus gros du bossage.
BOIS APPARENT, lorsqu'étant en oeuvre, comme dans les ponts de bois, planchers, cloisons, &c. il n'est point recouvert de plâtre ou autre matiere.
BOIS BLANC, quand il tient de la nature de l'aubier, & se corrompt facilement.
BOIS BOUGE, quand il a du bombement, ou qu'il est courbé en quelque endroit.
BOIS CANTIBAN, lorsqu'il n'a du flache que d'un côté.
BOIS CORROYE, quand il a été dressé à la varlope ou au rabot.
BOIS DECHIRE, celui qui revient de quelque ouvrage mis en pieces, pour raison de vétusté ou autre.
BOIS DEVERSE ou GAUCHI, lorsqu'après avoir été travaillé & équarri il n'a pas conservé la forme qu'on lui a donnée, mais s'est dejetté, courbé, incliné & déformé de quelque maniere & par quelque cause que ce soit.
BOIS D'ECHANTILLON, quand les pieces de bois sont d'une grosseur & longueur déterminée.
BOIS ECHAUFFE ; lorsqu'il commence à se gâter & à pourrir, & qu'on lui remarque de petites taches rouges & noires, ce sont ces sortes de bois que quelques-uns appellent bois pouilleux.
BOIS D'ENTREE, s'il est entre verd & sec.
BOIS D'EQUARRISSAGE, quand il est propre à recevoir la forme d'un parallelepipede : il ne s'équarrit point de bois au-dessous de six pouces de gros.
BOIS FLACHE, quand il ne pourroit être bien équarri sans beaucoup de déchet, & que les arêtes n'en sont point vives.
BOIS GISANT, lorsqu'il est coupé, abattu & couché sur terre.
BOIS EN GRUME, s'il n'est point équarri, & si on l'employe de toute sa grosseur, par exemple, en pieux appellés pilotis.
BOIS LAVE, quand on lui a ôté tous les traits de scie & rencontre, avec la besaiguë.
BOIS MOULINE, s'il est pourri & rongé des vers.
BOIS qui se tourmente, lorsqu'il se déjette, étant employé trop verd ou trop humide.
BOIS REFAIT, quand de gauche & flache qu'il étoit, il est équarri & redressé au cordeau sur ses faces.
BOIS DE REFEND, lorsqu'on l'a mis par éclat pour faire le merrein, les lattes, les échalats, du boisseau, &c.
BOIS ROUGE, s'il s'échauffe, & s'il est sujet à pourrir.
BOIS ROULE, quand les cernes ou crues de chaque année sont séparées, & ne font point de corps ; ce bois n'est bon qu'à brûler. On dit que le bois devient roulé, lorsqu'étant en séve il est battu par le vent.
BOIS SAIN & NET, lorsqu'il est sans malandres, noeuds vicieux, gale, fistule.
BOIS TORTU, quand il ne peut servir qu'à faire des courbes, & n'est bon que pour la marine.
BOIS TRANCHE, s'il a des noeuds vicieux ou fils obliques qui coupent la piece, & la rendent peu propre à résister à la charge & à être refendu.
BOIS VERMOULU, s'il est piqué de vers.
BOIS VIF, lorsque les arêtes en sont bien vives & sans flache, & qu'il ne lui reste ni écorce ni aubier.
BOIS DE CHARRONAGE : on comprend sous cette dénomination tout celui qui est employé par les Charrons à faire des charrettes, des roues, &c. comme l'orme, le frêne, le charme, & l'érable ; la meilleure partie s'en débite en grume. Voyez les articles de ces bois.
BOIS DE CHAUFFAGE ; le bois de chauffage est neuf ou flotté. Les marchands de bois neuf sont ceux qui embarquent sur les ports des rivieres navigables des bois qui y ont été amenés par charroi ; & ils les empilent ensuite en théatre, comme on le voit sur les ports, & autres places dont la ville de Paris leur a accordé l'usage. Voyez CHANTIER. Ces sortes de marchands ne font guere que le tiers de la provision de cette ville, &c.
Les marchands de bois flotté sont ceux qui font venir leurs bois des provinces plus éloignées. Ils les jettent d'abord à bois perdu sur les ruisseaux qui entrent dans les rivieres sur lesquelles ce commerce est établi ; ensuite ces mêmes rivieres les amenent elles-mêmes encore à bois perdu jusqu'aux endroits où il est possible de les mettre en trains, pour les conduire à Paris ; après néanmoins les avoir retirés de l'eau avant de les flotter en train, & les avoir fait sécher suffisamment, sans quoi le bois iroit à fond. Ces marchands font les deux autres tiers de la provision.
Il y a quelques siecles que l'on étoit dans l'appréhension que Paris ne manquât un jour de bois de chauffage ; les forêts des environs se détruisoient, & l'on prévoyoit qu'un jour il faudroit y transporter le bois des provinces éloignées ; ce qui rendroit cette marchandise si utile & d'un usage si général, d'un prix exorbitant occasionné par le coût des charrois. Si l'on eût demandé alors à la plûpart de ceux qui sentent le moins aujourd'hui le mérite de l'invention du flottage des bois, comment on pourroit remédier au terrible inconvénient dont on étoit menacé, ils y auroient été, je crois, bien embarrassés ; l'accroissement & l'entretien des forêts eussent été, selon toute apparence, leur unique ressource. C'est en effet à ces moyens longs, coûteux & pénibles, que se réduisit alors toute la prudence du gouvernement ; & la capitale étoit sur le point de devenir beaucoup moins habitée par la cherté du bois, lorsqu'un nommé Jean Rouvet, bourgeois de Paris ; imagina en 1549 de rassembler les eaux de plusieurs ruisseaux & rivieres non navigables ; d'y jetter les bois coupés dans les forêts les plus éloignées ; de les faire descendre ainsi jusqu'aux grandes rivieres ; là, d'en former des trains & de les amener à flot, & sans bateaux, jusqu'à Paris. J'ose assurer que cette invention fut plus utile au royaume, que plusieurs batailles gagnées, & méritoit des honneurs autant au moins qu'aucune belle action. Jean Rouvet fit ses premiers essais dans le Morvant ; il rassembla tous les ruisseaux de cette contrée ; fit couper ses bois, & les abandonna hardiment au courant des eaux : il réussit. Mais son projet traité de folie avant l'exécution, & traversé après le succès, comme c'est la coûtume, ne fut porté à la perfection & ne reçut toute l'étendue dont il étoit susceptible, qu'en 1566, par René Arnoul. Voyez à l'article TRAIN, la maniere de les construire. Ceux qui voyent arriver à Paris ces longues masses de bois, sont effrayés pour ceux qui les conduisent, à leur approche des ponts : mais il n'y en a guere qui remontent jusqu'à l'étendue des vûes & à l'intrépidité du premier inventeur, qui osa rassembler des eaux à grands frais, & y jetter ensuite le reste de sa fortune.
Entre les marchands de bois flotté, les uns sont bourgeois, les autres forains ; il y a beaucoup plus de bourgeois que de forains, qui fassent le commerce du bois, qui vient du pays d'amont ; au contraire il y a beaucoup plus de forains que de bourgeois, qui fassent le commerce du pays d'aval.
Tout ce qui concerne le bois de chauffage se réduit à sa façon, au tems de le tirer des ventes, à sa voiture & à son déchargeage, à la diligence de voiture, à son arrivée, à sa vente dans les chantiers, & aux officiers qui y veillent.
Façon. Il est enjoint de donner à tous les bois à brûler, trois piés & demi de longueur ; au bois de moule, dix-huit pouces de tour ; au bois de corde de quartier ou de traverse, autant. Si le bois de quartier, de traverse, ou fendu, a dix-huit pouces de tour, il se mesure au moule ; s'il n'en a que dix-sept, il va avec le bois de corde dans la membrure. Le bois taillis doit avoir six pouces de tour. Le bois d'Andelle a la même grosseur : mais il est plus court ; il n'a que deux piés & demi ou environ.
Sortie des ventes. Les marchands sont tenus de faire couper & sortir les bois des ventes, dans les tems qui leur auront été fixés, eu égard aux lieux & à la qualité des arpens.
Voitures. Il est permis de voiturer depuis les forêts jusqu'aux rivieres, à-travers toutes terres, en avertissant dix jours auparavant par des publications aux prônes ; de jetter les bois dans les rivieres ; de les pousser par les ruisseaux, étangs, fossés de châteaux, &c. sans qu'ils en puissent être empêchés par qui que ce soit.
Diligence. Il est défendu de séjourner en chemin sans nécessité, & de décharger ailleurs qu'à Paris.
Vente. Il est enjoint de les mettre en chantier, & ils ne peuvent être vendus ailleurs.
Officiers. La Ville commet des personnes à elle pour veiller à cette distribution. Toute la différence qu'il y a entre le bois de chauffage soit neuf, soit flotté, se tire de la taille, de la voiture, & de la mesure.
Relativement à la taille, il se distribue en gros bois & en menu bois ; à la voiture, en bois neuf & en bois flotté ; à la mesure, en bois de moule & de compte, & en bois de corde.
Tous le gros bois est compris sous le nom générique de bûches ; chaque bûche, de quelque bois que ce soit, doit avoir, ainsi que nous l'avons déja dit, trois piés & demi de long.
Les plus grosses bûches sont nommées bois de moule, ou de moulure, ou de compte ; parce qu'elles se mesurent dans le moule ou l'anneau. Voyez ANNEAU. Elles doivent avoir dix-huit pouces de tour.
Le bois de traverse suit immédiatement en grosseur le bois de compte ou de moule ; il doit avoir dix-sept pouces de tour. Il y en a qui comprennent sous la même dénomination tout le bois blanc.
On appelle bois taillis, tout celui qui n'a que cinq à six pouces de tour.
Le bois de corde, doit avoir au moins dix-sept pouces ; il est appellé bois de corde, parce que les Bucherons plantent à la corde quatre pieux en quarré, dont le côté a huit piés, & chaque pieu a quatre piés de haut. C'est-là leur mesure ou corde qui contient, comme on voit, quatre fois 64 ou 256 piés cubes de bois. Cette méthode de mesurer le bois a duré jusqu'en 1641, qu'il fut ordonné de se servir d'une membrure de charpente, qui retint le nom de corde. Voyez CORDE. Voyez MEMBRURE.
Le menu bois est ou coteret, ou fagot, ou bourrée.
Il y a des coterets de bois taillis fendu, ou des coterets de bois rond.
Ceux-ci viennent par l'Yonne : mais ils doivent avoir les uns & les autres neuf piés de long, sur dix-sept à dix-huit pouces de tour.
Les fagots sont faits de branches d'arbres menues. Ils doivent avoir trois piés & demi de long, sur dix-sept à dix-huit pouces de tour.
La bourrée, qui est une espece de fagot, est faite de brossailles d'épines & de ronces, &c.
Voici encore quelques dénominations qu'on donne au bois de chauffage.
BOIS EN CHANTIER, est celui qui est en pile ou en magasin ; on nomme ordinairement ces sortes de piles théatre.
BOIS FLOTTE, est celui qu'on lie avec des rouelles & des perches, & que l'on amene en train sur des rivieres. Voyez TRAIN.
BOIS PERDU, est celui qu'on jette dans les petites rivieres qui n'ont pas assez d'eau pour porter ni train ni bateau, & qu'on va recueillir & mettre en train aux lieux où ces rivieres commencent à porter.
BOIS CANARDS, sont ceux qui demeurent au fond de l'eau, ou qui s'arrêtent aux bords des ruisseaux, où l'on a jetté une certaine quantité de bois, bûche à bûche, pour le laisser aller au courant de l'eau. Après que ces bûches sont arrivées au lieu où le ruisseau est devenu une riviere navigable, les marchands peuvent faire pêcher leurs bois canards pendant 40 jours sans rien payer. Voyez l'Ordonnance de 1672.
BOIS VOLANS, sont ceux que le flot amene droit au port.
BOIS ECHAPPES, sont ceux que les inondations portent dans les prés ou dans les terres.
BOIS NEUF, est celui qu'on apporte dans des bateaux sans qu'il ait trempé dans l'eau.
BOIS PELARD, est un bois menu & rond, dont on ôte l'écorce pour faire du tan. Les Rotisseurs & Boulangers s'en servent.
BOIS DE GRAVIER, est un bois qui croît dans des endroits pierreux, & qui vient demi flotté du Nivernois & de Bourgogne ; le meilleur est de Montargis.
BOIS D'ANDELLE, ainsi nommé du nom de la riviere qui le voiture, est un bois de hêtre qui a ordinairement deux piés & demi de longueur ; il faut quatre mesures d'anneau pour la voye, & quatre bûches de témoins par anneau.
BOIS TORTILLARD ; ce bois n'est point ordinairement reçû dans les membrures à cause des vuides qu'il laisse, & le tort qui en résulte pour le public.
BOIS BOUCAN, bûches qui par vetusté ne sont plus de mesure pour être mises en membrures.
Je ne finirai point cet article du bois de chauffage, qui forme un objet presqu'aussi important, que celui de construction & de charpente, sans observer que nous sommes menacés d'une disette prochaine de l'un & l'autre ; & que la cherté seule du premier peut avoir une influence considérable sur l'état entier du royaume. Le bois de chauffage ne peut devenir extrèmement rare & d'un grand prix, sans chasser de la capitale un grand nombre de ses habitans ; or il est constant que la capitale d'un royaume ne peut être attaquée de cette maniere, sans que le reste du royaume s'en ressente. Je ne prévois qu'un remede à cet inconvénient, & ce remede est même de nature à prevenir le mal, si on l'employoit dès à présent. Quand les forêts des environs de la ville furent épuisées, il se trouva un homme qui entreprit d'y amener à peu de frais les bois des forêts éloignées, & il y réussit. Lorsque la négligence dans laquelle on persiste aura achevé de détruire les forêts éloignées, il est certain qu'on aura recours au charbon de terre ; & il est heureusement démontré qu'on en trouve presque par-tout. Mais pourquoi n'en pas chercher & ouvrir des carrieres dès aujourd'hui ? pourquoi ne pas interdire l'usage du bois à tous les états & à toutes les professions dans lesquels on peut aisément s'en passer ? car il en faudra venir là tôt ou tard ; & si l'on s'y prenoit plûtôt, on donneroit le tems à nos forêts de se restituer ; & en prenant pour l'avenir d'autres précautions que celles qu'on a prises pour le passé, nos forêts mises une fois sur un bon pié, pourroient fournir à tous nos besoins, sans que nous eussions davantage à craindre qu'elles nous manquassent. Il me semble que les vûes que je propose sont utiles : mais j'avoue qu'elles ont un grand défaut, celui de regarder plûtôt l'intérêt de nos neveux que le nôtre ; & nous vivons dans un siecle philosophique où l'on fait tout pour soi, & rien pour la postérité.
BOIS (MOULEUR DE), Police, officier de ville, commis sur les ports pour que le bois y soit fidelement mesuré dans les moules ou les membrures. V. MOULE & MEMBRURE.
BOIS (MARCHAND DE), voyez ci-dessus l'article BOIS DE CHAUFFAGE.
Bois de sciage. On entend par bois de sciage, celui qui est débité en soliveaux & coupé en planches à l'usage de la menuiserie. On comprend sous ce nom tout celui qui a moins de six pouces d'équarrissage, beaucoup de bois tendres, sur-tout pour la boiserie, le parquetage, les lambris, & plafonds. On fait façonner le bois de sciage, ou par des scieurs de long, ou dans les moulins à scie. Voyez SCIAGE.
Le bois de sciage, s'appelle :
BOIS MI-PLAT, s'il est beaucoup plus large qu'épais ; ce bois est pour l'usage de la menuiserie.
BOIS OUVRE, ou non ouvré, quand il passe ou non par les mains de l'ouvrier.
Il y a encore le bois d'ouvrage & celui de merrein.
Le bois d'ouvrage, est celui qu'on travaille dans les forêts, & dont on fait des sabots, des pelles, des seaux, des lattes, des cercles, des éclisses.
Le bois de chêne s'appelle bois de merrein, quand il est débité en petits ais ou douves pour faire des tonneaux, des cuves, des seaux, &c. Voyez MERREIN.
Il ne nous reste plus qu'à ajoûter à cet article quelques sortes de bois, parmi lesquelles il y en a qui ont peu de rapport avec les précédentes.
BOIS FOSSILE, (Hist. nat.) bois qui se trouve en terre à différentes profondeurs, où il est conservé depuis long-tems sans se pourrir. On sait assez qu'il arrive souvent des éboulemens de terre & d'autres déplacemens, qui sont occasionnés par différentes causes, & sur-tout par les tremblemens de terre, les torrens, les inondations, &c. c'est par ces accidens que les arbres sont enfoncés dans la terre. S'il se rencontre des matieres bitumineuses qui les pénétrent, alors ils ne sont plus susceptibles de pourriture, & ils se conservent dans leur entier. Les différentes combinaisons des matieres bitumineuses doivent causer des différences dans la consistance du bois fossile, dans sa couleur, son poids, &c. Voyez HOUILLE, CHARBON DE TERRE, JAYET. (I)
BOIS PETRIFIE. Voyez PETRIFICATION.
* BOIS D'ALOES. Il y a tout lieu de croire que le bois que nous appellons aujourd'hui bois d'aloès, est le même que Dioscoride a décrit sous le nom d'agallochum, & que l'on a nommé dans la suite xyloaloès. Il ne faut pas confondre le bois d'aloès avec le suc épaissi qui porte simplement le nom d'aloès, ni croire que ce suc sorte du bois d'aloès. Nous verrons dans la suite qu'on le tire de plusieurs especes de plantes aussi appellées aloès. On voit au contraire que le bois d'aloès ne peut venir que d'un arbre.
On peut distinguer trois sortes d'agallochum : la premiere est celle que les Indiens appellent calambac, c'est la plus rare & la plus précieuse, elle vient de la Cochinchine. Le calambac est tendre : il y en a de plusieurs couleurs, par lesquelles on a voulu le distinguer, & plusieurs especes. Si on le met sur les charbons ardens, il semble se fondre plûtôt que brûler, tant il est résineux ; la fumée qu'il rend est fort épaisse & de bonne odeur.
La seconde passe communément sous le nom de bois d'aloès ou bois d'aigle ; on la trouve comme la premiere dans la Cochinchine, mais il y en a aussi à Cambaye & à Sumatra : le bois d'aloès est plus commun dans ce pays-ci que le calambac, parce qu'il n'est pas si cher. Le bois d'aigle est compact & pesant ; sa substance est percée de plusieurs cavités, elle semble être cariée ; sa couleur est rousse, son goût est un peu acre & aromatique, il bouillonne sur les charbons ardens, sa fumée est d'une odeur fort agréable.
La troisieme espece d'agallochum est appellée calambour ou calambouc ; il est d'une couleur verdâtre & quelquefois rousse ; son odeur est agréable & pénétrante. On l'apporte des îles de Solor & de Temor en grosses bûches ; & on en fait des étuis, des boîtes, des chapelets, & plusieurs autres ouvrages.
On ne sait pas si ces trois especes d'agallochum viennent chacune d'un arbre particulier, ou s'il n'y a qu'une seule espece d'arbre pour les trois. Ce dernier sentiment a été soûtenu par plusieurs botanistes : ils ont assûré que l'arbre ressembloit à un olivier, & qu'il portoit des petits fruits rouges.
On dit que les Indiens laissent les troncs de ces arbres dans la boue, pour faire pourrir l'écorce & l'aubier ; il ne reste que le coeur, qui prend seulement une couleur brune, & qu'il conserve par la résine qu'il contient. On a prétendu que ce bois étant sur pié ou coupé récemment, rendoit un suc laiteux d'une mauvaise qualité : s'il entroit dans les yeux, on en perdoit la vûe ; s'il en tomboit sur la peau, il s'élevoit des boutons. On a vû que ce suc étant épaissi & desséché formoit la résine qui préserve de la pourriture les parties du bois auxquelles il s'attache. Celles qui en contiennent une grande quantité sont le vrai calambac : on dit qu'elles se trouvent ordinairement au pié du tronc. D'autres assûrent qu'il faut que les arbres se dessechent & se pourrissent d'eux-mêmes sur les montagnes, pour former du calambac. Quoi qu'il en soit, il est certain que ce bois est fort rare, même chez les Indiens, puisqu'ils l'achetent souvent au poids de l'argent, & même de l'or. Ils l'estiment beaucoup à cause de la bonne odeur qu'il rend lorsqu'on le brûle ; c'est un parfum délicieux qu'ils réservent pour les temples des dieux & pour les palais des rois. Si le bois d'aloès n'a pas une aussi bonne odeur que le calambac, on ne laisse pas que d'en faire grand cas dans ce pays-ci.
Il a une qualité chaude & dessicative, il est cordial, il fortifie les nerfs & le cerveau, il ranime les esprits, il prévient les défaillances & les maladies de la matrice ; on le fait entrer dans les cordiaux & dans la thériaque.
On l'employe dans les boutiques de Paris au lieu de l'aspalath.
* BOIS DE RHODES. On soupçonne que le bois de Rhodes étoit l'aspalath des anciens : mais ce n'est qu'une conjecture, les anciens n'étant pas même d'accord sur l'aspalath. Les modernes ont prétendu que c'étoit l'agallochum, le bois d'aloès, ou le bois de Rhodes ; aujourd'hui on ne sait pas encore précisément ce que c'est que le bois de Rhodes.
Celui auquel on donne aujourd'hui ce nom, est jaunâtre lorsqu'il est nouvellement coupé ; sa couleur devient brune avec le tems. Il est dur, compact, noüeux, & résineux ; il a une odeur de rose, c'est pour cela qu'on l'a appellé bois de rose ; & parce que l'arbre duquel on le tire croît dans l'île de Rhodes & de Chypre, on a donné au bois le nom de bois de Rhodes & de bois de Chypre. On trouve aussi ce bois aux Canaries & à la Martinique.
* BOIS DE BRESIL ; ce bois est ainsi nommé à cause qu'on l'a tiré d'abord du Bresil, province de l'Amérique. M. Huet soûtient cependant qu'on le connoissoit sous ce nom, longtems avant qu'on eût découvert ce pays. Voyez Huetiana pag. 268.
On le surnomme différemment suivant les divers lieux d'où il vient ; ainsi il y a le bresil de Fernambouc, le bresil du Japon, le bresil de Lamon, le bresil de Sainte-Marthe, & enfin le bresillet ou bois de la Jamaïque qu'on apporte des îles Antilles.
L'arbre de bresil croît ordinairement dans des lieux secs & arides, & au milieu des rochers. Il devient fort gros & fort grand, & pousse de longues branches, dont les rameaux sont chargés de quantité de petites feuilles à demi-rondes. Son tronc est rarement droit, mais tortu & raboteux, & plein de noeuds à-peu-près comme l'épine blanche. Ses fleurs, qui sont semblables au muguet, & d'un très-beau rouge, exhalent une odeur agréable & très-amie du cerveau qu'elle fortifie. Quoique cet arbre soit très-gros, il est couvert d'un aubier si épais, que lorsque les Sauvages l'ont enlevé de dessus le vif du bois, si le tronc étoit de la grosseur d'un homme, à peine reste-t-il une bûche de bresil de la grosseur d'une jambe.
Le bois de bresil est très-pesant, fort sec, & pétille beaucoup dans le feu, où il ne fait presque point de fumée, à cause de sa grande sécheresse.
Toutes ces différentes sortes de bresil n'ont point de moelle, à la réserve de celui du Japon. Le plus estimé est le bresil de Fernambouc.
Pour bien choisir ce dernier, il faut qu'il soit en bûches lourdes, compact, bien sain, c'est-à-dire sans aubier & sans pourriture ; qu'après avoir été éclaté, de pâle qu'il est il devienne rougeâtre, & qu'étant mâché il ait un goût sucré.
Le bois de bresil est propre pour les ouvrages de tour, & prend bien le poli : cependant son principal usage est pour la teinture, où il sert à teindre en rouge, mais c'est une fausse couleur qui s'évapore aisément, & qu'on ne peut employer sans l'alun & le tartre. Voyez TEINTURE.
Du bois de bresil de Fernambouc on tire une espece de carmin par le moyen des acides : on en fait aussi de la lacque liquide pour la mignature. Voy. ROUGE, LACQUE, &c.
* BOIS DE FUSTET, (Hist. nat.) l'arbre qui le donne est commun à la Jamaïque ; il y croît en pleine campagne. Les Teinturiers s'en servent pour teindre en jaune : mais il n'est d'aucun usage en Medecine.
* BOIS LETTRE, lignum sinense, il vient de la Chine. On l'appelle bois lettré, parce qu'on nous l'apporte marqué de lettres ; il n'est presque d'aucun usage en Medecine.
* BOIS DE SAINTE-LUCIE, arbre qui doit se rapporter au genre appellé cerisier, Voyez CERISIER.
* BOIS D'INDE, BOIS DE LA JAMAÏQUE, ou BOIS DE CAMPECHE. (Hist. nat.) on l'appelle aussi laurier aromatique ; c'est un grand & bel arbre qui croît en Amérique, & principalement aux îles de Ste Croix de la grande Terre, la Martinique, la Grenade, &c. Le bois de cet arbre est dur, compact, & si lourd, qu'il ne nage point sur l'eau. Sa couleur est d'un beau brun marron, tirant quelquefois sur le violet & le noir : on en fait des meubles précieux, car il prend un très-beau poli & ne se corrompt jamais. Son écorce est jaunâtre, très-mince & très-unie ; ses feuilles ressemblent assez à celles du laurier ordinaire, excepté que celles du bois d'Inde sont ovales, & ne se terminent pas en pointe comme les siennes ; elles sont lisses, roides, d'un verd foncé en-dessus, & d'un verd plus clair en-dessous ; les bords en sont unis, & ne sont point plissés comme ceux des feuilles de laurier, elles sont outre cela fort aromatiques ; & mises dans les sausses, elles leur donnent un goût relevé semblable à celui de plusieurs épiceries. Cet arbre fleurit une fois l'an ; & aux fleurs qui viennent par bouquets, succedent de petites baies ou de petites graines rondes, grosses comme des pois, qui renferment de la semence ; ces graines sont très-odorantes, & ont du rapport avec la cannelle, le clou de girofle, & la muscade : elles ont un goût piquant & astringent qui n'est point desagréable, on les connoît en Angleterre sous le nom de graine des quatre épices ; les habitans des îles s'en servent pour assaisonner leurs sausses. Si on en met digérer dans de bonne eau-de-vie, on en retire par la distillation une eau ou liqueur spiritueuse d'une odeur gracieuse mais indéfinissable, à laquelle il ne faut qu'ajoûter une dose convenable de sucre pour en faire une liqueur délicieuse au goût, & propre à fortifier l'estomac. On dit que la décoction des feuilles du bois d'Inde est bonne pour fortifier les nerfs, & soulage les paralytiques & les hydropiques. On l'employe dans la teinture, & sa décoction est fort rouge.
On a remarqué que si l'on met de cette teinture dans deux bouteilles, & que l'on mêle dans l'une un peu de poudre d'alun, celle-ci deviendra d'un très-beau rouge clair, qu'elle conservera, & l'autre deviendra jaunâtre en moins d'un jour, quoique les deux bouteilles soient fermées de même ; & si on laisse à l'air quelque peu de cette décoction, elle deviendra noire comme de l'encre dans le même espace de tems.
* BOIS DE FER, (Hist. nat.) arbre qui croît principalement aux îles de l'Amérique : c'est sa grande dureté qui lui a fait donner ce nom. Il est de la grosseur d'un homme par le tronc ; son écorce est grisâtre & dure ; il a beaucoup de petites feuilles, & est tout couvert de bouquets de fleurs, semblables à ceux du lilas ; l'aubier est jaune & fort dur jusqu'au coeur de l'arbre, qui est fort petit & d'un rouge brun : ce coeur est d'une si grande dureté, que les outils de fer les mieux trempés ne peuvent le percer.
* BOIS NEPHRETIQUE, (Hist. nat.) lignum nephreticum ou peregrinum : il est blanchâtre ou d'un jaune pâle, sordide, pesant, acre, & même un peu amer au goût ; d'une écorce noirâtre, & brun ou d'un rouge brun au coeur. Macéré dans de l'eau claire pendant une demi-heure, il lui donne une belle couleur opale, qui change selon la disposition de l'oeil & de la lumiere. Si on y mêle une liqueur acide, la couleur bleue disparoît, & la liqueur paroît dorée de quelque côté qu'on la regarde. Mais l'huile de tartre, ou la solution d'un sel alkali urineux, lui restituera la couleur bleue.
L'arbre qui donne ce bois s'appelle arbor americana Coatli. M. Tournefort en donne la description suivante. Il a la substance & la grandeur du poirier ; les feuilles disposées alternativement sur les rameaux de la forme de celles du pois chiche, mais plus épaisses, sans découpures ; longues d'un demi-pouce, larges de quatre lignes ; d'un verd brun, parsemées d'un duvet fort doux ; reluisantes en-dessous, où ce duvet est argenté, avec une nervure assez grosse ; la fleur attachée au bout des rameaux. Hernandès dit qu'elle est d'un jaune pâle, petite, longue, & disposée en épi, & que son calice est d'une piece, partagé en cinq quartiers, semblable à une corbeille, & couvert d'un duvet roux. Cet arbre croît dans la nouvelle Espagne.
On recommande l'usage de ce bois pour les maladies des reins & la difficulté d'uriner. On le coupe par petites lames qu'on fait macérer dans de l'eau. Cette eau acquiert au bout d'une demi-heure la couleur d'un bleu clair ; on la boit ; on en ajoûte de nouvelle, qu'on prend encore, & l'on continue jusqu'à ce que le bois ne colore plus.
Les uns prennent un verre de cette teinture tous les matins, d'autres la mêlent avec du vin. Quelques-uns en ont été soulagés dans la gravelle, & autres maladies relatives aux reins & à la vessie.
BOIS PUANT, (Histoire nat.) anagyris, genre de plante à fleur papilionacée ; dont la feuille supérieure est beaucoup plus courte que les autres. Lorsque cette feuille est passée, le pistil qui sort du calice devient une silique semblable à celle du haricot, qui renferme des semences qui ont ordinairement la figure d'un petit rein. Ajoûtez au caractere de ce genre, que ses especes ont les feuilles trois à trois sur un seul pédicule. Tournefort, Inst. rei herb. Voyez PLANTE. (I)
BOIS ROUGE ou BOIS DE SANG, (Hist. nat.) c'est le bois d'un arbre qui croît en Amérique près du golfe de Nicaragua. Il est d'un très-beau rouge ; on s'en sert dans la teinture : il se vend fort cher.
Différentes acceptions du terme bois dans les Arts méchaniques.
BOIS DE GRILLE, partie du métier à travailler les bas, sur laquelle les ressorts de grille sont disposés perpendiculairement. Voyez BAS.
BOIS de moule servant à fondre les caracteres d'Imprimerie ; ce sont deux morceaux de bois taillés suivant la figure du moule, dont l'un est à la piece de dessus, & l'autre à la piece de dessous : ils servent à tenir le moule, l'ouvrir & le fermer, sans se brûler au fer qui est échauffé par le métal fondu que l'on jette continuellement dedans. Voyez A & B, fig. 1. Pl. II. du Fondeur de caracteres d'Imprimerie ; & les fig. 2. & 3. de la même Planche.
BOIS, en terme de Lapidaire, est un gros cylindre court & percé de part en part, qui s'emmanche dans le clou ou cheville de la table, placé à côté de la roue, près duquel l'ouvrier appuie sa main pour être plus sûr ; & dans lequel il fourre un bout de son bâton à cimenter, afin que la pression de la pierre sur la roue soit égale. Voyez la fig. 7. Pl. du Lapidaire. 16. est le trou dans lequel entre le bout du bâton à ciment, comme la fig. 6. le représente ; 1, le bois ; r s, le clou ou cheville fixée par sa partie inférieure dans la table ou établi ; 12, la place de l'ouvrier qui presse sur le bâton à ciment, à l'extrémité duquel la pierre est montée ; 14, la meule.
BOIS de têtes, BOIS de fonds : les Imprimeurs nomment ainsi certains morceaux de bois de chêne qui entrent dans la composition d'une forme, lesquels sont de diverses grandeurs, mais égaux dans leur épaisseur, qui est réglée à sept à huit lignes, afin qu'elle soit inférieure à la hauteur de la lettre, qui est de dix à onze lignes. Ce sont ces différens morceaux de bois qui déterminent la marge. Ils doivent être plus ou moins grands, suivant le format de l'ouvrage & la grandeur du papier. Voyez FORME, BISEAU, COIN. Voyez Planche II. figure 5. lettres h, i ; figure 6. lettres h, i ; fig. 7. lettres h, i, k, l ; fig. 8, lettres f, g, h, i.
BOIS de raquette ; c'est un tour de bois qui a un manche de longueur médiocre, dont on fait avec de la corde à boyau, des raquettes à joüer à la paume.
Les bois de raquettes sont faits de branches de bois de frêne fendues en deux.
BOIS, chez les Rubaniers, se dit de la petite bobine qui porte l'or ou l'argent filé : il en porte ordinairement deux onces ; & c'est lorsqu'il est chargé qu'il est appellé bois, car il devient bobine lorsqu'il est vuide.
BOIS à limer, chez les ouvriers en métaux & autres ; c'est un petit morceau de bois quarré qui se met dans l'étau, & sur lequel on pose la piece que l'on tient d'une main, soit avec les doigts, soit avec un étau à main, soit avec une tenaille, & qu'on lime. On se sert de ce bois pour appui, de peur que le fer de l'étau ne gâte la forme de l'ouvrage à mesure qu'on travaille. On fait à ce morceau de bois une entaille qui sert de point d'appui à la piece.
BOIS de brosse, en terme de Vergettier ; c'est une petite planche mince de hêtre ou de noyer, percée à distance égale pour recevoir les loquets.
BOIS d'un éventail, signifie les fleches & les maîtres brins de bois, écaille, ivoire, ou autres matieres, dont on se sert pour monter un éventail. Le bois d'un éventail est composé de deux montans ou maîtres brins, & de dix-huit ou vingt fleches qui sont collées par en-haut entre les deux feuilles, & joints ensemble en-bas par un clou ou cheville de fer qui les traverse, & qui est rivée des deux côtés. Voyez EVENTAIL, & la fig. 24. Pl. de l'Eventailliste. Ce sont les Tabletiers qui les fabriquent, & qui se servent pour cet effet de limes, de scies, d'équerres, de forets, &c.
BOIS de fusil, ou FUT, terme d'Arquebusier ; c'est un morceau de bois de noyer ou de chêne sculpté, de la hauteur de quatre piés, large, & un peu plat par en-bas ou du côté de la crosse ; par en-haut il est rond, creusé en-dedans pour y placer le canon du fusil, à-peu-près de la même grosseur, de façon que le canon y est à moitié enchâssé. Il y a par-dessous une moulure pour y placer la baguette, qui y est retenue par les porte-baguettes : c'est sur ce bois que l'on monte la platine, le canon, la plaque de couche, la sous-garde, &c.
Il y a aussi des bois de fusils à deux coups, qui ne different de celui-ci que parce qu'ils sont plus larges, & qu'il y a deux moulures pour y placer les deux canons ; deux entailles pour y placer les deux platines, l'une à droite & l'autre à gauche ; & par-dessous une seule entaille pour placer la baguette.
BOIS, au Trictrac, se dit en général des dames avec lesquelles on joue au jeu. Voy. DAME & TRICTRAC.
* BOIS de vie, (Hist. eccl.) On nomme ainsi parmi les Juifs, deux petits bâtons semblables à-peu-près à ceux des cartes géographiques roulées, par où on prend le livre de la loi, afin de ne pas toucher au livre même, qui est enveloppé dans une espece de bande d'étoffe brodée à l'aiguille. Les Juifs ont un respect superstitieux pour ce bois ; ils le touchent avec deux doigts seulement, qu'ils portent sur le champ aux yeux : car ils s'imaginent que cet attouchement leur a donné la qualité de fortifier la vûe, de guérir le mal d'yeux, de rendre la santé, & de faciliter les accouchemens des femmes enceintes : les femmes n'ont cependant pas le privilége de toucher les bois de vie, mais elles doivent se contenter de les regarder de loin.
* BOIS SACRES, (Myth.) Les bois ont été les premiers lieux destinés au culte des dieux. C'est dans le creux des arbres & des antres, le silence des bois & le fond des forêts, que se sont faits les premiers sacrifices. La superstition aime les ténebres ; elle éleva dans des lieux écartés ses premiers autels. Quand elle eut des temples dans le voisinage des villes, elle ne négligea pas d'y jetter une sainte horreur, en les environnant d'arbres épais. Ces forêts devinrent bientôt aussi révérées que les temples mêmes ; on s'y assembla, on y célébra des jeux & des danses. Les rameaux des arbres furent chargés d'offrandes, les troncs sacrés aussi révérés que les prêtres, les feuilles interrogées comme les dieux : ce fut un sacrilége d'arracher une branche. On conçoit combien ces lieux deserts étoient favorables aux prodiges : aussi s'y en faisoit-il beaucoup. Apollon avoit un bois à Claros, où jamais aucun animal venimeux n'étoit entré. Les cerfs des environs y trouvoient un refuge assûré, quand ils étoient poursuivis. La vertu du dieu repoussoit les chiens ; ils aboyoient autour de son bois, où les cerfs tranquilles broutoient. Esculape avoit le sien près d'Epidaure ; il étoit défendu d'y laisser naître ou mourir personne. Le bois que Vulcain avoit au mont Ethna, étoit gardé par des chiens sacrés, qui flattoient de la queue ceux que la dévotion y conduisoit, déchiroient ceux qui en approchoient avec des ames impures, & éloignoient les hommes & les femmes, qui y cherchoient une retraite ténébreuse. Les furies avoient à Rome un bois sacré.
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BOIS-LE-DUC | (Géog.) grande ville bien fortifiée, du Brabant hollandois ; dont elle est la capitale, au confluent du Dommel & de l'Aa qui forment la Dies, qui va se jetter dans la Meuse au fort de Crevecoeur. Le pays qui en dépend s'appelle la mairie de Bois-le-duc, qui se divise en quatre quartiers ou districts.
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BOISER | v, act. terme de Menuiserie & d'Architecture ; c'est couvrir les murs d'une chambre ou d'un appartement, d'ouvrages en bois assemblés, moulés, sculptés, &c. Voyez LAMBRISSER & DECORATION. Les appartemens boisés sont moins froids en hyver, & plus sains en tout tems.
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BOISSEAU | S. m. (Comm.) mesure ronde de bois ordinairement cintré par le haut d'un cercle de fer, appliqué en-dehors bord à bord du fût, avec une tringle ou barre de fer qui la traverse par l'ouverture d'en-haut dans sa circonférence, pour le lever plus aisément. Il sert à mesurer les corps ou choses seches, comme les grains, le froment, l'orge, l'avoine, &c. les légumes secs, comme les pois, feves, lentilles, &c. les graines, comme le chénevi, le millet ; les fruits secs, comme les navets, oignons, noix, châtaignes, &c.
Ducange fait venir ce mot de bussellus, bustellus, ou bissellus, diminutif de buza, qui signifioit la même chose dans la basse latinité, d'autres le font venir de bussulus, qui signifie une urne dans laquelle on jettoit les sorts. Ce mot semble être une corruption de buxulus.
A Paris le boisseau se divise en deux demi- boisseaux, le demi- boisseau en deux quarts, le quart en deux demi-quarts, le demi-quart en deux litrons, & le litron en deux demi-litrons. Par sentence du prevôt des marchands de Paris, le boisseau doit avoir huit pouces & deux lignes & demie de haut, & dix pouces de diametre ; le demi- boisseau six pouces cinq lignes de haut, sur huit pouces de diametre ; le quart de boisseau doit avoir quatre pouces neuf lignes de haut, & six pouces neuf lignes de large ; le demi-quart quatre pouces trois lignes de haut, & cinq pouces de diametre ; le litron doit avoir trois pouces & demi-de haut, & trois pouces dix lignes de diametre ; & le demi-litron deux pouces dix lignes de haut sur trois pouces une ligne de large. Trois boisseaux font un minot, six font une mine, douze un septier, & cent quarante-quatre un muid. Voyez MUID.
La mesure du boisseau est différente dans les autres parties de la France. Quatorze boisseaux & un huitieme d'Amboise & de Tours, font le septier de Paris ; vingt boisseaux d'Avignon font trois septiers de Paris ; vingt- boisseaux de Blois font un septier de Paris, & il n'en faut que deux de Bordeaux pour faire la même mesure ; trente-deux boisseaux de la Rochelle font dix-neuf septiers de Paris.
Les mesures d'avoine sont doubles de celles des autres grains, desorte que vingt-quatre boisseaux d'avoine font un septier, & deux cent quarante-huit un muid. On divise le boisseau d'avoine en quatre picotins, & le picotin en deux demi-quarts ou quatre litrons. Quatre boisseaux de sel font un minot, & six un septier. Huit boisseaux font un minot de charbon, seize une mine, & trois cent, vingt-un muids. Trois boisseaux de chaux font un minot, & quarante-huit minots font un muid.
Par un reglement d'Henri VII. le boisseau en Angleterre contient huit gallons de froment ; le gallon huit livres de froment à douze onces la livre ; l'once vingt sterlins ; & le sterlin trente-deux grains de froment qui croissent dans le milieu de l'épi. (G)
* Cette mesure est l'ouvrage principal du Boisselier : il est composé de morceaux de merrein assemblés circulairement.
* BOISSEAU, s. m. c'est un instrument à l'usage des Boutonniers, de la même maniere que le coussin est à l'usage des faiseuses de dentelle ; avec cette différence que le coussin est fait en demi-globe, ou en globe tout entier, que l'ouvrier tient sur ses genoux, & sur lesquels ses fuseaux sont fixés de maniere que la poignée des fuseaux est tournée vers elle ; & le boisseau au contraire est la portion d'un cylindre creux, coupé par la moitié, que l'ouvrier place sur ses genoux, qui sont couverts de sa concavité. La partie supérieure du boisseau est attachée à sa veste par une courroie, & ses fuseaux sont placés de maniere que c'est leur tête qui est tournée vers l'ouvrier. Le chef de l'ouvrage, dans la dentelle, en est sur le coussin la portion la plus éloignée de l'ouvriere ; au contraire c'en est la partie la plus voisine dans la travail du boutonnier. C'est sur le coussin que se fait la dentelle ; c'est sur le boisseau que se font les galons de fil & de soie, les jarretieres, les ceintures & autres ouvrages de tissuterie. Le coussin est rembourré, & les fuseaux & la dentelle s'attachent dessus par le moyen des épingles. Le boisseau est de bois mince, & simplement couvert ou d'une toile grossiere, ou d'un parchemin fort ; ou il ne l'est point du tout & l'ouvrage est contenu sur le boisseau par une espece de bobine qui est placée à sa partie supérieure, & sous laquelle il passe pour se rendre entre l'estomac de l'ouvrier & le bord supérieur du boisseau, tomber sur le boisseau & s'y rouler. Voyez BOUTON, GALON, CEINTURE, &c. Voyez aussi à la Planche II. fig. 5. du Boutonnier, un ouvrier qui travaille au boisseau. Cet instrument est représenté en particulier dans les fig. 3. 3. de la Pl. II.
BOISSEAU, (Fontainier) on appelle ainsi la boîte de cuivre dans laquelle tourne la clé d'un robinet. (K)
BOISSEAU de Poterie, est un corps rond & creux de terre cuite, & vernissé en-dedans, en forme de petit barril sans fond, d'environ neuf à dix pouces de haut & d'autant de diametre, dont plusieurs emboîtés les uns dans les autres, forment la chausse ou tuyau d'une aisance. (P)
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BOISSELÉE | S. f. (Commerce) ce qui est contenu dans un boisseau. On dit une boisselée de froment, d'orge, de pois, de feves, &c.
Boisselée est aussi une certaine mesure de terre dont on se sert en plusieurs provinces de France, & elle dénote autant de terre qu'il en faut pour recueillir un boisseau de grain. Huit boisselées font un arpent de Paris ou environ. (G)
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BOISSELIER | c'est un ouvrier qui vend & fait des pelles, des boisseaux, des soufflets, des lanternes, & autres menus ouvrages de bois.
Les Boisseliers font partie de la communauté des Tourneurs. Voyez TOURNEUR.
Ces sortes d'ouvriers ont peu d'outils qui leur soient particuliers, ne se servant que de couteaux, marteaux, planes, &c. comme bien d'autres artisans, sous l'article desquels on pourra voir la description & la figure de chacun de ces outils.
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BOISSELLERIE | S. f. l'art ou la profession du Boisselier, qui consiste à faire & vendre plusieurs menus ouvrages de bois.
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BOISSON | S. f. on peut donner ce nom à tout aliment fluide destiné à réparer nos forces ; définition qui n'exclut pas les remedes même fluides. On a vû en Angleterre un homme qui ne vivoit que de fomentations qu'on lui appliquoit à l'extérieur. Le but de la boisson est de remédier à la soif, au desséchement, à l'épaisseur ou à l'acrimonie des humeurs. L'eau froide, très legere, sans odeur ni sans goût, puisée dans le courant d'une riviere, seroit la boisson la plus saine pour un homme robuste. L'eau froide est adoucissante ; elle fortifie les visceres, elle nettoye tout : si les jeunes gens pouvoient s'en contenter, ils auroient rarement des maladies aiguës. Hérodote paroît attribuer la longue vie des Ethiopiens à l'usage d'une eau pure & legere. Il sembleroit qu'il faudroit réserver la biere, le vin, & les autres liqueurs fortes, pour les occasions où il s'agit d'échauffer, de donner du mouvement, d'irriter, d'atténuer, &c. Boire de l'eau, & vivre d'alimens qui ne soient point du tout gras, voilà, dit Boerhaave, le moyen de rendre le corps ferme, & les membres vigoureux.
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BOITE | S. f. se dit en général de tout assemblage de bois, de cuivre, de fer, ou de quelqu'autre matiere que ce soit, destiné, soit à contenir, soit à revêtir, soit à diriger, soit à affermir d'autres pieces. Il faut bien observer que toute boîte fait l'une de ces fonctions ; mais qu'il y a un grand nombre d'outils, d'instrumens ou d'assemblages qui ont quelqu'une ou plusieurs de ces propriétés communes avec la boîte, & auxquels on ne donne pas le même nom.
Le nombre des assemblages auxquels on donne le nom de boîte est infini : nous ne ferons mention que des principaux ; les autres se trouveront aux articles de tous dont ils font des parties.
BOITE A FORET, outil d'Arquebusier, de Coutelier, de Serrurier, & autres ouvriers ; c'est une espece de bobine, ou de fer ou de bois, ou de cuivre, plus grosse que longue, qui est traversée d'une broche aussi de fer de la longueur de six pouces, dont un des bouts est pointu, pour entrer dans le plastron (Voyez PLASTRON), & l'autre bout est un peu plus gros par en-bas, & est percé d'un trou quarré dans lequel on met les forets & les fraises pour percer les trous, en faisant tourner la boîte avec l'archet, par le moyen de la corde de l'archet. Cette boîte est tantôt de fer, tantôt de cuivre, de bois, &c.
BOITES de réjoüissance, (Artificier) ce sont des especes de boîtes de fer ou de fonte qui se chargent avec de la poudre & un tampon, & qu'on tire dans les réjoüissances avant le canon, ou au défaut du canon.
* BOITE, s. f. (Artillerie) c'est le nom qu'on donne au bout de la hampe des écouvillons qui servent à nettoyer & à rafraîchir le canon. Voyez CANON, voyez HAMPE. On donne le même nom à la tête d'un refouloir, ainsi qu'à l'embouchure de fer ou de fonte dans laquelle entre le bout d'un essieu d'affût ou autre, & à la partie du vilebrequin qui reçoit la meche, & la fixe au corps du vilebrequin, &c.
* BOITE à pierrier, en Artillerie, corps cylindrique & concave fondu de bronze ou forgé de fer, avec une hanse & une lumiere : on remplit la boîte de poudre ; on la place ensuite dans le pierrier par la culasse, derriere le reste de la charge, qu'elle chasse en prenant feu.
BOITE, est encore un cylindre de cuivre percé selon son axe d'un trou quarré, pour pouvoir être monté sur la tige de l'alésoir : cette boîte porte les couteaux d'acier au moyen desquels on égalise l'ame des canons. Voyez ALESOIR, & D fig. 3. Pl. de la Fonderie des canons, fig. de l'alésoir.
BOITES à soudure, en terme de Bijoutier, sont de petits coffres dans lesquels l'on renferme les paillons. Voyez PAILLON. Ils sont chiffrés du titre de la soudure qu'ils contiennent.
BOITE, en terme de Boisselier, se dit de tout coffret destiné à contenir ou serrer quelque chose : il y en a de couverts, & d'autres sans couvercle.
Les boîtes couvertes sont garnies d'un couvercle qui embrasse l'extrémité supérieure de l'ouvrage en-dehors du corps ; les autres n'ont point cette piece.
BOITE à lisser, chez les Cartiers, est un instrument de bois qui a deux manches de bois à ses deux côtés, & qui par le milieu entre dans l'entaille qui est au bout de la perche à lisser. Cette boîte reçoit par son extrémité d'en-bas qui est creuse, une pierre noire fort dure & très-polie, avec laquelle on lisse les cartes en frottant dessus. Voyez Plan. du Cartier, fig. 3. qui représente un ouvrier qui lisse une feuille de carte, & la fig. 8. de la même Plan. N est la boîte à lisser dans sa situation naturelle, o la partie inférieure de la perche, n la lissoire de verre très-polie, qu'on fait entrer dans la mortoise qui paroît à la figure M, qui est la boîte à lisser renversée. On frotte la lissoire avec du savon, pour qu'elle coule plus facilement sur les cartes.
BOITE, instrument de Chirurgie, pour contenir la jambe dans le cas de fracture compliquée. Les pansemens qu'exigent les fractures compliquées ne peuvent se faire sans des mouvemens capables d'empêcher la réunion des os, à moins que les parties une fois réduites, ne soient contenues par des machines assez industrieusement inventées, pour qu'elles ne souffrent aucun dérangement. La Chirurgie moderne, déterminée par le succès, a préféré une boîte aux fanons & aux écorces d'arbres qu'on employoit pour maintenir ces sortes de fractures. Cette boîte est composée de quatre pieces ; savoir, d'une semelle, d'un plancher, & de deux murailles. La semelle est jointe à l'extrémité du plancher par deux gonds qui entrent dans deux fiches, & les deux murailles sont jointes de même aux parties latérales du plancher ; de maniere que les unes & les autres de ces pieces peuvent se joindre & se séparer du plancher pour les utilités dont on parlera plus bas. Le plancher est couvert d'un petit matelas qui soûtient la jambe ; les murailles aussi garnies de matelas, en s'approchant, contiennent la jambe, & empêchent les mouvemens qu'elle pourroit faire sur les côtés. La semelle matelassée soûtient la plante du pié, qui par son moyen est tenu plus ou moins fléchi à la faveur de deux crochets, qui, des deux côtés de la semelle, vont s'engager dans deux crémailleres attachées au bout & à l'extérieur des murailles : ces crémailleres ont plusieurs trous pour donner plus ou moins d'élévation à la semelle dont elles reçoivent les crochets.
M. Petit a perfectionné la structure de cette boîte, & en a considérablement étendu les avantages. La machine de M. Petit differe de celle que nous venons de décrire (V. Planche IV. fig. 3.) 1°. Parce qu'au lieu de plancher, elle a une espece de lit de sangle formé par un couti cloüé sur un chassis, lequel est composé de deux jumelles cintrées à l'endroit du pli du genou, & de deux traverses, dont l'une droite & plus courte joint les deux jumelles par le bout du côté du pié ; l'autre plus longue & cintrée les joint du côté du genou. La seconde chose en quoi cette boîte differe de la premiere, est un chassis composé aussi de deux jumelles & de deux traverses ; le tout parallele au chassis de dessus, excepté que les jumelles de ce dernier chassis sont toutes droites, & que celles du chassis supérieur sont cintrées sous le jarret. Les jumelles de l'un & l'autre chassis, par le bout qui regarde la cuisse, sont jointes ensemble par deux charnieres ; ce qui permet de les écarter & rapprocher plus ou moins ; & pour les tenir au degré de proximité, ou d'éloignement qui convient, il y a une espece de palette jointe par deux gonds de bois reçûs dans deux fiches attachées aux extrémités des jumelles du chassis supérieur : cette palette se plie contre les jumelles, & peut s'en éloigner par une suite de degrés, qui lui sont marqués par deux crans creusés sur la partie supérieure des jumelles du chassis inférieur du côté du pié ; de maniere que l'on peut lever plus ou moins & baisser de même le chassis supérieur sur lequel se trouve la jambe. Telle est la description que M. Petit fait de cette machine dans son Traité des maladies des Os. M. de Garengeot détaille dans son Traité d'instrumens les dimensions de différentes pieces qui entrent dans la structure de cette boîte. Nous avons fait graver toutes ces pieces en particulier ; cela suffira à tout homme intelligent pour en faire construire une pareille.
Ses avantages sont, 1°. qu'au moyen du double chassis, on peut changer l'attitude du malade, en lui baissant & relevant la jambe à son gré, sans qu'on ait à craindre que les os rompus se déplacent ; parce que ce changement ne dépend que de la flexion ou de l'extension du genou ; mouvemens qui peuvent se faire par le moyen du chassis supérieur, sans courir le risque de déplacer les os.
2°. La palette ayant des degrés de repos sur les jumelles du chassis inférieur, peut mettre la jambe en sûreté à tous les degrés de hauteur qui conviendront au malade, dans les pansemens ou dans les intervalles.
3°. On évitera par cette machine les mouvemens irréguliers auxquels le membre est exposé, lorsqu'on est obligé de lever les appareils, ou d'en appliquer de nouveaux ; parce qu'on mettra la partie au dernier degré d'élévation, & on la fera soûtenir par deux aides, pendant qu'un troisieme garnira d'un nouveau bandage le chassis qu'on aura retiré de dessous la jambe, & qu'on y remettra lorsque le pansement sera fait. On est sûr par ce moyen de trouver assez d'adresse & de force dans les aides qui soûtiennent le membre.
4°. Le couti dont le chassis supérieur est garni fait une espece de lit de sangle sur lequel la jambe se moule, & est bien plus commodément que sur le plancher de l'ancienne boîte.
5°. Le cintre des jumelles du chassis supérieur tient la jambe pliée, & relâche par conséquent le tendon d'achille, dont la tension cause des douleurs insupportables au talon, par l'extension de la jambe dans l'usage de la boîte ordinaire.
6°. Le chassis inférieur reçoit dans son quarré l'enflure du matelas pressé par le poids de la jambe, & l'empêche de glisser vers le pié du lit comme fait la boîte ordinaire, parce qu'elle est unie.
Pl. IV. fig. 3. la boîte ; les figures suivantes montrent ses différentes pieces.
Fig. 6. le lit de sangle à double chassis sur lequel on pose le membre.
Fig. 5. les murailles matelassées qui se montent par gonds & pentures, ainsi que la semelle, fig. 4. où l'on voit deux crochets qui entrent dans les trous d'une piece a, fixée à l'extérieur des murailles, figure 3.
Fig. 7. palette de bois avec ses gonds. Fig. 8. fiche qui reçoit un gond de la palette.
Fig. 9. la charniere qui unit les jumelles des deux chassis par le bout qui regarde la cuisse.
Les petites pieces qui ne sont point chiffrées sont les gonds & les pentures, dont on conçoit assez l'usage par ce que nous avons dit. (Y)
BOITE, en terme d'Epinglier, est une espece de petit coffre sans dessus, & ayant dans son milieu une lame de cuivre sur laquelle on appuie les épingles. Cette lame partage la boîte en deux parties qui sont le plus souvent de deux sortes de longueurs. Ces boîtes sont couvertes de plusieurs brins de fil de fer qui contiennent les épingles dans la capacité de la boîte, & les empêchent d'y remuer à la pression des cisailles. Voyez la figure 19. SS. Pl. de l'Epinglier.
BOITE, chez les Fontainiers, sont des coffres de fer ou de tole, percés de trous, que l'on met à la superficie des pieces d'eau, pour arrêter les ordures, & empêcher l'engorgement d'une conduite. Voyez CRAPAUDINE.
On appelle encore boîte ce qui fait la jonction des deux pieces d'une soupape. (K)
BOITE de montre ; cette boîte est composée de la cuvette qui contient le mouvement : de la lunette dans laquelle est ajusté le crystal, de la charniere qui joint ensemble ces deux parties, & de la bâte sur laquelle repose le cadran, & qui s'étend jusqu'au bord ou filet de la cuvette. C'est à cette bâte qu'on fait la petite charniere. Voy. CHARNIERE. Lorsque le mouvement est dans la boîte, le cadran vient se réposer sur le bord supérieur de la bâte, & la platine des piliers s'appuie aussi sur un petit rebord ou filet qui est dans l'intérieur de cette bâte ; il a une certaine épaisseur, & c'est par-dessous que s'avance la tête du ressort de cadran ; de cette façon le mouvement est contenu dans la boîte, sans hausser ni baisser, & n'en peut sortir qu'en degageant la tête du ressort de cadran de dessous ce filet. Voyez RESSORT DE CADRAN.
La boîte se ferme ordinairement au moyen d'un ressort situé vis-à-vis de la charniere, qu'on appelle ressort de boîte. Il est fait de façon que la lunette posant sur le bord ou filet de la cuvette, sa partie qu'on appelle la tête, s'avance sur un autre filet qui est à la partie inférieure de la lunette ; desorte que dans cet état elle ne peut plus se lever à moins que l'on ne pousse le bouton du ressort, qui le faisant avancer, dégage la tête de-dessus ce filet. Lorsqu'il n'y a point de ressort, la lunette est retenue au moyen d'un filet tourné en drageoir, & située à la partie inférieure de la bâte proche de la cuvette : de façon que par ce filet la lunette & la cuvette tiennent ensemble à ce drageoir. A la partie supérieure de la lunette, il y a une rainure pour contenir le crystal. V. DRAGEOIR, CHARNIERE, &c. (T)
BOITE, partie d'une presse d'Imprimerie ; c'est un morceau de bois H, fig. 1. & 2. Pl. IV. de l'Imprimerie, taillé à quatre faces, d'un pié de long, creusé dans sa longueur, selon la grosseur & la forme de l'arbre de la vis, pris depuis le dessous du barreau jusqu'au pivot, lequel, au moyen de cette emboîture, est contraint de tomber d'à-plomb dans la grenouille ; la boîte elle-même est maintenue perpendiculairement par une tablette K K découpée en quarré, dans laquelle elle se trouve encastrée au milieu de sa hauteur : la boîte est arrêtée un peu au-dessus du pivot, par une double clavette de fer qui traverse l'extrémité de l'arbre au-dessus du pivot ; aux quatre coins de cette boîte sont attachés quatre crochets de fer qui reçoivent les attaches de la platine. Voyez TABLETTE, PLATINE, PRESSE, &c.
BOITES, pieces d'une presse d'Imprimerie en taille-douce. Voyez PRESSE d'Imprimerie en Taille-douce.
BOITES, en termes de Layetier ; ce sont de petits coffres faits de bois de sapin ou autre, pour servir à toutes sortes d'usages. Ils donnent à ces coffres différens noms, selon leur usage & leur capacité. Exemples : ils appellent boîtes a Lingerie, une boîte qui a deux piés de long, quinze pouces de large, & dix à onze de haut, à l'usage des Lingeres ; boîte des champs, celle qui n'a qu'un pié de long, neuf de large, six à sept de haut ; boîte d'écritale, celle qui a dix-huit pouces de long, un pié de large, & neuf pouces de haut.
BOITE du crochet de l'établi, en Menuiserie, est un morceau de bois de deux pouces & demi ou environ en quarré, sur huit à neuf de long, qui entre dans une mortoise faite au bout de l'établi, & dans laquelle le crochet de fer est placé. Voyez la fig. 36. Planche de Menuiserie, fig. 4. la boîte, 3. le brochet.
BOITE de table à bracelets, en termes de Metteur-en-oeuvre, est une lame d'or ou d'argent battu, pliée de sorte que la partie supérieure avance moins que l'autre. Une petite languette de même matiere est soudée sur cette lame vers l'endroit où elle est pliée, & vient passer dans une ouverture faite à l'entrée de la boîte. Voyez ENTREE. Cette languette se termine par un petit bouton, assorti pour l'ordinaire avec la table. Voyez TABLE. C'est en appuyant sur ce bouton, ou le soûlevant un peu, que l'étoffe prise entre les deux lames ci-dessus, est chassée, ou y est retenue avec force. Il se fait aussi quelquefois de ces boîtes simples en or ou en argent, qui servent à attacher un bracelet de perles, ou autres pierres propres à être enfilées.
BOITES d'essai, à la Monnoie, sont des petits coffres où l'on met les monnoies qui ont été essayées, pour les envoyer à la cour des monnoies, où l'on en fait un nouvel essai. Les juges-gardes des monnoies sont chargés de faire les boîtes. Sur trente pieces d'or, ils doivent en mettre une sans choix ; & sur dix-huit marcs d'argent, une autre qui sert d'échantillon, sur quoi la cour des monnoies prononce.
BOITE, en Monnoie, est encore une partie du balancier. Voyez BALANCIER.
BOITE à moulure, ou à bille, en termes d'Orfevre, est un instrument fait d'un chassis de fer de quatre pouces de long sur trois de haut en-dedans. Le fer est d'un pouce d'épaisseur sur dix-huit lignes de largeur en-dedans. Sur les côtés il y a une coulisse pour assujettir les billes, avec une échancrure à l'un des deux côtés pour faire entrer les billes. A la partie de dessus au chassis, il y a deux trous taraudés, dans lesquels passent deux vis qui resserrent les billes l'une contre l'autre par le moyen d'une clé.
BOITES, dans les Orgues, sont des tuyaux d'étoffe. On appelle étoffe, un mélange de deux parties de plomb & d'une d'étain, de forme cylindrique A, fig. 44. Pl. d'Orgue, terminé par en-bas par un pié de forme conique, par le sommet duquel le vent du sommier passe dans la boîte, dans le corps de la trompette ou autre jeu d'anche, dont la partie inférieure C entre dans la boîte ainsi nommée de son usage. Voy. TROMPETTE & ORGUE.
BOITE, en Serrurerie, c'est une sorte de douille ronde ou quarrée, que l'on scelle ou dans un billot, ou à terre, pour recevoir l'extrémité soit d'une barre de fer, soit d'un instrument, soit d'un morceau de bois, dont l'usage est de les tenir fermes, quand ils y sont ; d'où l'on peut les tirer, & où l'on peut les replacer à discrétion. On voit des boîtes pratiquées dans les sacristies : elles sont scellées dans le pavé, pour recevoir les piliers qui soûtiennent les devants des tiroirs où l'on enferme les chapes, &c.
BOITE ou POCHE DE NAVETTE, terme de Tisserand ; c'est la partie creuse pratiquée dans le milieu de la navette, où on renferme l'espoulin ou le petit morceau de roseau, sur lequel est devidée une portion du fil de la trame. Voyez NAVETTE.
BOITE, terme de Tourneur ; c'est ainsi qu'on appelle une piece du bois de deux ou trois pouces de longueur, qui s'ajoûte à vis au mandrin, ou à l'arbre du tour, lorsqu'on veut tourner quelque ouvrage en l'air, ou lui faire des vis & des écroues, tant en-dedans qu'en-dehors. La boîte est de figure cylindrique, plate d'un côté, & arrondie par le bout qui touche l'arbre ou le mandrin. Le côté arrondi a une écroue pour recevoir la vis de l'une ou l'autre de ces deux pieces ; & on attache sur le côté plat avec du mastic ou avec certaines petites pointes placées exprès, l'ouvrage qu'on se propose de tourner. La boîte est toûjours au-dehors de la lunette. Voyez TOUR.
BOITE du gouvernail, (Marine) c'est la piece de bois percée, au-travers de laquelle passe le timon ou la barre. (Z)
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BOITER | (Manége) se dit du cheval, de même que de l'homme. Boiter de vieux ou de vieux tems, signifie qu'il y a long-tems que le cheval boîte. (V)
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BOITEUX | en terme de Manége, se dit d'un cheval qui a quelque irrégularité dans ses mouvemens, pour avoir été estropié à l'épaule, à la jambe, ou au pié ; desorte qu'en marchant il cherche à ménager la partie offensée, ou n'ose s'en servir qu'avec crainte.
Comme il importe de connoître ce mal dans ses différentes circonstances, nous en exposerons ici les principales. Si un cheval boite des piés de devant, c'est un signe que son mal est dans l'épaule, dans les jambes ou dans les piés ; s'il boite des piés de derriere, il faut que son mal soit dans la hanche, dans le jarret, ou dans quelqu'autre partie voisine.
1°. On connoît que le mal est dans l'épaule lorsque le cheval ne leve point la jambe à l'ordinaire, & qu'il la traîne par terre ; ou quand il leve une jambe plus que l'autre, & que son genou paroît comme disloqué : à quoi l'on peut ajoûter qu'en tournant court, il favorise visiblement la jambe du côté où il est boiteux. De même si le mal est dans l'épaule, il faut qu'il soit ou dans le garrot : ce qu'il fait connoître en boitant davantage lorsqu'il est monté, que lorsqu'on le mene par la bride, en bronchant beaucoup, & menaçant de mordre quand on le touche ou manie à la partie supérieure de l'épaule : ou bien le mal est dans la partie inférieure qui joint l'os moelleux, & que l'on connoît par le mouvement du cheval, qui presse ses pas en bronchant, au point de tomber si l'on appuyoit sur cette partie ; ou enfin le mal est dans le coude qui joint l'os moelleux à la jambe ; ce que le cheval fait connoître en ruant & levant le pié, quand on le pince dans cet endroit.
2°. Si le mal est dans les jambes, il faut qu'il soit ou dans le genou, ou dans la jointure du paturon ; ce que le cheval fait connoître en refusant de plier l'un ou l'autre, & en les roidissant lorsqu'on le fait marcher : ou le mal est dans le canon ; & pour lors il se manifeste par quelque esquille, suros, molette, ou autre mal visible.
3°. Si le mal est dans le pié, il faut qu'il soit dans la couronne, & qu'il vienne de quelque effort ou détorse ; ce que l'on connoît par quelque tumeur ou fracture, ou quand la partie est chaude & brûlante au tact : ou bien le mal est dans le talon ; ce qui vient de quelque nerf féru, ou autre accident semblable : en ce cas le mal est toûjours visible : & d'ailleurs le cheval le fait connoître en marchant tout-à-fait sur la pince : ou bien enfin le mal est dans les quartiers, entre le milieu du sabot & le talon ; ce que le cheval fait connoître en boitant davantage lorsqu'il est sur une pente, que lorsqu'il marche sur un terrein uni. Cet accident vient quelquefois d'un clou qui a blessé le cheval en le ferrant, & l'on distingue le clou qui blesse en pinçant la tête de chaque clou en même tems que le sabot, avec une paire de tenailles.
Quand un cheval boîte des piés de derriere, si le mal est dans la hanche ou dans l'os de la cuisse, il marchera de côté, & n'avancera pas si bien de la jambe malade que de l'autre ; en tournant court, il favorisera cette jambe malade ; & en marchant sur une pente, il tiendra toûjours cette jambe plus haute que l'autre.
Si un cheval a quelque maladie cachée qui l'oblige à boiter quand il travaille, on pourra le découvrir en le faisant courir à la main par un terrein uni, en lui lâchant toute la longueur du licou, & remarquant de quelle maniere il pose ses jambes. S'il ne favorise aucune des quatre, il faut continuer à l'éprouver en le maniant rondement jusqu'à ce qu'il soit bien échauffé ; alors il faut le laisser reposer pendant l'espace d'une heure, & le faire courir ensuite de nouveau à la main, en lui lâchant toute la longueur du licou comme auparavant. (V)
BOITEUX, adj. chez les Rubaniers-Tissutiers, se dit lorsqu'un dernier retour n'a pas autant de marches que les autres, comme s'il n'avoit que 20 marches ou plus ou moins, au lieu de 24 que les autres ont ; on appelle celui-ci ruban boiteux. Voyez RETOUR.
BOITEUX, se dit, chez les mêmes ouvriers, d'un ouvrage, comme d'un ruban, qui se trouve d'une couleur à un bord & d'une autre couleur à l'autre bord ; c'est ce qu'on appelle ruban boiteux.
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BOITIAPO | (Hist. nat.) c'est un grand serpent du Bresil ; il a sept ou huit piés de long ; il est de la grosseur du bras, sa queue se termine en pointe ; il est couvert de belles écailles d'un jaune olivâtre ; sa morsure est fort dangereuse ; sa chair a, dit-on, la propriété de résister au venin.
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BOITTE | S. f. en termes de Pêche ; c'est ainsi que les pêcheurs de morue nomment l'appas qu'ils mettent à leurs hameçons. Les François du Cap-Breton se servent du hareng & du maquereau, dont la morue est friande, & qui est commun sur ces côtes.
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BOITZENBURG | (Géog.) Il y a deux villes de ce nom en Allemagne ; l'une sur l'Elbe dans le comté de Schwerin, à quelques lieues de Hambourg ; l'autre dans l'électorat de Brandebourg.
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BOKAS | S. m. (Commerce) toile de coton que l'on tire de Surate. Il y a des bokas blancs & de bleus.
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BOL | S. m. (Hist. nat.) terre graisseuse & argilleuse, pesante & styptique ; elle s'attache promtement à la langue, & teint les mains. Il y a des bols de différentes couleurs, ordinairement de jaunes & de rouges. Il y en a aussi de blancs : &c. Autrefois on alloit chercher du bol dans le Levant en Arménie, pour l'usage de la Medecine : mais on s'est à la fin convaincu que le bol que nous avons très-communément en France, est aussi bon que celui d'Arménie. On en fait venir de Blois, de Saumur, de Baville, &c. Voyez TERRE. (I)
* Les plus connus d'entre les bols sont celui d'Arménie, qui est maintenant fort rare. La description générale de bol qui précede, lui convient. On lui attribue la vertu alexipharmaque & de l'astringence, il y en a de jaune & de blanc.
Celui de Blois, qui est une terre d'un rouge pâle.
Celui d'Allemagne, dont la couleur est un peu plus foible que celui d'Arménie. Il est parsemé de veines jaunes ; on le tire des mines de Bohème. Il n'a aucune propriété particuliere.
Le bol blanc, qui vient de Gran en Hongrie, & de Coltberg sur le territoire de Liége ; on le dit d'une efficacité singuliere dans la dyssenterie.
Le bol de France, qui vient de Blois, de Saumur, & de la Bourgogne. Le jaune passe pour le meilleur.
Celui de Transylvanie, il a tous les caracteres de celui d'Arménie ; il se fond dans la bouche comme beurre. Il vient des environs de Toccai.
Les Doreurs, pour faire l'assiette de l'or, se servent du bol d'Arménie. Les Relieurs l'écrasent avec une molette, en l'humectant avec un peu de blanc-d'oeuf mêlé d'eau, sur une pierre polie. Quand il est bien broyé, ils le renferment dans un petit pot pour en mettre dans l'occasion une couche très-mince sur la tranche du livre, après qu'elle a été bien ratissée. Voyez PINCEAU AU BOL.
BOL, (Pharmacie) forme sous laquelle on fait prendre certains médicamens, pour épargner aux malades le dégoût qu'ils ont, qui souvent leur donne beaucoup de répugnance ; le bol n'étant en effet qu'une bouchée très-petite, & très aisée à avaler.
Le bol doit être mou & un peu plus épais que le miel : on le compose avec tout ce qui peut être pris intérieurement ? lorsque ce sont des substances seches ou des poudres, on leur donne une consistance molle, en les mêlant avec des conserves ou des sirops. Lorsqu'elles sont liquides & qu'on a intention de les faire prendre sous la forme de bol, on y joint des poudres telles que la poudre de réglisse & autres, par le moyen desquelles on les rend un peu plus solides.
Le sucre en poudre, est un des ingrédiens dont on se sert pour donner la consistance d'un bol, aux médicamens gras & huileux, tels que les baumes.
L'on se sert de pain azyme pour envelopper le bol, empêcher qu'il ne s'en échappe quelque partie, & en faciliter la déglutition.
Le bol a diverses qualités, selon la différence des médicamens dont il est composé ; il y en a d'altérant, de purgatif, d'astringent, selon les indications qui se présentent à remplir.
On a soin de prescrire au malade une boisson appropriée à sa maladie, qui puisse aider à diviser le bol lorsqu'il est dans le ventricule. (N)
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BOLATHEN | S. m. (Myth.) en grec ; c'est un nom que les Phéniciens & les Syriens donnoient à Saturne.
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BOLBITINA | (Géog. anc.) ville d'Egypte, qui donnoit nom à une des bouches du Nil, bolbitinum ostium ; c'est aujourd'hui le bras de Raschit ou de Rosette.
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BOLCANE | (Géog.) l'une des îles des Larrons en Asie ; il y a un volcan.
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BOLCKENHAYN | (Géog.) petite ville de Silésie, dans la principauté de Schweidnitz.
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BOLCKWIT | (Géog.) petite ville de Silésie, dans la principauté de Glogaw.
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BOLDUC | voyez BOIS-LE-DUC.
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BOLENBERG | petite ville du duché de Mecklembourg, sur la mer Baltique.
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BOLLANDISTES | S. m. pl. (Hist. ecclésiast.) nom que l'on a donné à quelques jésuites d'Anvers, ou à une société d'écrivains de leur corps, qui depuis plus d'un siecle s'occupe à recueillir tout ce qui concerne les actes & les vies des Saints. On les a ainsi nommés de Bollandus jésuite flamand, un de leurs principaux chefs. Voyez ACTE, SAINT.
Comme dans le cours de cet ouvrage nous sommes souvent obligés de citer cette savante compagnie, des actes de laquelle nous avons tiré diverses observations, il ne sera pas inutile de les faire connoître au lecteur.
Au commencement du xvij. siecle, le P. Heribert Rosweid jésuite d'Anvers, conçut le dessein de rassembler les vies des Saints, telles qu'elles avoient été écrites par les auteurs originaux ; en y ajoûtant des notes semblables à celles que les meilleurs éditeurs des peres ont ajoûtées à leurs écrits, soit pour éclaircir les passages obscurs, soit pour distinguer le vrai du fabuleux. L'entreprise étoit grande, mais comme on le sent assez, beaucoup au-dessus des forces d'un seul homme : aussi le P. Rosweid ne put-il pendant toute sa vie qu'amasser des matériaux, & mourut sans avoir commencé à leur donner de forme. C'étoit en 1629 : & l'année suivante, le P. Bollandus reprit ce dessein sous un autre point de vûe, qui fut de composer les vies des saints d'après les auteurs originaux. En 1635, il s'associa le P. Godefroi Henschenius ; & six ans après, ils firent paroître les actes des saints du mois de Janvier en deux volumes in-folio ; ce livre eut un succès qui augmenta lorsque Bollandus eut donné trois autres volumes dans la même forme, contenant les actes des saints du mois de Février. Il s'étoit encore associé en 1650 le P. Papebrock, & travailloit à donner le mois de Mars lorsqu'il mourut en 1665. Après la mort d'Henschenius, le P. Papebrock eut la principale direction de ce grand ouvrage, & s'associa successivement les PP. Baërt, Jemaing, du Sollier, & Raye, qui ont donné vingt-quatre volumes, contenant les vies des saints jusqu'au mois de Juin. Depuis la mort du P. Papebrock, arrivée en 1714, les PP. du Sollier, Cuper, Piney, & Bosch, donnerent en cinq volumes in-folio, le reste du mois de Juin, & tout le mois de Juillet. Il a paru encore depuis de nouveaux volumes, contenant une grande partie des saints du mois d'Août, & l'ouvrage est toûjours continué par d'autres savans du même ordre. On prétend que Bollandus n'a pas été assez en garde contre les traditions populaires : mais ses successeurs, & sur-tout le P. Papebrock, ont apporté plus de critique dans le choix des monumens destinés à former cette vaste collection, qui ne peut être que très-utile à la religion. (G)
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BOLLINGEN | (Géog.) petite ville sur le bord d'un lac, dans l'évêché de Constance.
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BOLLOS | S. m. (Minéralog.) on appelle ainsi, dans les mines du Potosi & du reste du Pérou, les lingots ou barres d'argent qu'on tire du minéral par l'opération réitérée du feu, ou par le moyen des eaux-fortes. Voyez ARGENT.
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BOLOGNE | (Géog.) ville d'Italie, capitale du Bolonois, sur la riviere de Reno, jointe au Po par un canal. Long. 29. lat. 44. 27 20.
BOLOGNE (PIERRE DE), Hist. nat. c'est une pierre grisâtre, pesante, talqueuse, ordinairement de la grosseur d'une noix, mais d'une figure irréguliere : les plus luisantes & les moins remplies de taches sont les meilleures, aussi-bien que celles qui sont couvertes à la surface d'une croûte mince, blanche & opaque. On trouve ces pierres en plusieurs endroits d'Italie, mais sur-tout au pié du mont Paterno, qui est à peu de distance de Bologne : c'est après les grandes pluies qu'on les découvre ; parce qu'alors ces pierres se trouvent lavées & dégagées des parties terrestres qui les environnent quelquefois, & qui les rendent méconnoissables. On prépare ces pierres de la maniere suivante : après en avoir ôté la terre & les matieres hétérogenes, on en prend quelques-unes qu'on réduit en poudre très-déliée, qu'on passe ensuite au tamis ; on humecte les autres pierres avec de l'eau-de-vie, & on les enduit de cette poudre ; on prend ensuite un petit fourneau de terre dont la grille soit de cuivre jaune, on y met d'abord quelques charbons allumés ; quand ils sont consumés à moitié, on remplit à moitié le fourneau de charbon de braise ; on pose doucement dessus, les pierres enduites de poudre ; on acheve ensuite de remplir le fourneau de charbon de braise éteinte, on couvre le fourneau de son dôme, & on laisse brûler le charbon sans y toucher, jusqu'à ce qu'il soit entierement consommé. Lorsque tout sera refroidi, on trouvera sur la grille les pierres calcinées : on en sépare la croûte, & on garde ces pierres dans des boîtes avec du coton. Elles ont la propriété du phosphore : c'est-à-dire qu'en les exposant au jour ou au soleil, & même à la clarté du feu, & les transportant sur le champ dans un endroit obscur, elles paroissent lumineuses comme des charbons allumés, mais sans chaleur sensible. Cette lumiere dure quelque tems, puis elle s'affoiblit & se perd : mais en les exposant de nouveau à la lumiere, elles reprennent leur qualité phosphorique. S'il arrive qu'au bout de deux ou trois ans elles viennent à perdre tout-à-fait la propriété dont on vient de parler, on peut la leur rendre en les faisant calciner de nouveau de la maniere qui a été indiquée.
Nous devons ce procédé à M. Lemery, qui a fait grand nombre d'expériences sur la pierre de Bologne, & qui en donne un détail très circonstancié dans son cours de Chimie (-)
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BOLONOIS | (Géog.) province d'Italie, dans l'état de l'Eglise ; bornée au septentrion par le Ferrarois ; à l'orient, par le même & par la Romagne ; au midi par le Florentin ; & à l'occident par l'état de Modene.
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BOLSENA | (Géog.) ville d'Italie sur le lac de même nom, dans le patrimoine de S. Pierre. Long. 29. 33. lat. 42. 37.
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BOLTON | (Géog.) ville d'Angleterre, dans la soûdivision septentrionale de la province d'Yorck, sur la riviere de Trivel.
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BOLUC-BASSI | (Hist. mod.) c'est le nom d'une dignité ou d'un grade militaire chez les Turcs. Les boluc-bassis, sont chefs de bandes, ou capitaines de cent janissaires : ils sont habillés & montés, & ils ont soixante aspres de paye par jour.
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BOLZAN | ou BOZZEN, (Géog.) ville d'Allemagne au comté de Tirol, sur la riviere d'Eisach, proche l'Adige. Long. 28. 46. lat. 46. 42.
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BOLZAS | S. m. (Commerce) coutil fabriqué de fil de coton, qui vient des Indes. Il y en a de tout blancs, & d'autres rayés de jaune : les raies s'en font avec du fil de coton écru.
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BOLZWAERT | (Géog.) ville de la province de Frise, près de Zuyder-Zée.
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BOMBAI | ou BOMBAI, (Géog.) ville d'Asie dans les Indes, proche la côte de Malabar, au royaume de Visapour. Long. 90. 30. lat. 19.
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BOMBARD | S. f. (Artillerie) piece d'artillerie dont on se servoit autrefois, qui étoit grosse & courte avec une ouverture fort large. Quelques-uns l'ont appellée basilic.
Il y en a qui dérivent ce mot par corruption de Lombarde, croyant qu'elle est venue de Lombardie. Ducange après Vossius, le dérive de bombus & ardeo ; Menage, de l'allemand bomberden, le pluriel de bomber baliste : mais je doute que les Allemands ayent jamais connu ce mot. Il est assez ordinaire à Menage, & à plusieurs autres étymologistes, de donner des étymologies de mots qu'ils ont eux-mêmes forges.
Il y a eu des bombardes qui ont porté jusqu'à 300 livres de balle. Froissart fait mention d'une de ces pieces, qui avoit cinquante piés de long. On se servoit de grues de charpente pour les charger. On croit que les bombardes étoient en usage avant l'invention du canon. Voyez CANON.
Le P. Daniel croit qu'on donna d'abord le nom de bombarde à toutes les armes à feu, & que ce nom vient du grec , qui signifie le bruit que ces armes font en tirant. (Q)
BOMBARDE, (Luth.) jeu d'orgue de la classe de ceux qu'on appelle jeu d'anche, voyez TROMPETTE. & dont la bombarde ne différe que parce qu'elle sonne l'octave au-dessous, étant d'un plus grand diapason. Voyez la table du rapport des jeux de l'orgue. Il y a des orgues où les basses de ce jeu sont en bois ; alors les tuyaux ont la forme représentée dans la fig. 5. Pl. d'Orgue. Ceux des dessus & des tailles sont faits comme ceux de la trompette, & sont d'étain fin, ainsi que les basses, si on ne les fait point en bois.
Ordinairement on place la bombarde sur un sommier séparé ; car comme ce jeu consomme beaucoup de vent, il altéreroit les autres. Voyez ORGUE, où on explique la facture & les proportions des parties de ce jeu.
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BOMBARDEMENT | S. m. (Artillerie) c'est le fracas que l'on fait en jettant des bombes dans une place ou ailleurs. (Q)
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BOMBARDER | c'est jetter des bombes dans un fort ou dans une place. (Q)
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BOMBARDIER | S. m. c'est, dans l'Artillerie, celui qui exécute les mortiers & les bombes.
Les bombardiers ont formé en France un régiment attaché à l'Artillerie, comme celui des fusiliers, appellé ensuite régiment royal artillerie. Mais le régiment des bombardiers a été incorporé dans royal artillerie, par l'ordonnance du 5 Février 1720. Voyez MORTIER. (Q)
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BOMBARJOHN-SIGGEAR | (Hist. mod.) c'est le nom qu'on donne, à la cour de Maroc, à un eunuque noir qui est commis à la garde des thrésors & bijoux de l'empereur.
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BOMBASIN | S. m. (Commerce) on donne ce nom à deux sortes d'étoffes : l'une de soie dont la manufacture a passé de Milan en quelques provinces de France ; l'autre croisée & de fil de coton.
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BOMBE | S. f. (Artill.) est un gros boulet creux que l'on remplit de poudre, & qu'on jette par le moyen du mortier sur les endroits qu'on veut détruire. Elle produit deux effets ; savoir, celui de ruiner les édifices les plus solides par son poids ; & celui de causer beaucoup de desordre par ses éclats : car lorsque la poudre dont elle est chargée prend feu, son effort rompt ou creve la bombe, & en fait sauter les éclats à la ronde.
Le mot de bombe vient de bombus, crepitus, ou sibilus ani, à cause du bruit qu'elle fait.
M. Blondel croit que les premieres bombes furent jettées, en 1588, au siége de Wachtendonck, ville du duché de Gueldres. D'autres prétendent qu'un siecle auparavant, en 1495, on en jetta à Naples sous Charles VIII. & ils tâchent de le prouver par un endroit du Verger d'honneur, composé par Octavien de Saint-Gelais, & par André de la Vigne. Strada dit que ce fut un habitant de Venlo qui se mêloit de faire des feux d'artifice, qui inventa les bombes. Les habitans de cette ville se proposerent de régaler de cette invention le duc de Cleves qui étoit venu chez eux, & à qui ils avoient donné un grand repas. Ils voulurent donc en faire la premiere expérience devant lui, & elle réussit beaucoup mieux qu'ils ne l'avoient prétendu : car la bombe étant tombée sur une maison, elle enfonça le toît & les planchers, & y mit le feu, qui s'étant communiqué aux maisons voisines, brûla les deux tiers de la ville, le feu étant devenu si violent qu'il ne fut pas possible d'arrêter l'incendie. Le duc se servit de cette invention au siége de Wachtendonck, qu'il entreprit peu de jours après.
" Je sais, ajoûte Strada, que quelques-uns ont écrit qu'un mois ou deux auparavant, une pareille expérience avoit été faite à Berg-op-zoom par un Italien deserteur des troupes d'Espagne, qui s'étoit donné aux Hollandois, & leur avoit promis de faire des boules creuses de pierre ou de fer, qui étant jettées dans une ville assiégée, & se crevant après leur chûte, mettoient le feu par-tout : mais comme il préparoit son artifice, une étincelle étant tombée sur la poudre, il en fut tué, & laissa en mourant ceux pour qui il travailloit, dans l'incertitude si son secret auroit réussi ".
C'est seulement au siége de la Motte, en 1634, qu'on voit le premier usage des bombes en France. Le roi Louis XIII. avoit fait venir de Hollande un ingénieur Anglois nommé Mathus, qui employa les bombes avec succès en différens siéges, & qui fut tué à celui de Gravelines en 1658. Nous avons un livre de cet ingénieur, intitulé pratique de la guerre, contenant l'usage de l'artillerie, bombe, &c.
Les figures 5 & 6. de la Pl. VII. de l'art milit. peuvent servir à donner une idée exacte de la bombe.
La fig. 5. fait voir une bombe telle qu'elle paroît à la vûe, & la fig. 6. en fait voir la coupe ou le profil.
Les parties A & B sont les anses de la bombe, & F est la lumiere de la fig. 5. Dans la fig. 6. l'épaisseur du métal est marquée par l'espace rempli de petits points ; C D est la fusée de la bombe enfoncée par la lumiere C qui est entre les anses A & B. Voyez FUSEE & MORTIER. Cette fusée sert à porter le feu dans la poudre dont la bombe est chargée, laquelle poudre en s'enflammant, fait crever la bombe.
La bombe qui est jettée par un mortier de 18 pouces 4 lignes de diametre, qui contient douze livres de poudre dans sa chambre concave en forme de poix, appellée de la nouvelle invention, a dix-sept pouces dix lignes de diametre. Voyez CHAMBRE.
Elle a deux pouces d'épaisseur par-tout, excepté au culot qui a deux pouces dix lignes.
Sa lumiere a 20 lignes d'ouverture dehors, & dedans elle contient 48 livres de poudre, & pese sans sa charge 490 livres & un peu plus ; elle a deux anses coulées auprès de la lumiere.
Le mortier qui a 11 pouces 6 lignes de diametre, contient dans sa chambre 18 livres de poudre. Sa bombe a 11 pouces 8 lignes de diametre ; 1 pouce 4 lignes d'épaisseur par-tout, hors le culot qui a un pouce 8 lignes ; sa lumiere a 26 lignes d'ouverture par-dessus & par-dedans ; elle contient quinze livres de poudre, elle a deux anses coulées auprès de sa lumiere, & elle pese sans sa charge environ 130 livres.
Les bombes qui sont jettées par des mortiers de 12 pouces, 3, 4 & jusqu'à 6 lignes de diametre, & qui ont dans leurs chambres concaves 12 & 8 livres de poudre, ont les mêmes proportions que la précédente.
C'est aussi la même chose pour la bombe qui sert au mortier ordinaire de 12 pouces, qui contient dans sa chambre 5 à 6 livres de poudre.
La bombe jettée par un mortier de 8 pouces 4 lignes de diametre, & qui porte 1 livre & 3/4 de poudre dans sa chambre, a 8 pouces de diametre, 10 lignes d'épaisseur par-tout, hors du culot qui en a 13. Sa lumiere a un pouce de diametre par-dessus & par-dedans. Elle contient quatre livres de poudre ; elle a des anses de fer battu coulées avec la bombe, & elle pese sans sa charge 35 livres.
La bombe jettée par un mortier de 6 pouces 1/4 de diametre, qui porte dans sa chambre une livre & un peu plus de poudre, a 6 pouces de diametre, 8 lignes par-tout, hors par le culot où elle a 11 à 12 lignes ; sa lumiere a 10 lignes d'ouverture par-dessus & par-dedans. Elle contient trois livres & demie de poudre, & elle pese sans sa charge, 20 livres ou environ ; ces sortes de bombes n'ont point d'anses ordinairement.
Il y a des cas où l'on peut diminuer la poudre dont la bombe est chargée, c'est-à-dire lorsqu'on n'employe les bombes que pour ruiner les édifices, sans vouloir y mettre le feu, ou pour tirer sur les troupes ; car alors l'objet de la charge n'est que de faire crever la bombe ; par conséquent il ne faut que la quantité de poudre nécessaire pour produire cet effet. Or suivant ce qui est rapporté dans le Traité des armes & machines en usage à la guerre depuis l'invention de la poudre, M. Belidor a trouvé que trois livres de poudre étoit tout ce qu'il falloit pour faire crever les bombes de 12 pouces, & 1 livre pour celles de 8 ; ce qui doit faire présumer que 8 ou 10 livres suffiroient pour charger les bombes de 18 pouces au lieu des 48 liv. dont on les charge ordinairement.
La fig. 7. de la Pl. VII. de l'art milit. fait connoître comment l'on coule une bombe de 11 pouces 8 lignes, & ainsi des autres.
E, noyau de terre.
F, place qu'occupe le métal, formant l'épaisseur de la bombe, & d'où l'on a tiré la terre douce qui étoit entre le noyau & la chape.
Il faut observer que la terre se tire aisément, parce que la chape est de deux pieces.
G, chape qui est de terre fort dure & recuite.
H, est la lance qui passe au-travers du noyau, & qui le suspend en l'air pour laisser couler le métal entre le noyau & la chape.
I, I, ouvertures où sont placées les anses, & par lesquelles on coule la bombe.
Pour qu'une bombe soit bien conditionnée, il faut qu'elle soit de bonne fonte, & d'une matiere douce & liante, pour éviter les soufflures, les chambres & les évents, ensorte qu'elle soit à toute sorte d'épreuve. Elle doit être bien nette en-dedans, & il faut que le morceau de fer qui tient toûjours au culot après la fonte, & que l'on appelle lance, soit rompu.
La bombe doit être encore bien coupée, bien ébarbée par le dehors, & bien ronde ; avoir sa lumiere bien saine & les anses entieres, afin de la placer plus aisément dans le mortier.
Maniere de charger les bombes. Pour charger les bombes, il faut les emplir de poudre avec un entonnoir, y mettre ensuite la fusée C D, fig. 6. Pl. VII. de l'art milit. qu'on frappe ou enfonce dans la lumiere de la bombe avec un maillet de bois, & jamais de fer, crainte d'accident. A l'égard de la maniere de l'exécuter avec le mortier, voyez MORTIER & BATTERIE DE MORTIERS. (Q)
La théorie du jet des bombes est l'objet principal de la Balistique. Voyez BALISTIQUE. On trouvera cette théorie expliquée à l'article PROJECTILE.
BOMBE, adj. (Coupe des pierres) se dit d'un arc peu élevé au-dessus de sa corde, ou d'un petit arc d'un très-grand cercle.
Lorsqu'au lieu de s'élever au-dessus, l'arc s'abaisse au-dessous de sa corde, on l'appelle bombé en contrebas, comme il arrive aux plates-bandes mal-faites. (D)
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BOMBEMENT | S. m. en Architecture, se dit pour cavité, convexité & renflement. Voyez BOMBE. (P)
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BOMBER | v. act. & n. en Architecture, c'est faire un trait plus ou moins renflé. (P)
BOMBER, en terme de Bijoutier, c'est proprement emboutir ou creuser les fonds d'un bijou, tel qu'une tabatiere, plus ou moins. Pour cet effet l'on a une plaque de fer de la forme que l'on veut donner à son fond : dans cette plaque on met un mandrin de plomb, le fond dessus, & le frappe-plaque sur l'or, puis on frappe sur ce frappe-plaque avec une masse, jusqu'à ce que le fond soit bombé. Voyez FRAPPE-PLAQUE.
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BOMBON | (Géog.) province de l'Amérique méridionale, dans le Pérou, de l'audience de Lima, où la riviere des Amazones prend sa source. (Z)
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BOMERIE | S. f. terme de commerce de mer, c'est une espece de contrat, ou de prêt à la grosse aventure, assigné sur la quille du vaisseau, différent de l'assûrance, en ce qu'il n'est rien dû en vertu de ce contrat, en cas de naufrage, mais seulement quand le navire arrive à bon port. On a donné ce nom à l'intérêt des sommes prêtées entre marchands sur la quille du vaisseau, ou sur les marchandises qui y sont chargées, moyennant quoi le prêteur se soûmet aux risques de la mer & de la guerre ; & comme la quille d'un vaisseau s'appelle bodem en hollandois, on a nommé ce prêt bodemerie ou bodmerie, dont nous avons fait celui de bomerie.
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BOMMEL | (Géog.) ville fortifiée de la Gueldre hollandoise, dans une île formée par le Waal, qu'on appelle Bommeler Weert.
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BOMMEN | (Géog.) petite ville des Provinces-Unies, dans l'île de Schouwen.
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BOMONIQUES | adj. (Hist. anc.) nom que les Lacédemoniens donnoient aux jeunes gens de leur nation, qui faisoient gloire à l'envi, de souffrir constamment les coups de foüet qu'on leur donnoit dans les sacrifices de Diane. Ils se défioient les uns les autres à qui supporteroit plus long-tems cette espece de supplice : quelques-uns le soûtenoient une journée toute entiere, & l'on en voyoit souvent expirer avec joie sous les verges ; leurs meres présentes à cette cérémonie, les encourageoient par des exhortations & par des chants d'allégresse. On prétend que par-là les Lacédemoniens avoient en vûe de rendre la jeunesse de bonne heure insensible aux douleurs, & de l'endurcir aux fatigues de la guerre. Les étymologistes tirent ce nom de , autel, & de , victoire ; comme si l'on disoit victorieux à l'autel, parce que cette flagellation se faisoit devant l'autel de Diane. (G)
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BON | adj. (Métaph.) S'il est difficile de fixer l'origine du beau, il ne l'est pas moins de rechercher celle du bon. Il se fait aimer, ainsi que le beau se fait admirer, dans les ouvrages de la nature & dans les productions des arts. Mais quelle est son origine & quelle est sa nature ? en a-t-on une notion précise, une véritable idée, une exacte définition ? Ce qui embarrasse le plus, ce sont les diverses acceptions qu'il reçoit, selon les diverses circonstances où on l'applique. Il signifie tantôt une bonté d'être, tantôt une bonté animale, tantôt une bonté raisonnée propre à l'être pensant. Essayons de développer ces divers sens.
La bonté d'être consiste dans une certaine convenance d'attributs qui constitue une chose ce qu'elle est. Tous les êtres en ce sens sont nécessairement bons, parce qu'ils ont ce qui les constitue tels qu'ils sont ; & il est même impossible qu'ils ne l'ayent pas. J'ajoûte que tous les êtres sont également bons de ce genre de bonté. Mais outre les rapports intérieurs, qui constituent leur bonté absolue, ils en ont encore d'extérieurs, d'où résulte leur bonté relative. La bonté relative consiste dans l'ordre, l'arrangement, les rapports, les proportions, & la symmétrie que les êtres ont les uns avec les autres. Ici commence cette variété infinie de bonté qui différencie si fort tous les êtres. Ils ne sont pas tous également nobles & parfaits : un corps organisé est sans-doute préférable à une masse brute & grossiere. Par la même raison, un corps organisé & en même tems animé, l'emportera sur un corps organisé qui ne l'est pas ; & parmi les êtres animés, qui doute qu'il n'y en ait de plus parfaits les uns que les autres ? On diroit que la nature a ménagé, pour la perfection de cet univers, une espece de gradation qui nous fait monter à des êtres toûjours plus parfaits, à mesure qu'on s'avance dans la sphere qui les comprend tous. Ces nuances, il est vrai, ces passages imperceptibles n'ont plus lieu, quand il est question de passer du monde matériel au monde spirituel. De l'un à l'autre le trajet est immense : mais quand nous sommes une fois parvenus au monde spirituel, qui pourroit exprimer la distance qui sépare l'ame des bêtes, des sublimes intelligences célestes ? Les nuances qui distinguent les différentes especes d'esprits sont imperceptibles, & cependant très-réelles. Rien n'est plus mince que la barriere qui sépare l'instinct d'avec la raison, & cependant ils ne se confondent jamais. Voyez l'article ESPRIT, où nous avons eu soin d'en caractériser les différentes especes, & d'assigner, autant qu'il est possible, les limites qui séparent les unes des autres.
Tous les êtres qui entrent dans la composition de ce grand tout qu'on appelle l'univers, ne sont donc pas également bons, il est même nécessaire qu'ils ne le soient pas. C'est de l'imperfection plus ou moins grande des différens êtres, que résulte la perfection de cet univers. On conçoit qu'il seroit beaucoup moins parfait, s'il ne comprenoit dans sa totalité que des êtres de la même espece, ces êtres fussent-ils les plus nobles de tous ceux qui le composent. La trop grande uniformité déplaît à la longue : du moins elle ne tient pas lieu de la variété, qui compense ce qui manque aux êtres finis. Croit-on qu'un monde, qui ne seroit formé que de purs esprits, fut plus parfait qu'il ne l'est aujourd'hui ? qui ne voit que le monde matériel laisseroit par son absence un grand vuide dans cet univers ? On pourroit étendre cette reflexion jusqu'au mêlange de vertus & de vices, dont nous sommes ici-bas le spectacle & les spectateurs tout-à-la-fois. Un monde d'où seroient bannis tous les vices, ne seroit certainement pas si parfait qu'un monde qui les admet. La vertu prise en elle-même, est sans-doute préférable au vice, de même que l'esprit est par sa nature plus noble que le corps : mais quand on considere les choses par rapport au grand tout, dont ils font partie, on s'apperçoit aisément que pour une plus grande perfection, il étoit nécessaire qu'il y eût des imperfections dans le monde physique & dans le monde moral.
Si mala sustulerat, non erat ille bonus.
Voyez l'article MANICHEISME, où ce raisonnement est développé dans toute sa force.
Rien n'est sans-doute plus admirable que tous ces rapports, que la main du Créateur a ménagés entre les différens êtres. Ils sont plus ou moins immédiats, suivant le plus ou moins de variété de ces êtres. Il en est d'eux comme des vérités, qui tiennent toutes les unes aux autres, moyennant les vérités intermédiaires qui servent à les réunir. La bonté de cet univers consiste dans la gradation des différens êtres qui le composent. Ils ne sont séparés que par des nuances, comme nous l'avons déjà remarqué ; il ne se trouve aucun vuide dans le passage du regne minéral au regne végétal, ni dans le passage de celui-ci au regne animal ; autrement, pour me servir de la pensée de l'illustre Pope, il y auroit un vuide dans la création, où, un degré étant ôté, la grande échelle seroit détruite. Qu'un chaînon soit rompu, la chaîne de la nature l'est, & l'est également, soit au dixieme, soit au dix-millieme chaînon. C'est alors qu'on verroit, pour continuer la pensée du poëte Anglois ; la terre perdre son équilibre & s'écarter de son orbite, les planetes & le soleil courir sans regle au-travers des cieux, un être s'abysmer sur un autre être, un monde sur un autre monde, toute la masse des cieux s'ébranler jusque dans son centre, la nature frémir jusqu'au throne de Dieu, en un mot tout l'ordre de cet univers se détruire & se confondre.
Il faudroit être stupide & insensible, pour ne pas appercevoir la dépendance & la subordination de tous les êtres qui entrent dans la composition de ce tout admirable : mais il faudroit être encore pis que tout cela pour l'attribuer à un hasard aveugle. Voyez HASARD & éPICUREISME. L'esprit ne peut être frappé sans admiration de cette multiplicité de rapports, de ces combinaisons infinies, de cet ordre, de cet arrangement qui lie toutes les parties de l'univers, & l'on peut dire que plus il saisira de rapports, plus la bonté des êtres se manifestera à lui d'une maniere sensible & frappante. Dieu seul connoît toute la bonté qu'il a mise dans ses ouvrages, parce qu'il est lui seul capable de connoître parfaitement la justesse qui brille dans ses ouvrages, le rapport mutuel qui se trouve entr'eux, l'harmonie qui fait d'eux un tout régulier & sagement ordonné, en un mot l'ordre établi pour les conserver. La chaîne qui attire & réunit toutes les parties est entre les mains de Dieu, & non entre celles de l'homme. Petites parties de ce tout, comment pourrions-nous le comprendre ? " Tout ce que nous voyons du monde (dit dans son style énergique le sublime Paschal) n'est qu'un trait imperceptible dans l'ample sein de la nature : nulle idée n'approche de l'étendue de ses espaces : nous avons beau enfler nos conceptions, nous n'enfantons que des atomes au prix de la réalité des choses : c'est un cercle infini, dont le centre est par-tout, la circonférence nulle part : enfin c'est un des plus grands caracteres sensibles de la toute-puissance de Dieu, que notre imagination se perde dans cette pensée.... L'intelligence de l'homme tient, dans l'ordre des choses intelligibles, le même rang que son corps dans l'étendue de la nature : & tout ce qu'elle peut faire, est d'appercevoir quelqu'apparence du milieu des choses, dans un desespoir éternel d'en connoître ni le principe ni la fin. Toutes choses sont sorties du néant, & portées jusqu'à l'infini : qui peut suivre ces étonnantes démarches ? l'auteur de ces merveilles les comprend, nul autre ne le peut faire " Pensées de Pasch. ch. xxij.
Nous sommes forcés de joindre le témoignage de notre raison, au témoignage aveugle des créatures inanimées & matérielles, dont la beauté, la disposition & l'économie annoncent si hautement la grandeur de celui qui les a faites. Un spectacle digne de Dieu, peut bien être digne de nous. Moyse rapporte que lorsque Dieu eut achevé l'ouvrage des six jours, il considéra tous les êtres d'une seule vûe, & que les ayant comparés entr'eux & avec le modele éternel dont ils étoient l'expression, il en trouva la beauté & la perfection excellente. L'univers parut à ses yeux comme un tableau qu'il venoit de finir, & auquel il avoit donné la derniere main. Il trouva que chaque partie avoit son usage, chaque trait sa grace & sa beauté : que chaque figure étoit bien située & faisoit un bel effet : que chaque couleur étoit appliquée à propos, mais sur-tout que l'ensemble en étoit merveilleux : que les ombres mêmes donnoient du relief au reste ; que le lointain en s'attendrissant faisoit paroître ce qui étoit plus proche avec une force nouvelle ; & que les objets les plus remarquables recevoient une nouvelle beauté par le lointain, dont ils n'étoient séparés que par une diminution imperceptible de teintes & de couleurs. Qui considéreroit ce tableau de plus près, pourroit appercevoir dans le plan de la création celui de la rédemption. Si quelques défauts nous frappent dans cet immense tableau, souvenons-nous que ce sont des ombres que la main de l'éternel y a jettées exprès pour en faire sortir les figures ; que leur ordre & leur situation contribuent à lui donner une beauté qu'il n'auroit pas : & que prendre occasion de ces défauts pour critiquer l'univers & son auteur, ce seroit ressembler à un ciron, dont les yeux seroient fixés sur les ombres d'un tableau, & qui prononceroit que ce tableau est défectueux, qu'il n'y reconnoît aucune ordonnance, ni le vrai ton des couleurs.
La bonté animale est une économie dans les passions, que toute créature sensible & bien constituée reçoit de la nature. C'est en ce sens qu'on dit d'un chien de chasse, qu'il est bon, lorsqu'il n'est ni lâche ni opiniâtre : c'est aussi en ce sens qu'on dit d'un homme, qu'il est bien constitué, lorsqu'il regne dans ses membres la proportion qui s'ajuste le mieux avec les fonctions auxquelles l'a destiné la providence. La bonté animale sera d'autant plus parfaite, que les membres bien proportionnés conspireront d'une façon plus avantageuse à l'accomplissement des fonctions animales. Par une suite des lois que Dieu a établies, il doit s'exciter dans l'ame telles ou telles sensations à l'occasion de telles ou telles impressions qui auront été faites sur les organes de nos sens. Si donc elles ne s'y excitoient pas, il y auroit alors un défaut d'économie animale. On en peut voir un exemple bien sensible dans les personnes paralytiques. Le défaut d'économie animale se trouve aussi dans ceux qui ont des mouvemens convulsifs, qu'ils ne peuvent arrêter ni suspendre. On peut dire la même chose de ceux qui sont fous & stupides. Les uns ont trop d'idées, & les autres n'en ont pas assez, par un défaut de conformation dans le cerveau. Il est des personnes qui sont nées sans aucun goût pour la Musique, & d'autres pour qui les vers les mieux faits ne sont qu'un vain bruit. Ce défaut d'organes dans ces sortes de personnes est, comme l'on voit, un défaut d'économie animale. On peut dire en général, que c'est-là le grand défaut de ces esprits stupides & grossiers, dont la portée ne sauroit atteindre au raisonnement le plus simple. Les organes du corps qui les voile & les enveloppe, sont si épais & si massifs, qu'il ne leur est presque pas possible de déployer leurs facultés ni de faire leurs opérations. Plus les organes sont délicats, plus les sensations qu'ils occasionnent sont vives. Il y a des animaux qui nous surpassent par la délicatesse de leurs organes : le lynx a la vûe plus perçante que nous ; l'aigle fixe le soleil qui nous ébloüit ; le chien a plus de sagacité que nous dans l'odorat ; le toucher de l'araignée est plus subtil que le nôtre, & le sentiment de l'abeille plus exquis & plus sûr que celui que nous éprouvons : mais n'envions point aux animaux l'avantage qu'ils ont sur nous en cette partie. Si nous avions l'oeil microscopique du lynx, nous verrions le ciron ; mais notre vûe ne pourroit s'étendre jusqu'aux cieux. Si le toucher étoit plus sensible & plus délicat, nous serions blessés par tous les corps environnans, les douleurs & les maladies s'introduiroient par chaque pore. Si nous avions l'odorat plus vif, nous serions incommodés des parties volatiles d'une rose ; & leur action sur le cerveau en ébranleroit trop violemment les fibres. Avec une oreille plus fine, la nature se feroit toûjours entendre à nous avec un bruit de tonnerre, & nous nous trouverions étourdis par le plus leger souffle de vent. Croyons que les organes dont la nature nous a doüés, sont proportionnés au rang que nous tenons dans l'univers. S'ils étoient plus grossiers ou plus délicats, nous ne nous trouverions plus si propres aux fonctions animales, qui sont une suite de notre constitution. Après qu'on a pesé toutes choses dans la balance de la raison, on est forcé de reconnoître la bonté & la sagesse de la providence également & dans ce qu'elle donne & dans ce qu'elle refuse, & de convenir avec Pope, en dépit de l'orgueil & de la raison qui s'égare, de cette vérité évidente, que tout ce qui est, est bien. Nous nous regardons comme dégradés, parce qu'il a plû à l'auteur de notre être de nous assujettir aux organes d'un corps : mais il pourroit se trouver, en approfondissant la matiere, que cette influence de l'union de l'ame avec le corps, s'exerce peut-être plus au profit qu'aux dépens de nos facultés intellectuelles. Voyez les articles ESPRIT & RESURRECTION, où cette question est agitée.
La bonté raisonnée, qualité propre à l'être pensant, consiste dans les rapports des moeurs avec l'ordre essentiel, éternel, immuable, regle & modele de toutes les actions réfléchies : elle est la même que la vertu. Voyez cet article.
Jusqu'ici nous n'avons considéré le bon, que par les rapports qu'il a avec notre esprit. Pris en ce sens, il rentre dans l'idée du beau, qui n'est autre chose que la perception des rapports (voyez cet article) mais il y a un autre bon, dont les rapports sont plus immédiats avec nous, parce qu'ils touchent notre coeur de plus près. La bonté qui résulte de ces rapports, est plus intimement liée avec notre être, plus proportionnée à nos intérêts : il n'y a qu'elle qui ait de l'ascendant sur notre coeur, & qui l'ouvre au sentiment. L'autre bonté nous est, pour ainsi dire, étrangere ; elle ne nous touche presque pas : si elle a des charmes, ce n'est que pour notre esprit. Nous admirons les êtres en qui paroît cette premiere bonté : mais nous n'aimons que ceux qui participent à cette autre bonté ; & l'amour que nous leur portons se mesure sur les différens degrés de cette bonté relative. Le bon, pris dans ce second sens, se confond avec l'utile ; desorte que tous les êtres qui nous sont utiles, renferment cette bonté qui intéresse le coeur, ainsi que cette autre bonté qui plaît à l'esprit, est l'apanage de tous les êtres qui sont beaux.
Le bon a donc deux branches, dont l'une est le bon qui est beau, & l'autre le bon qui est utile. Le premier ne plaît qu'à l'esprit, & le second intéresse le coeur : l'un n'obtient de nous que des sentimens d'estime & d'admiration, tandis que nous réservons pour l'autre toute notre tendresse. Un être qui ne seroit que beau pour nous, se feroit seulement estimer & admirer de nous. Dieu, tout Dieu qu'il est, auroit beau déployer à notre esprit toutes les perfections qui le rendent infini, il ne trouveroit jamais le chemin de notre coeur, s'il ne se montroit à nous comme bienfaisant. Sa bonté pour nous est le seul attribut qui puisse nous arracher l'hommage de notre coeur. Et que nous serviroit le spectacle de sa divinité, s'il ne nous rendoit heureux ?
On voit par-là combien s'abusent de pieux visionnaires, qui follement amoureux d'une perfection chimérique, s'imaginent qu'ils peuvent aimer dans Dieu autre chose que sa bonté bienfaisante. Quel desintéressement ! ils veulent que leur amour pour Dieu soit si pur, si généreux, si gratuit, si indépendant de toutes vûes intéressées, que même à l'égard de Dieu on se contente du plaisir de l'aimer, sans rien attendre & sans rien espérer de lui. Ce n'est pas ici le lieu de combattre ces excès impies qui sont contraires à la loi naturelle, & qui deshonorent la Religion, sous la vaine apparence d'une perfection chimérique qui en détruit les fondemens. Voyez les articles CHARITE & QUIETISME, où sont réfutées ces absurdités aussi impies qu'insensées, mais qui sont les suites nécessaires d'un desintéressement absolu.
Un être peut nous être utile de deux manieres ; ou par lui-même, ou par quelque chose qui soit distingué de lui. Ce qui ne nous est utile que comme moyen, nous ne l'aimons pas pour lui-même. mais seulement pour la chose à laquelle il nous fait parvenir : ainsi nous n'aimons pas les richesses pour elles-mêmes, mais bien pour les plaisirs que nous achetons à leurs dépens ; j'excepte pourtant les avares, pour qui la possession des richesses est un véritable bien : ceux-ci sont heureux par la vûe de l'or, & les autres ne le sont que par l'usage qu'ils en font. Mais un être nous est-il utile par lui-même ? c'est alors que nous l'aimons par lui-même & que notre coeur s'y attache : ou cet être nous satisfait du côté de la conscience & de la raison, ce qui est un bien durable, solide, & qui n'est point sujet à de fâcheux revers ; & alors on lui donne le nom de bien honnête : ou bien cet être ne nous satisfait que du côté de la cupidité, & se trouve par conséquent exposé au dégoût & à l'inquiétude ; & alors on lui donne simplement le nom de bien agréable, entant qu'opposé à l'honnêteté.
Après avoir considéré le bon dans les êtres naturels, il est naturel de l'examiner dans ceux qu'on appelle artificiels : ils ont été inventés sur le modele de la nature ; d'où je conclus que leur perfection dépend plus ou moins de leur imitation de la nature. Mais de même que dans les ouvrages de la nature il y a un bon & un beau, qui ne dépendent ni du hasard ni du caprice, ainsi dans les productions des arts il y a des lois immuables qui nous guident dans nos connoissances & dans nos goûts ; & on ne peut en aucune façon violer ces lois tracées, avec tant d'éclat dans les ouvrages de la nature, que l'esprit & le goût n'en soient révoltés.
Il se trouve, avons-nous dit, dans les ouvrages de la nature deux sortes de bontés ; l'une qui rentre dans la même signification que la beauté, & qui pour cette raison ne flate que l'esprit ; & l'autre qui retient le nom de bonté, & qui intéresse notre coeur. Quand un objet réunit en soi ces deux genres de bonté, c'est-à-dire qu'il étend & perfectionne nos idées d'une part, & que de l'autre il nous présente des intérêts qui nous sont chers, qui tiennent à la conservation ou à la perfection de notre être, qui nous font sentir agréablement notre propre existence, nous prononçons que cet objet est bon ; & il l'est d'autant plus, qu'il possede ces avantages dans un plus haut degré. Pareillement une production de l'art, où le bon se réunissant avec le beau, renfermera toutes les qualités dont elle a besoin pour exercer & perfectionner à-la-fois notre esprit & notre coeur, sera d'autant plus parfaite, qu'elle attachera plus agréablement notre esprit, & qu'elle intéressera plus vivement notre coeur.
Parmi les ouvrages de la nature, il y en a qui ne sont que beaux, & qui ne plaisent qu'à l'esprit. La même chose se trouve dans les productions des arts : ainsi un théoreme de Géométrie, difficile, mais sans usage, n'est qu'un beau théorème. Voyez BEAU. Mais de même qu'il y a des ouvrages de la nature qui sont bons & beaux en même tems, parce qu'ils contiennent en soi de quoi réveiller des idées qui nous attachent & nous intéressent, il y en a aussi parmi les productions des arts qui produisent en nous le même effet, mais toûjours d'une maniere subordonnée à la nature, parce que la nature en tout surpasse l'art : in omni re procul dubio vincit imitationem veritas. Le coeur n'est touché des objets que selon le rapport qu'ils ont avec son avantage propre ; c'est ce qui regle son amour ou sa haine : or le coeur a plus d'avantage à attendre des objets naturels que des objets artificiels. Ce que l'art présente au coeur n'est qu'un phantôme, qu'une apparence ; & ainsi il ne peut lui apporter rien de réel. Ce qu'il y a de plus touchant pour nous, c'est l'image des passions & des actions des hommes, parce qu'elles sont comme des miroirs où nous voyons les autres, avec des rapports de différence ou de conformité. Il y auroit ici un beau problème à résoudre, savoir qui de Corneille ou de BON, (en terme de Pratique) est un terme par lequel on ratifie une promesse, une cellule ; faire bon, c'est promettre de payer pour soi ou pour autrui. (H)
* BON, (Hist. mod.) c'est le nom d'une fête que les Japonois célebrent tous les ans en l'honneur des morts ; on allume ce jour-là à chaque porte grand nombre de lumieres, & chacun s'empresse de courir aux tombeaux de ceux qui leur ont autrefois appartenu, avec des mets bien choisis qui sont destinés à la nourriture des morts.
BON, terme d'honneur dont on se sert dans le commerce pour désigner un marchand riche & solvable. Vous pouvez confier votre marchandise à M. N. je vous garantis qu'il est bon.
BON D'AUNAGE, voyez AUNAGE, & BENEFICE D'AUNAGE.
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BON | BON
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BON-CHRÉTIEN | S. m. (Jardinage) espece de poire fort grosse & fort vantée pour la bonté de son goût. Il y en a de plusieurs especes ; les principales sont le bon-chrétien d'été, & le bon-chrétien d'hyver : celui d'été est beurré, long, pyramidal & assez gros ; ce fruit porte jusqu'à quatre pouces de diamétre par son milieu, sur cinq à six de hauteur ; sa couleur naturelle est jaune : il demeure sur l'arbre depuis le mois de Mai jusqu'à la fin d'Octobre, & se conserve quatre à cinq mois dans la serre. Celui d'hyver a la même forme que celui d'été : sa chair est cassante, sa saveur agréable, & son eau douce & sucrée. Son défaut est d'être un peu coriasse & pierreux. Les curieux distinguent plusieurs sortes de bon-chrétiens, tant d'hyver que d'été : mais toutes ces distinctions sont de fantaisie.
La Quintinie fait encore mention du bon-chrétien d'été musqué, & du bon-chrétien d'Espagne : le premier de ces fruits est une poire de la grosseur d'une belle bergamotte, blanche d'un côté, rouge de l'autre, d'une chair entre le tendre & le cassant, & pleine d'eau & de parfum. Le second a tout-à-fait la forme du bon-chrétien d'hyver : mais il est rouge d'un côté, & piqueté de points noirs, d'un blanc jaunâtre de l'autre ; sa chair est très-cassante, son eau douce, sucrée, & assez agréable, quand il est mûr ; ce qui arrive assez communément depuis la mi-Novembre jusqu'à la mi-Décembre, & quelquefois en Janvier.
Au reste on ne peut guere avoir aucun de ces bon-chrétiens d'une certaine beauté, qu'on n'en mette les arbres en espalier ; on n'en obtient autrement que dans des jardins d'une exposition très-favorable.
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BON-HENRI | Bonus-Henricus, s. m. (Hist. nat. bot.) plante qui doit se rapporter au genre appellé patte-d'oie. Voyez PATTE-D'OIE.
* Le bonus-henricus, ou la tota-bona, a la racine épaisse, jaunâtre, garnie de quelques fibres, acre, & amere ; les tiges nombreuses, cannelées, creuses, en partie droites, en partie couchées sur la terre, legerement velues, longues d'un pié ou d'une coudée ; les feuilles triangulaires, comme celles de l'arroche ou du pié-de-veau, & quelquefois assez semblables, lisses en-dessus, couvertes d'une fine farine en-dessous, portées sur de longues queues, & posées alternativement sur des tiges, d'une saveur un peu nitreuse ; les fleurs au sommet des tiges, ramassées en épi, petites, sans pétales, composées de plusieurs étamines jaunes qui s'élevent d'un calice découpé en plusieurs parties ; le pistil dégénérant en une petite graine arrondie, applatie, approchant de la forme de rein, noire dans sa maturité, renfermée dans une capsule qui a la figure d'une étoile, & qui étoit le calice de la fleur.
La plante entiére est d'usage : on la trouve dans les lieux incultes & les masures, le long des chemins, des vieilles murailles & des haies des champs, ou même on la cultive dans les potagers.
La plante entiére, graine & racine, distillée à la cornue, donne une liqueur limpide, d'une couleur & d'une saveur d'herbe ; une autre liqueur limpide, de la même odeur & saveur, mais plus manifeste & fort acide ; une liqueur roussâtre, empyreumatique, fort acide, un peu salée & un peu austere ; une liqueur rousse, empyreumatique, imprégnée de beaucoup de sel volatil urineux, une huile épaisse comme du sirop.
La masse noire de la cornue calcinée, a donné des cendres dont on a tiré par lixiviation un sel fixe purement alkali.
Ainsi cette plante contient un sel essentiel, nitreux, ammoniacal, mêlé de beaucoup d'huile, & délayé dans beaucoup de phlegme ; d'où il résulte que c'est un composé visqueux, & un peu mucilagineux.
Cette plante relâche le ventre, & est émolliente ; sa feuille pelée & hachée réunit les plaies récentes, déterge les ulceres sordides & vieux, & tue les vers qui y surviennent. Elle est encore digestive, résolutive, & calmante. Le cataplasme de la plante entiere soulage dans la goutte.
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BON-SENS | S. m. (Métaphysique) c'est la mesure de jugement & d'intelligence avec laquelle tout homme est en état de se tirer à son avantage des affaires ordinaires de la société.
Otez à l'homme le bon-sens, & vous le réduirez à la qualité d'automate ou d'enfant. Il me semble qu'on exige plûtôt dans les enfans de l'esprit que du bon-sens ; ce qui me fait croire que le bon-sens suppose de l'expérience, & que c'est de la faculté de déduire des expériences, qu'on fait le plus communément les inductions les plus immédiates. Il y a bien de la différence dans notre langue entre un homme de sens & un homme de bon-sens : l'homme de sens a de la profondeur dans les connoissances, & beaucoup d'exactitude dans le jugement ; c'est un titre dont tout homme peut être flatté : l'homme de bon-sens au contraire passe pour un homme si ordinaire, qu'on croit pouvoir se donner pour tel sans vanité. Au reste il n'y a rien de plus relatif que les termes sens, sens-commun, bon-sens, esprit, jugement, pénétration, sagacité, génie, & tous les autres termes qui marquent soit l'étendue, soit la sorte d'intelligence de chaque homme. On donne ou l'on accorde ces qualités, selon qu'on les mérite plus ou moins soi-même.
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BONA | (Géog.) ville maritime d'Afrique, dans le royaume d'Alger, & peu loin de la frontiere de Tunis. Les vestiges de l'ancien Hippo-regius en sont peu éloignés. Lat. 37 degrés, long. 27 & demi.
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BONACE | S. f. (Marine) calme dans lequel le vent cesse, & les houles ou lames de la mer s'applanissent. Quelquefois la bonace précede les plus grands orages, & les pilotes s'en défient. V. CALME. (Z)
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BONAIRE | (Géog. mod.) île vis-à-vis du continent de l'Amérique méridionale, & de la province de Caracai, au levant de l'île de Curaçao, & occupée par les Hollandois. Lat. 12. long. 309.
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BONAROTE | S. f. (Hist. nat. bot.) en latin bonarota, genre de plante à fleur monopétale irréguliere, faite en masque & tubulée ; elle est divisée en deux levres dont la supérieure est entiere, ou un peu échancrée, & l'inférieure fendue en trois ou en quatre parties. Il s'éleve du fond du calice un pistil qui est attaché comme un clou à la partie postérieure de la fleur, & qui devient dans la suite un fruit oblong, fourchu, un peu applati, composé de deux loges formées par une cloison qui s'étend depuis le fond jusqu'au milieu. Ce fruit s'ouvre jusqu'au centre en quatre parties torses ; il est rempli de semences qui ressemblent à des grains de froment, & qui sont attachées à un placenta. Voyez Micheli, nova plantarum genera. Voyez PLANTE. (I)
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BONASIENS | S. m. pl. (Hist. ecclés.) hérétiques qui parurent dans le jv. siecle, & qui soûtenoient que Jesus-Christ n'étoit fils de Dieu que par adoption. Baronius. Voyez ADOPTIENS. (G)
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BONASUS | (Hist. nat. Zoolog.) animal de la figure d'un boeuf, dont il ne differe que parce qu'il est plus grand & plus fort ; d'ailleurs il a des crins pendans au cou comme le cheval, & d'autres qui lui tombent du sommet de la tête jusque sur les yeux : ses cornes vont en se recourbant, & renferment ses oreilles dans un arc à-peu-près circulaire. La convolution de ses cornes les lui rend inutiles pour le combat. On dit que sa chair est douce, & bonne à manger. Il semble différent de ce qu'on appelle la vache des Indes. Bonasus n'est pas le seul nom qu'il ait dans les auteurs ; Aristote l'appelle monapos ; Aelien, monopse ; & les Grecs, tantôt bolinthos, tantôt bonasos ou bonassos. On trouve la raison qui le faisoit appelles bolinthos, dans ce que les anciens Naturalistes rapportent de la maniere dont cet animal se défend quand il est chassé : ne pouvant écarter les chiens avec ses cornes recourbées, qui ne les blesseroient point, il lâche contr'eux ses excrémens, & les en couvre à la distance de quatre orgyes ou vingt-quatre piés. Ces excrémens sont une espece de caustique, assez corrosif pour enlever tout-d'un-coup le poil de l'endroit où ils tombent sur le corps des chiens. Le bonasus habitoit autrefois une montagne qui couvroit la Pæonie, & qui la séparoit d'un pays voisin appellé Mædica, qui Pæoniam Mædicamque regionem terminat.
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BONAVOGLIO | (Hist. mod.) on désigne par ce nom en Italie, ceux qui pour de l'argent & à certaines conditions s'engagent à servir sur les galeres, & qu'il faut distinguer des esclaves & des forçats qui sont condamnés à ramer.
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BONBANC | S. m. (Architecture) c'est une espece de pierre fort blanche qui se tire des carrieres qui sont aux environs de la ville de Paris. Le bonbanc se mouline, & ne résiste pas beaucoup ; il ne laisse pas néanmoins de durer assez long-tems, lorsqu'il n'est pas exposé aux injures de l'air ni à l'humidité. Il a depuis quinze pouces jusqu'à vingt-quatre de hauteur ; on s'en sert aux façades intérieures des bâtimens, & pour faire des rampes & des appuis ; on en tire aussi des colonnes : celui qui a un lit coquilleux & des molieres, est le meilleur.
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BOND | S. m. se dit en général de l'action d'un corps en mouvement qui réjaillit à la rencontre de la terre, ou d'un autre corps sur lequel il tombe.
BOND, terme de Paumier, c'est l'action d'une balle qui, après avoir frappé par terre rejaillit & se releve. Une balle prise au premier bond est aussi bonne que celle qu'on renvoye de volée : mais le second bond ne vaut rien.
Bond faux. Le faux bond est celui qui ne se faisant point selon la regle ordinaire de l'incidence des corps mûs en ligne droite, trompe le joueur, & lui fait manquer la balle. Voyez REFLEXION.
BOND, (Manege) est un saut que le cheval fait en s'élevant subitement en l'air, & retombant à sa même place. Aller par sauts & par bonds. Voyez ALLER. (V)
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BONDE | S. f. est une longue piece de charpente équarrie par un bout, & faite en forme de cone tronqué, que l'on pose dans un trou de la rigole pratiquée à l'endroit le plus creux d'un étang, pour le pouvoir vuider à fond quand on le veut pêcher. Cette bonde est soûtenue par un chassis de charpente avec un chapeau. (K).
* BONDE, (Hist. nat.) arbre d'une grandeur & grosseur prodigieuse qui se trouve au royaume de Quoya ; il a plus de six ou sept brasses d'épaisseur ; son écorce est toute hérissée d'épines ; son bois est huileux : on en fait plusieurs ustenciles de ménage ; aussi bien que des canots : ses cendres lessivées sont propres à faire de fort bon savon, en les mêlant avec de la vieille huile de dattes.
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BONDEN | (Hist. mod.) c'est un écueil fameux qui se trouve dans le golfe de Bothnie, qui se présente de loin comme un grand château bien bâti, & qui de près n'est qu'un assemblage de rochers.
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BONDENO | (Géog.) bourg du Ferrarois dans l'état du saint Siége, sur le Panaro, près de son embouchure dans le Pô.
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BONDON | terme de Tonnelier, est une cheville de bois grosse & courte dont on bouche le trou qu'on laisse au-dessus des tonneaux, pour pouvoir les remplir & leur donner de l'air quand on le veut.
Bondon se prend aussi quelquefois pour le trou qu'on ferme avec la cheville appellée bondon.
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BONDONNER | BONDONNER
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BONDONNIERE | instrument de Tonnelier fait en forme de tariere de figure conique, & dont le bout qui se termine en pointe est amorcé & tourné en vis : les Tonneliers s'en servent pour percer dans une des douves des futailles le trou où se met le bondon. V. TONNELIER.
La bondonniere est emmanchée dans le milieu, d'un cylindre de bois long d'un pié, rond, de deux pouces ou environ de diametre par le milieu, & plus petit par les extrémités. Voyez les Pl. du Tonnelier, & celles du Taillandier. Ce sont les Taillandiers qui font les bondonnieres.
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BONDORFF | (Géog.) bourg de la Soüabe dans la forêt Noire.
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BONDRÉE | (Hist. nat.) oiseau de rapine qui a le bec court, la tête plate & grosse, le cou fort court, garni de beaucoup de plumes. Il est en-dessus d'une couleur brune & obscure : mais il a le ventre blanc, marqueté de plusieurs taches brunes, oblongues ; il a la queue large. Aldrovandus lui donne trois testicules ; c'est ce qui l'a fait appeller en Latin buteo triorchis, ce qui est dérivé du mot Grec Voyez BUSE.
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BONDUC s | m. (Hist. nat. bot.) genre de plante dont la fleur est polypétale ou monopétale, profondément découpée en plusieurs parties, mais cependant d'une figure approchante de celle des fleurs irrégulieres. Il s'éleve du fond du calice un pistil qui devient dans la suite un fruit en silique pointu, le plus souvent hérissé de pointes : ce fruit renferme une ou deux semences rondes, dures, & lisses. Plumier, nova plant. Amer. gener. Voy. PLANTE. (I)
La plante nommée bonduc est d'usage en Medecine. Ses baies sont rondes & de couleur cendrée, blanches en-dedans, ameres & insipides.
On s'en sert dans les hernies ; elles dissipent les vents, soulagent dans la colique, fortifient l'estomac, provoquent les regles & chassent la pierre. Dale. (N)
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BONELLES | (Géog.) petite ville de l'île de France à neuf lieues de Paris.
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BONHEUR | S. m. (Morale) se prend ici pour un état, une situation telle qu'on en desireroit la durée sans changement ; & en cela le bonheur est différent du plaisir, qui n'est qu'un sentiment agréable, mais court & passager, & qui ne peut jamais être un état. La douleur auroit bien plûtôt le privilege d'en pouvoir être un.
Tous les hommes se réunissent dans le desir d'être heureux. La nature nous a fait à tous une loi de notre propre bonheur. Tout ce qui n'est point bonheur nous est étranger : lui seul a un pouvoir marqué sur notre coeur ; nous y sommes tous entraînés par une pente rapide, par un charme puissant, par un attrait vainqueur ; c'est une impression ineffaçable de la nature qui l'a gravé dans nos coeurs, il en est le charme & la perfection.
Les hommes se réunissent encore sur la nature du bonheur. Ils conviennent tous qu'il est le même que le plaisir ou du moins qu'il doit au plaisir ce qu'il a de plus piquant & de plus délicieux. Un bonheur que le plaisir n'anime point par intervalles, & sur lequel il ne verse pas ses faveurs, est moins un vrai bonheur qu'un état & une situation tranquille : c'est un triste bonheur que celui-là. Si l'on nous laisse dans une indolence paresseuse, où nôtre activité n'ait rien à saisir, nous ne pouvons être heureux. Pour remplir nos desirs, il faut nous tirer de cet assoupissement où nous languissons ; il faut faire couler la joie jusqu'au plus intime de notre coeur, l'animer par des sentimens agréables, l'agiter par de douces secousses, lui imprimer des mouvemens délicieux, l'enivrer des transports d'une volupté pure, que rien ne puisse altérer. Mais la condition humaine ne comporte point un tel état : tous les momens de nôtre vie ne peuvent pas être filés par les plaisirs. L'état le plus délicieux a beaucoup d'intervalles languissans. Après que la premiere vivacité du sentiment s'est éteinte, le mieux qui puisse lui arriver, c'est de devenir un état tranquille. Notre bonheur le plus parfait dans cette vie, n'est donc, comme nous l'avons dit au commencement de cet article, qu'un état tranquille, semé ça & là de quelques plaisirs qui en égayent le fond.
Ainsi la diversité des sentimens des philosophes sur le bonheur, regarde non sa nature, mais sa cause efficiente. Leur opinion se réduit à celle d'Epicure, qui faisoit consister essentiellement la félicité dans le plaisir. Voyez cet article. La possession des biens est le fondement de nôtre bonheur, mais ce n'est pas le bonheur même ; car que seroit-ce si les ayant en nôtre puissance, nous n'en avions pas le sentiment ? Ce fou d'Athenes qui croyoit que tous les vaisseaux qui arrivoient au Pirée lui appartenoient, goûtoit le bonheur des richesses sans les posséder ; & peut-être que ceux à qui ces vaisseaux appartenoient véritablement, les possédoient sans en avoir de plaisir. Ainsi, lorsqu'Aristote fait consister la félicité dans la connoissance & dans l'amour du souverain bien, il a apparemment entendu définir le bonheur par ses fondemens : autrement il se seroit grossierement trompé ; puisque, si vous sépariez le plaisir de cette connoissance & de cet amour, vous verriez qu'il vous faut encore quelque chose pour être heureux. Les Stoïciens, qui ont enseigné que le bonheur consistoit dans la possession de la sagesse, n'ont pas été si insensés que de s'imaginer, qu'il fallût séparer de l'idée du bonheur la satisfaction intérieure que cette sagesse leur inspiroit. Leur joie venoit de l'ivresse de leur ame, qui s'applaudissoit d'une fermeté qu'elle n'avoit point. Tous les hommes en général conviennent nécessairement de ce principe ; & je ne sais pourquoi il a plu à quelques auteurs de les mettre en opposition les uns avec les autres, tandis qu'il est constant qu'il n'y a jamais eu parmi eux une plus grande uniformité de sentimens que sur cet article. L'avare ne se repaît que de l'espérance de joüir de ses richesses, c'est-à-dire, de sentir le plaisir qu'il trouve à les posséder. Il est vrai qu'il n'en use point : mais c'est que son plaisir est de les conserver. Il se réduit au sentiment de leur possession, il se trouve heureux de cette façon ; & puisqu'il l'est, pourquoi lui contester son bonheur ? chacun n'a-t-il pas droit d'être heureux, selon que son caprice en décidera ? L'ambitieux ne cherche les dignités que par le plaisir de se voir élevé au-dessus des autres. Le vindicatif ne se vengeroit point, s'il n'espéroit de trouver sa satisfaction dans la vengeance.
Il ne faut point opposer à cette maxime qui est certaine, la morale & la religion de J. C. notre législateur & en même tems notre Dieu, lequel n'est point venu pour anéantir la nature, mais pour la perfectionner. Il ne nous fait point renoncer à l'amour du plaisir, & ne condamne point la vertu à être malheureuse ici-bas. Sa loi est pleine de charmes & d'attraits ; elle est toute comprise dans l'amour de Dieu & du prochain. La source des plaisirs légitimes ne coule pas moins pour le Chrétien que pour l'homme profane : mais dans l'ordre de la grace il est infiniment plus heureux parce qu'il espere, que par ce qu'il possede. Le bonheur qu'il goûte ici-bas devient pour lui le germe d'un bonheur éternel. Ses plaisirs sont ceux de la modération, de la bienfaisance, de la tempérance, de la conscience ; plaisirs purs, nobles, spirituels, & fort supérieurs aux plaisirs des sens. Voyez PLAISIR.
Un homme qui prétendroit tellement subtiliser la vertu qu'il ne lui laissât aucun sentiment de joie & de plaisir, ne feroit assûrément que rebuter notre coeur. Telle est sa nature qu'il ne s'ouvre qu'au plaisir ; lui seul en sait manier tous les replis & en faire joüer les ressorts les plus secrets. Une vertu que n'accompagneroit pas le plaisir, pourroit bien avoir notre estime, mais non notre attachement. J'avoue qu'un même plaisir n'en est pas un pour tous : les uns sont pour le plaisir grossier, & les autres pour le plaisir délicat ; les uns pour le plaisir vif, & les autres pour le plaisir durable ; les uns pour le plaisir des sens, & les autres pour le plaisir de l'esprit ; les uns enfin pour le plaisir du sentiment, & les autres pour le plaisir de la réflexion : mais tous sans exception sont pour le plaisir. Consultez cet article.
On peut lire dans M. de Fontenelle les réflexions solides & judicieuses qu'il a écrites sur le bonheur. Quoique nôtre bonheur ne dépende pas en tout de nous, parce que nous ne sommes pas les maîtres d'être placés par la fortune dans une condition médiocre, la plus propre de toutes pour une situation tranquille, & par conséquent pour le bonheur, nous y pouvons néanmoins quelque chose par notre façon de penser. (C)
* BONHEUR, PROSPERITE, (Gramm.) termes relatifs à l'état d'un être qui pense & qui sent. Le bonheur est l'effet du hasard ; il arrive inopinément. La prospérité est un bonheur continu, qui semble dépendre de la bonne conduite. Les fous ont quelquefois du bonheur. Les sages ne prosperent pas toûjours. On dit du bonheur qu'il est grand, & de la prospérité qu'elle est rapide. Le bonheur se dit & du bien qui nous est arrivé, & du mal que nous avons évité. La prospérité ne s'entend jamais que d'un bien augmenté par degrés. Le capitole sauvé de la surprise des Gaulois par les cris des oies sacrées, dit M. l'abbé Girard, est un trait qui montre le grand bonheur des Romains : mais ils doivent à la sagesse de leurs lois & à la valeur de leurs soldats, leur longue prospérité.
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BONICHON | S. m. (Verrerie) c'est un trou qui communique du four aux lunettes des arches à pots : il fait dans chaque arche à pot la fonction de ventouse. Comme on met cuire les bouteilles dans les arches à pots ; dès qu'on a quitté le travail, pour empêcher le feu du four d'entrer, & laisser refroidir les bouteilles ; on marge la lunette : mais la lunette étant margée, & la flamme du four n'ayant plus d'entrée ni de sortie, le four seroit étouffé, si on n'ouvroit le bonichon.
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BONIER | S. m. (Commerce & Agriculture) mesure de terre qui contient en surface 4074 toises cinq pouces & quatre lignes. Ainsi l'arpent contenant 900 toises, il faut quatre 1/2 arpens 24 toises 5 pouces & 4 lignes, pour l'équivalent d'un bonier en mesure de Paris. Cette mesure varie d'un canton à l'autre de la Flandre, où elle est en usage.
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BONIFACIO | (Géog.) petite ville & port dans la partie méridionale de l'île de Corse. Long. 27. lat. 41. 20. Le détroit qui sépare la Corse de la Sardaigne se nomme Bocca di Bonifacio.
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BONITE | (Hist. nat.) poisson fort commun dans la mer Atlantique : il est d'une couleur assez approchante de celle de nos maquereaux, à qui il ressemble aussi par le goût, hormis qu'il est beaucoup plus grand. Il se trouve plûtôt en pleine mer que près des côtes. Il est de la forme d'un oval, dont le grand diametre auroit deux piés, & le petit un ou un & demi : il y a près de la tête deux grands ailerons pointus, & depuis ses ailerons une ligne d'écaille tirée jusqu'à sa queue, qui est fourchue, & deux autres au-dessous ; une au bas-ventre, & l'autre de grandeur inégale, depuis le milieu du dos jusqu'à la queue. Il est couvert d'une peau ou cuir : la chair en est excellente ; elle est seche, ferme, & nourrissante. La mer en est quelquefois presque couverte. Il saute à dix ou douze piés de haut. On le prend soit à la foüine, soit au trident, soit au harpon, ou à l'hameçon. Cet hameçon est de la grosseur du petit doit : on l'amorce avec deux plumes de pigeon blanc, enveloppées de petits linges : on attache la ligne à la vergue ; on fait sautiller à une certaine hauteur l'hameçon ainsi armé ; la bonite le prend pour un petit poisson volant, se jette dessus, & se trouve accrochée à l'hameçon. Voyez l'histoire des Antil. du P. du Tertre.
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BONITON | S. m. amia (Hist. nat.) poisson de mer qui ressemble au thon, & au maquereau par la forme du corps, pour les nageoires & pour la queue. Il a le bec pointu, les yeux petits & de couleur d'or, le ventre gros & argenté, le dos bleu & luisant, & la queue mince & faite en forme de croissant : il y a des lignes de couleur noirâtre qui s'étendent obliquement depuis le dos jusqu'au ventre, & qui sont assez éloignées les unes des autres ; il n'a des écailles qu'à l'entour des ouies. Les dents sont fort pointues & recourbées en-dedans ; elles sont serrées les unes contre les autres. Ce poisson aime l'eau douce. Sa chair est grasse & bonne. Rondelet. Voyez POISSON. (I)
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BONJEAU | S. m. (Econ. rust.) c'est un assemblage de deux bottes de lin liées l'une contre l'autre de la tête au pié, afin d'occuper moins de place dans l'eau, où on doit mettre le lin roüir. Voyez LIN.
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BONN | (Geog.) ville forte & ancienne d'Allemagne dans l'électorat de Cologne, & située sur la rive gauche du Rhin. Elle est la résidence de l'électeur. Long. 25. lat. 50. 40.
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BONNE | (Geog.) ville maritime d'Afrique dans la Barbarie, au royaume d'Alger. Long. 25. 28. lat. 37.
BONNE, bourg de Faucigni, dans la Savoie, à 3 lieues de Geneve.
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BONNE DE NAGE | (Marine) se dit d'une chaloupe lorsqu'elle est facile à manier, & qu'elle passe ou avance bien, à l'aide des avirons seulement.
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BONNE DÉESSE | (Myth.) Dryade, femme de Faune, roi d'Italie, que son époux fit mourir à coups de verges, pour s'être enivrée, & à laquelle de regret il éleva dans la suite des autels. Quoique Fauna aimât fort le vin, on dit toutefois qu'elle fut si chaste, qu'aucun homme n'avoit su son nom ni vû son visage. Les hommes n'étoient point admis à célébrer sa fête, ni le myrte à parer ses autels. On lui faisoit tous les ans un sacrifice dans la maison, & par les mains de la femme du grand prêtre. Les vestales y étoient appellées, & la cérémonie ne commençoit qu'avec la nuit : alors on voiloit les représentations mêmes des animaux mâles ; le grand-prêtre s'éloignoit, emmenant avec lui tout ce qui étoit de son sexe. On prétend que c'étoit en mémoire de la faute & du châtiment de Fauna, qu'on bannissoit le myrte de son autel, & qu'on y plaçoit une cruche pleine de vin : le vin, parce qu'elle l'avoit aimé ; le myrte, parce que ce fut de branche de myrte qu'on fit la verge dont elle fut si cruellement foüettée pour en avoir trop bû. Les Grecs sacrifioient aussi à la bonne-déesse, qu'ils appelloient la déesse des femmes, & qu'ils donnoit pour une des nourrices de Bacchus, dont il leur étoit défendu de prononcer le nom. Du tems de Cicéron, qui appelle les mystères de la bonne déesse par excellence mysteres des Romains, Publius Clodius les profana en se glissant en habit de femme chez Jules César, dans le dessein de corrompre Mutia, sa femme. La déesse Fauna faisoit un double rôle en Italie ; c'étoit une ancienne reine du pays, & c'étoit aussi la terre : cette duplicité de personnage est commune à la plûpart des dieux du paganisme ; & voici la raison qu'on en lit dans le grand Dictionnaire historique. Dans les premiers tems tous les cultes se rapportoient à des êtres matériels, comme le ciel, les astres, la terre, la mer, les bois, les fleuves, qu'on prenoit grossierement pour les seules causes des biens & des maux. Mais comme le progrès de l'opinion n'a plus de bornes, quand celles de la nature ont été franchies, la vénération religieuse qu'on avoit conçûe pour ces êtres, s'étendit bien-tôt avec plus de raison aux personnes qui en avoient inventé le culte. Cette vénération augmenta insensiblement dans la suite des âges par l'autorité & le relief que donne l'antiquité : & comme les hommes ont toûjours eu le penchant d'imaginer les dieux semblables à eux, rien ne paroissant à l'homme, dit Cicéron, si excellent que l'homme même, on en vint peu-à-peu à diviniser les inventeurs des cultes, & à les confondre avec les divinités mêmes qu'ils avoient accréditées. C'est ainsi que la même divinité fut honorée en plusieurs endroits de la terre sous différens noms, sous les noms qu'elle avoit portés, & les noms des personnes qui lui avoient élevé les premiers autels ; & que Fauna fut confondue avec la terre, dont elle avoit introduit le culte en Italie. On l'appella aussi la bonne déesse, la déesse par excellence ; parce que la terre est la nourrice du genre humain, & que la plûpart des êtres ne tirent leurs dignités que du bien ou du mal que nous en recevons.
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BONNE TENUE | (Marine) Voyez TENUE.
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BONNE-DAME | S. f. (Hist. nat. bot.) plante qui doit se rapporter au genre appellé arroche. Voyez ARROCHE.
BONNE-DAME, atriplex, (Jard.) elle est potagere. Elle se nomme encore arroche, mais elle en est un peu différente. Elle croit de la hauteur de six piés ; pousse des feuilles larges qui ressemblent à celles de la blete, dont le goût est fade. Ses fleurs sont petites, à plusieurs étamines jaunâtres. La bonne-dame vient de graine qui se seme au printems. On se sert de sa feuille pour le potage & pour la farce. Cette plante vient en toute sorte de terre, & sa culture n'a rien de particulier. (K)
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BONNE-ESPERANCE | (Myth.) Bona spes, ce fut une divinité payenne. On trouve dans le recueil de Gruter une inscription qui porte ;
BONÆ SPEI
AUG. VOT.
PP. TR.
soit que ce fût la même déesse que l'Espérance, à laquelle les Romains donnoient l'épithete de bonne, soit qu'on distinguât ces deux divinités.
BONNE-ESPERANCE, (CAP DE) Géog. le cap de Bonne-Espérance, est-à la pointe méridionale de l'Afrique. Voyez CAP.
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BONNEAU | S. m. GAVITEAU, (Marine) c'est un morceau de bois ou de liége, & quelquefois un barril relié de fer, qui flottant sur l'eau, marque l'endroit où les ancres sont mouillées dans les ports ou rades. Voyez BOUEE. (Z)
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BONNESTABLE | (Géog.) ville de France, dans le Maine à 6 lieues du Mans ; il s'y fait un grand commerce de blé. Long. 18. 5. lat. 48. 11.
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BONNET | S. m. (Hist. mod.) sorte d'habillement de peau ou d'étoffe ; qui sert à couvrir la tête.
L'époque de l'usage des bonnets & des chapeaux en France se rapporte à l'an 1449 ; ce fut à l'entrée de Charles VII. à Roüen, qu'on commença à en voir : on s'étoit jusqu'alors servi de chaperons ou de capuchons. M. le Gendre en fait remonter l'origine plus haut ; on commença dit-il, sous Charles V. à rabattre sur les épaules les angles des chaperons, & à se couvrir la tête de bonnets, qu'on appella mortiers, lorsqu'ils étoient de velours, & simplement bonnets, s'ils étoient faits de laine. Le mortier étoit galonné ; le bonnet au contraire n'avoit pour ornement que deux especes de cornes fort peu élevées, dont l'une servoit à le mettre sur la tête, & l'autre à se découvrir. Il n'y avoit que le roi, les princes, & les chevaliers qui portassent le mortier. Voyez MORTIER.
Le bonnet étoit non-seulement l'habillement de tête du peuple, mais encore du clergé & des gradués, au moins fut-il substitué parmi les docteurs-bacheliers, &c. au chaperon qu'on portoit auparavant comme un camail ou capuce, & qu'on laissa depuis flotter sur les épaules. Pasquier dit qu'il faisoit anciennement partie du chaperon que portoient les gens de robe, dont les bords ayant été retranchés, ou comme superflus ou comme embarrassans, il n'en resta plus qu'une espece de calotte propre à couvrir la tête, qu'on accompagna de deux cornes pour l'ôter & la remettre plus commodément, auxquelles on en ajoûta ensuite deux autres ; ce qui forma le bonnet quarré dont il attribue l'invention à un nommé Patouillet ; ils n'étoient alors surmontés tout au plus que d'un bouton au milieu, les houpes de soie dont on les a couronnés étant une mode beaucoup plus moderne, & qui n'est pas même encore généralement répandue en Italie. Le même auteur ajoûte que la cérémonie de donner le bonnet de maitre ès-arts ou de docteur dans les universités, avoit pour but de montrer que ceux qu'on en décoroit avoient acquis toute liberté, & n'étoient plus soumis à la férule des maîtres ; à l'imitation des Romains qui donnoient un bonnet à leurs esclaves lorsqu'ils les affranchissoient ; d'où est venu le proverbe vocare servum ad pileum, parce que sur les médailles, le bonnet est le symbole de la liberté, dont on y représente le génie, tenant de la main droite un bonnet par la pointe.
Les Chinois ne se servent point comme nous de chapeaux, mais de bonnets d'une forme particuliere, qu'ils n'ôtent jamais en saluant quelqu'un, rien n'étant, selon eux, plus contraire à la politesse que de se découvrir la tête. Ce bonnet est différent selon les diverses saisons de l'année : celui qu'on porte en été a la formée d'un cone renversé ; il est fait d'une espece de natte très-fine & très-estimée dans le pays, & doublé de satin ; on y ajoûte au haut un gros flocon de soie rouge qui tombe tout-autour, se répand & flotte de tous côtés, ou une houppe de crin d'un rouge vif & éclatant, qui résiste mieux à la pluie que la soie, & fait le même effet. Le bonnet d'hyver est d'une sorte de peluche, fourré & bordé de zibeline, ou de peau de renard avec les mêmes agrémens que ceux des bonnets d'été ; ces bonnets sont propres, parans, du prix de huit ou dix écus, mais du reste si peu profonds, qu'ils laissent toujours les oreilles découvertes.
Le bonnet quarré est un ornement, & pour certaines personnes la marque d'une dignité, comme pour les membres des universités, les étudians en philosophie, en droit, en medecine, les docteurs, & en général pour tous les ecclésiastiques séculiers, & pour quelques réguliers. Il y a plusieurs universités où l'on distingue les docteurs par la forme particuliere du bonnet qu'on leur donne en leur conférant le doctorat ; assez communément cette cérémonie s'appelle prendre le bonnet. Il falloit que les bonnets quarrés fussent en usage parmi les clergé d'Angleterre, long-tems avant que celui de France s'en servit ; puisque Wiclef appelle les chanoines bifurcati, à cause de leurs bonnets ; & que Pasquier observe que de son tems, les bonnets que portoient les gens d'église, étoient ronds & de couleur jaune. Cependant ce que nous avons ci-dessus rapporté d'après lui, prouve que ce fut aussi de son tems que leur forme commença à changer en France.
Le bonnet d'une certaine couleur a été & est encore en quelques pays une marque d'infamie. Le bonnet jaune est la marque des Juifs en Italie ; à Luques, ils le portent orangé ; ailleurs on les a obligés de mettre à leurs chapeaux des cordons ou des rubans de cette couleur. En France les banqueroutiers étoient obligés de porter toûjours un bonnet verd. Voyez plus bas BONNET VERD.
Dans les pays d'inquisition ; les accusés condamnés au supplice sont coiffés le jour de l'exécution, d'un bonnet de carton en forme de mitre ou de pain de sucre, chargé de flammes & de figures de diables : on nomme ces bonnets, carochas. Voyez CAROCHA & INQUISITION.
La couronne des barons n'est qu'un bonnet orné de perles sur les bords ; & celles de quelques princes de l'Empire, qu'un bonnet rouge, dont les rebords, ou selon l'ancien terme, les rebras sont d'hermine. Voyez COURONNE.
Dans l'université de Paris, la cérémonie de la prise du bonnet, soit de docteur, soit de maître-ès-arts, après les examens, theses ou autres exercices préliminaires, se fait ainsi : le chancelier de l'université donne la bénédiction apostolique, & impose son bonnet sur la tête du récipiendaire, qui reçoit l'un & l'autre à genoux. Voyez DOCTEUR, MAISTRE-ES-ARTS. (G)
BONNET VERD, (Jurisprud.) étoit une marque d'infamie à laquelle on assujettissoit ceux qui avoient fait cession en justice, de peur que le bénéfice de cession n'invitât les débiteurs de mauvaise foi à frauder leurs créanciers : on n'en exceptoit pas même ceux qui prouvoient qu'ils avoient été réduits à cette misérable ressource par des pertes réelles & des malheurs imprévûs ; & si le cessionnaire étoit trouvé sans son bonnet verd, il pouvoit être constitué prisonnier : mais à présent on n'oblige plus les cessionnaires à porter le bonnet verd. Il ne nous en reste que l'expression, porter le bonnet-verd, qui signifie qu'un homme a fait banqueroute, & qui a passé en proverbe. (H)
BONNET A PRETRE, (en terme de Fortification) est une tenaille double construite vis-à-vis un bastion ou une demi-lune, dont le front forme deux tenailles simples, c'est-à dire un angle saillant & deux angles rentrans. Voyez TENAILLE-DOUBLE, & ANGLE MORT. (Q)
BONNET DE PRETRE ou BONNET A PRETRE, evonymus, (Jardinage) espece de citrouille, qui demande la même culture, & que l'on rame comme le fusain, qu'on appelle aussi bonnet de prêtre, parce que son fruit en a la figure. Voyez FUSAIN. (K)
Evonymus vulgaris granis rubentibus C. B. P. 428. On n'en sauroit faire usage intérieurement sans danger ; son fruit est d'une qualité nuisible. Théophraste assûre qu'elle fait du mal aux bestiaux ; Mathiole & Ruelle confirment ce sentiment, & rapportent que les brebis & les chevres, quelqu'avides qu'elles soient des bourgeons des plantes, ne touchent jamais à celle-là. Trois ou quatre de ses baies purgent par haut & par bas. Les paysans se servent de la poudre du fruit pour tuer les poux, & lavent leurs cheveux avec la décoction de ses graines.
Ce fruit employé extérieurement est émollient & résolutif, il tue les vers, & guérit la teigne & la gratelle. Dale. (N)
BONNET, s. m. dans les arts, on donne en général ce nom à tout ce qui est destiné à couvrir la partie supérieure & sphérique d'une machine, d'un instrument, &c.
Cette métaphore est prise de la partie de notre habillement appellée bonnet.
BONNET, en terme d'Orfevre en grosserie, se dit de la partie supérieure d'un encensoir, commençant au bouton, & finissant aux consoles où passent les chaînes ; il forme un dome un peu écrasé.
BONNET DF TURQUIE, c'est, parmi les Pâtissiers, un ouvrage en forme de bonnet ou turban à la turque, fait d'une pâte à biscuit, ou autre.
BONNETS, en termes de Bottier, sont les genouillieres échancrées des bottes de courier, ainsi nommées de leur forme qui approche beaucoup de celle d'un bonnet.
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BONNETER | ou selon d'autres, coeffer un artifice ; c'est en couvrir l'amorce d'un papier collé, pour que le feu ne puisse s'y insinuer que lorsqu'on le veut, en cassant ce papier qu'on appelle aussi bonnetage.
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BONNETERIE | S. f. manufacture de bonnets, de bas, de camisoles, de jupons, de chaussons, & autres ouvrages en laine pure ou en laine & soie, qu'on appelle castor & vigogne. Voyez LAINE, SOIE, CASTOR & VIGOGNE.
Les Bonnetiers achetent la laine, & la donnent à des ouvriers qui la font passer par toutes les opérations qui la mettent en état d'être employée à leurs marchandises. Ces préparations sont à-peu-près les mêmes que pour la draperie. Voyez l'article DRAPERIE.
Le dégrais, le battage & l'engrais, trois de ces préparations, dont il sera fait mention à l'article DRAPERIE, se font chez le bonnetier même. Il n'y a que la carde & le filage qui se fassent dehors.
La premiere attention du bonnetier doit être de se mettre à couvert de la friponnerie du cardeur & du fileur ; il peut être trompé sur le filage, en ce qu'il peut être plus ou moins fin ; il peut être trompé sur la quantité de la laine qu'on lui rend filée, en ce qu'on en peut diminuer la quantité, en augmentant le poids par une addition d'huile. Exemple : dans l'engrais de douze livres de laine qui se fait chez le bonnetier, il entre trois livres d'huile, ce qui fait quinze livres de poids : mais la livre de laine peut aller jusqu'à quatre francs, & la livre d'huile ne va qu'à douze sols ; le cardeur & le fileur peuvent donc être tentés de substituer de l'huile à de la laine.
Le bonnetier estimera la finesse du filage par une machine semblable à celle du drapier. Voyez l'article DRAPERIE. C'est une espece de devidoir qui indique le nombre de tours, & par conséquent la longueur du fil, qu'on peut toûjours comparer avec le poids. Il est évident que la finesse du filage est en raison composée de la directe du nombre des tours, & de l'inverse du poids, ou que le filage est d'autant plus fin, que le nombre des tours est grand, & le poids de l'écheveau petit.
Quant à la quantité de la laine ; s'il veut s'assûrer de la fidélité de l'ouvrier, il n'a qu'à la peser en la recevant ; & après l'avoir parfaitement dégraissée, le dégrais de quinze livres de laine aura d'abord emporté les trois livres d'huile qu'elles avoient reçûes dans l'engrais, & le poids de laine restant devroit être de douze livres ; s'il n'y avoit point eu de déchet dans la carde & le filage : mais il y a eu du déchet ; & ce déchet est estimé à deux onces par livre de seize onces. Le bonnetier reçoit la laine filée, & la distribue à des faiseurs de bas au métier & à des tricoteuses, pour être employée : ces gens lui rendent la laine employée aux ouvrages dont nous avons parlé ci-dessus. Mais il ne faut pas croire qu'alors ces ouvrages puissent se vendre ; ils ont à passer un grand nombre d'opérations dont nous allons rendre compte, & qui sont proprement du ressort du manufacturier bonnetier : aussi se font-elles ordinairement chez lui.
La premiere de ces opérations est la foule. La foule demande la construction d'une machine telle qu'on la voit Plan. du Bonnetier en face fig. 1. de côté fig. 3. Cette machine s'appelle une fouloire. La fouloire a été construite jusqu'à présent en bois de chêne : mais son peu de durée & de solidité a déterminé le sieur Pichard, marchand bonnetier fabriquant rue Mouffetard, à la faire construire de pierre.
Au reste la forme de la fouloire en pierre est la même que de la fouloire en bois que nous allons décrire, parce qu'elle est beaucoup plus ordinaire. abcd, fig. 1. est une planche de chêne échancrée. Les échancrures ae, ed, ont été pratiquées pour faciliter l'action des bras de l'ouvrier. La partie élevée e correspond au ventre de l'ouvrier. Le fond de la fouloire F, fig. 3. est fait d'une forte planche de chêne appuyée sur le bâtis de bois incliné h i k l. Entre les piés m n o p & sous ce bâtis, est placé un grand panier d'osier. Sur le fond F de la fouloire est fixée à clous une planche oblongue, sur un pié de hauteur & sur un peu plus de longueur ; cette planche est percée de rangées de trous, au nombre environ de cent vingt. On prend des dents de boeuf qu'on entortille de filasse, & qu'on fait entrer dans ces trous. Cette planche F garnie de dents de boeuf, s'appelle le ratelier. On voit même planche du Bonnetier, fig. 7. le ratelier séparé : il seroit mieux que le ratelier, au lieu d'être fixé à clous sur le fond de la fouloire, y fût enchâssé, de maniere qu'il n'y eût que les dents qui desafleurassent ; & c'est ce que le sieur Pichard a fait observer dans les siennes. Des robinets g g, donnent à discrétion dans la fouloire, de l'eau chaude qui vient d'une chaudiere B, fig. 2. assise sur un fourneau C, au-dessous duquel on remarque un petit bûcher D, & au dessus un réservoir A d'eau froide, qui fournit à la chaudiere B.
Pour fouler, on ouvre les robinets g, g, fig. 3. l'eau chaude tombe dans la fouloire ; l'ouvrier a du savon dans un sac de toile ; il prend ce sac, & le promene dans l'eau chaude. La précaution du sac est bonne ; par ce moyen il ne passe dans l'eau que les particules les plus fines du savon, le gros tacheroit l'ouvrage. Cette eau imprégnée de savon, s'appelle eau neuve. Quand l'eau neuve est prête, l'ouvrier prend sur la planche 1, 2, 3, 4, au lieu 1, une certaine quantité d'ouvrage qu'on appelle une poignée. Si ce sont des bas d'homme, il n'en faut qu'une paire pour faire une poignée. Cette poignée a déjà souffert plusieurs préparations dans la fouloire, avant que de passer dans l'eau neuve, ainsi qu'on le verra par la suite de l'opération que nous décrivons. L'ouvrier foule cette poignée : son travail consiste alors à tourner, retourner, & presser à plusieurs reprises sa poignée sur les dents du ratelier ; observant de la faire toucher à chaque mouvement à l'eau qui s'éleve dans la fouloire jusqu'à la hauteur de deux rangées de dents les plus voisines du fond. Il continue son opération pendant une bonne heure au moins, ayant soin de ne pas fouler à sec ; car sa marchandise en deviendroit cassante. Cela fait, il tord bien son ouvrage pour en faire sortir l'eau, le plie & le met dans le panier qui est sous la fouloire.
Son ouvrage serré dans le panier, il ouvre les robinets g, g ; il tombe de l'eau chaude dans la fouloire ; cela s'appelle réchauffer. Cette eau réchauffée une premiere fois s'appelle eau d'imprime. L'eau d'imprime étant préparée, l'ouvrier prend une poignée d'ouvrage au lieu 2 ; il met cette poignée dans l'eau d'imprime, l'y agite, & commence à la fouler un peu. Cette manoeuvre dure un quart-d'heure ; au bout de ce tems, au lieu de jetter cette poignée dans le panier, comme la premiere, il la met sur la planche au lieu 1, après l'avoir tordue.
Cela fait, il réchauffe l'eau : cette eau réchauffée s'appelle eau de dégrais à fait : il prend une autre poignée au lieu 3 ; il a du savon noir dans un barril ; il en frotte sa poignée à la quantité d'une demi-livre, ensuite il l'agite dans l'eau, & la presse fortement sur le ratelier pour en faire sortir la graisse. Cette manoeuvre dure un quart-d'heure : au bout de ce tems, il tord sa poignée & la met sur la planche au lieu 2.
Il réchauffe l'eau ; cette eau réchauffée s'appelle eau grasse. Il prend une autre poignée au lieu 4 ; il la met dans l'eau grasse sans la frotter de savon, il se contente de l'agiter & de la presser fortement contre le ratelier. Cette manoeuvre dure encore un quart-d'heure ; au bout de ce tems il tord sa poignée & la met sur la planche au lieu 3.
Pour cette fois il ne réchauffe point, il prend seulement une nouvelle poignée au lieu 5 ; cette poignée est d'ouvrage tel qu'il sort des mains du fabriquant, & sans aucune préparation. Il jette sa poignée dans l'eau, l'y agite, & presse contre les dents. Cette manoeuvre dure un quart-d'heure ; au bout de ce tems il la tord & la met sur la planche au lieu 4.
Cela fait, il vuide toute la fouloire par un bouchon qui est au fond, & la nettoye exactement. Quand la fouloire est bien nettoyée, il refait de l'eau neuve pour recommencer la suite d'opérations que nous venons de décrire, & dans lesquelles consiste la foule.
D'où l'on voit que nous avons supposé la fouloire en train : mais si elle n'y eût point été, on eût fait une eau neuve avec du savon noir, & on eût continué le travail dans l'ordre que nous avons prescrit : mais le commencement eût été coûteux & n'eût pas donné un ouvrage si parfait. Le but de la foule est de dégraisser, & de rendre l'ouvrage plus fort & plus serré.
L'ouvrier est payé trois sous la poignée : mais tous les ouvrages ne sont pas également durs. Les bas d'homme, de Segovie, sont les plus durs ; les bas de femme sont de deux paires à la poignée. L'ouvrage de foule le moins pénible, ce sont les calottes de castor, quoiqu'il y en ait huit à la poignée.
Si l'on veut avoir de bel & bon ouvrage, il ne faut le fouler ni aux piés ni au moulin ; ces deux manieres rendent les bas durs & inégalement foulés.
La seconde opération est celle de la forme. Au sortir des mains du foulon, dans le même jour, il faut enformer les marchandises : si on les laissoit sécher, on ne pourroit plus les enformer sans les mouiller, ce qui les gâteroit. La forme n'est autre chose qu'un morceau plat de bois de hêtre, dont le contour est, à proprement parler, la ligne de profil de la piece à enformer. On la fait entrer dans les ouvrages foulés, qu'on tend fortement sur elle, avec des petits clous qu'on plante, soit dans l'ouvrage, soit dans une lisiere ou allonge qu'on y attache : ordinairement on met des lisieres aux jupons. On laisse les marchandises en forme jusqu'à ce qu'elles soient seches, ce qui demande au moins douze heures, sans feu ni soleil.
Quand on est pressé, on porte les marchandises enformées dans une étuve ou cabinet échauffé par une poesle de feu : il ne faut aux marchandises qu'une heure d'étuve pour les sécher : mais il vaut mieux les laisser sécher à l'air.
La troisieme opération consiste à les racoutrer. Racoutrer, n'est autre chose que réparer les défauts que les marchandises rapportent, soit du métier à bas, soit de la foule. Cette réparation se fait à l'aiguille & avec la même matiere : il faut qu'elle soit la plus solide & la plus propre qu'il est possible.
La quatrieme opération est le draper. Pour draper, on a une broche double : cette broche double est une espece de fourche de fer, telle qu'on la voit fig. 5. On a monté sur chaque fourchon, un chardon de ceux qu'on appelle chardon à bonnetier, drapier ou foulon ; ces chardons peuvent se mouvoir ou tourner sur les deux fourchons ; & y sont arrêtés par une planchette qui en est traversée, & une clavette qui les traverse. L'ouvrier prend la queue de cette broche ou fourche entre l'index & le doigt du milieu de sa droite ; place son ouvrage sur son genou gauche, qu'un petit marche-pié tient élevé, & passe dessus les deux chardons, jusqu'à ce qu'il s'apperçoive qu'il s'est formé assez de duvet. Les chardons en roulant sur la marchandise, se chargent de bourre. Quand ils en ont trop, on a une carde telle qu'on la voit fig. 6. sur laquelle on les roule, ce qui s'appelle débourrer.
La cinquieme opération est la tonte. Cette opération est très-délicate, & il faut une certaine habitude pour aller vîte & ne pas tondre en échelle ou inégalement : pour cet effet le tondeur se ceint d'une ceinture telle qu'on la voit fig. 8 ; elle a une boucle ordinaire à son extrémité, & elle traverse un morceau de bois fait en coeur, dont on auroit coupé la pointe, & au milieu duquel on auroit pratiqué une ouverture quarrée. Il arrête ce morceau de bois, qu'on appelle coussinet, sur son flanc droit. Il prend dans sa main gauche un rouleau ou morceau de bois rond, couvert de serge, qu'on voit fig. 10. Ce rouleau ou morceau de bois a un pié de long sur quatre pouces de diametre. Il place son ouvrage sur ce rouleau, en-travers, si c'est un bas ; il appuie la longue branche de ses ciseaux dans l'ouverture du coussinet ; il les saisit toutes deux, & faisant ouvrir & fermer rapidement son ciseau, il enleve de dessus l'ouvrage les gros poils, observant de tourner peu à peu le rouleau, afin que la surface de l'ouvrage à tondre succede à la surface tondue, & se présente continuement au ciseau.
On appelle bourre, tant la laine enlevée au chardon, que celle qui vient du ciseau ; ce produit du draper & de la tonte sert à remplir les dents des cardes neuves, quand on craint qu'étant trop longues elles ne déchirent la laine. On la vend aussi à des ouvriers qui ont trouvé le secret d'en faire une sorte de tapisserie qu'on appelle tontisse. La bourre vaut quatre sous la livre.
Il est étonnant qu'on ait trouvé un emploi à la bourre de la laine, & qu'on n'en ait pas encore trouvé à la recoupe de la gase ; l'un pourtant me semble bien plus facile que l'autre. On entend par la recoupe de la gase, cette portion de fil & de soie blanche qui s'enleve au ciseau de dessus les pieces, quand elles sont fabriquées, pour en faire paroître les fleurs, voyez GASE : on brûle cette matiere ou cet amas de petits fils plus blancs que la neige. Cependant il n'est personne à qui il ne vienne en pensée qu'on en pourroit très-bien faire usage dans les papeteries : peut-être que du papier fabriqué en entier de cette matiere seroit cassant ; mais si on la mêlangeoit avec le chiffon, je ne doute point qu'elle ne contribuât à la blancheur & à la finesse : j'invite les fabriquans de papier à en faire l'essai. Si cet essai réussissoit, il y auroit un gain considérable à faire pour les premiers entrepreneurs ; car ces bouts de fil & de soie forment au bout de l'an, dans l'attelier d'un gasier un peu occupé, une masse très-considérable, & ils se donnent pour rien ou pour très-peu de chose.
La sixieme opération est la teinture. Après la tonte on teint ou l'on envoye à la teinture les ouvrages faits de laine blanche ; car pour ceux qui sont fabriqués de laines déjà teintes, ils restent de la couleur qu'on a cardé la laine. Voyez sur le mêlange des laines teintes propres à produire la couleur qu'on desire, l'article DRAPERIE. Voyez aussi TEINTURE.
Septieme opération. Il faut rapprêter les marchandises passées à la teinture. On entend par rapprêter, repasser au chardon legerement, ce qu'on appelle éclaircir, & tondre ensuite.
Huitieme opération. Quand les marchandises ont passé par toutes les opérations précédentes, on les presse ou on les catit. La presse des Bonnetiers n'a rien de particulier ; elle ressemble à celle des relieurs & de quelques autres ouvriers. L'action de la presse est de rendre les marchandises moins épaisses & de leur donner un oeil plus fin. Catir, c'est chauffer modérément sur une poële pleine de feu, qu'on appelle catissoire. La catissoire renfle la laine, & donne à la marchandise un air plus moëlleux & plus chaud, mais plus épais, ce qui ne plaît pas à tout le monde.
Il ne reste plus au Bonnetier après cela, qu'à renfermer sa marchandise dans des armoires, & à veiller à ce que les vers ne s'y mettent point.
La Bonnetterie de Paris est sans contredit une des meilleures de l'Europe, & la meilleure du royaume. La crainte qu'elle ne perdît de son crédit par de mauvais ouvrages distribués sur son compte, détermina sa Majesté à ordonner à trois reprises différentes, en 1713, 16 & 21, que les marchandises de bonnetterie, qui se présenteroient à l'entrée de Paris, seroient visitées à la doüanne ; & pour cet effet il fut enjoint 1°. au commis des portes & barrieres de Paris, sous peine d'interdiction pendant un mois, & de révocation en cas de récidive, d'envoyer au bureau de la douanne tous les marchands forains, voituriers, conducteurs de coches, & messagers qu'ils trouveront chargés de bonnetterie, tant au métier qu'à l'aiguille, de leur délivrer des envois, d'en prendre des gages proportionnés à la quantité des marchandises, & même de les conduire : 2°. en cas qu'il se trouvât des gens en contravention, de saisir & de dresser procès-verbal & rapport de saisie, dans les vingt-quatre heures : 3°. au lieutenant de police d'ordonner en ces conjonctures ce qu'il appartiendra : 4°. que le tiers des marchandises prises en fraude, soit adjugé aux commis.
La bonnetterie forme le cinquieme des six corps des marchands de Paris. Il a droit de vendre bonnets de drap, de laine, bas, gants, chaussons, camisoles, caleçons, & autres semblables ouvrages faits au métier, au tricot, à l'aiguille, en laine, fil, lin, poil, castor, coton, & autres matieres ourdissables.
Les Bonnetiers entendent par des bas castors, ou autres ouvrages désignés sous ce nom, ceux qui sont faits avec de la laine filée & torse, ensuite avec de la soie. Ces marchandises se traitent au sortir des mains du fabriquant, précisément comme si elles étoient toute laine.
Dans les statuts de la bonnetterie, accordés par Henri IV. en 1608, les marchands bonnetiers sont appellés Aulmulciers-mitoniers ; parce qu'anciennement c'étoient eux qui faisoient des aulmulces ou bonnets propres pour la tête quand on alloit en voyage, & qu'ils vendoient des mitaines. Voyez AUMUSSE. Suivant ces statuts, on ne peut être reçû dans le corps avant vingt-cinq ans, & sans avoir travaillé cinq ans en qualité d'apprenti, & cinq autres années en qualité de compagnon, & sans avoir fait chef-d'oeuvre.
La Bonnetterie a ses armoiries ; elles sont d'azur, à la toison d'argent, surmontée de cinq navires, aussi d'argent, trois en chef & deux en pointe ; & une confrairie établie en l'église de S. Jacques de la Boucherie, sous la protection de S. Fiacre.
Il y a à la tête du corps six maîtres ou six gardes. Trois sont appellés anciens. Le plus ancien des trois s'appelle le premier ou le grand garde : les trois autres sont nommés nouveaux gardes. On ne peut être élû premier garde, qu'on n'ait été nouveau garde.
L'élection de deux gardes se fait tous les ans après la S. Michel, au bureau de la Bonnetterie ; savoir, d'un ancien pour la seconde fois, & d'un nouveau pour la premiere fois ; ensorte qu'il en sort deux, le grand garde, & le premier des trois nouveaux. L'élection se fait à la pluralité des voix, en présence du procureur du Roi du Châtelet, & d'un greffier.
Les six gardes portent en cérémonie la robe consulaire, c'est-à-dire, la robe de drap noir, à collet, à manches pendantes, à paremens & bord de velours noir.
Dans les comptes que les gardes ont à rendre, ils sont entendus par six anciens hors de charge, nommés à la pluralité des voix.
Quand un ancien garde décede, les quatre derniers gardes en charge sont tenus d'assister en robe à son convoi, & de tenir chacun un des coins du poîle, qui est fourni par le bureau, avec six flambeaux de cire blanche, auxquels sont attachées les armoiries du corps.
Ce cinquieme corps s'est accrû, en 1716, de la communauté des maîtres bonnetiers & ouvriers au tricot des faubourgs.
Cette réunion occasionna dans la suite des contestations ; ces contestations augmenterent encore quand la communauté se fut accrue des faiseurs de bas au métier. Ce fut pour terminer tous ces démêlés, occasionnés par les différens réglemens qu'avoit chacun de ces corps avant la réunion, & qu'il prétendoit conserver après, qu'il fut ordonné par un arrêt du conseil de 1716, qui n'eut son effet qu'en 1718.
1°. Que la communauté des bonnetiers de faubourgs sera éteinte & restera unie au corps des Bonnetiers.
2°. Que les maîtres des faubourgs reçûs avant la réunion, seront réputés maîtres de la ville, & pourront y tenir boutique.
3°. Qu'ils joüiront eux, leurs veuves & leurs enfans, des droits de Bonnetiers de Paris.
4°. On peut voir le reste de ces réglemens dans le dictionnaire du Commerce, avec les huit articles qu'on fut obligé d'y ajoûter lors de la réunion des fabriquans de bas au métier, aux Bonnetiers de la ville & des faubourgs. Voyez aussi l'article BAS AU METIER.
Je finirai cet article par un fait qui pourra être de quelqu'utilité à d'autres marchands bonnetiers qu'au sieur Pichard. Il est constant qu'il n'y a point de fouloire bien entretenue, qui ne consomme au moins pour dix sous d'eau par jour, & un marchand bonnetier peut avoir chez lui jusqu'à six, huit, dix fouloires, ce qui fait pour l'eau seulement un objet assez considérable. Le Sr Pichard parloit un jour de cette dépense, devant un aveugle de naissance déjà connu (dont il s'agit dans la Lettre sur les aveugles & dans l'art. AVEUGLE), & cet aveugle lui donna un conseil dont on ne s'étoit pas encore avisé depuis qu'on fait de la bonnetterie : ce fut de se servir de l'eau de son puits ; cela n'étoit pas difficile à trouver, diront ceux qui ignorent que l'eau de puits est très-dure & se charge si difficilement de savon, qu'il n'est pas possible d'en faire usage en bonnetterie. Mais notre aveugle savoit très-bien, par l'usage qu'il avoit de la distillation, que cette même eau de puits distillée devenoit très-pénétrante, se chargeoit de savon avec une extrème facilité, & en demandoit même beaucoup moins que l'eau de riviere, pour produire le même effet.
Il savoit encore que le travail de la bonnetterie demandoit que l'on tînt perpétuellement du feu sous la chaudiere qui fournit de l'eau aux fouloires. Il conseilla donc au sieur Pichard de placer un grand alembic entre les deux chaudieres, qui recevroient l'eau qui s'en distilleroit, & qui la rendroient dans les fouloires. L'alembic de la fouloire du Sr Pichard est d'une forme singuliere ; il est concave en-dessous, & oppose une large surface au feu ; il s'en éleve perpétuellement une masse considérable de vapeurs ; il est placé de façon qu'il est échauffé par le feu même qui entretient la chaleur des chaudieres, & il fournit aux fouloires de l'eau qui ne coûte rien, qui épargne le savon, & qui foule mieux que l'eau de riviere.
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BONNETIER | S. m. celui qui vend, fabrique ou fait fabriquer des bonnets, des bas, & autres ouvrages de bonnetterie.
Le corps des Bonnetiers de Paris est composé de trois autres, dont la réunion s'est faite successivement ; du corps des Bonnetiers-Aulmulciers-Mitoniers, qui faisoient le cinquieme des six corps des marchands & ne travailloient que dans la ville ; du corps des Bonnetiers au tricot des faubourgs ; & du corps des Faiseurs de bas-au-métier. Voyez l'art. BONNETTERIE & BAS-AU-METIER.
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BONNETTE | terme de Fortification, est une espece d'angle saillant que l'on construit dans un siége au pié du glacis. Cet ouvrage s'appelle plus communément fleche. Voyez FLECHE. (Q)
BONNETTE, s. f. (Marine) ce sont de petites voiles dont on se sert lorsqu'il y a peu de vent ; on les ajoûte aux autres voiles du vaisseau pour les aggrandir, ou on les met en particulier pour avoir plus grand nombre de voiles.
Bonnettes maillées. Ces bonnettes servent à allonger les basses voiles pour aller plus vîte quand il fait beau tems : on les attache à des mailles, c'est-à-dire, à des oeillets qui sont près de la ralingue, après quoi on amarre les écoutes aux pointes des bonnettes.
Secondes bonnettes maillées. On les lace encore aux bonnettes maillées par-dessous. Ce sont les Hollandois qui se servent de secondes bonnettes.
Bonnettes maillées des huniers.
Bonnettes en étui, misene en étui, coutelas. Ce sont de petites voiles qui ont la figure d'un étui, & qui se mettent par le bout le plus étroit à chaque extrémité des vergues, sur des pieces de bois qu'on nomme boute-hors ; ainsi elles regnent le long des côtés des deux basses voiles & des huniers. On ne met les bonnettes en étui qui lorsque la mer est unie, & le vent pas trop frais.
Lacer la bonnette, c'est l'amarrer sous la voile avec des éguillettes qui la lacent dans les oeillets.
Délacer, déranger, démailler la bonnette, c'est la détacher de la voile où elle étoit attachée.
BONNETTE lardée, (Marine, larder la bonnette) c'est une pratique des calfateurs : quand un vaisseau a une voie d'eau, & qu'ils ne connoissent point l'endroit où elle est, pour la trouver ils lardent une bonnette avec de l'étoupe, qu'on pique sur la voile avec du fil à voile, & après avoir mouillé la bonnette, ils jettent de la cendre ou de la poussiere sur ces bouts de fil de caret & d'étoupe, afin de leur donner un peu de poids pour faire enfoncer la bonnette dans l'eau : en cet état ils la descendent dans la mer, & la promenent à stribord & à bas-bord de la quille, jusqu'à ce qu'elle se trouve opposée à l'ouverture qui est dans le bordage, & qui forme la voie d'eau ; car alors l'eau qui court pour y entrer pousse la bonnette contre le trou ; ce qui se connoît par une espece de gasouillement ou de frémissement que font la bonnette & la voie d'eau. Les matelots pour exprimer ce bruit ou gasouillement, disent que la bonnette supe. (Z)
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BONNEVAL | (Géog.) ville de France dans la Beauce, sur le Loir, à trois lieues de Châteaudun. Il y a une belle abbaye de l'ordre de S. Benoit. Long. 19. 5. lat. 48. 10.
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BONNEVILLE | (Géog.) petite ville de Suisse dans le canton de Bâle, sur un lac.
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BONONIA | (Géog. anc. & mod.) ville de la basse Pannonie, qu'on croit être notre Bonmonster sur le Danube, ou Sophie. Il y a plusieurs autres villes anciennes du même nom.
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BONOSIAQUE | ou BONOSIENS, (Hist. eccles.) c'est le nom de certains hérétiques du jv. siecle, qui paroissent avoir été dans les erreurs des Photiniens. Voyez BONOSIENS.
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BONOSIENS | S. m. (Hist. ecclés.) nom d'une secte que Bonose évêque de Macédoine renouvella au jv. siecle. Ses erreurs, de même que celles de Photin, consistoient à soûtenir que la Vierge avoit cessé de l'être à l'enfantement. Le pape Gelase les condamna. Comme ils baptisoient au nom de la Trinité, on les recevoit dans l'église sans baptême, au lieu que le second concile d'Arles veut que les Photiniens ou Paulianistes soient rebaptisés ; ce qui constitue quelque différence entre ces derniers hérétiques & les Bonosiens. Voyez PHOTINIENS ou PAULIANISTES.
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BONS | adj. (Hist. anc.) nom que les anciens Romains donnoient à plusieurs de leurs dieux, pour signifier des divinités favorables : ainsi ils disoient bona dea, bona fortuna, bona spes, bono genio, boni fati.
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BONS-CORPS | S. m. pl. (Hist. mod.) c'est le nom qu'on donna à une milice levée par François II. duc de Bretagne, dans la guerre qu'il eut en 1468 contre Louis XI. Ce duc en attendant les secours que le Roi d'Angleterre devoit lui fournir, fit lever dix mille hommes de nouvelle milice, composée de gens du commun : on choisissoit les plus robustes qu'on pouvoit trouver ; c'est ce qui les fit nommer bons-corps.
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BONS-HOMMES | S. m. (Hist. ecclés.) religieux établis l'an 1259 en Angleterre par le prince Edmond ; ils professoient la regle de S. Augustin, & portoient un habit bleu. Sponde croit qu'ils suivoient l'institut du bienheureux Jean le Bon qui vivoit en ce siecle. On donna en France ce nom aux Minimes, à cause du nom de bon-homme que Louis XI. avoit coûtume de donner à S. François de Paule leur fondateur. Les Albigeois affectoient aussi de prendre ce même nom de bons-hommes. Polydore Virgile, Hist. Angl. liv. XVI. Sponde, A. C. 1259. n. 9. Voyez MINIMES. (G)
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BONTANS | S. m. (Commerce) étoffes ou couvertures de coton rayées de rouge, fabriquées à Cantor. Les Européens en font le commerce avec d'autres peuples des côtes d'Afrique.
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BONTÉ | S. f. (Morale) La bonté morale consiste en deux points : le premier, ne pas faire du mal à nos semblables ; le second, leur faire du bien.
1°. Ne point faire à autrui ce que nous ne voudrions pas qu'on nous fît, voilà la regle qui détermine quelle sorte de traitemens la nature nous interdit à l'égard du reste des hommes. Tout ce qui fait à nous mêmes, nous paroîtroit dur, barbare & cruel, est compris dans la prohibition : mais cette maxime, d'un usage si étendu, est bien restrainte dans l'application qu'on en fait : la plûpart des hommes se conduisent les uns avec les autres, comme s'ils étoient persuadés qu'elle ne dût avoir lieu qu'entre amis.
Lorsque la passion vous porte à quelque violence contre un autre homme, jettez les yeux sur lui, pour y voir l'empreinte de la main divine, & votre propre ressemblance ; ce sera dequoi ralentir votre emportement. Ne dites point à Dieu ce que Caïn lui dit : m'avez-vous donné mon frere en garde ? Oüi sans-doute, il vous l'a donné en garde ; & non-seulement il vous défend de lui faire aucun mauvais traitement, mais il vous ordonne même de le servir de tout votre pouvoir.
2°. Lorsqu'on est officieux & bienfaisant pour ses parens, ses bienfaiteurs ou ses amis, on se croit généreux, quoique d'ailleurs dur & indifférent pour tout le reste des hommes ; & l'on n'est pas même charitable ; qualité cependant bien en-deçà de la générosité, qui est le comble & la perfection de toutes les autres vertus sociales. En pratiquant celles-ci on ne fait qu'éviter les défauts contraires placés tout près d'elle : mais la générosité nous éloigne bien plus du vice, puisqu'elle laisse pour intervalle entr'elle & lui toutes les vertus de précepte. La générosité est un degré de perfection ajoûté aux vertus par-dessus celui que prescrit indispensablement la loi. Faire pour ses semblables précisément ce qu'ordonne la loi, ce n'est pas être généreux ; c'est simplement remplir son devoir.
Mais la charité, ou ce qui est la même chose, cette affection générale que nous devons à tous les hommes ; n'est pas une vertu de surérogation : vous ne ferez que satisfaire à ce que l'humanité vous impose, si rencontrant un inconnu que des assassins ont blessé, vous vous en approchez pour panser ses plaies : le besoin qu'il a de votre secours est une loi qui vous oblige à le secourir. Un indigent est pressé par la faim ; vous ne ferez que payer une dette en appaisant son besoin. Les pauvres sont à la charge de la société ; tout le superflu des riches est affecté de droit à leur subsistance. Et ne plaignez pas même le secours que vous leur donnez, quand il seroit le prix de vos sueurs & de pénibles travaux : quoi qu'il vous coûte, il leur coûte encore plus : c'est l'acheter bien cher que de le recevoir à titre d'aumône.
Voulez-vous apprendre en deux mots jusqu'où s'étendent les bons offices que vous devez à vos semblables ? en voici la mesure. Faites à autrui ce que vous voudriez qu'on vous fît. (X)
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BONTIA | S. f. (Hist. nat. bot.) genre de plante dont le nom a été dérivé de celui de Jacques Bonti, medecin. La fleur de ce genre de plante est monopétale, en masque ; la levre supérieure est relevée, & l'inférieure divisée en trois parties. Il s'éleve du calice de la fleur un pistil qui est attaché comme un clou à la partie postérieure de la fleur, & qui devient dans la suite un fruit ovoïde, mou, & plein de suc. Ce fruit renferme un noyau oblong, dans lequel il y a une amende de la même figure. Plumier, nova plant. Amer. gen. Voyez PLANTE. (I)
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BONUS EVENTUS | le bon succès, (Myth.) divinité principalement honorée chez les anciens par les laboureurs, & qu'on mettoit, selon Varron, au nombre des douze dieux qui présidoient à l'agriculture : selon d'autres, il étoit aussi l'un des douze dieux nommés consentes, qui étoient admis au conseil de Jupiter. Il avoit un temple à Rome ; & dans plusieurs médailles du haut empire on voit la figure de ce dieu, avec ces diverses légendes : bonus eventus, bono eventui, eventus Aug. il y est représenté nud proche d'un autel, tenant d'une main une patere, de l'autre des épis & des pavots. Une ancienne inscription porte : bono eventui. aponia. C. F. montana. sacerdos divar. augustar. col. Aug. fir. editis. ob honorem sacerd. circensibus. Pline rapporte qu'à Rome dans le capitole il y avoit une statue de ce dieu, de la main de Praxitele ; & il ajoûte qu'Euphranor, autre fameux sculpteur grec, fit une statue du bonus eventus, toute ressemblante à la figure qu'on en trouve sur les médailles. (G)
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BONZES | (Hist. mod.) philosophes & ministres de la religion chez les Japonois. Ils ont des universités où ils enseignent les sciences & les mysteres de leur secte ; & si l'on en croit un jésuite, auteur de l'histoire de l'église du Japon, ils ont disputé avec autant de force que de subtilité contre nos plus savans missionnaires. Les auteurs sont fort partagés sur ce qui concerne leurs moeurs : les uns nous dépeignent les bonzes comme des cyniques abandonnés aux plus infames desordres ; d'autres au contraire assûrent qu'ils gardent la continence, vivent en commun, & qu'il y a des couvens de filles de leur ordre. Ils reconnoissent pour leur chef un certain Combadaxi, qui leur enseigna les premiers principes des arts & des sciences, & dont ils attendent la venue dans des millions d'années ; car, à les en croire, il n'est point mort, & n'a fait que disparoître de dessus la terre. On donne aussi le nom de bonzes aux prêtres de plusieurs autres peuples des Indes orientales. (G)
* Un empereur de la famille des Tangs fit détruire une infinité de monasteres de bonzes, sur un principe qu'il tenoit de ses ancêtres : c'est que s'il y avoit un homme qui ne labourât point, ou une femme qui ne s'occupât point, il falloit que quelqu'un souffrît le froid & la faim dans l'empire. Voyez l'esprit des lois, tome II.
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BOOPE | (Hist. nat.) Voyez BOGUE.
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BOOPIS | (Myth.) surnom de Junon, formé de , boeuf, & de , oeil. Junon fut surnommée la déesse aux yeux de boeuf, à cause de ses grands yeux.
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BOOT | (Géog.) île d'Ecosse dans sa partie méridionale, dans le golfe de Cluyd, entre le pays d'Argyle & l'île d'Aran.
* BOOT, s. m. (Hist. mod.) on nomme ainsi en Espagne un tonnelet à mettre du vin : il est fort en usage pour transporter les vins de Xerès.
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BOPFINGEN | (Géog.) petite ville libre & impériale d'Allemagne dans la Soüabe, sur l'Eger. Long. 27. 30. lat. 48. 51.
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BOPPART | (Géog.) petite ville d'Allemagne du cercle du bas Rhin, dans l'archevêché de Treves, autrefois impériale, mais unie à l'électorat de Treves en 1494. Elle est au pié d'une colline sur les bords du Rhin, près des monts de Pedernach, à 3 lieues de Coblentz. Long. 25. 10. lat. 50. 19.
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BOQUELLE | S. f. (Commerce) c'est le nom que les peuples d'Egypte donnent au daller ou écu de Hollande. Voyez DALLER.
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BOQUETEAU | S. m. (terme d'Eaux & Forêts) c'est un petit canton de bois planté en futaie ou en taillis, qui n'excede pas cinquante arpens. Il est moindre que le buisson, & le buisson moindre que la forêt. Voyez BUISSON ; voyez aussi FORET.
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BOQUILLONS | S. m. ouvriers occupés dans les coupes des bois destinés pour les salines. Ils sont soûmis à l'inspection des veintres. Voyez VEINTRE.
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BORA | (Géog.) petite riviere de la Misnie, qui se jette dans l'Elbe, près de Pirna.
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BORA METS | ou BORGNETTE, Voyez AGNUS SCYTHICUS.
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BORACHERA | (Hist. nat.) c'est un arbre des Indes occidentales, qui porte des fleurs aussi blanches que des lis, mais un peu plus grandes, & d'une odeur très-agréable. On dit qu'en exprimant le suc de ses feuilles, & le mêlant avec de l'eau, il en résulte un breuvage qui a assez de force pour enivrer.
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BORAU | (Géog.) petite ville de Silésie.
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BORAX | (Hist. nat. & Chimie) c'est un sel ou substance fossile, assez ressemblante à l'alun : il est blanc, transparent, composé de crystaux à 6 côtés tronqués par les deux bouts, qui ne sont ni si longs ni si réguliers que ceux du nitre, ni si serrés que ceux des autres sels. Le goût en est d'abord assez doux : mais il devient acre, salin, & nitreux. L'odeur que donne le borax est assez suave au commencement ; mais elle devient ensuite alkaline & urineuse ; c'est ce qui a donné lieu de le ranger au nombre des sels alkalis. Il ne se dissout que dans de l'eau très-chaude.
Les anciens ne paroissoient avoir eu qu'une connoissance très-imparfaite du borax ; ils l'ont confondu avec le nitre que les Grecs appelloient , comme on peut le voir dans Pline & dans Dioscoride : mais il y a plusieurs siecles que ce sel est connu des Arabes qui l'ont nommé baurach, dont il est aisé de voir que le mot borax est dérivé. Agricola l'appelle chrysocolla, en quoi il a été suivi par beaucoup d'auteurs ; nom qui paroît lui avoir été donné à cause de l'usage qu'on en fait pour souder l'or. C'est mal-à-propos qu'on a confondu le borax qui est un sel naturel, avec le nitre qui n'est que factice ; & M. Geoffroi a très-bien prouvé qu'il est différent de la chrysocolle des anciens. Voyez les mémoires de l'Académie des Sciences, année 1732. p. 549. Le peu de lumiere qu'on a eu sur la formation de ce sel a fait croire à quelques auteurs qu'il n'étoit point une production de la nature, mais de l'art : cependant la meilleure division qu'on en puisse donner, c'est en borax crud ou grossier, & en borax pur ou raffiné. On dit que la premiere espece se trouve dans les mines d'or & d'argent des Indes, de la Tartarie, de la Perse, & sur-tout dans l'île de Ceylan, d'où les Anglois & les Hollandois en apportent beaucoup. Il y en a de deux sortes ; l'une est grasse & rougeâtre, l'autre est grise & verdâtre, & se durcit à l'air. Ce borax qui se trouve brut aux Indes, se purifie en Europe, on donne la préférence à celui qui a été raffiné par les Vénitiens, qui en faisoient autrefois un grand débit : tout le secret consistoit, dit-on, à faire calciner le borax, à le faire cuire & fondre dans l'eau avec un peu de chaux vive ; on le filtroit ensuite, & on en faisoit des crystaux attachés à des meches de coton comme le sucre candi. Les Hollandois ont aussi une maniere de le raffiner ; mais ils en font mystere : c'est d'eux que nous tirons celui dont nous nous servons.
Il est bien surprenant que depuis qu'il y a un commerce aussi intime entre l'Europe & les Indes, on ait négligé des recherches aussi faciles que celles qui auroient pû nous mettre au fait, de ce qu'on doit penser sur la formation d'un sel aussi nécessaire qu'est le borax.
Ceux qui ont regardé le borax comme un sel factice, ont prétendu qu'on le faisoit avec du nitre, du sel ammoniac & du sel marin : d'autres ont voulu que ce fût avec de l'urine de jeunes garçons buvans vin, & du nitre.
Voici, suivant Agricola de re met all. lib. XII. la façon dont on fait le borax en Egypte : " Ce dont on fait le nitre n'est autre chose que de l'eau douce, filtrée par des terres nitreuses à laquelle on mêle une lexive de cendres de bois de chêne ; on reçoit l'une & l'autre dans des bassins quarrés de cuivre, où on les fait cuire jusqu'à ce que le nitre s'épaississe. Le nitre tant naturel que factice, mêlé dans des cuves avec de l'urine d'un enfant qui n'a pas encore l'âge de puberté, se cuit dans les mêmes bassins de cuivre. Après qu'il a été suffisamment cuit, on le verse dans des cuves où l'on a mis des fils de cuivre, & en s'y attachant il se fige & prend une consistance. C'est ainsi, continue cet auteur, que se fait la chrysocolle, à qui nous donnons le " nom de borax, qui est arabe.
Avant de faire usage du borax purifié, il est à propos d'examiner s'il n'est point mêlé à de l'alun : en effet, on se sert quelquefois de cette matiere pour le falsifier, celui qui est dans ce cas, n'est pas si blanc ni si leger, & n'enfle point au feu comme celui qui est pur ; on peut aussi en reconnoître la bonté à sa clarté & à sa transparence ; en le portant sur la langue, il ne doit avoir que très-peu de goût après le raffinage.
Le borax est d'un grand usage, & a beaucoup de propriétés dans la Chimie & la Métallurgie : lorsqu'on le met sur le feu, il enfle d'abord très-considérablement, & donne une écume blanche & legere ; il devient ensuite très-fluide ; & lorsqu'il est refroidi, il forme une espece de verre assez beau : il rend vitrifiables toutes les terres auxquelles il est mêlé.
Mais sa propriété principale est de faciliter infiniment la fonte de tous les métaux : cependant avant de s'en servir pour cet usage, il est important de commencer par le faire fondre à part dans un creuset dont il n'occupe tout au plus que le quart, parce qu'il s'éleve fort haut ; il faut aussi ne faire qu'un feu modéré tout-autour, & le retirer aussi-tôt qu'on n'entend plus de bouillonnement ; car si on poussoit trop le feu, il se vitrifieroit & seroit moins propre aux différens usages auxquels on l'employe. Lorsque les métaux sont divisés en particules déliées, séparées & éloignées les unes des autres, le borax en un véhicule très propre pour les réunir, les rapprocher & les rassembler, pour ne former qu'une même masse ou régule ; la moindre quantité de saletés ou de matieres hétérogenes est capable d'empêcher cet effet.
Pour remédier donc à cet inconvénient, on employe le borax. Ce sel facilite la réunion des parties métalliques, les fait tomber au fond du creuset, & vitrifie les scories & les saletés qui s'y trouvent, en les poussant vers la surface. Un autre avantage que les métaux en fonte retirent du borax, c'est qu'il les environne d'une espece de verre mince & délié qui les défend contre les impressions de l'air & du feu : joignez à cela qu'il dispense de faire beaucoup de feu, & qu'il ne se mêle point aux métaux. C'est pour cette raison qu'il est d'un si grand usage pour brasser & souder tous les métaux, tels que l'or, l'argent, le cuivre & le fer.
Il est à propos d'enduire de borax les creusets & vaisseaux destinés à fondre les métaux précieux, comme l'or & l'argent ; parce qu'au moyen de cette précaution on les en retire plus aisément & avec moins de perte après la fonte.
Le borax a la propriété de pâlir l'or ; c'est pourquoi lorsqu'on s'en sert pour la fonte de ce métal, il faut y joindre ou du nitre ou du sel ammoniac. Ces sels maintiennent l'or dans sa couleur naturelle ; mais il faut prendre garde de ne les point mettre tous deux, parce qu'il arriveroit détonation.
M. Lemery le jeune a donné plusieurs mémoires curieux sur le borax, qu'on peut voir dans les mémoires de l'académie royale des Sciences, an. 1728 ; item années 1719 & 1732.
On fait usage du borax dans la Medecine ; on le regarde comme très-propre à diviser & atténuer les humeurs visqueuses & pituiteuses, & fort bon dans les maladies qui sont causées par l'épaississement des humeurs ; il est apéritif, diurétique & abstergent ; il agit sans causer ni corrosion ni inflammation. On peut le donner depuis cinq grains jusqu'à un demi-scrupule, en poudre, dans du vin, dans un oeuf, ou dans quelqu'autre véhicule.
Le borax entre dans la composition du sel sédatif de Homberg. Voyez SEL SEDATIF.
Mais on le regarde sur-tout comme un très-puissant emménagogue, & comme un excellent remede pour les accidens qui accompagnent les accouchemens ; mais il devient plus efficace si on le mêle avec la myrrhe, le safran, la cannelle, des sels alkalis ; ou, ce qui vaut encore mieux, avec le nitre, le cinnabre, ou d'autres remedes antispasmodiques.
Suivant M. Lemery, la solution du caput mortuum du borax pousse fortement les urines, & fait sortir la gravelle. Il est très-styptique & astringent. On le met aussi au nombre des cosmétiques : on lui attribue la qualité de blanchir le teint, & de faire disparoître les taches de rousseur. La poudre emménagogue de Fuller se fait en prenant de borax de Venise 15 grains, myrrhe 12 grains, safran 3 grains, huile de clous de girofle une goutte : mêlez & faites une poudre, qui est bonne pour provoquer les regles. (-)
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BORBA | (Géog.) petite ville fortifiée en Portugal, entre Estremos & Elvas, dans un pays très-fertile.
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BORBAO | (Géogr.) riviere de Piémont, qui se jette dans le Tanaro près d'Asti.
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BORBONIA | genre de plante dont le nom a été dérivé de Gaston de France, prince du sang de la maison de Bourbon. La fleur des plantes de ce genre est monopétale, faite en forme de cloche ou en godet, & découpée. Il s'éleve du nombril de cette fleur un pistil qui devient dans la suite un fruit ressemblant à un gland charnu, & divisé au dedans en deux lobes. Le bas de la fleur devient le calice du fruit ; & ce calice est charnu, & ressemble à un capuchon. Plumier, nova plant. amer. gener. Voyez PLANTE. (I)
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BORBORIGME | S. m. (Medecine) bruit excité dans le ventre par des vents. Cet effet est produit par l'explosion de l'air contenu dans les alimens, qui venant à se raréfier par la chaleur des organes de la digestion, tend à s'échapper, & fait effort contre les parois des visceres. Galien dit que c'est un bruit de vents sourds & longs, accompagné d'une humidité modérée, qui se fait entendre en descendant vers les parties inférieures.
Tout ce qui peut occasionner des vents & les coliques, est cause du borborigme. Dans les constipations, le borborigme annonce assez ordinairement une évacuation prochaine. (N)
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BORBORITES | S. m. pl. (Hist. ecclés.) secte de Gnostiques dans le xj. siecle, laquelle, outre les erreurs & le libertinage commun à tous les hérétiques connus sous ce nom, nioit encore, selon Philastrius, la réalité d'un jugement dernier. S. Epiph. héres. 25. & 26. S. August. de heres. c. 5. Baronius ad an. Chr. 120. (G)
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BORCH | (Géog.) ville du duché de Magdebourg, à deux lieues de Magdebourg, sur l'Elbe, appartenante au roi de Prusse.
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BORCHHOLM | (Géog.) petite ville avec château, dans la Livonie. C'était autrefois la résidence de l'évêque de Revel.
BORCHHOLM, (Géog.) forteresse & port de l'île d'Oeland dans la mer Baltique, à la couronne de Suede.
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BORCHLOEN | (Géog.) ville de l'évêché de Liége, dans la Hasbaye, sur le Jecker.
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BORCKELOO | (Géog.) place forte des Provinces-Unies, au comté de Zutphen, & à quatre lieues de la ville de ce nom, sur la riviere de Borckel. Long. 24. 5. lat. 52. 15.
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BORCKEN | (Géog.) petite ville de la basse-Hesse, sur la riviere de Sehwalm.
BORCKEN, (Géogr.) petite ville de l'évêché de Munster, sur l'Aa, près de Wesel.
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BORCKFORT | (Géog.) forteresse & petite ville du comté d'Oldenbourg.
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BORD | S. m. (Gramm.) se dit communément des parties les plus éloignées du milieu d'une étendue limitée. Cette définition est presque générale, & c'est en ce sens qu'on dit le bord d'un pré, d'une table, d'un lit, d'une riviere, &c.
BORD : on entend ordinairement par le mot bord, le vaisseau même. On dit retourner à bord, sortir du bord, pour dire retourner au vaisseau, sortir du vaisseau : venir à bord, c'est se rendre au vaisseau.
Renverser, tourner, changer le bord ; c'est revirer, & porter le cap sur un autre air de vent.
Rendre le bord ; c'est-à-dire venir mouiller ou donner fond dans quelque rade ou quelque port.
Bord sur bord, courir bord sur bord ; c'est louvoyer, & gouverner tantôt à stribord, tantôt à basbord. Lorsque le vent est contraire, & qu'il ne permet pas de porter à route, on chicane le vent, & on court sur plusieurs routes, pour approcher du lieu où l'on veut aller ; ou pour ne s'abattre pas, & ne s'éloigner que le moins qu'on peut.
Faire un bord, faire une bordée ; c'est faire une route, soit à basbord, soit à stribord.
Courir même bord que l'ennemi, tenir même bord ; c'est virer à stribord & à basbord, selon que l'ennemi y a viré, & porter sur le même rumb.
Mettre à l'autre bord ; virer, changer de bord.
Tenir bord sur bord, c'est-à-dire courir d'un côté ou d'un autre au plus près du vent, soit pour attendre un vaisseau qui est de l'arriere, soit pour s'entretenir dans un parage. (Z)
De bord à bord. Cette expression veut dire autant sur un côté du vaisseau que sur l'autre, & signifie encore de part & d'autre de la droite route ; ce qui désigne la même chose. Lorsqu'on dit, par exemple, que l'on peut naviger ou faire des bordées sur onze points de compas de bord à bord, cela signifie qu'on peut se servir de onze airs de vent qui sont à stribord ou à l'un des côtés du vent de la route ; & encore des onze autres airs de vent qui sont à basbord, ou à l'autre côté du même vent de la route. Comme si le lieu de la route est à l'oüest, le vent d'est sera le vent de la droite route. Mais l'on peut se servir de vingt-deux rumbs de vent différens pour porter à l'ouest, ou s'en approcher ; savoir des onze airs de vent qui sont depuis l'est jusqu'au sud-oüest, quart de sud ; & des onze autres airs de vent qui sont depuis l'est jusqu'au nord-oüest : ainsi c'est naviger & gouverner sur onze airs de vent de bord à bord.
Bord à bord, deux vaisseaux qui sont bord à bord ; c'est-à-dire qu'ils sont près l'un de l'autre de l'avant en-arriere.
Un bord qui allonge, c'est-à-dire que la bordée que l'on court sert à la route, quoique le vent soit contraire.
Bon bord, fait un bon bord ; c'est-à-dire que l'on a gagné ou avancé à sa route, étant au plus près du vent.
Bord à terre, bord au large : on employe ce terme lorsqu'on parle d'un vaisseau qui court à la mer & qui recourt à terre, ou de la mer à terre & de la terre à la mer.
Passer du monde sur bord, c'est un commandement qui se fait à l'équipage pour faire passer des matelots des deux côtés de l'échelle, pour recevoir ceux qui veulent entrer ou sortir du vaisseau. Ce commandement ne se fait que pour les officiers, & pour ceux à qui on veut rendre des honneurs.
Bas bord, haut bord ; on dit un vaisseau de haut bord on dit aussi un vaisseau de bas bord. Voyez NAVIRE & VAISSEAU.
Bord de la mer, c'est le rivage ou les premieres terres qui bordent la mer.
BORD, BORDAGE ; ce sont les planches qu'on employe à border un vaisseau.
Franc bord, ce sont les bordages qui couvrent les membres du vaisseau. Ce mot se prend aussi en particulier pour le bordage, depuis le bas des fleuves jusqu'au haut du vaisseau. (Z)
BORD du bassin en Architecture ; c'est la tablette ou le profil de pierre ou de marbre, ou le cordon de gason ou de rocaille qui pose sur le petit mur, ou circulaire, ou quarré, ou à pans, d'un bassin d'eau. (P)
BORDS DENTELES, (Rubanerie-Tissuterie) est la même chose que dent de rat. Voyez DENT DE RAT.
BORD, RUBAN, ou GALON qu'on met aux extrémités des chapeaux, des jupes, & sur les coutures des habits, &c. On fabrique des bords de différente largeur & de toute sorte de matiére, comme or, argent, soie, fil, &c.
On fait à Amiens quantité de bords de laine : on en compte de trois sortes ; l'un, qu'on appelle petite bordure, dont la chaîne doit être composée de vingt-sept fils, & la piece doit contenir vingt-quatre aunes ; l'autre, dont la chaine est de trente-trois fils ; & la piece de vingt-quatre aunes, se nomme bord & demi ; & le troisiéme, qui doit avoir trente-six fils à la chaine, & trente-six aunes à la piece, est appellé bord à dentelle. Voyez ROULEAU DE LAINE.
BORD, en terme de Vannier ; c'est un cordon d'osier plus ou moins gros, selon la piece qu'il termine par en-haut, & qu'il rend plus solide.
BORD ; en terme de Fondeur de cloche, est la plus grande épaisseur qu'elle ait ; sur laquelle frappe le battant. Voyez l'art. FONTE des cloches, & la fig. 1. Planche de la fonderie des cloches. La troisiéme partie du bord s'appelle corps. Voyez CORPS.
BORD de manchon, en Pelleterie ; c'est une fourrure que l'on fait avec la peau d'un animal aux deux bouts des manchons. Voyez MANCHON.
BORD de front, terme de Perruquier ; c'est le nom que ces ouvriers donnent aux tresses qui se placent sur le bord de la perruque qui touche au front, & regnent depuis une des tempes jusqu'à l'autre.
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BORDAGE | BORDAGES, FRANCBORD, FRANCBORDAGE, en Marine ; ces mots sont synonymes. On nomme ainsi le revêtement des planches qui couvrent le corps du vaisseau par-dehors, depuis le gabord jusqu'au plat-bord. Quelques-uns l'appellent le francbordage, pour le distinguer du bordage intérieur, qui s'appelle serrage : serres ou vaigres. Les Charpentiers appellent aussi bordages, les planches qu'ils employent. On dit bordage de tant de pouces, par exemple, de quatre pouces, c'est-à-dire qu'il a quatre pouces d'épaisseur. Quelques-uns prétendent que l'épaisseur du francbordage se doit régler par l'épaisseur de l'étrave ; & qu'on lui doit donner le quart de cette épaisseur, & même un peu plus.
La largeur des planches du francbordage est le plus souvent de 18, 20 ou 22 pouces.
Le bordage de l'arcasse peut être d'un tiers plus mince que celui des côtés. Lorsqu'il s'agit des plus grands vaisseaux, pour lesquels il faut des bordages plus épais, & par conséquent plus difficiles à plier, on tâche de se passer de feu en tout ou en partie, c'est-à-dire de n'avoir pas besoin de les chauffer & de les plier beaucoup ; & pour cet effet on prend des poutres qu'on choisit fort unies, & on les scie en courbe entiere sur des modeles ou en demi-courbe ; & en ce cas on les échauffe un peu pour achever de les faire courber. Voyez Marine, Pl. VI. fig. 31. le dessein d'un bordage.
Il faut que les bordages & les ceintres qu'on destine pour un vaisseau, soient pris de quatre à six pouces plus longs que leur juste mesure, même en y comprenant leur rondeur, ou bien ils se trouveront trop courts.
BORDAGE DE FOND. Les constructeurs ne conviennent pas également de ce qu'on doit entendre par bordages de fond : les uns comprennent sous ce mot tous les bordages, depuis la quille jusqu'au premier bordage des fleurs, & par conséquent les gabords & les ribords ; souvent on n'entend que les bordages, depuis les ribords jusqu'au premier bordage des fleurs : d'autres confondent aussi les gabords & les ribords, en prenant l'un & l'autre mot pour les deux premieres planches qui joignent la quille par les deux côtés ; au lieu qu'il y a des charpentiers qui les distinguent, nommant ces deux premieres planches seulement gabords ; & les deux autres premieres planches qui suivent, c'est-à-dire une de chaque côté après les gabords, ils les nomment ribords. Voyez Marine, Pl. V. fig. 1. n°. 162. la place de ces bordages.
BORDAGES DES FLEURS ; ce sont les planches qu'on employe à border les fleurs du vaisseau, & qui en font la rondeur dans les côtés, depuis le fond de cale jusque vers la plus basse préceinte. Cette rondeur contribue beaucoup à faire flotter le vaisseau ; elle sert à le faire relever plus aisément lorsqu'il vient à toucher ; & elle fait qu'il ne s'endommage pas si facilement qu'il feroit, si le bas de ses côtés étoit plus quarré.
On employe dans les fleurs d'un vaisseau trois ou quatre pieces de bordage, ou même plus, selon la grandeur du navire, & selon la rondeur qu'on leur veut donner.
BORDAGES d'entre les préceintes ou couples ; ce sont les deux pieces de bordage qu'on met entre chaque préceinte : elles s'appellent aussi fermetures ou fermures. Voyez Pl. VI. n°. 32. la figure de ce bordage.
On donne aux bordages d'entre les préceintes une largeur convenable à la grandeur du vaisseau : ceux qui sont entre les deux plus basses préceintes, doivent être proportionnés, ensorte que les dalots y puissent être commodément percés, & qu'ils se rencontrent juste au-dessous de la seconde préceinte.
Les entre-sabords sont proportionnés à la largeur qu'on donne aux sabords. Les bordages d'entre les préceintes qui sont au-dessus des sabords, doivent aussi avoir leur juste proportion pour y percer les dalots de haut pont. Il faut remarquer qu'à la préceinte qui est au-dessus des sabords, on commence à diminuer l'épaisseur des bordages, & qu'on continue jusqu'au haut.
On donne le plus souvent aux fermures ou couples d'entre les préceintes, la moitié de l'épaisseur des préceintes ; cependant on change cette disposition, selon qu'on le juge à propos, par rapport aux proportions du bâtiment entier : mais à l'égard de leur largeur ou hauteur, il n'y a point de regle à donner, que de prendre bien garde que toutes les fermures soient si bien proportionnées que les sabords & les dalots puissent s'y placer commodément & d'une maniere qui soit agréable ; & pour cet effet on doit les tenir un peu plus étroites vers l'avant & vers l'arriere qu'au milieu. Au reste comme on ne les présente point, & qu'il faut les dresser toutes prêtes par la regle seulement, il y faut être fort exact, & prendre soin qu'il n'y ait point de défauts.
BORDAGES d'entre les deux préceintes du premier rang, ou plus basses préceintes. Voyez PRECEINTES.
BORDAGES des sabords, fermures des sabords ; ce sont tous les bordages d'entre les deux préceintes, où les sabords sont percés.
BORDAGES d'entre les sabords de la premiere & de la seconde batterie. Voyez Pl. V. fig. 1. n°. 171 & 172.
BORDAGES des acastillages ou esquain, quein, qlin. Voyez ESQUAIN.
Premier bordage de l'esquain ; c'est le bordage qui se pose sur la lisse de vibord, pour commencer les acastillages : il est plus épais que le reste de l'esquain. Voyez ce bordage Pl. VI. n°. 33.
BORDAGES pour recouvrir les ponts, voyez la Pl. VI. n°. 34. & 35. la fig. de ces bordages.
BORDAGES du premier pont ; voyez la Pl. V. fig. 1. n°. 78.
BORDAGES du second pont ; Pl. V. fig. 2. n°. 125.
BORDAGES des gaillards ; Pl. V. fig. 1. n°. 146.
BORDAGES du vaigrage ; voyez Pl. IV. fig. 1. n°. 141.
BORDAGES du vaigrage entre deux ponts ; voy. Pl. IV. fig. 1. n°. 117.
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BORDAIER | (Mar.) quelques-uns disent bordeger ; c'est faire ou courir des bordées, c'est-à-dire gouverner tantôt d'un côté, tantôt d'un autre, lorsque le vent ne permet pas de porter à route. (Z)
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BORDAILLE | S. f. terme de riviere, se dit de la partie d'un bateau foncet, voisine des rebords.
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BORDAT | S. m. (Commerce) petite étoffe ou tissu étroit, qui se fabrique en quelques lieux de l'Egypte, sur-tout au Caire, à Damiette, & à Alexandrie.
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BORDE | BORDE
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BORDÉ | adj. corps bordés, corpora fimbriata, en Anatomie, est le nom d'un petit rebord collatéral, mince & plat, comme une espece de bandelette, que l'on remarque aux côtés externes des piliers postérieurs de la voûte à trois piliers. Voyez VOUTE. (K)
BORDE, en terme de Blason, se dit des croix, des bandes, des gonfanons, & autres choses qui ont des bords de différens émaux.
Thomas d'Embri, d'or à la bande d'or bordée & dentelée de gueules. (V)
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BORDÉE | S. f. (Marine) c'est le cours d'un vaisseau, ou la route qu'il a faite sur un air de vent lorsqu'il a changé on reviré de bord, jusqu'à ce qu'il change de bord & qu'il revire de nouveau. Lorsque le vent est contraire à la route qu'on veut faire, on fait des bordées pour s'élever & s'approcher le plus près du vent que l'on peut. Voyez BORD SUR BORD & DE BORD A BORD.
Faire diverses bordées, courir plusieurs bordées, c'est-à-dire virer & revirer souvent.
Courir à la même bordée, c'est-à-dire courir encore du même côté que l'on a couru : c'est aussi courir à la même aire de vent qu'un autre vaisseau.
Venir à sa bordée d'un parage à un autre, c'est-à-dire y venir à la bouline sans changer les voiles & sans revirer.
Courir à petites bordées, c'est ne pas courir loin d'un côté & d'autre.
On dit : bonne bordée, mauvaise bordée.
Faire la grande bordée ; c'est lorsqu'étant dans une rade on veut y faire le quart, comme si on étoit à la mer.
Faire la petite bordée ; c'est lorsque dans une rade on partage les quarts en deux parties, pour faire le service ou le quart.
BORDEE de canon, (Marine) c'est l'artillerie qui est dans les sabords de l'un ou de l'autre côté.
Envoyer la bordée, donner la bordée ; c'est tirer sur un autre vaisseau tous les canons qui sont dans l'un ou l'autre côté du navire. (Z)
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BORDELAGE | S. m. terme de Droit coûtumier, est une sorte de tenure en roture, usitée en quelques coûtumes, & singulierement dans celle de Nivernois, à des charges & conditions particulieres.
Coquille dit que le terme de bordelage vient de borde ou borderie, ancien mot françois qui signifie un domaine aux champs, destiné pour le ménage, labourage, & culture.
Les conditions du bordelage sont, 1°, que faute du payement de la redevance, le seigneur peut rentrer dans l'héritage par droit de commise, en le faisant ordonner en justice : 2°. que le tenancier ne peut démembrer les choses qu'il tient en bordelage, à peine de commise : 3°. qu'il doit entretenir l'héritage en bon & suffisant état : 4°. que les collatéraux du tenancier ne peuvent lui succéder, s'ils n'étoient communs avec le défunt de communauté coûtumiere, (voyez COMMUNAUTE COUTUMIERE) ; faute de laquelle condition, c'est le seigneur qui lui succede : 5°. que si le détenteur vend l'héritage, le seigneur a le choix de le retenir en remboursant l'acquéreur, ou de prendre la moitié du prix porté par le contrat. (H)
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BORDELIERE | S. f. ballerus, (Hist. nat. Ichthyol.) poisson qui a la tête petite, des os rudes en place de dents, & le palais charnu sans qu'il y ait de langue : mais il se trouve au milieu du palais un os, & plus bas deux autres os découpés en scie d'un côté. C'est par la rencontre des os, que la bordeliere broye les herbes dont elle se nourrit. Elle a deux nageoires près des oüies, deux autres au milieu du ventre, une autre qui s'étend depuis l'anus jusqu'à la queue, & une autre sur le dos. Les dernieres nageoires & la queue sont rougeâtres, comme dans les perches de riviere : celle du dos est noire ; il y a un trait courbe qui s'étend depuis les oüies jusqu'à la queue : les oüies sont au nombre de quatre de chaque côté. On a donné à ce poisson le nom de bordeliere à Lyon & en Savoie, parce qu'il suit toûjours les bords des lacs, où on le prend. Il est assez semblable à la breme, quoiqu'il soit plus petit, & qu'il n'ait pas des écailles à proportion si grandes. On peut le comparer à la carpe pour sa façon de vivre. Rondelet. Voyez POISSON. (I)
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BORDELONGO | (Géog.) ville & royaume sur le golfe de Siam, avec un bon port.
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BORDEMENT | S. m. terme de Peinture en émail : pour employer les émaux clairs, on les broye seulement avec de l'eau ; car ils ne peuvent pas souffrir l'huile comme les émaux épais ; on les couche à plat, bordés du métal sur lequel on les met. On fait quelquefois des ouvrages qui sont tout en champ d'émail & sans bordement ; ce qui est assez difficile, à cause que les émaux clairs en se parfondant, se mêlent ensemble, & que les couleurs se confondent, principalement lorsque les pieces sont petites. Voyez PARFONDRE. (R)
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BORDER | v. act. en général, c'est garnir les extrémités de quelque chose que ce soit, d'une autre chose accidentelle, qui orne, conserve, ou fortifie la chose bordée.
Ainsi, en terme de Pêche, border un filet, c'est attacher de trois pouces en trois pouces avec du fil, une corde autour du filet pour le rendre plus fort.
BORDER, en terme de Jardinage, un parterre, une plate-bande, une planche de potager ; c'est l'entourer de buis, de staticée, de thym, de lavande, de romarin, & autres plantes. (K)
BORDER, en terme de Boisselier ; c'est garnir d'un bord d'osier les extrémités de chaque piece de boissellerie en-dessus du corps, ou vers le milieu de cette piece, pour la rendre plus ferme & plus solide.
BORDER, en terme de Vannerie ; c'est finir & terminer par un cordon de plusieurs brins d'osier une piece de mandrerie.
BORDER LA HAIE, en Art militaire, c'est un mouvement par lequel on dispose plusieurs rangs ou plusieurs files, sur une ou plusieurs lignes droites marquées ; & l'on dit border la haie, parce qu'on se sert véritablement de cette évolution pour disposer une troupe le long d'une haie, d'un retranchement, d'une rue, ou de quelqu'autre chemin, Voy. RANG, FILE.
Il y a plusieurs manieres de border la haie. La plus ordinaire est qu'au commandement de border la haie, chaque rang ou chaque file fait en particulier un quart de conversion du côté qu'il est dit ; ce qui réduit tous les rangs en une file, ou toutes les files en un seul rang, que l'on appelle haie. Bottée, Exercice de l'infanterie. (Q)
BORDER un vaisseau, (Marine) c'est couvrir ses membres de bordages.
On dit border le tillac, l'acastillage, le vibord.
Border en caravelle ; c'est border à l'ordinaire, de sorte que les bordages se touchent quarrément à côté l'un de l'autre.
Border à quein ; c'est border de sorte que l'extrémité d'un bordage passe sur l'autre. Voyez QUEIN.
BORDER une voile, (Marine) c'est l'étendre par en-bas en halant ou tirant les cordages appellés écoutes, pour prendre le vent.
Larguer la voile ou filer les écoutes, c'est le contraire de border.
Les voiles supérieures sont bordées par le bas aux vergues inférieures.
Border une écoute, c'est la tirer, ou haler, jusqu'à ce qu'on fasse toucher le coin de la voile à un certain point.
Border les écoutes arriere, c'est-à-dire haler les deux écoutes de chaque voile, afin d'aller vent en poupe.
Border l'artimon, c'est haler l'écoute d'artimon à toucher à une poulie qui est mise sur le haut de l'arriere du vaisseau. On dit seulement border l'artimon, ou l'écoute d'artimon, & non les écoutes ; parce qu'il n'y en a qu'une à cette voile qui serve à la fois.
Border l'artimon tout plat, border la misene tout plat, c'est en border les écoutes autant qu'il se peut.
Borde les écoutes tout à plat, terme de commandement. Border & brasser au vent, c'est pour faire border les écoutes & brasser les vergues, lorsque le vent recule. Borde la grande écoute ; borde la misene, ou la hale au plus près du vent ; borde la civadiere ; borde le grand perroquet ; borde le petit perroquet de misene ou d'avant ; borde au vent ; borde sous le vent.
Tous ces commandemens se font pour faire border les écoutes chacune en particulier, quelques-uns disent, borde l'écoute d'une telle voile.
La vergue de foule ne sert que pour border le perroquet par le bas.
BORDER un vaisseau ; on se sert quelquefois de cette expression pour dire, suivre un vaisseau de côté pour l'observer & le reconnoître. (Z)
BORDER les avirons, (en terme de Batelier) c'est mettre les avirons dans les tourets du bachot pour nager, autrement dit ramer.
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BORDEREAU | S. m. (terme de Finances) est un état, une liste ou un mémoire d'articles ou de sommes tous portés sur une même colonne, pour en resumer plus facilement le montant. (H)
BORDEREAU, s. m. (en terme de Commerce) est un mémoire ou une note des especes que l'on donne en payement, ou que l'on reçoit, ou que l'on a dans sa caisse ; on dit dans ce sens un bordereau d'especes ou un bordereau de caisse.
On appelle aussi bordereau de compte, l'extrait d'un compte dans lequel on comprend toutes les sommes tirées hors des lignes, soit de la recette soit de la dépense, afin de connoître le total de l'une & de l'autre, pour savoir s'il est dû par le comptable, ou si on lui doit.
Les marchands, négocians & banquiers ont un livre de caisse & de bordereaux, sur lequel ils portent toutes les sommes qu'ils reçoivent & qu'ils payent journellement ; ce livre est du nombre de ceux qu'on appelle livres d'aides, ou livres auxiliaires. Voyez LIVRE DE CAISSE & de BORDEREAUX.
On nomme aussi bordereau un petit livret que les commis, facteurs, garçons, & porteurs d'argent des marchands, négocians & banquiers, qui vont à la recette par la ville, portent dans leur poche, & sur lequel ils écrivent à mesure qu'on leur fait quelque payement, & les dates des jours qu'ils ont reçû, les noms de ceux qui ont payé, les sommes qui leur ont été payées, & en quelles especes ou monnoie.
On appelle table du bordereau d'aunage, une table composée de diverses fractions de l'aune, suivant qu'elle est différemment divisée, comparées aux parties de la livre tournois de vingt sols. On trouve cette table dans le Gendre & dans le Diction. du commerce, tom. I. pag. 1638. avec l'usage & la pratique qu'on en doit faire. (G)
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BORDIER | S. m. (terme de Coûtumes) par où l'on entend les propriétaires qui ont des héritages sur les bords des grands chemins. (H)
BORDIER, (Marine) vaisseau bordier, c'est celui qui a un côté plus fort que l'autre.
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BORDIGUE | S. f. (Pêche) c'est ainsi qu'on appelle un espace retranché de roseaux & de cannes, vers les bords de la mer, pour arrêter le poisson. Les bordigues se font ordinairement sur les canaux qui vont de la mer aux étangs salés ; & elles arrêtent le poisson dans le passage de l'une à l'autre.
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BORDOYER | (terme de Peinture en émail) qui exprime les mauvais effets que font les émaux clairs, lorsqu'étant employés sur de bas or, ils plombent & deviennent louches ; ensorte qu'une espece de couleur noire, comme de la fumée, obscurcit la couleur naturelle de l'émail, lui fait perdre beaucoup de sa vivacité, & la bordoye, en se rangeant tout-autour, comme si c'étoit du plomb noir. Voyez PEINTURE EN EMAIL. (R)
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BORDURE | S. f. se dit en général de tout corps appliqué sur les extrémités d'un autre, soit pour conserver ces extrémités, soit pour les orner, soit pour les fortifier.
BORDURE, s. f. (en Architecture) est un profil en relief rond ou ovale, le plus souvent taillé de sculpture, qui renferme quelque tableau, bas-relief ou panneau de compartiment ; on appelle cadres, les bordures quarrées.
BORDURE DE PAVE ; les Paveurs appellent ainsi les deux rangs de pierre dure & rustique, qui retiennent les bords du pavé d'une chaussée. (P)
BORDURE en Boissellerie ; ce sont des feuilles de hêtre fort minces, portant environ six pouces de largeur ; on les appelle bordures, parce qu'elles servent à border les extrémités des seaux, boisseaux, minots, &c.
BORDURE, (Corderie) tissu de chanvre ou sangle, large d'environ un pouce de roi, qui se fabrique par les Cordiers, & dont les Tapissiers se servent pour border les tentes, les tapisseries & autres gros ouvrages.
BORDURE, (en Jardinage) se dit des plantes qui entourent les planches d'un potager. Voyez BORDER.
BORDURE, (en Peinture) est un ornement qui regne tout-au-tour d'un tableau, d'une estampe, &c. Une riche bordure, une bordure commune, une bordure d'or bruni, d'or mat, &c. " Les bordures, dit M. l'abbé du Bos, jettent un nouvel éclat sur les couleurs, & semblent en détachant les objets voisins, réunir mieux entr'elles les parties dont ils sont composés ". Réfl. sur la Peint. (R)
BORDURE, (en terme de Blason) est une espece de brisure en forme de passement plat au bord de l'écu, qu'elle environne tout-au-tour en forme de ceinture, & sert à distinguer différentes branches.
La largeur de la bordure doit être d'environ une sixieme partie de l'écu.
La bordure simple est celle qui est toute d'une même couleur ou d'un même métal ; c'est la premiere brisure des puînés. Il y en a d'autres, componées, cantonnées, engrelées, endentées, & chargées d'autres pieces, qui sont des brisures différentes des puînés de différens degrés.
Si la ligne qui constitue la bordure est droite, & la bordure unie, comme on dit en terme de Blason, pour lors on ne nomme que la couleur ou le métal de la bordure, comme il porte des gueules à bordure d'or. Si la bordure est chargée de plantes ou de fleurs, on dit qu'elle est verdoyée de treffles. Si elle est d'hermine, de vaire, ou d'autre pelleterie, le terme d'art est bordée d'hermine.
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BOREAL | adj. (Physiq.) se dit en général de tout ce qui a rapport au septentrion ou au nord, d'où le vent Borée souffle. Ainsi on appelle l'hémisphere de la terre qui répond au pole arctique, hémisphere boréal ; on dit de même que la latitude boréale d'un lieu est de tant de degrés, pour marquer que ce lieu est dans l'hémisphere boréal à tant de degrés de distance de l'équateur.
Cependant on se sert aujourd'hui plus communément du mot septentrional ; & on a reservé le nom de boréal pour le phénomene appellé aurore boréale Voyez AURORE BOREALE.
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BOREASMES | S. f. pl. fêtes instituées en l'honneur de Borée.
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BORÉE | S. m. (Physiq.) nom dérivé du grec, & dont on se sert communément pour signifier le vent de nord. Voyez VENT & NORD.
Les étymologistes font venir ce mot du Grec , clamor, bruit ; ou de , esca, aliment ; soit parce que l'on regardoit ce vent comme donnant de l'appétit, ou parce qu'on le croyoit bon pour les fruits de la terre qui nous donnent la nourriture. D'autres le dérivent de l'hébreu, biojah, aliment, ou de beri, tranquillité, ou de bor, pureté, ou de bar, blé. Les anciens supposoient que ce vent se faisoit sentir principalement en Thrace. Pezron remarque qu'anciennement borée signifioit le vent de nord, & qu'il souffloit chez ces peuples pendant le solstice d'été. Il ajoûte que ce mot vient du mot celtique bore, matin, parce que les premiers rayons du soleil se font voir en été au nord-est, & qu'ordinairement c'est de ce point que ce vent commence à souffler. (O)
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BORETSCHO | (Géog.) ville forte, sur les limites de la Hongrie & de la Transilvanie.
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BOREZ | (Géog.) petite ville d'Espagne, dans le duché d'Arcos, en Andalousie.
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BORG | (Géog.) ville située dans l'île de Femern, dans la mer Baltique ; elle appartient au duc de Holstein.
BORG, (Géog.) petite ville & port de l'île de Barra, en Ecosse.
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BORGHETTO | (Géog.) il y a trois villes de ce nom ; la premiere dans le Trentin, vers les frontieres des états de Venise : la seconde dans le Véronois, sur les frontieres du Mantoüan ; & la troisieme dans le duché de Milan, sur le Lambro.
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BORGHOLTZHAUSEN | (Géog.) petite ville du comté de Ravensberg, appartenante au roi de Prusse.
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BORGI | (Géog.) ville d'Afrique, dans la province de Zeb, en Numidie.
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BORGO | (Géog.) ancienne ville de Suede, sur le golfe de Finlande, dans la province de Nylande, & dans le territoire de Borgo. Long. 44. lat. 60. 34.
BORGO DI S. ANGELO, (Géog.) forteresse dans l'île de Malte.
BORGO FORTE, (Géog.) petite ville du duché de Mantoue, sur le Pô. Long. 28. 17. lat. 41. 53.
BORGO D'OSMA, (Géog.) ville de la Castille vieille, sur le Duero.
BORGO SAN DONNINO, (Géog.) petite ville du duché de Parme. Long. 27. 30. lat. 41. 53.
BORGO DI SAN SEPOLCRO, (Géog.) ville du grand duché de Toscane, dans le Florentin. Longit. 29. 50. lat. 43. 35.
BORGO DI SESSIA, (Géog.) petite ville du duché de Milan, quoiqu'appartenante aux ducs de Savoie.
BORGO DI VAL DI TARO, (Géog.) petite ville sur le Taro, avec citadelle, sur les frontieres de l'état de Genes.
BORGO-FRANCO, (Géog.) petite ville sur le Pô, dans le Milanois.
BORGO-MANERO, (Géog.) ville du Milanois, près de Navarre.
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BORIGUEN | (Géog.) c'est le nom que les naturels Amériquains donnoient à l'île qui a pris le nom de Porto-rico, située au levant de l'île de S. Domingue, & dont les Espagnols sont en possession.
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BORISSOW | (Géog.) ville & château du palatinat de Minski, en Lithuanie, sur la riviere Berezina.
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BORJA | (Géog.) petite ville d'Espagne, dans le royaume d'Aragon. Long. 16. 15. lat. 41. 50.
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BORKUM | (Géog.) petite île de la mer d'Allemagne, près de la province de Groningue, de qui elle dépend.
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BORMIA | BORMIA
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BORMIO | (Géog.) ville agréable & bien peuplée, au pays des Grisons ; c'est la capitale du comté de ce nom, elle est située au confluent de l'Adda & de l'Issollaccia. Long. 27. 45. lat. 26. 45.
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BORNA | (Géog.) petite ville de Saxe, près de Leipsick, sur la Wyra & la Pleiss.
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BORNAG | (ACTION DE), terme de Palais, est celle par laquelle ceux qui ont des héritages voisins, tenans & aboutissans les uns aux autres, agissent l'un contre l'autre pour s'obliger respectivement à les séparer, en y plaçant de nouvelles bornes, ou en rétablissant les anciennes, qui auroient été transportées ailleurs ou par cas fortuit, ou par le fait de l'une des parties.
L'action de bornage est mixte. Voyez ACTION.
On parvient à borner deux héritages par trois moyens : par les bornes qui ont été mises sur les confins pour servir de limites, par titres & par témoins. La maniere de pratiquer ces deux dernieres preuves est la même qu'en toute autre action. Par rapport au premier, on reconnoît qu'une pierre a été mise pour servir de borne & de limite, quand on trouve dessous des garants ou témoins, c'est-à-dire deux ou trois morceaux d'une pierre plate, que les mesureurs & arpenteurs ont accoûtumé de mettre aux côtés de la borne quand ils la plantent. On appelle ces petites pierres garants ou témoins, parce qu'elles sont des témoins muets qui certifient la vérité. (H)
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BORNE | S. m. se dit en général de tout signe de limites, & cette définition convient tant au simple qu'au figuré. Ainsi,
BORNE, en Droit, est toute séparation naturelle ou artificielle, qui marque les confins ou la ligne de division de deux héritages contigus. Quand il n'y en a pas de naturelles, les arpenteurs en placent d'artificielles. Voyez ci-dessus BORNAGE.
Il y a peine d'amende contre ceux qui enlevent & déplacent les bornes, dans le dessein d'empiéter sur l'héritage voisin. (H)
BORNE DE BATIMENT, en Architecture, est une espece de cone tronqué de pierre dure, à hauteur d'appui, à l'encognure ou au-devant d'un mur de face, pour le défendre des voitures.
Borne de cirque ; Pierre en maniere de cone, qui servoit de but chez les Grecs, pour terminer la longueur de la stade, & qui régloit chez les Romains la course des chevaux dans les cirques & les hippodromes, ce qu'ils nommoient meta. (P)
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BORNEO | (Géog.) île d'Asie, dans les Indes, l'une des trois grandes îles de la Sonde ; elle fut découverte en 1521, par dom Georges Menezés, portugais. Cette île, qui a environ 600 lieues de tour, est sous la ligne. Tout ce pays est très-fertile ; il abonde en casse, cire, camphre, poivre, herbes aromatiques, bois odoriférans & résineux, le riz y est le meilleur de toute l'Asie. Il y a aussi de grandes forêts remplies d'animaux singuliers ; le plus extraordinaire sans-doute, est celui que l'on appelle homme sauvage ; il est, à ce qu'on dit, de la hauteur des plus grands hommes, il a la tête ronde comme la nôtre, des yeux, une bouche, un menton un peu différens des nôtres, presque point de nez, & le corps tout couvert d'assez longs poils. Ces animaux courent plus vîte que des cerfs ; ils rompent dans les bois des branches d'arbre, avec lesquelles ils assomment les passans, dont ensuite ils sucent le sang : c'est ce qu'en rapporte une lettre inserée dans les Mémoires de Trévoux en 1701. Ces bêtes, que l'on trouve au premier coup d'oeil ressembler si fort à l'homme, & qui examinées en détail en différent presque dans tous les traits, pourroient bien n'être que des singes, dont des voyageurs, amis du merveilleux, ont exagéré un peu la taille, l'agilité à la course, & beaucoup la conformité à l'espece humaine. On y voit aussi des singes rouges, noirs ou blancs, appellés oncas, qui fournissent de très-beaux bézoards.
Cette île contient plusieurs royaumes ; le principal est celui de Borneo, dont la capitale est la ville du même nom ; elle est bâtie dans un marais, sur pilotis comme Venise ; son port est grand & beau. Le roi de Borneo n'est que le premier sujet de sa femme, à qui le peuple & les grands déferent toute l'autorité : la raison en est qu'ils sont extrèmement jaloux d'être gouvernés par un légitime héritier du throne, & qu'une femme est certaine que ses enfans sont à elle, ce qu'un mari n'ose assûrer. Journal des Savans du mois de Février 1680.
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BORNER | v. act. (Jardinage) du bouis, par exemple, c'est, lorsqu'il vient d'être planté, lui donner avec le dos du plantoir ou avec les mains, la forme & le contour qu'il doit avoir suivant le dessein, en plombant bien la terre tout au-tour de peur qu'il ne s'évente. (K)
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BORNES | TERMES, LIMITES, (Gramm.) termes qui sont tous relatifs à l'étendue finie ; le terme marque jusqu'où l'on peut aller : les limites, ce qu'il n'est pas permis de passer : les bornes, ce qui empêche d'aller en-avant. Le terme est un point ; les limites sont une ligne ; les bornes un obstacle. On approche ou l'on éloigne le terme : on étend ou l'on resserre les limites : on avance ou l'on recule les bornes. On dit les bornes d'un champ, les limites d'une province, le terme d'une course.
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BORNHOLM | (Géog.) île de l'Océan, appartenante au royaume de Danemark, à 20 lieues des côtes de la Scandinavie ; elle contient une ville nommée Rottum, & deux châteaux.
BORNHOLM, île de la mer Baltique.
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BORN | ou BOURNOU, (Géog.) ville & royaume d'Afrique, dans la Nigritie, avec un lac & un desert de même nom ; on croit que c'est le pays des anciens Garamantes. On dit que les habitans n'ont point de religion, que les femmes y sont communes, & que les particuliers n'y reconnoissent pour leurs enfans que ceux qui leur ressemblent. Le pays abonde en troupeaux, en millet, & en coton. Il est entre le 32 & le 41 de long. & le 10 & le 20 de lat. Le lac de Borno est célebre parce que le Niger le traverse.
BORNO, (Géog.) petite riviere de la Savoie, qui se jette dans l'Arve.
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BORNOYE | ou BORNEYER, c'est regarder avec un oeil, en fermant l'autre, pour mieux juger de l'alignement, ou connoître si une surface est plane, ou de combien elle est gauche. Voyez DEGAUCHIR. (D)
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BORNSTADT | (Géog.) petite ville de la Transilvanie, à deux lieues d'Hermanstadt.
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BOROUBRIDGE | (Géog.) ville d'Angleterre, dans la province d'Yorck, sur la riviere d'Youre, à cinq lieues d'Yorck. Long. 16. 5. lat. 54.
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BORRELISTES | S. m. pl. (Hist. eccles.) M. Stoupp, dans son Traité de la religion hollandoise, parle d'une secte de ce nom dont le chef étoit Adam Boreil, Zélandois, qui avoit quelque connoissance des langues hébraïque, greque & latine. Ces Borrelistes, dit M. Stoupp, suivent la plus grande partie des opinions des Mennonites, bien qu'ils ne se trouvent point dans leurs assemblées. Ils ont choisi une vie fort sévere, employant une partie de leur bien à faire des aumônes, & s'acquitant d'ailleurs avec grand soin de tous les devoirs d'un homme chrétien, selon l'idée qu'ils s'en forment. Ils ont en aversion toutes les églises, & l'usage des sacremens, des prieres publiques, & de toutes les autres fonctions extérieures du service de Dieu. Ils soûtiennent que toutes les églises qui sont dans le monde, & qui ont été après la mort des apôtres & de leurs premiers successeurs, ont dégénéré de la pure doctrine qu'ils avoient prêchée, parce qu'elles ont souffert que la parole de Dieu infaillible, contenue dans le vieil & le nouveau Testament, ait été expliquée & corrompue par des docteurs qui ne sont pas infaillibles, & qui veulent faire passer leurs confessions, leurs catéchismes, leurs liturgies & leurs sermons, qui sont des ouvrages des hommes, pour ce qu'ils ne sont point. Ces Borrelistes soûtiennent qu'il ne faut lire que la seule parole de Dieu, sans y ajoûter aucune explication des hommes. M. Stoupp qui nous a donné cette description des Borrelistes, assûre qu'il les a connus en Hollande. (G)
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BORRIANO | (Géog.) petite ville d'Espagne dans le royaume de Valence, sur le bord de la Méditerranée.
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BORROMÉE | (Géog.) petite île du duché de Milan extrèmement ornée, dans le lac de Come.
BORROMEES, (Les îles) Géog. ce sont deux îles agréables du duché de Milan, à la partie méridionale du lac Majeur.
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BORROW | (Hist. nat.) arbre ou bois des Indes : son écorce est couverte d'épines crochues ; si l'on y fait une incision, il en sort un suc purgatif : il est si poreux qu'il n'est pas même bon à brûler. Il paroît par ce détail que cette plante est peu connue.
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BORROZAIL | (Medecine) ou le Zail des Ethiopiens, maladie épidémique régnante dans les environs de la riviere de Senega : elle attaque les parties honteuses ; cependant elle differe de la vérole, quoiqu'elle doive son origine à un usage immodéré des femmes : pour lesquelles les habitans de ces contrées ont une passion violente. Cette maladie s'appelle dans les hommes asab, & dans les femmes assabatus. Blancard. (N)
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BORSHOLDER | S. m. (Hist. mod.) nom qu'on donnoit anciennement en Angleterre au doyen ou chef d'une certaine société qu'on appelloit décurie, parce qu'elle étoit composée de dix hommes qui se cautionnoient solidairement, & s'obligeoient envers le roi de répondre de tout ce qui pourroit se commettre de contraire aux lois par leurs associés. Si l'un d'eux venoit à prendre la fuite, les autres étoient tenus de le représenter dans le terme de trente jours ; ou de satisfaire pour lui, selon la qualité de la faute qu'il avoit commise. Le roi Alfrede qui régnoit vers l'an 880, divisa toute l'Angleterre en comtés, chaque comté en centuries, & celles-ci en décuries ou dix classes de bourgeois considérables, dont le doyen fut appellé borsholder, c'est-à-dire le principal répondant, ou le vieillard du bourg. Spelman, gloss. archeolog. Voyez DIXAINE. (G)
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BORSTEL | (Géog.) ville de Westphalie, dans l'évêché d'Osnabrug.
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BORT | (Géog.) petite ville de France, dans la province de Limosin,, sur la Dordogne.
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BORTINGLE | terme de riviere, espece de platbord, qui sert de hausse au bord du bateau lorsque la quantité de charge lui fait prendre trop d'eau.
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BORTWICK | (Géog.) ville de l'Ecosse méridionale, dans la province de Lothian.
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BORUWANNY | (Géog.) ville du royaume de Bohème, dans le cercle de Bechin.
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BORVA | (Géog.) petite ville & château de Portugal, dans la province d'Alentéjo, à deux lieues de Villa-Viciosa.
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BORYSTHENE | (Géog.) grand fleuve ; on l'appelle aujourd'hui Dnieper, ou Nieper. Il prend sa source dans la Russie, & la sépare de la Lithuanie, traverse l'Ucraine, & tombe dans la mer Noire à Oczakow. Il est très-large à son embouchure, & d'une navigation dangereuse à cause des rochers qui s'y trouvent, & de 70 îles qu'il forme, qui sont habitées par les Cosaques de Zaporow.
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BOSA | (Géog.) ville maritime dans la partie occidentale de l'île de Sardaigne, avec une citadelle & un assez bon port. Elle est située sur la riviere de Bosa, à sept lieues d'Alghier. Long. 26. 25. lat. 40. 19.
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BOSCH | (Géog.) petite île dans la mer du Nord, près les côtes de la Frise.
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BOSC | ou BOSCHI, (Géog.) petite ville d'Italie au Milanès, dans l'Alexandrin. Elle est sur la riviere d'Orbe, à deux lieues d'Alexandrie.
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BOSEL | S. m. c'est en Architecture, la même chose que bâton, tore, spire, astragale. Voyez ASTRAGALE. (P)
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BOSENHAM | (Géog.) ville d'Angleterre dans la province de Sussex.
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BOSINGEN | (Géog.) ville de Suisse dans le canton de Fribourg, sur la riviere de Senfen.
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BOSNA | (Géog.) riviere de Bosnie, qui se jette dans la Seve à Arki.
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BOSNIE | (Géog.) province de la Turquie en Europe, ainsi nommée de la riviere Bosna qui y coule. Elle se divise en haute & basse : elle est bornée au nord par l'Esclavonie, & au sud par l'Albanie.
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BOSPHORE | S. m. (Géog.) nom que les anciens donnoient à un détroit ou canal de mer d'une très-petite étendue. Voyez DETROIT, MER, &c.
On n'a donné ce nom qu'à deux détroits de la mer Méditerranée ; le bosphore de Thrace, & le bosphore Cimmerien.
Le bosphore Cimmerien est le détroit qui sert de communication au Pont-Euxin ou à la mer Noire, avec le Palus-Méotide. Il tiroit sa dénomination des Cimmeriens, nation célebre dans l'antiquité. On lui a donné depuis le nom de détroit de Zabache.
Le bosphore de Thrace, ou canal de Constantinople, est le détroit par lequel la Propontide ou la mer de Marmara communique au Pont-Euxin, ou à la mer Noire. Il a environ six lieues marines de longueur. Sa largeur en quelques endroits n'est que d'environ quatre cent toises. L'un de ses bords appartient à l'Europe, l'autre à l'Asie.
Ce mot est grec, ; il est formé de , boeuf, & , passage. Ainsi le mot bosphore paroît signifier en général un bras de mer assez étroit pour qu'un boeuf pût le passer à la nage. C'est aussi l'opinion de plusieurs savans.
Cependant si l'on convient de l'étymologie de ce mot on ne convient pas de la raison de cette étymologie, principalement pour le bosphore de Thrace. Nymphius raconte que les Phrygiens voulant passer ce détroit construisirent un navire, à la proue duquel il y avoit une figure de tête de boeuf, & qui apparemment pour cela fut appellé , boeuf.
Denys le Géographe, Val. Flaccus, Apollodore, Marcellin, &c. disent qu'Io fille d'Inachus, ayant été changée en vache par Junon, passa ce détroit, qui de-là fut nommé bosphore.
Arrien dit que les Phrygiens ayant reçû une réponse de l'oracle qui leur ordonnoit de suivre la route que leur marqueroit un boeuf, ils en tourmenterent un qui se jetta à la mer pour éviter leurs poursuites, & passa ce détroit à la nage. D'autres disent qu'un boeuf tourmenté d'un taon, se jetta dans le détroit & le passa : d'autres, que tout détroit étoit autrefois appellé bosphore : d'autres, que quand les habitans des côtes vouloient passer le bosphore de Thrace, ils joignoient des bateaux ensemble, & y atteloient des boeufs. Chambers.
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BOSQUET | S. m. (Jardinage) petit bois planté dans les jardins de propreté ; c'est comme qui diroit un bouquet de verdure, un bois paré, au milieu duquel on trouve ordinairement une salle ornée de fontaines & de pieces de gason, avec des sieges pour se reposer.
Les bosquets font le relief des jardins ; ils forment une de leurs principales parties, & font valoir toutes les autres : c'est par leur moyen qu'on couvre toutes les vûes desagréables. On leur donne toutes sortes de figures, telles que des étoiles, des quinconces, cloîtres, salles vertes, galeries, labyrinthes, croix de S. André, pattes d'oie, chapelets, guillochis, culs-de-sacs, carrefours, cabinets, &c.
Le bosquet représenté dans la Pl. VI. est un quarré long, échancré dans ses quatre angles, coupé de diagonales, qui menent dans une figure octogone allongée, qui présente des renfoncemens pour des vases ou des figures en face de chaque allée ; on entre par quatre allées dans la salle du milieu, où l'on trouve une piece d'eau ceintrée dans ses extrémités, avec un bouillon au milieu : les quatre bancs pratiqués dans la palissade de l'octogone, en face de chaque allée, découvrent cette fontaine & s'enfilent l'un l'autre : on trouve encore quatre bancs cintrés dans les petits cabinets, ménagés dans les angles de la salle du milieu.
On trouvera la maniere de tracer ce bosquet & de le planter, aux articles TRACER, PLANTER. (K)
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BOSRA | nommée Busseret dans les historiens françois des Croisades. Bosra dans l'antiquité, ancienne métropole d'une province particuliere d'Arabie, au levant de la Palestine.
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BOSSAGE | S. m. se dit en général de toute éminence laissée à une surface plane de pierre ou de bois, ou autre matiere propre au bâtiment.
BOSSAGE, en Architecture, se dit de la saillie brute & non taillée, qu'on laisse dans les bâtimens à des pierres que l'on se propose de réparer au ciseau, pour y former des ornemens, des armes, des feuillages, &c.
Joindre des pierres en bossage, c'est les laisser saillir au-delà des endroits où sont les joints, comme on le remarque au tambour des colonnes de plusieurs pieces : c'est un moyen de conserver les arêtes de leurs joints de lit, que les cordages pourroient émousser, & d'en faciliter la pose.
On donne encore le nom de bossages ou de pierres de refend, à celles qui semblent excéder le nud du mur, quand les joints de lit en sont marqués par des enfoncemens ou canaux quarrés.
Le bossage rustique est arrondi, & ses paremens paroissent ou brutes ou pointillés également : l'arrondi a ses arêtes arrondies ; le bossage à angler est chanfrené, & joint à un autre de pareille maniere, avec lequel il forme un angle droit : celui à pointe de diamant a le parement à quatre glacis, terminés en un point quand il est quarré, & en arrête quand il est barlong ; celui qui est en caret a la saillie terminée par un caret entre deux filets, &c. (P)
BOSSAGES, (Charpent.) ce sont des masses de bois qu'on laisse aux pieces qu'on allégît aux endroits des mortoises, pour qu'elles soient plus fortes. Voyez les arbres des grues, Planche du Charpentier.
On donne encore en Charpente le nom de bossage, à l'arc ou au cintre que forment les bois courbes. Le bossage se toise.
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BOSSE | S. f. se dit en général de toute éminence sphérique, soit essentielle, soit accidentelle au corps où cette forme se remarque. Le bossué est l'opposé de bossu : le premier marque enfoncement, & l'autre saillie, & ils peuvent se trouver en même tems sur un corps mince ; si ce corps est bossué d'un côté, il sera bossu de l'autre. La bosse est accidentelle, toutes les fois qu'elle gâte la forme totale ; elle est essentielle, quand elle est un effet de l'art, & une suite de la conformation ou de l'usage de l'ouvrage.
BOSSE, vice de conformation, qui consiste en ce que l'épine du dos est convexe & voûtée, & quelquefois le sternum. La moelle de l'épine & les nerfs qui en sortent, sont comprimés par ce dérangement ; de-là vient l'amaigrissement du corps, tandis que la tête grossit ; les nerfs du cerveau sont d'autant plus actifs & plus nourris, que ceux de la moelle de l'épine sont plus affoiblis. C'est peut-être pour cette raison, dit M. Daubenton (Hist. nat. tom. III.), que les bossus ont ordinairement plus d'esprit que les autres. La regle n'est pourtant pas générale, & l'auteur ne donne cette explication que comme une conjecture. Voyez RACHITIS. (O)
BOSSE, en Anatomie ; épithete dont on se sert pour caractériser une éminence. Voyez EMINENCE.
Ainsi on dit la protubérance ou bosse occipitale. Voy. OCCIPITAL. (L)
BOSSE ou RONDE BOSSE, en Architecture, est toute figure qui sert à l'ornement d'un édifice ; ou plus généralement tout ouvrage de sculpture, dont les parties ont leur véritable rondeur, & sont isolées comme les figures. On appelle demi-bosse, un bas-relief, qui a des parties saillantes & détachées. (P)
BOSSE, en termes de Bâtiment ; c'est dans le parement d'une pierre un petit bossage que l'ouvrier laisse pour marquer que la taille n'en est pas toisée, & qu'il ôte après en ragréant. (P)
BOSSE (travailler d'après la), se dit, en Dessein, d'un éleve ou d'un maître qui copie d'après une figure de relief, soit en marbre, soit en plâtre. (R)
BOSSE, en Marine ; se dit de bouteilles de verre fort minces qu'on remplit de quatre à cinq livres de poudre, qu'on garnit de plusieurs meches qui pendent du goulot, & d'un bouchon qu'on allume & qu'on lance d'un vaisseau dans un autre, avec une corde longue de quatre à cinq piés : cette machine venant à se briser, met le feu dans le bâtiment, & répand le desordre entre l'équipage. On dit qu'elle est d'usage sur la Méditerranée.
BOSSES, s. m. pl. (Marine) ce sont des bouts de corde d'une médiocre longueur, ayant à leurs extrémités des noeuds nommés cul de ports doubles. L'usage des bosses est de rejoindre une manoeuvre rompue, ou qu'un coup de canon aura coupée ; ce qui est fort nécessaire dans un combat.
BOSSES pour les haubans. Voyez HAUBAN.
BOSSES à éguillettes ou à raban, bosses de cables ; ce sont les bosses qui sont pour le cable, c'est-à-dire qui ont au bout une petite corde qui sert à saisir le cable lorsque le vaisseau est à l'ancre.
BOSSES à foüet ; ce sont celles qui étant tressées par le bout, vont jusqu'à la pointe en diminuant.
BOSSE du bossoir ; c'est la manoeuvre qui sert à tirer l'ancre hors de l'eau, pour l'amener au bossoir lorsqu'elle paroît. Voyez CANDELETTE.
BOSSES de chaloupe ou de canot ; ce sont les cordes dont on se sert pour amarrer les chaloupes & les canots.
Prendre une bosse ; c'est-à-dire amarrer une bosse à quelque manoeuvre. (Z)
BOSSE (serrure à) ; elle s'attache en-dehors, soit avec des clous rivés, soit avec des vis dont les écrous sont placés en-dedans, & se ferme à moraillon. Voy. la description de cette serrure à l'article SERRURE.
BOSSE, dans les grosses Forges ; on donne ce nom à une partie des applatissoires. Voyez APPLATISSOIRE & GROSSES FORGES.
BOSSE ; (Economie rustiq.) c'est ainsi qu'on appelle à la campagne les paquets des chardons que l'on fait pour être vendus aux drapiers, laineurs, couverturiers, &c.
BOSSE a aussi son acception en Orfévrerie. La vaisselle se distribue en plate & en vaisselle en bosse. La plate comprend les assiettes, les plats, les cuilleres, & tout ce qui n'a pas une concavité considérable. Celle en bosse comprend tous les grands vaisseaux qui ont un ventre & un cou, comme seaux, flacons, aiguieres, bassins profonds, &c.
BOSSE, chez les Paumiers, se dit ou d'une éminence ronde pratiquée en saillie, d'un pié ou environ de diametre, sur quatre à cinq de haut, du côté de la grille ; ou d'un angle obtus que le mur du côté de la grille fait au même endroit, dans lequel la balle venant à frapper, elle est très-difficile à juger pour ceux qui ont à la prendre.
* BOSSES, dans les Salines ; c'est ainsi qu'on appelle des tonneaux pleins de sel en grain, ou de sel trié, destiné pour satisfaire aux engagemens de la France avec les cantons Catholiques de Suisse. Les bosses doivent contenir seize fierlins, mesure de Berne, qui sont évalués sur le pié de quatre charges deux tiers, & la charge à raison de cent trente livres : cependant les seize fierlins ne pesent environ que cinq cent cinquante à soixante livres. Quoique le sel trié soit le moins humide de celui qui se tire de la poêle, sur les bords de laquelle on le laisse assez long-tems en monceaux, pour que la plus grande partie de la muire s'en écoule ; cependant une des principales conditions du traité du Roi & du fermier avec les Suisses, c'est qu'il ait été déposé pendant six semaines sur les étuailles, avant que d'être mis dans les bosses. Les ouvriers qu'on appelle poulains, & qui emplissent les bosses, entrent dedans à la quatrieme mesure, c'est-à-dire au quatrieme gruau qu'on y verse, & foulent le sel avec les piés, & ainsi de quatre en quatre mesures. Elles restent ensuite huit jours sur leurs fonds ; après quoi on bat encore le sel de dix-huit coups de pilon ou demoiselle. On ajoûte la quantité nécessaire pour qu'elles soient bien pleines ; on les ferme, & on les marque d'une lettre. Chaque lettre a cent bosses. Les bosses rendues à Grandson & à Yverdun, y doivent encore rester trois semaines en dépôt. On les mesure encore de nouveau, & l'entrepreneur des voitures, à qui le fermier passe pour déchet 9 pour 100 en-dedans, ce qui fait cent bosses pour quatre-vingt-onze, est tenu de les remplir de maniere qu'il n'en revienne pas de plaintes.
BOSSES (contrôleur à l'emplissage des) ; c'est un officier gagé dans les Salines, qui veille à ce que les poulains fassent bien leur devoir, & que les bosses soient bien pleines. Voyez POULAIN.
BOSSE, se dit, en Vénerie, de la premiere poussée d'un cerf qui a mis bas ; ce qui commence dès les mois de Mars ou d'Avril. Il se prend en même sens pour le chevreuil. C'est dans l'une & l'autre l'éminence d'où sort le mairin, la perche, ou le fût du bois. Cette éminence se nomme meule dans le premier de ces animaux, & enflure dans le second.
* BOSSE, terme de Verrerie ; c'est la forme que l'ouvrier appellé bossier, donne à la matiere vitrifiée, en l'allongeant, polissant, tournant sur le marbre, & soufflant à plusieurs reprises. La bosse a la figure d'un globe d'environ deux piés de tour : elle tient à la felle par une espece de col. C'est ce globe qui deviendra par les opérations subséquentes, un plat de verre à vitre. Voyez VERRERIE A VITRE.
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BOSSEMAN | S. m. (Marine angl.) second contre-maître ; c'est un officier marinier qui est chargé du soin des cables & des ancres, des jas & des boüées. Il doit faire griffer & fourrer les cables aux endroits nécessaires, caponner & bosser les ancres, y mettre ornis de longueur convenable au fond des mouillages, y tenir les boüées flottantes au-dessus de l'eau, & veiller sur les cables, pour voir s'ils ne rompent point, & si l'ancre ne chasse pas.
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BOSSER | BOSSER
Bosser l'ancre, c'est aussi tirer l'ancre pour la mettre sur les bossoirs. (Z)
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BOSSETTE | S. f. en terme d'Eperonnier, s'entend d'un ornement en or, en argent, en cuivre, &c. embouti, dont on couvre le fonceau d'un mors, Voyez FONCEAU ; voyez MORS ; voy. D fig. 21. Planche de l'Eperonnier.
C'est aussi une piece de cuivre qu'on met sur les yeux des mulets.
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BOSSIER | S. m. c'est dans les Verreries, le nom d'un gentilhomme occupé à former la bosse. Voyez BOSSE ; voyez VERRERIE EN PLAT.
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BOSSOIR | ou BOSSEURS, s. m. pl. Marine ; ce sont deux poutres ou pieces de bois mises en saillie à l'avant du vaisseau au-dessus de l'éperon, pour soûtenir l'ancre & la tenir prête à mouiller, ou bien l'y poser quand on l'a tirée hors de l'eau. La saillie que font les bossoirs, donne lieu à l'ancre de tomber à l'eau sans risque, quand il faut mouiller, & empêche qu'elle n'offense le franc bordage ou les ceintres. V. Planche I. le bossoir coté M. voyez aussi la Planche IV. fig. 1. n°. 173, le bossoir ; & n°. 174, le porte-bossoir. L'inspection de ces deux figures fera connoître parfaitement la forme des bossoirs, & leur position dans le vaisseau. Il y a un ou deux roüets à la tête de chaque bossoir, par le moyen desquels on tire l'ancre lorsqu'elle est venue à pic.
Le bossoir doit avoir huit pouces d'épais & dix pouces de large par le bout qui est sur le château d'avant, & huit pouces de large & quatre pouces d'épais par l'autre bout.
On fait des ornemens de sculpture à la tête du bossoir : à côté il y a une grosse crampe qui tient au bossoir, dans laquelle on met une poulie qui sert à enlever les plus grosses ancres. La corde qui est dans cette poulie, va passer dans un roüer qui est sur le château d'avant dans un traversin qui traverse le gaillard proche un fronteau, & qui sert à amarrer diverses manoeuvres. (Z)
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BOSSON | (Mar.) voyez BOUGE & BESSON. (Z)
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BOSSU | adj. pris subst. en terme de Médecine, est celui qui a les vertebres, ou le sternum d'une convexité difforme. Voyez VERTEBRE & BOSSE.
La partie du foie d'où sort la veine-cave est aussi appellée partie gibbeuse, c'est-à-dire bossue. Voyez FOIE. (L)
BOSSU, (Astronomie) on se sert quelquefois du terme de bossu pour désigner la partie éclairée de la lune, lorsqu'elle passe du plein au premier quartier, & du dernier quartier au plein ; car pendant tout ce tems, la partie qui est dans l'obscurité est cornue, & celle qui est éclairée est élevée en bosse convexe ou bossue. Voyez PHASE & LUNE. Ce mot se dit plus en latin qu'en françois : luna gibbosa. (O)
BOSSU, (Monnoie) nom que l'on donne en Touraine aux sous marqués.
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BOSSUT | (Géog.) bourg & château du comté de Hainaut, entre Valenciennes & Mons.
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BOSSY | S. m. (Hist. nat. bot.) arbre qui croit au royaume de Quoja en Afrique : il a l'écorce seche & le bois gras & huileux. Ses cendres sont bonnes pour le savon ; & son fruit est une prune jaune, aigre, qui se mange.
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BOSTANGIS | S. m. (Hist. mod.) classe des azamoglans ou valets du serrail, occupés aux jardins du grand-seigneur. Quelques-uns cependant sont élevés à un degré plus haut, & occupés aux messages ou commissions du sultan ; c'est pourquoi on les nomme hassakis ou chassakis, c'est-à-dire messagers du roi.
BOSTANGI BACHI, chef des jardiniers ou surintendant des jardins du grand-seigneur. De simple bostangi ou jardinier, il parvient à cette dignité, qui est une des premieres de la Porte, & qu'il ne quitte que pour être fait bacha à trois queues. Quoiqu'il soit inspecteur né des jardins du serrail & des maisons du sultan, son autorité ne se borne pas à cette fonction ; elle s'étend depuis le fond du port Kassumpacha, Galata, Top-Hana, & le détroit de Constantinople, jusqu'à la ville de Varne sur la mer Noire. Jour & nuit il fait la ronde dans tous ces lieux avec une gondole montée de trente bostangis pour veiller au feu, surprendre les ivrognes, & les femmes de mauvaise vie, qu'il coule quelquefois à fond, quand il les rencontre avec des hommes dans des bateaux. Il est encore grand-maître des eaux & forêts, & capitaine des chasses des plaisirs du grand-seigneur. On ne peut faire entrer une seule piece de vin dans Constantinople sans sa permission ; ce qui lui donne une jurisdiction de police sur les cabarets. Il contrôle les vins des ambassadeurs, & fait arrêter leurs domestiques à la chasse, s'ils n'ont pas son agrément. Mais sa fonction la plus honorable est de soutenir sa hautesse, lorsqu'elle se promene dans ses jardins, de lui donner la main quand elle entre dans sa gondole, d'être alors assis derriere elle, de lui parler à l'oreille en tenant le timon, & de lui servir de marchepié le jour de son couronnement.
Quelquefois le bostangi bachi prend les devans avec son bateau, pour écarter tous ceux qui se rencontrent sur la route de l'empereur. Il doit connoître non-seulement toutes les variations que la mer cause sur son rivage, mais encore tous les différens édifices qui ornent ses bords, & les noms de leurs propriétaires, afin de répondre exactement aux questions que le grand-seigneur peut lui faire ; desorte qu'il faut avoir couru long-tems les bords de cette mer, en qualité de simple bostangi, pour parvenir à celle de bostangi bachi : cet accès facile auprès du grand-seigneur, donne à cet officier un très-grand crédit, & le fait quelquefois devenir favori de son maître ; place dangereuse ; & qui dans les révolutions fréquentes à Constantinople, a plus d'une fois coûté la tête à ceux qui y étoient parvenus.
Comme les empereurs Ottomans vont quelquefois à Andrinople, ancienne capitale de la monarchie turque, il y a aussi dans cette ville un bostangi bachi, comme à Constantinople. Leur rang est égal, mais leur jurisdiction & leur revenu sont fort différens. Celui d'Andrinople n'est chargé que du palais impérial, quand le sultan y fait sa résidence, & de la garde de ses fils ; au lieu que le bostangi bachi a une surintendance générale sur toutes les maisons de plaisance du prince, à-peu-près comme en France, le directeur général des bâtimens. Guer. moeurs & usages des Turcs, tom. II. (G)
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BOSTON | (Géog.) ville d'Angleterre, dans la province de Lincoln, sur la riviere de Witham, peu au-dessus de son embouchure dans la mer, à 10 lieues de Lincoln. Lat. 53 degrés, long. 17 & demi.
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BOSTON | c'est le nom qu'on a donné à la ville capitale de la nouvelle Angleterre, dans l'Amérique septentrionale ; elle est grande & a un très-bon port. Lat. 42 degrés, 20 minutes ; long. 306 degrés, 50 & quelques minutes.
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BOSWORTH | (Géog.) bourg dans la province de Leicester, en Angleterre, à environ 35 lieues de Londres.
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BOSZUT | (Géog.) petite riviere d'Esclavonie, qui se jette dans la Save, près du lieu de l'ancienne ville de Sirmium.
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BOT | (Marine) c'est un gros bateau flamand, ou une espece de petite flûte ; le bot est ponté. Au lieu de dunette ou de chambre un peu élevée, il y a une chambre retranchée à l'avant, qui ne s'éleve pas plus que le pont. On fait joüer le gouvernail, ou avec une barre, ou sans barre ; parce que celui qui gouverne, le peut faire tourner aisément de dessus le bord.
A l'avant du bot, il y a une poulie, qui sert à lever l'ancre, & au milieu du bâtiment on pose un cabestan, lorsqu'il en est besoin, & on l'affermit par deux courbatons, qui de l'un & de l'autre côté vont se terminer contre le bord. Les membres du fond sont vaigrés ou couverts de planches hormis à l'endroit par où l'on puise l'eau qui y entre.
Paquebot, paquet-bot, c'est ce bateau qui porte les lettres d'Angleterre en France, & de France en Angleterre ; il va de Douvres à Calais. Il y a aussi des paquebots, qui portent les lettres d'Angleterre en Hollande ; ils partent de Harwich & vont à la Brille. (Z)
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BOTA | (Commerce) c'est le nom usité en Espagne, pour désigner une mesure de liquides, qui tient 30 robas ; le robas tient 30 livres pesant.
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BOTADON | (Géog.) petite ville d'Angleterre, dans la province de Cornoüaille.
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BOTALL | trou (Anat.) on donne le nom du trou botall au trou ovale, situé entre les deux oreillettes du coeur ; de Botall, conseiller & médecin de Charles IX. à qui on en attribue la découverte. Voyez COEUR. (L)
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BOTANIQUE | S. f. (Ordre encyclop. Entendement. Raison. Philosophie ou Science. Science de la nature. Physique générale, particuliere. Botanique.) partie de l'histoire naturelle, qui a pour objet la connoissance du regne végétal en entier ; ainsi la Botanique est la science qui traite de tous les végétaux & de tout ce qui a un rapport immédiat avec les végétaux.
L'étude de la végétation fait la premiere partie de cette science, c'est la base de tous les autres ; car on doit commencer par examiner la nature des végétaux en général, avant que de traiter de chaque plante en particulier ; & on ne peut pas parvenir à connoitre l'oeconomie végétale, si on ne sait comment les germes des plantes se développent, & comment elles prennent leur accroissement ; quels sont les moyens de les multiplier ; quelle est leur organisation en général ; la structure de chaque partie ; leur maniere de se reproduire, & quel est le mouvement & la qualité de la séve ; & enfin si on ne sait en quoi le terrein & le climat peuvent influer sur les plantes. Tels sont les principes généraux qui établissent les fondemens de la Botanique : mais ces connoissances dépendent de la Physique, & forment le lien qui unit ces deux sciences. Voyez VEGETATION.
Le détail de la Botanique est divisé en plusieurs parties : il y en a trois principales ; savoir la nomenclature des plantes, leur culture, & leurs propriétés. La derniere est la seule qui soit importante par l'utilité que nous en tirons ; les deux premieres ne doivent nous occuper qu'autant qu'elles peuvent contribuer à faire valoir la troisieme, en perfectionnant la connoissance des propriétés. On doit entendre par les propriétés des plantes, tous leurs usages, même les usages d'agrément ; ainsi les arbres des forêts & les herbes des parterres ont dans ce sens leurs propriétés, comme les plantes usuelles dans la Médecine.
Dès que la connoissance des plantes a formé un corps de science, l'énoncé de leur nomenclature a dû précéder dans l'exposé de cette science l'histoire de leur culture & de leurs propriétés. Mais il est certain que la premiere connoissance que l'on ait eu des plantes, a été celle des usages auxquels on les a employées, & que l'on s'en est servi avant que de leur donner des noms. On s'est nourri avec des fruits ; on s'est vêtu avec des feuilles ou des écorces ; on a formé des cabanes avec les arbres des forêts avant que d'avoir nommé les pommiers ou poiriers, le chanvre ou le lin, les chênes ou les ormes, &c. L'homme a dû satisfaire ses besoins les plus pressans par le seul sentiment, & indépendamment de toute connoissance acquise : on a joüi d'un parfum des fleurs dès qu'on s'en est approché, & on a recherché leur odeur sans s'inquiéter du nom de la rose & du jasmin. Les usages des plantes qui supposent le plus d'expérience, n'ont jamais été indiqués par le nom ou par l'apparence extérieure d'aucune plante ; c'est par un coup heureux du hasard, que l'on a été instruit de l'utilité que l'on pouvoit tirer du riz ou du froment, du caffé & de la vigne. Enfin il y a tout lieu de croire que les plantes usuelles dans la Medecine & dans les Arts, n'ont été nommées, qu'après que leur efficacité a été connue : il y en a plusieurs qui ont encore aujourd'hui des noms relatifs à leurs propriétés.
La nomenclature des plantes n'est donc pas nécessaire pour la découverte de leurs propriétés ; cela est si vrai qu'il seroit ridicule de l'avoir mis en question, s'il n'étoit prouvé par l'état présent de la Botanique & par l'expérience du passé, que l'on s'est appliqué à la nomenclature par préférence aux autres parties de cette science. On fait plus d'observations & on tente plus de combinaisons pour parvenir à réduire la nomenclature des plantes en système, qu'il ne faudroit peut-être faire d'expériences & acquérir de faits pour découvrir quantité de nouvelles propriétés utiles dans ces mêmes plantes. Ce défaut de conduite dans l'étude de la Botanique, est un obstacle à l'avancement de cette science, parce qu'il nous éloigne de son principal objet. Il est même à craindre que si on continuoit à marcher dans cette fausse route, on ne vint à le perdre de vûe. Pour s'en convaincre il faut examiner quelle est l'utilité que l'on a retirée de la nomenclature des plantes, poussée au point de perfection que les Botanistes se sont efforcés de lui donner ; à quoi cette nomenclature peut servir dans la Botanique ; & à quoi elle peut nuire, en supposant que cette connoissance soit réduite en système constant & même infaillible.
On est parvenu par le moyen de la nomenclature, à distinguer environ vingt mille especes de plantes, selon l'estime des Botanistes, en comptant toutes celles qui ont été observées tant dans le nouveau monde, que dans l'ancien. S'il y avoit eu un plus grand nombre d'observateurs, & s'ils avoient parcouru toute la terre, ils auroient doublé ou triplé le nombre des especes de plantes ; ils en auroient peut-être trouvé cent mille & plus, conformément aux principes de leur calcul. Mais quel cas doit-on faire de ce calcul ? le résultat n'est pas le même pour tous les observateurs ; chacun compte à sa mode ; les uns multiplient sans nécessité, en séparant sous différentes especes des individus qui sont semblables ; les autres mêlent ensemble des individus différens, & diminuent par cette confusion le nombre des especes. On n'a donc pû convenir jusqu'ici d'un principe certain pour constater ce nombre : cependant on y a employé beaucoup d'art, on n'a épargné ni soins ni fatigues, mais toûjours infructueusement. Il ne faut pas en être surpris, car il est aisé de remonter à la source de cette erreur. On a voulu faire une science de la nomenclature des plantes, tandis que ce ne peut être qu'un art, & seulement un art de mémoire.
Il s'agissoit d'imaginer un moyen de se retracer, sans confusion, l'idée & le nom de chaque plante que l'on auroit vû réellement existante dans la nature, ou décrite & figurée dans les livres. Il y a cent façons différentes de parvenir à ce but : dès qu'on a bien vû un objet & qu'on se l'est rendu familier, on le reconnoît toûjours, on le nomme, & on le distingue de tout autre, avec une facilité qui ne doit surprendre que ceux qui ne sont pas dans l'habitude d'exercer leurs yeux ni leur mémoire. Il est vrai que le nombre des plantes étant, pour ainsi dire, excessif, le moyen de les nommer & de les distinguer toutes les unes des autres, en étoit d'autant plus difficile à trouver ; c'étoit un art qu'il falloit inventer ; art qui auroit été d'autant plus ingénieux, qu'il auroit été plus facile à être retenu de mémoire. Par cet art une fois établi, on auroit pû se rappeller le nom d'une plante que l'on voyoit, ou se rappeller l'idée de celle dont on savoit le nom ; mais toûjours en supposant dans l'un & l'autre cas, que la plante même fût bien connue de celui qui auroit employé cet art de nomenclature ; car la nomenclature ne peut être constante que pour les choses dont la connoissance n'est point équivoque.
La connoissance en général est absolument indépendante du nom. Pour le prouver, examinons ce que doit faire un homme qui veut connoître une plante qu'il voit pour la premiere fois, & dont il ne sait pas le nom. S'il commence par s'informer du nom de cette plante il n'en tirera aucune lumiere, parce que le nom d'une chose que l'on ne connoît pas, n'en peut rappeller aucune idée. Il faudra donc qu'il observe la plante, qu'il l'examine, & qu'il s'en forme une idée distincte : il y parviendra en la voyant ; & s'il expose, s'il décrit tout ce qu'il aura vû, il communiquera aux autres la connoissance qu'il aura acquise. Alors le nom servira de signe pour lui rappeller l'idée de cette plante à lui-même & à ceux qui auront lû la description : mais il est impossible qu'un nom tienne jamais lieu de description ; ce signe peut rappeller l'idée d'une chose connue, mais il ne peut pas donner l'idée d'une chose inconnue.
Cependant on a fait des tentatives infinies pour parvenir à étendre les noms des plantes, à les compliquer & les combiner, de façon qu'ils pûssent donner une idée distincte des plantes, sans qu'il fût nécessaire de les avoir vûes, ou d'en avoir lû la description entiere. Ce projet ne tendoit à rien moins qu'à former une science de la nomenclature des plantes, s'il eût réussi : mais on a échoüé dans l'exécution autant de fois qu'on l'a entreprise, parce que les descriptions ne peuvent pas être réduites en nomenclature, & que par conséquent les noms ni les phrases ne peuvent pas être équivalens aux descriptions.
Les nomenclateurs ont entrevû la vérité de cette objection, & pour surmonter cette difficulté, ils ont joint au nom une petite partie de la description. C'est ce composé qu'ils appellent phrase. Ils ont tâché d'y faire entrer les caracteres spécifiques : mais comme ils n'ont pû comprendre dans ces phrases, c'est-à-dire dans les noms des especes, qu'une partie de la description qui ne pouvoit pas donner une idée de la plante, ils ont prétendu suppléer à ce défaut, en attribuant au nom générique une autre partie de la description. Ces deux parties étant désignées par les noms du genre & la phrase de l'espece étant encore trop imparfaite pour faire reconnoître la plante, ils ont compris dans l'énoncé de l'ordre & de la classe d'autres parties de la description : mais quelqu'art qu'ils ayent employé pour combiner toutes ces partitions, ils n'ont pû parvenir à donner une idée distincte de la plante, parce qu'ils n'ont pas rapporté la description en entier.
Cette description complete est absolument nécessaire pour caractériser une plante, de façon qu'on la puisse distinguer de toute autre plante : c'est une loi constante pour tous les objets de l'histoire naturelle, & principalement pour ceux qui sont aussi nombreux que les plantes. Cependant on a tâché d'éluder cette difficulté insurmontable dans la nomenclature, en se persuadant que l'on trouveroit dans les plantes, des parties dont la description pourroit suppléer à la description de la plante entiere, & que ces parties seroient assez constantes pour ne manquer à aucune plante, assez variées pour fournir des caracteres à chaque espece, & assez évidentes pour être facilement reconnues. ç'a été par le moyen de ces attributs imaginaires, que l'on a prétendu réduire la nomenclature en système, en méthode, en distribution méthodique ; & si l'on en croit les plus enthousiastes des nomenclateurs, ce système est le système de la nature ; cependant la nature dément à chaque instant de pareils systèmes. Il n'y a dans les plantes aucunes parties qui se manifestent dans toutes les especes : les fleurs & les semences, qui paroissent être les parties les plus essentielles, & par conséquent les plus constantes, ne sont pas reconnoissables dans plusieurs especes. C'est pourtant sur les parties de la fructification, que les systèmes les plus vantés sont établis Mais comme leur fondement n'est pas plus sûr que les fondemens des autres systèmes de nomenclature, ils ne se soûtiennent pas mieux, & ils ne sont pas moins éloignés les uns que les autres du système de la nature. Voyez METHODE.
En effet, comment peut-on espérer de soûmettre la nature à des lois arbitraires ? sommes-nous capables de distinguer dans un individu qu'elle nous présente, les parties principales & les parties accessoires ? Nous voyons des especes de plantes, c'est-à-dire des individus qui sont parfaitement ressemblans ; nous les reconnoissons avec certitude, parce que nous comparons les individus tout entiers : mais dès qu'on fait des conventions pour distinguer les especes les unes des autres, pour établir des genres & des classes, on tombe nécessairement dans l'erreur, parce qu'on perd de vûe les individus réels pour suivre un objet chimérique que l'on s'est formé. De-là viennent l'incertitude des nomenclateurs sur le nombre des especes, des genres & des classes, & la multiplicité des noms pour les plantes ; par conséquent toutes les tentatives que l'on a faites pour réduire la nomenclature des plantes en corps de science, ont rendu la connoissance des plantes plus difficile & plus fautive qu'elle ne le seroit, si on ne se servoit que de ses yeux pour les reconnoître, ou si on n'employoit qu'un art de mémoire sans aucun appareil scientifique. Ces systèmes n'ont servi à l'avancement de la Botanique, que par les descriptions exactes de plusieurs parties des plantes, & par les observations que l'on a faites sur ces mêmes parties, pour établir des caracteres méthodiques.
Voilà donc à quoi ont servi toutes les méthodes que l'on a imaginées jusqu'ici dans la nomenclature des plantes. Voyons à présent ce que l'on pourroit attendre de ces mêmes méthodes, en supposant qu'elles fussent portées au point de perfection, tant desiré par les nomenclateurs. Quiconque seroit bien instruit de ce prétendu système de la nature, auroit à la vérité un moyen infaillible de reconnoître toutes les especes de plantes, & de les distinguer les unes des autres : mais l'application de ce système paroîtroit immense dans le détail ; & ce seroit vraiment un chef-d'oeuvre de combinaisons & de mémoire, dont peu de personnes seroient capables, que de pouvoir rapporter sans équivoque vingt mille noms à vingt mille plantes que l'on ne connoîtroit presque pas. D'ailleurs un pareil système de nomenclature, une aussi grande connoissance de noms & de phrases, ne pourroit en aucune façon nous instruire de la culture & des propriétés des plantes ; puisque ces deux parties de la Botanique demandent chacune des observations toutes différentes de celles que suppose la nomenclature. Un méthodiste observe scrupuleusement la position, le nombre, & la forme de certaines parties de chaque plante : mais il n'en peut tirer aucune conséquence pour la culture ; parce que, suivant son système, le nombre, la position, & la forme de ces parties, doivent être les mêmes en quelque climat que se trouve la plante, & de quelque façon qu'elle soit cultivée. Ces mêmes observations ne peuvent donner aucune lumiere pour les propriétés des plantes. La preuve en est connue. Nous savons parfaitement que toutes les plantes que l'on rapporte au même genre, n'ont pas les mêmes propriétés : ce fait a été constaté dans tous les systèmes de nomenclature qui ont été faits jusqu'à présent ; & malheureusement on peut dire d'avance qu'il sera confirmé par tous ceux que l'on pourra faire dans la suite. Cependant les méthodistes les plus zélés pour la découverte du prétendu système de la nature, ont annoncé qu'on pourroit parvenir à indiquer les propriétés des plantes par les vrais caracteres génériques. Ils prétendent même qu'on a déjà établi plusieurs de ces vrais caracteres qu'ils appellent naturels, & qui se sont soûtenus dans la plûpart des méthodes. Si cela est, ce ne peut être que l'effet d'un heureux hasard : car les méthodistes ne peuvent changer les propriétés des plantes, comme l'ordre de leur nomenclature.
Il seroit bien à souhaiter qu'il fût possible d'établir un pareil système. Cette découverte seroit plus profitable au genre humain, que celle du système du monde : cependant elle ne nous dispenseroit pas de faire des expériences pour découvrir de nouvelles propriétés dans les plantes, il y auroit beaucoup de genres qui ne comprendroient que des especes dont on ne connoîtroit pas les propriétés. Quoiqu'on pût tirer quelque indication de la propriété générale attribuée à la classe, il faudroit encore acquérir de nouvelles lumieres pour assigner le degré d'efficacité des plantes d'un de ses genres : d'ailleurs toutes les especes d'un même genre seroient-elles également actives, demanderoient-elles la même préparation, &c. Je n'insisterai pas davantage sur une supposition chimérique ; il me suffira de faire observer, qu'autant la nature est indépendante de nos conventions, autant les propriétés des plantes sont indépendantes de leur nomenclature. Peut-être que les descriptions complete s des plantes pourroient donner quelques indices de leurs propriétés : mais que peut-on attendre d'une description imparfaite de quelques parties ? On conçoit que la description exacte d'un animal, tant à l'extérieur qu'à l'intérieur, peut donner quelque idée de ses qualités. Mais si l'on n'observoit que les parties de la génération, comme on prétend le faire dans les plantes, que pourroit-on conclure de cet animal ? à peine pourroit-on savoir s'il est plus ou moins fécond qu'un autre. S'il est vrai que certaines plantes, dont les parties de la fleur & du fruit sont semblables à quelques égards, ayent les mêmes propriétés, c'est un fait de hasard qui n'est point constant dans les autres plantes. Ces combinaisons fortuites peuvent arriver dans tous les systèmes des nomenclateurs : mais je pense qu'il n'est pas plus possible de trouver leur prétendu système naturel, que de juger de la qualité des fruits sans les avoir goûtés.
Non-seulement la nomenclature des plantes ne peut contribuer en rien à la connoissance de leur culture, ni de leurs propriétés, mais elle y est très-préjudiciable en ce qu'elle retarde l'avancement de ces deux parties de la Botanique. La plûpart de ceux qui se sont occupés de cette science depuis le renouvellement des Lettres, se sont appliqués par préférence à la nomenclature. Que de méthodes se sont détruites en se succédant les unes aux autres ! que de vains efforts pour parvenir à un but imaginaire ! Mais toutes ces tentatives ont marqué beaucoup de soin, de finesse, & de sagacité dans le plus grand nombre des méthodistes. Ils auroient pû s'épargner bien des fatigues ; ou en faire un meilleur emploi, en s'appliquant à la culture ou aux propriétés des plantes. Une seule méthode suffisoit pour la nomenclature ; il ne s'agit que de se faire une sorte de mémoire artificielle pour retenir l'idée & le nom de chaque plante, parce que leur nombre est trop grand pour se passer de ce secours : pour cela toute méthode est bonne. A présent qu'il y en a plusieurs, & que les noms des plantes se sont multipliés avec les méthodes, il seroit à souhaiter qu'on pût effacer à jamais le souvenir de tous ces noms superflus, qui font de la nomenclature des plantes, une science vaine & préjudiciable aux avantages réels que nous pouvons espérer de la Botanique, par la culture & par les propriétés des plantes.
Au lieu de nous occuper d'une suite de noms vains & surabondans, appliquons-nous à multiplier un bien réel & nécessaire ; tâchons de l'accroître au point d'en tirer assez de superflu pour en faire un objet de commerce. Tel est le but que nous présente la Botanique dans la seconde partie, qui est la culture des plantes. Il ne dépend pas toûjours de nous de découvrir leurs propriétés ; nous ne pouvons jamais les modifier à notre gré : mais il est en notre pouvoir de multiplier le nombre des plantes utiles, & par conséquent d'accroître la source de nos biens, & de la rendre intarissable par nos soins. Les anciens nous en ont donné l'exemple : au lieu de passer tout leur tems & d'employer tous leurs soins à des recherches vaines sur les caracteres distinctifs du froment, du seigle, de l'orge, du riz, de l'avoine, du millet, du panic, du chiendent, & des nombreuses suites d'especes que l'on prétend rapporter à chacun de ces genres, ils se sont uniquement appliqués à cultiver celles de toutes ces plantes dont ils connoissoient l'utilité. Ils sont parvenus, à force de travail & de constance, à les rendre assez abondantes pour fournir aux besoins des hommes & des animaux domestiques. C'est en perfectionnant l'art de la culture des plantes, qu'ils ont trouvé le moyen de les distribuer sur la surface de la terre dans l'ordre le plus convenable à leur multiplication & à leur accroissement. On a semé les terres qui pouvoient produire d'abondantes moissons ; on a planté des vignobles dans les lieux propres à la maturité du raisin ; on a fait des pâturages ; on a élevé des forêts, &c. enfin on a su aider à la nature, en rassemblant les plantes utiles dans les lieux les plus convenables, & en écartant de ces mêmes lieux, autant qu'il étoit possible, toutes les plantes inutiles. Voilà l'ordre le plus nécessaire, & l'arrangement le plus sage que l'on puisse mettre dans la division des plantes : aussi ç'a été le premier que les hommes ayent senti & recherché pour leur propre utilité. Voyez AGRICULTURE.
La connoissance de la nature du terrein & de la température du climat, est le premier principe de l'Agriculture. C'est de l'intelligence de ce principe, & du détail de ses conséquences, que dépend le succès de toutes les pratiques qui sont en usage pour la culture des plantes. Cependant on n'est guidé que par des expériences grossieres, pour reconnoître les différens terreins. Les gens de la campagne ont sur ce sujet une sorte de tradition, qu'ils ont reçue de leurs peres, & qu'ils transmettent à leurs enfans. Ils supposent chacun dans leur canton, sans aucune connoissance de cause, du moins sans aucune connoissance précise, que tel ou tel terrein convient ou ne convient pas à telle ou telle plante. Ces préjugés bien ou mal fondés, passent sans aucun examen ; on ne pense seulement pas à les vérifier : l'objet est cependant assez important pour occuper les meilleurs physiciens. N'aurons-nous jamais des systèmes raisonnés, des distributions méthodiques des terreins, des climats, relativement à leurs productions ; je veux dire, de ces systèmes fondés sur l'expérience ?
La convenance du climat est moins équivoque que celle du terrein, parce qu'on la détermine aisément par la maturité des fruits, ou par les effets de la gelée : mais on n'a pas assez observé combien cette convenance de température a de fréquentes vicissitudes dans un même lieu. Les deux principales causes de ces changemens sont les coupes des forêts, ou seulement des arbres épars, ce qui diminue la quantité des brouillards ; & l'élévation des vallons, ou seulement des bords des rivieres & des ruisseaux, ce qui desseche le terrein & rend les inondations moins fréquentes. On conçoit aisément quels changemens ces deux causes peuvent occasionner dans la température du climat par rapport aux plantes. Il seroit trop long de suivre ce sujet dans les détails. Je me contenterai de faire observer que l'on ne doit pas renoncer à cultiver telle plante dans tel lieu, parce qu'elle n'y a pas réussi pendant quelque tems. On ne doit pas craindre de multiplier les expériences en Agriculture ; le moindre succès dédommage abondamment de toutes les tentatives inutiles.
On peut distinguer deux principaux objets dans la culture des plantes. Le premier est de les multiplier, & de leur faire prendre le plus d'accroissement qu'il est possible. Le second est de perfectionner leur nature, & de changer leur qualité.
Le premier a dû être apperçû dès qu'il y a eu des hommes qui ont vécu en nombreuse société. Les essais que l'on aura faits dans ces premiers tems, étoient sans-doute fort grossiers : mais ils étoient si nécessaires, qu'on a lieu d'être surpris qu'ils n'ayent pas été suivis jusqu'à présent de plus de progrès. Nous ne savons pas combien de moyens différens ont été employés pour labourer la terre depuis que les hommes existent : mais nous ne pouvons pas douter que ceux que nous employons ne puissent encore devenir meilleurs, & même qu'il n'y en ait d'autres à trouver qui vaudroient bien mieux. Cependant la charrue est toûjours la même depuis plusieurs siecles, tandis que les modes de nos ameublemens & de nos équipages changent en peu d'années, & que nous sommes parvenus à cet égard à un point de commodité qui ne nous laisse presque rien à desirer. Que l'on compare une charrue à une chaise de poste, on verra que l'une est une machine grossiere abandonnée à des mains qui le sont encore plus ; l'autre au contraire est un chef-d'oeuvre auquel tous les Arts ont concouru. Notre charrue n'est pas meilleure que celle des Grecs & des Romains : mais il a fallu bien plus d'industrie & d'invention pour faire nos chaises de poste, qu'il n'y en a jamais eu dans les chars de triomphe d'Alexandre & d'Auguste. L'art de la culture des terres a été négligé, parce qu'il n'a été exercé que par les gens de la campagne ; les objets du luxe ont prévalu même en Agriculture ; nous sommes parvenus à faire des boulingrins aussi beaux que des tapis, & à élever des palissades de décoration. Enfin nous connoissons l'architecture des jardins, tandis que la méchanique du laboureur n'a presque fait aucuns progrès. Cependant les moyens de multiplier les plantes & de les faire croître, semblent être à la portée de tous les hommes ; & je ne doute pas qu'on ne pût arriver en peu de tems à un haut degré de perfection, si ceux qui sont capables d'instruire les autres daignoient s'en occuper plus qu'ils ne le font.
Il paroît qu'il est plus difficile de produire des changemens dans la nature des plantes, & de leur donner de meilleures qualités qu'elles n'en ont naturellement. On y est pourtant parvenu par le moyen de la greffe & de la taille des arbres. Cet art est connu depuis long-tems ; & il a, pour ainsi dire, survécu à la plûpart de ses effets. Nous savons des anciens qu'ils avoient le secret de tirer des semences du pommier & du poirier sauvages des fruits délicieux. Ces fruits ne sont pas venus jusqu'à nous : mais nous avons sû faire des pommes & des poires que nous ne changerions pas pour celles des Romains ; parce que nous avons semé, greffé, & taillé les arbres aussi bien qu'eux. Cet art précieux est inépuisable dans ses productions. Combien ne nous reste-t-il pas d'expériences à faire, dont il peut résulter de nouveaux fruits qui seroient peut-être encore meilleurs que ceux que nous avons déjà trouvés ? Ce que nous avons fait pour les arbres & les arbrisseaux ne peut-il pas aussi se faire pour les autres plantes, sur-tout depuis que nous croyons savoir comment s'opere leur génération, en substituant aux poussieres fécondantes d'une plante, des poussieres d'une autre espece ? n'y auroit-il pas lieu d'espérer qu'elles produiroient dans le pistil de nouveaux germes, dont nous pourrions tirer des sortes de mulets, comme nous en avons dans les animaux ; & que ces mulets de plantes auroient de nouvelles propriétés, dont nous pourrions faire usage. Le nombre des variétés auxquelles la nature peut se prêter, est presque infini : c'est de ces variétés que nous avons tiré nos meilleurs fruits. Si nos prunes, nos pêches, nos abricots, &c. ne sont pas des especes constantes, ce sont au moins des productions préférables à la plûpart des especes constantes, & bien dignes par leur utilité d'occuper les Botanistes, qui semblent les dédaigner & en abandonner le soin aux Jardiniers.
La transmigration des plantes n'est pas un des moindres objets de leur culture : en tirant de l'étranger une nouvelle plante utile, on s'approprie un nouveau bien qui peut devenir meilleur que ceux dont on joüissoit auparavant. Le plane, l'orme, le marronnier, le pêcher, l'abricotier, le rosier & tant d'autres, ont été transportés de pays fort éloignés, & ont été, pour ainsi dire, naturalisés chez nous. La nature a favorisé la premiere tentative que l'on a faite pour leur transplantation : mais combien y a-t-il de plantes qui nous paroissent trop délicates pour résister à notre climat, & qui pourroient peut-être y vivre, si on les en approchoit par degrés ; si au lieu de les transporter brusquement d'un lieu chaud à un lieu froid, on les déposoit successivement dans des climats de température moyenne, & si on leur donnoit le tems de se fortifier avant que de les exposer à la rigueur de nos hyvers ? Il faudroit peut-être plusieurs générations de la même plante dans chaque dépôt, & beaucoup d'industrie dans leur culture, pour les rendre plus robustes : mais quels avantages ne tireroit-on pas de toutes ces expériences, si on réussissoit dans une seule ? Je sai qu'il n'est pas possible de suppléer à la chaleur du soleil pour les plantes qui sont en plein air : mais on rapporte souvent au défaut de chaleur ce qui ne dépend que du terrein ; & je crois qu'il est toûjours possible de le rendre convenable à la plante que l'on veut cultiver.
Tous ces différens objets d'agriculture sont bien dignes d'occuper les hommes, & principalement ceux qui se sont voüés à la Botanique : mais les propriétés des plantes nous touchent encore de plus près, c'est le bien dont l'agriculture nous prépare la joüissance. Nous devrions réunir tous nos efforts pour y parvenir, & nous appliquer par préférence à découvrir de nouvelles propriétés.
Nous devons certainement au hasard la plûpart de celles que nous connoissons ; & la découverte des autres est si ancienne, que nous en ignorons l'histoire. Pour juger des tems passés par ce qui se fait à présent au sujet des propriétés des plantes, il est très-probable qu'on n'en a jamais connu aucune que par des circonstances fortuites. Bien loin d'avoir eu des principes pour avancer cette connoissance, on a souvent pris les plantes les plus salutaires pour des poisons, tandis que l'on mettoit en usage celles dont les effets auroient paru très-dangereux, si on les avoit examinées sans prévention. On a peine à concevoir que les hommes gardent des préjugés contre leurs propres intérêts, cependant on n'en a que trop d'exemples : on s'est souvent laissé prévenir sans raison pour ou contre des remedes dont on faisoit dépendre la vie ou la mort des malades ; chacun les employoit ou les rejettoit à son gré, sans trop penser à en déterminer les vraies propriétés. D'où vient donc cette indifférence pour des choses qui nous intéressent de si près ? Notre amour pour la vie n'est point équivoque, & cependant nous semblons négliger ce qui peut la conserver. Nous savons que les propriétés des plantes sont les moyens les plus doux & souvent les plus sûrs pour rétablir notre santé, ou pour prévenir nos maladies ; & l'art qui pourroit nous conduire à reconnoître ces propriétés, n'est pas encore né. Que d'arts frivoles ont été portés à leur comble ! que de connoissances vaines ont été accumulées au point de former des sciences ! tandis que l'on s'est contenté de faire une liste des plantes usuelles dans la Medecine, & de distinguer leurs propriétés par un ordre méthodique qui les repartit en classes & en genres. On a compris dans une même classe les plantes évacuantes, & dans une autre les plantes altérantes : les purgatives, les émétiques sont des genres de la premiere classe ; & la seconde est divisée en plantes céphaliques, béchiques, cardiaques, diurétiques, diaphorétiques, &c. Voyez MATIERE MEDICALE.
Cette méthode est très-incomplete ; parce qu'à l'exception du genre des purgatifs qui est partagé en purgatifs forts & en purgatifs minoratifs, il n'y en a aucun autre qui soit sous-divisé ; & parce que dans tous les especes ne sont point déterminées, les plantes y sont seulement rassemblées pêle-mêle sans être caractérisées, de façon que l'on puisse distinguer leurs propriétés de celles des autres plantes du même genre. Cependant cette méthode est bonne, en ce qu'elle est moins arbitraire qu'aucune méthode d'histoire naturelle ; ses caracteres dépendant des effets que produisent les plantes sur le corps humain, sont aussi constans que la nature des plantes & que la nature humaine : aussi cet ordre méthodique n'a point été changé jusqu'ici ; & je crois qu'il vaudroit bien mieux le développer en entier & le suivre dans les détails, que de penser à en faire d'autres. L'abus que l'on a fait des méthodes dans les nomenclatures des plantes, doit nous préserver d'un pareil abus dans l'exposé de leurs propriétés, qui ne peut être que le résultat de nos observations.
Il se présente naturellement deux objets principaux dans les observations qui peuvent nous conduire à la connoissance des propriétés des plantes. Le premier est de déterminer l'effet des propriétés connues, & de le modifier dans les différentes circonstances. Le second est de trouver les moyens de découvrir de nouvelles propriétés.
Le premier a été bien suivi par les bons observateurs, tant pour les remedes intérieurs de la Medecine, que pour les topiques de la Chirurgie par rapport au regne végétal. Aussi est-ce par le résultat de ces observations que l'on constate la plûpart des connoissances de la matiere médicale, qui est sans-doute une des parties les plus certaines de la Medecine. Mais ces mêmes observations sont imparfaites en ce qui dépend de la Botanique & de la Pharmacie, c'est-à-dire de l'état actuel de la plante que l'on employe & de sa préparation. On ne sait pas bien en quoi different les propriétés d'une racine arrachée au printems ou en automne, en été ou en hyver ; une fleur cueillie, des feuilles séchées, une écorce enlevée ou un bois coupé dans ces différentes saisons ; en quelle proportion l'efficacité des plantes augmente ou diminue à mesure qu'on les garde après les avoir recueillies ; quelle différence y occasionne un dessechement plus ou moins promt, & la façon de les tenir dans un lieu plus ou moins fermé ; en quoi les propriétés des plantes dépendent de leur âge, du terrein, & du climat dans lequel elles croissent, &c. Si on a quelques connoissances des effets que produisent ces différentes circonstances, ce sont des connoissances bien vagues & bien éloignées du point de précision qu'exige l'importance du sujet. On n'a jamais fait des expériences assez suivies pour avoir de bonnes observations sur ces différens objets : de telles observations pourroient nous faire connoître la meilleure façon de préparer les plantes pour modifier leur efficacité à tel ou à tel point. Nous saurions au moins quel changement arrive dans la propriété d'une plante par une infusion plus ou moins longue, & par quantité d'autres préparations.
Il sera sans-doute plus facile de déterminer l'effet des propriétés connues dans les plantes, &
de les modifier par differens procédés, que de trouver le moyen de découvrir des vertus nouvelles.
Les Chimistes avoient entrepris cette recherche, & avoient cru pouvoir y parvenir en déçomposant les
plantes , & en en faisant une analyse exacte : mais les plus habiles artistes ont échoüé dans cette
entreprie; les résultats de l'analyse n'ont pas été d'accord avec les qualités les plus connues des
plantes analysées. On a même prétendu que les plantes les plus opposées en vertu, se réduisoient aux
mêmes principes. Enfin on a abandonné la voie de l'analyse, après s'être convaincu qu'elle ne pouvoit
conduire à aucune connoissance certaine fur les propriétés des plantes. Que de travaux infructueux!
La plûpart des plantes usuelles avoient été analysées; on les avoit déjà caractérisées par les principes
auxquels elles avoient été réduites, & on espéroit que cette méthode nous feroit connoître les
propriétés d'une nouvelle plante par les résultats de son analyse.
Il faut donc renoncer à cette erreur, quelque flateuse qu'elle soit: mais pour avoir fait des tentatives
inutiles, on ne doit pas se décourager dans un sujet aussi important. Il s'agit à présent de substituer à
l'analyse des plantes quelqu'autre moyen de découvrir leurs propriétés: dût-on échoüer de nouveau
après une longue suite d'expériences, on ne peut trop les multiplier, pour peu que le succès soit
probable. On vient de faire une découverte dont on pourroit tirer des lumieres pour cette recherche. M.
de Buffon nous a fait voir des corps mouvans, non-seulement dans les semences des animaux, mais
dans celles des plantes. Lorsqu'on a fait infuser pendant quelque tems des semences broyées ou
d'autres parties d'une plante, on y voit, par le moyen du microscope, des parties organiques qui se
développent, qui se meuvent de différentes manieres, & qui prennent des figures différentes. Hist. nat.
tom. II. Voyez ANIMACULE. Cette belle découverte qui a, pour ainsi dire, dévoilé aux yeux de son
auteur le mystere de la réproduction des animaux & des plantes, pourroit peut-être nous rendre les
propriétés des plantes ensibles aux yeux. Ce fut la premiere réflexion que je fis, lorsque M. de Buffon
me montra ces corps mouvans dans toutes les infusions de plantes qu'il mit en expérience pour la
premiere fois, après qu'il eut conclu, que puisqu'il y avoit des parties organiques sensibles dans les
semences des animaux, elles devoient aussi se trouver dans celles des plantes. Cette induction, qui
ne pouvoit venir que d'un génie fait pour les plus grandes découvertes, a été confirmée par toutes les
expériences qui ont été faites depuis. M. Néedham en a fait beaucoup en vûe de la végétation.
Nouvell. obs. microscop. J'en ai fait quelques-unes par rapport aux propriétés des plantes, & je crois
qu'il seroit à propos d'en faire bien d'autres, pour tâcher de parvenir par ce moyen à déterminer les
différences entre les propriétés connues, & à en trouver de nouvelles. Le développement, la situation,
la figure, le mouvement, la durée de ces corps mouvans pourroient servir de regle & de mesure pour
juger des propriétés de la plante, & pour évaluer leur efficacité. Voyez HISTOIRE NATURELLE, PLANTE. (I)
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BOTANOMANCIE |
s. f. divination qui se faisoit par le moyen des plantes & des arbrisseaux. Ce mot est formé du
Grec βοτάνη, herbe, & de μαντεία divination.
On se servoit, dans la botanomancie, de branches ou de rameaux de verveine, de bruyere, de
figuier, & d'autres simples ou arbrisseaux, sur lesquels on écrivoit le nom & la question du
consultant. Les auteurs ne nous disent pas de quelle maniere se faisoit la réponse, ni par quels
signes elle se manifestoit. Il est à présumer que les prêtres ou les devins la rendoient de vive-
voix. On faisoit grand usage dans la botanomancie de branches de tamarin ou de bruyere,
parce que cet arbrisseau étoit particulierement consacré à Apollon, qui présidoit à la
divination, & à qui l'on avoit donné le surnom de myricoeus, du Latin myrica, qui signifie
bruyere, & à celle-ci l'épithete de prophétique. Au reste il ne faut pas confondre la divination
dont nous parlons ici, avec la coûtume qu'avoit la sibylle de Cumes d'écrire ses réponses sur
des feuilles. (G)
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BOTANOMANCIE | s. f. divination qui se faisoit par le moyen des plantes & des arbrisseaux. Ce mot est formé du Grec βοτάνB7;, herbe, & de μαντείř divination.
On se servoit, dans la botanomancie, de branches ou de rameaux de verveine, de bruyere, de figuier, & d'autres simples ou arbrisseaux, sur lesquels on écrivoit le nom & la question du consultant. Les auteurs ne nous disent pas de quelle maniere se faisoit la réponse, ni par quels signes elle se manifestoit. Il est à présumer que les prêtres ou les devins la rendoient de vive-voix. On faisoit grand usage dans la botanomancie de branches de tamarin ou de bruyere, parce que cet arbrisseau étoit particulierement consacré à Apollon, qui présidoit à la divination, & à qui l'on avoit donné le surnom de myricoeus, du Latin myrica, qui signifie bruyere, & à celle-ci l'épithete de prophétique. Au reste il ne faut pas confondre la divination dont nous parlons ici, avec la coûtume qu'avoit la sibylle de Cumes d'écrire ses réponses sur des feuilles. (G)
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BOTHNIE | (Géog.) province considérable de Suede, sur le golfe du même nom, qui la divise en orientale & occidentale.
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BOTHRION | s. m. (Chirurgie.) nom d'une espece d'ulcere creux, étroit, & dur, qui se forme sur la cornée transparente & sur l'opaque. On l'appelle aussi fossette, fossula ou annulus, à cause de sa profondeur. La cure ne differe point de celle des autres ulceres qui attaquent ces parties. Voyez ARGEMA . (Y)
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BOTHYNOE | ou ANTRES, (Physique.) sorte de météore. Voyez AURORE BOREALE. (O)
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BOTRYTIS | s. f. (Hist. nat. bot.) genre de plante, qui ne differe du byssus que parce qu'elle dure très peu, & par l'arrangement de ses semences, qui sont disposées en grappe ou en épi au bout des tiges ou des rameaux. Micheli, Nova plantarum genera. Voyez PLANTE. (I)
La bothrytes ou bothrytis ou botrys vulgaris, offic. Germ. 250. est amere au goût, & son odeur est forte, mais non desagréable; elle est chaude de sa nature, desséchante, résolutive, apéritive, détersive, & purgative; elle empêche la putréfaction, & elle est d'une efficacité singuliere dans les oppressions, les toux, la difficulté de respirer, & toutes les maladies froides de la poitrine; elle est bonne pour dissiper les matieres visqueuses contenues dans les bronches; elle leve les obstructions du foie, des reins, & de la matrice, guérit la jaunisse, prévient les hydropisies, hâte les regles & les vuidanges, & calme les douleurs du basventre & de l'uterus.
Les dames Vénitiennes regardent le botrys comme un remede infaillible contre les acces de la passion hysterique.
L'eau, la conserve, & le looch de botrys sont excellens dans toutes les maladies de la poitrine & du bas-ventre.
L'herbe bouillie dans une lessive quelconque tue la vermine; & si l'on en lave la tête, elle emportera la gale.
On assûre que cette plante semée avec le grain, tue les vers qui sont nuisibles au grain. Barthol. Zorn, Botanalog. (N)
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BOTTAGE | s. m. (Commerce.) est un droit que l'abbaye de S. Denys en France leve sur tous les bateaux & marchandises qui passent sur la riviere de Seine, à compter du jour S. Denys, 9 Octobre, jusqu'à celui de S. André, 30 Novembre.
Ce droit est assez fort, pour que les marchands prennent leurs mesures de bonne heure pour l'éviter, soit en prévenant l'ouverture de ce droit pour le passage de leurs marchandises, soit en différant jusqu'à sa clôture, sur-out si ces marchandises sont de gros volume. (G)
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BOTTE | s. f. (Manége.) chaussure de cuir-sort, dont on se sert pour monter à cheval: elle est composée de la genouillere, d'une tige aussi large en-haut près du genouil, qu'en-bas près du cou-de-pié, & d'un soulier armé d'un éperon qui tient à la tige. La botteforte est celle dont la tige est dure & ne fait aucun pli; elle sert ordinairement aux chasseurs, aux postillons, & à la cavalerie. Voyez Planche du Cordonnier-Bottier, fig. 47. La botte-molle, est celle qui fait plusieurs plis au-dessus du cou-de-pié; les académistes & les dragons s'en servent. Les bottes à la houssarde & à l'Angloise sont molles & n'ont point de genouil [p. 346] lere. On met quelquefois aux chevaux qui se coupent, un morceau de cuir qu'on attache avec des boucles, & qui entoure la jambe dans l'endroit où le cheval se coupe. On appelle ce cuir une botte. Voyez la suite de cet article. (V)
BOTTE à baleine, en terme de Bottier, c'est une espece de botte molle, soûtenue par plusieurs brins de baleine enfermés dans des fourreaux. Ce sont ces bottes que l'on garnit, sur-tout de garnitures rondes. Voyez GARNITURES RONDES.
BOTTE de chasse, en terme de Bottier. Voyez BOTTE DE COUR.
BOTTE à chaudron, en terme de Bottier. V. BOTTE DE COUR.
BOTTES à contrefort, en terme de Bottier, sont des bottes qu'on garnit de pieces rapportées sur la tige, pour les rendre plus fermes. Voyez CONTRE-FORT.
BOTTE de cour, en terme de Bottier, est une espece de botte dont la genouillere est évasée en forme d'entonnoir ou de chaudron, ce qui les fait aussi nommer bottes à chaudron. On les appelle cependant le plus ordinairement bottes de cour, parce que c'est de cette espece de botte dont toute la suite du Roi se sert dans les parties de chasse; c'est proprement l'uniforme des cavaliers en fait de bottes. Voyez GENOUILLERE. Voyez Planche du Cordonnier-bottier, fig. 47.
BOTTES de courier, sont des bottes ainsi nommées parce qu'elles ne servent guere qu'aux couriers; elles sont beaucoup plus fortes que les autres: les garnitures sont jointes l'une à l'autre par des jarretieres à boucles. Ces bottes se changent de jambe, ce qu'on ne peut faire avec toutes les autres.
BOTTES, demi-chasse, (en terme de Bottier) sont les bottes dont le dedans de la genouillere est échancré; ce qui la distingue de la botte de chasse, ou à chaudron, qui ne l'est point. Voyez BOTTE DE CHASSE, ou à CHAUDRON.
BOTTES, demi-chasse à quatre coutures, (en terme de Bottier) sont des bottes ornées de quatre cordons en maniere de couture sur les quatre faces. Voyez COUTURE.
BOTTES de gardes du Roi, (en terme de Bottier) sont des bottes dont les genouilleres sont grandes & quarrées, & les garnitures rondes ou en forme de fil.
BOTTES de mousquetaire, (en terme de Bottier) sont des bottes auxquelles on a laissé un pli derriere le talon, qui fait que la botte se plie en marchant; ce qui lui donne à peu près le même usage que la botte molle, dont on a parlé plus haut.
BOTTES de poste de courier, (en terme de Bottier) sont des bottes qui ne different des bottes de courier ordinaire, que parce qu'elles ont double tige. Voyez TIGE.
BOTTE, aller à la botte, (Manege) c'est une action d'un cheval colere, qui porte sa bouche à la botte ou à la jambe de celui qui le monte pour mordre.
Serrer la botte, (Manege) est une expression figurée, qui veut dire presser un cheval d'avancer en serrant les jambes. Ce terme est usité à la guerre.
BOTTE, (en Vénerie) c'est ainsi qu'on appelle le collier avec lequel on mene aux bois le limier.
BOTTE, s. f. espece de forces dont on se sert dans les manufactures de lainage de la province de Champagne, & avec laquelle il est ordonné par les reglemens de donner la derniere tonte aux droguets.
BOTTE, tonneau ou vaisseau de bois propre à mettre du vin ou d'autres liqueurs. On dit une botte de vin d'Espagne, une botte d'huile.
La botte pour les huiles est à peu près semblable à un muid. Celles pour les vins sont plus larges par le milieu que par les extrémités, allant toûjours en diminuant depuis le bondon jusqu'au jable.
Le terme de botte est usité particulierement dans les provinces de France, qui approchent de l'Italie, où l'on appelle bottais un tonnelier. Il est aussi en usage chez les Espagnols, où la botte contient trente arobes de vingt-cinq livres chacune. Voyez AROBE.
En Angleterre la botte contient cent vingt-six gallens, c'est-à-dire 504 pintes de Paris. Voyez GALLON.
En Bretagne, on jauge les bottes par veltes; chaque velte est estimée 4 pots, c'est-à-dire 8 pintes mefure de Paris.
Les bottes de Portugal jaugent 67 à 68 veltes, celles d'Espagne ne sont pas si grandes.
Les bottes d'huile d'Espagne & de Portugal pesent environ un millier. Il y a aussi des demi-bottes.
La botte de Venise est la moitié de l'amphora. Voyez AMPHORA. Celle de Lisbonne est moindre que celle d'Espagne, la premiere ne rendant à Amsterdam que 26 à 27 stekans, & l'autre 36 à 37.
BOTTE se dit aussi d'un fagot, ou paquet de plusieurs choses de la même espece liées ensemble. Une botte d'échalas, une botte de lattes, une botte d'allumetes, &c.
BOTTE de paille ou de foin, (OEconom. rustiq.) est une certaine quantité de paille ou de foin, qu'on entoure avec des liens de même nature, & qui pese plus ou moins selon les différentes pays: on en nourrit les chevaux qui sont à l'écurie.
Botte de mouchoirs, se dit d'un paquet de mouchoirs des Indes qu'on vend au Caire; dix-huit fins, ou dix gros, font une botte.
Botte, soie en botte, paquet de soie platte ou autre pliée de la longueur d'un pié sur deux pouces d'épaisseur en tout sens, & dont la livre est de 15 onces.
Botte est aussi le nom qu'on donne aux gros paquets de chanvre du poids de 150. (G)
BOTTE de corde de boyau, (terme de Boyaudier) c'est ainsi qu'on nomme un petit paquet de cordes de boyau plié en sept ou huit plis. Voyez CORDE A BOYAU.
BOTTE DE PARCHEMIN, c'est une certaine quantité de peaux ou de feuilles de parchemin liées ensemble en paquet.
La botte de parchemin en cosse, aussi bien que celle de parchemin raturé, soit qu'il soit équarrié ou non, est composée de trente-six peaux.
Le parchemin raturé mis en cahier se vend aussi à la botte, qui est composée de soixante & douze feuilles, ou de dix-huit cahiers de quatre feuilles chacun. Voyez PARCHEMIN.
BOTTE de bordure, (en terme de Boisselerie) c'est une douzaine de feuilles de hêtre de six pouces de largeur, liées ensemble & préparées pour faire des bordures.
BOTTE de seaux, (en terme de Boisselerie) c'est un paquet de six corps de seaux, tels qu'ils sortent de la premiere main & de la forêt.
BOTTE ou ESTOCADE, (en terme de Maître en fais d'armes.) Voyez ESTOCADE.
BOTTE, s. f. (terme de Sellier) c'est une espece de marche-pié, fait de maroquin en dessus, rembouré par dessous le maroquin, & suspendu par des courroies de cuir aux côtés ou brancards d'une berline, d'un carrosse, & de toute autre voiture, vis-à-vis des portieres; on appuie le pié sur la botte pour entrer dans la voiture. Voyez les Planches du Sellier.
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BOTTELAGE | s. m. (OEconom. rustiq.) c'est l'action de mettre en botte; celui-ci se dit particulierement du foin. Voyez FOIN.
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BOTTELER | v. act. (Jardinage.) c'est mettre en botte. On dit botteler du foin, & en général on peut le dire de toutes les plantes, telles que les buis, les raves, les asperges dont on fait des bottes. Une botte de ces dernieres plantes est à peu-près la valeur de deux ou trois poignées ensemble. On dit aussi des bottes d'échalas, de foin, de paille, de charmille, d'osier, &c. Voyez plus haut l'article BOTTE. (K)
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BOTTELEUR | s. m. (OEconom. rustiq.) homme e journée employé à mettre le foin en botte. Voyez FOIN.
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BOTTER | (se) signifie mettre des bottes pour monter à cheval. On dit aussi qu'un cheval se botte lorsque marchant dans un terrein gras, la terre lui remplit le pié & y reste. (V)
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BOTTIER | s. m. est celui qui fait & vend toutes sortes de bottes molles, fortes, bottines. Les Bottiers sont du corps des Cordonniers, & ne se servent point d'autres outils qu'eux. Voyez CORDONNIER.
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BOTTINES | s. f. chez les Boy audiers, ce sont des morceaux de cuir souple ou de peau, que ces ouvriers s'attachent au-dessus du coup-de-pié, afin d'empêcher que l'ordure & l'eau n'entrent dans leurs souliers, lorsqu'ils travaillent les boyaux destinés à faire des cordes. Ces bottines ressemblent assez aux morceaux de peau que les Tailleurs de pierre se mettent aux jambes, pour empêcher que les éclats des pierres n'entrent dans leurs souliers & ne les blessent.
BOTTINES, (en terme de Boursier) c'est une espece de botte de fer revêtue de cuir, pour soûtenir la jambe d'un enfant lorsqu'elle est trop foible, ou qu'elle prend un pli contre nature.
BOTTINES, s. f. (Bottier) on donne ce nom à une chaussure de cuir fort & dur, qu'on met à ses jambes pour monter à cheval: elle differe de la botte, en ce que la tige & la genouillere sont fendues en long par le côté, & se rejoignent par des boucles ou des boutons; en ce qu'elle suit précisément le moule de la jambe, & en ce que le soulier n'y est point attaché. Voyez Pl. du Bottier, fig. 30.
BOTTINES FORTES à tringles, en terme de Bottier, sont des especes de bottes dont la tige est aussi forte que les grosses bottes. Elles n'ont point de pié, & se ferment au bas de la jambe par une tringle de fer qui regne tout le long de la tige, & s'emboîte dans un anneau.
BOTTINES à passans, en terme de Bottier, sont des bottines qui se ferment par des especes de boutonnieres de cuir cousues le long de la tige, & qui se passent les unes dans les autres jusqu'à la derniere qui s'arrête par un bouton. Voyez PASSANS, & la fig. 50 Pl. du Cordonnier-Bottier.
BOTTINES à la dragonne; Elles ont la tige dure comme la botte: elles sont ouvertes tout du long par le côté, & elles emboîtent la jambe juste; & le long du côté de l'ouverture est une verge de fer qui passe par le bas environ d'un pouce, & entre dans un petit anneau de fer qui est à l'autre côté de la tige, qui sert à la tenir ferme par le bas, & par le haut à la genouillere: elle est fermée avec des attaches & des boucles. Les bottines n'ont point de souliers.
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BOTTWAR | (Géog.) ville du duché de Wirtemberg, sur la riviere de même nom.
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BOTZENBOURG | (Géog.) ville d'Allemagne située sur l'Elbe, dans le duché de Meckelbourg. Lon. 28. 23. lat. 53. 34.
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BOVA | (Géog.) petite ville d'Italie au royaume de Naples, dans la Calabre, près l'Apennin, à 8 lieues de Reggio. Long. 34. 3. lat. 37. 55.
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BOUARD | s. m. gros marteau qui étoit anciennement à l'usage des monnoyeurs. Voyez BOUER.
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BOUBIE | ou BOOBY, s. m. (Hist. nat.) c'est un oiseau aquatique d'Amérique, qui n'est pas tout-à-fait si gros qu'une poule: il est d'un gris clair, a un bec semblable à celui d'une corneille, les pattes larges & épattées comme un canard; il se laisse prendre très-aisément, car il n'est point sauvage; sa chair est noire, & le goût est comme celui de la chair des poissons.
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BOUC | s. m. hircus. (Hist. nat. Zoolog.) animal quadrupede, dont la femelle est appellée chevre, capra. Voyez CHEVRE. Les Latins donnoient aussi le nom de caper au bouc lorsqu'il avoit été coupé; c'est de ces deux derniers noms qu'a été dérivé celui du genre auquel on a rapporté ces animaux, caprinum genus.
Le bouc differe du bélier en ce qu'il est couvert de poil & non pas de laine; que ses cornes ne sont pas autant contournées que celles du bélier; qu'il a une sorte de barbe au menton, & qu'il répand une mauvaise odeur. Ray, Anim. quad. synop. Voyez QUADRUPEDE. (I)
Le bouc pour être bon à la chevre doit avoir le corps grand, les jambes grosses, le cou chainu & court, la tête petite, le poil noir, épais & doux, les oreilles grandes & pendantes, la barbe longue & touffue; s'il a des cornes, il sera pétulent, dangereux, & n'en sera pas meilleur.
Il ne lui faut donner des chevres qu'à un an ou deux, & ne lui en plus donner au-delà de quatre ou cinq; mais il peut servir pendant deux mois à cent cinquante chevres. Quand on l'occupe, il le faut bien nourrir, & lui donner sept à huit bouchées de son & de foin à manger, lorsqu'il a sailli une fois; on lui donne la même chevre jusqu'à trois fois, afin de s'assûrer qu'elle est pleine.
Lorsqu'on ne le destine pas à multiplier, on le châtre à six mois ou un an. Voyez CHEVREAU. Voyez aussi CHEVRE.
On mange rarement le bouc, à cause de son odeur & de son goût desagréable.
La graisse de bouc passe pour un très-bon émollient. Hippocrate la recommande comme telle dans un pessaire.
Dioscoride a donné la composition d'un topique très-salutaire selon lui, contre la goutte, & qu'il fait avec parties égales de graisse de bouc, & de celle de chevre, mêlées avec un peu de safran. (N)
Les peaux de bouc font une partie assez considérable du commerce des cuirs; les Maroquiniers, les Chamoiseurs & les Mégissiers, les préparent en maroquin, en chamois ou en mégie, & les mettent en état d'être employées à différens usages. Le suif de bouc n'est pas non plus à négliger.
BOUC, (Myth.) Les habitans de Mendés en Egypte, avoient une grande vénération pour les boucs. Les Egyptiens en général n'en immoloient point, par respect pour Pan à la tête & aux pieds de bouc. Ils adoroient sous ce symbole la nature féconde. Les Grecs sacrifioient le bouc à Bacchus. C'étoit la monture ordinaire de la Vénus populaire.
BOUC : on donne ce nom dans les machines hydrauliques à une espece de poulie garnie de cornes de fer, qui font monter & descendre une chaîne sans fin. C'est par le moyen d'un bouc que les eaux sont élevées du puits salé de Moyenvic. Voyez les Planches de Saline.
BOUC : on donne aussi ce nom dans les grosses forges à une grande roue à eau, traversée par un arbre qu'elle fait mouvoir, & telle que celle qu'on voit en M, Planche II. fig. 1. des grosses forges.
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BOUCACHARDS | s. m. (Hist. ecclés.) espece de chanoines réguliers réformés, ainsi appellés de la maison de Boucachard, où commença la réforme. Les Boucachards ne sont ni anciens ni approuvés par l'Eglise; cependant ils ont plusieurs maisons, & sont appellés Boucachards dans celles des chanoines réguliers où il a plu aux évêques de les introduire.
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BOUCAGE | s. m. tragoselinum, (Hist. nat. Bot.) genre de plante à fleur en rose & en ombelle, composée de plusieurs pétales inégaux faits en forme de coeur, disposés en rond & soutenus par un calice. Ce calice devient dans la suite un fruit composé de deux semences oblongues arrondies, cannelées d'un côté & applaties de l'autre. Tournefort, Inst. rei herb. Voyez PLANTE. (I)
Premiere espece, Tragoselinum majus umbellâ candidâ. Pit. Tourn.
Seconde espece, Tragoselinum minus. Pit. Tourn.
Ces plantes croissent aux lieux incultes, & en terre grasse; elles contiennent beaucoup de sel essentiel & d'huile: la petite & la plus commune est la plus estimée dans la Medecine; on employe la racine, les feuilles & la semence.
Elles sont apéritives, détersives, sudorisiques, vulnéraires, propres pour briser la pierre du rein & de la vessie, pour résister au venin & à la malignité des humeurs, pour lever les obstructions, pour exciter l'urine & les regles, étant prises en décoction, ou en poudre.
On l'appelle bouquetine, parce que les boucs en mangent. (N)
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BOUCAN | s. m. les marchands de bois nomment ainsi une buche rompue par vétusté. Ce mot a encore un autre sens. Voyez l'art. suivant.
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BOUCANIER | s. m. (Hist. mod.) est le nom que l'on donne dans les Indes occidentales à certains sauvages qui font fumer leur viande sur une grille de bois de Bresil placée à une certaine hauteur du feu, qu'on appelle boucan.
Delà vient qu'on appelle boucans les petites loges dans lesquelles ils font fumer leurs viandes, & l'action de les préparer boucaner.
On prétend que la viande ainsi boucanée plaît également aux yeux & au goût; qu'elle exhale une odeur très-agréable; qu'elle est d'une couleur vermeille, & qu'elle se conserve plusieurs mois dans cet état.
Oexmelin de qui nous tenons ces faits, ajoûte qu'il y a des habitans qui envoyent dans ces lieux leurs engagés lorsqu'ils sont malades, afin qu'en mangeant de la viande boucanée ils puissent recouvrer la santé.
Savary dit que les Espagnols, qui ont de grands établissemens dans l'île de Saint-Domingue, y ont aussi leurs boucaniers, qu'ils appellent matadores, ou monteros; c'est-à-dire, chasseurs: les Anglois appellent les leurs cow-killers.
Il y a deux sortes de boucaniers; les uns ne chassent qu'aux boeufs pour en avoir le cuir, & les autres aux sangliers pour se nourrir de leur chair.
Voici, suivant Oexmelin, la maniere dont ils font boucaner la viande: Lorsque les boucaniers sont revenus le soir de la chasse, chacun écorche le sanglier qu'il a apporté, & en ote les os; il coupe la chair par aiguillettes longues d'une brasse ou plus, selon qu'elles se trouvent. Ils la mettent sur des tables, la saupondrent de sel fort menu, & la laissent ainsi jusqu'au lendemain, quelquefois moins, selon qu'elle prend plus ou moins vîte son sel. Après ils la mettent au boucan, qui consiste en vingt ou trente bâtons gros comme le poignet, & longs de sept à huit piés, rangés sur des travers environ à demi-pié l'un de l'autre. On y met la viande, & on fait force fumée dessous, où les boucaniers brûlent pour cela les peaux des sangliers qu'ils tuent, avec leurs ossemens, afin de faire une fumée plus épaisse. Cela vaut mieux que du bois seul; car le sel volatil qui est contenu dans la peau & dans les os de ces animaux, vient s'y attacher, & donne à cette viande un goût si excellent qu'on peut la manger au sortir de ce boucan sans la faire cuire, quelque délicat qu'on soit.
L'équipage des boucaniers, selon le même auteur, est une meute de vingt-cinq à trente chiens, avec un bon fusil, dont la monture est différente des fusils ordinaires, & qu'on nomme fusils de boucaniers. Leur poudre qui est excellente, & qu'ils tirent de Cherbourg, se nomme aussi poudre de boucaniers. Ils sont ordinairement deux ensemble, & s'appellent l'un l'autre matelot. Ils ont des valets qu'ils appellent engagés, qu'ils obligent à les servir pour trois ans, & auxquels, ce terme expiré, ils donnent pour récompense un fusil, deux livres de poudre, & six livres de plomb, & qu'ils prennent quelquefois pour camarades. En certaines occasions ces boucaniers se joignent aux troupes réglées dans les colonies, & servent aux expéditions militaires; car il y en a parmi toutes les nations européennes qui ont des établissemens en Amérique. (G)
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BOUCASSIN | s. m. (Commerce.) nom que l'on donnoit autrefois à certaines toiles gommées, calendrées, & teintes de diverses couleurs. Il y a des boucassins de Smyrne, ou des toiles apprêtées & empesées avec de la colle de farine. On les peint en indiennes; & l'on donne l'épithete de boucassine à toutes les toiles préparées en boucassin.
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BOUCAUT | s. m. (Marine.) on donne quelquefois ce nom à certaines embouchures de rivieres, soit à la mer ou dans des lacs. Ce nom est en usage à la côte de Maroc & de Biscaye. (Z)
BOUCAUT, s. m. (Commerce.) moyen tonneau ou vaisseau de bois qui sert à renfermer diverses sortes de marchandises, particulierement du girofle, de la muscade, de la morue, &c.
On se sert aussi de boucauts pour le vin, & autres liqueurs.
Quelquefois le boucaut se prend pour la chose qui y est contenue: ainsi l'on dit un boucaut de girofle, un boucaut de vin, &c. (G)
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BOUCHAGE | s. m. c'est dans les grosses forges, une certaine quantité de terre détrempée & pétrie, dont on se sert pour fermer la coulée. Voyez COULEE. Ainsi faire le bouchage, c'est détremper & pétrir cette terre. Voyez GROSSES FORGES.
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BOUCHAIN | (Géog.) ville forte des Pays-Bas dans le Hainaut, à trois lieues de Valenciennes & de Cambray. Long. 20. 58. lat. 50. 17.
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BOUCHARDE | s. f. (terme de Sculpture.) est un outil de fer, de bon acier par le bas, & fait en plusieurs pointes de diamant, fortes & pointues de court. Les sculpteurs en marbre s'en servent pour faire un trou d'égale largeur, ce qu'ils ne pourroient faire avec des outils tranchans. On frappe sur la boucharde avec la masse, & ses pointes meurtrissent le marbre, & le mettent en poudre; & il en sort par le moyen de l'eau que l'on jette de tems en tems dans le trou, de peur que l'outil ne s'échauffe, & ne perde sa trempe. C'est par la même raison que l'on mouille les grais sur lesquels on affûte les outils, qui se détremperoient si on les frottoit dessus le grais à sec. Cela se fait aussi pour empêcher que la pierre ne s'engraisse, & que le mer n'entre & ne se mette dans les pores du grais.
Lorsqu'on travaille avec la boucharde, on prend un morceau de cuir percé, au travers duquel on la fait passer. Ce morceau de cuir monte & descend aisément, & empêche qu'en frappant sur la boucharde l'eau ne réjaillisse au visage de celui qui travaille. Voyez Plan. I. fig. 2. à côté de laquelle on voit le plan marqué (A).
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BOUCHART | (Géog.) île & ville de France en Touraine, sur la Vienne, à sept lieues de Tours.
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BOUCHE | s. f. en Anatomie, est une partie du visage composée des levres, des gencives, du dedans des joues, & du palais. Voyez FACE, LEVRES, &c.
Toutes ces parties sont tapissées d'une tunique glanduleuse qui se continue sur toute la surface interne de la joue, & sur toutes ses parties excepté les dents.
Les glandes de cette tunique séparent une sorte de salive qui coule par une infinité de petits conduits excrétoires, & sert à entretenir dans la bouche & dans toutes ses parties l'humidité & la souplesse. Voyez SALIVE.
A la partie postérieure du palais, & perpendiculairement sur la glotte, pend un corps rond, mou, & uni, semblable au bout du doigt d'un enfant, & qui est formé par la duplicature de la membrane du palais; il se nomme la luette: il est mû par deux muscles, savoir, le sphénostaphylin, & le ptérygostaphylin, & suspendu par autant de ligamens. Voyez LUETTE.
Sous la membrane du palais sont quantité de petites glandes assez visibles dans la partie antérieure de la bouche, & semblables à des grains de millet, & dont les conduits excrétoires s'ouvrent dans la bouche à travers sa membrane: mais vers la partie postérieure de la bouche elles sont beaucoup plus serrées, & autour de la racine de la luette elles sont rassemblées si près les unes des autres, qu'elles semblent ne former qu'une grosse glande conglomérée, que Verheyen appelle par cette raison glandula conglomerata palatina. Voyez PALAIS. Les gencives couvrent les alvéoles où les dents sont enchâssées. Voyez DENT.
Outre les parties propres de la bouche, il y en a d'autres dedans & alentour qui lui sont extrèmement utiles & nécessaires; comme les glandes, dont les plus considérables sont les parotides, les maxillaires, les sublinguales, & les amygdales. Voyez-les chacune dans leurs articles particuliers, PARODITES, &c.
Ces glandes sont les organes de la salive, & fournissent toute la liqueur des crachats qui découlent dans la bouche par différens conduits, après qu'elle a été séparée du sang dans le corps des glandes. Comme il sort plus de salive lorsque la mâchoire inférieure agit, par exemple, lorsque l'on mâche, que l'on avale, ou que l'on parle beaucoup, &c. la disposition des conduits salivaires favorise aussi dans ces occasions cette plus grande évacuation.
M. Derham observe que la bouche des differens animaux est exactement proportionnée aux usages de cette partre, étant d'une figure très-convenable pour saisir la proie, ramasser & recevoir la nourriture, &c. La bouche de presque tous les animaux s'appelle gueule.
Dans certains animaux elle est grande & large, dans d'autres petite & étroite; dans les uns elle est taillée profondément dans la tête, pour mieux saisir & tenir la proie, & brise plus aisément une nourriture dure, d'un gros volume, & qui résiste; dans les autres, qui vivent d'herbes, elle est taillée moins avant.
Celle des insectes est très-remarquable: dans les uns elle est en forme de pinces, pour saisir, tenir & déchirer la proie; dans les autres elle est pointue, pour percer & blesser certains animaux, & sucer leur sang; dans d'autres elle est garnie de mâchoires & de dents, pour ronger & arracher la nourriture, traîner des fardeaux, percer la terre & même le bois le plus dur, & jusqu'aux pierres mêmes, afin d'y pratiquer des retraites & des nids pour les petits.
La bouche des oiseaux n'est pas moins remarquable, étant faite en pointe pour fendre l'air, & étant dure & de la nature de la corne, pour suppléer au défaut des dents, étant crochue dans les oiseaux de proie, pour saisir & tenir la proie, longue & mince dans ceux qui doivent chercher leur nourriture dans les endroits marécageux, longue & large dans ceux qui la cherchent dans la vase. Voyez BEC. (L)
BOUCHE-EN-COUR, (Hist. mod.) c'est le terme dont on se sert pour signifier le privilége d'être nourri à la cour aux dépens du Roi. Ce privilége ne s'étend quelquefois qu'à la fourniture du pain & du vin. Cette coûtume étoit en usage anciennement chez les seigneurs de même que chez les rois. (G)
La BOUCHE & les mains, terme de Jurisprudence féo-dale, employé dans la coûtume de Paris art. 3. pour signifier la foi & hommage. L'origine de cette expression vient de ce qu'autrefois le vassal en prêtant le serment de fidélité à son seigneur, lui présentoit la bouche, & lui mettoit les mains dans les siennes: mais cette formalité a été abrogée par le non-usage. (H)
Ouvrir & fermer la bouche d'un cardinal, c'est une cérémonie qui se fait en un consistoire secret, où le pape ferme la bouche aux cardinaux qu'il a nouvellement nommés, en sorte qu'ils ne parlent point quoique le pape leur parle: ils sont privés de toute voix active & passive jusqu'à un autre consistoire, où le pape leur ouvre la bouche, & leur fait une petite harangue, pour leur marquer de quelle maniere ils doivent parler & se comporter dans le consistoire.
Bouche signifie aussi dans les cours des princes ce qui regarde leur boire & leur manger, & le lieu où on l'apprête; de-là les officiers de bouche, les chefs de la bouche.
BOUCHES INUTILES, (Art milit.) ce sont dans une ville assiégée les personnes qui ne peuvent servir à sa défense; tels sont les vieillards, les femmes & les enfans, &c. Un gouverneur qui sait que sa place est pourvûe de peu de vivres, doit prendre le parti de se défaire de bonne heure des bouches inutiles; car lorsque le siége est formé, l'assaillant ne doit pas permettre la sortie de ces personnes, afin qu'elles aident à consommer les vivres, & que le gouverneur se trouve forcé de se rendre plus promptement (Q)
BOUCHE À FEU, c'est dans l'Art militaire, les canons & les mortiers: ainsi battre une place avec 200 bouches à feu, c'est avoir 200 pieces, tant de canons que de mortiers, en batterie sur la ville. (Q)
BOUCHE, en terme de Manege, marque la sensibilité du cheval en cette partie où on lui met le mors. Filets de la bouche d'un cheval, voyez FILET.
La bouche est la partie de la tête du cheval à laquelle on donne le nom de gueule dans les autres animaux. Le cheval à cause de sa noblesse, est le seul quadrupede à qui on donne une bouche: ses bonnes qualités sont d'être bonne ou loyale, c'est-à-dire, que le mors n'y fasse trop ni trop peu d'impression. On appelle aussi bouche à pleine main, une bouche que l'on ne sent ni trop ni trop peu dans la main: assûrée, c'est-à-dire, que le cheval sente le mors sans inquiétude: sensible, signifie qu'elle est délicate aux impressions du mors; c'est un défaut à une bouche que d'être trop sensible: fraîche, c'est-à-dire, qu'elle conserve toûjours le sentiment du mors, & qu'elle est continuellement humectée par une écume blanche.
Les mauvaises qualités d'une bouche sont d'être fausse ou égarée, c'est-à-dire, qu'elle ne répond pas juste aux impressions du mors; chatouilleuse, vient d'une trop grande sensibilité; seche, c'est-à-dire sans écume, est quelquefois une suite d'insensibilité; forte, veut dire que le mors ne fait presque point d'impression sur les barres: on dit dans cette occasion que le cheval est gueulard, ou a de la gueule, ou est sans bouche, ou est fort en bouche: perdue ou ruinée, signifie que le cheval n'a plus aucune sensibilité à la bouche. Assûrer, rassûrer, gourmander, offenser, ouvrit la bouche d'un cheval, voyez ces termes à leurs lettres. (V)
BOUCHE, en Architecture, terme métaphorique, pour signifier l'ouverture ou l'entrée d'un tuyau, d'un four, d'un puits, d'une carriere, &c.
BOUCHE, c'est, chez le roi & chez les princes, un bâtiment particulier composé de plusieurs pieces, comme de cuisines, offices, &c. où l'on apprête & dresse séparément les viandes des premieres tables. (P)
BOUCHE, (Marine.) on donne quelquefois ce nom aux ouvertures par lesquelles de grandes rivieres déchargent leurs eauxà la mer. On dit les bouches du Rhone, les bouches du Nil, &c. Quelquefois on l'applique à certains passages de la mer resserrés entre les terres, comme les bouches de Boniface, entre la Corse & la Sardaigne. (Z)
BOUCHE, BOSSON, BESSON; voyez BOUGE & BESSON.
BOUCHE, dans les tuyaux d'Orgue; on appelle ainsi l'ouverture du tuyau par laquelle l'air qu'il contient sort. On a ainsi appellé cette partie par analogie à la bouche de l'homme, parce que c'est par cette ouverture que le tuyau parle: la largeur entre les deux levres 3 & 0, fig. 30. Pl. d'Orgue, doit être le quart de leur longueur b b, pour qu'elle parle avec le plus d'avantage qu'il est possible; car si elle est trop ouverte, le tuyau ne parle presque pas; & si elle l'est trop peu, le tuyau ne fait entendre qu'un siflement desagréable.
BOUCHE OVALE, sorte de bouche des tuyaux d'Orgue laquelle est arrondie par le haut, comme la figure 31. Plan. d'Orgue le représente.
Pour trouver le trait de cette bouche, soit d b, fig. 31. n° 2. sa largeur; il faut diviser cette largeur en deux au point 3, élever perpendiculairement la ligne 3 e, sur laquelle on prendra 3 f égale à d b; du point f, comme centre, & d'un rayon moitié de d b, on décrira la demi-circonférence e, qui avec les deux perpendiculaires aux points d & b, terminera la figure de la bouche ovale. Voyez ORGUE.
BOUCHE EN POINTE, c'est ainsi que l'on nomme la bouche des tuyaux d'orgue dont la levre supérieure, figure 33. Plan. d'Orgue, est faite en triangle isoscele a b c; b c est la largeur de la bouche; c 2 une fois & demie cette largeur qui est la hauteur de la bouche, que l'on forme en tirant les deux lignes égales a c & a b. Voyez l'article ORGUE.
BOUCHE, BOUCHE DE FOUR, en terme de Boulanger, est une ouverture en quarré ou cintrée, par laquelle on met le bois & le pain dans le four. Voyez fig. 1. du Boulanger; A B C D est la bouche du four, & C D E F, la plaque de fer avec laquelle on le ferme, en levant cette plaque qui fait charniere dans la ligne C D. Voyez la fig. 2. qui est le profil du four sur sa longueur.
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BOUCHER | s. m. (Police anc. & mod. & Art.) celui qui est autorisé à faire tuer de gros bestiaux, & à en vendre la chair en détail.
La viande de boucherie est la nourriture la plus ordinaire après le pain, & par conséquent une de celles qui doit davantage & le plus souvent intéresser la santé. La police ne peut donc veiller trop attentivement sur cet objet: mais elle prendra toutes les précautions qu'il comporte, si elle a soin que les bestiaux destinés à la boucherie soient sains; qu'ils soient tués & non morts de maladie, ou étouffés; que l'apprêt des chairs se fasse proprement, & que la viande soit débitée en tems convenable.
Il ne paroît pas qu'il y ait eû des Bouchers chez les Grecs, au moins du tems d'Agamemnon. Les héros d'Homere sont souvent occupés à dépecer & à faire cuire eux-mêmes leurs viandes; & cette fonction qui est si desagréable à la vûe n'avoit alors rien de choquant.
A Rome il y avoit deux corps ou colléges de Bouchers, ou gens chargés par état de fournir à la ville les bestiaux nécessaires à sa subsistance: il n'étoit pas permis aux enfans des Bouchers de quitter la profession de leurs peres, sans abandonner à ceux dont ils se séparoient la partie des biens qu'ils avoient en commun avec eux. Ils élisoient un chef qui jugeoit leurs différends: ce tribunal étoit subordonné à celui du préfet de la ville. L'un de ces corps ne s'occupa d'abord que de l'achat des porcs, & ceux qui le composoient en furent nommés suarii: l'autre étoit pour l'achat & la vente des boeufs; ce qui fit appeller ceux dont il étoit formé, boarii ou pecuarii. Ces deux corps furent réunis dans la suite.
Ces marchands avoient sous eux des gens dont l'emploi étoit de tuer les bostiaux, de les habiller, de couper les chairs, & de les mettre en vente; ils s'appelloient laniones ou lanii, ou même carnifices: on appelloit lanienoe, les endroits où l'on tuoit, & macella, ceux où l'on vendoit. Nous avons la même distinction; les tueries ou échaudoirs de nos Bouchers répondent aux lanienoe, & leurs étaux aux macella.
Les Bouchers étoient épars en différens endroits de la ville; avec le tems on parvint à les rassembler au quartier de Coelimontium. On y transféra aussi les marchés des autres substances nécessaires à la. vie, & l'endroit en fut nommé macellum magnum. Il y a sur le terme macellum un grand nombre d'étymologies qui ne méritent pas d'être rapportées.
Le macellum magnum, ou la grande boucherie, devint sous les premieres années du regne de Néron un édifice à comparer en magnificence aux bains, aux cirques, aux aquéducs, & aux amphithéatres. Cet esprit qui faisoit remarquer la grandeur de l'empire dans tout ce qui appartenoit au public, n'étoit pas entierement éteint: la mémoire de l'entreprise du macellum magnum fut transmise à la postérité par une médaille où l'on voit par le frontispice de ce bâtiment, qu'on n'y avoit épargné ni les colonnes, ni les portiques, ni aucune des autres richesses de l'architecture.
L'accroissement de Rome obligea dans la suite d'avoir deux autres boucheries: l'une fut placée in regione Esquilina, & fut nommée macellum Livianum; l'autre in regione fori Romani.
La police que les Romains observoient dans leurs boucheries s'établit dans les Gaules avec leur domination; & l'on trouve dans Paris, de tems immémorial, un corps composé d'un certain nombre de familles chargées du soin d'acheter les bestiaux, d'en fournir la ville, & d'en débiter les chairs. Elles étoient réunies en un corps où l'étranger n'étoit point admis, où les enfans succédoient à leurs peres, & les collatéraux à leurs parens; où les mâles seuls avoient droit aux blens qu'elles possédoient en commun, & où par une espece de substitution, les familles qui ne laissoient aucun hoir en ligne masculine, n'avoient plus de part à la société; leurs biens étoient dévolus aux autres jure accrescendi. Ces familles élisoient entr'elles un chef à vie, sous le titre de maître des Bouchers, un greffier, & un procureur d'office. Ce tribunal subordonné au prevôt de Paris, ainsi que celui des Bouchers de Rome l'étoit au préfet de la ville, décidoit en premiere instance des contestations particulieres, & faisoit les affaires de la communauté.
On leur demanda souvent leur titre, mais il ne paroît pas qu'ils l'ayent jamais fourni; cependant leur privilége fut confirmé par Henri Il. en 1550, & ils ne le perdirent en 1673, que par l'édit général de la réunion des justices à celle du Châtelet.
Telle est l'origne de ce qu'on appella dans la suite la grande boucherie; l'accroissement de la ville rendit nécessaire celui des boucheries, & l'on en établit en différens quartiers; mais la grande boucherie se tint toûjours séparée des autres, & n'eut avec elles aucune correspondance, soit pour la jurande, soit pour la discipline.
A mesure que les propriétaires de ces boucheries diminuerent en nombre & augmenterent en opulence, ils se dégoûterent de leur état, & abandonnerent leurs étaux à des étrangers. Le Parlement qui s'apperçut que le service du public en souffroit, les contraignit d'occuper ou par eux-mêmes ou par des serviteurs: de-là vinrent les étaliers Bouchers. Ces étaliers demanderent dans la suite à être maîtres, & on le leur accorda: les Bouchers de la grande boucherie s'y opposerent inutilement; il leur fut défendu de troubler les nouveaux maîtres dans leurs fonctions; ces nouveaux furent incorporés avec les Bouchers des autres boucheries: dans la suite, ceux même de la grande boucherie leur loüerent leurs étaux, & toute distinction cessa dans cette profession.
La premiere boucherie de Paris fut située au parvis Notre-Dame: sa démolition & celle de la boucherie de la porte de Paris fut occasionnée par les meurtres que commit sous le regne de Charles VI. un Boucher nommé Caboche. Ce châtiment fut suivi d'un édit du roi, daté de 1416, qui supprime la derniere, qu'on appelloit la grande boucherie, confisque ses biens, révoque ses priviléges, & la réunit avec les autres Bouchers de la ville, pour ne faire qu'un corps, ce qui fut exécuté: mais deux ans après, le parti que les Bouchers soûtenoient dans les troubles civils étant devenu le plus fort, l'édit de leur suppression fut révoqué, & la démolition des nouvelles boucheries ordonnée. Une réflexion se présente ici naturellement, c'est que les corps qui tiennent entre leurs mains les choses nécessaires à la subsistance du peuple, sont très-redoutables dans les tems de révolutions, sur-tout si ces corps sont riches, nombreux & composés de familles alliées. Comme il est impossible de s'assûrer particulierement de leur fidélité, il me semble que la bonne politique consiste à les diviser: pour cet effet, ils ne devroient point former de communauté, & il devroit être libre à tout particulier de vendre en étal de la viande & du pain.
La grande boucherie de la porte de Paris fut rétablie; mais on laissa subsister trois de celles qui devoient être démolies; la boucherie de Beauvais, celle du petit-pont, & celle du cimetiere S. Jean: il n'y avoit alors que ces quatre boucheries; mais la ville s'accroissant toûjours, il n'étoit pas possible que les choses restassent dans cet état; aussi s'en forma-t-il depuis 1418, jusqu'en 1540, une multitude d'autres accordées au mois de Février 1587, & enregistrées au Parlement, malgré quelques oppositions de la part de ceux de la grande boucherie qui souffroient à être confondus avec le reste des Bouchers; dont les principales étoient celle de S. Martin des Champs, des religieuses de Montmartre, des religieux de S. Germain-des-Prés, les boucheries du Temple, de Ste Génevieve, &c. sans compter un grand nombre d'étaux dispersés dans les différens quartiers de la ville.
Ces établissemens isolés les uns des autres, donnerent lieu à un grand nombre de contestations qu'on ne parvint à terminer, qu'en les réunissant à un seul corps: ce qui fut exécuté en conséquence de lettres patentes sollicitées par la plûpart des Bouchers même.
Il fut arrêté en même tems 1°. que nul ne sera reçû maître, s'il n'est fils de maître, ou n'a servi comme aprenti & obligé pendant trois ans; & acheté, vendu, habillé & débité chair, pendant trois autres années.
2°. Que les fils de maître ne feront point chef d'oeuvre, pourvû qu'ils ayent travaillé trois à quatre ans chez leurs parens.
3°. Que la communauté aura quatre jurés élus deux à deux, & de deux en deux ans.
4°. Que nul ne sera reçû, s'il n'est de bonnes moeurs.
5°. Qu'un serviteur ne pourra quitter son maître, ni un autre maître le recevoir, sans congé & certificat, sous peine d'un demi-écu d'amende pour le serviteur, & de deux écus pour le maître.
6°. Que celui qui aspirera à la maîtrise, habillera en présence des jurés & maîtres, un boeuf, un mouton, un veau, & un porc.
7°. Que nul ne fera état de maître Boucher, s'il n'a été reçû, & s'il n'a fait le serment.
8°. Qu'aucun Boucher ne tuera porc nourri ès maisons d'huiliers, barbiers ou maladreries, à peine de dix écus.
9°. Qu'aucun n'exposera en vente chair qui ait le fy, sous peine de dix écus.
10°. Que les jurés visiteront les bêtes destinées ès boucheries, & veilleront à ce que la chair en soit vénale, sous peine d'amende.
11°. Que s'il demeure des chairs, du jeudi au samedi, depuis Pâques jusqu'à la S. Remi, elles ne pourront être exposées en vente, sans avoir été visitées par les Bouchers, à peine d'amende.
12°. Que ceux qui sont alors Bouchers, continueront, sans être obligés à expérience & chef-d'oeuvre.
13°. Que les veuves joüiront de l'état de leur mari, & qu'elles n'en perdront les priviléges, qu'en épousant dans un autre état.
14°. Que les enfans pourront succéder à leur pere, sans expérience ni chef-d'oeuvre, pourvû qu'ils ayent servi sous lui pendant trois ans.
15°. Que les enfans de maître ne pourront aspirer à maîtrise avant dix-huit ans.
16°. Que les autres ne pourront être reçûs avant vingt-quatre.
De la Police des étaux. Lorsque les Bouchers furent tentés de quitter leur profession & de loüer leurs étaux, on sentit bien que plus ce loyer seroit fort, plus la viande augmenteroit de prix; inconvénient auquel la police remédia en 1540, en fixant le loyer des étaux à seize livres parisis par an. Il monta successivement; & en 1690, il étoit à neuf cents cinquante livres. Mais la situation, l'étendue, la commodité du commerce, ayant mis depuis entre les étaux une inégalité considérable, la sévérité de la fixation n'a plus de liéu, & les propriétaires font leurs baux comme ils le jugent à propos. Il est seulement défendu de changer les locataires, de demander des augmentations, de renouveller un bail, ou de le transporter, sans la permission du magistrat de police.
Il est aussi défendu d'occuper un second étal, sous un nom emprunté dans la même boucherie, & plus de trois étaux dans toute la ville.
De l'achat des bestiaux. La premiere fonction du Boucher après sa réception, est l'achat des bestiaux: les anciens dispensoient les Bouchers des charges onéreuses & publiques; toute la protection dont ils avoient besoin leur étoit accordée; on facilitoit & l'on assûroit leur commerce autant qu'on le pouvoit. Si nos Bouchers n'ont pas ces avantages, ils en ont d'autres: un des principaux, c'est que leur état est libre; ils s'engagent avec le public tous les ans aux approches de Pâques; mais leur obligation finit en Carême.
La police de l'achat des bestiaux se réduit à quatre points: 1°. quels bestiaux il est permis aux Bouchers d'acheter: 2°. en quels lieux ils en peuvent faire l'achat: 3°. comment ils en feront les payemens: 4°. la conduite des bestiaux des marchés à Paris, & leur entretien dans les étables.
Autrefois les Bouchers vendoient boeuf, veau, mouton, pore, agneau, & cochon de lait.
Des tueries ou échaudoirs. On a senti en tout tems les avantages qu'il y auroit pour la salubrité de l'air & la propreté de la ville, à en éloigner un grand nombre de professions; & l'on a toûjours prétendu que le projet d'établir des tueries sur la riviere, le lieu qui leur convient le plus, n'étoit bon qu'en spéculation. M. le commissaire de la Mare n'a point pris parti sur cette question; il s'est contenté de rapporter les raisons pour & contre.
Il observe 1°. que la translation des tueries du milieu de la ville aux extrémités des faubourgs, a été ordonnée par plusieurs arrêts, & qu'elle a lieu à Lyon, Moulins, Tours, Laval, Nantes, & d'autres villes.
2°. Que les embarras & même les accidens causés par les gros bestiaux dans les rues de la ville, semblent l'exiger.
3°. Que ce projet s'accorde avec l'intérêt & la commodité du Boucher & du public: du Boucher, à qui il en coûteroit moins pour sa quotité dans une tuerie publique, que pour son loyer d'une tuerie particuliere: du public, qui se ressentiroit sur le prix de la viande de cette diminution de frais.
4°. Qu'il est desagréable de laisser une capitale infectée par des immondices & du sang qui en corrompent l'air, & la rendent mal saine, & d'un aspect dégoûtant.
Malgré la justesse de ces observations, je croi que dans une grande ville sur-tout, il faut que les boucheries & les tueries soient dispersées. On peut en apporter une infinité de raisons: mais celle qui me frappe le plus, est tirée de la tranquillité publique. Chaque Boucher a quatre garçons; plusieurs en ont six: ce sont tous gens violens, indisciplinables, & dont la main & les yeux sont accoûtumés au sang. Je croi qu'il y auroit du danger à les mettre en état de se pouvoir compter; & que si l'on en ramassoit onze à douze cents en trois ou quatre endroits, il seroit très-difficile de les contenir, & de les empêcher de s'entrassommer: mais le tems amene même des occasions où leur fureur naturelle pourroit se porter plus loin. Il ne faut que revenir au regne de Charles VI. & à l'expérience du passé, pour sentir la force de cette réflexion, & d'une autre que nous avons faite plus haut. Loin de rassembler ces sortes de gens, il me semble qu'il seroit du bon ordre & de la salubrité, qu'ils fussent dispersés un à un comme les autres marchands.
De la vente des chairs. La bonne police doit veiller à ce que la qualité en soit saine, le prix juste, & le commerce discipliné.
En Grece, les Bouchers vendoient la viande à la livre, & se servoient de balance & de poids. Les Romains en userent de même pendant long-tems: mais ils assujettirent dans la suite l'achat des bestiaux & la vente de la viande, c'est-à-dire le commerce d'un objet des plus importans, à la méthode la plus extravagante. Le prix s'en décidoit à une espece de sort. Quand l'acheteur étoit content de la marchandise, il fermoit une de ses mains; le vendeur en faisoit autant: chacun ensuite ouvroit à la fois & subitement, ou tous ses doigts ou une partie. Si la somme des doigts ouverts étoit paire, le vendeur mettoit à sa marchandise le prix qu'il vouloit: si au contraire elle étoit impaire, ce droit appartenoit à l'acheteur. C'est ce qu'ils appelloient micare; & ce que les Italiens appellent encore aujourd'hui joüer à la moure. Il y en a qui prétendent que la mication des boucheries Romaines se faisoit un peu autrement: que le vendeur levoit quelques-uns de ses doigts; & que si l'acheteur devinoit subitement le nombre des doigts ouverts ou levés, c'étoit à lui à fixer le prix de la marchandise, sinon à la payer le prix imposé par le vendeur.
Il étoit impossible que cette façon de vendre & d'acheter n'occasionnât bien des querelles. Aussi fut-on obligé de créer un tribun & d'autres officiers des boucheries; c'est-à-dire d'augmenter l'inconvénient; car on peut tenir pour maxime générale, que tant qu'on n'aura aucun moyen qui contraigne les hommes en place à faire leur devoir, c'est rendre un desordre beaucoup plus grand, ou pour le présent ou pour l'avenir, que d'augmenter le nombre des hommes en place.
La création du tribun & des officiers des boucheries ne supprima pas les inconvéniens de la mication: elle y ajoûta seulement celui des exactions, & il en fallut revenir au grand remede, à celui qu'il faut employer en bonne police toutes les fois qu'il est praticable, la suppression. On supprima la mication & tous les gens de robe qu'elle faisoit vivre. L'ordonnance en fut publiée l'an 360, & gravée sur une table de marbre, qui se voit encore à Rome dans le palais Vatican. C'est un monument très-bien conservé. Le voici.
Ex auctoritate Turci Aproniani, V. C. proefecti urbis.
Ratio docuit, utilitate suadente, consuetudine micandi summotâ, sub exagio potius pecora vendere quam digitis concludentibus tradere; & adpenso pecore, capite, pedibus & sevo lactante (mactanti) & subjugulari (subjugulanti) lanio cedentibus, reliqua caro cum pelle & iteraneis proficiat venditori, sub conspectu publico fide ponderis comprobatâ, ut quantum caro occisi pecoris adpendat & emptor norit & venditor, commodis omnibus, & proedâ damnatâ quam tribunus officium cancellarius & scriba de pecuariis capere consueverant. Quoe forma interdicti & dispositionis, sub gladii periculo perpetuo, custodienda mandatur.
« La raison & l'expérience ont appris qu'il est de l'utilité publique de supprimer l'usage de la mication dans la vente des bestiaux, & qu'il est beaucoup plus à propos de la faire au poids que de l'abandonner au sort des doigts: c'est pourquoi, après que l'animal aura été pesé, la tête, les piés & le suif appartiendront au Boucher qui l'aura tué, habillé & découpé; ce sera son salaire. La chair, la peau & les entrailles seront au marchand Boucher vendeur, qui en doit faire le débit. L'exactitude du poids & de la vente ayant été ainsi constatées aux yeux du public, l'acheteur & le vendeur connoîtront combien pese la chair mise en vente, & chacun y trouvera son avantage. Les Bouchers ne seront plus exposés aux extorsions du tribun & de ses officiers; & neus voulons que cette ordonnance ait lieu à perpétuité, sous peine de mort ».
Charlemagne parle si expressément des poids & du soin de les avoir justes, qu'il est certain qu'on vendoit à la livre dans les premiers tems de la monarchie. L'usage varia dans la suite, & il fut permis d'acheter à la main. La viande se vend aujourd'hui au poids & à la main, & les Bouchers sont tenus d'en garnir leurs étaux, selon l'obligation qu'ils en ont contractée envers le public, sous peine de la vie.
Les Bouchers sont du nombre de ceux à qui il est permis de travailler & de vendre les dimanches & fêtes: leur police demande même à cet égard beaucoup plus d'indulgence que celle des Boulangers, & autres ouvriers occupés à la subsistance du peuple. D'abord il leur fut enjoint d'observer tous les dimanches de l'année, & d'entre les fêtes celles de Pâques, de l'Ascension, de la Pentecôte, de Noël, de l'Epiphanie, de la Purification, de l'Annonciation, de l'Assomption, de la Nativité de la Vierge, de la Toussaint, de la Circoncision, du Saint-Sacrement, & de la Conception. Dans la suite, il leur fut permis d'ouvrir leurs étaux les dimanches depuis Pâques jusqu'à la Saint-Remi: le terme fut restraint, étendu, puis fixé au premier dimanche d'après la Trinité jusqu'au premier dimanche de Septembre inclusivement. Pendant cet intervalle ils vendent les dimanches & les fêtes.
Ces marchands sont encore assujettis à quelques autres regles de police, dont il sera fait mention ailleurs. Voyez les articles TUERIE, VIANDE, ÉCHAUDOIR, SUIF, ÉTAL , &c.
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BOUCHERIE | s. f. (Police anc. & mod.) c'étoit chez les Romains, sous le regne de Néron, un grand bâtiment public élevé avec magnificence, où des marchands distribuoient la viande aux habitans. C'est de notre tems & dans nos villes de France, une rue infectée, où des gens chargés du même commerce, ont leurs étaux. Voyez ÉTAL & BOUCHER.
Il y a aussi dans les maisons nombreuses attenant les grandes cuisines, une piece qui est destinée à contenir les grosses viandes, & qu'on appelle boucherie. Il faut avoir soin de n'y pas laisser un grand jour, d'y tenir toujours la viande suspendue, & d'y avoir une balance ou romaine pour la peser, avec une table & plusieurs tablettes.
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BOUCHER | v. act. On dit, en terme de Dorure, boucher d'or moulu, pour dire ramender avec de l'or moulu les petits défauts qu'on trouve encore à l'or après qu'on l'a bruni. Cet or moulu se met dans une petite coquille avec un peu de gomme arabique; & il n'y a point de meilleur moyen pour faire un ouvrage propre, pourvû que l'endroit gâté ne soit pas considérable.
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BOUCHETURE | s. f. en terme de Coûtume, est tout ce qui sert de clôture à un champ, un pré, une terre labourable, ou tous autres héritages, à l'effet d'empêcher les bêtes d'y entrer; comme haies vives, palissades, échaliers & autres. En pays de pâturage il est bien expressément défendu d'enlever les bouchetures. (H)
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BOUCHIN | s. m. (Marine.) On entend par ce mot la plus grande largeur du vaisseau de dehors en dehors. C'est la partie la plus large du corps du vaisseau, ce qui se trouve toûjours à stribord & à basbord du grand mât, à cause que le maître ban & la maîtresse côte sont en cet endroit. Quand on parle de la largeur du vaisseau de dedans en-dedans, elle s'exprime par la longueur du ban ou barrot; & l'on dit, ce vaisseau a tant de piés de ban ou de barrot. Lorsqu'on dit qu'un bâtiment est plus court de varangue & plus petit de bouchin, c'est-à-dire qu'il est plus rond par la quille, & plus étroit par le bordage. (Z)
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BOUCHOIR | s. m. c'est ainsi que les Boulangers appellent le couvercle de la bouche de leur four. Il est de fer; il a une poignée: quant à sa figure, c'est un grand segment de cercle, ou la figure de la bouche du four.
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BOUCHON | s. m. (Commerce.) nom que l'on donne à des paquets de laine d'Angleterre, & qui leur vient de la maniere dont ils sont contournés.
BOUCHON, (Jardinage.) on donne ce nom à ces paquets de toile filée ou formée par les chenilles, qu'on apperçoit à l'extrémité des arbres & des arbrisseaux, sur-tout en hyver quand il n'y a plus de feuilles, & dans lesquelles ces insectes se conservent pendant cette saison. On détruit les bouchons le plus exactement qu'on peut.
BOUCHON, (Manege.) c'est un tortillon de paille ou de foin qu'on fait sur le champ, pour frotter le corps d'un cheval, sur-tout quand il a chaud.
Bouchorner un cheval, c'est le frotter avec le bouchon. (V)
BOUCHON de contre-potence, signifie, parmi les Horlogers, une petite piece de laiton, dont une partie, qui est comme un gros pivot, entre à frottement dans le trou de la contre-potence d'une montre. Voy. b, fig. 44. Pl. X. de l'Horlogerie.
Cette piece reçoit un des pivots de la roue de rencontre dans un petit trou, que les habiles Horlogers font ordinairement avec un poinçon; parce qu'il faut qu'il ait peu de profondeur, que le fond en soit plat, & qu'il soit, ainsi que les parois, bien écroüi & bien poli.
Le trou de la contre-potence est rond, pour qu'on puisse y faire tourner le bouchon; ce qui est nécessaire afin de pouvoir donner à la roue de rencontre la situation convenable, en variant par ce mouvement la position du trou du bouchon. V. CONTRE-POTENCE, ROUE DE RENCONTRE, POTENCE , &c. (T)
BOUCHONS, s. m. pl. Les ouvrieres occupées au tirage de la soie donnent ce nom à des inégalités & grosseurs qui se rencontrent dans le fil au sortir de dessus le cocon & de dedans la bassine; défauts qui en rendent le tirage plus difficile, & la soie tirée moins parfaite.
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BOUCHOT | s. m. (Pêche.) parc que l'on construit sur les greves, ou aux bords de la mer, pour y arrêter le poisson.
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BOUCLE | BOUCLE, s. f. (Hist. anc.) Les anciens avoient des boucles de plusieurs sortes: les unes servoient à l'Architecture; d'autres à la Chirurgie. Les Musiciens & les Comédiens avoient les leurs: elles étoient également d'usage aux hommes, aux femmes, aux Grecs, aux Romains, & aux autres nations, pour attacher les tuniques, les chlamydes, les lacernes, les pénules, &c. Elles avoient presque toutes la forme d'un arc avec sa corde. Il y avoit à chaque côté de l'habit, à l'endroit où on l'attachoit, une piece de métal, d'or, d'argent, ou de cuivre. La partie de la boucle qui formoit comme la corde de l'arc, étoit une aiguille. Cette aiguille passoit comme un crochet àtravers des trous pratiqués à la piece de métal, & suspendoit la partie de l'habit tantôt sur une épaule, tantôt sur l'autre. On en trouvera la figure dans nos Planches d'Antiquités.
BOUCLE, (Marine) mettre un matelot sous boucle, ou à la boucle; le tenir sous boucle: ce terme signifie clé ou prison. Mettre un matelot sous boucle, c'est le mettre sous clé, le tenir en prison. (Z)
BOUCLES, en Architecture, sont de petits ornemens en forme d'anneaux, lacés sur une mouline ronde, comme baguette ou astragale. (P)
BOUCLES D'OREILLES, en terme de Metteur-en-oeuvre, est une sorte de bijou de femme, quelles portent à leurs oreilles. Il y en a de plusieurs especes, qui prennent pour la plûpart leur nom de la figure dont elles sont faites. On dit boucles à quadrille simple ou double; boucles entourées simples ou doubles; boucles à dentelle; boucles de nuit, &c. Voyez ces mots à leur article.
BOUCLES À QUADRILLE, en terme de Metteur-enoeuvre, sont des boucles composées de quatre pierres ou de neuf, arrangées de maniere qu'elles forment un quarré régulier. Le quadrille double est celui où le nombre des pierres est multiplié au double. Il y a aussi des quadrilles entourés V. ENTOURÉ & ENTOURAGE.
BOUCLES DE NUIT, en terme de Metteur-en-oeuvre, sont des boucles composées de quatre pierres, dont les deux plus grosses sont placées au-dessus l'une de l'autre, celle d'en-bas allant en diminuant en façon de poire, & les deux autres latéralement à l'endroit où celles-ci se joignent.
BOUCLES DE BRACELET, est une espece d'attache qui n'a qu'un arguillon sans chappe, & qui est précédée d'une barriere, autour de laquelle on tourne le ruban des bracelets, qui s'arrête enfin par un trefle. Voyez BARRIERE & TREFLE.
BOUCLES, en Serrurerie ou en Fonderie, ce sont ces anneaux ronds de fer ou de bronze, qui sont attachés aux portes cocheres, & qu'on tire avec la main pour les fermer. Il y en a de riches, de moulure & de sculpture.
BOUCLE GIBECIERE, c'est le nom qu'on donne à ces heurtoirs si bien travaillés qu'on voit aux portes cocheres. On leur donne le nom de gibeciere, parce que leur contour imite celui de la gibeciere.
BOUCLE, en terme de Rafineur de sucre, est en effet une boucle ou anneau de fer emmanché dans un morceau de bois de deux piés ou environ de longueur. On s'en sert pour tirer les formes tombées dans le bac à formes, voyez BAC À FORMES; ce qui n'arrive que lorsquelles se séparent du reste qui y est empilé. On s'y prend de maniere à faire entrer la tête de la forme dans la boucle, & on la retire alors sans risque.
BOUCLÉ, adj. (Marine.) se dit d'un port. Un port bouclé, c'est-à-dire fermé, & dont on n'en veut rien laisser sortir. (Z)
BOUCLÉ, (terme de Blason.) il se dit en parlant du collier d'un levrier ou d'un autre chien qui a des boucles.
Le Febvre de Laubiere, d'asur au levrier rampant d'argent, accolé de gueules, bordé & bouclé d'or. (V)
BOUCLÉ, en Passementerie & Soierie, s'entend du velours à boucles qui a été fait à l'épingle, pour le distinguer du velours coupé, que l'on appelle ras, & qui est fait au couteau. Voyez VELOURS.
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BOUCLER | une jument, (Maréchallerie & Manege.) c'est lui fermer l'entrée du vagin au moyen de plusieurs aiguilles de cuivre, dont on perce diamétralement les deux levres, & qu'on arrête des deux côtés. On se sert aussi d'anneaux de cuivre, le tout afin qu'elle ne puisse point être couverte. (V)
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BOUCLETTE | s'employe en terme de Chasse: on dit une pentiere à bouclette, parce qu'elle a dans le haut de petites boucles attachées comme on en voit à un rideau de lit. Voyez PENTIERE & BÉCASSE.
BOUCLETTES, se dit, en Passementerie, de l'endroit où la ficelle, soit des lisses, soit des hautes-lisses, est traversée dans le milieu par une autre ficelle qui en fait la partie inférieure. L'usage de ces bouclettes est tel, que si c'est une haute-lisse, la rame étant passée dans la bouclette, & se trouvant arrêtée par la jonction des deux parties de ficelle dont on vient de parler, elle est contrainte de lever lorsque la haute-lisse leve; & que si c'est une lisse, les soies de la chaîne étant passées dans les bouclettes de ces lisses, les soies levent aussi quand les bouclettes levent.
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BOUCLIER | (Art. milit.) espece d'armure défensive, dont les anciens se servoient pour se couvrir des coups de l'ennemi.
Le bouclier se passoit dans le bras gauche. Sa figure a fort varié dans toutes les nations, aussi-bien qu'en France. Il y en avoit de ronds ou ovales, qu'on appelloit des rondelles. Il y en avoit d'autres presque quarrés, mais qui vers le bas s'arrondissoient ou s'allongeoient en pointe. Ceux des piétons étoient beaucoup plus longs que ceux de la cavalerie, & quelques-uns couvroient presque tout le corps. Ces derniers boucliers s'appelloient aussi targes, targes, nom qui se donnoit encore à d'autres boucliers, dont on ne se servoit pas pour combattre, mais pour se couvrir; par exemple, sur le bord d'un fossé d'une ville, contre les fleches des assiégés. Daniel, Histoire de la Milic. Franç. (Q)
Selon plusieurs savans, le mot bouclier est dérivé de buccularium ou buccula, parce qu'on représentoit sur les boucliers des têtes ou gueules de gorgone, de lion, ou d'autres animaux. Le bouclier d'Achille & celui d'Enée sont décrits dans l'Iliade & dans l'Éneide. Ovide dit que celui d'Ajax étoit couvert de sept peaux.
Cléomenes établit à Sparte l'usage des boucliers à anses, fortement attachées sous le bouclier, & par lesquelles on passoit le bras. Ils étoient & plus commodes & plus sûrs que ceux qu'on portoit auparavant, qui ne tenoient qu'à des courroies attachées avec des boucles.
Aux boucliers des anciens ont succédé chez les modernes les écus, rondaches ou rondelles, boucliers ronds & petits, que les Espagnols portent encore avec l'épée quand ils marchent de nuit.
BOUCLIERS VOTIFS, espece de disques de métal, qu'on consacroit aux dieux, & que l'on suspendoit dans leurs temples, soit en mémoire d'une victoire ou d'un héros, soit en action de graces d'une victoire remportée sur les ennemis, dont on offroit même les boucliers pris sur eux comme un trophée. C'est ainsi que les Athéniens suspendirent les boucliers pris sur les Medes & les Thébains, avec cette inscription: Les Athéniens ontpris ces armes sur les Medes & sur les Thébains. Les boucliers votifs différoient des boucliers ordinaires, en ce que les premiers étoient ordinairement d'or ou d'argent, & les autres d'osier & de bois revêtu de cuir. On les suspendoit aux autels, aux voûtes, aux colonnes, aux portes des temples. Les Romains emprunterent cet usage des Grecs, & de-là les ancilia ou boucliers sacrés de Numa. Lorsque Lucius Martius eut défait les Carthaginois, on suspendit dans le capitole un bouclier d'argent pesant cent trente-huit livres, qui se trouva dans le butin. Celui que les Espagnols avoient offert à Scipion, en reconnoissance de sa modération & de sa générosité, & qu'on voit dans le cabinet du Roi, est d'argent & pese quarantedeux marcs. Sous les empereurs, cette coûtume dégénera en flatterie, puisqu'on consacra des boucliers aux empereurs mêmes, honneur qui, avant eux, n'avoit été accordé qu'aux dieux. On nommoit en général ces boucliers, clypei, disci, cicli, aspides; nom générique, qui convenoit également aux boucliers qu'on portoit à la guerre: mais on les appelloit en particulier pinaces, tableaux, parce qu'on y représentoit les grands hommes & leurs belles actions: stelopinakia, tableaux attachés à des colonnes, parce qu'on les y suspendoit souvent: protoniai, bustes, parce que celui du héros en étoit pour l'ordinaire le principal ornement: sthetaria, dérivé du Grec ςϖθοζ, pectus, parce que les héros n'y étoient représentés que jusqu'à la poitrine. Quoiqu'il fût permis aux particuliers d'ériger ces monumens dans les chapelles particulieres, ils ne pouvoient cependant en placer un seul dans les temples sans l'autorité du sénat. Mémoires de l'Acad. tom. I.<\a> (G)
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BOUDIN | s. m. (Cuisine.) espece de mets qui se fait avec le sang du cochon, sa panne, & son boyau. Lorsque le boyau est bien lavé, on le remplit de sang de cochon, avec sa panne hachée par morceaux, & le tout assaisonné de poivre, sel, & muscade. On lie le boudin par les deux bouts, & on le fait cuire dans l'eau chaude, observant de le piquer de tems en tems à mesure qu'il se cuit, de peur qu'il ne s'ouvre & ne se répande. Quand il est cuit, on le coupe par morceaux & on le fait rôtir sur le gril. Ce boudin s'appelle boudin noir.
Le boudin blanc se fait de volaille rôtie & de panne de cochon hachées bien menu, arrosées de lait, saupoudrées de sel & de poivre, & mêlées avec des jaunes d'oeuf. On remplit de cette espece de farce le boyau du cochon, qu'on fait cuire ensuite dans l'eau chaude. Quand on le veut manger on le rôtit sur le gril entre deux papiers, & on le sert chaud.
BOUDIN (ressort à), c'est un ressort en spiral, dont nous parlerons à l'article RESSORT.
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BOUDINE | s. m. se dit dans les Verreries en plat, d'une éminence ou bouton que le gentilhomme bossier forme au bout de la bosse destinée à faire un plat. C'est par cette éminence que cet ouvrier reprend la bosse pour ouvrir le plat. Voyez BOSSIER, BOSSE, & VERRERIE EN PLAT.
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BOUDINIERE | s. f. instrument de Chaircuitier; c'est un petit instrument de cuivre ou de fer-blanc, dont ces gens se servent pour remplir les boyaux dont ils font le boudin.
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BOUDINURE | DE L'ARGANEAU, EMBOUDINURE, (Marine.) c'est un revêtement ou une enveloppe dont on garnit l'arganeau de l'ancre, & qui se fait avec de vieux cordages qu'on met tout autour, pour empêcher le cable de se gâter ou se pourrir. (Z)
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BOUDRI | (Géog.) petite ville sur une hauteur, dans le comté de Neufchâtel, en Suisse.
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BOUE | s. m. se dit en général de cette ordure qui s'engendre dans les rues & les places publiques, & que ceux qui veillent à la propreté d'une ville, sont enlever dans des tombereaux.
BOUE, (Maréchallerie.) On dit que la boue souffle au poil, lorsque par quelque blessure qu'un cheval aura cue au pié, la matiere de la suppuration paroit vers la couronne. (V)
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BOURDEAUX | ou BORDEAUX, (Géog.) grande, belle & riche ville de France sur la Garonne, capitale de la Guienne. Son archevêque prend le titre de primat des Aquitaines. Il y a un parlement & beaucoup d'autres tribunaux; un hôtel des monnoies, & trois forts: le principal est le château Trompette; il commande au port, qui est un des plus beaux du royaume. Lon. 16d. 55'. 52". lat. 44d. 50'. 18".
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BOURDEILLE | (Géog.) petite ville de France dans le Périgord.
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BOURDELAGE | s. m. terme de Coûtume, est la même chose que bordelage. Voyez ce dernier.
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BOURDELIER | se dit du seigneur à qui appartient le droit de bourdelage ou bordelage. On le dit aussi de l'héritage concédé à ce titre, & du contrat de concession: héritage bordelier, contrat bordelier. (H)
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BOURDILLON | s. m. (Tonnelier.) bois de chêne débité, refendu, & propre à faire des douves de tonneau. Voyez MAIRIN.
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BOUQUETIN | BOUC-ESTAIN, STEINBOK, IBEX, s. m. (Hist. nat. Zoolog.) animal quadruped sauvage, du genre des boucs. Il est à-peu-près de la grandeur de la chevre domestique, & il ressemble en quelque façon au cerf; car son poil est court & de couleur fauve. Il a les jambes menues, la barbe longue & roire, la tête petite, & des cornes de quatre ou cinq piés de longueur, grosses & noüeuses: chaque noeud est le produit d'une année. Ray, Anim. quad. synop. Voyez QUADRUPEDE. (I)
* Le sang du bouquetin, mais celui sur-tout, dit Van-Helmont, qu'on a tiré de ses testicules, desseché au soleil, est un remede excellent dans la fluxion de poitrine. J'en ai entendu réciter des effets si merveilleux, qu'il est étonnant qu'on nen fasse pas plus d'usage. On l'ordonne depuis vingt grains jusqu'à deux dragmes.
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BOURDON | s. m. bombylius, (Hist. nat. Insectol.) insecte du genre des abeilles. Voyez ABEILLE. Il a un aiguillon & une trompe; il tire des fleurs son miel & de la cire brute. Les bourdons que l'on voit le plus souvent sont plus gros que les abeilles ordinaires, ils font plus de bruit en volant. Ces mouches sont couvertes de poils longs & touffus, qui les font paroître plus grosses qu'elles ne le sont réellement. Elles ont différentes couleurs: il y en a qui n'ont que les anneaux postérieurs de couleur canelle; le reste du corps est noir. Dans d'autres, le corcelet est couvert de poils blancs, & le corps est traversé par une raie jaune, qui est suivie d'une raie blanche. On en voit qui ont de plus une bande transversale de couleur de citron, vers le milieu du corps. Dans quelques-uns la partie antérieure du corcelet est bordée de poils blancs ou jaunes, qui forment une espece de collier. Dans d'autres, le corcelet est couvert de poils blancs; il a sur le corps une large raie de poils jaunes, ensuite une bande noire, & enfin une bande blanchâtre. Il se trouve des bourdons de couleur blonde plus ou moins foncée; les poils du dessous du corps sont de couleur de citron fort pâle; ceux du dessus du corcelet sont un peu roux. Ces couleurs varient: mais celle des jambes est toûjours noire.
Il y a des bourdons qui n'ont des poils longs que sur le corcelet: on en trouve de tels en Egypte, dont les poils sont d'une belle couleur d'olive, & les ailes tirent sur le violet; & d'autres qui ont le dessus du corcelet couvert de longs poils, d'une belle couleur de citron, & les anneaux du corps ras, & même lisses & luisans. Ces anneaux sont noirs avec quelques [p. 368] teintes de violet, & les ailes sont d'une couleur violette moins noire.
Dans l'espece des bourdons qui ont des longs poils sur le corcelet & sur le corps, la même femelle produit trois sortes de bourdons de différentes grandeurs: les plus grands surpassent de beaucoup les abeilles ordinaires pour la grosseur; ce sont les femelles: les mâles ne sont pas si grands; & les plus petits de tous n'ont point de sexe. Leur grandeur est égale à celle des abeilles, quelquefois elle est moindre.
Les bourdons vivent en société comme les abeilles: mais ils ne sont pas si nombreux; on n'en trouve que cinquante ou soixante réunis ensemble. Ils font des especes de nids pour se loger, & ils les couvrent de mousse: ces nids sont dans les prairies & dans les champs de sainfoin & de luserne; leur diametre est de cinq ou six pouces & plus, & ils sont élevés de quatre à cinq pouces au-dessus de terre. Le meilleur moyen de trouver ces nids, est de suivre les faucheurs, parce qu'ils les découvrent & même les coupent avec la faux. L'extérieur ressemble à une motte de terre couverte de mousse, plus ou moins relevée en bosse. Il y a dans le bas un trou qui sert d'entrée, & souvent on trouve une sorte de chemin d'un pié de long, & une voûte de mousse qui sert d'avenue. Dans certains nids qui ne sont pas encore finis, les bourdons entrent par le dessus. Quand on enleve le dessus du nid qui sert de toict, il en sort quelques mouches; les autres y restent, & il n'arrive pas qu'on en soit piqué, quoiqu'elles ayent des aiguillons. Après avoir enlevé cette couverture, on voit une sorte de gâteau épais plus ou moins grand, mal façonné, & composé de corps oblongs ajustés les uns contre les autres: quelquefois il n'y a qu'un gâteau; d'autres fois il y en a deux ou trois; on voit marcher les bourdons par-dessus & par-dessous: dès qu'on cesse de toucher au nid, les mouches travaillent à le recouvrir; & pour cela elles employent la mousse qu'on a enlevée & jettée à quelque distance: mais au lieu de porter les brins de mousse, elles les poussent, ou pour mieux dire, elles les font glisser peu-à-peu. Toutes travaillent ensemble, les mâles, les femelles, & celles qui ne sont ni mâles ni femelles.
Le bourdon a comme l'abeille deux dents écailleuses très-fortes, dont le bout est large & dentelé: c'est par le moyen de ces dents qu'il coupe la mousse & qu'il l'attire en-arriere sous son corps; ensuite il la fait glisser avec les pattes de devant; les pattes de la seconde paire la font passer plus loin, & les dernieres la poussent aussi loin qu'elles peuvent s'étendre. En répétant cette manoeuvre, ils rassemblent derriere eux un petit tas de mousse. Le même bourdon, ou un autre, reprend ce tas par brins comme le premier, & l'approche du nid; pour cet effet, ils se posent de façon que le nid est en arriere par rapport à eux: chaque fois que le tas de mousse change de place, il parcourt un espace égal à la longueur du bourdon, avec les pattes de derriere étendues. Lorsque ces mouches arrangent la mousse pour former la couverture du nid, elles se servent de leurs dents & de leurs pattes de devant. Cette sorte de toict a un pouce ou deux d'épaisseur, & met le nid à l'abri des pluies ordinaires. Les bourdons qui sont entierement jaunâtres, & ceux sur lesquels le noir domine, & peut-être d'autres, mettent un enduit de cire brute sur toute la surface intérieure du couvert de mousse; ils y forment une sorte de platfond, qui n'a que le double de l'épaisseur d'une feuille de papier ordinaire, mais qui est impénétrable à l'eau: cet enduit lie tous les brins de mousse qui sont à l'intérieur, & rend la couverture plus solide. La matiere de cet enduit a une odeur de cire: mais ce n'est qu'une cire brute & tenace; on peut la pétrir. La chaleur ne la liquéfie, ni ne la ramollit: mais elle s'enflam me. Sa couleur est d'un gris jaunâtre; elle ne s'attache pas aux doigts lorsqu'on la pétrit.
Le nombre & l'étendue des gâteaux augmentent à proportion que le nid est plus ancien. Ces gâteaux sont convexes à l'extérieur, & concaves à l'intérieur: mais leurs surfaces, sur-tout l'inférieure, sont fort inégales. Chaque gâteau est composé, comme il a déjà été dit, de corps oblongs, appliqués les uns contre les autres suivant leur longueur. Ils sont d'un jaune pâle ou blanchâtre. Il y en a de trois grandeurs différentes: les plus gros ont le grand diametre de plus de sept lignes de longueur, & le petit d'environ quatre lignes & demie; dans les plus petits, le grand diametre n'a pas trois lignes. Quelquefois ces corps sont fermés par les deux bouts; d'autres fois la plûpart sont ouverts par le bout inférieur, & vuides: ce sont des coques de soie qui ont été formées par des vers qui s'y sont métamorphosés. Les bourdons qui viennent de ces vers après la métamorphose, laissent les coques ouvertes en en sortant.
Il y a aussi dans les gâteaux de petites masses irrégulieres assez semblables à des truffes, quoique moins dures: on trouve dans chacune un vuide au centre, dans lequel il y a des oeufs d'un beau blanc un peu bleuâtre, longs d'environ une ligne & demie sur un diametre plus court des deux tiers. Le nombre des oeufs n'est pas le même dans chaque masse; il y en a trois, quatre, quinze, vingt, & même trente ensemble: mais lorsqu'il y en a tant, ils sont renfermés dans différentes cavités. La matiere qui environne les oeufs est une pâtée dont se nourrissent les vers, après qu'ils sont éclos. Ces vers sont assez semblables à ceux des abeilles; leur couleur est blanche, & ils ont quelques taches noires sur les côtés: lorsqu'ils ont consommé une partie de leur pâtée, il arriveroit quelquefois qu'ils se feroient jour au-dehors, & qu'ils s'exposeroient trop tôt à l'air, si les bourdons n'avoient soin d'appliquer de nouvelle pâtée sur les endroits trop minces. Toute cette matiere est de la cire brute: on y reconnoît les poussieres des étamines; elles sont humectées par un miel aigrelet. Quoiqu'il se consomme beaucoup de cette pâtée dans les nids, on ne voit que très-rarement les bourdons y revenir chargés de cire; ce qui fait croire qu'ils avalent les étamines pour les digérer, & les dégorger ensuite.
Il y a dans chaque nid trois ou quatre petites cavités, remplies de miel: ce sont des sortes de vases presque cylindriques, au moins aussi grands que les plus grandes coques, faits avec la même matiere qui sert de plafond au nid. On ne sait si ce miel sert à ramollir les étamines pour faire la pâtée. Les faucheurs connoissent ces petits dépôts, & les cherchent pour en boire le miel.
Après avoir enlevé les gâteaux d'un nid, on trouve au bout de huit jours, que les bourdons ont travaillé à en faire de nouveaux: ils commencent par former dans le milieu du nid une petite masse de pâtée de la grosseur d'une noisette, qui est posée sur un lit de mousse, & qui tient à un petit vase plein de miel: c'est sans doute pour recevoir les oeufs de la mere que ce premier travail se fait.
Les vers s'éloignent les uns des autres à mesure qu'ils consument leur pâtée: ainsi lorsqu'ils approchent du tems où ils doivent prendre leur forme de nymphe, ils ont chacun assez d'espace pour filer leur coque. Comme ces coques se trouvent à découvert dans la suite, il est à croire que les bourdons enlevent les restes de pâtée qui sont au-dehors. Tous les vers donnent à leur coque la même position: le grand axe est perpendiculaire à l'horison, & chacun attache la sienne aux coques voisines en la commençant; c'est par cette union que les gâteaux sont formés.
Ces mouches au sortir de leur coque n'ont que des couleurs tendres, qui deviennent plus foncées lorsqu'elles sont exposées au grand air. En ouvrant dans des tems convenables les plus gros bourdons, qui sont les semelles, on trouve dans leur corps un ovaire de chaque côté, & on n'y voit qu'une vingtaine d'oeufs au plus; cependant elles en pondent une plus grande quantité: tous ces oeufs ne sont pas sensibles dans le même tems. On croit qu'un nid de bourdons est commencé par une femelle qui le peuple peu-à-peu: ce qui rend cette opinion très-probable, c'est qu'à la fin de l'hyver on ne voit voler que des bourdons femelles, sans aucuns mâles ni ouvriers. Les petits bourdons ont un aiguillon comme les femelles: les mâles n'en ont point; ils sont de grandeur moyenne. Mais il y a aussi des bourdons de cette même grandeur qui n'ont point de sexe, & que l'on doit regarder comme des ouvriers, de même que les petits: ceux-ci paroissent plus actifs, & les autres plus forts. On a observé entre un bourdon de moyenne taille, qui étoit mâle, & une femelle, un accouplement qui dura près d'une demi-heure. On s'est aussi assûré que les bourdons mâles n'ont point d'aiguillon, & qu'ils ont des parties analogues à celles des mâles de divers insectes.
Les bourdons ont de petits poux; on les voit quelquefois par centaines sur le corcelet, ou sur d'autres parties: ces mêmes poux se trouvent sur les gâteaux des nids. Il y a apparence qu'ils cherchent la liqueur miellée des bourdons pour s'en nourrir.
Les fourmis cherchent la pâtée des bourdons; quelquefois il entre dans leur nid une fourmiliere entiere; & lorsqu'il ne s'y trouve qu'un petit nombre de mouches, elles sont obligées de l'abandonner, ne pouvant pas le défendre. Il s'y forme de gros vers qui manget la pâtée, les vers & les nymphes des bourdons. Il y a aussi des especes de chenilles: mais les animaux qui y font le plus de ravage, sont les rats, les mulots & les foüines.
Les parties intérieures des bourdons sont à-peu-près semblables à celles des abeilles; de même leurs aiguillons & leur venin.
On ne trouve aucuns bourdons dans leurs nids au commencement de Novembre; il est à croire que les mâles & les ouvriers périssent avant l'hyver, & qu'il ne reste que les femelles; celles-ci étant fécondées, suffisent pour perpétuer l'espece. Elles se cachent dans des trous de murs, ou dans des creux en terre jusqu'au printems. Mémoires pour servir à l'hist. des insectes, tom. VI. prem. mém. Voy. INSECTE. (I)
BOURDON, s. m. les Imprimeurs entendent par ce mot, une omission que le compositeur a faite dans son ouvrage, d'un ou de plusieurs mots de sa copie, & même quelquerois de plusieurs lignes. Le compositeur est obligé, en remaniant, de faire entrer les omissions; ce qui souvent lui donne beaucoup de peine, & nuit presque toûjours à la propreté de l'ouvrage. Ce terme fait allusion au grand bâton dont les pélerins se servent pour franchir les fossés. Voyez REMANIER, REMANIEMENT.
BOURDON de 16 piés, ou huit piés bouché; on appelle ainsi dans les Orgues un jeu, dont le plus grand tuyau qui sonne l'ut à la double octave au-dessous de la clé de c sol ut, a huit piés de longueur; ce qui équivaut à un tuyau de 16 piés ouvert, qui est à l'unisson d'un de huit piés bouché. Ce jeu a trois octaves en bois, & celle de dessus en plomb. Voyez la fig. 30, Pl. d'Orgue, qui représente un tuyau de bois des basses, & un tuyau de plomb des dessus. Les tuyaux de bois sont composés de quatre planches assemblées à rainure & languette, les unes dans les autres, & fortement collées, comme la fig. 52 le montre; b, la bouche; 3, la lévre inférieure; 4 ou 0, la levre supérieure; A, le pié; B, la chambre; C, le biseau; E, le tampon, que l'on retire ou que l'on enfonce dans le tuyau pour accorder. La fig. 30. n°. 2. représente un tuyau de plomb des dessus, & a le pié dans les deux figures; c, la bouche; d, les oreilles au moyen desquelles on les accorde; e, coupe du tuyau; b, le biseau, dont le talud regarde en dessus; f, plaque qui ferme le tuyau par dessus & qui y est soudée. Quant à la proportion des parties du tuyau, elle doit être telle qu'il ait de longueur, dix fois sa largeur ou environ; ainsi le tuyau de huit piés doit avoir 9 pouces d'équarrissage intérieurement. Remarquez que la longueur du tuyau se compte depuis la face supérieure du biseau c, jusqu'à la face inférieure du tampon E, & que la haeur de la chambre B, & l'espace pour retirer le tampon E, doivent être pris en sus de cette mesure; tous les tuyaux du bourdon doivent suivre exactement entre eux la proportion du diapason. Voyez DIAPASON, & l'article ORGUE, & la table du rapport de l'étendue des jeux de l'Orgue.
BOURDON de huit piés ou quatre piés bouché, est un jeu d'orgue dont le plus grand tuyau, qui est de quatre piés bouché sonne l'octave au-dessus du bourdon de 16; les basses sont en bois & les tailles en plomb & bouchées à rase, & les dessus à cheminées. Voyez la fig. 32. Pl. d'orgue; A, tuyau des basses; B, tuyau des tailles; e d, les oreilles; 3, la plaque qui bouche le tuyau par en haut; C, tuyau des dessus à oreilles & à cheminées; 4, la plaque qui le ferme, laquelle est percée d'un trou; 2 cheminée qui est soudée sur la plaque 4, comme la fig. C le représente. Voy. les articles Orgue, Diapason, dont tous les tuyaux de ce jeu doivent suivre la proportion.
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BOURDONNÉ | (en termes de Blason) se dit d'une croix dont les branches sont tournées & arrondies en bourdons de pélerins.
Rochas en Provence, d'or à la croix bourdonnée ou pommelée de gueules, au chef d'asur, chargé d'une étoile d'or. (V)
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BOURDONNET | S. m. (terme de Chirurgie) c'est un petit rouleau de charpie de figure oblongue, mais plus épais que large, destiné à remplir une plaie ou un ulcere. Les premiers bourdonnets qu'on introduit dans le fond d'un ulcere profond doivent être liés, afin qu'on puisse les retirer, & qu'ils n'y séjournent point sans qu'on s'en apperçoive. Voyez fig. 8. 9. & 11. Pl. II.
L'usage des bourdonnets & de tous les dilatans peut être fort nuisible ou fort avantageux, selon la façon dont on s'en sert. Si les bourdonnets ferment un ulcere profond comme on ferme une bouteille avec son bouchon, ils s'opposent à l'écoulement des matieres purulentes, & produisent la collection du pus qui corrompt les sucs que la circulation conduit vers l'endroit où il croupit. L'obstacle que les bourdonnets font à l'issue des matieres purulentes peut en causer le reflux dans la masse du sang, où elles occasionnent, pour peu qu'elles soient atteintes de putréfaction, des colliquations fâcheuses qui détruisent la partie rouge de la masse des humeurs, & qui rendent cette masse toute séreuse ; de-là sont produites les évacuations continuelles, qui jettent le corps dans le marasme & dans une extrème foiblesse, qui est enfin suivie de la mort.
Si on remplit un ulcere de bourdonnets durs entassés les uns sur les autres, l'irritation qu'ils causeront aux vaisseaux empêchera le passage des sucs : ils s'arrêtent, s'accumulent & se condensent dans les parois de l'ulcere, & y forment des callosités qui le rendent incurable à moins qu'on n'en détruise les duretés.
Ces inconvéniens bien observés ont fait beaucoup crier contre le tamponage des playes : M. Belloste, dans son Traité du Chirurgien d'Hôpital, s'est élevé contre l'usage des bourdonnets qu'il croit fort nuisibles ; il blâme même l'attention qu'on a de garnir exactement les plaies caverneuses avec des bourdonnets mollets : c'est cependant le seul moyen d'empêcher la collection & le séjour du pus, & d'exclure l'air de leur cavité. La charpie s'imbibe de matieres purulentes, ces matieres se distribuent entre les filets qui les soutiennent, & les empêchent de se rassembler en aucun lieu particulier. La charpie est pour ces matieres, selon l'expression de M. Quesnay, une échelle avec laquelle elles peuvent monter du fond de la plaie, jusqu'à ce qu'elles trouvent une issue pour s'évader, à peu près comme il arrive dans ces distillations qui se font par le moyen d'une languette de drap, où les liqueurs montent jusque par-dessus les bords du vase qui les contient. (Y)
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BOURG | (Hist. anc. & mod.) ce mot vient du mot allemand burg, ville, forteresse & château ; il est fort ancien chez les Allemands, comme on peut le voir dans Vegece au IV. livre de re militari, castellum parvum quem burgum vocant, &c. Du tems des empereurs Carlovingiens, il n'y avoit en Allemagne que fort peu de villes enfermées de murailles ; ce fut Henri l'Oiseleur qui commença à bâtir plusieurs forteresses ou bourgs pour arrêter les incursions fréquentes des Huns ou Hongrois : pour peupler ces nouveaux bourgs, on prenoit un neuvieme des habitans de la campagne, & l'on appelloit burger ou bourgeois, ceux qui demeuroient dans les bourgs ou villes, pour les distinguer des paysans. Aujourd'hui par bourg, en entend un endroit plus considérable qu'un village, mais qui l'est moins qu'une ville.
BOURG-EN-BRESSE, (Géog.) ville de France, capitale de la Bresse, presqu'au centre de cette contrée, sur la riviere de Resousse. Long. 22. 53. 55. lat. 46. 12. 31
BOURG-SUR-MER, ville de France en Guienne, avec un assez beau port, au confluent de la Dordogne & de la Garonne, à 6 lieues de Bourdeaux. Long. 17. lat. 45.
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BOURGANEUF | (Géog.) ville de France dans la Marche, sur la riviere de Taurion, à six lieues de Limoges.
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BOURGEOIS | CITOYEN, HABITANT, (Gramm.) termes relatifs à la résidence que l'on fait dans un lieu. Le bourgeois est celui dont la résidence ordinaire est dans une ville ; le citoyen est un bourgeois considéré relativement à la société dont il est membre ; l'habitant est un particulier considéré relativement à la résidence pure & simple. On est habitant de la ville, de la province, ou de la campagne : on est bourgeois de Paris. Le bourgeois de Paris qui prend à coeur les intérêts de sa ville contre les attentats qui la menacent, en devient citoyen. Les hommes sont habitans de la terre. Les villes sont pleines des bourgeois ; il y a peu de citoyens parmi ces bourgeois. L'habitation suppose un lieu ; la bourgeoisie suppose une ville ; la qualité de citoyen, une société dont chaque particulier connoît les affaires & aime le bien, & peut se promettre de parvenir aux premieres dignités.
BOURGEOIS, on appelle ainsi, en terme de Marine, le propriétaire d'un navire, soit qu'il l'ait acheté, soit qu'il l'ait fait construire. Si plusieurs marchands s'unissent pour faire l'acquisition d'un navire, on les appelle co-bourgeois.
Ce sont les bourgeois des vaisseaux qui les équipent, qui les frettent, & qui font avec ceux avec qui ils les louent cette espece de traité, qu'en terme de Marine on appelle charte-partie. Voyez CHARTE-PARTIE.
Quelques auteurs prétendent que le mot de bourgeois est venu du style de la hanse Teutonique, à cause qu'en Allemagne il n'y a que les bourgeois des villes anséatiques qui puissent avoir ou faire construire des vaisseaux ; ce qui fait qu'en ce pays-là on appelle bourgeois tout seigneur & propriétaire de navire : & l'Allemagne a emprunté vraisemblablement ce nom des Romains, qui pendant le meilleur tems de la république ne permettoient pas aux patrices ou sénateurs de posséder ni tenir en propre aucun navire un peu considérable, mais seulement de petites barques ; les simples citoyens ayant seuls le droit d'armer de grands vaisseaux. (Z)
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BOURGEO | ou BOUTON, s. m. (Jardin) c'est une éminence qu'on remarque aux branches des arbres, ou un oeil animé qui produit dans la suite une jeune branche ; les feuilles y sont arrangées & couchées avec beaucoup d'industrie. (K)
Il paroît que le terme de bourgeon s'employe mieux pour la vigne, le verjus, le chasselas, le muscat. Voyez BOUTON. (K)
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BOURGES | (Géog.) ancienne & grande ville de France, capitale du Berry. Elle est sur les rivieres d'Auron & d'Yevre, presqu'au centre de toute la France. Long. 20. 3. 26. lat. 47. 4. 58.
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BOURGOGNE | S. f. (Géog.) province considérable de France, avec titre de duché. Elle est située entre le Bourbonnois, le Nivernois, & la Franche-Comté. Son commerce principal est en vin. Les plus vantés sont ceux de Dijon, de Nuis, de Beaune, de Pomarre, de Chassagne, de Mâcon, de Tonnerre, d'Auxerre, & autres endroits. Ils se transportent dans toutes les provinces du royaume, & dans toutes les contrées de l'Europe. Il vient encore des grains, des foins, des bestiaux, des fers, & du bois de chauffage, du bailliage de Dijon. Il y a aussi des foins & des grains dans le bailliage de S. Jean de Laune. Celui d'Auxonne fait le commerce de ses blés & de ceux du Bassigny. La Saone est très-favorable à celui des bois. Le territoire d'Autun est ingrat. Celui du bailliage de Châlons est très-fertile en vin, blé, & autres grains dont la Saone favorise le transport. Avalon a des grains, des vins, des bestiaux & des bois. Il ne sort guere d'Auxerre que ses vins. Le Charolois fournit des bois & des bestiaux. C'est peu de chose que le commerce du comté de Bar-sur-Seine & de la Bresse, si l'on en excepte les bestiaux de cette derniere contrée. Le Bugey fait le même commerce. Le commerce du pays de Gex n'est presque rien. Il se fait dans la province entiere des draperies à Dijon, à Vitaux, à Merci, à Semur, Saulieu, Seignelay, &c.
BOURGOGNE, (le cercle) c'est un des dix cercles de l'empire, qui comprenoit autrefois la Franche-Comté & les dix-sept provinces des Pays-bas, mais qui est actuellement entierement démembré de l'Empire. C'étoit le roi d'Espagne qui étoit directeur de ce cercle, du tems que ce royaume appartenoit à des princes de la maison d'Autriche.
BOURGOGNE, (Comté de) voyez FRANCHE-COMTE.
BOURGOGNE, (LA) s. f. nom d'une danse Françoise qui fut faite pour M. le duc de Bourgogne.
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BOURGOIN | (Géog.) petite ville du Viennois en Dauphiné. Il s'y fait un grand commerce de chanvre.
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BOURGUEMESTRE | S. m. (Hist. mod.) Ce mot est formé de deux termes Flamands, burger, bourgeois, & meester, maître ; c'est-à-dire, le maître & le protecteur des bourgeois. Quelques-uns l'expriment en Latin par consul, d'autres par senator. M. Bruneau dit que Bourguemestre en Hollande répond à ce qu'on appelle alderman & sherif en Angleterre ; attourné à Compiegne ; capitoul à Toulouse ; consul en Languedoc ; mais cela n'est pas exact ; l'alderman des Anglois répond au scheepen ou échevin des Hollandois.
Les bourguemestres sont choisis du nombre des échevins, & ne sont ordinairement en place que pour un ou deux ans.
C'est ainsi qu'on appelle les principaux magistrats des villes de Flandre, de Hollande & d'Allemagne : ils sont comme les maires & les gouverneurs ; ils donnent des ordres pour le gouvernement, l'administration des finances, la justice & la police des villes. Le pouvoir & les droits des bourguemestres ne sont pas égaux par-tout : chaque ville a ses lois & ses statuts particuliers.
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BOURGUIGNONES | (LOIS) Jurisprud. ce sont celles qui étoient en usage chez les Bourguignons avant Gondebaud l'un de leurs derniers rois, qui les réforma & en fit une espece de code, qu'on appella de son nom lois gombettes. Voyez GOMBETTES. (H)
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BOURGUIGNOTE | S. f. (Art milit.) c'est une armure de tête faite de fer poli, dont se servoient les piquiers. (Q)
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BOURICHE | S. m. (Chasse) c'est une espece de panier fait en forme d'oeuf, dans lequel les oiseleurs portent en vie les oiseaux aquatiques. On donne aussi le même nom à ceux dans lesquels on fait des envois de gibier.
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BOURIGNONISTE | S. m. (Hist. ecclés.) nom de secte. On appelle ainsi dans les Pays-bas protestans, ceux qui suivent la doctrine d'Antoinette Bourignon, célebre quiétiste. Voyez QUIETISME.
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BOURIQUET | S. m. (Minéral.) espece d'escabelle, dont on se sert dans les fonderies en cuivre pour contenir les branches de la tenaille, lorsqu'on employe ce dernier instrument à tenir le creuset dans son à-plomb, tandis qu'on le charge.
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BOURLE | ou BOURRELET, s. m. se dit au propre d'un ajustement de tête à l'usage des jeunes enfans ; c'est une espece de bandeau rembourré & épais qui leur ceint le front ; & des cordons de ruban qui se croisent sur le haut de la tête, & l'empêchent de descendre sur les yeux. Il garantit la tête des enfans dans les chûtes & autres accidens. On a transporté ce nom aux éminences circulaires, pratiquées à l'extrémité de plusieurs corps ; parce qu'elles ont la forme & le lieu des bourlets pris au propre.
BOURLET ; c'est dans l'Artillerie l'extrémité d'une piece de canon du côté de son ouverture ou de la bouche. La piece en cet endroit est renforcée de métal, & elle ressemble à un bourlet.
On le faisoit autrefois avec différens ornemens ou membres d'architecture : mais aujourd'hui on le fait en tulipe, c'est-à-dire avec un arrondissement à-peu-près semblable à une tulipe. Cette forme est la plus avantageuse pour la conservation des embrasures. Voyez CANON. (Q)
BOURLET, en Marine, c'est un gros entrelacement de cordes & de tresses, que l'on met autour du grand mât, du mât de misene, & du mât d'artimon, pour arrêter la vergue dans un combat, en cas que les manoeuvres qui la tiennent fussent coupées. (Z)
BOURLET, (Jardinage) s'entend d'un gros noeud qui, au bout de quelques années, vient au-dessous d'une greffe plus gros que le pié sur lequel elle a été faite ; ce qui dénote que le sujet ou sauvageon n'est pas bien conditionné. Le bourlet se connoît par un cercle avancé, la greffe se joignant difficilement à l'arbre greffé, qui demeure plus petit : la raison est que les vaisseaux de la greffe ne répondant pas exactement au bout des vaisseaux du sujet sur lequel on l'applique, il n'est pas possible que le suc nourricier les enfile en droite ligne. Quand on s'apperçoit qu'un sauvageon fait le bourlet, soit dans la pépiniere, soit mis en place, on ne peut mieux faire que de l'arracher & d'en replanter un autre. (K)
BOURLET, ancien terme qui signifioit la partie du harnois des chevaux, qu'on appelle à-présent le collier. C'est de-là qu'est venu le nom de Bourrelier, qu'on donne aux ouvriers qui font les colliers de chevaux. Voyez COLLIER. Voyez B, fig. 6. Planche du Bourrelier.
BOURLET de lustre, en termes de Boutonnier, est un ouvrage en bois tourné en poire ou autrement : il y en a de deux sortes ; l'un est percé par en-haut, & sert à cacher les tire-fonds ; & l'autre l'est par en-bas, un peu en s'évasant, pour renfermer le noeud de la corde qui suspend le lustre. Les uns & les autres peuvent être percés à jour, ou ne l'être pas.
BOURLET, en termes de Raffineur de sucre, est un cercle de corde qui a sept à huit pouces de diametre, d'où s'élevent quatre autres cordes qui se réunissent & se lient ensemble environ deux piés au-dessus du bourlet. Il faut faire attention de conserver dans cette ligature une boucle, pour attacher le bourlet à la corde du tracas. Voyez TRACAS.
On se sert du bourlet pour monter les pots & les grosses pieces ; comme bâtardes vergeoises, dans les greniers. Voyez BATARDES & VERGEOISES. Celui qui sert aux vergeoises doit avoir moins de diametre & des cordes plus longues, que celui qui sert aux pots. Voyez POT & VERGEOISE.
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BOURMONT | (Géog.) petite ville de France au duché de Bar, à sept lieues de Nancy, près de la Meuse. Long. 23. 18 : lat. 48. 10.
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BOURNEZEAU | petite ville de France dans le Poitou.
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BOURON | (Géog.) ville de la Romanie sur le lac de même nom, appartenante aux Turcs.
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BOURRE | S. f. dans plusieurs Arts méchaniques, poil de plusieurs animaux, comme taureaux, boeufs, vaches, veaux, bufles, chevaux, cerfs, &c. qu'on détache par le moyen de la chaux, ou qu'on rase avec un couteau de dessus leurs peaux ou cuirs lorsqu'on les prépare dans les tanneries, ou chez les Mégissiers, Chamoiseurs, ou Hongrieurs. La bourre sert à garnir des selles, des bats, des chaises, des tabourets, des banquettes ou formes, &c.
A Paris ce sont les marchands de fer, qui sont du corps de la Mercerie, qui font presque tout le négoce de cette espece de bourre, quoiqu'il soit permis aux marchands Epiciers de le faire. Ceux qui en font commerce, l'achetent en gros des ouvriers qui préparent les cuirs, & la revendent ensuite en détail aux artisans qui en ont besoin.
* BOURRE de laine, chez les Bonnetiers, c'est la partie qui tombe sous la claie quand on la bat.
* BOURRE-LANISSE, laine que les Laineurs ou Eplaigneurs tirent de dessus les draps, les ratines & autres étoffes, quand ils les préparent sur la perche avec le chardon, avant que de les tondre.
* BOURRE-TONTISSE, laine qui provient de la tonte des draps.
Les faiseurs de matelas & autres ouvriers qui employent la laine, trompent souvent, soit en mélangeant les bonnes laines avec ces mauvaises, soit en les leur substituant. Il faut y prendre garde.
* BOURRE DE SOIE, FILOSELLE, ou FLEURET, c'est la partie de soie qu'on rebute au devidage des cocons ; on la file & on la met en écheveaux comme la bonne ; on en fait des padous, des ceintures, des lacets, du cordonnet, &c.
* BOURRE, (rouge de) en Teinture ; il se fait avec le poil de chevre le plus court. On fait bouillir le poil plusieurs fois dans la garance : ainsi préparé, il se fond dans la cuve à teindre par le moyen de quelque alkali, comme la cendre gravelée, l'urine, &c. & donne le rouge ou nacarat de bourre, un des sept bons rouges.
* BOURRE de Marseille, s. m. (Commerce) étoffe moirée dont la chaîne est toute de soie, & la trame toute de bourre de soie. Les premiers bourres se sont faits à Marseille : il s'en fabrique à-présent à Montpellier, à Nîmes, & ailleurs.
* BOURRE, chez les Corroyeurs, c'est le vieux tan qui est resté des peaux de mouton au sortir de la tannerie. On ébourre ces peaux avec l'étire.
BOURRE, en termes d'Artillerie, c'est tout ce que l'on met sur la poudre en chargeant les armes à feu, papier, foin, &c. Voyez CHARGE & TAMPON. (Q)
BOURRE se dit de la premiere sorte de bourgeons des vignes & des arbres fruitiers.
Bourre se dit aussi de la graine d'anemone. (K)
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BOURREAU | S. m. (Hist. anc. & mod.) le dernier officier de justice, dont le devoir est d'exécuter les criminels. La prononciation de la sentence met le bourreau en possession de la personne condamnée. En Allemagne on n'a point pour le bourreau la même aversion qu'en France. L'exécuteur est le dernier des hommes aux yeux du peuple ; aux yeux du philosophe, c'est le tyran.
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BOURRÉE | S. f. terme d'Orchestique. Il y a des pas qu'on nomme pas de bourrée. Voyez plus bas.
Il y a une danse qu'on nomme la bourrée : elle est gaie, & on croit qu'elle nous vient d'Auvergne : elle est en effet toûjours en usage dans cette province. Elle est composée de trois pas joints ensemble, avec deux mouvemens. On la commence par une noire en levant.
Mouret a fait de jolies bourrées ; il a porté ce genre d'airs & de danse dans ses ballets.
On l'a peu suivi, cette danse ne paroissant pas assez noble pour le théatre de l'opéra. (B)
La bourrée est à deux tems, & composée de deux parties, dont il faut que chacune ait quatre mesures, ou un nombre de mesures multiple de quatre. Elle differe peu du rigaudon. Voyez RIGAUDON.
BOURREE, (Pas de) ce pas est composé de deux mouvemens ; savoir d'un demi-coupé avec un pas marché sur la pointe du pié, & d'un demi-jetté : je dis un demi-jetté, parce qu'il n'est sauté qu'à demi ; & comme ce pas est coulant, son dernier pas ne doit pas être marqué si fort. On en a adouci l'usage, parce qu'il demande beaucoup de force dans le coup-de-pié : on y a donc ajoûté le fleuret. Voyez la définition de ce pas.
Pas de bourrée avec fleuret dessus & dessous. Ces pas se font en revenant du côté gauche, le pié droit étant à la premiere position. On plie sur le pié gauche en ouvrant les genoux, & étant plié on croise le pié devant soi jusqu'à la cinquieme position, & l'on s'éleve dessus. On porte ensuite le pié gauche à côté à la seconde position, & le droit se croise derriere à la cinquieme ; ce qui fait l'étendue du pas.
Ceux qui se font dessous & dessus ne different du premier, qu'en ce que le demi-coupé se croise derriere, & le troisieme se croise devant.
Quant à ceux qui se font de côté en effaçant l'épaule ; le corps étant posé sur le pié gauche, on plie dessus, ayant le pié droit en l'air près du gauche, & on le porte à côté en s'élevant sur la pointe, & en retirant l'épaule droite en arriere : mais la jambe gauche suit la droite, & se pose derriere à la troisieme position, les genoux étendus sur la pointe ; & pour le troisieme on laisse glisser le pié droit devant à la quatrieme position, en laissant poser le talon à terre, ce qui finit ce pas. Le corps étant posé sur le droit, on peut plier dessus, & en faire un autre du gauche.
Pas de bourrée ouvert ; si on prend ce pas du pié droit, l'ayant en l'air à la premiere position, on plie sur le gauche & l'on porte le droit à la seconde position ; ou l'on s'éleve sur ce pié, en faisant ce pas de la sorte : la jambe gauche suit la droite, en s'approchant à la premiere position, & dans le même tems le droit se pose entierement, & de suite le gauche se pose à côté à la seconde position, en laissant tomber le talon le premier. Lorsque le corps se pose sur ce pié, on s'éleve sur la pointe ; par cette opération on attire la jambe droite, dont le pié se glisse derriere le gauche jusqu'à la troisieme position, & le pas est terminé. Si l'on en veut faire un autre du pié gauche, il faut porter le talon droit à terre, plier dessus, & porter le pié gauche à côté, en observant les mêmes regles.
Pas de bourrée emboîté ; ce pas s'appelle ainsi, parce qu'il s'arrête au second pas à l'emboîture. Il faut faire le demi-coupé en arriere, en portant le pié à la quatrieme position. Le second pas se porte vîte à la troisieme, & l'on reste un peu dans cette position sur la pointe des piés, les jambes étendues ; puis on laisse glisser le pié qui est devant jusqu'à la quatrieme position. Ce mouvement se fait en laissant plier le genou de la jambe de derriere, qui renvoye par son plié le corps sur le pié de devant ; ce qui fait l'étendue de ce pas.
BOURREE, est un petit fagot qui n'est fait que de ramassis de bois & de brossailles, telles que celles dont on fait l'ame d'un fagot. Voy. BOIS DE CHAUFFAGE, voyez FAGOT.
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BOURRELIERS | S. m. ouvriers qui font les harnois de chevaux de carrosse, de charrette ; ils sont de la communauté des Selliers.
Ils ont été nommés bourreliers, du collier des chevaux, qu'on appelloit autrefois bourrelet. Voyez SELLIER.
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BOURRU | BOURRUE, adj. (Manufact. en soie) se dit de tout fil ou soie inégal, ou chargé de différentes bourres de la même espece, qui s'y sont introduites lors de la fabrique de ce fil ou soie ; cette bourre doit être ôtée soit de la chaîne ou de la trame si l'on veut que l'ouvrage soit beau.
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BOURSAULT | terme de Plombier, est une piece de plomb qu'on place au haut des trois couverts d'ardoise. C'est la principale piece de l'enfaîtement ; au-dessous du boursault est la bavette, & au-dessous de la bavette est le membron.
BOURSAULT ROND, outil de Plombier ; c'est un instrument de bois plat d'un côté & arrondi de l'autre, dont les plombiers se servent pour battre & arrondir les tables de plomb dont ils veulent faire des tuyaux sur les tondins. Le manche du boursault est attaché le long du côté qui est plat ; il n'y a que le côté arrondi qui serve à battre le plomb. Voyez la figure Planc. de Plomberie & du Fontainier.
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BOURSE | en termes de Boursiers, dont ils tirent leur nom, est une espece de petit sac portatif, fermé par des cordons, & propre à recevoir tout ce qu'on veut y mettre. Il y a des bourses à cheveux, à jettons, &c. Voyez ces mots.
BOURSE A CHEVEUX, terme de Boursier & autres, c'est un petit sac de taffetas noir, environ de huit pouces en quarré, au haut & en-dessus duquel est attaché un ruban fort large, noir & plié en rose. Ce sac est fermé de deux côtés, & est ouvert par en-haut. Il y a un faux ourlet à chaque bord, dans lesquels passent des cordons qui le font ouvrir ou fermer. Les hommes s'en servent pour mettre leurs cheveux par-derriere. Les marchands de modes en font peu, mais ils les font faire par des ouvriers.
BOURSE A JETTONS, les Boursiers appellent de ce nom un sac de cuir, de velours, &c. qui se ferme avec des cordons qui traversent les quarrés en sens contraires. Il y a des bourses à dix, douze quarrés plus ou moins, c'est-à-dire à dix ou douze plis.
BOURSE, en Anatomie, se dit de deux sacs formés par le darthos & le scrotum, qui enveloppent les testicules comme dans une bourse. Voyez DARTHOS & SCROTUM. (L)
BOURSE, (Commerce) en termes de Négocians, est un endroit public dans la plûpart des grandes villes, où les Banquiers, Négocians, Agens, Courtiers, Interpretes, & autres personnes intéressées dans le commerce, s'assemblent en certains jours, & à une heure marquée, pour traiter ensemble d'affaires de commerce, de change, de remises, de payemens, d'assûrances, de fret, & d'autres choses de cette nature, qui regardent les intérêts de leur commerce, tant sur terre que sur mer.
Bruges en Flandre a été la premiere ville où l'on se soit servi du mot de bourse, pour designer le lieu où les Marchands tenoient leurs assemblées, à cause que les Marchands de cette ville s'assembloient dans une place vis-à-vis d'une maison qui appartenoit à la famille de Vander bourse.
En Flandre, en Hollande, & dans plusieurs villes de la France, on appelle ces endroits bourses ; à Paris & à Lyon, place de change ; & dans les villes libres & anséatiques du Nord, collége des Marchands.
Ces assemblées se tiennent avec tant d'exactitude, & il est si nécessaire aux négocians de s'y trouver, que la seule absence d'un homme le fait quelquefois soupçonner d'avoir manqué ou fait banqueroute. Voyez BANQUEROUTE & FAILLITE.
Les bourses les plus célèbres de l'Europe sont, celle d'Amsterdam, & celle de Londres, que la reine Elisabeth fit appeller le change royal, nom qu'elle a retenu depuis. Voyez en la description à l'article CHANCE ROYAL.
La bourse d'Anvers n'étoit guere inférieure à celles de Londres & d'Amsterdam, avant le déclin du commerce de cette ville.
Dans les tems mêmes des anciens Romains, il y avoit des lieux où les commerçans s'assembloient dans les villes les plus considérables de l'empire. La bourse que quelques-uns prétendent avoir été bâtie à Rome, l'an 259 après la fondation de cette ville, c'est-à-dire 493 ans avant la naissance de Jesus-Christ, sous le consultat d'Appius Claudius, & de Publius Servilius, fut nommée collegium mercatorum ; on prétend qu'il en reste encore quelque chose, que les romains modernes appelle loggia, la loge, & qu'ils nomment aujourd'hui la place S. George. Voyez COLLEGE.
C'est sur l'autorité de Tite-Live qu'on fonde cette opinion d'une bourse dans l'ancienne Rome ; voici ce que dit cet auteur : Certamen consulibus inciderat uter dedicaret Mercurii aedem. Senatus à se rem ad populum rejecit : utri eorum dedicatio jussu populi data esset, eum præesse annonae, mercatorum collegium instituere jussit. Lib. II. Mais il est à remarquer que dans la pureté de la langue latine, collegium ne signifioit jamais un édifice fait pour une société de gens ; desorte que collegium mercatorum instituere, ne peut pas se rendre par bâtir une place de change ou un collége pour les négocians. Le sens de cette expression est que les négocians furent incorporés & formés en compagnie ; & comme Mercure étoit le dieu du commerce, cette aedes Mercurii semble avoir été le lieu destiné aux dévotions de cette compagnie de commerçans.
La bourse des marchands de Toulouse fut établie par Henri II. en 1549, à l'incitation des juges conservateurs des priviléges des foires de Lyon.
L'édit d'érection confirmé par lettres patentes du roi en 1551, permet aux marchands de cette ville d'élire & de faire chaque année un prieur & deux consuls d'entr'eux pour connoitre & décider en premiere instance de tous & chacuns les procès & différends qui pour raison de marchandises, assûrances, &c. seroient mûs & intentés entre marchands & trafiquans à Toulouse, & par appel au parlement de ladite ville ; leur permettant d'acheter ou construire un bâtiment pour y tenir la jurisdiction & les assemblées de ladite bourse commune.
Les marchands qu'il est permis aux prieur & consuls de choisir & de s'associer pour assister aux jugemens de la bourse, s'appellent juges-conseillers de la retenue, & sont au nombre de soixante. Voyez JUGES DE LA RETENUE.
La bourse de Roüen, ou, comme on l'appelle, la convention de Roüen, est de quelques années plus moderne que celle de Toulouse, n'étant que de l'année 1566, sous le regne de Charles IX. pour le reste elle lui est à-peu-près semblable.
La plus nouvelle de toutes les bourses consulaires est celle de Montpellier, érigée en 1691 par Louis XIV. pour les marchands de cette ville, & dont la jurisdiction s'étend dans les diocèses de Montpellier, Nîmes, Usès, Viviers, le Puy, Mende, Lodève, Agde, Besiers, Narbonne, & Saint-Pons. Ses officiers sont un prieur, deux juges-consuls, un syndic, & un certain nombre de bourgeois pour assister avec eux aux jugemens.
A Bourdeaux, les consuls sont appellés juges consuls de la bourse commune des marchands. Voyez CONSULS.
Jusqu'en 1724, le lieu d'assemblée où les marchands, banquiers, négocians, & agens de change de Paris s'assembloient pour traiter de leur commerce, étoit situé dans la grande cour du palais, au dessous de la galerie dauphine, du côté de la conciergerie ; & on l'appelloit la place du change. Mais alors on choisit l'hôtel de Nevers, rue Vivienne ; & aux bâtimens qui y étoient déjà, on en ajoûta de nouveaux pour la commodité des négocians, banquiers, &c. & c'est ce qu'on nomme aujourd'hui à Paris la bourse. On peut en voir les principaux reglemens dans l'arrêt du conseil du 24 Septembre 1724, & dans le dictionnaire du Commerce de Savary, tom. I. pag. 1080. & suiv.
La bourse d'Amsterdam est un grand bâtiment de brique & de pierre de taille, qui a 230 piés de long sur 130 de large, & autour duquel regne un péristile, au-dessus duquel est une galerie de vingt piés de largeur. Les piliers du péristile sont au nombre de quarante-six, tous numerotés depuis un jusqu'à quarante-six, pour distinguer les places où se tiennent les marchands, & aider à les trouver aux personnes qui ont affaire avec eux ; ce qui sans cela seroit fort difficile, puisque ce bâtiment peut contenir jusqu'à 4500 personnes. La bourse est ouverte tous les jours ouvrables depuis midi jusqu'à une heure & demie ou deux heures ; on en annonce l'ouverture par le son d'une cloche. A midi & demi on en ferme les portes ; on y peut néanmoins entrer jusqu'à une heure en payant un certain droit à un commis établi pour le recevoir.
Outre cette bourse, il y en a encore une dans la même ville, qu'on appelle la bourse aux grains. C'est une halle spacieuse où les marchands de grains, facteurs, &c. s'assemblent tous les lundis, mercredis, & vendredis, depuis dix heures du matin jusqu'à midi, & vendent ou achetent des grains sous montre. Il y a aussi à Rotterdam une bourse très-belle, & qui fait un des principaux ornemens de cette ville, quoique moins grande & moins spacieuse que celle d'Amsterdam.
BOURSE a encore, dans le Commerce, plusieurs significations, dont voici les principales.
Il se dit de ceux qui ont beaucoup d'argent comptant, qu'ils font valoir sur la place en escomptant des lettres & billets de change : ainsi on dit, ce marchand est une bourse des meilleures de Paris.
Bourse commune est proprement une société qui se fait entre deux ou plusieurs personnes de même profession, pour partager par égale portion les profits, ou supporter les pertes qui peuvent arriver dans leur trafic. On dit quelquefois tenir la bourse, pour tenir la caisse. Voyez CAISSE.
Bourse commune s'entend aussi de ce qui provient des droits de réception, soit à l'apprentissage, soit à la maîtrise, dans les corps des marchands & les communautés des Arts & Métiers ; ce qui compose un fonds qui ne peut être employé que pour les besoins & affaires communes. Ce sont ordinairement les maitres & gardes & jurés qui sont chargés de la perception de ces deniers, dont ils rendent compte au sortir de leur charge.
Bourse se dit encore de l'argent ou bien de quelqu'un. Avoir la bourse, manier la bourse, c'est faire la dépense. Mettre la main à la bourse, c'est dépenser. Faire une affaire sans bourse délier, c'est faire un troc de marchandises, un accommodement but à but, & sans être obligé de donner de l'argent de part ni d'autre. (G)
BOURSE, (Hist. mod.) maniere de compter, ou espece de monnoie de compte fort usitée dans le Levant, singuliérement à Constantinople. Voyez MONNOIE DE COMPTE.
La bourse est une somme de cent vingt livres sterlins, ou de cinq cent écus. Ce terme vient de ce que le thrésor du grand seigneur est gardé dans le serrail dans des bourses de cuir, qui contiennent chacune cette somme.
Cette maniere de compter des Turcs leur vient des Grecs, qui l'avoient prise des Romains, dont les empereurs la firent passer à Constantinople ; comme il paroit par la lettre de Constantin à Cécilien, évêque de Carthage, citée par Eusebe & Nicéphore, où on lit ce qui suit : " Ayant résolu de donner quelques secours en argent aux ministres de la religion catholique en Afrique, dans les provinces de Numidie & de Mauritanie ; j'ai écrit à Vesus, notre thrésorier général en Afrique, & lui ai donné ordre de vous délivrer trois mille folles ", c'est-à-dire bourses : car, comme le remarque M. de Fleury, ce que nous appellons bourse, les Latins l'appellent follis, par où ils entendent une somme de deux cent cinquante deniers d'argent, ce qui revient à cinq cent livres de notre monnoie.
La bourse d'or chez les Turcs est de quinze mille sequins, ou de trois mille écus ; & ce sont celles que les sultans généreux distribuent à leurs favoris & aux sultanes.
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BOURSETTES | S. f. (Orgue) ce sont de petites parties du sommier fort ingénieusement imaginées, pour pouvoir faire entrer un fil de fer dans la laye, sans que le vent dont elle est remplie, puisse sortir par le trou par où le fil de fer passe. Voyez la fig. 5.
Le n°. 1. représente les différentes parties dont une boursette est composée. A est un petit morceau d'osier d'une ligne ou deux, plus long que la planche de la laye n'a d'épaisseur. d e est un fil de fer enfilé dans l'osier. A l'extrémité d, on fait un anneau avec les pincettes rondes. B est un morceau de peau d'agneau fort délié. C est un autre petit morceau d'osier d'une ligne & demie ou deux de long, que l'on enfile pardessus la peau d'agneau. On met de la colle aux bouts des morceaux d'osier qui touchent la peau. On coupe ensuite le fil de fer e, ensorte qu'il n'en reste que pour faire un anneau e. N°. 2. & n°. 3. lorsque la boursette est ainsi préparée, on perce des trous dans la planche de dessous de la laye : ces trous doivent être seulement un peu plus grands que les morceaux d'osier n'ont de grosseur, afin qu'ils puissent y passer librement. Du côté de l'intérieur de la laye, on élargit les trous en les brûlant avec un fer chaud : ce fer doit avoir une tête hémisphérique, pour former comme un bassin concave. Lorsque les trous sont ainsi préparés : on passe le grand morceau d'osier dedans, & on colle les bords de la peau sur les bords évasés du trou, comme on voit au n°. 3. La colle dont on se sert est la colle-forte ordinaire, avec laquelle on colle le bois. Pour faire prêter la peau à la même forme que les trous des boursettes, on se sert d'un morceau de bois arrondi par le bout, comme le fer à brûler dont on a parlé ci-devant, avec lequel en appuyant sur la peau que l'on vient de coller, on lui fait prendre la forme des trous. La peau prête facilement, sur-tout lorsqu'elle n'a pas été étirée, c'est-à-dire autant étendue qu'elle peut l'être avant de l'employer à cet usage.
Cette opération faite, la boursette est entiérement achevée. On l'assemble ensuite avec la soupape r, fig. 6. par le moyen d'une S e f qui prend d'un côté dans l'anneau de la soupape, & de l'autre dans l'anneau supérieur de la boursette, dont l'anneau inférieur reçoit la targette, appellée targette du sommier.
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BOURSIER | S. m. ouvrier & marchand tout-à-la-fois, qui fait & vend des bourses à cheveux, toutes sortes d'ouvrages à l'usage des chasseurs & des guerriers, pour mettre en munitions ; tels que sont gibeciere, cartouche, giberne, &c. toutes sortes de sacs ou étuis à livre, à flacon, calotte, parapluie, parasol, &c.
La communauté des Boursiers est gouvernée par trois jurés ; dont le plus ancien sort de charge tous les ans, pour faire place à un autre qui est élû le 11 d'Août, ensorte que chaque juré exerce sa charge deux ans de suite.
Ce sont ces jurés qui expédient les lettres d'apprentissage & de maîtrise, qui donnent le chef-d'oeuvre, & font leurs visites tous les trois mois, comme il est porté par les statuts.
L'apprenti ne peut être obligé pour moins de quatre ans, & chaque maître n'en peut avoir qu'un à la fois ; il peut cependant en prendre un second après trois ans & demi d'apprentissage du premier.
L'apprenti sorti d'apprentissage, doit faire encore trois ans de compagnonage chez les maitres. Tout aspirant à la maîtrise est tenu au chef-d'oeuvre, à moins qu'il ne soit fils de maître.
L'apprenti étranger doit, pour parvenir à la maîtrise, servir pendant cinq ans, trois chez le même maître, & les deux autres où il lui plait.
Le chef-d'oeuvre consiste en cinq pieces ; savoir, une bourse ronde à quarre de cuir ; une autre de velours, brodée en or & en argent, avec les crépines & boutons de même ; une gibeciere de maroquin à fer, garnie de son ressort, avec des courans & boutons de cuir ; une autre aussi de maroquin à fer cambré, pareillement garnie de son ressort ; enfin un maroquin à l'usage des hommes, c'est-à-dire un sac de maroquin dont les hommes se servent pour mettre sous les genoux.
Les veuves peuvent tenir boutique, & jouïr des autres privilèges de maîtrise, excepté du droit de faire des apprentis qu'elles n'ont point ; pouvant toutefois continuer celui qui auroit commencé son tems du vivant de leur mari.
Les maîtres ne peuvent aller au-devant des marchandises qu'au-delà de vingt lieues de Paris.
Les patrons de la communauté sont S. Brice & Notre-Dame de la Fontaine.
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BOUSARDS | S. m. (Vénerie) ce sont des fientes de cerf qui sont molles comme bouse de vache, dont elles ont pris ce nom, & qu'on nomme autrement fumées.
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BOUSE | en terme de Blason, se dit d'une espece de chanteplure avec laquelle on puise l'eau en Angleterre. C'est une piece dont quelques seigneurs ont chargé l'écu de leurs armoiries. (V)
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BOUSIN | S. m. terme de Riviere ; c'est le tendre du lit d'une pierre, qu'on ne doit point employer en maçonnerie.
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BOUSONVILL | (Géog.) petite ville avec une abbaye considérable sur la Nied, à huit lieues de Metz.
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BOUSSAC | (Géog.) petite ville de France dans le Berri.
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BOUSSEVILLE | ou BOUXVILLER, (Géog.) petite ville de France en Alsace, avec un château, aux confins de la Lorraine.
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BOUSSOLE | S. f. instrument de Marine, qu'on appelle aussi compas de mer, nécessaire aux pilotes pour diriger la route de leur vaisseau. Sa propriété de se tourner toûjours vers les poles du monde, en fait le mérite, & la rend précieuse aux navigateurs. On en attribue l'invention à Flavio de Gioia, Napolitain, qui vivoit dans le xiij. siécle : néanmoins on voit par les ouvrages de Guyot de Provins, vieux poëte François du douziéme siécle, qu'on connoissoit déja la boussole. Ce poëte parle expressément de l'usage de l'aimant pour la navigation.
* Les anciens qui ne connoissoient point la boussole, étoient obligés de naviger le long des côtes ; & leur navigation étoit par là très imparfaite. On prétend pourtant que des Phéniciens, envoyés par Néchao roi d'Egypte, firent autrefois le tour de l'Afrique, en partant de la mer Rouge ; & qu'ils furent trois ans à ce voyage : mais ce fait est-il bien vrai ? Les anciens, dit l'illustre auteur de l'Esprit des Lois, pourroient avoir fait des voyages de mer assez longs, sans le secours de la boussole : par exemple, si un pilote dans quelque voyage particulier avoit vû toutes les nuits l'étoile polaire, ou le lever & le coucher du soleil, cela auroit suppléé à la boussole : mais c'est là un cas particulier & fortuit.
* Les François prétendent que si l'on met par-tout une fleur de lis pour marquer le nord, soit dans le carton mobile dont les mariniers chargent l'aiguille, soit dans la rose des vents qu'on attache sous le pivot de l'aiguille, au fond des boussoles sédentaires, c'est parce que toutes les nations ont copié les premieres boussoles, qui sont sorties des mains d'un ouvrier François. Les Anglois s'attribuent, sinon la découverte même, au moins la gloire de l'avoir perfectionnée par la façon de suspendre la boîte où est l'aiguille aimantée. Ils disent, en leur faveur, que tous les peuples ont reçû d'eux les noms que porte la boussole, en recevant d'eux la boussole même amenée à une forme commode ; qu'on la nomme compas de mer, des deux mots Anglois mariner compass ; & que de leur mot boxel, petite boîte, les Italiens ont fait leur bossola, comme d'Alexandre ils font Alessandro. (Les Italiens disent bossolo au masculin ; suivant le dictionnaire de Trévoux.) Mais la vérité est que le mot boussole vient du Latin buxus, d'où l'on a fait buxolus, buxola, bussola, & enfin boussole. Les Espagnols & les Portugais disent bruxula, qui semble venir de bruxa, sorciere. Il y a apparence que c'est une corruption de bussola. Quant au nom de mariners compass, les François pourroient également prétendre que les Anglois l'ont pris d'eux en traduisant le nom François, compas de mer.
* Il ne tient pas à d'autres qu'on n'en fasse honneur aux Chinois. Mais comme encore aujourd'hui l'on n'employe l'aiguille aimantée à la Chine qu'en la faisant nager sur un support de liége, comme on faisoit autrefois en Europe, on peut croire que Marco Paolo, ou d'autres Vénitiens, qui alloient aux Indes & à la Chine par la mer Rouge, ont fait connoître cette expérience importante, dont différens pilotes ont ensuite perfectionné l'usage parmi nous.
* La véritable cause de cette dispute, c'est qu'il en est de l'invention de la boussole, comme de celle des Moulins de l'Horloge, & de l'Imprimerie. Plusieurs personnes y ont eu part. Ces choses n'ont été découvertes que par parties, & amenées peu-à-peu à une plus grande perfection. De tous tems on a connu la propriété qu'a l'aimant d'attirer le fer. Mais aucun ancien, ni même aucun auteur antérieur au commencement du douzieme siecle, n'a sû que l'aimant suspendu, ou nageant sur l'eau par le moyen d'un liége, tourne toûjours un de ses côtés, & toûjours le même côté, vers le nord. Celui qui fit le premier cette remarque, en demeura là : il ne comprit ni l'importance, ni l'usage de son admirable découverte. Les curieux, en réitérant l'expérience, en vinrent jusqu'à coucher une aiguille aimantée sur deux brins de paille posés sur l'eau, & à remarquer que cette aiguille tournoit invariablement la pointe vers le nord. Ils prenoient la route de la grande découverte : mais ce n'étoit pas encore là la boussole. Le premier usage que l'on fit de cette découverte, fut d'en imposer aux simples par des apparences de magie, en exécutant divers petits jeux physiques, étonnans pour ceux qui n'en avoient pas la clé. Des esprits plus sérieux appliquerent enfin cette découverte aux besoins de la navigation ; & Guyot de Provins, dont nous avons parlé, qui se trouva à la cour de l'empereur Frédéric à Mayence en 1181, nous apprend, dans le roman de la Rose, que nos pilotes François faisoient usage d'une aiguille aimantée ou frottée à une pierre d'aimant, qu'ils nommoient la marinette, & qui régloit les mariniers dans les tems nébuleux.
Icelle étoile ne se muet,
Un art font qui mentir ne puet ;
Par vertu de la marinette,
Une pierre laide, noirette,
Ou li fer volentiers se joint, &c.
* Bientôt après, au lieu d'étendre les aiguilles comme on faisoit, sur de la paille ou sur du liége, à la surface de l'eau, que le mouvement du vaisseau tourmentoit trop, un ouvrier intelligent s'avisa de suspendre sur un pivot ou sur une pointe immobile, le milieu d'une aiguille aimantée, afin que se balançant en liberté, elle suivît la tendance qui la ramene vers le pole. Un autre enfin, dans le xjv. siecle, conçut le dessein de charger cette aiguille d'un petit cercle de carton fort léger, où il avoit tracé les quatre points cardinaux, accompagnés des traits des principaux vents, le tout divisé par les 360 degrés de l'horison. Cette petite machine legerement suspendue dans une boîte, qui étoit suspendue elle-même, à-peu-près comme la lampe des mariniers, répondit parfaitement aux espérances de l'inventeur. M. Formey.
La boussole : Pl. de navigation, fig. 12. est composée d'une aiguille ou losange, ordinairement faite avec une lame d'acier trempée & aimantée sur l'aimant le plus vigoureux : cette aiguille est fixée à une rose de carton ou de talc, sur laquelle on a tracé un cercle divisé en trente-deux parties égales : savoir d'abord en quatre par deux diametres qui se coupent à angles droits, & qui marquent les quatre points cardinaux de l'horison, le nord, le sud, l'est, & l'oüest ; chacun de ces quarts de cercle est divisé en deux ; ce qui constitue avec les précédens les huit rumbs de vent de la boussole : chaque partie est encore divisée & subdivisée en deux, pour avoir les huit demi-rumbs & les seize quarts. On peut voir sur la figure ces trente-deux airs, avec leurs noms usités dans les mers du Levant & du Ponent.
On désigne ordinairement le rumb du nord par une fleur de lis, & quelquefois celui de l'est par une croix ; les autres par les premieres lettres de leurs noms : chacun de ces airs de vent ou rumbs est indiqué par une des pointes de l'étoile tracée au centre de la rose. Voyez la figure.
Il y a un autre cercle concentrique à celui de la rose, & qui est fixé à la boîte : il est divisé en 360 degrés, & sert à mesurer les angles & les écarts de la boussole : le centre de la rose qui est évidé, est recouvert d'un petit cône creux de cuivre ou de quelqu'autre matiere dure qui sert de chape, au moyen de laquelle l'aiguille peut être posée sur un pivot bien pointu & bien poli, & s'y mouvoir avec liberté. On suspend le tout à la maniere de la lampe de Cardan, par le moyen de deux anneaux ou cercles concentriques, chacun mobile sur deux pivots aux extrémités des deux diametres dont les directions se coupent à angles droits, afin que la boussole puisse toûjours conserver la situation horisontale, malgré les roulis du vaisseau. Enfin on l'enferme dans une boîte quarrée couverte d'une glace, & on la place près du gouvernail dans une plus grande boîte ou armoire quarrée sans fer, que les marins nomment habitacle, laquelle est placée à l'arriere du vaisseau sur le pont, & éclairée pendant la nuit d'une lampe, afin que le timonnier, c'est-à-dire un matelot intelligent qui tient le gouvernail, & qui dans les vaisseaux de roi est relevé de deux heures en deux heures, puisse avoir toujours la boussole sous les yeux, & diriger la route du vaisseau suivant le rumb qui lui est prescrit par le pilote.
Comme la rose de la boussole est mobile sur sa chape, le timonnier a soin de gouverner ensorte que la pointe de la rose qui indique le rumb ou air du vent de la route actuelle du vaisseau, soit dirigée parallélement à la quille ; ce que la position de la boîte de la boussole, parallelement aux parois de l'habitacle, indique suffisamment. Enfin pour ne laisser aucune équivoque, on a coûtume de marquer d'une croix l'endroit de la boîte qui regarde la proue.
Les capitaines de vaisseau, les officiers & les pilotes attentifs, ont ordinairement une boussole un peu différemment construite suspendue au plancher de leur chambre, afin de pouvoir, lors même qu'ils ne sont pas sur le pont, savoir à toute heure où le navire a le cap, c'est-à-dire quelle route il fait actuellement (déduction faite de la dérive) : cette suspension exige moins de précautions que la précédente : mais en ce cas il faut observer que l'est soit à la gauche du nord, & l'oüest à sa droite ; en un mot que tous les points soient dans une situation inverse à l'égard de la boussole renversée, quoique toûjours dans la même position à l'égard du spectateur ou à l'égard du vaisseau.
Pour prévenir les accidens que les frottemens ou quelqu'irrégularité physique pourroient causer à une boussole si elle étoit seule, il y en a toûjours deux dans l'habitacle, & elles sont séparées par une cloison. Toutes deux sont exposées à la vûe du timonnier.
Maintenant voici la maniere de se servir de cet instrument pour diriger la route du navire. On reconnoit sur une carte marine réduite, par quel rumb le vaisseau doit tenir sa route pour aller au lieu proposé, & on tourne le gouvernail jusqu'à ce que le rumb déterminé soit vis-à-vis de la croix marquée sur la boîte ; & le vaisseau faisant voile est dans sa véritable route : par exemple, si on part de l'île d'Oüessant à l'occident de Brest, & qu'on veuille aller au cap Finisterre en Galice, on commencera par chercher dans une carte marine réduite quelle doit être la direction de la route, & on trouve qu'on la doit faire au sud-oüest quart au sud : tournant donc le gouvernail jusqu'à-ce que le rumb sud-oüest quart au sud réponde exactement à la petite croix marquée sur la boîte de la boussole ; le vaisseau se trouvera dans sa véritable route.
Tel est le principal usage de la boussole : il y en a plusieurs autres qui tendent à déterminer les latitudes, à fixer les points de l'horison où les astres se levent & se couchent ; c'est-à-dire à déterminer les amplitudes orientales ou occidentales : mais ces usages ont plus de rapport à l'Astronomie & à la Navigation qu'à l'usage principal de la boussole.
La déclinaison de l'aimant dont on a parlé à l'article AIGUILLE, qui consiste en ce que cette aiguille ne se dirige presque jamais exactement vers les poles du monde, mais qu'elle s'en écarte ordinairement tantôt vers l'est tantôt vers l'oüest ; cette déclinaison, dis-je, qui varie dans les différens endroits de la terre, & dans les mêmes en différens tems, oblige les marins à faire continuellement des corrections aux opérations qu'ils font avec la boussole. On verra à l'article VARIATION les précautions qu'ils apportent pour reconnoître & déterminer la quantité de cette variation, & les moyens dont ils se servent pour rectifier leur route.
L'avantage que les gens de mer retirent de la boussole qui les guide au-travers des mers les plus vastes, & les fait arriver aux extrémités de la terre les plus reculées, a porté les Physiciens à imaginer différens moyens pour la perfectionner. Tous conviennent que la boussole doit être la mieux aimantée qu'il est possible, très-legere dans sa construction, & sur-tout parfaitement mobile sur son pivot. Nous avons enseigné dans l'article AIGUILLE la meilleure maniere de construire & d'aimanter les aiguilles : en voici une autre qui a aussi ses avantages, & même qui nous paroît préférable à bien des égards. Elle est fondée sur ce principe démontré par l'expérience, que le fer & l'acier ne reçoivent qu'une quantité déterminée de vertu magnétique, & qu'il y a une proportion de longueur, de largeur & d'épaisseur pour que ces métaux puissent recevoir la plus grande quantité qu'il est possible qu'ils retiennent ; c'est pourquoi M. Mitchell, auteur de cette nouvelle méthode, prétend qu'il est très avantageux de faire les boussoles avec des lames d'acier parallélepipedes & bien trempées, plûtôt que de fil d'acier ou de lames de ressort dont on se sert ordinairement. En effet, on éprouve que non-seulement ces lames prennent beaucoup plus de vertu magnétique, qu'elles la conservent plus longtems dans le même degré, & qu'elles la perdent beaucoup plus difficilement, mais encore qu'elles ont leurs poles plus près des extrémités ; ce qui augmente considérablement leur vivacité, & l'exactitude de l'observation. La dimension qu'il estime la meilleure, est celle à-peu-près qu'il donne aux lames dont il compose ses aimans artificiels ; c'est-à-dire, six pouces de longueur, six lignes de largeur, & environ un tiers de ligne d'épaisseur : elles doivent être percées dans le milieu, pour laisser passer le pivot sur lequel elles feront leur révolution.
On a observé que la rouille détruit considérablement la vertu magnétique, c'est pourquoi on doit tâcher d'en préserver avec soin les aiguilles des boussoles : les boîtes vitrées dans lesquelles on les renferme ordinairement sont insuffisantes, & l'air de la mer agit toujours sur elles. On les garantira de cet accident en les enduisant d'une couche fort mince d'huile de lin cuite : cet enduit n'apporte aucun obstacle aux effets de l'aimant, & les boussoles s'aimantent au-travers avec autant de facilité que si elles étoient bien polies. Il y a même lieu de croire par quelques expériences, que les boussoles peintes conservent mieux que les autres leur grande force magnétique ; car on remarque dans la plûpart des ferremens peints à l'huile, qu'ils sont plus susceptibles de magnétisme que les autres fers ; en même tems qu'ils deviennent plus cassans & plus durs ; & c'est peut être par cette raison qu'ils s'aimantent mieux.
On aimantera ces lames en les posant sur le milieu d'une barre de fer assez longue, & en passant huit à dix fois d'un bout à l'autre six aimans artificiels, dont trois ont leurs poles nord tournés en-haut, & contigus aux poles du sud des trois autres lames ; ensorte que les poles du sud des premiers aimans soient un peu écartés des poles du nord des trois autres lames, & tournés vers l'extrémité de l'aiguille qu'on veut faire diriger vers le nord. Voyez l'article AIMANT.
Comme il est difficile de bien déterminer dans des aiguilles ainsi larges & plates, si leur axe, c'est-à-dire la ligne qui joint les deux poles, passe exactement par les points de suspension, & que d'un autre côté en les faisant pointues par les extrémités, on fait rentrer leurs poles en-dedans, & on les rend un peu moins aimantées qu'elles ne le pourroient être, voici un moyen de remédier à ces inconvéniens. On mettra sur un pivot une des meilleures aiguilles aimantées, construite suivant la méthode ordinaire, & pointue par ses extrémités, & on observera avec soin de combien son pole nord décline de quelque point fixe qu'on choisira à volonté : ensuite on ajustera sur le pivot la nouvelle aiguille, appliquée sur la rose de carton de telle sorte que la fleur-de-lis décline du point observé : dans le même sens & de la même quantité que faisoit le pole du nord de l'aiguille mince & pointue : on fixera la rose dans cette situation, & la boussole sera centrée.
Il vaudra mieux faire cette opération sur un vaisseau en cette maniere : on tirera une ligne droite de la poupe à la proue, & on placera les deux boussoles sur cette ligne, à une telle distance & en telle sorte qu'elles ne puissent ni agir l'une sur l'autre, ni être détournées par aucun fer qui soit dans le voisinage : on ajustera la rose comme on vient de dire, de maniere que la fleur-de-lis fasse avec la ligne d'épreuve, le même angle que fait le pole du nord de l'autre aiguille.
On ne sauroit dissimuler que le poids de ces nouvelles aiguilles ne fasse augmenter leur frottement, sur-tout si le pivot & la chape sont de cuivre ; car il n'est guere possible de se servir à la mer du pivot d'acier, qui seroit bien-tôt rouillé. Mais on pourra remédier à cet inconvénient en employant un pivot d'or, allié de quelque métal pour l'endurcir, & en attachant aux barres, des chapes garnies d'un petit morceau de verre concave bien poli ; ce qui vaut encore mieux que l'agate dont on se sert quelquefois. Ce petit changement, qui n'augmente pas considérablement le prix des boussoles, donne à ces instrumens plus d'exactitude qu'on ne peut espérer dans les boussoles ordinaires, sur-tout lorsque le tems est calme, & que les vagues n'agitent pas le vaisseau : car alors il faut nécessairement frapper les boîtes pour vaincre les frottemens, si l'on veut que la boussole marque la route avec exactitude ; au lieu que les nouvelles boussoles se meuvent très librement sans ce secours.
On a construit sur ces principes une aiguille de boussole qui avoit trente-deux pouces de longueur, & qui pesoit un peu plus de huit onces. Elle a été mise en mouvement avec une force capable de lui faire faire vingt-cinq tours par minute : cette force a été suffisante pour lui faire continuer ses révolutions pendant l'espace de soixante-dix ou quatre-vingt minutes, & elle a encore fait des vibrations pendant quinze autres minutes, quoiqu'elle ne fût que sur un pivot de cuivre qui a été bien-tôt émoussé par son poids, au lieu qu'elle a fait à peine quelques vibrations lorsqu'elle a été suspendue par une chape de cuivre sur un pivot d'acier bien pointu & bien poli.
Les avantages de la boussole ne se bornent pas à ceux qu'en peuvent retirer les navigateurs ; cet instrument est aussi fort utile sur la terre pour faire une infinité d'opérations : on y fait seulement différens changemens, pour le rendre plus propre aux divers usages auxquels on le destine. Son application la plus commune est à l'équerre des arpenteurs, qui ne consistoit anciennement que dans un cercle de cuivre divisé en quatre parties égales par deux diametres qui se coupent à angles droits. Il y a une pinule bien perpendiculaire au plan du cercle, à l'extrémité de chacun de ces diametres, afin de pouvoir pointer sur différens objets. Voyez EQUERRE.
Dans les nouvelles équerres d'arpenteur on a ajoûté au centre du cercle un pivot, sur lequel est suspendue une aiguille aimantée, & renfermée dans une boîte couverte d'une glace. L'aiguille parcourt dans ses différens mouvemens la circonférence d'un cercle divisé en trois cent soixante degrés ; & le o de la graduation marqué d'une N (nord) ou d'une fleur-de-lis est directement au-dessous d'une des pinnules, ensorte que les autres points cardinaux se trouvent aussi sous les autres pinnules : toute la machine est montée sur pivot, ou mieux encore sur un genou, sur lequel on peut la tourner librement en tout sens.
On se sert aussi quelquefois de boussoles enfermées dans des boîtes de cuivre ou de bois (ces dernieres sont plus sûres) exactement quarrées, & dont les côtés sont bien paralleles aux diametres qui passent par les points cardinaux.
Celles-ci, par exemple, sont très-commodes pour trouver la déclinaison d'un mur ou d'un édifice, c'est-à-dire l'angle qu'ils forment avec le méridien du lieu : pour cet effet on applique à une regle posée horisontalement le long du mur, le côté de la boîte marqué sud ou nord, suivant que le mur regarde à-peu-près le septentrion ou le midi ; ensuite on observe quel angle fait la pointe de l'aiguille, ou son pole boréal, avec le méridien tracé sur la boussole, & qui est perpendiculaire à la regle. Cet angle, réduction faite de la déclinaison de l'aimant, exprime en degrés la véritable déclinaison du mur, laquelle est orientale ou occidentale, suivant que l'aiguille s'écarte à l'est ou à l'oüest du méridien de la boussole, dans le cas ou ce mur est tourné du côté du midi ; & réciproquement, lorsqu'il regarde le septentrion.
Ceux qui construisent des cadrans solaires verticaux, ont souvent recours à cette méthode pour trouver la déclinaison du plan sur lequel ils veulent tracer, & découvrir jusqu'à quelle heure il peut être éclairé ; ou bien en connoissant la déclinaison de l'aiguille aimantée dans le lieu & au tems de l'opération, ils l'employent pour tracer tout d'un coup une ligne méridienne, & orienter un cadran horisontal : il suffit pour cet effet de poser la boussole sur un plan bien parallele à l'horison, & de faire ensorte en tournant peu-à-peu la boîte, que le pole boréal de l'aiguille s'arrête du côté de l'oüest ou de l'est, sur un point qui fasse avec celui de O un angle égal à celui de la déclinaison de l'aimant (par exemple, de 17d 10' N. O. pour le 19 Oct. 1750 à Paris) : & en appliquant une regle à l'est ou à l'ouest de la boîte, ils tracent une ligne droite qui est la méridienne. Enfin cette méthode est encore très-utile pour orienter des édifices, des orangeries, des serres chaudes, pour donner une exposition favorable aux étuves, aux greniers, ou aux glacieres.
La Géométrie pratique tire de grands avantages de la boussole, pour lever d'une maniere expéditive des angles sur le terrein, faire le plan d'une forêt, d'un étang, d'un marais inaccessible, ou pour déterminer le cours d'une riviere.
Par exemple, pour lever les angles A D B, B D C, (Pl. d'Arpentage, fig. 11.) on commencera par appliquer bien exactement un coté de la boîte de la boussole sur la ligne A D, ensorte que la ligne qui passe par les pinnules du nord & du sud se termine aux points A & D ; ensuite on observera l'angle que fera le pole boréal de l'aiguille avec cette ligne : on appliquera aussi la boussole sur la ligne D B, & on observera de même l'angle que fera l'aiguille avec cette ligne. Maintenant la différence de ces deux angles sera la valeur de l'angle A D B, si l'aiguille s'écarte dans le même sens de la méridienne de la boussole ; ou, ce qui est la même chose, des lignes A D, D B, sur lesquelles elle est posée. Mais si l'aiguille s'écarte de sa méridienne en sens contraire, comme il arrive en la posant sur les lignes B D, D C, la somme des angles observés sera la valeur de l'angle cherché.
On opérera plus exactement, si au côté même de la boîte de la boussole est appliqué un parallélepipede creux, qui porte deux pinnules par lesquelles on vise à un objet éloigné : la ligne de mire des deux pinnules doit être parallele au diametre de la boussole d'où l'on commence à compter les divisions. Ce parallélepipede équivalent à une regle à pinule donne encore un autre avantage : il doit être mobile sur un clou ou pivot, ensorte qu'il puisse s'incliner à l'horison sans sortir du même plan vertical ; ce qui est très-commode, & même nécessaire quand on veut pointer à un objet élevé ou abaissé au-dessous de l'horison, & reconnoître sa direction ou son gissement par rapport aux régions du monde ; ce que les marins nomment relever un objet, parce qu'ils font cette opération avec une boussole ordinaire placée sur le pont du vaisseau, en se mettant dans l'alignement du centre de la boussole & de l'objet dont ils veulent reconnoître le gissement, & qu'ils étendent le bras vers le centre de la boussole, & le relevent ensuite perpendiculairement jusqu'à la rencontre du rocher, du cap, du vaisseau, ou d'un point quelconque ; c'est cette opération qu'ils désignent en disant : avons relevé tel cap à tel air de vent. Dans la boussole à pinnules dont nous parlons, & qui est destinée pour la terre, on dirige la pinule parallele au côté de la boîte de la boussole sur l'objet qu'on veut relever, ou dont on veut connoître le gissement ; & cet objet étant ordinairement éloigné, c'est la même chose que si la regle à pinule étoit placée sur le centre même de la boussole, quoique cette regle en soit éloignée d'environ trois pouces, qui est au plus la demi-largeur ordinaire de cet instrument, tant pour le rendre plus portatif, que parce que l'expérience a fait voir que c'est la proportion la plus convenable ; les aiguilles plus petites étant trop vives & trop long-tems à se fixer, & les plus grandes trop paresseuses & trop peu libres sur leur pivot.
Pour lever le plan d'une forêt, d'un étang ou d'un marais, on commencera par réduire leur circuit en autant de lignes droites qu'il sera convenable, en mettant des piquets à toutes les courbures un peu considérables ; on mesurera tous les côtés de ce polygone, & dirigeant sur chaque côté successivement les pinnules nord & sud de l'équerre, on observera l'angle que forme le pole boréal de la boussole avec ce côté du polygone, en remarquant si l'aiguille s'en écarte à droite ou à gauche : ces observations détermineront les angles que ces côtés forment entr'eux, en usant des mêmes précautions qu'on vient d'indiquer pour lever les angles sur le terrein. Connoissant donc les angles & les côtés du polygone, il sera facile d'en tracer le plan ; il ne s'agira plus que de l'orienter ; ce qu'on exécutera fort aisément, puisqu'on connoît tous les angles que forme la boussole avec chacun des côtés du plan : on en choisira donc un à volonté, auquel on tracera une parallele ; en quelqu'endroit à l'écart on fera avec cette parallele, & dans le même sens, un angle égal à celui que faisoit sur le terrein l'aiguille de la boussole avec ce côté correspondant ; & connoissant cet angle par la déclinaison de l'aimant, qu'on connoîtra d'ailleurs, la ligne qui formera cet angle corrigé avec la parallele, sera la méridienne du plan.
Soit A B C D E F, (fig. 12.) une riviere dont on veuille déterminer le cours : on commencera par planter des piquets à tous ses points principaux de flexion, afin de reduire sa courbure en autant de petites lignes droites A B, B C, C D, D E, E F, qu'il sera nécessaire ; on mesurera toutes ces lignes droites, & on déterminera les angles qu'elles font entr'elles, en prenant d'abord celui que chacune d'elles fait avec l'aiguille aimantée : ces opérations donneront le plan de la riviere & de ses détours, & on l'orientera par la méthode qu'on vient d'indiquer tout-à-l'heure.
On se sert aussi quelquefois pour orienter un plan, d'une autre espece de boussole que quelques-uns nomment un déclinatoire : celle-ci ne differe des autres qu'en ce que sa boîte, longue de 6 ou 7 pouces suivant le plus ou le moins de longueur de l'aiguille, n'a environ que 2 pouces de large, ce qui suffit pour marquer à droite & à gauche de la pointe de l'aiguille un nombre de degrés, au-moins égal à celui de la déclinaison de l'aimant dans le lieu de l'observation. Alors si l'on fait répondre la pointe de l'aiguille sur la quantité de déclination, qu'on suppose connue d'ailleurs, l'axe de la boîte ou son côté qui lui est parallele se trouvera dans la direction du méridien, & pourra servir à tracer sur le terrein une ligne nord & sud : à laquelle on rapportera toutes les autres.
Il faut bien remarquer que toutes les pratiques précédentes, où l'on opere avec la boussole, ne peuvent donner qu'une méridienne approchée, & dont on ne peut au plus répondre qu'à un demi-degré près, à cause de la petitesse de l'instrument & des petites variations à quoi l'aiguille aimantée est elle-même sujette. Si l'on avoit besoin d'une plus grande précision, il faudroit se servir des moyens que l'Astronomie fournit pour tracer une méridienne ou pour trouver l'azimuth du soleil. Voyez MERIDIENNE & AZIMUTH.
Il est plus avantageux de se servir, pour les opérations que nous venons de décrire, des grandes boussoles faites avec des lames d'acier trempé & fortement aimantées, que des petites aiguilles ordinaires : celles-ci sont trop facilement dérangées par les corps magnétiques ou ferrugineux, qui se trouvent répandus dans les différens endroits où l'on opere : cette précaution est sur-tout nécessaire dans les travaux qu'on entreprend dans l'intérieur de la terre, où il se rencontre souvent des corps qui détourneroient trop les petites aiguilles. Qu'on veuille, par exemple, déterminer dans une mine de charbon la direction d'un lieu à un autre, afin de creuser un puits par-dehors, justement à l'extrémité d'une galerie ; on observera premierement dans la mine quel angle fait le pole boréal de la boussole, ayant la direction de la galerie, & on fera cette observation à l'extrémité de la galerie qui se trouve au bas de quelque puits déjà fait : & ayant mesuré sa longueur, on fera la même opération en-dehors au haut du puits, & on mesurera cette longueur dans la ligne qui fait avec la boussole le même angle que faisoit avec elle la direction de la galerie, & dans le même sens, ce qui déterminera le point où il faut faire le nouveau puits. Mais s'il y a dans le voisinage des corps magnétiques ou ferrugineux, les petites boussoles seront presque toûjours insuffisantes pour cette opération ; les grandes aiguilles y seront aussi à la vérité un peu sujettes : mais voici un moyen de reconnoître la présence de ces corps magnétiques, & de remédier à cet inconvénient.
On tendra dans le milieu de la galerie & dans sa direction un cordeau le plus long qu'il sera possible, & on fera ensorte qu'il soit bien en ligne droite : on placera la boussole à l'extrémité de ce cordeau, de telle sorte que la ligne fiducielle ou le diametre de la boussole, duquel on commence à compter les divisions, soit bien dans la direction de la galerie : on observera si l'aiguille co-incide avec cette ligne, ou sous quel angle elle s'en écarte & de quel côté : on réitérera cette observation d'espace en espace, en avançant vers le fond de la galerie. Si elle conserve toûjours la même direction par rapport au cordeau dans toute sa longueur, il sera assez probable que rien ne dérange l'aiguille de sa direction naturelle, du-moins à droite ni à gauche : mais si sa direction varie en différens endroits le long du cordeau, le lieu où elle s'écartera le plus de la direction qu'elle a dans le plus grand nombre de points, sera le plus proche du corps qui la détourne ; c'est pourquoi on tirera par ce point une perpendiculaire opposée au côté vers lequel l'aiguille paroît le plus détournée, & on donnera le plus de longueur qu'on pourra à cette perpendiculaire : on tirera par différens points de cette perpendiculaire des paralleles au cordeau, & on examinera aux points où ces paralleles coupent la perpendiculaire, si l'aiguille fait avec les paralleles le même angle qu'elle faisoit avec le cordeau dans la plûpart des points où on n'a pas eu lieu de soupçonner qu'elle fût détournée : si elle fait le même angle, on conclura qu'on est hors de la sphere d'attraction du corps magnétique, & on connoîtra de cette maniere & par différentes épreuves, la force & l'étendue de ces sortes de corps.
On se sert en mer d'une autre espece de boussole appellée compas de variation, pour reconnoître la déclinaison de l'aiguille aimantée dans le parage où on navige. Il y en a de différentes sortes ; un entr'autres qui n'exige qu'un seul observateur : il est décrit dans les Mémoires de l'Académie des Sciences, de l'année 1733. Voyez VARIATION & COMPAS.
Nous devons tout cet article, à l'exception des alinea marqués d'une étoile, à M. le Monnier, qui nous avoit déjà donné, pour le premier volume, les articles entiers de l'aimant & de l'aiguille aimantée. Voyez ces articles. Voyez aussi DECLINAISON, MAGNETISME, AMPLITUDE, AZIMUTH. Les endroits marqués d'une étoile dans cet article sont de M. Formey, qui les a tirés du Spectacle de la nature. T. IV.
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BOUSTROPHEDON | (Hist. anc.) terme usité parmi les antiquaires, pour exprimer une maniere d'écrire particuliere aux Grecs, sur-tout dans les inscriptions. Elle consistoit en ce que la premiere ligne étant écrite de la droite à la gauche, la seconde étoit écrite de la gauche à la droite : & ainsi de suite. On tire l'étymologie de ce mot des sillons que les boeufs font en labourant, parce qu'à la fin de l'un ils reprennent l'autre par un demi-cercle, & ainsi alternativement ; de , boeuf, & , article, couplet, ligne.
M. l'abbé Fourmont, dans le voyage qu'il fit en Grece en 1729 par ordre de la cour, recueillit plusieurs inscriptions en boustrophedon : dont on espéroit tirer des grandes lumieres sur divers points de l'antiquité greque. (G)
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BOUSURE | S. f. (à la Monnoie) composition dont on se sert pour le blanchiment des especes. V. BLANCHIMENT. C'est ce que l'on appelloit dans l'ancien monnoyage, Bouture.
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BOUT | EXTRéMITé, FIN, (Gramm.) termes relatifs à l'étendue : bout, à l'étendue seulement en longueur, dont il marque le dernier point ; extrémité, à l'étendue, soit en longueur, soit en longueur & largeur, soit en longueur, largeur, & profondeur ; car on dit l'extrémité d'une ligne, d'une surface, d'un corps ; mais extrémité differe encore de bout, en ce qu'elle réveille davantage l'idée de derniere limite, soit de la ligne, soit de la surface, soit du solide. Fin, n'est relatif qu'à un tout où l'on considere des parties comme antérieures & postérieures dans l'ordre ou le tems. Ainsi bout ne se dit d'une table que quand elle est oblongue, & qu'on en veut désigner la partie la plus éloignée du centre : extrémité, que de l'espace de cette table pris tout autour extrèmement voisin des bords qui la terminent : fin, que d'un livre, d'une année, d'un récit, d'un concert, &c.
BOUT-RIME, s. m. (Littérature) ce sont des rimes disposées par ordre, qu'on donne à un poëte pour les remplir. Voyez RIME.
L'invention des bouts-rimés est dûe à un poëte nommé Dulot, qui vivoit vers l'an 1649. On choisissoit pour rimes des mots dont les idées avoient entr'elles le moins de rapport. Ces rimes bisarres sont bien souvent celles qui embarrassent le moins, & qui fournissent le plus de choses nouvelles & surprenantes pour ce style burlesque. Sarrasin a fait un poëme qu'il a intitulé la Défaite des bouts-rimés. Les bouts-rimés sont aujourd'hui abandonnés aux mauvais poëtes.
Les lanternistes de Toulouse ont trouvé le secret de relever de nos jours les bouts-rimés, en en proposant toutes les années, pour être remplis à la gloire du Roi ; & le sonnet victorieux est récompensé par une médaille d'argent.
BOUTS & JOUSTES, terme de Palais, synonyme à tenans & aboutissans. Voyez ABOUTISSANT. (H)
BOUT DE CORDE, (Marine) c'est ainsi qu'on appelle à la mer une corde d'une moyenne longueur.
Bouts de corde ; ce sont des bouts de corde dont le prévôt se sert pour châtier ; & que les gens du quart ou de l'équipage tiennent aussi pour frapper sur ceux qui sont condamnés à ce châtiment.
Bouts de cable sont des bouts ou morceaux de cables usés, rompus, ou trop courts.
Bout de vergue ; c'est la partie de la vergue qui excede la largeur de la voile, & qui sert quand on prend les ris.
Bout de beaupré ; c'est un matereau qui fait saillie sur l'étrave, dans les petits bâtimens qui n'ont point de beaupré.
Bout pour bout. Filer le cable bout pour bout. Voyez FILER. (Z)
BOUT, terme de lapidaire. Voyez BOUTEROLLE.
BOUT, terme de Ceinturiers, petite plaque d'argent que l'on met au bout des boucles d'un baudrier, pour leur donner plus de grace. Voyez BAUDRIER.
BOUT, en terme de Fourbisseur, c'est une piece de cuivre ajustée au bout du fourreau, & qui en environne l'extrémité pour la rendre plus ferme contre la pointe. Voyez la lettre a, Pl. du Fourbisseur, fig. 2.
BOUT DE REVERS, en terme de Fourbisseurs, est une partie de la branche, enrichie d'ornemens, qu'on remarque à l'extrémité qui entre dans le pommeau. Voyez BRANCHE & POMMEAU, & la Planche du Ciseleur-Damasquineur avec explication.
BOUTS DE QUEUE, chez les Plumassiers, ce sont des plumes qu'on tire de la queue de l'autruche.
BOUT DE CLE, chez les Serruriers, c'est la partie de la tige qui excede le panneton de la clé, & auquel on pratique ordinairement un bouton, quand la clé n'est pas forée.
BOUT D'OR, les Tireurs d'or appellent bout d'or, un bâton d'argent doré, & bout d'argent, un gros bâton d'argent fin, qu'ils passent par la filiere, pour faire des filets d'or & d'argent. Voyez FILIERE & FILET.
BOUT, (Maréchall.) on dit qu'un cheval n'a point de bout, quand il recommence souvent des exercices violens & de longueur sans en être fatigué, & avec la même vigueur ; & qu'il est à bout, lorsqu'il est extrèmement fatigué.
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BOUT-à-PORT | S. m. (Police) officier sur les ports, dont la fonction est de mettre ou faire mettre à port les bateaux qui y arrivent. Le bout-à-port est contrôleur à l'inspection pour les rangemens des bateaux. On a réuni à cet office celui de débacleur.
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BOUTADE | S. f. on donnoit ce nom autrefois à des petits ballets, qu'on exécutoit ou qu'on paroissoit exécuter impromptu. Ils étoient composés pour l'ordinaire de quatre entrées, d'un recit, & d'une entrée générale ; c'étoit le grand ballet en raccourci : Idée des spectacles anciens & nouveaux de l'abbé de Pure, imprimé à Paris en 1667. Voyez BALLET. (B)
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BOUTAN | (Géog.) royaume d'Asie à l'orient de la Tartarie, sur les confins du Mogol. On y trouve de la bonne rhubarbe & du musc.
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BOUTANES | S. f. (Commerce) toiles de coton, qui se fabriquent dans l'île de Chypre.
BOUTANT, adj. se joint, en Architecture, avec d'autres mots ; on dit, par exemple, are-boutant, & c'est un arc ou un soûtenu qui sert à porter une voûte, & qui est lui-même soûtenu par quelque gros mur, ou par quelque gros pilier. Voyez ARC-BOUTANT, SOUTIEN, APPUI. Ce mot vient du vieux mot françois bouter.
Un pilier boutant est une grande chaîne de piliers de pierre, faite pour supporter un mur, une terrasse ou une voûte. (P)
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BOUTARGU | ou POUTARGUE, (Commerce) mets fort en usage en Italie & en Provence ; se sont les oeufs du mulet préparés de la maniere suivante : on prend tous les oeufs de ce poisson, on les met dans un plat & on les saupoudre de sel : on les couvre pendant quatre ou cinq heures afin que le sel y penetre, après quoi on les met en presse entre deux planches. On les lave & on les fait sécher au soleil pendant quinze jours, ou on les fume. On mange la boutargue avec de l'huile & du citron. Il s'en fait beaucoup à Tunis, en Barbarie, & à Martegue en Provence.
* BOUT-AVANT, s. m. officier de saline, dont la fonction est de veiller à ce que l'emplissage du vaxel se fasse selon l'usage. Voyez VAXEL & AIDE-BOUT-AVANT.
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BOUTÉ | adj. cheval bouté, est celui qui a les jambes droites depuis le genou jusqu'à la couronne ; ce qui arrive souvent aux chevaux court-jointés. Cheval long-jointé est le contraire de bouté. (V)
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BOUTE-FEU | (LE) Artillerie) est un bâton ou hampe de bois, garni d'un serpentin de fer par en haut, dans lequel se passe la meche qui sert à mettre le feu aux pieces de canon & aux mortiers. Voyez la fig. du boute-feu, Pl. VI. de Fortific. fig. 6.
Les boute-feux sont de toutes sortes de bois ; ils sont longs de deux à trois piés, gros d'un pouce, & fendus par une de leurs extrémités pour y passer le premier bout d'une brasse de meche, laquelle est tournée autour ; l'autre bout repassant sur celle qui est tournée, passe dans la fente du boute-feu, qui l'empêche de se détortiller : on peut par ce moyen allumer les deux bouts de la meche, qu'on allonge facilement à mesure qu'elle brûle. Saint-Remy, Mémoires d'Artillerie. (Q)
BOUTE-SELLE, s. m. (Art milit.) sonner le boute-selle ; c'est battre le tambour d'une maniere particuliere, pour que les cavaliers sellent leurs chevaux, & qu'ils se mettent en état de monter à cheval au premier commandement. (Q)
BOUTE-DE-LOF, BOUTE-LOF, s. f. (Mar.) c'est une piece de bois ronde ou à huit pans, qu'on met au-devant des vaisseaux de charge qui n'ont point d'éperon : elle sert à tenir les armures de misene.
BOUTE-DEHORS, BOUTE-HORS, s. m. (Marine) ce sont des pieces de bois longues & rondes, qu'on ajoûte par le moyen d'anneaux de fer à chaque bout des vergues du grand mât & du mât de misene, pour porter des bonnettes en étui quand le vent est foible & qu'on veut chasser sur l'ennemi, ou prendre chasse & faire diligence. (Z)
Boute-dehors, c'est un petit mât qui sert à la machine à mâter, pour mettre les chouquets & les hunes en place.
Boute-dehors, boute-hors, défenses ; ce sont aussi de longues perches ou pieces de bois avec des crocs, pour empêcher dans un combat l'abordage du brûlot, ou pour empêcher dans un mouillage que deux vaisseaux, que le vent fait dériver l'un sur l'autre, ne s'endommagent. Voyez MINOT. (Z)
BOUTE-EN-TRAIN, en terme de haras, est un cheval entier dont on se sert pour mettre les jumens en chaleur, ou pour découvrir si elles sont en état de se laisser saillir. Il faut qu'un boute-en-train hennisse souvent. (V)
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BOUTÉE | voyez BUTER.
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BOUTEILLAGE | S. m. (Hist. mod.) c'est le droit sur la vente des vins étrangers, que le bouteiller du roi d'Angleterre prend, en vertu de sa charge, sur chaque vaisseau : ce droit est de deux chelins par tonneau.
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BOUTEILLE | S. f. (Verrerie) vaisseau de gros verre noirâtre, qui est presque le seul en usage parmi nous pour le vin. Les bouteilles servent aussi à renfermer d'autres matieres, soit liquides, soit solides, dont on craint l'évaporation ou l'évent. La quantité de bouteilles qu'on employe parmi nous est si considérable, que nous avons plusieurs verreries occupées à ce seul ouvrage. Voyez l'art de faire des bouteilles à l'article VERRERIE.
BOUTEILLE, (Comm.) mesure des liquides dont on se sert à Amsterdam : elle n'est point différente du mingle. Voyez MINGLE. (G)
BOUTEILLES D'EAU, (Physiq.) on appelle ainsi les petites gouttes rondes d'un fluide quelconque, qui sont remplies d'air & qui se forment, soit sur la surface du fluide par l'addition d'un fluide semblable, comme quand il pleut ; ou dans sa substance, par une vive commotion intérieure de ses parties. Voyez. PLUIE. Les bouteilles ou bulles d'eau sont dilatables ou compressibles ; c'est-à-dire qu'elles occupent plus ou moins d'espace, selon que l'air qu'elles renferment est plus ou moins échauffé, ou plus ou moins pressé : elles sont rondes, parce que l'air renfermé agit également au-dedans d'elles en tout sens. La tunique qui les couvre est formée des plus petites particules du fluide ; & comme ces particules sont très-minces, & ne font que très-peu de résistance, la bouteille creve bien-tôt pour peu que l'air se dilate. Le méchanisme de ces petites bouteilles est le même que le méchanisme de celles que les enfans forment avec du savon, en soufflant au bout d'un chalumeau.
Lorsqu'on a mis une liqueur sous le récipient de la machine pneumatique, & qu'on commence à pomper l'air, il s'éleve à la surface de la liqueur, des bouteilles ou bulles semblables à celles qui sont produites par la pluie. Ces bouteilles sont formées par l'air qui est renfermé dans la liqueur, & qui se trouvant moins comprimé lorsqu'on a commencé à pomper l'air du récipient, se dégage d'entre les particules du fluide, & monte à la surface.
Il en arrive autant à un fluide qui bout avec violence, parce que l'air qui y est contenu se trouvant raréfié par la chaleur, cherche à s'étendre & à se mettre au large, & s'échappe avec promtitude vers la surface du fluide, où il forme des bouteilles. Voyez BOUILLIR. (O)
BOUTEILLES, (Marine) ce sont des saillies de charpente sur les côtés de l'arriere du vaisseau de part & d'autre de la chambre du capitaine.
Les bouteilles sont à la place des galeries, dont l'usage fut supprimé par l'ordonnance de 1673. Leur figure ressemble assez à une moitié de fanal coupé de haut en-bas. Voyez Pl. I. lettre &. Les bouteilles n'ont guere qu'environ deux piés ou deux piés & demi de largeur, & sont conduites depuis les sabords de Sainte-Barbe jusqu'au couronnement. Voyez GALERIE.
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BOUTER | v. act. ce mot signifie, en termes de Marine, mettre, & pousser.
Boute le cable au cabestan.
Bouter à l'eau, c'est faire sortir un bateau hors du port, ou mettre la chaloupe ou le canot à la mer.
Boute au large ; c'est-à-dire pousse au large.
BOUTER DE LOF, (Marine) c'est venir au vent, bouliner, serrer le vent, prendre l'avantage du vent, mettre les voiles en écharpe pour prendre le vent de côté. (Z)
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BOUTEREAU | S. m. en terme d'Epinglier, c'est un poinçon rond d'acier, qui diminue de grosseur depuis le haut jusqu'en-bas : c'est avec cet outil que l'on grave l'empreinte de la tête dans l'enclume & dans le poinçon. Il faut qu'il soit bien trempé. Voyez la fig. 17. Pl. II. de l'Epinglier.
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BOUTEROLLE | S. f. ce terme a différentes acceptions, selon les ouvriers qui s'en servent. La bouterolle de l'Orfevre n'est pas la même que celle du Serrurier ou du Lapidaire. Voyez à la suite de cet article les définitions de ces bouterolles, qui n'ont presque rien de commun, si ce n'est de servir, les unes d'une façon, les autres d'une autre, à donner des formes tantôt concaves, tantôt convexes.
BOUTEROLLE de Doreur (la) est un morceau de fer arrondi par un bout, que l'ouvrier applique sur les boutons mis dans le tas, frappant sur l'autre bout afin qu'ils prennent la forme du tas. Voyez Planche du Boutonnier.
BOUTEROLLES des Graveurs en pierre fine (les), sont des morceaux de cuivre soudés sur une tige de même matiere. On monte la tige sur l'arbre du touret ; & la tête enduite de poudre d'émeril ou de diamant, use par le frottement la pierre qu'on lui présente. Il y en a de diverses formes & figures, les unes sphériques, les autres plates, les autres aiguës, les autres évuidées. Voyez les fig. 3. 8. Pl. III. de la Gravure, l'article GRAVURE en PIERRE FINE.
BOUTEROLLE du Metteur-en-oeuvre (la), est un morceau de fer arrondi par un bout, qu'on applique sur les pieces qu'on veut restraindre dans le dez à emboutir. Voyez DEZ à emboutir ; voyez Planche du Metteur-en-oeuvre & Bijoutier, fig. 9.
BOUTEROLLE de l'Orfevre en grosserie (la), est un instrument de fer qui se termine aussi par une tête convexe de la forme d'une cuilliere ou d'un autre ouvrage : c'est en frappant cette bouterolle sur la cuilliere disposée sur une masse de plomb, qu'on forme la capacité ou le cuilleron. Voyez Pl. II. fig. 8.
BOUTEROLLE du Serrurier (la), est une sorte de roüet qui se pose sur le palâtre de la serrure, à l'endroit où porte l'extrémité de la clé qui le reçoit, & sur lequel elle tourne. Le bout de la clé reçoit la bouterolle par le moyen d'une fente pratiquée au panneton, entre la tige & le panneton.
Il y en a de différentes sortes. Il y a des bouterolles avec un faussillon ; ce sont celles où la bouterolle avec le faussillon forment une croix qui n'a qu'un croison ou un bras.
Il y a des bouterolles à faussillon, renversées & en bâton rompu ; ce sont celles où le bord du faussillon renversé forme un bâton rompu.
Il y a des bouterolles à crochet ; ce sont celles où le bord de la bouterolle est renversé, & forme un crochet.
Il y a des bouterolles où toutes les formes ci-dessus se trouvent employées, & sur lesquelles on en pourroit encore employer d'autres. Voyez nos Planches de Serrurerie, & leur explication.
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BOUTEROUE | terme de riviere ; c'est ainsi qu'on appelle les bornes qui empêchent que les essieux des voitures ne brisent les garde-fous, par-tout où l'on en met sur leurs passages.
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BOUTES | S. f. pl. (Marine) ce sont de grandes futailles où l'on met de l'eau douce, que l'on embarque pour faire voyage. Les boutes ou tonnes à mettre de l'eau, ne sont pas fournies par le munitionnaire dans les navires de guerre, mais aux dépens du roi, aussi-bien que les barrils, seilleaux, & liége pour les boutes, lesquelles doivent être cerclées de fer.
BOUTE, BAILLE, s. f. (Marine) se dit encore d'une moitié de tonneau en forme de bacquet, dans laquelle on met le breuvage, qui est distribué chaque jour à l'équipage, (Z)
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BOUTICLAR | S. m. terme de riviere ; c'est une grande boutique à poisson. Voyez BOUTIQUE.
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BOUTILLIE | ou BOUTEILLER, le grand boutillier ou bouteiller de France, s. m. (Hist. mod.) nom qu'on donnoit anciennement à l'officier que nous nommons aujourd'hui le grand échanson, & qu'on appelloit alors en latin buticularius ; comme on le voit dans une souscription du testament de Philippe-Auguste, rapportée par Rigord. Le grand boutillier étoit un des cinq grands officiers de la couronne, qui signoit dans toutes les patentes des rois, ou du moins assistoit à leur expédition. Il avoit séance entre les princes, & disputoit le pas au connétable. Il prétendoit avoir droit de présider à la chambre des comptes ; & l'on trouve en effet sur les registres de cette chambre, qu'en 1379 Jean de Bourbon, grand boutillier de France, y fut reçu comme premier président. Depuis même, cette prérogative fut annexée par édit du roi à la charge de grand boutillier : mais soit négligence du titulaire de cette derniere charge, soit disposition contraire de la part du souverain, ce privilége ne subsista pas, & la charge de grand boutillier fit elle-même place à celle de grand échanson. Au reste cette dignité étoit fort considérable du tems de Charlemagne ; & Hincmar dans ses lettres en parle comme d'un des principaux postes du palais de nos rois. (G)
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BOUTIQUE | S. f. (Commerce) lieu où les marchands exposent leurs marchandises en vente, qui est ouvert sur la rue & au rez-de-chaussée. On l'appelloit autrefois fenêtre & ouvroir, comme on le voit dans les anciens statuts des communautés des Arts & Métiers.
On dit dans le commerce, lever, ouvrir boutique ; garder, conduire la boutique ; se mettre en boutique, garçon de boutique, fille de boutique, &c.
Il y a aussi des boutiques dans les foires, dans les salles du Palais, &c. On appelle encore boutiques certains étaux portatifs, à l'abri desquels se mettent les petits marchands dans les foires. Voyez éTAU.
Boutique se dit aussi du fonds d'un marchand. Ce négociant a vendu ou cedé sa boutique à son garçon, à son associé, c'est-à-dire qu'il lui a abandonné ses marchandises, son fonds.
Arriere-boutique est un magasin sur le derriere d'une maison, destiné à mettre les marchandises qu'on veut conserver.
Garde-boutique se dit d'une vieille étoffe défectueuse ou qui n'est plus de mode.
BOUTIQUE, dans le commerce du poisson d'eau-douce, est un bateau dont se servent les marchands de poisson pour le voiturer & le nourrir en attendant qu'ils le vendent. Ces bateaux sont percés de divers trous au-dessous du niveau de la riviere, & ne sont soûtenus sur l'eau que par le vuide qui est à l'avant & à l'arriere.
A Paris, la plûpart de ces boutiques sont placées au port Saint-Paul & à la descente du pont Marie. Le prevôt des marchands & les échevins connoissent des contestations & délits sur le fait desdites boutiques. (G)
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BOUTIS | S. m. c'est ainsi qu'on appelle en Vénerie, tous les lieux où les bêtes noires ont remué la terre ; on dit, ces forêts sont toutes remplies de boutis.
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BOUTISSE | S. f. terme d'Architecture, c'est une pierre dont la plus grande longueur est dans le corps du mur. Elle est différente du carreau, en ce qu'elle présente moins de face ou de parement, & qu'elle a plus de queue. (P)
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BOUTOI | ou BOUTOI, s. m. c'est en Vénerie, le bout du nez des bêtes noires ; on dit, ce sanglier a le boutoi fort.
BOUTOIR, outil de Corroyeur ; c'est une espece de couteau emmanché par les deux bouts, à-peu-près comme la plane des Tonneliers, à l'exception que les manches n'en sont pas recourbés. Les Corroyeurs se servent de cet instrument pour bouter les cuirs qu'ils veulent corroyer.
Ces artisans ont deux sortes de boutoirs ; l'un dont le tranchant est émoussé, qu'on appelle pour cette raison un coûteau sourd ; l'autre au contraire a le tranchant fort affilé. Voyez CORROYER, & les figures 3 & 4 Planche du Corroyeur.
BOUTOIR ; les Maréchaux appellent ainsi un instrument qui sert à parer le pié du cheval, & à en couper la corne superflue. Il est large de quatre doigts, & recourbé vers le manche. Voyez PARER. Voyez la Planche du Maréchal.
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BOUTON | S. m. petit ouvrage composé d'un morceau de bois plat dessous, arrondi dessus, & recouvert en cuivre, en argent, en or, en soie ou en poil, servant dans l'habillement à réunir deux parties séparées, ou à en contenir deux autres l'une sur l'autre au moyen des boutonnieres dans lesquelles les boutons se passent. Les boutons se divisent en trois especes ; en bouton à pierre, en bouton de métal, & en bouton tissu.
Ces derniers sont ou poil & soie à la brochette, ou boutons de soie pure, ou boutons d'or & d'argent ; enfin, ou boutons planés.
Toutes ces différentes especes de boutons sont unies ou façonnées ; il n'y a point de difficulté pour l'uni, c'est un tissu simple. Le bouton façonné est celui sur lequel on exécute des desseins en soie, en or, ou en argent ; ces desseins varient au-delà de ce qu'on peut s'imaginer ; un ouvrier quelquefois ne fait pas dix garnitures d'un même dessein. Cet art tout méchanique qu'il est, demande donc du goût & même de l'imagination ; il est vrai que les desseins ne changent guere que quant à la forme ; le fond reste toujours le même. On fait des boutons à épi, à mande, en limasse, &c. mais c'est toûjours avec du bouillon, du luisant, des falbalas, des cordes à puits, des roues, &c. Voyez tous ces articles.
Quant à la matiere, c'est toûjours deux fils de poil tords avec un fil de soie pour les boutons poil & soie, unis, façonnés, ou à la brochette ; de la soie pure, pour ceux de soie. Les boutons d'or ont une premiere couche pour ainsi dire d'une soie médiocre, qui sert de fondement à l'or ; s'ils sont rostés en soie, ce doit être de soie de Piémont, la plus belle de toutes celles qu'employent les Boutonniers, pour approcher le plus qu'il est possible de l'éclat de l'or ; ensorte que le bouton d'or du moindre prix est fait avec la meilleure soie ; l'or & l'argent sont en trait, en luisant, en frisé, en cordonnet, &c.
Le bouton poil & soie uni se fait avec quatre pointes. Voyez POINTE. On y distingue les coins, les ondes, & la croix. Voyez ces articles & bouton poil & soie uni.
Le bouton poil & soie à la brochette se fait sans pointes sur une petite broche qui sert à tenir le bouton qui y est fiché. Il n'a que des coins & une croix sans ondes. Voyez BOUTON A LA BROCHETTE, & BROCHETTE.
Tous ces boutons ayant une manoeuvre particuliere, pour ne rien donner ici de confus, nous avons pris chaque espece à part, & nous les avons conduites de la premiere opération à toutes les autres dans le rang qu'elles ont entr'elles.
Bouton à amande, est un bouton d'or entouré d'un cerceau simple ou gravé, découpé en plein. Voyez CERCEAU, & dont la tête est fermée d'un dessein qui représente une amande ovale, quarrée, longue ou ronde. Il se fait comme le bouton façonné par un premier jettage de soie, un second de cerceaux arrêtés à l'aiguille, & enfin on forme son amande. Voyez AMANDE, & on l'orne de cordelieres, de roues, de falbalas, de corde à puits, &c. Voyez tous ces articles. Ces ornemens se mettent à l'aiguille, & s'attachent comme nous l'avons dit, au bouton façonné. Voyez BOUTON FAçONNE, avec une soie de grenade égale & cirée.
BOUTON A LA BROCHETTE, en terme de Boutonnier, est un bouton fait sans pointe sur une brochette. Voyez BROCHETTE. Le plus difficile dans ce bouton c'est de jetter les premiers tours sur les bords d'un moule à surface arrondie. Les autres tours se font de l'un à l'autre, mais sans revenir deux fois sur le même coin ; au bouton couvert de cette sorte, le poil s'est amassé autour de la brochette en-dessous en quatre tas ou parties que l'on embrasse ensemble avec un fil double : on les arrête ensuite. Ces boutons n'ont point d'onde, & doivent être cousus sur les habits par les quatre branches que nous avons dites, sans passer l'aiguille au milieu d'elles, ce qui romproit des brins, & détruiroit le bouton en peu de tems.
BOUTON A CUL-DE-DE, est un bouton façonné qui n'a point de premier jettage ; on le fait en or ou en argent filé, ou en milanoise ; on jette d'abord divers passages de plusieurs brins, chacun de ces passages étant également distans l'un de l'autre ; puis on a une aiguille enfilée d'un pareil nombre de fils que l'on coule sur le premier passage & sous le second, sur le troisieme & sous le quatrieme, ainsi des autres : ce qui fait des quarrés les uns vuides, & les autres pleins, assez semblables aux creux & aux pleins d'un dé, à la forme près. Ce bouton se fait sur la brochette.
BOUTON D'OR UNI, en terme de Boutonnier, se fait avec les pointes ou à la brochette, selon qu'on veut qu'il ait des ondes ou qu'il n'en ait pas. L'or peut être en luisant, en frisé, en trait, en guipé, en cordonnet, &c. Voyez ces mots à leur article. Alors les boutons sont glacés ou guipés, &c. Les opérations dans toutes ces sortes de boutons sont les mêmes que dans les boutons unis poil & soie, aux pointes ou à la brochette. Voyez ces mots excepté que les coins sont toûjours de fil dans les boutons de trait glacé. Voyez COINS ; parce que l'aiguille romproit ce trait, s'il n'y avoit pas des endroits pour la ficher ; & que ces boutons sont plus difficiles à faire que ceux de poil & soie ; parce que dans ceux-ci on ne mene qu'un brin à la fois, & que ceux-là on en mene plusieurs qu'il faut prendre garde de ne poins mettre l'un sur l'autre.
BOUTON D'OR FAçONNE, se dit d'un bouton sur lequel on a exécuté un dessein, & que l'on a décoré de divers ornemens. Soit que les boutons soient à amandes, à épi, à limasse, &c. Voyez ces articles. On commence par les jetter en soie, à plusieurs brins qui servent d'assiette aux cerceaux, s'il y en a, & de prise à l'aiguille s'ils sont rostés ou enjolivés. Voyez CERCEAUX & ROSTER. Ce jettage achevé, on fait celui des cerceaux, ou on applique les ornemens : dans le premier cas, on arrête les cerceaux avec du trait ou de la soie en les tournant diversement autour du bouton, de maniere que ces tours l'embrassent avec grace. On le roste en soie ou or, & on le bouillonne, pour les finir. Voyez BOUILLONNER. Dans le second cas, on place les pieces de rapport qu'on y destine, en formant tel ou tel dessein avec l'aiguille & une soie de grenade unie, égale, & cirée, qui les attache par le premier jettage. Ce premier jettage est la base & le fondement des opérations pour toutes les especes de boutons façonnés. Nous le disons ici pour ne plus le répéter. Voyez JETTAGE.
BOUTON A éPI, est un bouton façonné, roulé après le premier jettage (voyez ROULER) d'or en trait, en cordonnet, en luisant, & couvert d'un cerceau ; ensuite on jette de haut en-bas autant de côtes de soie que l'on veut faire d'épis. Voyez éPI. Ces côtes servent à donner prise à l'aiguille qui ne pourroit se ficher dans le cerceau, on pose ses épis, on roste, & on enjolive le bouton de falbalas, roues, &c. Voyez ces mots.
BOUTON A GARDE D'éPEE, est un bouton uni en or ou argent, qui ne differe des autres que par ses ondes, qui sont beaucoup plus hautes que les ordinaires. Il se fait aux pointes ; & s'il est de trait, ce trait doit être du n°. 17. pour pouvoir être retordu avant d'être employé. Voyez POINTE, & BOUTON POIL ET SOIE UNI. On fait les ondes plus hautes en multipliant les passages sur le même sens. Voyez ONDE.
BOUTON A LIMACE, est un bouton façonné qui ne differe des autres que parce qu'il est entouré de plusieurs croix de soie luisante, & d'autres en rostage qui l'embrassent dans toute sa hauteur, & descendent de haut en-bas en tournant autour de lui ; ce qui donne à ces croix ou pans une forme approchante de celle de la coquille d'un limaçon. Ces sortes de boutons sont rarement enjolivés.
BOUTON POIL ET SOIE UNI, en terme de Boutonnier ; c'est un moule de bois couvert d'un fil composé de poil de chevre & de soie, deux tiers du premier, & un de l'autre : c'est au maître à faire ce mélange ; il l'exécute au roüet. Voy. ROUET. Il devide ensuite sa matiere sur une bobine, & la donne en cet état à l'ouvrier, qui pose la bobine sur un rochet. Voyez ROCHET. Il plante quatre pointes sur le moule en croix, en gardant des distances égales, autant qu'il est possible. Il fait sur chaque pointe cinq ou six tours, en allant de l'une à l'autre, pour former les coins. Voyez COINS. Il ôte ses pointes, prend une aiguille enfilée de gros fil, la fiche en-dessous dans les tours faits ; fait un tour sur un coin ; plie son poil sur le fil de son aiguille ; retourne sur le même coin, y arrête son poil en le pliant comme ci-dessus, & gagne un autre coin où il fait encore deux tours ; ainsi du reste jusqu'à la croix. Voy. CROIX. Il arrête le pié du bouton avec le fil de son aiguille, & donne son ouvrage en cet état à un autre ouvrier qui l'arrête. Arrêter, c'est faire un point en croix sur les tours qui terminent le bouton. On se sert pour cet effet de l'aiguille, & d'un fil pareil à celui du bouton.
Les BOUTONS à pierre ne sont autre chose que des cailloux, des pierres ou des crystaux, auxquels le Lapidaire a donné la forme de bouton, & qui reçoivent du Metteur-en-oeuvre une monture propre à l'usage du bouton.
Les BOUTONS en argent, or & cuivre, ne sont autre chose que des feuilles minces & rondes de ces métaux, auxquelles on donne la forme de boutons par le moyen de tas où l'on a pratiqué à l'aide du poinçon, des concavités dans lesquelles les feuilles étant frappées, elles prennent non-seulement la figure convexe, mais encore cette figure sur tous les ornemens qu'on a pratiqués en creux dans le tas.
BOUTON plane, en terme de Boutonnier, est un bouton d'un métal quelconque, en plein, monté sur un moule, & le reste du vuide rempli d'une espece de ciment. La matiere de ces boutons est tantôt du plomb, tantôt de l'étain argenté, tantôt du cuivre & de l'argent, & plus rarement de l'or. Les Boutonniers prennent les trois derniers métaux, l'un chez le Fondeur, & les autres chez l'Orfevre. Quant au plomb ou à l'étain argenté, ils fondent l'un & l'autre, & argentent le dernier chez eux. Leur moule est un morceau de fonte de la forme qu'il a plû de lui donner, gravé d'un trou de la profondeur que doit avoir la calotte. On jette la matiere fondue dans un moule ; on le panche aussi-tôt de côté, pour verser la matiere qui remplit la calotte : elle tombe ; & ne laissant que celle qui s'est d'abord figée aux parois du moule, il vient une calotte creuse. Le cuivre, l'argent & l'or en rubans, sont coupés à l'emporte-piece F E, G H, en ronds C C C, D D, Pl. du Boutonnier en métal, de différentes grandeurs. Alors on emboutit tous ces métaux dans un tas uni M N, ou gravé en creux, en frappant sur des bouterolles. Voyez BOUTEROLLES, & la fig. 1. On coupe le plus gros autour avec des ciseaux. On passe la corde à boyau dans les moules, en commençant d'abord par un trou, & allant de l'un à l'autre jusqu'au quatrieme ; ce qui forme deux tours sur le bouton. On fait les deux autres en passant par les mêmes trous, & remplissant les espaces vuides. On fait fondre le mastic pilé dans les calottes exposées sur le feu dans une platine de fer à bord, d'un demi-pouce de haut, & remplie de sablon à une certaine épaisseur, qui sert à entretenir la chaleur, & à empêcher que les calottes ne fondent. Voyez fig. 2. Le mastic fondu, on y met le moule. Voyez MOULE. On sertit les calottes autour du moule sur un tour, & avec des brunissoires : enfin on rabat la calotte avec une langue de serpent tranchante, en coupant l'extrémité en biseau, & l'appliquant le plus près du moule qu'il se peut. On polit pour derniere façon les boutons, de quelque métal qu'ils soient, & on les attache par douzaines sur un petit carton quarré.
* BOUTON, (MOULE DE) Arts méchaniques ; Le travail des moules de bouton est un très-petit art, dont voici la description. Les moules de bouton sont assez ordinairement de bois de chêne. Il faut se procurer des bûches de ce bois de six à sept pouces en quarré. On prend ces bûches ; on a une espece d'étau de bois entre les mâchoires duquel on les place les unes après les autres, comme on en voit une en a. Deux ouvriers ou scieurs, tels qu'ils sont représentés Pl. du faiseur de moules à bouton, fig. 1. & 2. coupent avec une scie la bûche a en tranches de l'épaisseur de 4, 5, 6, 7 lignes. Ces tranches passent entre les mains d'un ouvrier assis sur une espece de chevalet, jambe de-çà, jambe de-là, & ayant devant lui le moule perçoir monté sur une poulie & posé par ses deux extrémités sur deux appuis qui servent de collets. Une corde passe sur cette poulie, & va se rendre sur une grande roue ; deux ouvriers ou tourneurs font mouvoir la roue, & par conséquent la poulie & le moule perçoir qui la traverse, & qui lui sert d'axe. C'est ce qu'on voit fig. 3. 4. 5. Le moule perçoir, fig. 9. est composé de deux parties, d'un manche & d'un fer. Le corps du manche a n'a rien de particulier ; c'est une boîte à foret oblongue, sur laquelle une corde peut se rouler. La tête ou partie supérieure est faite de deux petits tenons séparés par une fente, dont les faces sont inclinées l'une vers l'autre ; ensorte que l'ouverture de la fente est plus étroite en bas qu'en haut : le fer a la même inclinaison, par laquelle il s'insere, s'applique & se fixe entre les faces des tenons, comme on l'y voit en 1, 2, 3. L'extrémité du fer est terminée par cinq pointes : celle du milieu est la plus longue ; elle sert à percer le moule du bouton au centre ; les deux parties voisines de celles du milieu tracent des moulures à sa surface, les deux des extrémités forment les bords du moule, & l'enlevent de la tranche de bois. Toutes ces pointes qui sont encore tranchantes par leurs bords, & qui forment la concavité d'un arc de cercle sur le fer, ne peuvent tourner sur elles-mêmes, sans donner au morceau de bois qu'on leur applique une figure convexe.
L'ouvrier représenté fig. 5. applique une tranche de bois au moule perçoir, & la met successivement en autant de moules de boutons qu'elle peut être percée de trous. Comme il y a des boutons de différentes grosseurs, il faut aussi des moules de différentes grosseurs, & par conséquent différentes sortes de moules perçoirs. On en voit un plus petit, fig. 10. son fer n'a que trois pointes ; celle du milieu qui perce le moule de bouton, & les deux des côtés qui sont concaves, forment la surface convexe du moule, & le séparent de la tranche de bois. On peut faire mouvoir le moule perçoir par le moyen d'une roue & d'une poulie ; mais on le peut aussi par le moyen d'un archet, comme on voit fig. 7. 8. On doit aller plus vîte à la roue qu'à l'archet, & former plus de moules en moins de tems ; mais en revanche il faut un ou deux ouvriers de plus. Le chevalet, dans ce second cas, est le même que dans le premier : l'ouvrier est assis dessus de la même maniere ; & la seule différence qu'il y ait entre l'une & l'autre manoeuvre, c'est que le moule perçoir est monté dans une boîte, & se meut ici par l'archet, & que dans le premier cas il est monté dans une poulie & se meut par des tourneurs. Il semble qu'il faudroit travailler les petits moules de boutons à l'archet, & les gros moules à la roue.
Lorsque les boutons sont enlevés, il s'agit d'y faire les trous à passer les cordes : c'est ce qui s'exécute avec beaucoup de promtitude avec la perçoire de la fig. 11. Cette perçoire peut se monter sur une poulie, ou s'insérer seulement, comme on la voit ici, dans une longue boîte à foret. Dans le premier cas, les trous à cordes se feront à la roue ; dans le second, ils se feront à l'archet.
Il est à-propos que le bois de moule à boutons soit dur & sec, afin qu'il se tranche net. On faisoit autrefois des moules à bouton avec la corne ; mais la mode en est passée.
Ce métier nourrit à peine l'ouvrier, & il ne peut guere se tirer d'affaire que par la célérité.
Ces moules se vendent à tous ceux qui font des boutons. Les Boutonniers-Passementiers les couvrent de fils de soie, de poil de chevre, d'or & d'argent. Voyez BOUTON. Les Orfevres en remplissent la concavité des boutons qu'ils frappent sur le tas, les contenant dans cette concavité à l'aide de la bordure de bouton, & d'un enduit ou de mastic, ou de ciment mêlé avec la poix-résine.
Le terme bouton ne se prend pas seulement pour une des parties de notre habillement ; on a transporté le même nom à une infinité d'autres choses qui n'ont de commun avec cette partie que la seule forme, comme on le verra dans les articles suivans.
BOUTON, (Chimie & Métall.) On désigne par ce mot un globule d'argent qui reste sur la coupelle au fourneau d'essai. Lorsque pour essayer de l'argent on le met sur la coupelle où il y a du plomb fondu, il commence par noircir un peu ; ensuite il se fond en tournoyant continuellement, & paroît bouillonner. A mesure que les bouillons grossissent, ils deviennent moins fréquens, & la matiere qui les environne diminue. Enfin il ne se fait plus que deux ou trois bouillons, qui se rassemblent pour n'en former plus qu'un ; ce qui fait éclair ou coruscation, ou l'opale. Pendant ce tems le globule paroît tourner encore ; enfin il cesse & demeure sans mouvement. On le laisse refroidir peu-à-peu ; & ce qu'on trouve sous la coupelle, est ce qu'on nomme le bouton ; on le pese pour connoître le titre de l'argent. (M)
BOUTON, (Chirurgie) tubercule ou petite tumeur rouge qui s'éleve sur la peau, principalement au visage. Cette tumeur est de la nature du phlegmon (voyez PHLEGMON), & se termine ordinairement par suppuration. Voyez ABCES.
Bouton est aussi un instrument de Chirurgie dont on se sert dans l'opération de la taille. Voyez Pl. XI. fig. 6. Il en compose trois, parce qu'il a trois usages dans cette opération. C'est une espece de sonde d'acier ou d'argent, très-polie, longue de huit pouces. Le corps de cet instrument est cylindrique ; il a cinq pouces de long, près de quatre lignes de diametre à sa base, & deux lignes à sa pointe. Le long de cette tige regne une crête ou languette qui s'éleve doucement vers la base, & qui devient de plus en plus éminente jusqu'aux deux tiers de son chemin, où elle ne doit pas excéder une ligne & un tiers de hauteur ; elle continue ensuite en diminuant insensiblement, pour finir en mourant. La longueur de cette crête est de quatre pouces & demi.
L'extrémité antérieure de cet instrument est la suite du corps ; elle a encore un peu de la figure cylindrique & pyramidale, puisqu'elle va en diminuant de volume pendant la longueur de trois lignes. Cette extrémité est recourbée du côté de la crête, & se termine par un bouton en forme de poire de cinq lignes de longueur sur deux & demie de diametre. Ce bouton qui donne le nom à tout l'instrument, est très-adouci & très-poli, pour ne point blesser la vessie.
L'extrémité postérieure forme une espece de cuilliere beaucoup plus allongée que large ; elle n'a à son extrémité la plus évasée que cinq lignes de diametre : se longueur est de deux pouces deux lignes. Sa cavité est du coté opposé à la crête & au bouton ; elle commence doucement, & a environ trois lignes de profondeur dans l'endroit le plus creux, pour se terminer par une espece de bec arrondi. Le dehors de cette cuilliere est très-poli, & fait une legere courbure qui se jette du côté de la crête.
L'usage du bouton est de pénétrer dans la vessie, pour retourner les pierres qui sont mal chargées dans les tenettes ; d'entrer dans cet organe après la sortie d'une pierre, pour savoir s'il n'y en a point d'autres. La crête fait l'office de conducteur, puisque c'est par son moyen qu'on réitere avec sûreté l'introduction des tenettes dans la vessie autant qu'il en est besoin. Enfin la curete sert à ôter les fragmens de pierre, les sables, les caillots de sang, & autres corps étrangers qu'on ne peut tirer avec les tenettes.
Bouton de feu, est un nom qu'on donne au cautere actuel. Voyez CAUTERE. (Y)
BOUTON, on appelloit ainsi dans l'Artillerie, un petit corps rond fondu avec le canon à l'extrémité de la volée, & qui étoit aussi élevé sur l'ame de la piéce, que la partie supérieure de la culasse. On s'en servoit pour mirer ou pointer le canon ; mais l'ordonnance du 7 Octobre 1732 supprime ce bouton à toutes les pieces : on se sert à sa place du fronteau de mire. Voyez POINTER.
Il y a aussi dans le canon l'extrémité de la culasse qui forme une espece de bouton, & que l'on appelle par cette raison le bouton de la culasse. (Q)
BOUTON, (Jardinage) est un petit point rond qui vient le long des branches des arbres, d'où sort la fleur qui doit produire le fruit. Les boutons des arbres à pepin ont plusieurs fleurs, ceux à noyau n'en ont qu'une.
Il y a deux sortes de boutons ; les boutons ronds, & les boutons plats : les ronds sont ceux qui font espérer des branches à fruits : les plats au contraire ne laissent entrevoir que des branches à bois. (K)
BOUTONS D'OR, voyez BASSINET.
BOUTON : les Artificiers appellent ainsi l'extrémité de la tétine du culot arrondie en forme de zone sphérique, du milieu de laquelle s'éleve la broche qui forme l'ame de la fusée. Voyez CULOT.
BOUTONS, en termes de Brasserie, sont de petites parties de mousse en forme de boutons, qui s'élevent sur le levain.
BOUTON, en termes de Fourbisseur, est un demi-rond qui termine la garde par en-haut, & sur lequel on ride la soie, pour rendre la monture plus solide. Voyez la figure, Planche du Doreur.
BOUTON de la bride, (Maréchallerie & Manege) est un petit anneau de cuir, au-travers duquel les deux renes passent, & qu'on fait monter ou descendre selon le besoin qu'on en a. Couler le bouton, c'est le faire descendre sur le crin. Mettre un cheval sous le bouton, c'est raccourcir & tendre les renes par le moyen du bouton de la bride, que l'on fait descendre jusque sur le crin. On s'en sert quelquefois de cette maniere lorsqu'on dresse les chevaux d'arquebuse, pour les arrêter plus facilement & plus vîte.
Boutons de farcin, sont les grosseurs rondes qui viennent au cheval qui est attaqué de cette maladie.
Bouton de feu, est un morceau de fer long, terminé en pointe & emmanché ; que l'on fait rougir pour en percer la peau du cheval dans certains cas. (V)
BOUTONS DE RETOURS, en Rubanerie ; ce sont communément des moitiés de vieux rochets coupés en deux, à-travers lesquels on passe les tirans des retours, pour que ces retours soient plus aisément tirés par l'ouvrier, que s'il falloit qu'il les tirât par le tirant : on fait un noeud au bout de ce tirant qui empêche le bouton de retour de s'échapper.
BOUTONS, se dit aussi, dans les Manufactures de soie, des petites boules de bois traversées de ficelles, qui se rendent au rame, & qui tiennent lieu de semple dans les ouvrages à la petite tire. Voyez RAME, SEMPLE, & PETITE-TIRE.
BOUTON, eu Serrurerie ; c'est ce qui sert de main pour ouvrir & fermer les verroux, targettes, &c.
Il y en a de différentes sortes, selon la figure qu'ils ont : ainsi on dit, des boutons à olive ; on les fait ainsi dans les locquets à bascules, & dans les serrures à demi-tour : il y en a de ronds & de plats.
Bouton à filet & rosette ; ce sont ceux qu'on voit aux portes des appartemens, qui sont plats, & auxquels on voit un filet & une rosette : ils servent à tirer la porte. Le filet & la rosette sont de pur ornement.
Bouton à coulisse ; c'est celui qui dans les serrures en-dedans des appartemens, est placé sur le palatre ou sur les cloisons de dessus ou de dessous, & sert à ouvrir le demi-tour & la porte en même tems. Voyez nos Planches de Serrurerie, & leur explication.
BOUTON ou BATON, (Géog.) l'une des îles Molucques en Asie : elle a 25 lieues de long & 20 de large. La capitale s'appelle Calasusung : elle est grande & peuplée.
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BOUTONNE | (Géog.) riviere de France, qui prend sa source en Poitou, & qui se jette dans la Charente.
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BOUTONNÉ | en termes de Blason, se dit du milieu des roses & des autres fleurs, qui est d'un autre émail que la fleur. Il se dit aussi d'un rosier qui a des boutons & des fleurs de lis épanoüies, comme celle de Florence, d'où sortent deux boutons.
Gotafrey en Dauphiné, d'argent à trois roses de gueules, boutonnées d'or. (V)
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BOUTONNER | BOUTONNER
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BOUTONNERIE | S. f. (Commerce) marchandise de boutons. Ce mot se dit aussi de la profession de ceux qui en font commerce. Les Boutonniers-Passementiers fabriquent la boutonnerie d'or, d'argent, de fil, de soie, de poil, de crin, &c. Mais les marchands Merciers pour qui ces artisans travaillent, sont ceux qui en font le plus gros commerce.
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BOUTONNIER | S. m. celui qui fait & vend des boutons, & autres choses qui y ont rapport. Les Boutonniers font un corps considérable à les regarder par leur nombre ; le métier étoit même si étendu, que jadis chaque ouvrier en avoit choisi une branche, qu'il exerçoit sans se mêler des autres : les uns ne faisoient que retordre ; ceux-ci travailloient en boutons ; ceux-là en tresses ; d'autres en crêpines ; d'autres en boutons planés, l'un battoit, gravoit, & découpoit (voyez BATTRE, GRAVER, & DECOUPER) : cet autre avoit embrassé la partie des moules & des bois pour les gros ouvrages, enfin chacun avoit son district, d'où il ne sortoit & ne pouvoit sortir. Mais les deux tiers des ouvrages qui sont portés sur leurs statuts, ont passé de mode, & ne se font plus.
Les Boutonniers & les Rubaniers ne faisoient qu'un corps, gouverné par les mêmes lois, & travaillant avec les mêmes priviléges. Dans la suite, le nombre des uns & des autres s'étant fort accru, on en fit deux communautés, qui n'eurent plus rien de particulier entr'elles. Cette division pourroit fort bien avoir aidé à faire tomber la boutonnerie, que les Tailleurs auroient achevé de ruiner, s'ils n'avoient été déboutés de la prétention de mettre sur les habits des boutons de la même étoffe.
Les statuts des Boutonniers n'ont rien d'assez particulier pour en faire mention. Ils ont pour leurs apprentis & leurs compagnons, à-peu-près les mêmes reglemens que les autres communautés. Leur patron est S. Louis, & leur chapelle est dans l'église des enfans de la Trinité.
BOUTONNIER en émail, verre, & crystallin ; c'est un artisan qui fabrique des boutons à la lampe avec ces sortes de matieres. Les maîtres Boutonniers en émail forment une communauté dans la ville de Paris, & ont été réunis en 1706 avec les maîtres Verriers, couvreurs de bouteilles & flacons en osier. Mais on distingue toûjours les uns d'avec les autres : ceux-ci sont plus connus sous le nom de Fayenciers, & les premiers sous celui d'Emailleurs. Voyez éMAILLEURS.
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BOUTONNIERE | S. f. (Tailleur & Couturiere) ce sont des ouvertures longues & étroites, pratiquées par les Tailleurs à tous les endroits de nos vêtemens, d'homme sur-tout, où l'on veut avoir la commodité de les ouvrir & de les fermer par le moyen des boutons. Le bouton est à droite, & la boutonniere est à gauche. Le bouton est dessus le bord du vêtement, & il entre dans la boutonniere par-dessous. La boutonniere est faite ou de soie, ou de fil, ou de fil d'or & d'argent, selon la richesse ou la simplicité de l'habillement. Ses côtés sont bordés d'une espece de tissu fort, étroit, & un peu relevé, que le tailleur forme à l'aiguille ; & les extrémités sont contenues par deux brides.
Il y a des boutonnieres ouvertes, & ce sont celles dont nous venons de parler. Il y en a de fermées, & ce sont celles qu'on place dans des endroits où elles étoient autrefois d'usage, & où la boutonniere & le bouton ne sont plus que d'ornement.
Les boutonnieres prennent chez les Tailleurs & les Couturieres, différens noms relatifs à la façon de la boutonniere.
BOUTONNIERE, terme de Chirurgie, incision qu'on fait au périnée, pour pénetrer dans la vessie & y placer une cannule qui puisse donner issue aux matieres qui y sont contenues.
Cette opération est nécessaire pour procurer le cours des urines, des graviers, & du pus ; par son moyen on fait commodément des injections dans une vessie graveleuse ou ulcérée : elle a lieu dans certaines rétentions d'urine qui viennent des fongus de la vessie ; ce sont des excroissances charnues qui bouchent l'orifice interne de la vessie, & qui empêchent que la contraction de ce viscere agisse sur l'urine contenue.
Pour faire cette opération, on place le malade comme pour lui faire l'opération de la taille ; on prend une sonde cannelée (voyez CATHETER) ; on l'insinue doucement dans la vessie (voyez CATHETERISME) ; un aide monté sur une chaise ou un tabouret, placé au côté droit du malade, soûleve les bourses, & applique ses doigts indicateurs parallelement le long du périnée à chaque côté de l'urethre. L'opérateur, le genou droit en terre, tient avec fermeté de la main gauche le manche de la sonde, de façon qu'elle fasse un angle droit avec le corps du malade. Il fait faire, autant qu'il est possible, une saillie au périnée avec la courbure de la sonde, à côté du raphé, entre les deux doigts index de l'aide-chirurgien. L'opérateur doit appuyer pour un moment le bec de sa sonde sur le rectum, pour bien remarquer au-dessus de l'anus jusqu'à quel endroit il pourra continuer l'incision. Il prend alors un lythotome ou bistouri, qu'il tient de la main droite comme une plume à écrire : il porte la pointe de l'instrument dans la cannelure de la sonde, au-dessous des bourses ; il perce les tégumens & l'urethre au côté gauche du raphé, & il continue son incision inférieurement jusqu'au point qu'il a remarqué au-dessus de l'anus, en se gardant de passer outre, de crainte d'intéresser l'intestin. Dès que l'incision est faite, l'opérateur retire le lythotome, & prend un gorgeret dont il porte le bec dans la cannelure de la sonde, sur laquelle il le fait couler jusque dans la vessie. Il retire la sonde, prend le manche du gorgeret avec la main gauche, & de la droite il conduit une cannule arrivée dans la vessie à la faveur du gorgeret, qu'il retire ensuite en lui faisant faire un demi-tour sur la cannule ; de façon qu'en le retirant, son dos ou surface convexe regarde l'angle supérieur de la plaie, qu'on panse avec de la charpie seche, qu'il faut soûtenir avec des compresses & un bandage contentif, qui ne gêne point la sortie de l'urine. Il ne differe point de l'appareil de la lythotomie. Voyez LYTHOTOMIE.
L'objet de la Chirurgie est de guérir & non d'opérer : ainsi dès qu'on a fait la boutonniere au périnée, on n'a rempli qu'un des points du traitement, & le malade se trouve simplement dans une disposition favorable pour recevoir les secours qu'un chirurgien intelligent doit lui procurer. Cette opération permet l'issue aux matieres graveleuses, dont il faut aider la sortie par des injections, & dont il faut quelquefois faire l'extraction lorsqu'il se trouve des petites pierres, dont le volume sera d'un diametre plus grand que celui des ouvertures latérales de l'extrémité antérieure de la cannule. Voyez CANNULE. Les injections doivent être appropriées à la nature & à l'état de la maladie qui les exige, parce qu'il faut quelquefois mettre des fongus en suppuration ; tantôt mondifier une vessie malade, déterger ensuite les ulceres ; d'autres fois fortifier les fibres qui ont perdu leur ressort, &c. Lorsqu'on sera parvenu à rétablir les choses dans l'état naturel, par l'usage successif ou combiné des différens moyens qui seront indiqués, on supprime la cannule, & on met dans l'urethre une sonde creuse ou cannelée, courbée en S (voyez ALGALIE) par laquelle les urines couleront d'abord en partie : à mesure que la plaie se resserrera, les urines ne prendront point d'autre route pour s'écouler ; & la plaie n'étant plus mouillée par les urines, elle se réunira bientôt.
L'administration des remedes doit être variée, & n'est pas, comme on voit, moins soûmise aux indications dans le traitement des maladies chirurgicales, que dans celui des maladies internes : le manuel chirurgical même doit être différent, suivant les circonstances qui se présentent. On sait que l'art d'opérer, dépouillé de tout rapport à la guérison des maladies, & considéré simplement en lui-même, demande des connoissances anatomiques très-exactes : mais elles ne suffisent point à un chirurgien. La structure de la partie ne lui montre point de routes nouvelles pour diriger ses opérations : l'usage des parties & le méchanisme par lequel elles exécutent leurs fonctions, sont absolument nécessaires à savoir, pour qu'on puisse juger sainement de la maladie, qui consiste dans la lésion des fonctions. C'est sur ces connoissances physiologiques & pathologiques, qui suffisent à un habile homme dans l'autre branche de l'art de guérir, & qui dans la Chirurgie doivent être soûtenues de la connoissance exacte de la structure, du volume, de l'étendue, des attaches des parties, & de leurs différens rapports à celles qui les environnent, qu'on sait se tracer & qu'on suit avec toute la certitude possible des voies d'opérer qui ne sont point déterminées par les préceptes. Dans l'opération de la boutonniere, l'incision est commune aux tégumens & à l'urethre ; cependant des circonstances particulieres demandent qu'on étende & qu'on dirige différemment la section des parties. Il survint à un homme de quarante-cinq ans, par une rétention totale d'urine, une tumeur au périnée qui s'étendoit dans les bourses, dans les aines, sous la peau qui couvre le pubis & la verge. Le progrès en fut si rapide, qu'en deux fois vingt-quatre heures il survint une suppuration gangreneuse. On ouvrit en plusieurs endroits du périnée, des bourses, & des aines ; les parties se dégorgerent, les urines coulerent en abondance, les lambeaux gangréneux se détacherent ; on parvint enfin à guérir toutes ces plaies, excepté une du périnée qui resta fistuleuse, & par laquelle les urines couloient involontairement. Le malade avoit déjà souffert l'opération de la boutonniere sans succès, lorsqu'il se confia à M. Petit. Je supprime ici le détail des complications & des traitemens préliminaires que ce grand praticien mit en usage, pour me restraindre à l'opération. M. Petit jugea par la sortie continuelle & involontaire des urines, que l'orifice interne de la fistule étoit au-delà du sphincter de la vessie, parce que quand le trou d'une fistule est en-deçà du sphincter, l'urine ne peut sortir par la fistule qu'après être entrée dans l'urethre, & elle n'y entre que par les efforts que le malade fait lorsqu'il veut uriner. Ce malade au contraire, sans être averti du besoin d'uriner, & sans faire aucun effort, rendoit presque toutes ses urines par le trou de la fistule sans en rendre par la verge, ou s'il en rendoit, c'étoit toûjours volontairement, & quand il étoit excité par le résidu des urines ; car le trou de la fistule étoit si petit, que malgré l'écoulement involontaire & continuel des urines, sa vessie se remplissoit une ou deux fois par jour ; de sorte qu'à chaque fois il rendoit un verre d'urine & à plein canal, sur-tout lorsqu'avec le doigt il bouchoit le trou de la fistule près le bord de l'anus. Sur ces observations, M. Petit jugea que le trou interne de la fistule étant au-delà du sphincter de la vessie, il falloit que l'incision s'étendit jusque-là ; & que l'opération faite à ce malade par les chirurgiens de sa province, avoit été infructueuse, parce que le trou interne de la fistule n'avoit point été compris dans l'incision. Pour guérir radicalement le malade, M. Petit, après avoir fait l'incision comme nous l'avons décrite, la continua en coulant son bistouri le long de la cannelure de la sonde, & la porta jusqu'au-delà du cou de la vessie, pour fendre le sinus fistuleux dans toute son étendue : il mit une cannule, & réussit comme il l'avoit solidement conçû, à guérir le malade. Cette observation est insérée dans le premier volume des Mém. de l'acad. royale de Chirurgie.
A l'occasion des opérations qui conviennent au périnée & à la vessie, indépendamment de la lythotomie, voyez FISTULE AU PERINEE & RETENTION D'URINE. (L)
BOUTONNIERE ; on donne en général ce nom à toute piece de bois de layetterie d'environ sept pouces de long, cinq de large, & quatre de haut.
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BOUTRIOT | est parmi les Cloutiers d'épingles une espece de burin dont ils se servent pour faire la petite cavité du poinçon. Voyez POINçON, & Pl. du Cloutier d'épingles, fig. 17. & 18.
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BOUTS | S. m. c'est ainsi que les Cordonniers appellent des morceaux de cuir, forts, attachés sous les talons des souliers avec des chevilles de bois, soit que les talons soient de cuir ou qu'ils soient de bois.
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BOUTTES | S. f. (Comm.) espece de grands tonneaux dans lesquels on enferme en Guienne les feuilles de tabac après qu'elles ont sué. Chaque boutte contient environ sept quintaux de feuilles.
Boutte est aussi le nom qu'on donne à des barriques dans lesquelles on met le caviac ou oeufs d'esturgeon & de mouronne qui viennent de la mer Noire. La boutte de caviac pese sept quintaux & demi. Voyez QUINTAL. (G)
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BOUTURE | S. f. (Jardin.) c'est une branche que l'on coupe à certains arbres moëlleux, tels que le figuier, la saule, le coignassier, le groseiller, laquelle reprend en terre sans racines.
Plusieurs confondent la bouture avec la marcotte qui est bien différente, en ce que cette derniere est une branche couchée en terre, mais qui n'est point séparée de l'arbre qui lui donne vie, & qu'on ne sevre que quand elle a des racines ; au lieu que la bouture & le plançon sont des branches sans racines. Voyez MARCOTTE. (K)
BOUTURE, terme d'Orfevre, eau préparée, lexive faite avec du sel de tartre pour blanchir l'argent. La coûtume qu'on a prise de blanchir l'argent au feu, a mis cette eau presque hors d'usage.
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BOUVEMENT | S. m. outil qui sert aux Menuisiers pour faire les moulures sur leurs ouvrages : il ne differe de l'espece générale des bouvets, qu'en ce que son profil est une cimaise ; du reste la maniere de se servir de cet outil est la même. Voyez BOUVET, & la fig. 16. Pl. II. du Menuisier, qui le représente.
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BOUVET | sorte de rabot, outil qui sert aux Menuisiers & aux Charpentiers à faire les rainures & les languettes. Le bouvet qui fait les rainures s'appelle bouvet mâle, & celui qui forme les languettes s'appelle bouvet femelle. Le premier est représenté fig. 17. Pl. II. du Menuisier : on voit à côté le profil d'une rainure. L'autre représenté fig. 18. est le bouvet femelle, qui sert à faire des languettes dont on voit le profil à côté : on ne se sert de ces outils qu'après que les bois sont bien dressés, & la maniere de s'en servir est la même que celle du feuilleret. Voyez FEUILLERET.
BOUVET de deux pieces ou brisé, sorte de rabot qui differe des autres en ce que sa joue est montée sur deux tiges quarrées qui sont fixées perpendiculairement sur le corps du bouvet, dont elle s'approche & s'éloigne suivant le besoin. Cette joue s'arrête par le moyen de deux clés. On se sert de cet outil pour faire des rainures à différentes distances, ce qui ne se peut avec les autres dont la joue est fixe. Voyez la fig. 19. Pl. II. du Menuisier, qui représente un bouvet femelle brisé.
BOUVETS de brisure, servent à rainer les brisures des guichets, des croisés, & des portes.
BOUVET à dégorger sert à dégorger les moulures.
BOUVETS à embrevure, servent à faire les embrevemens des cadres.
BOUVETS à noix, servent à faire les noix des battans des croisées.
BOUVETS à panneaux, servent à rainer le bois des panneaux.
BOUVETS à planchers, servent à rainer les planches à planchers.
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BOUVIER | S. m. (Oeconom. rust.) celui qui garde les boeufs. Il doit être robuste, vigilant, avoir la voix forte, être attentif à donner à ses bêtes bonne nourriture & bonne litiere, à les frotter soir & matin avec des bouchons de paille, à leur laver la queue avec de l'eau tiede ; en un mot à en avoir tous les soins nécessaires pour les conserver en force, en chair, & en santé. Voyez BOEUF.
BOUVIER, BOOTES, arctophylax, en Astronomie, est une constellation de l'hémisphere septentrional, dont les étoiles sont au nombre de vingt-trois dans le catalogue de Ptolomée ; de vingt-huit selon Tycho-Brahé : de cinquante-deux selon Hevelius, & de cinquante-cinq selon le catalogue de Flamsteed. (O)
BOUVIER, (Hist. nat. Ornythol.) boarina Aldr. oiseau auquel on a donné le nom de boarina ou de boarota à Bologne, parce qu'il suit les troupeaux de boeufs. Aldrovande ajoûte à ces noms celui de muscicapa frima. Cet oiseau a le corps allongé de même que le bec, qui est de couleur brune roussâtre : le dos & la tête sont de couleur cendrée ou jaunâtre, avec quelques teintes de couleur plombée : la gorge & le ventre sont blanchâtres ; la poitrine est parsemée de taches noires : les ailes sont brunes, à l'exception de la pointe des petites plumes qui recouvrent les grandes, & des barbes extérieures des grandes plumes qui sont blanchâtres. La queue est composée de douze plumes ; les deux du milieu sont de couleur cendrée ; les trois qui suivent de chaque côté sont noirâtres, & ont les bords extérieurs cendrés ; l'avant-derniere a de plus une tache à la pointe ; cette tache est beaucoup plus grande dans la derniere ; elle descend du côté extérieur jusqu'aux deux tiers de la longueur de la plume, & elle s'étend au-delà du tuyau sur les barbes intérieures dans le dessus de la plume. Les pattes sont noirâtres : le doigt extérieur tient au doigt du milieu à sa naissance, & les ongles des doigts de derriere sont fort grands, comme dans les aloüettes, & un peu courbés. Aldrovande, Ornith. Voyez OISEAU. (I)
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BOUVREUI | ou PIVOINE, s. m. (Hist. nat. Ornithol.) rubicilla, oiseau qui a le bec noir, court, & fort, ressemblant à celui de l'oiseau qu'on appelle gros-bec, quoique plus petit : la base de la piece inférieure du bec est contournée en forme de croissant, au milieu duquel y a une petite protubérance qui le partage en deux segmens de cercle : la piece du dessus déborde sur celle du dessous d'environ une demi-ligne, & la pointe devient un peu crochue lorsque l'oiseau est avancé en âge : la langue est comme fendue & coupée par le bout : l'iris des yeux est de couleur de noisette : les ongles sont noirs : les pattes sont de couleur brune mêlée de noir : le doigt extérieur tient au doigt du milieu par la premiere phalange : la tête est grosse à proportion du corps. Il y a dans le mâle une belle couleur rouge de mine de plomb, qui tient toute la poitrine, & le dessous du bec le long des mâchoires jusqu'aux yeux : le dessus de la tête est noir : il y a aussi une bande noire qui entoure le bec : le ventre & le croupion sont blancs : le dessus du cou & le dos sont de couleur cendrée, très-legerement teinte de roux.
Il y a dix-huit grandes plumes dans chaque aile ; les dernieres de ces plumes sont d'un noir luisant à leur partie supérieure, & sur-tout du côté extérieur : la derniere a de ce même côté une tache de la même couleur qui est sur la poitrine : les barbes extérieures des premieres plumes sont seulement brunes, & le bord extérieur de la premiere plume est blanc dans la partie inférieure : dans les trois ou quatre plumes suivantes ce même bord n'est blanc qu'à la partie supérieure de la plume : l'extrémité des petites plumes des ailes, qui sont les plus proches du corps & qui recouvrent les grandes, sont de couleur cendrée ; sur les plumes intérieures cette couleur cendrée est plus étendue que sur les extérieures ; celles qui sont sur la côte de l'aile sont de la même couleur que le dos : la queue a deux pouces de longueur, & elle est composée de douze plumes qui sont d'une couleur noire luisante.
Le mâle est gros comme la femelle ; il en differe par ses couleurs qui sont plus brillantes.
Cet oiseau aime beaucoup les premiers boutons qui précedent les feuilles & les fleurs des pommiers, des poiriers, des pêchers, & de tous les autres arbres des jardins, où il cause un grand dommage. Le chant de cet oiseau est agréable : cependant on aime mieux celui de la linote. Aldrovande prétend que la femelle chante aussi-bien que le mâle, au contraire des autres oiseaux. On leur apprend sans beaucoup de peine à imiter le son de la flûte, & on prétend qu'ils approchent de la voix humaine. Villughby, Ornith. Voyez OISEAU. (I)
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BOUZES | S. m. pl. prêtres idolâtres à la Chine & au Japon, fort méprisés dans le premier de ces empires, & en grande vénération dans le second, où cependant on n'ignore pas leur débauche & leur hypocrisie. Ils sont divisés en plusieurs sectes, qu'on reconnoît à la couleur de leurs habits : la premiere est des Xenxus, qui prétendent que l'ame est mortelle ; la seconde des Xodovius, bonnes gens, & qui croyent l'immortalité de l'ame ; la troisieme des Foquexus, docteurs de Xaca, & les plus honnêtes d'entre les bouzes : la quatrieme des Negous, les meilleurs soldats de l'empire ; la cinquieme des Ixoxus, qui passent pour sorciers : on y ajoûte les Arbors-bouxes, grands contemplateurs, & qui font leurs demeures dans des arbres creux ; les Jenguis & les Géoguis, directeurs de pélerins. Ces différentes sectes se détestent : elles ont un supérieur général appellé Xaco, & des supérieurs particuliers revêtus du pouvoir de faire des prêtres ; ils appellent ceux-ci Tundes. Charlevoix, hist. du Japon.
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BOWENS | (Géog.) petite ville dans l'île de Fuhnen, avec un bon port.
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BOXBERG | (Géog.) petite ville & château en Franconie, près de la ville de Landa.
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BOXMEER | (Géog.) ville & comté dans le comté de Zutphen, sur les frontieres du duché de Cleves.
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BOXTEHUDE | petite ville d'Allemagne dans le duché de Bremen, au cercle de basse Saxe, à cinq lieues de Hambourg. Elle appartient au Danemark. Long. 27. 10. lat. 53. 40.
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BOXTEL | (Géog.) petite ville & seigneurie du Brabant hollandois, sur le Dommel, à deux lieues de Boisleduc.
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BOYARD | S. m. (fonte du lard de baleine) espece de civiere à bras dont le fond est fait à jour & en grillage, dans laquelle on place le lard & les crotons, afin qu'ils puissent s'égoutter dans des bacs, & qu'on ne perde rien du suc des uns & de l'huile des autres. Voyez l'article BALEINE ; & à la fin des Planches d'Histoire naturelle la fonte du lard de baleine, la fig. 4. est un boyard.
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BOYARDS | ou BOJARES, ou BOJARDS, s. m. pl. (Hist. mod.) nom que l'on donne aux grands seigneurs de Moscovie. Selon Becman les boyards sont chez les Russiens la même chose que la haute noblesse dans les autres pays : le même auteur ajoûte que dans les actes publics le czar nomme les Boyards avant les Waivodes. Voyez WAIDODES.
Oléarius, dans son voyage de Moscovie, dit que ces grands sont les principaux membres du conseil d'état ; qu'ils ont à Moscou de magnifiques hôtels, & qu'ils sont obligés de suivre le prince dans ses voyages ; que dans les jours de cérémonie ils sont vêtus d'une tunique de brocard enrichie de perles, & couverts d'un grand bonnet fourré de renard noir, & qu'ils président aux tribunaux de justice, mais depuis que le czar Pierre 1er a tiré la Russie de la grossiereté où elle étoit plongée, on a laissé aux boyards leurs titres de noblesse ; & quoiqu'ils joüissent d'une grande considération, il ne paroît pas qu'ils ayent grande part au gouvernement. (G)
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BOYAUDIER | S. m. est un artisan qui prépare & file des cordes à boyau, pour servir aux instrumens de musique, à faire des raquettes, & à d'autres usages.
Ces maîtres composent une des communautés des Arts & Métiers de la ville & faubourgs de Paris : ils ne sont que huit maîtres en tout, qui travaillent dans le même endroit, & ont chacun leur attelier au faubourg S. Martin, auprès de l'endroit appellé Montfaucon.
Voici la maniere dont ces ouvriers s'y prennent pour fabriquer les cordes à boyau : ils se servent pour cela de boyaux de mouton ou d'agneau qu'on leur apporte de la boucherie sans être lavés, & encore tous pleins d'ordure, dans des especes de hottes appellées bachoux. Voyez BACHOU.
La premiere opération est le lavage des boyaux : pour cet effet ils se mettent des bottines aux jambes, pour empêcher l'ordure de tomber dans leurs souliers, & devant eux trois tabliers les uns par-dessus les autres, aussi-bien qu'une bavette devant leur estomac, pour ne point gâter leurs habits. V. BOTTINE, TABLIER, & BAVETTE. Dans cet équipage, ils prennent les boyaux par un bout, les uns après les autres, & les font glisser dans leur main, en les comprimant pour en faire sortir toute l'ordure. A mesure qu'ils les nettoyent, ils les jettent dans un chauderon pour les laisser amortir. Voyez CHAUDERON & AMORTIR.
Après avoir laissé amortir les boyaux pendant un tems raisonnable, dont la durée n'a point d'autre regle que le plus ou moins de chaleur qu'il fait, & qui dépend de la prudence de l'ouvrier, on les remet dans un autre chauderon encore pendant un certain tems, & ensuite on les en tire pour les dégraisser un à un, sur un instrument appellé dégraissoir. Voy. DEGRAISSOIR.
Lorsque les boyaux sont suffisamment dégraissés, & qu'on en a ôté les filandres, que l'on jette dans une tinette qui est auprès du dégraissoir, on les remet encore dans une tinette pleine d'eau ; c'est ce qu'on appelle les mettre blanchir. Voyez FILANDRES & BLANCHIR.
Les boyaux ayant suffisamment blanchi, des femmes les retirent de la tinette pour les coudre les uns au bout des autres, afin de leur donner précisément la longueur qu'on veut donner à la corde. Voyez COUDRE.
Tout cela fait, les boyaux sont en état d'être filés. On file un boyau seul ou plusieurs ensemble, selon la grosseur que doit avoir la corde. Quand il n'y en a qu'un, on fait une petite boucle à l'extrémité, & on l'attache par-là au crochet ou émerillon qui est au-haut du roüet ; s'il y en a plusieurs, on les attache ensemble par un noeud, & on les accroche à l'émerillon : pour lors un homme tourne la manivelle du roüet, tandis que l'ouvrier file en reculant à-peu-près de même que les Cordiers. Voyez ROUET.
Quand les cordes sont filées, on les étend à l'air sur des especes de rateaux garnis de chevilles, dont le manche est enfoncé en terre ; & au bout de quelques jours ils les dégrossissent, c'est-à-dire les rendent plus douces & plus égales : cette opération se fait avec une corde de crin, imbibée de savon noir, avec laquelle ils les frottent rudement depuis un bout jusqu'à l'autre. Voyez DEGROSSIR.
On donne encore une autre préparation aux cordes à boyau, avant qu'elles soient en état d'être exposées en vente : mais les ouvriers en font un mystere, & prétendent que c'est en cela que consiste tout le secret de leur art. Il y a apparence que ce prétendu secret n'est autre chose que de les frotter d'huile pour les adoucir encore plus & les rendre plus souples ; cependant ils assûrent qu'ils ne se servent point d'huile.
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BOYAUX | terme ordinaire dont on se sert pour désigner les intestins. Voyez INTESTIN.
BOYAUX, dans la guerre des Siéges, sont les chemins que l'on fait en zig-zag pour approcher de la place sans en être vû ; ou bien ce sont les parties de la tranchée qui conduisent à la place. Voyez l'art. TRANCHEE.
La tranchée qui est à-peu-près parallele à la place se nomme place d'armes. Voyez PARALLELE.
Les boyaux de la tranchée doivent être tracés de maniere que leur prolongement ne donne sur aucune des parties de la place attaquée, autrement ils seroient enfilés de cette partie. Voyez TRANCHEE & ENFILER. (Q)
BOYAU, cheval qui a beaucoup de boyau, se dit en Manege & Maréchallerie, de celui qui a beaucoup de flanc, beaucoup de corps, les côtes longues, ni plates ni serrées. Cheval étroit de boyau, est celui qui n'a point de corps, qui a les côtes resserrées ou courtes, & le flanc retroussé, ce qui lui rend le corps efflanqué comme celui d'un levrier ; c'est ce qu'on appelle un cheval estrac, qui est ordinairement délicat & peu propre au travail, à moins qu'il ne soit grand mangeur. On rebute sur-tout les chevaux de carrosse qui n'ont point de corps, qui sont étroits de boyau, & qui semblent avoir la peau des flancs collée sur les côtes. Un chasseur ne méprise pas un cheval étroit de boyau ; il le préferera même à un autre qui aura plus de flanc, pourvû qu'il soit de grande haleine, de beaucoup de ressource, leger, & grand mangeur. On donne le vert pour faire reprendre du boyau aux chevaux qui l'ont perdu. Le mot de flanc est aussi en usage, & selon quelques auteurs, plus élégant que celui de boyau. (V)
BOYAU ; il y a des animaux dont les boyaux sont utiles dans le commerce, après avoir été préparés par certains artisans qu'on nommé Boyaudiers, qui forment à Paris une des communautés des Arts & Métiers.
BOYAU : on appelle cordes à boyau certaines cordes faites avec des boyaux de mouton ou d'agneau. Il s'en fabrique une assez grande quantité à Rome, à Toulouse, à Lyon, à Marseille, & à Paris. Voyez CORDE A BOYAU. Voyez l'article BOYAUDIER.
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BOYER | BOIER, & BOUIER, s. m. (Marine) c'est une espece de bateau ou de chaloupe flamande. Le boyer est mâté en fourche, & à deux semelles, au moyen desquelles il va bien à la bouline & dérive peu.
Le boyer est un petit bâtiment de charge, qui a un beaupré & de l'acastillage à l'avant & à l'arriere : il a du rapport dans beaucoup de parties avec le semaque : il est plat de varangues, & le mât en est fort haut & porte un perroquet. Cette sorte de bâtiment n'est pas si propre à naviger sur mer, que sur les rivieres & sur les autres eaux internes. Mais pour donner une idée plus claire de cette sorte de bâtiment, il faut en voir la figure, Planche XII. figure premiere ; & pour plus d'intelligence, nous allons donner le devis d'un boyer de 86 piés de long de l'étrave à l'étambord, de 20 piés de ban de dedans en dedans, & de 9 piés un quart de creux de dessus la quille au niveau des gouttieres.
La quille a 14 pouces en quarré ; l'étrave & l'étambord ont un pié d'épaisseur ; l'étrave a 8 piés de quête, & l'étambord un pié 3 pouces. Il a 6 piés à l'avant de relevement, & 7 piés à l'arriere : le fond de cale a 15 piés de large, & s'éleve de 2 pouces vers les fleurs : les varangues ont 9 pouces d'épaisseur, & 8 pouces dans les fleurs ou aux empatures. Les genoux ont un demi-pié d'épais sur le franc bord, & les allonges autant au même endroit, & 4 pouces 1/2 par le haut. La carlingue a 9 pouces d'épais sous le mât, & 6 ou 7 pouces à l'arriere. Les vaigres d'empature ont 4 pouces d'épais, & les vaigres de fond 2 pouces, & les autres aussi jusqu'aux serrebauquieres qui ont 4 pouces d'épais, & chaque ban a deux courbes de haut en-bas, & deux par la longueur du bâtiment. Les serregouttieres ont 4 pouces d'épais, & les bordages qui couvrent le pont en ont 2 pouces 1/2 : les préceintes ont un demi-pié d'épais & un pié de large, c'est-à-dire les deux plus basses ; la troisieme a 4 pouces d'épais & 10 de large.
Les couples ou fermures ont 6 pouces de large ; ceux d'entre la plus haute préceinte & le carreau, ont 10 pouces de large & 5 pouces d'épais. Le carreau a vers les bouts un grand pié de largeur, & est plus large par son milieu. La chambre de proue a 10 piés de long, à prendre à l'étrave en-dedans ; c'est-là que sont les cabanes & la cuisine, dont le tuyau de cheminée sort sur le pont proche du virevaut. Le virevaut a 20 pouces d'épais. Le mât d'artimon, qui est fort petit, est tout proche de la planche qui sert d'appui vers l'arriere. Quelquefois on fait une petite dunette vers l'arriere, pour y serrer quelque chose, ou pour coucher des gens.
La grande écoutille a 10 piés de long & 7 piés de large ; l'écoutille qui s'emboîte a 4 piés. La chambre de poupe a 14 piés de long, & est élevée au-dessus du pont ; elle est séparée de deux ou trois fronteaux, & dans l'un des retranchemens on met les voiles & les agrès ; les autres servent à coucher ou sont pour d'autres usages. La chambre du capitaine a 10 piés de long, à prendre du dedans de l'étambord ; son bas plancher descend 3 piés 1/2 au-dessous du pont, & baisse un peu vers l'arriere : le tillac ou plancher qui la couvre, s'éleve 3 piés au-dessus du pont, & il y a une petite échelle pour descendre sur le pont.
La hauteur du mât est assez arbitraire ; on peut le mettre plus long ou plus court ; il panche un peu vers l'arriere. Le gouvernail a six pouces d'épais par le haut, & est par le bas de la même épaisseur que l'étambord. La barre passe entre le banc & la voûte de la chambre du capitaine. Le timonnier se tient devant cette chambre. Le relevement du tillac à l'avant & à l'arriere sert à faire écouler les eaux, sur-tout celles que lancent les coups de mer. Les semelles, qui sont attachées avec des chevilles un peu au-dessous du carreau, enfoncent dans l'eau deux piés plus bas que la quille ; leur largeur se prend à discrétion ; & comme elles sont destinées à empêcher que le vaisseau ne dérive, il s'ensuit qu'il faut les faire grandes, & qu'elles pourroient être encore plus grandes qu'on ne les fait, si cette grandeur ne les rendoit pas trop difficiles à manoeuvrer. L'étrave & la quille sont jointes ensemble par un lien de fer de chaque côté. (Z)
* BOYEZ, s. m. pl. (Hist. mod.) prêtres idolâtres des sauvages de la Floride. Chaque prêtre a son idole particuliere, & le sauvage s'adresse au prêtre de l'idole à laquelle il a dévotion. L'idole est invoquée par des chants, & la fumée du tabac est son offrande ordinaire.
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BOYNE | (Géog.) riviere d'Irlande, dans le comté de Leinster, qui se jette dans la mer, au-dessous de Drogheda.
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BOZA | (Géog.) petite ville du royaume de Hongrie.
* BOZA, (Commerce) c'est une espece de biere ou liqueur forte en usage chez les Turcs ; elle se fait avec de l'orge & du millet qu'on cuit ensemble, & qu'on laisse ensuite fermenter : on dit que cette boisson n'est rien moins qu'agréable, & qu'elle ne laisse pas d'enivrer lorsqu'on en boit d'une façon immodérée.
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BOZANTIA | (Géog.) petite ville assez bien fortifiée de la petite Pologne, dans le Palatinat de Sendomir.
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BOZZO | (Géog.) riviere dans le duché de Milan, qui sort du lac majeur, & va se perdre dans le lac de Gavira, près de Bozzolo.
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BOZZOLO | (Géog.) petite ville du Mantouan, capitale d'une principauté de même nom, entre Mantoue & Crémone. Long. 28. lat. 45. 9.
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BRABANT | (Géog.) duché, & l'une des dix-sept provinces des Pays-Bas, bornée au nord par la Hollande & la Gueldre ; à l'occident par la Zélande & la Flandre ; au midi par le Hainault & le comté de Namur, & à l'orient par l'évêché de Liége. Une partie en appartient à la maison d'Autriche, & l'autre partie à la république des Provinces-Unies ; ce qui le fait diviser en Brabant espagnol, & Brabant hollandois. Bruxelles est la capitale du premier, & Bois-le-Duc du second. Il s'y fait un très-grand commerce de toiles, dentelles, &c.
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BRABEUTE | S. m. (Hist. anc.) du grec , qui signifie distributeur du prix, nom d'un officier public chez les Grecs, qui présidoit aux jeux solemnels, & sur-tout aux jeux sacrés. Cette charge, qui étoit une espece de magistrature, pour juger de ceux qui remportoient le prix à la course, la lutte, &c. étoit fort considérable, non-seulement chez les Grecs, mais encore parmi les Perses. Les rois eux-mêmes l'exerçoient ; c'étoit au moins parmi les familles les plus considérables de la Grece, qu'on choisissoit ces arbitres. Philippe de Macédoine s'en étoit fait attribuer la qualité, & en commettoit les fonctions à un de ses officiers, lorsqu'il n'y pouvoit assister lui-même ; ce que Démosthene regarde comme un attentat à la liberté des Grecs. Quand ces juges étoient sur le point d'exercer leur charge, on les faisoit entrer pour quelque tems dans un petit enclos, où on leur faisoit prêter serment, qu'ils jugeroient avec impartialité. Cette formalité achevée, ils en sortoient la couronne sur la tête, revêtus d'un habit de pourpre, portant à la main une baguette pour marque de leur autorité, & alloient s'asseoir à une place distinguée, qu'on nommoit , qui étoit regardée comme un asyle inviolable : de-là, par une loi de Lycurgue, ils prononçoient leurs jugemens avec un pouvoir absolu, décernoient des peines contre les athletes qui s'étoient mal comportés, & des récompenses aux vainqueurs. Les prix qu'ils distribuoient s'appelloient , & les couronnes , pour marquer que c'étoit Thémis elle-même ou la déesse de la justice, qui les avoit pliées & formées de ses propres mains. Le nombre des brabeutes n'étoit point fixé ; quelquefois il n'y en avoit qu'un, mais plus ordinairement on en comptoit sept ou neuf. Ce sont les mêmes qu'on appelloit athlothetes-époptes, c'est-à-dire juges & inspecteurs des athletes. Voyez ATHLOTHETE & EPOPTES. (G)
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BRABORG | (Géog.) petite ville de Suéde, dans la province d'Ostgothie, sur la riviere de Motala.
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BRACCAS | (Géog.) île de l'Amérique, près de celle de Cuba, l'une de celles qu'on nomme Caymanes ; elle est inhabitée.
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BRACCIANO | (Géog.) petite ville d'Italie, dans le patrimoine de S. Pierre, avec titre de duché, à 6 lieues & demie de Rome. Il y a des bains célebres. Long. 29. 45. lat. 42. 4.
BRACCIANO, (Géog. anc. & mod.) un des plus grands lacs d'Italie, proche la ville de même nom. On le nommoit autrefois sabatinus ou sabatus locus.
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BRACCIO | BRACCIO
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BRACELET | S. m. (Antiq.) ornement fort ancien que les Grecs & les Romains portoient au bras, comme le mot le fait assez entendre, & dont l'usage s'est conservé parmi nous. Le bracelet ancien a eu différentes formes ; on en voit un à trois tours sur une statue de Lucille, femme de l'empereur Lucius-Verus. Ils étoient la plûpart ou d'or ou de fer, ou dorés ou argentés ; on entend ici par dorés & argentés, autre chose que ce que nous faisons signifier à ces mots, c'est-à-dire qu'ils étoient couverts de lames d'or ou d'argent : on plaçoit quelquefois dans les bracelets, ou un anneau ou une médaille. Ils étoient pour toutes sortes de conditions. Les hommes en portoient ainsi que les femmes. Les Sabins, dit Tite-Live, en avoient d'or, & de fort pesans au bras gauche ; c'étoit une marque arbitraire d'honneur ou d'esclavage : on en récompensoit la valeur des gens de guerre. On trouve dans Gruter la figure de deux bracelets, avec cette inscription : Lucius Antonius Fabius Quadratus, fils de Lucius, a été deux fois honoré par Tibere-Cesar, de colliers & de bracelets. Quand l'empereur faisoit ce présent, il disoit : l'empereur te donne ces bracelets. Il y avoit des bracelets d'ivoire : il est à croire que ceux de cuivre & de fer ne servoient qu'aux esclaves & aux gens de bas état. Le nom d'armilla vient d'armus, la partie supérieure du bras ; parce qu'anciennement le bracelet se mettoit au haut du bras. Capitolin dans la vie d'Alexandre Severe, se sert du terme dextrocherium, au lieu d'armilla : il raconte que cet empereur avoit huit piés un pouce de hauteur ; que sa force répondoit à sa taille ; que ses membres y étoient proportionnés ; qu'il traînoit seul un chariot chargé ; qu'il faisoit sauter toutes les dents à un cheval d'un seul coup de poing ; qu'il lui cassoit la jambe d'un coup de pié ; & qu'il donna d'autres preuves de sa vigueur extraordinaire, qu'on peut voir dans l'histoire : mais ce qui fait à notre sujet, c'est qu'il avoit le pouce si gros, que le bracelet ou le dextrocherium de sa femme lui servoit de bague : d'où le pere Montfaucon conclut qu'on portoit des bagues au pouce, comme aux autres doigts.
Le bracelet n'est plus parmi nous qu'à l'usage des femmes. C'est quelquefois un ornement fort précieux par les perles & les diamans dont il est enrichi. Il se place vers l'extrémité du bras ; le portrait du mari y est assez ordinairement enchâssé : on en fait de rubans, de cheveux, de crin, &c. Ils sont également portés par les peuples policés & par les nations barbares. Ceux-ci les font ou de grains enfilés, ou de coquilles, ou de verrerie, &c. Ils faisoient jadis si grand cas de ces ornemens, qu'ils abandonnoient leurs plus riches marchandises, & même sacrifioient quelquefois la liberté de leurs peres, de leurs femmes & de leurs enfans, pour s'en procurer la possession.
* BRACELET, s. m. chez les Doreurs, Argenteurs, & autres ouvriers, est un instrument ou de cuir simple, ou de cuir rembourré d'étoffe, ou de plusieurs peaux mises les unes sur les autres, dont ils se couvrent le bras gauche au-dessus du poignet, afin de pouvoir l'appuyer fortement contre la partie inférieure du brunissoir, sans se blesser, quand ils polissent leurs ouvrages.
BRACELET, voyez CARPE.
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BRACHBANT | (Géog.) on nomme ainsi un petit district du Hainault, où se trouvent les villes de Condé & de Leuse.
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BRACHHUSEN | (Géog.) petite ville du comté de Hoya, appartenant à l'électeur de Hanovre.
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BRACHIAL | adj. est, en Anatomie, une épithete que l'on donne aux différentes parties qui composent le bras ; c'est dans ce sens que l'on dit les nerfs brachiaux, l'artere brachiale, le muscle brachial, &c. mais on donne plus particulierement ce nom à l'artere qui est placée le long de l'humerus, & à deux muscles dont l'un est placé à la face interne & l'autre à la face externe de ce même os, & sont en conséquence appellés l'un brachial interne, & l'autre brachial externe, ou anconé interne. Voyez ANCONE.
Le brachial interne est situé tout le long de la partie moyenne inférieure & intérieure de l'humerus à laquelle il s'attache, & se termine à une tubérosité qui se remarque à la partie supérieure & externe du cubitus.
Les nerfs brachiaux naissent de l'union des cinq dernieres paires cervicales & de la premiere dorsale qui se divise principalement en six rameaux remarquables. En 1697 M. Duverney en caractérisa cinq par ces noms, le musculo-cutané, ou cutané externe, le médian, le cubital, le cutané interne, & le radial, & le sixieme a été appellé par M. Winslow nerf axillaire ou articulaire, &c. Voyez CUTANE EXTERNE, MEDIAN, &c.
Outre ces gros nerfs brachiaux il part plusieurs petites branches des paires cervicales qui se distribuent aux épaules, à la poitrine, &c.
BRACHIO-CUBITAL, (ligament en Anatomie) c'est un ligament qui unit l'os du bras ou l'humerus avec l'os du coude ou le cubitus. Voyez HUMERUS & CUBITUS.
BRACHIO-RADIAL, (ligament en Anatomie) c'est un ligament qui unit le rayon ou radius avec l'os du bras ou l'humerus. V. HUMERUS & RADIUS. (L)
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BRACHITES | S. m. (Hist. ecclés.) secte d'hérétiques qui parurent dans le troisieme siecle. Ils suivoient les erreurs de Manés & des Gnostiques. (G)
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BRACHMANES | S. m. pl. (Hist. anc.) Gymnosophistes ou philosophes Indiens, dont il est souvent parlé dans les anciens. Ils en racontent des choses fort extraordinaires ; comme de vivre couchés sur la terre ; de se tenir toûjours sur un pié ; de regarder le soleil d'un oeil ferme & immobile depuis son lever jusqu'à son coucher ; d'avoir les bras élevés toute leur vie ; de se regarder sans-cesse le bout du nez, & de se croire comblés de la faveur céleste la plus insigne, toutes les fois qu'ils y appercevoient une petite flamme bleue. Voilà des extravagances tout-à-fait incroyables ; & si ce fut ainsi que les brachmanes obtinrent le nom de sages, il n'y avoit que les peuples qui leur accorderent ce titre qui fussent plus fous qu'eux. On dit qu'ils vivoient dans les bois, & que les relâchés d'entr'eux, ceux qui ne visoient pas à la contemplation béatifique de la flamme bleue, étudioient l'Astronomie, l'histoire de la nature, & la politique, & sortoient quelquefois de leurs deserts pour faire part de leurs contemplations aux princes & aux sujets. Ils veilloient de si bonne heure à l'instruction de leurs disciples, qu'ils envoyoient des directeurs à la mere, si-tôt qu'ils apprenoient qu'elle avoit conçû ; & sa docilité pour leurs leçons étoit d'un favorable augure pour l'enfant. On demeuroit trente-sept ans à leur école, sans parler, tousser, ni cracher ; au bout de ce tems, on avoit la liberté de mettre une chemise, de manger des animaux, & d'épouser plusieurs femmes ; mais à condition qu'on ne leur révéleroit rien des préceptes sublimes de la gymnosophie. Les brachmanes prétendoient que la vie est un état de conception, & la mort le moment de la naissance ; que l'ame du philosophe retenue dans son corps, est dans l'état d'une chrysalide, & qu'elle se débarrasse à l'instant du trépas, comme un papillon qui perce sa coque & prend son essor. Les évenemens de la vie n'étoient selon eux ni bons ni mauvais ; puisque ce qui déplaît à l'un plaît à l'autre, & qu'une même chose est agréable & desagréable à la même personne en différens tems : voilà l'abregé de leur morale. Quant à leur physique, c'étoit un autre amas informe de préjugés : cependant ils donnoient au monde un commencement & une fin ; admettoient un Dieu créateur, qui le gouvernoit & le pénétroit ; croyoient l'univers formé d'élémens différens ; regardoient les cieux comme le résultat d'une quintessence particuliere ; soûtenoient l'immortalité de l'ame ; & supposoient des tribunaux aux enfers, &c. Clément d'Alexandrie en fait l'une des deux especes de gymnosophistes. Voyez PHILOSOPHIE DES INDIENS & GYMNOSOPHISTES.
Quand ils étoient las de vivre, ils se brûloient ; ils dressoient eux-mêmes leur bûcher, l'allumoient de leurs mains, & y entroient d'un pas grave & majestueux.
Tels étoient ces sages que les philosophes Grecs allerent consulter tant de fois : on prétend que c'est d'eux que Pythagore reçut le dogme de la métempsycose. On lit dans Suidas qu'ils furent appellés Brachmanes, du roi Brachman leur fondateur. Cette secte subsiste encore dans l'orient, sous le nom de Bramenes ou Bramines. Voyez BRAMINE.
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BRACHYGRAPHIE | S. f. (Gramm.) c'est-à-dire l'art d'écrire par abréviations : ce mot est composé de , brevis, & de , scribo. Ces abréviations étoient appellées notae ; & ceux qui en faisoient profession, notarii. Gruter nous en a conservé un recueil qu'il a fait graver à la fin du second tome de ses inscriptions, notae Tironis ac Senecae. Ce Tiron étoit un affranchi de Cicéron, dont il écrivit l'histoire ; il étoit très-habile à écrire en abregé.
Cet art est très-ancien : ces scribes écrivoient plus vîte que l'orateur ne parloit ; & c'est ce qui a fait dire à David, Lingua mea calamus scribae velociter scribentis. Ps. 44. " Ma langue est comme la plume d'un écrivain qui écrit vîte ". Quelque vîte que les paroles soient prononcées, dit Martial, la main de ces scribes sera encore plus promte : à peine votre langue finit-elle de parler, que leur main a déjà tout écrit.
Currant verba licet, manus est velocior illis :
Vix dum lingua tuum, dextra peregit opus.
Mart. épig.
Manilius parlant des enfans qui viennent au monde sous le signe de la vierge, dit :
Hic est scriptor, erit velox, cui littera verbum est,
Quique notis linguam superet, cursimque loquentis
Excipiat longas, nova per compendia voces.
Manil. Astron. lib. IV. v. 197.
C'est par de semblables expédiens, que certains scribes que nous avons eus à Paris, suivoient en écrivant nos plus habiles prédicateurs ; & ce fut par ce moyen, que parut, il y a environ trente ans, une édition des sermons du P. Massillon. (F)
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BRACHYSTOCHRONE | S. f. (Méchanique) est le nom que feu M. Bernoulli, professeur de Mathématique à Bâle, a donné à une courbe A B C (fig. 68. Méchan.) dont la propriété est telle qu'un corps qui tombe du point A, en vertu de sa pesanteur, le long de la concavité de cette courbe, arrive de A en B en moins de tems qu'il n'y arriveroit, s'il descendoit le long de toute autre courbe A D B, passant par les mêmes points A, B, ou même s'il descendoit le long de la ligne droite A B.
Ce mot vient de deux mots grecs ; savoir, , superlatif de , qui signifie vîte, promt, & , tems. La courbe brachystochrone s'appelle aussi courbe ou ligne de la plus vîte descente.
Feu M. Bernoulli proposa aux Géometres en 1697, de déterminer quelle étoit cette courbe. Le problème fut résolu par M. Jacques Bernoulli son frere, alors professeur de Mathématique à Bâle, par M. Leibnitz, par M. le Marquis de l'Hôpital, & par M. Newton. M. Bernoulli avoit averti les Géometres dans son programme, que la ligne droite A B, passant par les deux points A, B, quoiqu'elle fût la plus courte de toutes celles qu'on pouvoit faire passer par ces points, n'étoit pas néanmoins celle qu'un corps pesant, tombant de A, devoit parcourir en moins de tems ; & en effet, on trouva que c'étoit une cycloïde, ou plûtôt un arc de cycloïde passant par les points A, B, & dont le point A étoit l'origine. V. CYCLOÏDE.
Il n'est pas impossible de faire sentir à ceux même qui sont peu versés dans la Méchanique transcendante, comment il peut se faire que la ligne droite A B ne soit pas la ligne de la plus courte descente. Car, imaginons la ligne horisontale E C qui partage la courbe A B C en deux parties A C, C B, telles que la partie A C soit plus courte que A E, & la partie C B plus longue que E B ; il est certain que le corps A arrivera en C plûtôt qu'il n'arriveroit en E, puisqu'il aura moins de chemin à faire. Il est vrai qu'il employera ensuite plus de tems à parcourir C B, qu'il n'en mettra à parcourir E B ; mais il faut remarquer que les tems employés à parcourir les lignes A E, A C, C B, E B, ne sont point entr'eux comme ces lignes, parce que le corps ne les décrit pas d'un mouvement uniforme ; ainsi il ne doit pas paroître impossible que l'excès du tems par A E sur le tems par A C, soit plus grand que l'excès du tems par C B sur le tems par E B. Ainsi de ce que la ligne droite A B est plus courte que la ligne courbe A C B, il ne s'ensuit nullement que la ligne droite A B doive être descendue en moins de tems que la ligne courbe A C B. L'espece de raisonnement métaphysique que nous venons de faire, peut bien servir à faire soupçonner que la ligne de la plus vîte descente peut être une courbe : mais ce raisonnement ne sauroit jamais être une démonstration. C'est par le calcul seul qu'on peut s'assûrer si ce qu'on a soupçonné est vrai, & le calcul démontre en effet qu'on a soupçonné juste. Voici à-peu-près comment on s'y prend pour déterminer la courbe de la plus vîte descente. Soit A C B cette courbe, & ayant pris un arc infiniment petit C c, soit imaginé un arc quelconque infiniment petit C O c, terminé aux points C, c ; il est évident que le corps pesant arrivé en C, doit parcourir l'arc C c, en moins de tems que l'arc C O c. Car s'il étoit moins de tems à parcourir l'arc C O c, alors ce seroit A C O c B, & non A C B qui seroit la courbe de la plus vîte descente, ce qui est contre l'hypothèse. Ainsi la propriété de la courbe dont il s'agit, est telle, qu'un de ses arcs quelconques infiniment petits C c, est parcouru en moins de tems que tout autre arc infiniment petit C O c, passant par les mêmes points C, c.
Maintenant soient imaginés les points infiniment proches C, c, & soit cherchée sur la ligne horisontale Q L, la position du point K, tel que C K c soit parcouru en moins de tems que tout autre chemin C k c, passant par C & c, on trouvera (Voyez REFRACTION) en menant les lignes K R, c r, perpendiculaires à Q L, que le sinus de l'angle C K R doit être au sinus de K c r, comme la vîtesse le long de C K à la vîtesse le long de K c : d'où il s'ensuit que la courbe cherchée doit être telle que le sinus de l'angle qu'un de ses côtés quelconque infiniment petit C K fait avec la verticale K R, soit proportionnel à la vîtesse en K ; laquelle vîtesse est comme la racine quarrée de la hauteur d'où le corps est parti. Or en achevant le calcul, on trouve que cette propriété convient à la cycloïde. Voyez CYCLOÏDE.
Si l'on supposoit qu'un corpuscule de lumiere traversât l'atmosphere, de maniere qu'il arrivât d'un point à un autre dans le plus court tems possible, la courbe qu'il décriroit seroit une brachystochrone, pourvû que l'on fit certaines hypothèses sur la densité du milieu. Voyez REFRACTION, ACTION, CAUSES FINALES.
Voyez dans les Mémoires de l'Académie de 1718. deux solutions du problème de la brachystochrone, données par M. Bernoulli, & toutes deux fort simples. Galilée a cru faussement que la brachystochrone étoit un arc de cercle. La Géométrie de son tems n'étoit pas encore assez avancée pour résoudre ce problème. On trouve dans le second volume de la Méchanique de M. Euler, imprimé à Petersbourg 1736. une solution très-élegante de ces problèmes & des théorèmes fort simples & fort généraux sur les propriétés de la brachystochrone ; la solution du problème devient beaucoup plus difficile lorsqu'on suppose que le corps se meut dans un milieu résistant, parce qu'alors la vîtesse ne dépend pas de la hauteur seule. M. Euler a donné aussi la brachystochrone pour ce cas-là, ce que personne n'avoit encore fait avant lui. (O)
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BRACKEL | (Géog.) petite ville d'Allemagne, dans le cercle de Westphalie, sur la Nette, à cinq lieues de Paderborn. Long. 26. 43. lat. 51. 49. Il y a une autre ville de ce nom en Westphalie, dans l'évêché d'Hildesheim.
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BRACKENHEIM | (Géog.) petite ville sur la riviere de Zaber, à deux lieues de Hailbron, appartenante au duc de Wirtemberg.
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BRACKLEY | (Géog.) ville d'Angleterre, dans la province de Northampton. Long. 16. 25. lat. 51. 56.
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BRACON | S. m. (Machine hydrauliq.) on appelle bracon d'un vanteau, d'une porte d'écluse, la console, la potence, ou l'appui qui soûtient cette porte. (K)
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BRACONNIER | S. m. (Chasse) celui qui chasse sans droit & sans permission sur les terres d'autrui. Les ordonnances decernent des peines très-grieves contre les braconniers. (H)
" Tous tendeurs de lacs, tirasses, tonnelles, traineaux, bricoles de corde & de fil d'archal, pieces & pans de retz, colliers, alliers de fil ou de soie, dit l'ordonnance du roi, du mois de Mai 1669, seront condamnés au foüet pour la premiere fois, & en trente livres d'amende ; & pour la seconde, fustigés, flétris, & bannis pour cinq ans hors de la maîtrise, soit qu'ils ayent commis délit dans nos forêts, garennes, & terres de notre domaine, ou en celles des ecclésiastiques, communautés, & particuliers de notre royaume, sans exception ".
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BRADANO | (Géog.) riviere dans la Basilicate, au royaume de Naples, qui prend sa source dans l'Apennin, & se décharge dans le golfe de Tarente.
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BRADFORD | (Géog.) contrée d'Angleterre, avec titre de comté, dans la province de Shrop.
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BRADIE | (Géog.) ville de Moldavie située sur la riviere de Pruth.
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BRADUPEPSIE | S. f. ou COCTION LENTE, (Medecine) maladie de l'estomac, dans laquelle les alimens ne sont digérés qu'avec peine & lenteur. La digestion passe pour lente, quand au lieu de s'exécuter dans l'espace de vingt-quatre heures, elle ne se fait que dans l'espace de plusieurs jours. Voyez ESTOMAC, DIGESTION. Bradupepsie est composée de , lent, tardif, & de , cuire, digérer.
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BRAGANCE | (Géog. anc. & mod.) ville de Portugal avec château, capitale du duché de même nom, dans la province de Tra-los-montes. La maison regnante de Portugal en porte le nom. Long. 11. 20. lat. 41. 47.
Quelques auteurs prétendent que c'est le Coeliobriga des anciens.
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BRAGANZA | (Géog.) petite ville sur les frontieres de la Marche Trevisane dans le territoire de la république de Venise.
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BRAGUE | S. f. ou BRACQUE, DRAGUE, (Marine) tous ces termes sont synonymes.
La brague est une corde qu'on fait passer au-travers des affûts du canon, & qu'on amarre par les bouts à deux boucles de fer qui sont de chaque côté des sabords : les bragues servent à retenir les affûts de canon, & empêchent qu'en reculant ils n'aillent frapper jusqu'à l'autre bord du vaisseau. (Z)
BRAGUE, (Géog. anc. & mod.) grande ville de Portugal avec archevêché, dont l'archevêque est primat du royaume, sur la riviere de Cavédo. Long. 9. 30. lat. 41. 30. Ptolomée la nomme Braccara augusta, & l'itinéraire d'Antonin, Bragara.
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BRAHILOW | (Géog.) petite ville de Valachie, à l'endroit où la riviere de Seret se jette dans le Danube.
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BRAI | S. m. mélange de gomme, de résine, de poix, & d'autres matieres visqueuses, ou de poix liquide, & d'huile de poisson, dont on se sert pour le calfat des bâtimens de mer. Voyez GOUDRON.
* BRAI : on entend encore par ce mot l'escourgeon & l'orge broyé pour la biere. Le brai pris en ce sens gâte les moulins à blé ; & les seigneurs ne peuvent contraindre de le porter à leurs moulins, à moins qu'ils n'en ayent de particuliers pour cette mouture.
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BRAID-ALBAI | ou ALBANIE, province septentrionale de l'Ecosse, entre le Lochaber, le pays d'Athol & d'Argile. La Tay y prend sa source.
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BRAIE | S. f. (Marine) c'est ainsi qu'on nomme des morceaux de toile poissée ou de cuir goudronné, qu'on applique autour d'un trou pratiqué dans le tillac pour faire passer le mât ; ce qui empêche que l'eau de la pluie ou des coups de vagues ne tombent à fond de cale. On applique aussi des braies à l'ouverture par où passe la barre du gouvernail ; parce que de gros tems, & sur-tout de vent arriere, les vagues qui sautent souvent par-dessus la dunette rempliroient la sainte-barbe, où il n'y a ni dalots ni maugeres pour la faire écouler. Voyez DALOT & MAUGERE. (Z)
BRAIE, (Corderie) Voyez BROYE.
BRAIE, en terme de Cirier, est un instrument sur lequel on écache la cire. Voy. ECACHER. Il est composé d'un banc garni d'un anneau, dans lequel est retenue la braie proprement dite ; c'est-à-dire une planche de bouis joüant dans cet anneau, sous laquelle on pétrit la cire.
BRAIE, chez les Imprimeurs, c'est une peau ou parchemin préparé pour l'usage de l'Imprimerie, qui sert à recouvrir le grand tympan.
On appelle encore braie une feuille de papier gris ou une maculature découpée en frisquette, qui sert à faire des épreuves. Voyez EPREUVE, MACULATURE, TYMPAN, FRISQUETTE.
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BRAILLE | S. f. (Pêche & Comm.) pelles de bois dont on se sert dans la salaison des harengs. Voyez BRAILLE.
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BRAILLER | v. act. (Pêche) c'est remuer le poisson avec la braille lorsqu'il est salé, afin qu'il prenne mieux la salure. On ne braille que quand on sale à terre : quand on encaque d'abord le poisson ; on le tient dans des paniers plats, & on le saupoudre à chaque rangée ou lit qu'on en fait dans la caque, observant quelquefois de le tourner & retourner dans les paniers avant que de l'encaquer.
BRAILLER, (Chasse) on dit qu'un chien braille quand il crie sans voix.
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BRAILLEUR | S. pris adj. (Manége) est un cheval qui hennit très-souvent. Ce défaut est extrèmement incommode, sur-tout à la guerre. (V)
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BRAINE | (Géog.) petite ville de France à quatre lieues de Soissons.
BRAINE-L'ALEU, petite ville des Pays-bas autrichiens, près de Bruxelles.
BRAINE-LE-COMTE, petite ville du Hainaut à cinq lieues de Mons. Long. 21. 46. lat. 50. 35.
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BRAISE | S. f. (Boulangers & Pâtissiers) c'est ainsi qu'on appelle le charbon éteint. Ceux qui craignent la vapeur du charbon noir se servent de braise : elle se vend au boisseau. On en distingue de deux especes, la menue, & la grosse : celle-ci est un peu plus chere que l'autre.
* BRAISE, (faire la) Verrerie : c'est une des fonctions de tiseur. Pour faire la braise, le tiseur prend le grand rable, il en passe le bout dans le tisonnier, & égalise la braise par-tout ; puis avec sa pelle à tisser il jette dans le four trois, quatre, ou cinq pelletées de charbon ; ensuite il va à l'autre tisonnier, il en fait autant, & revient au premier, jusqu'à ce qu'il ait rempli le foyer environ aux deux cinquiemes : il le laisse dans cet état à-peu-près un quart-d'heure, jusqu'à ce que le charbon ait pris feu ; alors il recommence la même manoeuvre qu'il a faite, jusqu'à ce que la braise le soit : quand la braise est faite, le foyer en est rempli d'environ les trois quarts de sa hauteur, alors les ouvriers sont appellés au travail. Voy. l'article VERRERIE.
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BRAKERNES | (Géog.) petite ville de Norvege, dans la province d'Aggerhus, sur la Dramme.
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BRALIN | (Géog.) ville & château de la basse Silésie, à peu de distance de Martemberg.
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BRAM | ou BRAHMA, s. m. (Hist. mod.) l'un des principaux dieux du Tonquin, entre la Chine & l'Inde. Il est adoré par les sectateurs de Confucius.
Ces idolâtres font des sacrifices aux sept planetes, comme à des divinités : mais ils ont encore cinq idoles pour lesquelles ils ont une vénération particuliere ; savoir quatre dieux, nommés Brama, Raumu Betolo, Ramonu ; & une déesse qu'ils appellent Satibana. Le roi, les mandarins, c'est-à-dire les seigneurs de la cour, & les doctes du pays, n'adorent guere que le ciel. Tavernier, voyage des Indes. Voyez CHINOIS & BRAMINES. (G)
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BRAMANT | (Géog.) petite ville de Savoie dans la province de Maurienne, sur la riviere d'Arc.
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BRAMAS | (LES) Géog. peuples d'Asie qui habitent les extrémités du royaume d'Ava & de Pégu.
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BRAMER | v. n. (Chasse) ce mot n'a point d'autre usage que de désigner le cri du cerf.
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BRAMINES | ou BRAMENES, ou BRAMINS, ou BRAMENS, s. m. pl. (Hist. mod.) secte de philosophes indiens, appellés anciennement Brachmanes. Voyez BRACHMANES. Ce sont des prêtres qui réverent principalement trois choses, le dieu Fo, sa loi, & les livres qui contiennent leurs constitutions. Ils assûrent que le monde n'est qu'une illusion, un songe, un prestige, & que les corps pour exister véritablement, doivent cesser d'être en eux-mêmes, & se confondre avec le néant, qui par sa simplicité fait la perfection de tous les êtres. Ils font consister la sainteté à ne rien vouloir, à ne rien penser, à ne rien sentir, & à si bien éloigner de son esprit toute idée, même de vertu, que la parfaite quiétude de l'ame n'en soit pas altérée. C'est le profond assoupissement de l'esprit, le calme de toutes les puissances, la suspension absolue des sens, qui fait la perfection. Cet état ressemble si fort au sommeil, qu'il paroit que quelques grains d'opium sanctifieroient un bramine bien plus sûrement que tous ses efforts. Ce quiétisme a été attaqué dans les Indes, & défendu avec chaleur. Du reste ils méconnoissent leur premiere origine. Le roi Brachman n'est point leur fondateur. Ils se prétendent issus de la tête du dieu Brama, dont le cerveau ne fut pas seul fécond ; ses piés, ses mains, ses bras, son estomac, ses cuisses, engendrerent aussi, mais des êtres bien moins nobles que les Bramines. Ils ont des livres anciens, qu'ils appellent sacrés. Ils conservent la langue dans laquelle ils ont été écrits. Ils admettent la métempsycose. Ils prétendent que la chaîne des êtres est émanée du sein de Dieu, & y remonte continuellement, comme le fil sort du ventre de l'araignée & y rentre. Au reste il paroît que ce système de religion varie avec les lieux. Sur la côte de Coromandel, Wistnou est le dieu des Bramines ; Brama n'est que le premier homme. Brama reçut de Wistnou le pouvoir de créer ; il fit huit mondes comme le nôtre, dont il abandonna l'administration à huit lieutenans. Les mondes périssent & renaissent : notre terre a commencé par l'eau, & finira par le feu : il s'en reformera de ses cendres une autre, où il n'y aura ni mer ni vicissitude de saisons. Les Bramines font circuler les ames dans différens corps ; celle de l'homme doux passe dans le corps d'un pigeon ; celle du tyran dans le corps d'un vautour ; & ainsi des autres. Ils ont en conséquence un extrème respect pour les animaux : ils leur ont établi des hôpitaux : la piété leur fait racheter les oiseaux que les Mahométans prennent. Ils sont fort respectés des Benjans ou Banians dans toutes les Indes ; mais surtout de ceux de la côte de Malabar, qui poussent la vénération jusqu'à leur abandonner leurs épouses avant la consommation du mariage, afin que ces hommes divins en disposent selon leur sainte volonté, & que les nouveaux mariés soient heureux & bénis. Ils sont à la tête de la religion ; ils en expliquent les rêveries aux idiots, & dominent ainsi sur ces idiots, & par contre-coup sur le petit nombre de ceux qui ne le sont pas. Ils tiennent les petites écoles. L'austérité de leur vie, l'ostentation de leurs jeûnes, en imposent. Ils sont répandus dans toutes les Indes : mais leur collége est proprement à Banassi. Nous pourrions pousser plus loin l'exposition des extravagances de la philosophie & de la religion des Bramines : mais leur absurdité, leur nombre & leur durée, ne doivent rien avoir d'étonnant : un chrétien y voit l'effet de la colere céleste. Tout se tient dans l'entendement humain ; l'obscurité d'une idée se répand sur celles qui l'environnent : une erreur jette des ténebres sur des vérités contiguës, & s'il arrive qu'il y ait dans une société des gens intéressés à former, pour ainsi dire, des centres de ténebres, bien-tôt le peuple se trouve plongé dans une nuit profonde. Nous n'avons point ce malheur à craindre : jamais les centres de ténebres n'ont été plus rares & plus resserrés qu'aujourd'hui : la Philosophie s'avance à pas de géant, & la lumiere l'accompagne & la suit. Voyez dans la nouvelle édition de M. de Voltaire, la lettre d'un Turc, sur les Bramines.
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BRAMPOUR | grande ville d'Asie, capitale du royaume de Candish, qui est tributaire du grand Mogol. Les habitans sont idolâtres. Il s'y fait un grand commerce de toiles de coton. Long. 95. lat. 21. 10.
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BRANCA | (Géog.) ou L 'ISLE-BLANCHE, l'une des îles du Cap-Verd.
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BRANCARD | S. m. assemblage de plusieurs pieces de bois de charpente, sur lequel on place des pierres, ou autres fardeaux d'une grande pesanteur, quand on craint d'en gâter la forme par des chocs. On donne le même nom à une espece de grande civiere à bras & à piés, sur laquelle les crocheteurs transportent les choses fragiles, comme glaces, bureaux, buffets, &c.
BRANCARD, terme de Charron ; ce sont deux pieces de bois longues, quarrées, un peu courbées, qui sont enchassées à mortoise dans le bout du lissoir de derriere, & posent sur l'avant train : elles peuvent avoir environ quinze ou seize piés de long, sur six pouces d'équarrissage. Voyez la figure Planche du Sellier.
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BRANCASTRE | (Géog. anc. & mod.) village du comté de Norfolck, autrefois grande ville. C'étoit le Brannodunum des Latins.
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BRANCE | S. m. (Economie rustique) espece de blé blanc assez commun en Dauphiné : on le confond avec le sandelium des Latins, & le riguet & l'arinque de nos ancêtres. Voyez BLE.
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BRANCHER | BRANCHE, voy. FOURCHES. (O)
* BRANCHER, en Verrerie ; c'est mouvoir circulairement la branche dans l'ouverture de la bosse. Voy. BRANCHE, VERRERIE en plat, & BOSSE.
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BRANCHES | S. f. (Jard.) Les branches sont les bras du corps de l'arbre ; ce sont elles qui lui donnent la figure. Le bourgeon s'étend peu-à-peu en branches portées collatéralement, & composées des mêmes parties de la tige. Ces branches s'étendent ensuite, s'élargissent, & se divisent en ramilles, d'où sortent quantité de feuilles. Elles croissent à l'oeil de la queue de la feuille & produisent des fleurs, ensuite des fruits, qui se convertissent en semence pour la propagation de l'espece.
L'agitation des branches causée par le vent est aux arbres, ce qu'est aux animaux l'impulsion du coeur : inflexibles comme les os, elles pourroient se rompre : pliantes & élastiques comme elles sont, elles se prêtent & résistent à la violence des vents.
On compte des maitresses ou meres branches ; des branches petites & foibles ; des branches à bois, à fruit, chifonnes, gourmandes, veules, aoutées, & les branches de faux bois.
Les branches chifonnes, qui sont courtes & fort menues, seront retranchées lors de la taille d'un arbre.
Les branches gourmandes sont celles qui sortent des meres branches ou du tronc, bien droites, grosses, & longues.
Les branches à bois sont celles qui étant les plus grosses & pleines de boutons plats, donnent la forme à un arbre fruitier, & doivent se conserver en partie.
Les branches à fruit sont celles qui naissent plus foibles que les branches à bois, avec des boutons ronds : ce sont elles qui donnent les fruits, & qu'on doit conserver.
Les branches de faux bois sont celles qui croissent hors des branches taillées de l'année précédente, ou qui étant venues, sont grosses où elles devroient être menues, & qui ne donnent aucune marque de fécondité : on les coupe ordinairement.
Les maîtresses branches ou meres branches, sont les plus hautes branches de l'arbre, & d'où partent toutes les autres.
Les branches veules, qui après leur accroissement sont longues & fort menues, sans promettre aucune fécondité, se coupent comme n'étant propres à rien.
La branche aoutée se dit quand après le mois d'Août elle a bien pris sa croissance, s'endurcit, & prend une couleur noirâtre. Si elle demeure verte & velue, elle n'est pas bien aoutée. (K)
* On a transporté par métaphore le nom de branche, de l'arbre où il est pris au propre, aux pieces d'une infinité de machines, dans lesquelles ces pieces sont regardées comme des parties analogues à la branche dans l'arbre. Voyez-en des exemples ci-dessous.
BRANCHE, en Généalogie ; se prend quelquefois pour un rejetton, ou pour une famille issue d'une autre ; ce que les généalogistes appellent aujourd'hui seconde ou troisiéme branche.
BRANCHE, en Anatomie ; c'est un nom qui se donne à quelques productions d'autres parties qui en sont considérées comme le tronc.
Les arteres principales se divisent en branches, & ces branches se subdivisent en rameaux. V. ARTERE.
La cinquieme paire de nerfs se divise en trois branches, & chacune de ces branches se subdivise en d'autres rameaux. Voyez NERF & PAIRE.
Les branches ou cuisses du clitoris, qui sont comme les racines des deux corps caverneux du clitoris, sont de même attachés au bord de la branche de l'os ischium, où elles se terminent peu-à-peu, quoiqu'une portion du tuyau membraneux paroisse dans quelques-unes s'étendre jusqu'à la tubérosité, Voyez CLITORIS, ISCHIUM, &c. Elles sont trois fois aussi longues que le tronc ordinaire du clitoris même ou des cuisses.
Les branches antérieures de la moelle allongée ou ses grosses branches, que l'on nomme aussi jambes antérieures de cette moelle ; pédoncules du grand cerveau, bras de la moelle allongée, cuisses de la moelle allongée, sont deux faisceaux médullaires très-considérables, dont les extrémités antérieures s'écartent l'une de l'autre ; & les extrémités postérieures s'unissent, desorte que les deux faisceaux représentent un V romain. Leurs extrémités antérieures paroissent se perdre au bas des corps cannelés. Les petites branches ou branches postérieures de la moelle allongée sont des productions latérales de la protubérance annulaire, qui vont se perdre dans le cervelet. On nomme aussi ces petites branches, jambes postérieures du cervelet, pédoncules du cervelet. (L)
BRANCHE de courbe, terme de Géométrie. Pour entendre ce que c'est que branche de courbe, imaginez une courbe géométrique, dont on a l'équation en x & en y, x représentant les abscisses, & y les ordonnées. Voyez COURBE, ABSCISSE, ORDONNEE, &c. Il est évident.
1°. Qu'en prenant x positive, y aura un certain nombre de valeurs correspondantes à la même valeur de x.
2°. Qu'en prenant x négative, y aura de même un certain nombre de valeurs correspondantes à la même x.
Or la courbe a autant de branches que y a de va leurs répondantes aux x tant positives que négatives. Voyez à l'article COURBE, pourquoi les ordonnées positives se prennent du même côté de l'abscisse, & les négatives du côté opposé.
Au reste il est bon d'observer que les Géometres n'ont pas encore bien fixé la signification du mot branche. Par exemple, soit une courbe qui ait pour équation y = xx/6 a + x +5/6 a, on regarde d'ordinaire cette courbe comme n'ayant qu'une seule branche, parce que y n'a qu'une seule valeur. Cependant cette branche est quelquefois comptée pour deux, parce qu'elle s'étend à l'infini du côté des x positives, & du côté des x négatives. Introd. à l'analyse des lignes courbes par M. Cramer.
On appelle branche infinie une branche de courbe qui s'étend à l'infini.
L'hyperbole & la parabole ont des branches infinies. Mais le cercle & l'ellipse n'en ont point ; ce sont deux courbes qui rentrent en elles mêmes.
Les branches infinies d'une courbe sont ou paraboliques ou hyperboliques.
Les branches paraboliques sont celles qui peuvent avoir pour asymptote une parabole d'un degré plus ou moins élevé. Par exemple, la courbe dont l'équation seroit y = x2/a + b2/x, auroit une branche infinie parabolique, qui auroit pour asymptote une parabole ordinaire dont l'équation seroit y = x2/ a. En effet x étant infinie, l'équation se réduit à y = x2/ a qui est celle de la parabole ordinaire. De même si l'équation étoit y = x3/a2 + b3/xx ; on trouveroit que la branche infinie auroit pour asymptote une parabole du troisieme degré y = x3/ a2.
Les branches hyperboliques sont celles qui ont pour asymptote une ligne droite ; elles peuvent aussi avoir pour asymptote une hyperbole d'un degré plus ou moins élevé. Par exemple, la courbe y = x2/a + b2/x dont nous venons de parler, se réduit à y = b2/ x lorsque x = 0, elle a pour asymptote l'ordonnée infinie qui passe par l'origine, & elle peut avoir aussi pour asymptote l'hyperbole ordinaire.
De même la courbe y = x3/a2 + b3/x2 a pour asymptote l'ordonnée infinie, qui passe par le point où x = 0 ; & elle a aussi pour asymptote une hyperbole cubique.
Il est visible que toutes les branches infinies sont ou hyperboliques ou paraboliques. Car soit dans l'équation d'une courbe y exprimée en x par une série dont tous les termes soient réels, il est évident que quand x sera infinie ou infiniment petite, toute cette équation se réduit à y = xm, tous les autres termes étant alors regardés comme nuls. Or la branche sera parabolique, si m est positif & plus grand que 1, & hyperbolique, si m est négatif, ou 0, ou 1. Voyez SERIE.
Au reste il ne faut pas croire que cette équation y = xm qui détermine si une branche est hyperbolique ou parabolique, soit suffisante pour connoître le nombre & la position des branches. Par ex. soit y = x2/a + ; en faisant x infinie, on a y = x2/aa, & l'on voit que la branche est parabolique. De plus, on est tenté de croire que cette courbe aura comme la parabole deux branches infinies, l'une du côté des x positives, l'autre du côté des x négatives. Mais on seroit dans l'erreur, si on le pensoit ; car x étant négative, l'ordonnée y = x2/a + sera imaginaire. On peut bien négliger vis-à-vis de x2/ a2, lorsque & x2/a sont tous deux réels : mais lorsque devient imaginaire, alors ce terme rend imaginaire x2/ a, & on ne sauroit conserver l'un sans l'autre. Je suis le premier qui ait fait cette remarque. Voyez les mém. de l'acad. royale des Sciences de Prusse, année 1746. Voyez aussi REBROUSSEMENT.
On trouvera une théorie très-complete des branches infinies des courbes dans le viij. chapitre de l'introduction à l'analyse des lignes courbes, par M. Cramer. Il y donne la méthode de déterminer les différentes branches d'une courbe, & leurs asymptotes droites ou courbes. Comme cette théorie nous conduiroit trop loin, nous renvoyons là-dessus à son ouvrage. On trouve aussi d'excellentes choses sur ce sujet dans les usages de l'analyse de Descartes, par M. l'abbé de Gua. (O)
BRANCHES D'OGIVES, (Architecture & Coupe des pierres) ce sont les nervûres des voûtes gothiques, qui font saillie sur le nud de ces voûtes. Voyez NERF. (D)
* BRANCHES ou VERGE DE BALANCE ; c'est cette longue piece de fer, de bois, ou de cuivre, qui fait une des parties principales de la romaine, & sur laquelle sont marqués les points qui désignent les poids des corps qu'on pese. Voyez BALANCE & ROMAINE.
BRANCHES, terme de Bimblotier, Faiseur de balles & de dragées pour les armes à feu : on appelle ainsi le jet principal auquel toutes les dragées tiennent par un jet particulier. Ces branches sont formées dans la gouttiere du moule. Voyez, figure 6. Pl. de la fonte des dragées au moule, les dragées qui tiennent par autant de jets à l'arrête inférieure de la branche, & l'article FONTE des dragées moulées.
BRANCHE, terme de Riviere & de Marchand de bois ; il se dit de la partie d'un train qui forme un coupon. Il a quatre branches : savoir deux de labourage, & deux de rive.
La branche a six mises, & une petite mise nommée accolure. Voyez TRAIN.
* BRANCHE, se dit, chez les Charrons, des deux pieces de bois qui sont au-derriere du train d'un carrosse, vis-à-vis les montans, & qui en soûtiennent les arcboutans. C'est sur ces branches que les laquais se tiennent debout, lorsque sa livrée est nombreuse.
BRANCHE, en termes d'Epinglier, se dit proprement du brin ou du corps de l'épingle, lorsqu'une de ses extrémités est en pointe, & l'autre prette à recevoir la tête. Voyez EPINGLE.
BRANCHES de la bride, (Eperonnier) ce sont deux pieces de fer courbées, qui portent l'embouchure, la chaînette, la gourmette, & qui sont attachées d'un côté à la têtiere, & de l'autre aux rênes, pour assujettir la tête du cheval. Voyez EMBOUCHURE, CHAINETTE, GOURMETTE, TETIERE, RENE, &c.
On dit branche hardie, en parlant de celle qui ramene. Voyez RAMENER. On forgeoit autrefois une branche pour relever, qu'on appelloit branche flaque : elle n'est plus en usage, parce que celui des branches à genou est beaucoup meilleur. Pour faire une branche hardie, les Eperonniers placent le touret au-delà de la ligne du banquet, à l'égard de l'encontre ; & la branche est flaque ou foible, si le trou du touret est placé au-deçà de cette ligne par rapport à l'encolure. Voyez TOURET, BANQUET, ENCOLURE, &c.
Le coude de la branche est cette partie de la branche qui prend naissance au bas de l'arc du banquet, vis-à-vis du fonceau ou du chaperon, qui forme un autre arc au-dessous du banquet. Voyez FONCEAU, CHAPERON. Le coude d'une branche prend un tour plus ou moins grand, selon que l'on veut fortifier ou affoiblir la branche.
Branche de mors. Les meilleures branches de mors sont de l'invention du connétable de Montmorenci, qu'on appelle à cause de cela, à la connétable. De quelque côté que les branches du mors aillent, la bouche du cheval va toûjours au contraire. Vous tirez la bride, & ce mouvement tire les branches en-haut, & la bouche va en-bas. L'action de la branche de la bride ressemble à celle du levier. Voici les noms des différentes especes de branches : branche droite à pistolet, branche à la connétable, branche à la gigote, branche à genou, branche françoise : on peut en voir la description dans Soleysel, Newcastle, &c. & la figure en AO, Planche de l'Eperonnier, fig. 22.
* BRANCHES, terme de Manufacture d'étoffe, de laine, de soie, de gase, &c. c'est une des portions dans lesquelles une chaîne est divisée. Voyez CHAINE. La chaine est distribuée en portées ; la portée en branches, & la branche en fils. La branche est une demi-portée. La quantité de fils dont elle est composée, varie selon la qualité de l'étoffe.
BRANCHE, en terme de Fourbisseur, est une partie de la poignée faite en demi-cercle, qui passe d'un bout dans l'oeil au-dessous de la poignée, & de l'autre bout dans le pommeau au-dessus. Voyez POIGNEE & POMMEAU. La branche est garnie d'une amande & d'un bout de revers. Voyez AMANDE & BOUT DE REVERS, & la figure, Planche du Ciseleur-Damasquineur.
* BRANCHE, terme de Nattier ; c'est ainsi que ces ouvriers appellent les portions dont un cordon de natte est formé. Un cordon de natte a trois branches, & chaque branche peut avoir depuis quatre brins jusqu'à douze, selon l'épaisseur & la force qu'on veut donner à la natte.
BRANCHES, ne se dit, chez les Rubaniers, que dans l'ouvrage des velours, & s'entend de chaque portion de chaîne, quoique de différentes couleurs, ou d'une seule, contenue sur chacun des petits roquetins qui composent lesdites branches. Il en a été parlé plus au long à l'article ALLONGES des potenceaux. Voyez ROQUETIN.
* BRANCHE, en Verrerie en plat ; c'est une planche aiguisée en pointe par un bout, & que le foüet fait entrer dans l'orifice de la basse qui lui est présentée par l'ouvrier, pour lui faciliter l'ouverture du plat, en polir les bords, & former l'ourlet. Voyez VERRERIE EN PLAT, FOUET, & BOSSE.
* BRANCHE de vigne, (Antiq.) La branche de vigne étoit chez les Romains la marque des centurions. Voyez CENTURION.
* BRANCHE de cyprès, (Commerce) c'est une espece de droit de balise qui se paye au bureau des fermes établi à Blaye, par chaque vaisseau qui vient de Bordeaux, Livourne, & Bourg.
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BRANCHIDES | S. m. pl. (Hist. anc.) prêtres du temple d'Apollon, à Didyme dans l'Ionie. Ces prêtres livrerent eux-mêmes à Xerxès les richesses du temple. Après cette impiété, ils se réfugierent dans la Sogdiane, où Xerxès leur permit de bâtir une ville. Mais Apollon ne laissa point leur crime impuni. Alexandre prit leur ville, la rasa après en avoir passé tous les habitans au fil de l'épée ; & la faute des peres fût poursuivie sur leurs descendans.
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BRANCHIER | adj. se dit, en Fauconnerie, d'un jeune oiseau qui n'ayant point encore de force, se repose de branche en branche au sortir du nid.
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BRANCION | (Géog.) petite ville avec titre de comté, dans le duché de Bourgogne.
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BRANDAM | (Géog.) ville d'Asie dans l'île de Java, appartenante au roi de Suruhaya.
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BRANDEBOURG | (LA MARCHE DE) Géogr. c'est un grand pays d'Allemagne dans le cercle de la haute Saxe. Il est borné à l'occident par le duché de Lunebourg ; au nord, par le Meckelbourg & la Poméranie ; à l'orient par la grande Pologne ; & au midi, par la Silésie, la Lusace, l'électorat de Saxe, & le duché de Magdebourg. Ce pays est abondant en grains, chanvre, bestiaux ; il s'y trouve beaucoup de manufactures très-florissantes, il appartient au roi de Prusse, qui porte le titre de marggrave & d'électeur de Brandebourg. Il est archi-chambellan de l'Empire : c'est le comte de Hohenzollern qui remplit sous lui cette fonction.
BRANDEBOURG, (Géogr.) ville capitale de la Marche de ce nom, sur la riviere d'Havel. Il y a une autre ville de ce nom dans le duché de Meckelbourg, qu'on appelle nouvelle Brandebourg.
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BRANDEIS | (Géog.) petite ville & château de Bohème sur l'Elbe, à trois lieues de Prague. Il y a encore une autre ville de ce nom en Bohème : elle est située sur la riviere d'Orlitz.
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BRANDERIE | S. f. (Commerce) c'est ainsi qu'on nomme à Amsterdam les lieux où l'on fait les eaux-de-vie de grain.
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BRANDES | S. f. pl. se dit, en Vénerie, des bruyeres où les cerfs vont viander. V. CERF & VIANDER.
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BRANDEUM | subst. (Hist. ecclés.) nom usité dans les auteurs de la basse latinité, pour signifier un linceul de soie ou de lin, dont on enveloppoit les corps des saints & leurs reliques. On donnoit le même nom aux linges que l'on faisoit toucher aux reliques des saints. Du tems de S. Grégoire le Grand, qui tenoit le siége de Rome l'an 600, & avant lui, on ne touchoit point aux corps des saints ; & au lieu de leurs os, on se contentoit d'envoyer dans une boîte un morceau de ce drap ou de ce corporal. Le pape saint Grégoire parle de cette coûtume, & ajoûte qu'on la croyoit, par tradition, du tems du pape S. Léon, vers l'an quatre cent cinquante. Quelques grecs ayant douté si l'on devoit tenir ces reliques pour bonnes, ce saint pontife, pour les convaincre, se fit apporter des ciseaux ; & coupa en leur présence un de ces brandeum, c'est-à-dire une de ces pieces de drap, dont on dit qu'il sortit du sang, comme si c'eût été le corps même du saint. Géog. Turon. de Glor. conf. cap. xxxvij. Pierre Damien, in lib. IV. epist. xjv. Bede, Hist. Angl. lib. I. c. iij. Ducange, Glossar. (G)
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BRANDIR | v. n. en termes de Charpenterie, c'est, lorsque l'on place une piece de bois de travers sur une autre sans être entaillée, percer un trou en travers des deux pieces, & y mettre une cheville de bois pour les arrêter ensemble. Brandir les chevrons sur les pannes : c'est faire avec une tariere un trou qui perce les deux ensemble, & y mettre une cheville.
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BRANDONS | S. m. pl. terme de Palais, auquel on joint pour l'ordinaire celui de panonceaux ; ce sont des bouchons de paille qu'on attache en quelques provinces à la porte des héritages saisis, avec les armes du roi ou du seigneur. Voyez PANONCEAUX.
ARRET BRANDONS ; voyez ARRET. (H)
* BRANDONS, (Oeconomie rustique) c'est le nom qu'on donne dans les campagnes à quelques épines, branches, ou bouchons de paille, par lesquels on avertit que le chaume est réservé & retenu par celui qui jouit de la terre : sans quoi il seroit censé abandonné, & le premier venu en pourroit faire son profit. Dans les coûtumes où les brandons ont lieu, on les met dès le 15 Septembre.
BRANDONS, danse des brandons ; on exécutoit cette danse dans plusieurs villes de France, le premier dimanche de carême, autour des feux qu'on allumoit dans les places publiques ; & c'est de-là qu'on leur avoit donné le nom de brandons. Voyez DANSE SACREE. Les ordonnances de nos rois ont sagement aboli ces danses : ainsi que les baladoires, les nocturnes, & celles qui se faisoient dans nos églises : cet usage étoit si fort enraciné, que malgré les sages précautions des évêques & des magistrats, il subsistoit opiniâtrément dans quelques villes du royaume. A la fête de saint Martial, Apôtre du Limousin, le peuple dansoit encore vers le milieu du dernier siecle dans le choeur de l'Eglise, dont ce saint est le patron. A la fin de chaque pseaume, au lieu de chanter le Gloria Patri, tout le peuple chantoit en langage du pays : san Marceau pregats per nous, è nous epingaren per bous ; c'est-à-dire, saint Martial priez pour nous, & nous danserons pour vous. Cette coûtume est abolie. Bonnet, Histoire de la danse. (B)
BRANDONS, (Géog.) ville de France en Bourgogne, sur les frontieres du Charolois, à quatre lieues d'Autun.
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BRANDSOE | (Géog.) petite île du Danemarck, dans le détroit de Middelfart, entre le duché de Schleswig & l'île de Funen.
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BRANLANT | en terme de Metteur en oeuvre, est une croix qui se porte sans coulant, d'un simple chaton, qui se termine par une pendeloque qui lui donne ce nom. Voyez PENDELOQUE.
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BRANLE | S. m. terme d'Orchestre ou de Danse ; c'est un pas composé de plusieurs personnes qui dansent en rond en se tenant par la main, & en se donnant un branle continuel.
On commençoit autrefois tous les bals par un grand branle : on les commence aujourd'hui ordinairement par les menuets.
Il y a le branle simple & le branle double : le premier consiste en trois pas un pié joint, qui se font en quatre mesures. On les répete pour faire le branle double.
Il n'y a guere de nom de province qu'on n'ait donné à quelqu'un des branles François ; il y a des branles de Bourgogne, du Barrois, & de Bretagne.
Il y avoit autrefois le branle des Lavandieres, des sabots, des chevaux, des pois, des hermites, de la torche, &c. les branles morgués, gesticulés, de la moutarde, &c. tous ces branles se réduisent à présent à un seul genre qu'on nomme branle à mener. Dans cette espece de branle, chacun mene la danse à son tour, & se met après à la queue. C'est pour l'ordinaire aux chansons que l'on danse les branles. Orchesographie de Thoinot Arbeau. (B)
BRANLE de S. Elme, (Hist. mod.) fête qui se célébroit autrefois à Marseille la veille de St. Lazare. On choisissoit les plus beaux garçons & les filles les mieux faites ; on les habilloit le plus magnifiquement qu'on pouvoit ; cette troupe représentoit les dieux de la fable, les différentes nations, &c. & étoit promenée dans les rues au son des violons & des tambours. Cette mascarade s'appelloit le branle de saint Elme.
BRANLE ou HAMAC, (Hist. mod.) est une espece de lit suspendu entre deux arbres, deux poteaux ou deux crochets, dont on se sert dans les Indes orientales.
Les Indiens suspendent leurs branles à des arbres, pour se mettre à couvert des bêtes sauvages & des insectes, qui ne manqueroient pas de leur nuire s'ils couchoient par terre.
Les habitans des îles Caribes sont extrèmement superstitieux au sujet de leurs branles, & ne les font jamais sans beaucoup de cérémonie : ils placent à chaque bout un sac de cendre, croyant que sans cette précaution ils ne subsisteroient pas longtems. Ils croiroient faire tomber leurs branles s'ils mangeoient dessus des figues, ou quelque poisson qui eût des dents.
Le P. Plumier qui s'étoit souvent servi de branles dans ses voyages des Indes, prétend qu'ils consistent en une grande mante ou grosse toile de coton d'environ six piés en quarré, aux extrémités de laquelle sont des gances de la même étoffe, où passent à travers des cordons dont on forme d'autres anneaux, & où passe une corde qu'on attache aux arbres voisins, ou à deux crochets si c'est dans les maisons. Cette espece de couche sert en même tems de lit, de matelas, de drap, & de coussin. (G)
BRANLES, HAMACS, (Marine) c'est ainsi qu'on appelle encore les lits dont se servent les gens de l'équipage d'un vaisseau : ils sont composés d'un morceau de forte toile, long de six piés & large de trois, renforcé par les bords d'un cordage appellé ralingue, en façon d'ourlet, que l'on suspend par les quatre coins entre les ponts d'un vaisseau, où l'on fait coucher un matelot ou un soldat. Voyez HAMAC.
Branle matelassé, c'est une espece de matelas qui est fait en branle.
On dit, tendre & détendre les branles.
Branle-bas ou forbranle, c'est un commandement qu'on fait lorsqu'on veut faire détendre tous les branles d'entre les ponts, afin de se préparer au combat, ou pour quelqu'autre raison. (Z)
BRANLE, en Fauconnerie, se dit du vol de l'oiseau, lorsque s'élevant seulement au premier degré sur la tête du fauconnier, il tourne en battant des aîles & remuant la queue.
BRANLE, en Horlogerie, s'entend de l'espace parcouru par le régulateur dans une vibration.
Comme les petits arcs décrits par un pendule ne different pas sensiblement de ceux qu'il décriroit, s'il vibroit entre des portions de cycloïde (voyez CYCLOÏDE) ; il est à propos que le pendule décrive de petits arcs dans ses vibrations : au reste le branle doit être toujours conditionnel à l'échappement qu'on employe ; parce qu'il y en a qui exigent un plus grand branle que d'autres, tel est l'échappement à levier. Voy. ECHAPPEMENT, PENDULE, CYCLOÏDE, &c.
L'expérience a appris aux Horlogers, que pour qu'une montre aille juste avec l'échappement ordinaire, & que cette justesse soit de durée, il falloit que le balancier branlât moitié, c'est-à-dire qu'un point quelconque de sa circonférence parcourût dans chaque vibration un demi-cercle ou 180 degrés. Voy. ECHAPPEMENT, LEVIER, &c. (T)
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BRANLER | v. n. en terme de Commerce, se dit d'un marchand ou d'un banquier, qui fait présenter ses billets par-tout pour avoir de l'argent, & qui donne par-là à connoître qu'il est sur le penchant de sa ruine, & prêt à faire faillite. Voyez FAILLITE. (G)
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BRANLOIRE | S. f. c'est ainsi que les Serruriers, Taillandiers, & autres ouvriers de forge, appellent la chaîne, qui tient d'un bout au levier ; qui fait mouvoir leurs soufflets, & qui porte un manche de l'autre bout qu'ils prennent à la main, pour mettre en action ce levier.
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BRANQUE-URSIN | voyez ACANTHE.
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BRANSKO | (Géogr.) petite ville de Moscovie, sur la riviere Desna, dans le duché de Novogorod Sewiersky. Il y a deux autres villes de même nom, l'une en Podlachie sur la Narva, l'autre en Wolhinie.
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BRANSLE | (Géog.) riviere de France, qui prend sa source dans le Vendomois, se jette dans la Cisse, un peu au-dessus de sa jonction avec la Loire.
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BRAQUER un cano | ou un mortier, (Artillerie) c'est lui donner la position nécessaire pour tirer : mais on se sert plus communément du terme de pointer, pour exprimer la même chose. Voyez POINTER. (Q)
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BRAQUE | ou BRACS, s. m. pl. (Chasse) c'est le nom qu'on donne à des chiens ras de poil, bien coupés, legers, bons quêteurs, vigoureux, & assez fins de nez. Ils sont bons pour la plaine & pour les brossailles. Ils résistent à la chaleur, & sont moins sensibles aux épines que les autres.
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BRAS | S. m. (Anatomie) est une partie du corps humain, qui se termine d'un côté à l'épaule, & de l'autre à la main. Voyez CORPS, EPAULE, &c.
Chez les Medecins & les Anatomistes, bras signifie seulement cette partie qui est entre l'épaule & le coude ; le reste depuis le coude jusqu'au poignet, se nomme l'avant-bras. Voyez MAIN.
Le bras dans ce dernier sens, n'a qu'un seul os appellé humerus. Voyez HUMERUS.
Le bras a cinq sortes de mouvemens qui s'exécutent par neuf muscles ; un mouvement en-haut, par le deltoïde, le susépineux, & le coracobrachial : un mouvement en-bas, par le grand rond, le petit rond, & le grand dorsal ; un mouvement en-devant, par le grand pectoral & le sous-scapulaire ; un mouvement en-arriere, par le sous-épineux ; un mouvement circulaire, par l'action combinée de tous ces muscles. Voyez chacun de ces muscles sous son article particulier.
L'autre partie du bras ou l'avant-bras, est composée de deux os, le radius & le cubitus. Voy. RADIUS & CUBITUS.
Les muscles qui fléchissent l'avant-bras, sont le biceps & le brachial interne ; ceux qui l'étendent sont le long extenseur & le court extenseur, le brachial externe, l'anconée ; le mouvement de pronation s'exécute par le rond pronateur & le quarré pronateur ; & celui de supination, par le long supinateur & le court supinateur. V chacun de ces muscles en son lieu. La saignée ordinaire se fait au bras. V. SAIGNEE & PHLEBOTOMIE.
BRAS de la moelle allongée, voyez BRANCHES & MOELLE ALLONGEE. (L)
BRAS, se prend au figuré pour un instrument ou pour la partie d'une machine, qui a par sa longueur & par sa fonction des rapports, quelquefois bien éloignés, avec la forme & les usages du bras dans le corps humain. C'est en ce sens qu'on appelle chez les marchands Ciriers, bras de flambeaux, les longs cordons de meche dont ils forment leurs flambeaux, en les enduisant de cire. Voyez FLAMBEAU & CIRE.
Chez les Menuisiers & charpentiers, bras de scie, sont les deux pieces de bois paralleles auxquelles la feuille de la scie est attachée. Voyez SCIE.
Chez les Charpentiers, bras de chevre, les deux longues pieces de bois qui portent le treuil sur lequel le cable s'enveloppe, quand on monte un fardeau. Voyez CHEVRE, &c.
Chez les Masons, bras de bar & de civiere, les extrémités des deux principales pieces de ces engins, celles que les porteurs tiennent à leurs mains, quand ils s'en servent. On dit encore bras de grue (voyez GRUE) ; bras de baleine, pour nageoires (voyez BALEINE) ; bras d'engin (voyez ENGIN) ; bras de Tourneur, bras d'ancre, bras de riviere, &c. Voyez ces articles, les uns ci-dessous, les autres à leurs renvois.
BRAS SECULIER, terme usité en Droit, est l'autorité, la main ou puissance du juge séculier, que l'on employe pour faire exécuter les ordonnances du juge d'Eglise, ou pour faire subir à un ecclésiastique coupable d'un délit privilégié, les peines que l'Eglise ne peut imposer. Le juge d'Eglise n'a pas le pouvoir de mettre à exécution ses sentences sur les biens temporels de ceux qu'il auroit condamnés, d'imposer des peines grieves, & qui aillent jusqu'à l'effusion du sang. Dictionn. de Droit de Deferriere.
BRAS, en Manége, se dit de la partie de jambe de devant, qui s'étend depuis le bas de l'épaule jusqu'au genou. On dit qu'un cheval plie bien le bras, pour dire qu'il plie bien la jambe, quoique le bras même ne plie point. Un cheval qui plie bien les bras, & leve le devant avec liberté, n'a plus besoin d'être mis entre deux piliers pour lui rendre le devant leger. Le bras pour être bien fait, doit être large, long, & charnu. (V)
BRAS, (Jardinage) est un terme dont on se sert en parlant des melons, des concombres, des citrouilles, pour exprimer les branches qu'ils poussent. On distingue les bons bras d'avec les mauvais, qui sont veules, & qu'il faut supprimer. Les bons melons ne viennent jamais que sur les bons bras. (K)
BRAS, en Marine ; ce sont des cordages amarrés au bout de la vergue, pour la mouvoir & gouverner selon le vent. La vergue d'artimon, outre les bras, a une corde appellée ourse, à l'extrémité de la vergue.
Halez sur les bras, terme de commandement pour ordonner aux matelots de roidir ces cordages.
Tenir un bras, c'est-à-dire haler & amarrer un de ces cordages nommés bras.
on bras, cela se dit quand on brasse au vent, ensorte que le vent ne soit pas au plus près.
Bras de revers, larguer le bras du vent ou de service.
Bras, les grands bras ou bras de la grande vergue, fig. 1. n°. 44.
Bras de la vergue de misene, n° 45.
Bras de la vergue du grand hunier, n° 73.
Bras de la vergue du petit hunier, n°. 75.
Bras de vergue de foule, n° 71. Le cordage appellé ourse ou hource, n° 43.
Bras de vergue de perroquet de foule, n° 72.
Bras de la vergue du grand perroquet, n° 74.
Bras de la vergue du perroquet de misene, fig. 1. n° 76.
Bras de la vergue de civadiere, n° 46.
Bras de la vergue de perroquet de beaupré, n° 77. (Z)
BRAS, terme dont se servent les Géographes, pour dire une partie de mer ou de riviere resserrée entre des terres. Voyez MER, OCEAN, RIVIERE.
L'Italie est séparée de la Sicile par un bras de mer.
Le bras de Saint-Georges dans la Méditerranée, est l'ancien bosphore de Thrace, aujourd'hui le détroit des Dardanelles.
BRAS d'une ancre, est une des moitiés de la partie courbe, dite croisée. Voyez ANCRE.
BRAS d'une balance, sont les deux parties du levier qui la forme, prises de part & d'autre du centre, & auxquelles on suspend les poids. V. BALANCE. (O)
BRAS, en terme de Diamantaire, n'est autre chose qu'une piece de bois A B, Pl. XI. du Diamantaire, d'environ deux piés de long, garnie de deux poignées, & montée sur une autre piece perpendiculaire C D, qui tourne par en-bas sur une crapaudine scellée en terre, & par en-haut au moyen d'un tourbillon dans un collet qui l'embrasse. Voyez la figure premiere, Pl. II. du Diamantaire.
Pour faire mouvoir la roue, un ouvrier pousse & tire alternativement les bras A B, par le moyen des deux poignées qu'il tient dans ses mains ; le mouvement ainsi imprimé au bras se communique par le moyen de l'épée au coude de l'arbre, qui porte la roue de bois. Voyez les figures.
BRAS, (parties de la presse en taille-douce) ils sont au nombre de quatre, assemblés par une de leurs extrémités o o, dans les parties latérales des jumelles C D ; leur autre extrémité F F, porte sur les colonnes G, qui sont de même au nombre de quatre. Voyez PRESSE d'Imprimerie en taille-douce, & les fig. prem. & 6.00, FF, Pl. de l'Imprimerie en taille-douce.
BRAS, (terme de Tourneur) ce sont deux pieces de bois qui traversent les poupées du tour un peu au-dessous des pointes, & qui servent à soutenir la barre sur laquelle l'ouvrier appuie ses outils en travaillant. Ces bras s'avancent & reculent à la volonté de l'ouvrier, & selon que l'ouvrage le demande. Voyez TOUR.
Bras de presse, bras de force, pieces du métier à bas. Voyez l'article BAS.
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BRASIDÉES | S. m. pl. (Hist. anc.) fêtes instituées en l'honneur de Brasidas, par les habitans d'Amphipolis, qui éleverent à ce chef fameux des Lacédémoniens, un superbe tombeau dans le milieu de leur ville. Nous ne savons rien de la maniére dont les Brasidées se célebroient.
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BRASILLER | v. neut. (terme de Marine) il se dit des feux & de la lumiere que jette la mer pendant la nuit. La mer brasille beaucoup le long des flancs d'un vaisseau qui vogue à pleines voiles.
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BRASLA | ou BRACKLAW, (Géog.) ville & palatinat, ou province de la petite Russie, sur les frontieres de la Tartarie ; la ville est située sur la riviere de Bog. Long. 47. 15. lat. 48. 49.
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BRASLAW | ou BRATISLAW, (Géog.) ville de Pologne, sur les frontieres du duché de Curlande, sur un grand lac, à peu de distance de la Dwina. Long. 44. 40. lat. 55. 45.
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BRASSAGE | S. m. (à la Monnoie) droit que le roi accorde aux directeurs de la monnoie sur chaque marc d'or, d'argent, & de billon, mis en oeuvre & fabriqué. Ce droit est de cinq sous pour l'or & pour l'argent, & de six sous pour le billon.
Autrefois le directeur (que l'on appelloit maître) prenoit trois livres par marc d'or ; & dix-huit sous par marc d'argent, dont la moitié étoit employée au déchet de fonte, charbon, frais, &c. & l'autre moitié au payement des ouvriers.
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BRASSARD | S. m. instrument de bois dont on se sert pour joüer au ballon : c'est une douille de bois de chêne assez mince, de la longueur de l'avant-bras qu'on y fait entrer à force avec des mouchoirs, serviettes, ou autres linges. On peut avec le bras ainsi armé, recevoir le ballon & le frapper si fort que l'on veut sans se blesser. La surface du brassard est taillée en grosses dents, afin que le coup ne glisse pas sur le ballon.
Les anciens à qui le jeu de ballon n'étoit pas inconnu, ont eu aussi leurs brassards : mais ils n'étoient pas de bois ; c'étoient des courroies d'un cuir fort, dont ils faisoient plusieurs tours sur leurs bras.
* BRASSARD de Verrier : ces brassards sont faits de deux vieux chapeaux passés l'un dans l'autre. On en ôte le dessus, & l'on en couvre le bras droit jusqu'au coude. Ils servent à soûtenir le manche des pelles, quand il est trop chaud, lorsqu'on transporte avec ces pelles de la matiere, des arches à recuire, dans le pot.
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BRASSAW | ou GRONSTAT, (Géog. anc. & mod.) ville forte de Transilvanie. Long. 44. 10. lat. 46. 30. Les uns la prennent pour la Praetoria augusta de Ptolomée, & d'autres la nomment Corona & Stephanopolis.
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BRASSE | S. f. La Marine a trois sortes de brasses ; la grande brasse, dont on se sert pour les vaisseaux de guerre est de six piés, la moyenne, qui est celle des vaisseaux marchands, est de cinq piés & demi ; & la petite n'est que de cinq piés ; elle n'est en usage que parmi les patrons de barques & autres petits bâtimens qui servent à la pêche.
Tous les cordages se mesurent par brasses. Les cables des plus grands vaisseaux ont 120 brasses, ou 720 piés. Le Roi entretient dans ses ports un officier nommé maître d'équipage, dont la principale fonction est de couper les manoeuvres suivant le rang des vaisseaux, c'est-à-dire de donner aux cordages la longueur qui leur convient à chacun. (Z)
BRASSE, (Commerce) mesure de la longueur des deux bras étendus, & qui est ordinairement de cinq piés. M. Savari la fait de six piés de roi, & équivalente à la toise. Voyez TOISE.
BRASSE, est aussi une espece d'aune ou de mesure de longueur, qui sert à mesurer les draps, toiles, rubans & autres pareilles marchandises.
On s'en sert dans presque toute l'Italie, mais sa mesure varie suivant les lieux. A Venise la brasse contient un pié trois pouces trois lignes, qui font huit quinziemes de l'aune de Paris, & ainsi quinze brasses de Venise font huit aunes de Paris.
La brasse de Bologne, Modene, Mantoue, est semblable à celle de Venise.
A Luques la brasse est d'un pié neuf pouces dix lignes, ce qui fait demi-aune de Paris : à Florence elle contient un pié neuf pouces quatre lignes, qui font quarante-neuf centiemes d'aune de Paris, & par conséquent un peu moins d'une demi-aune.
A Milan la brasse pour mesurer les soies, n'est pas la même que celle avec laquelle on mesure les draps de laine : la premiere ne contenant qu'un pié sept pouces quatre lignes, & la seconde deux piés onze lignes.
A Bergame la brasse contient un pié sept pouces six lignes, qui font cinq neuviemes d'aune de Paris ; ainsi neuf aunes de Bergame n'en font que cinq de Paris.
BRASSE, se dit aussi de la chose mesurée avec la brasse ; une brasse de drap, une brasse de corde. (G)
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BRASSÉE DE SOIE | (terme de Fabrique des étoffes de soie) La brassée de soie est composée d'autant de brins de soie qu'il y a de rochets à la cantre. Le terme de brassée n'est en usage que pour l'ourdissage des chaînes : mais on se sert par-tout du terme de portée. La portée ordinaire est de 80 fils.
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BRASSEIER | BRASSER, BRACHER, v. neut. en Marine, c'est faire la manoeuvre des bras, & gouverner les vergues avec ces cordages. V. BRAS. (Z)
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BRASSER | v. neut. il se dit proprement de la manoeuvre des brasseurs ou fabricateurs de biere ; dont le principal travail est des bras. Voyez BRASSERIE.
Le verbe brasser a passé de-là dans plusieurs autres arts.
BRASSER les vergues, (Marine) c'est mettre les vergues horisontalement de l'avant en-arriere, en maniant les manoeuvres.
BRASSER les voiles sur le mât, c'est-à-dire manoeuvrer les voiles de telle maniere que le vent se mette dessus, au lieu d'être dedans : ce qui est aussi brasser à contre, terme usité pour la misene.
Brasse au vent, terme de commandement pour faire manoeuvrer les vergues du côté d'où vient le vent. Brasse au vent tout court, se dit pour faire manoeuvrer, ensorte que le vent ne soit pas au plus près. Brasse au plus près du vent, pour qu'il soit au plus près. Brasse sous le vent, c'est pour faire manoeuvrer les vergues du côté opposé à celui du vent. Brasse à l'autre bord, pour faire brasser les vergues à l'autre bord. Brasse à porter, brasse à servir ; c'est pour faire brasser les vergues, ensorte que le vent donne dans les voiles. Brasser à contre, c'est-à-dire brasser les bras du vent, & faire que le vent donne sur les voiles ; cela se pratique ordinairement lorsqu'on veut le mettre sur la voile de misene. C'est dans ce sens qu'on dit, brasse la misene à contre. (Z)
BRASSER ; (à la Monnoie) verbe qui marque l'action de remuer le métal lorsqu'il a acquis l'état de fluidité. L'or ne se brasse point de même que l'argent & le billon. Voyez BRASSOIR.
* BRASSER, terme de Pêcheur, c'est agiter & troubler l'eau avec la bouloire, pour faire sortir le poisson & le conduire dans les filets.
* BRASSER, en terme de Tannerie, c'est remuer les cuirs, les agiter, & retourner pendant un certain tems dans une cuve remplie de tan & d'eau chaude, pour les rougir. Voyez TANNER.
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BRASSERIE | subst. f. attelier qui contient les cuves, chaudieres, moulins, & tous les autres instrumens, agrès & commodités nécessaires pour faire la biere. La biere est une boisson fort ancienne. V. BIERE. On peut dire en général, qu'elle se tire du grain : mais elle ne se tire pas du même grain, par tout où l'on en fait. A Paris, & plus généralement en France, on n'y employe que l'orge. Quelques brasseurs seulement y mêlent, les uns un peu de blé, d'autres un peu d'avoine. Dans les provinces du nord de la France ; telles que la Picardie, l'Artois, le Boulonnois, la Flandre Françoise, elle ne se fait qu'avec le soucrillon, ou l'orge d'hyver, ou même avec l'espiotte, que nous appellons aussi l'escourgeon. Ce que nous nommons orge, s'appelle dans ces provinces pamele.
En Hollande, où brasse non-seulement avec l'orge soucrillon, mais encore avec le blé & l'avoine. Les brasseurs hollandois, qui tirent de la biere de chacun de ces trois grains, ont trois sortes différentes de biere.
En Allemagne, ou la biere ne laisse pas que d'être fort commune, elle se fait aussi avec l'orge. On y employe quelquefois l'espiotte. L'espiotte est un grain, dont le noyau ressemble assez à celui du seigle, excepté qu'il est plus court & plus plat. La coque qui le renferme ne differe guere de celle du blé ; on a seulement beaucoup plus de peine à en faire sortir le grain, même en le battant à la maniere des autres grains ; aussi on se contente d'en briser les épis ; on le fait germer & on le mout dans sa coque.
En Angleterre, où la biere est très-commune, on la fait ainsi qu'ailleurs, avec l'orge, le blé & l'avoine.
Une brasserie est un bâtiment très-considérable ; le nombre des agrès ne l'est pas moins : les principaux sont le germoir, la touraille, le moulin, les cuves les chaudieres, &c.
Pour brasser, suivant notre façon de Paris, il faut avoir de bon orge, que l'on met tremper dans de l'eau naturelle pendant l'espace de trente à quarante heures, plus ou moins, selon que les eaux sont plus ou moins dures & l'orge plus ou moins sec. Au reste en quelque tems que ce soit, & de quelque nature que soit l'orge, on jugera qu'il aura assez d'eau, quand en le serrant entre les doigts, il cédera facilement à la pression & s'écrasera sans peine sous l'ongle ; alors on le retirera de la cuve où on l'aura fait mouiller, & on le transportera dans le germoir.
Du germoir. Le germoir ainsi que le nom l'indique assez, est un lieu où l'on met germer le grain mouillé qu'on destine à faire de la biere. Il y en a de deux especes, les uns sont de grandes caves voûtées, on les regarde comme les meilleurs ; les autres de grandes salles aux rez-de-chaussée. Le grain reste au germoir, en tas ou en mottes, communément vingt-quatre heures. Au bout de ce tems, qu'on lui accorde pour reboire son eau, comme on dit dans les brasseries, on le met en couches, c'est-à-dire qu'on étend les mottes ou tas, & qu'on les réduit à la hauteur de 8 à 9 pouces d'épaisseur, plus ou moins, selon que le germoir est plus ou moins échauffé. On laisse le grain dans cet état jusqu'à ce que par la chaleur naturelle qu'il trouvera dans lui-même, le germe commence à en sortir. Quand on verra le germe pointer hors du corps du grain, pour lors il faudra rompre.
On appelle rompre une couche de grain, la remuer avec une pelle, jetter le grain d'une place dans une autre, le retourner, & le remettre en couche comme auparavant, observant seulement de donner à la couche moins de hauteur. A moins que le grain n'eût été rompu trop jeune, c'est-à-dire avant que le germe en fût assez avancé, on laissera la nouvelle couche de grain dans cet état pendant douze ou quinze heures, plus même, sur-tout si l'air qui regne dans le germoir est froid ; car alors la germination se fera beaucoup plus lentement.
Au bout des douze ou quinze heures, le germe s'étant accru considérablement, & la chaleur s'étant beaucoup augmentée, on redonnera encore un coup de pelle au grain, observant de l'éventer plus que la premiére fois : cette manoeuvre s'appelle donner le second coup de pelle. On finira le second coup de pelle, par remettre le grain en couche ; il y restera encore douze à quinze heures, ce tems lui suffira pour achever de pousser son germe au point qui convient pour être en état de passer sur la touraille.
De la touraille. La touraille est une des portions principales d'une brasserie. Sa partie supérieure A B C D, figure premiére ; Brasserie, Planche premiére, a la forme d'une pyramide équilatérale, creuse, dont le sommet seroit tronqué, & la base en-haut. Le corps ou les faces en sont composées de pieces de bois assemblées & revêtues en-dedans d'une maçonnerie de brique, faite sur un lattis tel que celui des plafonds ; & pour préserver les bois d'un incendie presqu'inévitable, la maçonnerie de brique est enduite de bonnes couches de plâtre : x, y, z, sont trois faces intérieures de la pyramide ou tremie de la touraille. On a pratiqué à l'une de ces faces une porte pour pouvoir entrer dans le corps de la touraille, en cas de besoin.
La base de cette pyramide ou la superficie supérieure de cette tremie A B E F, est un plancher fait de tringles de bois de 3 pouces d'équarrissage. Chaques tringles laissent entr'elles le même intervalle, ensorte que la surface entiere A B E F, est tant pleine que vuide. Sur ces tringles de bois, qui sont communément de sapin, on étend une grande toile de crin, que l'on nomme la haire. La haire couvre tout le plancher A B E F de la touraille ; cet espace est environné & surmonté de madriers, au défaut de muraille. Sur ces madriers sont attachées des bandes de chêne, que l'on nomme costieres. Les costieres débordent, ou, comme on dit, recouvrent sur l'aire du plancher, & empêchent le grain de s'échapper par les rebords, & de tomber dans le corps de la touraille.
Sous la tremie A B C D ou sous le corps de la touraille, en est une autre de maçonnerie C D G H, de la forme d'un parallelepipede. C'est dans l'intérieur de ce solide qu'est construit le fourneau de la touraille, dont on voit l'intérieur par la bouche I. Ce fourneau a communément vingt pouces de large, quatre piés & demi de long dans oeuvre, non compris son embouchure, qui se trouvera plus ou moins longue, selon que les murs du fourneau auront plus ou moins de profondeur.
Pour construire solidement un fourneau de touraille, il faut que le pavé en soit fait de briques posées debout & de champ, & que le pié du mur en-dedans du fourneau soit revêtu de fortes enclumes, capables de résister à l'action du feu ; autrement, soit les briques, soit les tuiles dont on le construiroit, seroient bientôt calcinées. Comme la premiere portion du fourneau s'éleve en grand sur le plomb, ainsi qu'on l'apperçoit dans la figure, il est nécessaire que les enclumes soient detenues par le haut, d'une forte barre de fer scellée d'un bout dans le mur du fond du fourneau, & de l'autre dans le mur de côté, près de l'embouchure, ensorte qu'elle s'étende de toute la longueur du fourneau ; & pour plus de solidité, on l'armera de gougeons de fer d'environ un pié de long, qui seront pareillement scellés dans le mur de côté, ainsi qu'on l'apperçoit dans les coupes du fourneau, fig. 2. & 3. même Planche.
La premiere partie du fourneau étant ainsi élevée, on construira à-plomb sur elle celle du milieu ; on lui donnera environ un pié de hauteur. On enlevera ensuite la derniere partie, sa forme sera la même qu'on voit à celle du milieu, mais dans une situation renversée ; ensorte que la partie du milieu du fourneau & sa partie supérieure, ressemblent assez à deux chaudieres opposées fond à fond, & communiquant par une ouverture commune ; avec cette seule condition, que la chaudiere inférieure auroit plus de hauteur que la supérieure. Voyez fig. 1. 2. & 3. I G H K L. partie inférieure du fourneau. K L M, bouche. N O P Q, enclumes scellés, P Q R S, partie du milieu du fourneau. R S T V, communication de la partie du milieu avec la partie supérieure. T V X Y, partie supérieure. La fig. 1. montre le fourneau en entier. La fig. 3. en est une coupe verticale par le milieu de la bouche. La fig. 2. en est une coupe verticale, & parallele à la bouche.
Sur cette construction on placera de bonnes & fortes briques de champ sur le mur de la partie supérieure, selon leur hauteur, & de distance en distance comme on voit fig. 1. 2. 3. en 0, 0, 0, 0, &c. Ces briques ainsi disposées formeront des especes de carneaux. Sur ces briques on placera un chassis de fer plat, d'environ deux pouces d'équarrissage. Voy. fig. 4. ce chassis. On distribuera sur ce chassis de grandes & fortes tuiles, qui serviront à porter la maçonnerie qu'il convient d'élever dessus ce chassis. On appelle communément cette maçonnerie la truite.
De la truite. La truite, P q r s, fig. 1. a la figure d'un comble de pavillon à quatre arêtes ; c'est un égoût formé par des tuiles, & tel que seroit exactement celui d'un bâtiment. L'usage de la truite est d'arrêter l'action du feu, qui tend naturellement à monter, de replier la flamme sur elle-même, de consumer le peu de fumée qui se fait dans le fourneau, de contraindre la flamme à s'échapper pure par les carneaux formés par les briques qui soûtiennent le chassis, & de distribuer par ce moyen une chaleur égale dans tout l'intérieur de la touraille, qui, sans cette précaution, ne seroit bien échauffée que dans le milieu. D'ailleurs elle empêche le germe qui tombe dans l'intérieur de la touraille, de passer dans le fourneau. C'est aussi par cette derniere raison qu'on lui a donné la figure d'un comble à quatre arêtes.
La poussiere du grain & le germe, après avoir traversé la haire ou toile de grain dont le plancher de la touraille est couvert, ne restent point sur la truite : ils descendent tour-à-tour, & se rendent au pourtour de la maçonnerie intérieure de la partie du milieu du fourneau, où l'on a pratiqué des canaux appellés ventouses, qui les reçoivent. Les ventouses, fig. 1. & 3. Z, Z, forment comme un petit fossé d'environ six à sept pouces de large tout-autour du fourneau, entre la maçonnerie intérieure & la maçonnerie extérieure.
Le grain, au sortir du germoir, se charge sur le plancher de la touraille ; on l'y étend en forme de couche d'environ cinq à six pouces d'épaisseur. On fait du feu dans le fourneau jusqu'à ce qu'on s'apperçoive que la grande humidité que le grain a prise dans le mouillage, commence à sortir : il y a pour cela un signe certain. Alors on voit à la surface du grain une grande rosée, & cette rosée, est coupée par bandes ; ou plûtôt toute la surface de la couche est divisée par bandes chargées & non chargées de rosée alternativement. Cette division est causée par les tringles de bois qui sont sous la haire, & qui empêchent que tout le grain ne soit atteint également par le feu. Celui qui correspond aux espaces vuides, doit chauffer plus vîte que celui qui correspond aux espaces pleins.
Lorsqu'on apperçoit ces bandes, il est tems de remuer le grain. Pour cet effet on jette celui qui est sur une moitié du plancher, sur l'autre moitié ; puis on rejette sur la partie, & le grain qui y étoit, & celui qui n'y étoit pas, mais mêlé & retourné. Cela fait, on étend le tout, & l'on en reforme une couche sur toute la superficie de la touraille. Dans cet état, celui qui étoit à demi séché se trouve placé à côté de celui qui ne l'étoit point ; il se fait une répartition assez égale d'humidité, & un progrès assez uniforme de dessication. Cette premiere manoeuvre s'appelle retourner la touraille pour la premiere fois.
Après que la touraille a été retournée, on ranime de nouveau le feu du fourneau, & on le continue jusqu'à ce qu'il soit tems de la retourner pour la seconde fois : ce moment est indiqué par la suppression presqu'entiere de l'humidité dans tout le grain. Le plus voisin de la haire en est entierement privé, on n'apperçoit plus de moiteur qu'à la superficie : c'est alors qu'il est tems de rebrouiller.
On appelle rebrouiller la touraille, mettre dessous le grain qui se trouve à la superficie de la couche, & dessus celui qui étoit dessous. Dans cette manoeuvre on ne jette point le grain l'un sur l'autre, comme quand on retourne ; on se contente de le prendre avec la pelle, & de le retourner c'en-dessus-dessous pelletée à pelletée.
On laissera la touraille rebrouillée quelques heures dans le même état & sans feu, pour donner à la chaleur du fourneau le tems de dissiper le reste d'humidité qui pourroit se trouver dans le grain ; après quoi on ôtera le grain de dessus la touraille, pour faire place à d'autre ; & pour le cribler au crible de fer, afin d'en séparer la poussiere & les touraillons. On appelle touraillons le germe séché.
Du moulin. On laisse reposer le grain pendant quelques jours ; la méthode en est meilleure que de le porter au moulin tout au sortir de la touraille. Le moulin représenté Pl. III. est un moulin à double tournure ; il a deux roüets & deux lanternes, sans compter le grand roüet. Les chevaux sont attelés par le moyen de patons aux queues ou leviers, ou aisseliers A du moulin. Ces aisseliers sont emmanchés dans l'arbre de bout B. Cet arbre fait tourner le grand roüet C. Ce roüet est armé de dents qui engrainent dans les fuseaux de la grande lanterne D. dans laquelle passe l'arbre de couche E. Cet arbre porte à son autre extrémité, & parallelement à la grande lanterne, le petit roüet F qui tourne verticalement, & engraine dans la petite lanterne G fixée sur l'arbre de fer qui traverse la meule supérieure H. Cette meule s'appelle la meule courante ; elle est posée un peu au-dessus d'une autre qu'on appelle la meule gissante. Ces deux meules écrasent entr'elles le grain qui y est introduit par le moyen de la tremie K & de l'auget. Le grain réduit en farine, sort par l'anche, & tombe dans le sac I. L'endroit où sont les chevaux s'appelle le manege. On voit à gauche de la même figure les meules séparées, & à la distance qui convient pour la mouture avec l'ouverture de l'anche, car le grand roüet C produit des deux côtés le même effet, & fait marcher proprement deux moulins. Mais ce n'est pas tout : le même méchanisme pourroit servir à deux moulins à l'eau : on en voit un à droite. L'eau est tirée du puits par une pompe à chapelet. On a pratiqué dans l'étage supérieur à celui du manege, un trou au plancher, à-travers lequel passe le grand arbre debout B. Cet arbre porte à sa partie supérieure, comme on voit aussi à son inférieure, un grand roüet CC. Les dents de ce roüet engrainent dans la lanterne K K fixée sur l'arbre de couche L, au bout duquel est adaptée une étoile M garnie de ses cornichons, à l'aide desquels elle porte & tire la chaîne à chapelet, qui passant dans un tuyau de bois N qu'elle remplit exactement, monte l'eau dans le petit réservoir O qui est au-dessus du puits. De ce réservoir on la conduit par des tuyaux de plomb par-tout où l'on en a besoin.
Il ne faut pas que la farine soit trop grosse ni qu'elle soit trop fine ; l'un & l'autre excès a ses inconvéniens : trop grosse, le suc ne s'en tire pas facilement ; trop fine, on court risque de perdre entierement le brassin : il s'en fait alors une liaison, un mortier que l'eau ne peut pénétrer lorsque la farine est dans la cuve.
De la cuve matiere. Lorsque la farine est faite, on la met dans la cuve appellée communément cuve matiere, Pl. V. A. Cette cuve A est de bois ; ses douves ont environ deux pouces ou deux pouces & demi d'épaisseur, sur quatre à cinq pouces de largeur ; sa profondeur est d'environ quatre piés & demi : elle est à deux fonds ; celui d'en-bas est plein, comme le sont ordinairement tous les fonds de cuve : mais il est surmonté d'un second que l'on appelle faux-fond. Ce faux-fond est composé de planches percées d'une multitude de petits trous faits en cone, ou plus ouverts à la partie inférieure de la Planche, qu'à sa partie supérieure. La différence de diametre de ces ouvertures est grande ; car à la partie inférieure le trou peut avoir trois quarts de pouce ou environ, & il se trouve réduit à la partie supérieure à une ligne ou environ. Ces planches sont soûtenues au-dessus du premier fond par des patins qui sont attachés sur elles-mêmes. Ces patins ont environ deux pouces de hauteur, de façon qu'il se trouve deux pouces d'intervalle entre les deux fonds.
Le faux-fond est arrêté en-dessus par un cordon de bois qui regne tout-autour de la cuve. Ce cordon a environ trois petits pouces de large, & sert à retenir tous les bouts des planches du faux-fond, & à empêcher qu'elles ne se levent avec l'eau que l'on envoye dans la cuve. Dans un endroit de la cuve le plus commode, on place debout une espece de pompe ou tuyau de bois, qu'on appelle pompe à jetter trempe. Ce tuyau passe à-travers le faux-fond, & pose sur l'autre fond, mais ne s'y applique pas. On lui a pratiqué aux quatre angles, quatre especes de piés sur lesquels il est appuyé : l'espace évuidé qui est entre ces quatre piés, suffit pour donner passage à l'eau.
Sous la cuve matiere il y en a une autre plus petite, que l'on nomme reverdoir, & dans laquelle est équipée une pompe à chapelet, qu'on appelle pompe à cabarer. Cette pompe sert à enlever ce qui sort de la cuve matiere, & à le nettoyer par le moyen d'une gouttiere qu'on lui applique dans les chaudieres, sur le bord desquelles cette gouttiere est appuyée de l'autre bout. Voyez la Planche V. A, cuve matiere : B, autre cuve matiere ; car on peut en avoir plusieurs : C, C, pompes à cabarer, qui se rendent dans les cuves placées au-dessous des cuves matieres : E, E, gouttieres : D, D, chaudieres : F, F, bacs. On verra plus bas l'usage de tous les agrès, après que nous aurons expliqué ce qui concerne les chaudieres.
Des chaudieres. Les chaudieres dont on se sert, sont faites de grandes tables de cuivre cloüées ensemble avec des clous de même métal. Leur figure est celle d'un demi-globe. Elles sont montées sur leurs fourneaux, qui doivent être construits de brique ou de tuileau. On y employe quelquefois la pierre ; mais la difficulté de trouver des pierres qui résistent au feu, fait préférer les deux autres especes de matériaux.
Pour bien construire un fourneau, il faut d'abord faire un bon massif de moilon, que l'on revêtira de bons murs. Voyez fig. 2. Pl. II. A, A, A, A, &c. Ces murs étant élevés à la hauteur de deux piés & demi ou environ, suivant la grandeur des chaudieres, on pavera le fond du fourneau B, B, B, B, &c. avec du gros pavé de grès, ou avec de la brique de champ, & debout ; puis on posera l'embouchure C, C, C, C, &c. L'embouchure doit être construite de trois ou quatre barres de fer, fortes, & larges de cinq à six pouces, chacune assemblée avec des entretoises de pareil fer. L'embouchure étant posée, on construira le mur intérieur du fourneau, qu'on voit même Planche, fig. 9. en D, D, D. Cette figure est une coupe verticale de la chaudiere & du fourneau, prise sur le milieu de l'embouchure qu'elle partage en deux, selon sa longueur. Ce mur intérieur doit être de brique ou de tuileau ; on l'élevera environ de 15 pouces à-plomb : sa forme, comme on voit, est concave, après quoi on le continuera à grand fruit. Quant à la forme qu'on lui donnera, ce sera celle d'une calotte sphérique concave, capable d'embrasser la chaudiere dans toute sa surface, excepté à l'endroit qui correspond au fourneau, où la chaudiere n'a aucune partie de construction qui s'y applique ; & que par-tout ailleurs il y a entre la chaudiere & le mur en calotte sphérique concave, cinq à six pouces de distance. Il n'y a rien qui corresponde au fond de la chaudiere E, comme on voit figure 9. L'espace du mur & de la chaudiere F, F, plus grand par en-bas que par-tout ailleurs, va toûjours en diminuant à mesure qu'il s'éleve vers les bords de la chaudiere. Cette construction est très-raisonnable. Par ce moyen les parties de la chaudiere sont d'autant plus découvertes, qu'elles sont plus exposées à l'action du feu ; & la flamme resserrée à mesure qu'elle monte, se replie sur elle-même, & enveloppe toute la chaudiere, s'élevant jusqu'aux ventouses qui sont perpendiculairement au-dessus de l'embouchure, environ à cinq à six piés plus haut. Il n'est pas nécessaire d'avertir qu'il faut garnir & élever les murs de revêtissement, à mesure que l'on éleve ceux du fourneau qui doivent commander aux autres. Lorsqu'on a poussé la construction jusqu'en G, G, à quatre à cinq pouces des agraffes de chaudiere, qui doivent être faites de cuivre, pour plus grande solidité, on fermera tout-à-coup le fourneau, ensorte que toutes les briques toucheront pour lors la chaudiere : & l'on continuera de construire ainsi, lors même qu'on sera au-dessus des agraffes, avec cette différence seulement, que les briques, depuis les piés du mur jusqu'aux agraffes, seront unies avec de la terre à four & que depuis les agraffes jusqu'aux bords & au-dessus des bords on les liera avec un mortier de chaux & un ciment d'eau-forte. On observera, lorsqu'on posera les briques avec le mortier de chaux & le ciment, de faire mouiller les briques, afin, qu'elles soient plus disposées à faire corps avec le ciment.
Lorsqu'on a conduit la maçonnerie à la hauteur de la chaudiere, & qu'on aura construit les ventouses ; les cheminées R, R, fig. 1. les hottes S, S, on posera sur le devant de la chaudiere, c'est-à-dire à la partie opposée à l'embouchure du fourneau, une jante de bois d'orme de 4 à 5 pouces d'équarrissage, & dont la largeur couvre l'épaisseur du mur. On garnira & l'on arasera cette jante tout-autour de la chaudiere & des bords, avec des briques & du ciment. La maçonnerie ainsi arasée, on posera les sommiers : ce sont deux pieces de bois de chêne d'environ neuf pouces de largeur, sur un pié de hauteur, qui doivent traverser la chaudiere dans toute sa largeur, laissant entr'elles un espace de vingt à vingt-deux pouces qui restera toûjours vuide, afin de pouvoir emplir & vuider les chaudieres. Ces deux pieces de bois étant aussi arasées par la maçonnerie de brique & de ciment, on posera dessus des planches, comme on les voit en T, T, T, fig. 1. Planche II. ou fig. 1. Planche V. Ces planches seront attachées sur les sommiers, serviront de couverture à la chaudiere, & porteront les bacs à jets, qui doivent toujours être sur les chaudieres, & qu'on y voit fig. 1. Planche V. en F, F.
Des bacs. Les bacs sont des especes de réservoirs destinés à recevoir la biere lorsqu'elle est faite. Il y en a de deux sortes, les bacs à jetter, & les bacs de décharge. Les bacs à jetter dont il s'agit ici, & qu'on voit en F, F, fig. 1. Pl. V. sont placés sur les chaudieres, & sont faits pour recevoir tout ce qui en sort, soit eau, soit biere : mais les liqueurs ne font que passer dessus, & n'y restent jamais ; aussi sont-ils plus petits que les autres. Les bacs de décharge sont destinés à recevoir la biere lorsqu'elle est faite, & qu'elle a cessé de cuire dans les chaudieres. On fait couler dessus ces bacs la biere avec le houblon, par le moyen des gouttieres faites & disposées exprès. La biere reste dessus jusqu'à ce qu'elle soit prette à mettre en levain dans la cuve guilloire, dont nous parlerons ci-après.
Nous avons suffisamment exposé ce qui concerne les agrès de la brasserie : nous allons maintenant retourner au grain moulu, que nous avons laissé dans la cuve matiere, & continuer la fabrication de la biere, ou l'art de brasser, qui ne commence proprement qu'en cet endroit.
Maniere de brasser. Après qu'on a tiré de l'eau du puits, & qu'on en a rempli les chaudieres, on fait du feu dans les fourneaux sur lesquels elles sont placées, jusqu'à ce que l'eau ait acquis le degré de chaleur convenable pour jetter trempe. Il faut bien prendre garde que l'eau ne soit ni trop chaude, ni trop froide. Cela est de la derniere conséquence pour la fabrication. Le trop de chaleur, est cause que l'on ne peut ensuite faire fermenter la biere, ni par conséquent la dépurer de tout ce qu'elle a de grossier. Le trop peu peut nuire encore davantage, une trempe trop douce ne manquant jamais de lier en quelque sorte la farine, de l'empêcher de filtrer, & d'occasionner la perte des brassins.
Il n'est pas facile de juger si l'eau est bonne ; c'est une affaire d'un tact expert à goûter les eaux : c'est le terme de Brasseurs. On goûte les eaux, en présentant le bout du doigt à leur surface. Si l'eau pique au premier abord, c'est un signe qu'elle est bonne. Cette détermination me paroît bien vague. Il me semble qu'il vaudroit beaucoup mieux s'en rapporter au thermometre : il ne s'agiroit que d'un nombre suffisant d'expériences faites avec cet instrument en différentes saisons.
On appelle jetter trempe, vuider l'eau de la chaudiere dans les bacs à jetter qu'on voit en F, F, sur les chaudieres. Cette manoeuvre se fait à l'aide d'un instrument qu'on appelle un jet. Il est représenté Pl. II. fig. 4. C'est un grand chauderon de cuivre fait exprès, & emmanché d'un long morceau de bois, au bout duquel est un contrepoids de plomb qui allege le fardeau du jet & de l'eau qu'il contient, & facilite son mouvement. Le milieu du manche porte sur la jante de bois qui occupe l'intervalle des deux sommiers qui sont sur la chaudiere ; on laisse tomber la cuilliere du jet dans la chaudiere. Quand elle est pleine on applique la main vers le contrepoids ; la cuilliere s'éleve jusqu'à la hauteur du bac, dans lequel on renverse l'eau qu'elle contient, en lui donnant un tour de poignet.
Il faut observer que, tandis qu'on jette l'eau hors de la chaudiere, il faut tirer le feu de dessous ; sans quoi la chaudiere se vuidant & restant à sec, & le feu continuant dans le fourneau, la chaudiere risqueroit d'être brûlée. L'eau est conduite des chaudieres par les bacs dans la cuve matiere, par le moyen d'une gouttiere qui porte d'un bout à l'endroit où le bac à jetter est percé, & de l'autre sur les bords de la cuve matiere. Mais la maniere dont elle est portée dans la cuve matiere est très ingénieuse : la gouttiere, ou plûtôt son ouverture correspond à celle de la pompe à jetter dont nous avons parlé : l'eau, au sortir de la gouttiere, tombe dans la pompe à jetter ; la pompe à jetter la transmet jusqu'au fond-plein de la cuve matiere. L'intervalle compris entre le fond plein & le faux fond ou fond percé de trous coniques, se remplit d'eau ; quand il en est plein, alors l'eau des chaudieres qui continue de descendre par la pompe à jetter, force celle qui est contenue entre les deux fonds, à sortir par les trous du faux fond : cet effort est considérable, comme le penseront bien ceux qui savent que les liqueurs agissent en tout sens, en raison de leur hauteur & de leur base. La farine qui couvre le faux-fond est enlevée du faux-fond par l'effort de l'eau jaillissante par les trous jusqu'au niveau des bords de la cuve. Cinq ou six garçons brasseurs, armés chacun d'un fourquet, ou d'un instrument tel qu'on le voit fig. 7. Pl. II. (c'est une espece de pelle de fer ou de cuivre, percée dans son milieu de deux grands yeux longitudinaux) ; ces ouvriers, dis-je, font vis-à-vis d'eux, chacun un trou dans la farine, l'écartant avec le fourquet jusqu'à ce qu'ils ayent atteint l'eau qui l'enleve en masse. Aussi-tôt qu'ils l'ont atteinte, ils agitent la farine ; ils travaillent à la mêler à l'eau ; ils n'épargnent aucun moyen de la bien délayer, du moins en gros. A cette manoeuvre, ils en font succéder une autre. Ils quittent le fourquet. Ils prennent la vague : c'est un long instrument de bois, terminé par trois fourchons, traversés tous trois horisontalement par trois ou quatre chevilles, ce qui divise l'espace total contenu entre les fourchons en plusieurs espaces plus petits. Voy. Pl. des outils de Brass. Ils plongent la vague dans la cuve, & agitent fortement l'eau & la farine avec cet instrument. Dès ce moment, le mêlange d'eau & de farine contenu dans la cuve-matiere, s'appelle le fardeau, & la derniere manoeuvre s'appelle vaguer. On ne cesse de vaguer, que quand la farine est délayée le plus parfaitement qu'on peut.
u fardeau. Le fardeau reste dans cet état une heure ou environ, pendant laquelle toute la farine se précipite & se repose sur le faux-fond. La liqueur que pour lors on nomme les métiers, demeure au-dessus ; au bout d'une heure, les métiers étant éclaircis, on donne avoi, en levant une tape de bois, qui traverse le faux-fond, & ferme un trou pratiqué dans le fond de la cuve. La tape de bois étant levée, la liqueur passe dans le reverdoir, petite cuve dont nous avons fait mention ci-dessus. Quand je dis la liqueur, j'entens celle qui est comprise entre deux fonds. Pour celle qui est sur le fardeau ; lorsque l'espace compris entre le fond & le faux-fond est vuide, elle se filtre à-travers le fardeau, & acheve de se charger du suc contenu dans cette farine.
Pendant que les métiers s'éclaircissent, comme on vient de le dire ; on remplit une des chaudieres avec de l'eau nouvelle, jusqu'à une certaine hauteur ; on met sur cette eau une partie des premiers métiers, & l'on acheve de remplir la chaudiere pour la seconde trempe : on fait de nouveau feu dessous la chaudiere, & on l'entretient jusqu'à ce qu'elle commence à bouillir. Le reste des métiers est déposé dans une autre chaudiere.
Lorsque la matiere de la seconde trempe, ou l'eau mêlée avec les premiers métiers commence à bouillir, on jette cette seconde trempe comme la premiere, avec la gouttiere & par la pompe à jetter trempe ; on délaye avec le fourquet ; on agite avec la vague, & on laisse encore reposer le fardeau environ une heure. Au bout de cette heure, on donne avoi & on reçoit la liqueur dans le reverdoir, comme à la premiere fois ; on la fait passer du reverdoir dans les chaudieres, ainsi que nous l'avons dit plus haut, à l'occasion de ce vaisseau, à l'aide d'une pompe à chapelet ; c'est alors qu'on met la quantité convenable de houblon ; on fait du feu sous la chaudiere, & le tout cuit ensemble.
La quantité de houblon varie, selon sa force & selon celle de la biere, ou plutôt la quantité de grain qu'on y a employé : on peut cependant assûrer qu'il en faut depuis trois jusqu'à quatre livres par piece ; & par conséquent une soixantaine de livres sur un brassin de treize à quatorze pieces. Il n'y a point de préparation à lui donner.
Mais le grain & le houblon ne sont pas les seuls ingrédiens qu'on fasse entrer dans la biere ; il y en a qui y ajoûtent la coriandre, soit en grain soit moulue. Ceux qui l'employent en grain l'enferment dans un sac qu'ils suspendent dans la cuve guilloire : ceux qui la font moudre, ou l'enferment dans un sac qu'ils suspendent dans la cuve guilloire, comme si elle étoit en grain, ou en saupoudrent la biere quand elle est sur les bacs à décharger. Au reste on fait très-bien de la biere sans coriandre : cependant on en peut mettre une chaudronnée de dix à douze pintes sur un brassin de treize à quatorze pieces ; & ce que nous avons dit, indique très-clairement le moment d'en faire usage.
De la cuisson. C'est alors que le travail de la biere rouge & de la biere blanche commence à devenir différent : car jusqu'ici, toute la façon a été la même pour l'une & pour l'autre, si ce n'est que l'on a fait beaucoup plus sécher le grain à la touraille pour la biere rouge que pour la blanche.
La cuisson de la biere rouge est beaucoup plus considérable que celle de la blanche. La cuisson de la biere blanche se fait en trois ou quatre heures, suivant la capacité des chaudieres ; & celle de la rouge en demande jusqu'à trente & quarante. Il faut avoüer aussi que la biere blanche se cuit à bien plus grand feu que la rouge ; au reste le plus ou le moins de cuisson, tant du grain sur la touraille, que de la biere même dans les chaudieres, est la seule chose qui fasse la différence de la couleur des bierres.
Lorsque la biere est suffisamment cuite, on vuide les chaudieres avec le jet, comme nous l'avons dit ailleurs, & cela s'appelle décharger : c'est pour lors que la biere en sortant des bacs à jetter, qui sont sur les chaudieres, entre dans les grands bacs ou bacs de décharge, & y reste avec le houblon, jusqu'à ce qu'elle soit bonne à mettre en levain.
Du levain. On ne peut dire au juste à quel degré de tiédeur ou de chaleur il faut prendre la biere pour la mettre en levain ; attendu que ce degré varie suivant les différentes températures de l'air, & qu'on est obligé de mettre en levain à un degré beaucoup plus chaud dans l'hyver que dans l'été. Il faut dans cette derniere saison que la biere soit presque froide ; il n'y a qu'un long usage & une grande expérience qui puissent instruire là-dessus, ou les observations au thermometre : c'est assûrément ici une des occasions où cet instrument peut être très-utile.
Lorsque la biere est prette à être mise en levain, on fait couler dans la cuve, qu'on appelle cuve guilloire, par le moyen des robinets qui sont aux bacs ; on en fait couler, dis-je, une certaine quantité, dans laquelle on jette de la levure de biere, plus ou moins suivant la quantité de biere qu'on a à mettre en levain. La levure est la cause & l'effet de la fermentation ; desorte que celle que l'on met dans la biere y occasionnant la fermentation, engendre de nouvelle levure & ainsi successivement ; il faut environ la production de levure de quatre à cinq pieces, pour en mettre en levain la quantité de trente pieces.
La levure étant mise dans la quantité de biere que l'on a fait passer des bacs à décharger dans la cuve guilloire ; on a ce qu'on appelle le pié de levain : on ferme les robinets, & on laisse le pié de levain environ une heure ou deux dans cet état ; pendant ce tems le principe de la fermentation s'établit. On connoît que ce principe est suffisamment établi, aux crevasses qui se font à la mousse, en différens endroits de la surface de la cuve ; ces crevasses représentent assez au naturel une patte d'oie : pour lors il faut de nouveau faire couler de la biere des bacs à décharger dans la cuve guilloire, afin d'entretenir la fermentation, observant néanmoins de ne pas lâcher les robinets d'abord à plein canal ; car on s'exposeroit à fatiguer, & peut-être à noyer le pié de levain : au lieu que si l'on modere les avois pendant quelque tems, la fermentation se conserve vigoureuse, & il vient un moment où l'on peut en sûreté ouvrir les robinets entierement.
Quand toute la biere a passé des bacs à décharger dans la cuve guilloire, la fermentation continue ; elle augmente jusqu'à un certain point de force ou de maturité, auquel on peut entonner la biere. On connoît que le levain est mûr, lorsque les rochers de mousse que la fermentation a engendrés commencent à s'affaisser & à fondre sur eux-mêmes, & ne se reproduisent plus ; & qu'on ne remarque plus à la superficie du levain qu'une grosse écume extrèmement dilatée : pour lors il faut frapper sur cette écume avec une longue perche, & la faire rentrer dans la liqueur ; & c'est ce qu'on appelle battre la guilloire.
Lorsque la guilloire est battue, on entonne la biere dans des tonneaux rangés à côté les uns des autres sur des chantiers, sous lesquels sont des bacquets ou moitiés de tonneaux ; c'est dans ces vaisseaux que tombe la levure au sortir des tonneaux. L'endroit de la brasserie où sont rangés les tonneaux s'appelle l'entonnerie. Voyez Pl. V. de Brasserie, une entonnerie.
De la levure. La levure ne se forme pas aussi-tôt que la piece est entonnée, quoique la fermentation, selon toute apparence, n'ait pas cessé ; il ne sort d'abord que de la mousse qui se fond promtement en biere : ce n'est guere qu'au bout de trois ou quatre heures, que la levure commence à se former. On distingue facilement le changement ; alors la mousse ne sort plus si promtement : elle devient plus grasse & plus épaisse ; mais bien-tôt après la fermentation se ralentit, pour lors on pure le bacquet, c'est-à-dire qu'on en retire la biere provenue de la fonte des mousses, & on en remplit les tonneaux. Mais comme le produit des bacquets ne suffit pas pour le remplissage, on a recours à de la biere du même brassin mise en réserve pour cet effet.
Les tonneaux ainsi remplis recommencent à fermenter avec plus de vivacité que jamais, & jettent pour lors de la vraie levure. On a soin de soutenir & de cultiver la fermentation, en remplissant de tems en tems les tonneaux ; c'est-à-dire que deux heures après qu'on a fait le premier remplissage, on en fait un second, mais sans purer les bacquets. Les bacquets ne se purent qu'une fois ; après deux autres heures, on fait un troisieme remplissage : au bout d'une heure le quatrieme, & à peu-près à même distance de tems, le cinquieme & dernier.
Tous ces différens remplissages faits, on laisse la biere tranquille sur les chantiers ; & ce n'est que vingt-quatre heures après le dernier remplissage qu'elle peut être bondonnée. Si on se hâtoit de bondonner, la fermentation n'étant pas achevée, on exposeroit les pieces à s'entr'ouvrir en quelqu'endroit.
Voilà donc la biere faite, & en état d'être mise en cave : mais si l'on est pressé d'en faire usage, & que l'on n'ait pas le tems de la laisser éclaircir naturellement, ce qui ne s'exécute pas trop promtement, on y remédie en la collant.
De la colle. On colle la biere, ainsi que le vin, avec de la colle de poisson qui se prépare de la maniere suivante : prenez la colle de poisson, battez-la avec un marteau, afin de pouvoir la déchiqueter plus facilement : mettez-la en pieces les plus petites qu'il est possible ; faites-la tremper dans de l'eau pendant vingt-quatre ou trente heures ; renouvellez l'eau, sur-tout dans les tems chauds, pour prévenir la corruption : après que la colle aura trempé, retirez-la de l'eau ; maniez-la fortement jusqu'à ce qu'elle soit devenue comme de la pâte ; délayez-la ensuite dans de l'eau claire, & faites-en comme de l'orgeat très-épais : après cette premiere préparation elle ne tarde pas à prendre une autre forme, & à devenir, de lait qu'elle sembloit être, une gelée de viande très forte, en versant dessus une quantité suffisante de vin blanc, ou de biere très-vieille, & remuant bien le tout ensemble : plus on remue, plus on s'apperçoit que la gelée prend de consistance : quand elle en a suffisamment, on la laisse dans cet état jusqu'à ce qu'on veuille s'en servir.
Quand on veut éclaircir la biere par le moyen de la colle, on prend de cette gelée dont on vient de parler ; on la délaye dans de l'eau ; on passe ce mélange à-travers un linge : il ne faut pas qu'il y ait trop d'eau ; si la colle étoit trop délayée, elle ne produiroit plus d'effet. On prend environ une pinte de colle délayée & passée pour un demi-muid : quand on a versé la colle dans la piece, on y introduit un bâton de la longueur du bras ; on agite fortement la liqueur pendant environ une ou deux minutes, & on laisse le tonneau environ douze heures sans le reboucher ; cela fait avec soin, au bout de vingt-quatre heures on aura de la biere très-claire.
Voilà tout ce qui concerne la maniere de brasser, & les instrumens du Brasseur. Un homme intelligent pourroit, sur cette description & sur l'inspection de nos planches, lever une brasserie, & faire de la biere : il ne lui resteroit à apprendre que ce qu'on ne tient que de l'expérience, comme la chaleur de l'eau propre à jetter trempe, celle de la biere pour être mise en levain, & autres circonstances pareilles. L'agrès d'une brasserie où l'on remarque particulierement de l'invention, c'est la cuve à deux fonds, que les Brasseurs appellent cuve-matiere : si au lieu de faire enlever le fardeau de farine par des eaux qui le prennent en dessous, on eût fait tomber les eaux dessus, ces eaux l'auroient pénetré, appesanti, lié, & il eût été presqu'impossible de le travailler, soit au fourquet, soit à la vague. Le faux-fond & la pompe à jetter trempe, sont une application très-ingénieuse & très-utile du principe d'action des fluides : un bon physicien n'auroit pas imaginé mieux que l'ouvrier à qui l'on doit cette invention, en vertu de laquelle la masse de farine est prise en-dessous, & portée toute entiere vers le haut de la cuve, d'où l'ouvrier n'a plus qu'à la précipiter vers le fond ; ce qui lui est infiniment plus facile que d'avoir à l'élever d'un fond vers le haut de la cuve : d'ailleurs l'eau renfermée entre la farine & le fond, se conserve dans une chaleur presqu'égale, & la trempe en est d'autant meilleure. Les petits trous du faux-fond, après avoir servi à l'exhaussement de la farine pour la vaguer, servent, après qu'elle est vaguée, à la filtration de l'eau chargée de son suc ; & il y a bien de l'apparence que la nécessité de cette filtration a fait d'abord imaginer le faux fond, & qu'on a passé de-là à la pompe à jetter trempe.
Les uns font venir le mot brasser de brace, espece de grain dont on faisoit la biere : les autres de bras ou de ses composés, parce que la manoeuvre la plus fatigante s'exécute à force de bras. Les brasseries sont fort anciennes à Paris ; & les Brasseurs avoient des statuts en 1268, sous S. Louis. Ceux auxquels ils sont soûmis se réduisent à un petit nombre d'articles.
1°. Il y est dit que nul ne brassera & ne charriera ou fera charrier biere, les dimanches, les fêtes solemnelles & celle de Vierge.
2°. Que nul ne pourra lever brasserie sans avoir fait cinq ans d'apprentissage, & trois ans de compagnonage, avec chef-d'oeuvre.
3°. Qu'il n'entrera dans la biere que bons grains & houblons bien tenus & bien nettoyés, sans y mêler sarrasin, ivraie, &c. pour cet effet les houblons seront visités par les jurés, afin qu'ils ne soient employés échauffés, moisis, gâtés, mouillés, &c.
4°. Qu'il ne sera colporté par la ville aucune levure de biere, mais qu'elle sera toute vendue dans la brasserie aux Boulangers & Pâtissiers, & non à d'autres.
5°. Que les levures de biere apportées par les forains seront visitées par les jurés avant que d'être exposées en vente.
6°. Qu'aucun Brasseur ne pourra tenir dans la brasserie, boeuf, vache, porc, oison, canne, volaille, comme contraires à la netteté.
7°. Qu'il ne sera fait dans une brasserie qu'un brassin par jour, de quinze septiers de farine au plus. Je doute que cet article soit exécuté.
8°. Que les caques, barrils, & autres vaisseaux à contenir biere, seront marqués de la marque du Brasseur, laquelle marque sera frappée en présence des jurés.
9°. Qu'aucun maître n'emportera des maisons qu'il fournit, de biere, que les vaisseaux qui lui appartiendront par convention.
10°. Que ceux qui vendent en détail seront soûmis à la visite des jurés.
11°. Que nul ne pourra s'associer dans le commerce d'autres qu'un maître du métier.
12°. Qu'aucun maître n'aura qu'un apprenti à la fois, & que cet apprenti ne pourra être transporté sans le consentement des jurés. Il y a exception à la premiere partie de cet article pour la derniere année : on peut avoir deux apprentis, dont l'un commence sa premiere année, & l'autre sa cinquieme.
13°. Que tout fils de maître pourra tenir ouvroir en faisant chef-d'oeuvre.
14°. Que nul ne recevra pour compagnon celui qui aura quitté son maître, outre le gré de ce maître.
15°. Qu'une veuve pourra avoir serviteur & faire brasser, mais non prendre apprentis.
16°. Que les maîtres ne se soustrairont ni ouvriers ni apprentis les uns aux autres.
17°. Qu'ils éliront trois maîtres pour être jurés & gardes, deux desquels se changeront de 2 en 2 ans.
18°. Que ces jurés & gardes auront droit de visite dans la ville, les faubourgs & la banlieue.
La biere est sujette à des droits ; & pour que le Roi n'en soit point frustré, le brasseur est obligé à chaque brassin d'avertir le commis du jour & de l'heure qu'il met le feu sous les chaudieres, sous peine d'amende & de confiscation.
Comme on ne peut faire de la biere sans y employer beaucoup de grain, le Roi fait surseoir les brasseries dans tems de disette.
Il y eut jadis une grande contestation sur la vente que les Brasseurs faisoient de la levure de biere aux Boulangers & aux Pâtissiers : on prétendoit qu'elle étoit mal-saine ; la faculté de Paris décida le contraire.
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BRASSEUR | S. m. (Art méchan.) ouvrier autorisé à lever une brasserie, & à fabriquer & vendre de la biere. Voyez BRASSERIE & BIERE. Les Brasseurs s'appelloient autrefois Cervoisiers. Voyez dans les mêmes articles les statuts auxquels les Brasseurs sont assujettis.
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BRASSICOURT | (Manége) se dit d'un cheval qui a naturellement les jambes courbées en arc, à la différence des chevaux arqués. Voyez ARQUES. (V)
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BRASSIN | S. m. on entend par ce mot toute la biere qui se retire de la quantité de grains qu'on met & qu'on travaille à chaque fois dans la cuve-matiere : ainsi le bassin peut-être plus ou moins considérable.
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BRASSOIR | S. m. à la Monnoie, instrument de fer ou de terre cuite de creuset, dont on se sert pour brasser le métal lorsqu'il est en bain. Pour l'argent & le billon les brassoirs sont des cuillieres de fer : mais pour lors si l'on se servoit de brassoirs de fer, l'hétérogénéité qui regne entre ces deux métaux feroit petiller l'or & s'écarter ; d'où il s'ensuivroit des déchets & un embarras dans le travail. On a soin de bien chauffer le brassoir, même de terre, avant de s'en servir. Voyez BAIN.
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BRATHIAN | (Géog.) ville de la Prusse Polonoise.
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BRATSK | ou BRATI, (Hist. mod.) c'est une nation de Tartares en Sibérie, qui s'est venu établir sur les bords de la riviere d'Anagara. Ils sont soûmis à la Moscovie, & ont bâti la ville de Bratskoy.
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BRAUBACH | (Géog.) petite ville d'Allemagne avec un château, sur le Rhin, dans la Weteravie.
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BRAULIO | (Géog.) haute montagne des Alpes chez les Grisons, près de la ville de Bormio, sur les frontieres du Tirol.
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BRAULS | S. f. pl. (Commerce) toiles des Indes rayées de bleu & de blanc : on les nomme autrement turbans, parce qu'on les employe particulierement sur la côte d'Afrique aux coeffures appellées de ce nom.
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BRAUNAU | (Géog.) ville fortifiée de la haute Baviere, sur la riviere d'Inn. Il y a encore une autre ville de ce nom dans le royaume de Bohême.
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BRAUNFELS | (Géog.) petite ville avec un château fort dans le comté de Solms, dans le cercle du haut Rhin, à une lieue de Wetzlar.
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BRAUNSBERG | (Géog.) ville de la Prusse polonoise, sur la lisiere de la Prusse royale, sur la riviere de Passerg.
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BRAURONE | (Géog. anc. & Myth.) lieu de l'Attique où la statue de Diane enlevée de la Tauride par Iphigénie fut déposée dans un temple qu'Oreste fit élever. On y célébroit tous les ans la délivrance de ces deux enfans d'Agamemnon. On appliquoit une épée nue sur la tête d'une victime humaine ; quelques gouttes de son sang y tenoient lieu de sacrifice. Iphigénie reçut les honneurs divins dans le temple de Braurone, dont elle avoit été la premiere prêtresse.
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BRAVA | (Géog.) l'une des îles du cap-Verd, appartenante aux Portugais. Le meilleur port qui s'y trouve est celui de Fuerno. Il y croît d'excellent vin.
BRAVA, ville & république d'Afrique avec un bon port, sur la côte d'Ajan, près de celle de Zanguebar. Long. 59. 10. lat. 1.
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BRAVADE | S. f. (Hist. mod.) fête qui se célebre à Aix en Provence la veille de S. Jean. On expose un oiseau dans un champ pendant quelques jours, on le tire à coups de fusil, & celui qui lui abat la tête est déclaré roi de la fête par les consuls & les autres magistrats. Le roi se choisit un lieutenant & un enseigne qui sont reçûs à l'hôtel-de-ville. Ces trois officiers levent chacun une compagnie de mousquetaires, & se trouvent tous ensemble sur la place de la ville, où le parlement se rend aussi pour allumer le feu de la S. Jean. On fait remonter l'institution de cette fête jusqu'en 1256, lors du retour de Charles d'Anjou du voyage de la Terre-sainte. On tiroit autrefois l'oiseau avec les fleches, qu'on a abandonnées depuis l'invention du fusil. Il y a apparence que le roi de la bravade joüit de quelques priviléges, quoiqu'on ne nous les dise pas. Dans toutes les villes de province où l'on tire l'oiseau, on donne le nom de roi à celui qui l'abat trois années de suite, & il est exempt des droits d'entrée & du logement des soldats.
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BRAVOURE | VALEUR, COURAGE, CŒUR, INTREPIDITé, (Gramm.) termes qui désignent tous l'état de l'ame à la vûe d'un danger : le coeur marque la fermeté ; l'homme de coeur ne recule pas : le courage est accompagné d'impatience ; il brûle d'attaquer : la valeur est le courage accompagné d'une sorte d'ostentation qu'on aime dans la jeunesse : la bravoure n'est guere d'usage que dans les dangers de la guerre, & semble ne s'accorder qu'à ceux qui s'y sont exposés plusieurs fois ; la bravoure est le courage souvent éprouvé : l'intrépidité est le mépris de la vie & des dangers. Les termes bravoure, valeur, intrépidité, ont une acception moins étendue que ceux de coeur & de courage.
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BRAY sur Seine | petite ville de France dans la province de Champagne. Il y a aussi une ville de ce nom dans le Soissonnois.
BRAY sur Somme, petite ville de France en Picardie, entre Péronne & Amiens.
BRAY, (le pays de) Géog. petit pays de France en Normandie. C'est une des quatre petites contrées qui composent le diocèse de Rouen.
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BRAYE | (Géog.) riviere de France qui prend sa source dans le bas Perche, & se jette dans le Loir.
BRAYE, voyez CANAL.
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BRAYER | S. m. terme de Chirurgie, est une sorte de bandage d'acier ou autre matiere semblable, pour tenir en état les parties auxquelles il y a des hernies ou ruptures. Voyez HERNIE.
Ces bandages sont faits d'un cercle d'acier forcé, battu, & applati, assez grand pour environner les trois quarts du corps, & dont l'extrémité, qui doit poser sur la descente, est allongée en en-bas en forme d'écusson. A l'autre extrémité du cercle, il y a une courroie assez longue pour achever le tour du corps, & pour s'attacher à l'écusson, où il y a une pointe d'acier en forme de crochet qui entre dans un des trous dont la courroie est percée, afin qu'on puisse serrer le bandage plus ou moins, selon qu'il est nécessaire : ces bandages sont ordinairement garnis de coton, & recouverts de chamois ou de marroquin. L'écusson doit être bien garni intérieurement, afin de contenir les parties sans blesser le point sur lequel il appuie. Il y a des bandages à double écusson pour la hernie. Des deux cotés on peut joindre les écussons par un ressort ou par deux ou trois petites charnieres qui leur permettent de se plier, cette méchanique empêche le froissement & la contusion des parties sur lesquelles le bandage est posé. Voyez Pl. V. fig. 7. & VI. fig. 1. 2. 3. & 4.
M. Delaunay, maître en Chirurgie, a présenté un bandage d'acier élastique, dont la figure & la description se trouvent dans le premier volume des Mémoires de l'académie royale de Chirurgie.
M. Martin, aussi maître en Chirurgie, a présenté depuis peu à la même académie, des bandages qu'il a perfectionnés à plusieurs égards. Un défaut assez ordinaire des bandages, est de ne pas comprimer également dans toutes les attitudes & les différens mouvemens auxquels on est exposé, parce que la ceinture d'acier ne peut pas avoir assez de ressort, & former à l'opposite de l'écusson, un point d'appui suffisant pour la compression. M. Martin, pour éviter cet inconvénient, a rendu élastique la pelote ou écusson du brayer. La pelote renferme deux platines : l'une est continue au demi-cercle d'acier ; & l'autre placée en dedans, tient supérieurement à la précédente par une charniere qui en fait le point fixe, pendant que la partie inférieure reste béante & mobile au moyen d'un ressort mis entre les deux plaques : ce ressort tend toûjours à rapprocher celle du dedans vers le ventre, dans le tems que la premiere pourroit s'en éloigner avec le demi-cercle d'acier par quelque mouvement particulier du corps ou quelque changement de situation. Ainsi cette seconde platine, qui est continuellement passée vers l'anneau, fait une compression d'autant plus avantageuse, qu'elle est déterminée de bas en haut, & demeure toûjours égale dans quelque attitude que se trouve le corps. Cet avantage dispense de porter le bandage aussi serré qu'on le porte ordinairement ; ce qui est une seconde utilité d'un grand prix pour beaucoup de personnes, & surtout pour celles qui sont grasses & qui s'écorchent facilement.
M. Martin a donné plusieurs avantages aux bandages, qui servent à contenir les hernies de l'ombilic, les chûtes de matrice, du fondement, &c.
Il est important de faire remarquer que les bandages n'exigent pas un soin si borné ni si vulgaire qu'on pourroit se l'imaginer : tout y est digne de l'attention des habiles Chirurgiens. L'exécution de ces sortes de machines ne peut être parfaite qu'à l'aide de leurs lumieres & de leur expérience. Cette branche de l'art tient à beaucoup de connoissances anatomiques & chirurgicales fort délicates, & éloignées seulement en apparence ; connoissances dont sont dépourvûs les ouvriers auxquels on permet la fabrique & même l'application de ces sortes d'instrumens.
Le public ne peut être trop informé qu'un brayer bien conditionné est l'unique moyen qui puisse mettre en sûreté la vie de ceux qui sont affligés de descentes ; il les garantit de l'étranglement que la chûte des parties pourroit occasionner ; & il produit quelquefois la guérison aux personnes même d'un âge avancé.
Pour les enfans qui sont encore à la mammelle, on ne se sert pas de bandages d'acier : on pose quelques compresses graduées sur l'anneau, & on les contient avec une bande de toile. On peut aussi se servir d'un bandage, dont la ceinture de lisiere ou de drap revêtu de chamois ou de futaine, ait une pelote de toile bien bourrée de filasse & revêtue de la même étoffe que la ceinture. On doit cirer les bandages des enfans, pour qu'ils ne pourrissent pas dans les urines & les excrémens.
Au derriere de tous les brayers on attache une bandelette de toile double, qui passant sous la cuisse vient s'attacher à l'écusson, de même que la courroie qui termine la ceinture. Cette bandelette se nomme la sous-cuisse ; elle soûtient le bandage, & empêche qu'il ne remonte.
L'application de ces bandages est aisée à faire : ceux qui en portent les ôtent & les remettent sans peine, par l'habitude qu'ils en ont contractée. Mais une circonstance essentielle à observer, c'est de ne point mettre le bandage que la descente ne soit entierement rentrée ; car s'il restoit une partie de l'intestin dans l'aine, le bandage le meurtrissant y causeroit de la douleur, de l'inflammation ; & enfin la gangrene, si l'on n'y pourvoyoit : cette regle souffre quelque exception, lorsque l'épiploon forme la hernie. Voyez REDUCTION.
Brayer pour contenir les hemorrhoïdes. Voyez HEMORRHOÏDES.
Brayer pour la chûte du rectum ou de la matrice. Voyez CHUTE.
Brayer pour la hernie du nombril. Voyez EXOMPHALE. (Y)
BRAYER, c'est une espece de bandage fait de gros cuir, garni d'une boucle & de son ardillon, qui sert à soûtenir le battant d'une cloche. Voyez CLOCHE & FONDEUR DE CLOCHES. Voyez figure 6. Planche de la Fonderie des cloches, & l'article FONTE DES CLOCHES.
BRAYER, en Fauconnerie, c'est le cul d'un oiseau de proie ; & on dit qu'une marque de la bonté d'un faucon est quand il a le brayer net, & lorsqu'il lui tombe bien bas le long de la queue & qu'autour il est bien émaillé de taches noires & rousses.
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BRAZER | en terme de Serrurier, Coutelier, & autres ouvriers en fer, c'est unir deux pieces de fer avec du cuivre. On braze dans les occasions sur-tout où la crainte de gâter les formes d'une piece rompue, empêche de la souder. Pour brazer, il faut ajuster les pieces à brazer le plus exactement qu'on pourra, de maniere qu'elles ne vacillent point, parce que si elles s'ébranloient, elles se déplaceroient & ne se brazeroient pas où l'on veut ; c'est pourquoi on les lie avec de petits fils de fer ; après quoi on prend du laiton ou de la mitraille la plus jaune & la plus mince que faire se peut ; on la coupe par petites bandes, que l'on met autour des pieces qu'on veut brazer, on les couvre avec du papier ou du linge qu'on lie avec un fil ; alors on prend de la terre franche qui soit un peu sablonneuse, car autrement elle pourroit fondre & couler : s'il arrivoit que la terre fût trop grasse, on y mêleroit du sable & de l'argille, & de l'écaille de fer, avec un peu de fiente de cheval & de bourre ; puis on la bat avec un bâton. & on la détrempe avec de l'eau claire en consistance de pâte ; plus elle sera battue, mieux elle vaudra. On en couvre l'ouvrage accommodé comme nous l'avons dit ci-dessus, de l'épaisseur de 2, 3, 4, 5, 6 lignes ou davantage, suivant la grosseur des pieces à brazer. Ainsi couvert, on le mouille avec de l'eau, puis on met de l'écaille de fer par-dessus ; cela fait on le met dans le feu, & on le chauffe doucement. Quand on voit la terre rouge, on le tourne & retourne doucement dans le feu, & on chauffe encore un espace de tems, toûjours tournant & retournant à plusieurs reprises, de peur qu'il ne chauffe trop d'un côté ; on chauffe jusqu'à ce qu'on apperçoive une fumée bleue qui s'échappe de la terre ; on est sur-tout exact à tourner & retourner lorsqu'on voit la flamme bleue violette, car c'est une marque que le laiton est fondu. On chauffe encore un peu, afin que la fusion du laiton soit parfaite, & qu'il coule également par tous les endroits nécessaires. On ôte ensuite l'ouvrage du feu, & on le tourne & retourne doucement sur l'enclume pour faire aller le laiton partout, jusqu'à ce que l'ouvrage soit un peu refroidi, & qu'il soit à présumer que le laiton ne coule plus ; sans cette précaution il se trouveroit plus épais en un endroit qu'en un autre. On laisse refroidir l'ouvrage sous la terre, & l'on ne songe à le découvrir que quand on peut facilement y appliquer la main. Cette façon est commune à toutes les grosses pieces.
Pour les petits, on les pourra brayer sans les couvrir de terre, prenant du laiton, le mettant sur la piece, la mouillant avec de l'eau claire, & y répandant du borax en poudre ; après quoi on la fera sécher doucement contre le feu ; car si on l'approchoit d'un trop grand feu en commençant, l'eau venant à s'échauffer & à bouillir, elle jetteroit le laiton & le borax hors de sa place.
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BRAZZA | (Géog.) île, avec une petite ville de même nom, dans le golfe de Venise, vis-à-vis de Spalatro : elle est aux Vénitiens.
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BREBBES | S. m. pl. (Hist. mod. & Géog.) Peuples particuliers, qui habitent les montagnes Atlantiques de l'Afrique : ils sont Mahométans ; & par une dévotion très-bizarre ils se balafrent les joues de marques & de cicatrices, ce qui les distingue des autres habitans des mêmes contrées.
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BREBEZ | (Géog.) riviere qui prend sa source dans la Prusse Polonoise, & qui se jette à Mazoire, dans la riviere de Natew.
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BREBIS | ovis, sub. f. (Hist. nat. Zoolog.) animal quadrupede femelle, dont le bélier est mâle ; cependant c'est du nom de la femelle qu'on a dérivé les noms génériques oviaria & oviarium pecus, troupeaux de brebis. Voyez BELIER. Il y a des brebis qui ont de petites cornes : mais la plûpart n'en ont point. On a distingué plusieurs sortes de brebis, par la différence du poil ou de la laine : on les a aussi désignées par les noms des pays où elles se trouvoient. M. Linnaeus a réduit toutes celles dont il est fait mention dans plusieurs auteurs, à trois especes principales.
La brebis domestique, & celle qui a une très-grande queue, sont comprises sous la premiere espece. Voy. MOUTON.
La seconde est celle du Strepsiceros de Crete ou de Candie, qui a les cornes droites & entourées par une gouttiere dirigée en spirale ; au reste, elle ne differe guere des nôtres. Belon dit qu'il y en a de grands troupeaux sur le mont Ida.
La troisieme espece comprend les brebis de Guinée ou d'Angole ; elles sont plus grandes que les nôtres ; le derriere de la tête est plus saillant, les oreilles sont pendantes, & les cornes petites & recourbées en-bas jusqu'aux yeux : ces brebis ont une criniere qui descend plus bas que le cou, des poils courts comme ceux du bouc au lieu de laine, & un fanon sous la gorge comme le boeuf. Voyez MOUTON, QUADRUPEDE. Ray, synops. anim. quadrup. Linnaei, syst. nat. (I)
* Choix des brebis. Le profit qu'on a tiré d'un troupeau, dépend principalement de la bonté des brebis. Une bonne brebis a le corps grand, les yeux de même, & fort éveillés ; la queue, les jambes, & les tétines longues ; le ventre grand & large ; la démarche libre & alerte ; les jambes bas-jointées, la tête, le dos & le cou, garnis de laine longue, soyeuse, déliée, luisante & blanche. La brebis noire n'est pas si estimée que la blanche : la grise & la tachetée de différentes couleurs l'est encore moins.
Age de la brebis. Que votre brebis ne soit ni trop jeune ni trop vieille. Celle de deux ans sera bonne à garder : laissez celle qui en aura plus de trois.
L'âge d'une brebis se connoît à ses dents qui se fortifient jusqu'à trois & quatre ans. Passé cet âge, elles deviennent inégales entr'elles : mais c'est une affaire d'expérience que d'estimer l'âge par ces différences.
Espece de brebis. Les brebis étrangeres vous rapporteront plus que les communes. Les flandrines, ou celles qui sont venues des Indes en Hollande & en Flandre, vous donneront au moins deux agneaux par an ; seront plus fortes que vos brebis ordinaires ; porteront deux fois plus de laine, l'auront plus fine, & vous procureront des moutons & des béliers plus forts.
Ayez donc un bélier flandrin avec quelques brebis de cette espece.
Il y a dans le pays Bressan, aux environs de Mantoue, des brebis dont la laine est grossiere, mais qu'on tond jusqu'à trois fois par an : elles sont d'ailleurs si vigoureuses, qu'on peut les mener aux champs en tout tems.
Le pays Tessin a ses brebis : elles sont aussi vigoureuses que les bressanes, mais elles portent moins de laine. En récompense, elles sont belles, grosses, & donnent de beaux agneaux. Les bâtardes du Bressan sont estimées ; cependant elles sont moins fortes que les naturelles, quoique plus fortes que les tessines. On dit que c'est aux brebis de barbarie que l'Angleterre doit la beauté de ses draps : ce qu'il y a de certain, c'est qu'elles donnent trois fois plus de lait que les brebis du pays ; que la laine en est plus fine, & qu'on en tire deux fois davantage.
Choisissez entre ces brebis les meilleures, & formez-en votre troupeau. Ayez de bonnes bergeries ; voyez l'article BERGERIE. Ne négligez pas le choix du berger ; voyez les articles BERGER & CHIEN DE BERGER.
Les brebis sont timides, douces, sensibles au chaud & au froid, & fort sujettes à maladies : elles ne passent guere neuf ans.
Nourriture des brebis. Il faut les nourrir d'herbes, de foin, de paille, & de son dans la bergerie : on peut aussi leur donner des raves, des navets, & des joncs marins hachés, de la vesce, du sainfoin, & de la luserne : dans le tems de disette, des feuilles d'ormeau, de frêne, & de bouleau, du cythise, des cosses & feuilles de légumes, des choux, &c. C'est principalement en hyver qu'on use de ces secours, au défaut des pâturages.
Lorsque le tems du pacage est venu, au printems, en automne, & en hyver, on les y mene une fois par jour : elles sortent sur les neuf heures, & on les ramene avant le soleil couché. En été, elles y vont deux fois le jour. Elles partent dès le grand matin, & rentrent sur les dix heures : on les fait boire ; on les renferme dans la bergerie ; elles y reposent jusqu'à trois heures qu'elles retournent aux champs, où elles paissent jusqu'au coucher du soleil, qu'on les fait boire une seconde fois avant que de les renfermer. On ne les fait boire qu'une fois dans les autres saisons.
Il ne faut pas mener paître au loin les brebis qui ont des agneaux ; il faut même alors leur donner le matin de bon foin. Tirez leur lait le matin, avant qu'elles sortent, & le soir quand elles reviennent.
Recommandez à votre berger d'éviter les pâturages épais & marécageux ; qu'il choisisse les lieux secs, aérés, élevés, ceux qui abondent en plantes odoriférantes, & les collines : les chardons & les épines gâtent la laine, & donnent la galle aux brebis. Mais il n'y a point de meilleurs pâturages que les bords de la mer & les environs des marais salans. Qu'il les fasse paître à l'ombre dans les grandes chaleurs.
Il faut tenir le bélier séparé des brebis, soit aux champs, soit dans la bergerie, à moins qu'elles ne soient en chaleur ; & pour augmenter son troupeau, il en faut séparer toutes les vieilles brebis. Ce triage se fera sur la fin d'Avril.
La paille qu'on donne aux brebis se remet en gerbe, qu'on vend ; car les bêtes à laine n'en rongent que l'épi. On parque les brebis ; voyez l'article PARCAGE. On les tond vers le mois de Mai ; voy. TONTE. On les engraisse quand on veut s'en défaire ; voy. ENGRAIS. Quant à la propagation, voici comment on y procede.
Multiplication des brebis. Les brebis sont en chaleur depuis la Toussaint jusqu'au mois d'Avril ; elles agnellent donc aussi pendant six mois : elles portent pendant cinq. Comme le froid feroit périr les agneaux qui naîtroient avant Décembre, on ne laisse approcher le bélier des brebis, que vers la fin de Juillet ou au mois d'Août.
Ne laissez le bélier avec vos brebis que le tems qu'il faut pour qu'elles conçoivent. Vos agneaux vous viendront au tems où vous les attendrez, & vous ménagerez votre bélier. Nourrissez bien votre bélier pendant qu'il travaille, & faites prendre de l'eau salée à la brebis.
Il faut veiller sur les brebis, quand le tems de l'agnation approche. L'agneau & la mere périront souvent si on ne les aide. Voyez l'article AGNEAU. Vous enfermerez les brebis qui auront agnelé pendant quatre jours, avec du bon foin, du son mêlé d'un peu de sel, & de l'eau tiede, blanchie avec un peu de farine de millet ou de froment. Donnez-leur aussi de la feuille d'orme ou de frêne, amassée dans la saison. Le cinquieme jour, elles pourront aller aux champs, mais non loin, de peur que leur lait ne s'échauffe. Si l'on veut tirer parti du lait de la brebis, il ne faut pas que l'agneau la tette.
Maladies des brebis. Comme les brebis sont fort délicates, elles sont, comme nous l'avons dit plus haut, sujettes à plusieurs maladies. Il faut soigneusement séparer les malades des autres. On s'en appercevra à plusieurs signes ; elles auront alors la tête lourde & les yeux troubles ; elles négligeront les pâturages ; elles ne bondiront point ; elles marcheront lentement ; elles se tiendront à l'écart ; elles chercheront l'ombre & la solitude ; elles chancelleront en marchant ; elles se coucheront souvent ; elles se traîneront après les brebis saines : le berger ne sauroit y regarder de trop près.
Voici un remede qui soulage assez généralement les bestiaux.
Prenez du foie d'antimoine, enveloppez-le dans un linge, mettez-le tremper dans une pinte de vin blanc ; ajoûtez huit dragmes de sené, du sucre, de la noix muscade, & autres épices ; laissez infuser le tout 24 heures, & donnez un demi-septier de cette infusion à chaque brebis : cependant tenez la brebis ainsi médicamentée dans un lieu chaud, & ne la faites manger que le soir.
Les brebis sont principalement sujettes à la gale, voyez GALE : à la fievre, voyez FIEVRE : aux poux, voyez POUX : à la clavelée ou claveau, voyez CLAVELEE : à la toux, à l'enflure, à la difficulté de respirer ; ce qui marque abondance de sang, ou obstruction dans les visceres de la respiration. On les soulagera en leur fendant les naseaux, ou en leur coupant les oreilles : à la morve, voyez MORVE : à l'avertin, vertige, étourdissement, sang, folie ou tournant, voyez AVERTIN. Elles deviennent boiteuses ou de lassitude, ou parce que leurs ongles sont amollis, ou parce qu'elles ont resté long-tems dans leur fiente. Si c'est lassitude, laissez-les reposer dans la bergerie ; si c'est ongles amollis, coupez-leur l'extrémité de l'ongle gâté, mettez-y de la chaux vive, enveloppée d'un linge pendant un jour ; le lendemain substituez le verd-de-gris, & ainsi alternativement, chaux & verd-de-gris, jusqu'à ce que l'ongle soit guéri. Il y en a qui préférent à ce remede, de la vieille huile de noix ou d'olive, mise en onguent par l'ébullition, avec de l'alun pulvérisé. Elles sont encore sujettes aux abcès, qu'il faut ouvrir quelque part qu'ils paroissent : quand l'abcès sera ouvert & vuidé, on distillera dedans de la poix fondue avec du sel brûlé & mis en poudre, & l'on fera boire à la brebis de la thériaque délayée dans de l'eau. A la peste, qui les attaque en été & en hyver ; elles en meurent quand elles en sont malades : mais on préviendra cet accident, si on leur fait prendre pendant une quinzaine, au commencement du printems & de l'autonne, tous les matins avant qu'elles aillent aux champs, de l'eau où l'on aura fait infuser la sauge & la marrube. Si une brebis se rompt la jambe, on la lui frottera avec de l'huile & du vin mêlés ; on l'entortillera avec des linges, & on la soûtiendra avec des éclisses : on la fera reposer trois ou quatre jours dans la bergerie, le cinquieme elle pourra suivre les autres aux champs.
Usage. La brebis fournit dans le commerce les mêmes marchandises que le bélier & le mouton ; entre autres de la laine, qui sert dans les manufactures d'étoffes ; & sa peau, qu'on vend aux Tanneurs & aux Mégissiers.
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BRECHE | S. f. terme de Bâtiment : il se dit en général d'une ouverture causée à un mur de clôture par mal-façon, caducité, ou faite exprès pour faire passer des voitures ou équipages de maçonnerie. Ce mot vient de l'allemand brechen, qui signifie rompre.
Breche, sorte de marbre. Voyez MARBRE. (P)
BRECHE, dans l'attaque des places, se dit du trou ou de l'ouverture qu'on fait à quelque partie des murailles d'une ville, par une mine, sappe, ou coups de canon, pour ensuite monter à l'assaut, ou emporter la place de force. Voyez SIEGE, ASSAUT, &c.
On dit réparer la breche, fortifier la breche, se loger sur la breche, &c. Nettoyer la breche, c'est en ôter les ruines pour pouvoir mieux la défendre.
Une breche praticable est celle où des hommes peuvent monter & s'y loger. La breche doit être large de 15 à 20 toises. Les assiégeans y montent en se couvrant avec des gabions, des sacs de terre, &c.
Battre en breche ; voyez BATTRE & BATTERIE.
Monter à la breche ; voyez MONTER. (Q)
BRECHE, (LA) Géog. riviere de France qui a son cours dans le Beauvoisis, & se jette dans l'Oise.
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BRECHET | & par corruption BRICHET, s. m. (Anat.) la partie de la poitrine où les côtes aboutissent antérieurement, & que les Anatomistes appellent le sternum. Voyez STERNUM. (L)
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BRECHKNOCK | (Géog.) ville d'Angleterre au midi de la province de Galles, dans un petit pays appellé Brecknockshire. Long. 14. 12. lat. 52. 8.
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BRECHYN | (Géog.) petite ville de l'Ecosse septentrionale, dans la province d'Angus. Long. 15. 20. lat. 36. 47.
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BREDA | (Géog.) ville forte avec titre de baronie, située dans le Brabant hollandois, dans un lieu fort marécageux, sur la Merck. Long. 22. 20. lat. 51. 35.
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BREDENARDE | (Géog.) petite contrée de France en Artois.
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BREDINDIN | S. m. (Marine) c'est une manoeuvre ou petit palan qui passe dans une poulie simple, amarrée au grand étai sous la hune, & par le moyen de laquelle on enleve de médiocres fardeaux, pour les mettre dans le navire. (Z)
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BREDIR | v. neut. terme en usage chez les Bourreliers ; ils s'en servent pour exprimer la maniere dont ils joignent ensemble les différens cuirs dont ils cousent les soûpentes & autres grosses pieces. Pour cet effet ils prennent une grosse alène appellée alène à bredir, avec laquelle ils font dans le cuir des trous où ils passent, au lieu de fil, des lanieres de cuir ; & serrent cette espece de couture par le moyen du marteau appellé serre-attache.
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BREDOUILLE | S. f. terme de Trictrac : on appelle ainsi le jetton qui sert à marquer que les points qu'on a, on les a pris sans interruption : ainsi, je gagne quatre points, je marque ces quatre points avec un jetton accompagné de celui de la bredouille : j'en gagne encore deux, qui avec quatre que j'avois font six, je marque ces six points avec un jetton, toûjours accompagné de celui de la bredouille. Mon adversaire joue, il gagne deux points ; alors je perds la bredouille, & c'est lui qui la gagne, & qui la conservera jusqu'à ce que je lui ôte en lui gagnant quelques points avant qu'il en ait pris douze : alors nous ne l'aurons ni l'un ni l'autre ; car nous nous serons interrompus tous les deux en prenant alternativement des points. Si l'on gagne douze points sans interruption, ou, comme on dit au jeu, douze points bredouille, on marque deux trous ; s'ils ne sont pas bredouille, on ne marque qu'un trou.
S'il y a des trous bredouille, il y a aussi des parties bredouille. La partie du trictrac est de douze trous ; on la gagne bredouille quand on prend ces douze trous tout de suite & sans interruption. Il y a des joüeurs qui la font payer double.
Pour que le trou & la partie soient bredouille, il n'est pas nécessaire que votre adversaire ne prenne point de trous ni de points ; il suffit que vous fassiez vos douze points ou vos douze trous tout de suite ; que votre adversaire eût des points ou des trous avant que vous en prissiez, cela est indifférent.
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BRÉE | (LA) ou L'ABRAS, c'est ainsi qu'on appelle dans les forges, la garniture de fer qui entoure le manche du marteau pour l'empêcher de s'user par le frottement. Voyez en D fig. 6. Planche des Forges. La brée est placée dans l'endroit où les cammes de l'arbre prennent le manche & le font lever. On conçoit que cet endroit doit fatiguer d'autant plus que le marteau est plus lourd, le nombre des cammes plus fréquent, & le mouvement de l'arbre plus rapide.
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BREF | COURT, SUCCINT, (Gram.) termes relatifs à la quantité ; bref, à la quantité du tems ; court, de l'espace & du tems ; succint, de l'expression. La prononciation d'une syllabe est longue ou breve ; un discours est diffus ou succint ; un article est court ou long.
BREF, s. m. dans plusieurs coûtumes de France, se dit des lettres qu'on obtient en chancellerie, à l'effet d'intenter une action contre quelqu'un. Ainsi on dit dans ces coûtumes un bref de restitution, de rescision. Dans quelques anciennes coûtumes, & même encore à présent en Angleterre, ce terme est synonyme à action.
Par exemple, on appelle en Normandie bref de mariage encombré, une action que la femme a droit d'exercer à l'effet d'être réintégrée dans ses biens dotaux ou matrimoniaux, qui ont été aliénés par son mari.
BREFS APOSTOLIQUES, sont des lettres que le pape envoye aux princes & aux magistrats pour des affaires publiques. On les appelle ainsi, parce qu'elles sont concises, sans préambule, & sur papier ; au lieu que les bulles sont plus amples, écrites sur du parchemin, & scellées de cire verte ou de plomb. Les brefs ne sont scellés qu'avec de la cire rouge, & sous l'anneau du pêcheur. Ce scel ne s'applique jamais qu'en présence du pape. Voyez BULLE.
Les brefs ont en tête le nom du pape, & ils commencent par ces mots : Dilecto filio salutem, & apostolicam benedictionem, &c. après quoi s'ensuit la matiere qui doit être traitée sans aucun préambule.
Le pape ne signe pas les brefs, & on n'y applique pas son nom au bas ; c'est le secrétaire qui signe. Le pape Alexandre VI. établit un collége de secrétaires pour les brefs, depuis ce tems les brefs sont plus longs & plus amples qu'auparavant.
Les brefs n'étoient autrefois envoyés que pour les affaires de justice : mais présentement ils sont employés pour les matieres de bénéfice, de graces expectatives, & pour les dispenses.
BREF, en terme de Commerce ; on appelle bref état de compte, un compte en abregé, ou qui n'est pas dressé & rendu en forme. Voyez COMPTE.
BREF, en terme de Commerce de mer, signifie en Bretagne un congé ou permission de naviger.
Il y en a de trois sortes, bref de sauveté, bref de conduite, & bref de victuailles. Le premier se donne pour être exempt de droit de bris. Voyez BRIS : le second, pour être conduit hors des dangers de la côte ; & le troisieme, pour avoir liberté d'acheter des vivres.
On les appelle aussi brieux ; & dans le langage ordinaire, on dit, parler aux hébrieux pour obtenir ces brefs. Voyez BRIEUX. (G)
BREF, en Musique, est un mot qu'on ajoûte quelquefois au-dessus de la note qui finit un air ou un chant, pour marquer que cette finale doit être coupée par un son bref & sec, au lieu de durer toute sa valeur. Voyez COUPE. (S)
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BREFAR | (Géog.) c'est le nom d'une des îles Sorlingues, près des côtes de Cornoüaille en Angleterre.
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BREFORT | (Géog.) petite ville du comté de Zutphen, assez bien fortifiée, & située dans un endroit fort marécageux.
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BREGENTZ | (Géog.) ville capitale d'un comté de même nom, sur le lac de Constance en Soüabe, appartenante à la maison d'Autriche. Il y passe une petite riviere de même nom. Long. 27. 20. lat. 47. 27.
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BREGIN | S. m. terme de riviere, espece de filet dont les mailles sont fort étroites.
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BREGLIO | (Géog.) petite ville du comté de Nice en Piémont, sur la petite riviere de Rodia.
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BREGMA | S. m. en Anatomie, c'est ce qu'on appelle aussi le sinciput. Voyez SINCIPUT.
Le bregma, est composé de deux os que l'on appelle bregma ou bregmatis ossa, qui sont les deux pariétaux. Voyez PARIETAUX (L)
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BREGNA | (Géog.) petite contrée d'Italie, l'une des quatre que les Suisses y possedent, entre les sources du Rhin & la ville de Bellinzone. Il y a dans ce pays une riviere de même nom, qui le traverse, & se jette dans le Tessin.
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BREGNANO | (Géog.) petite ville du duché de Milan, sur la Sevese.
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BREHAINE | se dit, en Vénerie, d'une biche qui n'engendre point ; on la nomme aussi brehagne. Cette vieille biche laisse un pié large qui peut induire en erreur.
BREHAINES, (Terres) terme de coûtumes, qui se dit des terres non labourées ni cultivées, qui sont vacantes, en friche & abandonnées. (H)
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BREHIS | S. m. (Hist. nat.) animal de l'île de Madagascar, de la grandeur de la chevre, qui n'a qu'une corne sur le front, & qui est fort sauvage.
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BREHNA | (Géog.) petite ville de l'électorat de Saxe, à trois milles de Leipsick.
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BREISICH | (Géog.) petite ville d'Allemagne, au duché de Juliers, sur la riviere gauche du Rhin.
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BREIT-BACH | (Géog.) petite ville sur le Rhin, située dans l'électorat de Cologne.
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BREITENBACH | (Géog.) petite ville & château dans la Thuringe.
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BREITENBOUR | ou BREDENBERG, (Géog.) forteresse autrefois considerable dans le duché de Holstein, sur la riviere de Stoer.
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BREITH-MARCK | (Géog.) petite ville d'Allemagne, en Franconie, sur le Mayn.
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BRELAND | S. m. jeu de cartes : il se joue à tant de personnes que l'on veut : mais il n'est beau, c'est-à-dire très ruineux, qu'à trois ou cinq. L'ordre des cartes est as, roi, dame : valet, dix, neuf, huit, sept, six : l'as vaut onze points : le roi, la dame, le valet & le dix, en valent dix ; les autres cartes comptent autant de points qu'elles en portent ; on laisse rarement les six dans le jeu.
On donne trois cartes, ou par une, ou par deux & une, ou par une & deux, mais non par trois. Si un joüeur a dans ses trois cartes, l'as, le roi, & la dame d'une même couleur, il compte trente-un ; s'il a l'as & le dix, il compte vingt-un : s'il a le dix, le neuf & le sept ; il compte vingt-six, & ainsi des autres cartes ou jeux qui peuvent lui venir.
S'il a dans ses trois cartes, ou trois as, ou trois rois, ou trois valets, &c. il a breland. Un breland est supérieur à quelque nombre de points que ce soit ; & entre les brelands, celui d'as est supérieur à celui des rois ; celui de rois à celui de dames, & ainsi de suite.
Les as, ou plus généralement les cartes qui se trouvent dans la main des joueurs, emportent toutes les cartes inférieures de la même couleur qui se trouvent aussi sur le jeu ; ainsi si un joüeur a trois coeurs par le valet, & qu'un autre joüeur ait ou l'as, ou la dame, ou le roi de coeur seul ou accompagné, il ne reste rien au premier, & le second a quatre coeurs au moins. Il n'y a d'exception à cette regle que le cas du breland ; les as mêmes n'emportent point les cartes qui font breland dans la main d'un joüeur.
Celui qui donne met seul au jeu ; cet enjeu s'appelle passe, & la passe est si forte ou si foible qu'on veut. Il y a primauté entre les joüeurs. Celui qui est le plus à droite du donneur, prime sur celui qui le suit ; celui-ci sur le troisieme, & ainsi de suite. Le donneur est le dernier en carte. A égalité de points entre plusieurs joüeurs, le premier en carte a gagné.
On n'est jamais forcé de joüer ; si l'on a mauvais jeu, on passe : si tout le monde passe, la main va à celui qui étoit le premier en carte ; il joint son enjeu au précédent, & il y a deux passes : le nombre des enjeux ou passes augmente jusqu'à ce que quelqu'un joue. Mais si un joueur dit, je joue, n'eût-il point de concurrent, il tire toutes les passes qui sont sur jeu, sans même être obligé de montrer son jeu.
Si un joüeur dit, je joue, il met autant d'argent sur jeu qu'il y a de passes ; si un autre joüeur dit aussi, je joue, il en fait autant, & ainsi de tous ceux qui joüeront : puis ils abattent leurs cartes. Ils s'enlevent les uns aux autres les cartes de même couleur, inférieures à celles qu'ils ont ; & celui qui compte le plus de points dans les cartes d'une seule couleur, a gagné : ou s'il y a des brelands, celui qui a le breland le plus haut ; ou celui qui a un breland, s'il n'y en a qu'un, tire tout l'argent qui est sur le jeu.
Il faut observer que la carte retournée est du nombre de celles qui peuvent être enlevées ou par celui qui a dans sa main la carte la plus haute de la même couleur, ou de préférence par celui qui a trois autres cartes, non de la même couleur, mais de la même espece : ainsi dans le cas où la carte retournée seroit un dix, le joueur qui auroit trois dix en main, auroit de droit le quatrieme ; ce qui lui formeroit le jeu qu'on appelle tricon. Le tricon est le jeu le plus fort qu'on puisse avoir ; cependant ce jeu n'est pas sûr.
Si le breland est un jeu commode, en ce qu'on ne joue que quand on veut, c'est un jeu cruel, en ce qu'on n'est guere libre de ne jouer que ce qu'on veut. Tel se met au jeu avec la résolution de perdre ou de gagner un loüis dans la soirée, qui en perd 50 en un coup. C'est votre tour à parler, vous croyez avoir jeu de risquer la valeur de la passe ; je suppose qu'elle soit d'un écu, vous dites, je joue, & vous mettez au jeu un écu. Celui qui vous suit, croira pouvoir aussi risquer un écu, & dira, je joue, & mettra son écu : mais le troisieme croira son jeu meilleur qu'un écu ; il dira, je joue aussi, voilà l'écu de la passe, mais j'en mets vingt, trente, quarante en sus. Le quatrieme joüeur, ou passe, ou tient, ou enchérit. S'il passe, il met ses cartes au talon ; s'il tient, il met & l'écu de passe, & l'enchere du troisieme joüeur ; s'il enchérit, il met & l'écu de passe, & l'enchere du troisieme joüeur, & son enchere particuliere. Le cinquieme joüeur choisit aussi de passer, de tenir ou de pousser. S'il tient, il met la passe, l'enchere du troisieme, & celle du quatrieme ; s'il pousse ou enchérit, il ajoûte encore son enchere. Le jeu se continue de cette maniere, jusqu'à ce que le tour de parler revienne à celui qui a joüé le premier ; il peut ou passer, en ce cas il perd ce qu'il a déjà mis sur jeu ; ou tenir, en ce cas il ajoûte à sa mise la somme nécessaire pour que cette mise & son addition fassent une somme égale à la mise totale du dernier enchérisseur ; où il pousse & enchérit lui-même ; & en ce cas il ajoûte encore à cette somme totale son enchere. Les encheres ou tenues se continuent, & vont aussi loin que l'acharnement des joüeurs les entraîne, à moins qu'elles ne soient arrêtées tout-court par une derniere tenue faite dans un moment où celui qui tient, ajoûtant à sa mise ce qui manque pour qu'elle fasse avec son addition une somme totale égale à la derniere enchere, tous les joüeurs se trouvent avoir sur le jeu la même somme d'argent, excepté celui qui a fait, à qui il en coûte toûjours la passe de plus qu'aux autres. En général, tout joüeur qui a moins d'argent sur jeu qu'un autre joüeur peut enchérir, & les encheres se poussent nécessairement jusqu'à ce qu'il arrive une tenue au moment où la mise de tous ceux qui ont suivi les encheres, est absolument égale.
Il faut savoir qu'on n'est point obligé de suivre les encheres, & qu'on les abandonne quand on veut ; mais aussi qu'on perd en quittant, tout ce qu'on a mis d'argent sur le jeu : il n'y a que ceux qui suivent les encheres jusqu'au bout, qui puissent gagner.
Lorsque tous les joüeurs qui ont suivi les encheres, sont réduits à l'égalité de mise & arrêtés par quelque tenue, ils abattent leurs cartes, ils se distribuent celles qui leur appartiennent par le droit de supériorité de celles qu'ils ont, s'il n'y a point de breland ; & celui qui forme le point le plus haut dans les cartes d'une même couleur, gagne tout. S'il y a un breland celui qui l'a, tire ; s'il y en a plusieurs, tout l'argent appartient au plus fort breland, à moins qu'il n'y ait un tricon : le tricon a barre sur tout. Il n'y a de ressource contre le tricon, que d'avoir plus d'argent que lui, & que de le forcer à quitter par une enchere qu'il n'est pas en état de suivre. C'est par cette raison que nous avons dit que tricon étoit le plus beau jeu que l'on pût avoir, sans toutefois être un jeu sûr.
Tel est le jeu qu'on appelle breland : il n'y a peut-être aucun jeu de hazard plus terrible & plus attrayant. Il est difficile d'y joüer sans en prendre la fureur : & quand on en est possedé, on ne peut plus supporter d'autres jeux : ce qu'il faut, je crois, attribuer à ses révolutions, & à l'espérance qu'on a de pousser le gain tant qu'on veut, & de recouvrer en un coup la perte de dix séances malheureuses ; espérances extravagantes, car il y a démonstration morale que le gain ne peut aller que jusqu'à un certain point ; & il est d'expérience que le grand gain rend les joüeurs plus resserrés & plus timides, & que la grande perte les rend plus avides & plus téméraires. La police n'a pas tardé à sentir les tristes suites de ce jeu, & il a été proscrit sous les peines les plus séveres : cependant il se joue toûjours, & je suis convaincu que les hommes n'y renonceront que quand ils en auront inventé un autre qui soit aussi égal & plus orageux ; deux conditions difficiles à remplir, car il faut convenir que le breland est un jeu très-égal, quand l'enchere la plus forte est bornée.
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BRELLE | S. m. (Commerce de bois quarré) c'est ainsi que ceux qui font ce commerce, nomment une certaine quantité de pieces de bois liées ensemble en forme de radeau. Il faut quatre brelles pour former un train complet. Voyez TRAIN.
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BRELUCH | S. f. (Commerce) c'est ainsi qu'on appelle des droguets fil & laine qui se fabriquent à Roüen, à Darnetal & à Caën, & les tiretaines de Poitou. Voyez DROGUET. Voyez TIRETAINE.
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BREMA | (Géog.) royaume & ville d'Asie, dans l'Inde, au-delà du Gange.
BREMA, (Géog.) petite ville du duché de Milan, sur le Pô entre Casal & Valence.
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BREMBATO | BREMBATO
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BREMBO | (Géogr.) riviere qui prend sa source aux frontieres de la Valteline, & qui se jette dans l'Adda au-dessous de Bergame.
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BREME | BRAME, s. m. (Hist. nat. Ichthyolog.) cyprinus lacus, poisson de lac & de riviere. Il est grand & large ; il a la tête petite à proportion du corps, le dos convexe & tranchant, le corps plat & couvert de grandes écailles, comme la carpe ; le dos est d'un bleu noirâtre ; les côtés & le ventre sont blancs, sur-tout dans ceux qui sont jeunes & maigres. Ceux qui sont plus avancés en âge & gras, ont les côtés de couleur d'or, & le ventre rougeâtre. La breme a un trait courbe qui s'étend depuis les oüies jusqu'à la queue ; elle a deux nageoires auprès des oüies, une sur le dos, deux au milieu du ventre, une autre qui se continue depuis l'anus jusqu'à la queue. Ce poisson devient fort grand ; il y en a dans quelques lacs d'Auvergne qui ont deux coudées de longueur & deux piés de largeur : il reste dans les eaux dormantes. On n'en trouve que dans les rivieres dont le cours est lent & l'eau bourbeuse ; par exemple, dans la Saône : mais les bremes de riviere ne sont jamais si grosses que celles des lacs. La chair de ce poisson est molle & grasse : il y a des gens qui la trouvent bonne. Rondelet. Willughby. Voyez POISSON. (I)
BREME, (Géog.) duché d'Allemagne dans le cercle de basse Saxe, situé entre l'Elbe & le Wesel ; il appartient à l'électeur de Hanovre, qui l'a acheté de la couronne de Suede.
BREME, (Géog.) ville libre & impériale, fortifiée, arrosée par le Weser : elle est au nombre des villes hanséatiques, & il s'y fait un commerce très-considérable. Le port de cette ville en est éloigné de trois lieues ; il en sort grand nombre de vaisseaux qui trafiquent sur la mer Baltique, & vont à la pêche de la baleine. Long. 26. 20. lat. 53. 10.
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BREMERWERD | ou BREMERFURT, (Géog.) ville & château fort dans le duché de Breme, à trois milles de Breme. Long. 26. 30. lat. 53. 40.
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BREMGARTEN | (Géog.) petite ville de la Suisse à trois lieues de Zurich, sur la riviere de Russ ; elle appartient en partie au canton de Berne, & en partie à celui de Zurich. Long. 25. 55. lat. 47. 20.
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BREMME | (Géog.) ville d'Italie sur le Pô, dans le duché de Milan.
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BREMPT | (Géog.) petite ville d'Allemagne dans l'électorat de Treves, sur la Moselle.
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BRENDOLO | (Géog.) petite ville avec un port, sur une petite île des lagunes de Venise, entre la ville de Venise & l'embouchure du Pô.
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BRENNE | (Géog.) c'est le nom d'un petit district de France, dans la Touraine.
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BRENNKIRCHEN | (Géogr.) petite ville de la basse Autriche sur les frontieres de la Hongrie, à peu de distance du Danube.
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BRENS | ou BRENSKI, (Géogr.) ville dans la principauté de Severie, sur la riviere de Desna, appartenante aux Moscovites.
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BRENTA | Géogr.) riviere qui prend sa source dans l'évêché de Trente, & qui se jette dans le golfe de Venise au-dessous de Padoue.
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BRENTE | S. f. en italien brenta, (Comm.) mesure des liquides dont on se sert à Rome. La brente est de 96 bocales, ou de treize rubbes & demi. Voyez BOCALE & RUBBE.
La brente de Vérone est de seize bassées. Voyez BASSEE. (G)
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BRENTFORD | (Géog.) ville assez peuplée d'Angleterre dans le comté de Middlesex, sur la riviere de Brente, à l'endroit où elle se jette dans la Tamise.
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BRENTOLA | (Géog.) petite ville du Vicentin, à peu de distance de Vicenze ; elle dépend de la république de Venise.
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BRENTZ | (Géog.) riviere qui prend sa source dans le duché de Wirtemberg, & qui se jette dans le Danube près de Laugingen.
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BREOULX | (Géog.) petite ville de France en Provence, vers les confins du Dauphiné, à quatre lieues d'Embrun.
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BREQUIN | S. m. c'est dans un vilebrequin la partie qu'on appelle plus communément la meche.
Il y a des brequins de toute grandeur & grosseur ; leur usage est de pratiquer les trous nécessaires en travaillant en bois seulement.
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BRESCAR | (Géog.) ville d'Afrique au royaume de Tremecen, dans la province de Tenez.
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BRESCIA | (Géog.) capitale du Brescian, sous la domination de Venise, sur la riviere de Garza ; elle est fortifiée & défendue par une citadelle : on y fabrique toutes sortes d'armes. Long. 27. 40. lat. 45. 31.
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BRESCIAN | (Géogr.) pays d'Italie soumis aux Vénitiens, borné au nord par les Grisons, à l'occident par le Bergamasque, au sud par le Cremonois, & à l'orient par le Trentin, le Mantoüan & le Veronois.
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BRESCON | (Géog.) petite île de France dans le golfe de Lyon, près des côtes de Languedoc ; elle est pleine de rochers, & il s'y trouve un château fort.
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BRESECKE | (Géogr.) petite ville de la Marche de Brandebourg, sur la riviere d'Ucker.
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BRESELL | ou BERSELLO, (Géog.) petite ville d'Italie dans le duché de Modene. Long. 28. lat. 44. 55.
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BRESIL | (Géog.) grande contrée de l'Amérique méridionale, bornée au nord, à l'orient & au midi par la mer, & à l'occident par le pays des Amazones & le Paraguai : les côtes qui ont environ 1200 lieues de long sur 60 de large, appartiennent aux Portugais. L'intérieur du pays est habité par des peuples sauvages & idolâtres, qui se défigurent le visage pour paroître plus redoutables à leurs ennemis : on prétend qu'ils sont anthropophages. Les plus connus sont les Topinambous, les Marjagas & les Onétacas. Cette partie du Nouveau-monde est fort riche. Les Espagnols la reconnurent en 1500. Alvarès Cabral, portugais, en prit possession en 1501 pour son roi. Voyez, quant à son commerce, SAINT-SALVADOR, OLINDE, & SAINT-SEBASTIEN.
BRESIL, bois de Bresil, voyez l'article BOIS.
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BRESILLER | v. act. (Teinture) c'est teindre avec le bois de Bresil. Il faut que les toiles & les fils à marquer ayent été teints en bonne cuve pour être bresillés. Voyez TEINTURE.
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BRESINI | (Géog.) petite ville de la grande Pologne, dans le palatinat de Lenczicz.
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BRESLAU | (Géogr.) grande & riche ville, avec titre de principauté ; elle est la capitale de la Silésie, sur l'Oder : elle est fortifiée, & fort commerçante. Il y a un évêché & une université. Elle appartient aujourd'hui au roi de Prusse. Long. 34. 40. lat. 51. 4.
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BRESLE | (LA) Géog. petite ville de France dans le Lyonnois, sur la Tardine.
BRESLE, (la) Géog. riviere de France qui prend sa source en Normandie dans le pays de Caux, & se jette dans la mer au-dessous d'Eu.
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BRESLOIA | (Géogr.) ville d'Italie, appartenant à la république de Venise.
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BRESNITZ | (Géog.) ville du royaume de Boheme dans le territoire de Prague, où il y a des mines de fer : il y a encore une autre ville de ce nom en Boheme, dans le cercle de Satz, sur la riviere d'Egery.
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BRESSE | (Géog.) province & comté de France, dont Bourg est la capitale ; elle est bornée au nord par la Bourgogne & la Franche-Comté, à l'est par la Savoie, au midi par le Viennois, & à l'orient par la principauté de Dombes & la Sône. Elle comprend les pays de Gex, de Bugey, & de Valromey.
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BRESSIN | S. m. (Marine) c'est un palan ou cordage qui sert à isser & à amener une vergue ou une voile, on l'appelle autrement guinderesse. V. PALAN.
BRESSINS ; ce sont des crocs de fer. Voyez CROCS DE PALAN. (Z)
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BRESSUITE | (Géog.) petite ville de France, sur la riviere d'Argenton, en Poitou.
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BREST | (Géog.) ville de France fort considérable par ses fortifications & son port sur l'Océan, qui est un des meilleurs du royaume ; elle est défendue par un fort château bâti sur un rocher escarpé. Long. 13d. 9'. 10''. lat. 48d. 22'. 55''.
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BRETAGN | (GRANDE), Géog. c'est une grande île de l'Océan, qui comprend les royaumes d'Angleterre & d'Ecosse ; ce nom lui a été donné sous le regne de la reine Anne, après la réunion de ces deux royaumes. Quant au commerce, voy. ANGLETERRE & éCOSSE.
BRETAGNE (Nouvelle), pays & presqu'île de l'Amérique septentrionale au Canada, au nord du fleuve Saint-Laurent.
* BRETAGNE, (Géog.) grande province de France, avec titre de duché. Elle forme une peninsule : du côté des terres, elle est bornée par le Poitou, l'Anjou, le Maine, & une partie de la Normandie. Son commerce est considérable. Il s'y fait des sels dans les marais de Bourneuf & du Croissi. Il vient des beurres de l'évêché de Nantes, des grains de Vannes, des chanvres & des lins des évêchés de Rennes, de Treguier, & de Léon, où l'on fabrique aussi des toiles ; il y en a qui servent à faire des voiles de vaisseaux : on les appelle pertes, locrenans, polledanis, pentes olonnes, toiles de Quintin, de Pontivy, Nantoises, de Morlaix, &c. Les toiles de Quintin sont toutes de lin, & ne le cedent guere en finesse aux batistes. On fait avec les plus fines des manchettes, des rabats, des coeffures &c. avec les grosses, des mouchoirs & des chemises. Les toiles à tamis bleuâtres viennent de la même province. Les toiles de Pontivy ne différent pas de celles de Quintin. On donne le nom de crès à celle de Morlaix & autres lieux, & l'on distingue un grand nombre de crès différentes. Les haut-brins se font à Dinan ; les vitrés, à Vitré même : on peut voir dans le dictionnaire du commerce le détail de ces toiles. Il y a aussi en Bretagne, de la bonnetterie & des mines de fer & de plomb. On fait la pêche de la sardine & du maquereau au Port-Louis, à Belisle, à Cancarnau, &c. Il se fabrique dans la plûpart des villes de petites étoffes de laine, comme étamines, droguets, serges, molletons, crêpons, &c. voilà à-peu-près quelles sont les marchandises du crû de cette province. On peut mettre au nombre de celui du dehors la morue, dont la pêche se fait par les Maloüins & les Nantois. Quant aux retours des îles françoises de l'Amérique, ils consistent en sucres bruts qui se raffinent à Angers, Saumur, & Orléans ; en gingembre, indigo, rocou, écaille, cuirs, bois de teinture. Il y arrive d'Angleterre, de Hambourg, & Hollande des planches, des mâts, des chanvres, du goudron, du fromage, &c. Les villes du commerce le plus étendu sont Rennes, Saint-Malo, Nantes, Vitré, Morlaix, Port-Louis, Chateaulin, Coveron, & Audrai.
* BRETAGNE (toiles de), Commerce, c'est ainsi qu'on nomme celles qui se fabriquent dans cette province, ou celles qui se fabriquent ailleurs sous même longueur, largeur & force. Voyez BRETAGNE, Géog. & son commerce.
BRETAGNE (la), s. f. nom d'une danse françoise, fort noble & d'un beau caractere ; elle se danse en pas de deux. Feue M. la duchesse de Luxembourg, qui étoit la meilleure danseuse de la cour, en fixoit sur elle tous les regards, lorsqu'elle exécutoit cette danse.
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BRETAUDER | BRETAUDER
* BRETAUDER, v. neut. terme d'usage chez les Tondeurs de draps, c'est tondre inégalement. Voyez DRAPERIE.
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BRETCHEN | (Géog.) forteresse & petite ville de la Prusse Polonoise, dans le pays de Liban, entre Strasburg & Osterode.
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BRETELER | BRETELER
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BRETELLES | S. f. on donne en général ce nom à des rubans ou à de longues & larges courroies, assemblées par d'autres courroies transversales, de maniere qu'elles forment un quarré oblong, dont on auroit prolongé deux des côtés paralleles. On peut passer la tête dans le quarré oblong ; alors les courroies prolongées s'appliquent sur l'une & l'autre épaule, & des courroies transversales, l'une passe sur les épaules, l'autre sur la poitrine. Les bouts des longues courroies placées sur les épaules & prolongées descendent par-devant & par-derriere à la hauteur des mains, & aident à porter plus facilement une civiere, une chaise à porter, & toute autre machine dont on peut placer les bras dans les boucles ou boutonnieres pratiquées à ces extrémités. Les bretelles servent encore à d'autres usages.
BRETELLES (les) ce sont, chez les Rubaniers, deux bouts de sangle attachés d'une part au chassis du métier, & de l'autre à la poitriniere : l'ouvrier passe la tête au-travers de ces deux bretelles, & se trouve assez appuyé par l'extrémité des épaules, pour en être beaucoup soulagé ; comme il est peu assis & fort courbé sur son ouvrage, on a été obligé à lui chercher ce point d'appui. Voyez POITRINIERE, & nos Planches de Passementerie, où presque tous les ouvriers qu'on a représentés travaillant au métier, sont appuyés sur leurs bretelles.
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BRETEUIL | (Géog.) petite ville de France dans la haute Normandie, avec titre de comté. Il y a encore une autre ville de ce nom dans le Beauvoisis.
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BRETHEI | ou BRETTEN, (Géog.) petite ville d'Allemagne dans le bas Palatinat, sur les frontieres du duché de Wirtemberg, sur la riviere de Saltz.
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BRETTA | (Géog.) petite ville de Suede, dans la province de Westgothie.
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BRETT | ou BRETELé, adj. Serrurerie, Taillanderie sur-tout. Il se dit de certains outils, tels que les marteaux à tailler de la pierre, les ébauchoirs de Sculpteur, &c. où la partie tranchante est divisée en dents faites à la lime ; les unes prises de court sur le tranchant même de l'outil, les autres tirées de long par des traits paralleles sur les deux surfaces.
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BRETTEN | (Géog.) petite ville du royaume de Suede, dans la Dalie, sur le lac Waner.
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BRETTE | ou BRETELER, v. act. & neut. En général, c'est se servir d'un instrument bretté. C'est avec le marteau bretté que les Tailleurs de pierre ébauchent les paremens.
BRETTER, terme de Sculpture ; c'est, en modelant, travailler la terre, de maniere qu'elle ne soit pas lisse, mais comme égratignée, ce que les ouvriers font d'abord avec un ébauchoir bretelé. Il y a beaucoup d'art à laisser paroître en quelques endroits cette négligence de travail. V. MODELER & EBAUCHOIR.
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BRETTESSES | S. f. pl. terme de Blason ; ce sont des rangées de crenaux, & l'on dit des pieces où l'on apperçoit ces especes de dentelures, qu'elles sont bretessées.
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BRETTIN | (Géog.) petite ville de l'électorat de Saxe, sur l'Elbe.
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BRETTURE | S. f. se prend en deux sens différens, ou pour les dents mêmes pratiquées à l'instrument dont on se sert pour bretter, ou pour les traits faits à l'ouvrage à l'aide de l'instrument. Dans le premier sens, c'est un terme de Taillanderie ; dans le second, il est de Maçonnerie & de Sculpture.
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BREUBERG | (Géog.) petite ville avec château dans la Franconie, sur le Mayn.
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BREUIL | S. m. terme d'Eaux & Forêts, est un petit bois taillis ou buisson, fermé de haies ou de murs, dans lequel les bêtes ont accoûtumé de se retirer. (H)
BREUILS ou CARGUES, (Marine) Voyez CARGUES.
BREUILS, MARTINETS, & GARCETTES : ces mots se prennent aussi, en Marine, pour toutes les petites cordes qui servent à breuiller, ferler, & serrer les voiles. (Z)
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BREUILLE | ou BROUILLER les voiles, les targuer ou trousser ; voyez CARGUER. (Z)
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BREUSCH | (Géog.) riviere de la basse Alsace, qui prend sa source aux frontieres de la Lorraine, & tombe dans l'Ile près de Strasbourg.
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BREUVAGE | S. m. Voyez BOISSON.
BREUVAGE, BREVAGE, BRUVAGE : on appelle ainsi, en Marine, un mélange égal de vin & d'eau, qu'on donne quelquefois pour boisson à l'équipage.
Le breuvage des équipages de Hollande dans les mers d'Allemagne & Baltique, est de la biere ; & dans les voyages de long cours, ce n'est que de l'eau, ou de l'eau mêlée avec du vinaigre. (Z)
BREUVAGE : on appelle encore ainsi, en Medecine & en Maréchallerie, toutes les liqueurs médicinales que le medecin & le maréchal font prendre à l'homme & au cheval malades. Le breuvage se donne à ce dernier avec la corne de vache. (V)
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BREVE | S. f. en terme de Grammaire, se dit d'une syllabe relativement à celles qui sont longues : par exemple, l'a est bref dans place, & long dans grâce ; en matin le commencement du jour, ma est bref, au lieu qu'il est long en mâtin, gros chien. L'a est bref en tache, macula, & long en tâche, ouvrage qu'on donne à faire.
Toutes nos voyelles sont breves ou longues, ou communes. C'est de l'assortiment des unes avec les autres que résulte l'harmonie de la période. Le tems d'une breve est de moitié plus court que le tems d'une longue ; ou, comme on dit communément, la breve n'a qu'un tems, & la longue en a deux : c'est-à-dire que pour prononcer la breve, on n'employe précisément que le tems qu'il faut pour la prononcer ; au lieu qu'on prononceroit deux breves dans l'intervalle de tems que l'on met à prononcer une longue.
Les Latins étoient extrèmement exacts à distinguer les longues & les breves. Ciceron dit, que si un acteur faisoit une faute sur ce point, il étoit sifflé par les spectateurs : Non solum verbis arte positis moventur omnes, verum etiam numeris ac vocibus. At in his si paulùm modò offensum est, ut aut contractione brevius fieret, aut productione longius, theatra tota reclamant. Quid ? hoc non idem fit in vocibus, ut à multitudine & populo, non modo catervae atque conventus, sed etiam ipsi sibi singuli discrepantes, ejiciantur ? Cic. de orat. lib. III. cap. j.
La même chose arriveroit sans-doute parmi nous si un acteur prononçoit par consquent au lieu de par conséquent, la mér au lieu de la mêr, &c.
Dans le latin, la breve se marque d'un & la longue d'un-; ainsi dans rm la premiere est longue & la seconde breve. Breve est aussi un terme de Musique : alors on sousentend note. Voyez l'article suivant.
BREVE, en Musique, est une note qui passe deux fois plus vîte que celle qui la précede : ainsi la noire est breve après une blanche pointée, la croche après la noire pointée. On ne pourroit pas de même appeller breve une note qui vaudroit la moitié de la précédente : ainsi la noire n'est pas une breve après la blanche simple, ni la croche après la noire, à moins qu'il ne soit question que de syncope.
C'est autre chose dans le Plain-chant. Pour répondre exactement à la quantité des syllabes, la breve y vaut la moitié juste de la longue : de plus, la longue a quelquefois une queue pour la distinguer de la breve qui n'en a point ; ce qui est précisément le contraire de la Musique, où la ronde qui n'a point de queue est double de la blanche qui en a une. Voyez MESURE, VALEUR des notes.
Breve est aussi le nom que donnent les Italiens à cette ancienne figure de note que nous appellons quarrée, qui se fait ainsi , & qui vaut trois rondes ou semi-breves dans la mesure triple, & seulement deux dans celle à deux ou à quatre tems. Anciennement, dit l'abbé Brossard, sous le signe du C barré, elle ne valoit que deux tems. De-là vient que les Italiens nomment encore alla breve, la mesure à deux tems fort vîtes, dont ils se servent dans les musiques da capella. (S)
BREVE, (à la Monnoie) est la quantité de marc ou d'especes délivrées, & provenant d'une seule fonte. De trente marcs d'or, il doit revenir neuf cent loüis : or la délivrance des neuf cent loüis est une breve. Voyez DELIVRANCE.
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BREVET | S. m. (Jurisp.) est un acte expédié en parchemin par un secrétaire d'état, portant concession d'une grace ou d'un don que le roi fait à quelqu'un, comme d'un bénéfice de nomination royale, d'une pension, d'un grade dans ses armées, ou autre chose semblable ; d'une somme payable au profit du brevetaire, par celui qui sera pourvû de telle charge ou de tel gouvernement, soit par la mort de celui qui l'occupe, ou par sa démission : c'est ce qu'on appelle brevet de retenue. Voyez RETENUE.
Brevet, en style de Notaires, est la minute d'un acte passé par devant Notaires, délivrée en original à l'une des parties. (H)
BREVET, se dit encore de plusieurs actes qui s'expédient par les commis des doüannes, ou les maîtres & gardes & jurés des corps & communautés.
BREVET DE CONTROLE, c'est une espece de récépissé ou d'attestation que donnent les commis des bureaux des doüannes, traites foraines, &c. à la sortie du royaume, à la place de l'acquit de payement des droits que les conducteurs & voituriers leur remettent entre les mains. Ce brevet, qui est sur du papier timbré & imprimé, se donne sans frais, pas même pour le timbre, & sert de certificat, que les marchandises énoncées dans l'acquit ont été visitées & recensées. Voyez ACQUIT.
BREVET D'APPRENTISSAGE ; acte qui se délivre à un apprenti après qu'il a servi le tems porté par les statuts de sa communauté, ou celui dont il est convenu pardevant notaires avec un maître, qui pourtant ne peut être moindre que celui qui est reglé par les statuts. On appelle aussi brevet l'obligé de l'apprenti qui doit être enregistré par les jurés, & qu'il doit rapporter aussi-bien que les certificats de son apprentissage & de son dernier service en qualité de compagnon, avant que de pouvoir être reçû à la maîtrise, & admis au chef-d'oeuvre. Voyez APPRENTI & APPRENTISSAGE.
BREVET : on nomme aussi quelquefois brevet de maîtrise, l'acte de réception à la maîtrise ; on dit plus proprement lettres de maîtrise. Voyez LETTRES.
BREVET, en terme de Marine, est ce qu'on appelle connoissement sur l'Océan, & police de chargement sur la Méditerranée ; c'est-à-dire un écrit sous seing privé, par lequel le maître d'un vaisseau reconnoît avoir chargé telles & telles marchandises dans son bord, qu'il s'oblige à porter au lieu & pour le prix convenu, sauf les risques de la mer. Voyez CONNOISSEMENT & POLICE DE CHARGEMENT. (G)
* BREVET, (Teinture) bain d'un guesde ou d'une cuve qu'on se dispose à faire réchauffer.
On dit en Teinture, manier le brevet : c'est examiner avec la main si le bain ou brevet de la cuve est bon ou assez chaud : ouvrir le brevet, c'est prendre de la liqueur soit avec la main, soit avec le rable, pour juger de la couleur du bain. V. BAIN & TEINTURE.
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BREVETAIRE | c'est l'impétrant d'un brevet. Voyez ci-dessus BREVET.
Dans le concours d'un indultaire & d'un brevetaire de joyeux avenement, le grand-conseil donne la préférence à l'indultaire, quoique sa réquisition soit postérieure à celle du brevetaire. Voyez INDULT, INDULTAIRE, & EXPECTATIVE. (H)
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BREVIAIRE | S. m. (Théol.) livre d'Eglise, qui contient pour chaque jour de la semaine & pour chaque fête, l'office du jour & de la nuit. Voyez OFFICE.
Le breviaire est composé des prieres qu'on récite dans l'église à diverses heures du jour : savoir, l'office de la nuit, que l'on appelle matines, que l'on récitoit autrefois la nuit ; usage qui s'est encore conservé dans quelques cathédrales, & dans la plûpart des ordres religieux : laudes, qu'on disoit au lever du soleil : prime, tierce, sexte & none, ainsi nommées des heures du jour où on les récitoit, suivant l'ancienne maniere de compter ces heures : vêpres, qui se disoit après soleil couché. On a depuis ajoûté complies, mais sans les séparer absolument des vêpres, afin de rendre à Dieu un tribut de prieres sept fois par jour, pour se conformer à ce passage du psalmiste : septies in die laudem dixi tibi. Voyez HEURES. L'usage de réciter des prieres à ces diverses heures de la nuit & du jour, est très-ancien dans l'Eglise : on les appelloit en Occident le cours ; on leur a donné depuis le nom de breviaire, soit que l'ancien office ait été abrégé, soit que ce recueil soit comme un abregé de toutes les prieres.
Le docteur Mege tire l'origine du nom de breviaire, de la coûtume qu'avoient les anciens moines de porter dans leurs voyages de petits livres qui contenoient les pseaumes, les leçons, & ce qu'on lisoit en chaire ; le tout extrait des grands livres d'église : & le P. Mabillon assûre, qu'il a vû dans les archives de Citeaux deux pareils livres, qui n'avoient pas plus de trois doigts de large, écrits en très-petit caractere avec des abréviations, où très-peu de syllabes exprimoient une période entiere.
Le breviaire est composé de pseaumes, de leçons tirées de l'Ecriture, ou des homélies des Peres, ou des histoires des Saints ; d'hymnes, d'antiennes, de répons, de versets, d'oraisons convenables au tems, aux fêtes, & aux heures. Les églises ayant chacune rédigé les offices qui étoient en usage chez elles, il en a résulté de la différence entre les breviaires ; il s'est même glissé dans plusieurs, quantité de fausses légendes des Saints : mais la critique qui s'est si fort perfectionnée depuis un siecle, en a purgé la plûpart. Les conciles de Trente, de Cologne, les papes Pie V. Clément VIII. & Urbain VIII. ont travaillé à cette réforme ; & aujourd'hui les églises de France en particulier, ont des breviaires composés avec beaucoup de soin & d'exactitude. Celui qu'on appelle breviaire romain, n'est point l'ancien breviaire de l'église de Rome, mais un breviaire que les Cordeliers récitoient dans la chapelle du pape, & que Sixte IV. adopta. Plusieurs de ses successeurs ont voulu en faire un breviaire universel pour toute l'Eglise : mais ce projet est demeuré sans exécution. Le cardinal Quignonez s'étoit aussi proposé de le simplifier, en supprimant le petit office de la Vierge, les versets, les répons, & une grande partie de la vie des Saints. Son projet n'a pas non plus eu lieu.
Les principaux breviaires, après celui de Rome & ceux des églises particulieres, sont ceux des Bénédictins, des Bernardins, des Chartreux, des Prémontrés, des Dominicains, des Carmes, de Cluny, & le breviaire mozarabique dont on se sert en Espagne. Celui des Franciscains & des Jésuites est le même que le romain, à l'exception de quelques fêtes propres & particulieres à l'un ou l'autre de ces ordres.
Le breviaire des Grecs, qu'ils appellent horologium, est à-peu-près le même dans toutes leurs églises & monasteres. Ils divisent le pseautier en vingt parties, qu'ils nomment , pauses ou repos ; & chaque pause est subdivisée en trois parties : en général, le breviaire grec consiste en deux parties, dont l'une contient l'office du soir appellé , & l'autre celui du matin, qui comprend matines, laudes, les petites heures, vêpres & complies. Celui des Maronites contient quelques différences plus considérables. Voyez MARONITE.
Parmi les peuples qui parlent la langue sclavone, ou quelques-uns de ses dialectes, le breviaire est en langue vulgaire, comme parmi les Maronites en syriaque, parmi les Arméniens en arménien, &c. Ceux qui disent le breviaire en sclavon, sont divisés quant au rit. Les habitans de la Dalmatie & des côtes voisines de cette province, de même que ceux qui sont plus avant dans les terres, comme en Hongrie, Bosnie, & Esclavonie, suivent le rit romain ; en Pologne, Lithuanie, Moscovie, ils suivent le rit grec. Le breviaire des Abyssins & des Cophtes est presque le même. Voyez COPHTES, GRECS, &c.
L'usage de réciter le breviaire en particulier étoit originairement de pure dévotion ; non-seulement des ecclésiastiques, mais même des laïcs l'ont pratiqué quand ils ne pouvoient pas assister à l'office dans l'église : mais on ne trouve pas de loi ancienne qui y oblige les ecclésiastiques. La premiere est le decret du concile de Bâle, suivi de celui de Latran sous Jules II. & Léon X. encore ne regardent-ils expressément que les bénéficiers. Mais les casuistes pensent en général, que tous les ecclésiastiques promûs aux ordres sacrés, ou possédant des bénéfices, sont tenus au breviaire sous peine de péché mortel ; & quant à ces derniers, qu'ils sont obligés à la restitution des fruits de leur bénéfice proportionnément au nombre de fois qu'ils ont manqué de réciter leur breviaire. Mege. Joly, de recit. hor. canon. Mabillon, de cursu gallican. De Vert, des cérémonies. (G)
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BREVIATEUR | S. m. (Hist. anc.) c'étoit le nom d'un officier des empereurs d'Orient, dont la fonction étoit d'écrire & de transcrire les ordonnances du prince. On appelle encore à Rome breviateurs ou abreviateurs, ceux qui écrivent & délivrent les brefs du pape. Voyez BREF. (G)
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BREY | (Géog.) petite ville du pays de Liége, dans le comté de Looz. Long. 23. 10. lat. 51. 6.
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BREYN | (Géog.) petite ville du comté d'Assint dans l'Ecosse septentrionale, sur un petit golfe de même nom.
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BREYNIA | S. f. (Hist. nat. bot.) genre de plante dont le nom a été dérivé de celui de Jacques Breyn de Dantzic. La fleur de ce genre de plante est en rose, composée de plusieurs pétales disposés en rond : il s'éleve du fond du calice un pistil qui devient dans la suite un fruit ou une silique molle & charnue, dans laquelle sont renfermées plusieurs semences qui ont la figure d'un rein. Plumier, nova plant. Amer. gener. Voyez PLANTE. (I)
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BREZIN | (Géog.) ville de la grande Pologne, dans le palatinat de Lenczicz.
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BRIANçON | (Géog.) ville de France dans le haut Dauphiné, avec un château fort sur la Durance. Long. 24. 20. lat. 44. 46.
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BRIANçONNET | (Géog.) forteresse de Savoie dans la Tarentaise, bâtie sur un rocher inaccessible.
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BRIANçONNOIS | (Géog.) petit pays de France en Dauphiné, dont Briançon est la capitale.
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BRIARE | (Géog.) petite ville de France en Gatinois, sur la Loire, remarquable par le canal qui porte son nom, & qui fait communiquer la Loire & la Seine. Long. 20d. 24'. 13''. lat. 47d. 38'. 16''.
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BRIATENTE | (Géog.) petite ville de France en Languedoc, sur le Dadou, à quelques lieues d'Alby.
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BRICIEN | S. m. (Hist. mod.) l'ordre militaire des Briciens fut institué, en 1366, par sainte Brigite reine de Suede ; sous le pontificat d'Urbain V. qui l'approuva, & lui donna la regle de S. Augustin. Cet ordre avoit pour arme une croix d'azur, semblable à celle de Malte, & posée sur une langue de feu, symbole de foi & de charité. On y faisoit voeu de combattre contre les hérétiques & pour la sépulture des morts, & l'assistance des veuves, des orphelins, & des hôpitaux. Toutes ces institutions sont plus recommandables par la pureté d'intention des personnes qui les ont instituées, les riches commanderies dont elles ont été dotées, la naissance & la piété de plusieurs de leurs membres, que par leur conformité avec l'esprit pacifique de l'Eglise, & de celui qui dit de lui-même, qu'il est si doux qu'il ne sauroit éteindre la lampe qui fume encore. Voyez Fleuri, Discours sur les Religieux.
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BRICOLE | S. f. terme de Bourrelier. Voyez COUSSINET.
BRICOLE, terme de Paumier ; joüer de bricole, c'est faire frapper la balle contre un des murs de la longueur du jeu de paume.
BRICOLE, terme de jeu de Billard : on dit qu'une bille en frappe une autre par bricole, lorsqu'au lieu d'être poussée directement contr'elle, elle ne vient la rencontrer qu'après avoir frappé la bande du billard, & avoir été renvoyée par cette bande.
Soit F une des billes, & A l'autre (fig. 27. Opt.), H G la bande du billard ; si on pousse la bille F suivant F E, & que renvoyée suivant E A par le point E de la bande, elle vienne choquer la bille A ; cela s'appelle choquer de bricole. Pour trouver le point E de la bande, auquel il faut pousser la bille F pour choquer la bille A de bricole, menez de la bille A la perpendiculaire A G, à la bande G H, & prolongez-la de maniere que G B soit égal à A G ; ensuite visez de F en B, & poussez la bille F suivant F B ; le point E où F B coupera G H, sera le point de bricole : car tirant F E & A E, il est aisé de démontrer que l'angle F E H est égal à l'angle A E G. Donc, suivant les lois de la réflexion des corps (Voyez REFLEXION), la bille poussée suivant F E, rejaillira suivant E A.
Au reste les bons joüeurs, par la seule habitude, trouvent ce point E sans préparation, & les maladroits le manquent avec cet échafaudage.
On peut donner aussi des regles géométriques pour toucher une bille par deux bricoles ou davantage : mais elles seroient plus curieuses dans la théorie, qu'utiles dans la pratique. Voyez l'article MIROIR, où l'on traite assez au long de la réflexion simple ou multiple des rayons : réflexion qui représente parfaitement les bricoles simples ou multiples d'une bille de billard. (O)
BRICOLE, (Chasse & Pêche) ce sont des filets faits de petites cordes pour prendre les grandes bêtes ; ils sont en forme de bourses. On se sert aussi de cette sorte de filets pour prendre le poisson. V. BROCHET.
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BRICOLIER | S. m. (Manége) est le cheval qu'on attelle à une chaise de poste à côté du cheval de brancard, & sur lequel le postillon est monté. Ce nom vient du harnois qu'on lui met, qui s'appelle une bricole. (V)
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BRICOTEAUX | S. m. pl. chez les Rubaniers & les Gaziers, &c. ce sont deux pieces détachées & enfilées (fig. 1. Pl. V.) dans la broche qui porte les poulies du côté gauche du chatelet. Il y en a un (fig. 5.) qui est représenté seul, pour en laisser voir toutes les parties. A A est la piece enfourchée, qui soûtient le bricoteau ; B la broche du chatelet, où il s'attache ; C l'endroit de la bascule, où s'attache le bricoteau ; D l'endroit où s'attache le tirant des marches ; E la corde qui porte la pierre ou le poids F, qui sert à donner plus de charge à la bascule ; G le noeud des quatre lacs des quatre lames, qui seules font agir le bricoteau ; H les quatre lames dont on vient de parler, & qui sont enfilées dans leur chassis toutes les quatre du même côté ; I les quatre marches qui font mouvoir les quatre lames, & sont les quatre en-dehors du côté gauche de l'ouvrier, marchées du même pié gauche ; K l'endroit où se place la corde de la traverse, qui sert à lever également toute cette machine ; L L les deux cordes qui soutiennent le lisseron M M, qui porte les lissettes N N ; O O les quatre rouleaux du porte-rame de devant, sur lesquels & entre les différentes grilles sont passées les rames de fond P P, qui viennent aboutir en Q Q, où elles sont noüées en R R aux lissettes.
Voici l'usage de ces bricoteaux. Dans les ouvrages extrèmement composés, il y a jusqu'à cinquante ou soixante livres pesant de fuseaux attachés aux lissettes ; & cela, comme il a été dit à leur article, pour faire retomber ces lissettes. On voit cette masse énorme dans la fig. 1. Pl. V. comme on en voit une petite partie dans la fig. 5. en S S. Ce poids considérable doit être levé presqu'en totalité par le pié gauche, toutes les fois que l'ouvrier en aura levé du pié droit une partie, quelquefois très-petite, d'autres fois plus considérable, mais toûjours bien moins considérable que la quantité qu'il leve avec le pié gauche, puisque c'est de ce pié que seront levées toutes les soies de fond ; au lieu que le droit ne levant que la figure qui s'exécute sur l'ouvrage, n'opere très-souvent que de très-petites levées, par la marche des vingt marches du pié droit (car elles sont dans cet ordre, vingt du pié droit pour la figure, & quatre du pié gauche pour le fond). Pendant cette petite levée toutes les soies de chaîne restent en-bas : mais après un coup de navette lancé à-travers cette levée, le fond venant à lever par une des quatre marches du pié gauche ; ce fond chargé, comme nous avons dit plus haut, rend cette levée d'une lourdeur extraordinaire, qui est considérablement diminuée par le moyen du bricoteau ou des deux bricoteaux, qui font ici l'office d'un levier, encore aidée du poids de la pierre F. C'est donc avec raison que la bascule C D. qui passe par l'enfourchement A, est d'inégale longueur : cette nécessité n'a pas besoin d'être prouvée. Dans certains ouvrages, ce bricoteau leve encore les quatre hautes lisses de devant qui portent les rames de lisiere, & qui sont levées alternativement par chacune des quatre marches du pié gauche ; dans ce cas ces quatre hautes lisses sont à claire voie, c'est-à-dire qu'elles n'ont qu'une très-petite quantité de mailles, distribuées sur les deux bouts de leurs lisserons F F, G G, de la fig. 2. les rames I I qui forment les lisieres y étant seules passées, le sont en cet ordre : si la premiere rame fait un pris sur la premiere haute lisse, elle fera un laissé sur la seconde, un pris sur la troisieme, & un laissé sur la quatrieme ; la 2e au contraire de la 1re, fera un laissé sur la 1re haute lisse, un pris sur la 2e, un laissé sur la troisieme, & un pris sur la quatrieme ; ainsi des autres rames de lisiere : ces quatre hautes lisses ne portant que les rames que l'on vient d'expliquer, n'ayant besoin que de quelques mailles sur les extrémités, doivent par conséquent laisser un grand vuide entr'elles, qui donne passage à la grande quantité de rames de figure qui vient aboutir sur les différens rouleaux, & à-travers les différentes grilles du porte-rames de devant. Si l'on faisoit de l'ouvrage en plein, c'est-à-dire qui ne représentât qu'un même fond sans aucune figure, il n'y auroit pour lors besoin que des deux lisses A A, fig. 2. dont la seconde C C porteroit en B B, comme la premiere A A, un poids à chacune des quatre extrémités de leurs deux lisserons. Ce poids composé d'un ou de plusieurs fuseaux, serviroit à faire retomber la lisse qui baisse : mais la chaîne D est passée dans ces deux lisses en cette sorte ; le premier brin est passé dans les deux premieres mailles de la premiere lisse ; le second brin est passé dans les deux premieres mailles de la 2e lisse, & toûjours de même de l'une à l'autre ; par conséquent il y auroit toûjours une moitié de la chaîne qui leveroit par le moyen de la lisse dans laquelle cette moitié se trouve ainsi passée : or c'est à-travers ces levées égales que la navette qui porte la trame est lancée ; ce coup de navette qui reçoit sur lui un coup de battant pendant que le pas est encore ouvert, est ce qu'on appelle duite (Voyez DUITE) ; ce pas est fermé par l'ouverture de l'autre, où la même chose se fait encore, & toûjours de même. Cette égalité de répartition de chaîne dont on vient de parler, est bien différente dans les ouvrages figurés, car c'est de la quantité de chaîne plus ou moins considérable qui leve, que dépend la formation des différentes parties de dessein, comme on le voit fig. 4. où a, qui fait la figure, est en-bas, pendant que b, qui fait le fond, leve. Ce pas ainsi ouvert va recevoir le coup de trame de la navette n, qui est de soie, & à l'autre pas où a qui fait la figure sera levé, il recevra le coup de la navette N qui est chargée de deux brins de fil d'or ou d'argent. Mais pourquoi ces deux différentes navettes, l'une de soie & l'autre de filé ? Si lorsque le pas b est ouvert, où presque toute la chaîne est levée, on lançoit la navette N qui porte le filé, ce coup se trouveroit absorbé & comme enseveli sous la grande quantité de soie qui le couvriroit ; & ce seroit presqu'autant de filé de perdu ; au lieu que lorsque le pas de figure sera ouvert, comme a qui fait la figure dans la figure 3. pendant que le fond B est en-bas, le coup de la navette N qui est de filé qui y va être lancé, se trouvera presque tout à découvert. On aura par ces diverses opérations le développé du dessein X : il y a une double nécessité de la seconde navette de soie ; car la soie qu'elle contient occupant bien moins d'espace que le filé, & étant toûjours placée entre deux coups de filé qui en occupent beaucoup plus qu'elle, la liaison du tout est plus aisée à se faire par les coups des battans : dans ce cas où deux navettes sont lancées comme ici l'une après l'autre, l'ouvrier reçoit l'une entre les doigts index & medius, & l'autre navette est reçûe entre ce même medius & l'annulaire, tantôt d'une main tantôt de l'autre : de même, comme il arrive quelquefois, s'il y en avoit trois qui allassent alternativement, il recevroit le troisieme entre l'annulaire & l'auriculaire : il n'en peut conduire davantage, n'ayant que ces trois ouvertures. Lorsqu'il y a plus de navettes, puisqu'il y en a quelquefois jusqu'à 25 ou 26, celles qui ne travaillent pas sont posées jusqu'à leur tour sur le carton. Voyez CARTON.
On trouvera dans cet article beaucoup de choses qui auroient dû faire la matiere d'autant d'articles différens : mais comme on a l'estampe sous les yeux, on a cru devoir traiter sous un même point de vûe tout ce qu'elle renferme : par-là on évite aussi les redites continuelles, presqu'inévitables en traitant une matiere si étendue, & si sujette à la prolixité.
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BRIDE | S. f. (Maréchall.) se dit en général & au propre de tout le harnois de tête du cheval harnaché, & en particulier du mors & des différentes parties qui l'accompagnent, dont voici le nom : l'embouchure, qui est soûtenue en sa place par la monture de la bride ; cette monture est de cuir & a plusieurs parties ; savoir, la têtiere, ou le dessus de tête, qui pose sur le sommet de la tête, derriere les oreilles ; les porte-mors ou les montans de la bride, qui sont deux cuirs qui passent dans les yeux du mors, le soûtiennent à sa place ; chacun a une boucle pour pouvoir hausser ou baisser le mors : le frontail, ou le cuir qui traverse le front au dessus des yeux, & qui est attaché à la têtiere des deux côtés ; il n'a point de boucles ; la sous-gorge, qui part de la têtiere, & dont on entoure la jonction de la gauche au cou, l'ayant attaché à une boucle du côté du montoir : la muserole ou le cuir qui entoure le milieu de la tête du cheval, & se boucle du côté du montoir : enfin les rênes, qui sont deux cuirs, qui d'un bout se bouclent aux anneaux des tourets des branches, & de l'autre sont joints & liés ensemble ; le mors ou fer qui entre dans la bouche du cheval ; la branche, la sous-barbe, qui est une piece de fer qui prend du fonceau au bas du coude de la branche, & ne sert qu'à attacher l'oreille du bas de la bossette aux branches coudées ; les bossettes qui ne servent que d'ornement, & seulement pour cacher le bouquet & le fonceau du mors ; enfin la gourmette, qui est composée de mailles de fer & de deux maillons destinés à entrer dans un crochet, lorsqu'on veut la mettre à sa place. Voyez MORS, BRANCHE, MARTINGALE, &c. Voyez la Pl. de l'Eperonnier.
La main de la bride, c'est la gauche, voyez MAIN. Boiteux de la bride, voyez BOITEUX. Secousse de la bride, voyez SACCADE. Effet de la bride, c'est le degré de sensibilité que le mors cause aux barres du cheval par la main du cavalier. Boire la bride, voyez BOIRE. Donner quatre doigts de bride, voyez DONNER. Mettre la bride sur le cou, voyez METTRE. Rendre la bride, voyez RENDRE. Raccourcir la bride, est la même chose qu'accourcir ; voyez ACCOURCIR. Bride en main, voyez TENIR. Bocher avec la bride, c'est une habitude que quelques chevaux prennent de joüer avec la bride, en secoüant le mors par un petit mouvement de tête, sur-tout lorsqu'ils sont arrêtés. Goûter la bride, se dit lorsque le cheval commence à s'accoûtumer aux impressions de mors.
Bride à abreuver ; on peut mettre à un poulain pour quelques jours la bride à abreuver sans rênes ; après quoi, lui mettre le mors. Il n'y a rien de si utile à la santé des chevaux, que de les tenir avec la bride à abreuver trois ou quatre heures avant que de les monter, & autant de tems après, jusqu'à ce qu'ils soient bien refroidis. Il leur est aussi très-utile de les tenir bridés deux ou trois heures avant & après leur avoir fait prendre quelque remede.
BRIDE : on donne ce nom au figuré à toute piece en général qui sert à retenir ou soûtenir. Ainsi dans une barre de godet, on appelle la bride de la barre la partie qui sert à soûtenir les côtés du godet ou de la gouttiere de plomb. On trouvera dans nos Planches de Serrurerie, plusieurs figures de brides. Voyez l'explication de ces Planches.
BRIDE, (terme d'Arquebusier) c'est un petit morceau de fer plat, échancré sur les bords, un peu plus grand que la noix, reployé en deux parties sur chaque bout, & percé d'un trou où l'on place des vis qui l'assujettissent en-dedans au corps de platine : le milieu de la bride est un peu plus large ; il est percé d'un trou qui reçoit le piveau menu de la noix, & la tient comme en équilibre. Cette bride sert pour soûtenir la noix, & empêcher que le chien n'approche trop près du corps de platine en-dehors. Elle est posée par-dessus la noix, de façon cependant, qu'elle ne la gêne point dans ses différens mouvemens.
* BRIDE, (Bas au métier) on donne ce nom à une partie de soie qui s'étant échappée de dessous le bec d'une aiguille, ou qui n'y étant point entrée, n'a point été employée à former la maille, & qui, au lieu de paroître tissue & de contribuer à la continuité du bas, paroît droite & lâche, & laisse un vuide ou un trou. Ce trou se rebouche en remontant la maille ; pour cet effet on prend la tournille, on fait passer la bride dans son bec ; on transporte cette bride de dessous le bec de la tournille sous le bec de l'aiguille, & l'on acheve à la main ce que la machine auroit dû faire. Voyez MAILLE, TOURNILLE, & BAS AU METIER.
BRIDE, (outil de Charron) c'est une bande de fer plate, pliée en trois, quarrément, dont les deux branches sont percées de plusieurs trous vis-à-vis les uns des autres, pour y placer une cheville de fer, qui va répondre d'un trou dans un autre. Cet outil sert aux Charrons pour assujettir plusieurs pieces de leurs ouvrages ensemble. Voyez la fig. 1. Planche du Charron.
BRIDE à brancard, (outil de Charron) assez semblable, & d'un usage fort analogue au précédent. C'est une bande de fer pliée en trois, dont la partie du milieu peut avoir six ou huit pouces de long, & la partie des deux côtés peut avoir cinq piés de long, sur quatre pouces de large : cela sert aux Charrons pour maintenir le brancard quand ils le montent & l'assemblent. Voyez la fig. 11. Pl. du Charron.
BRIDES, en terme de Fondeur de cloches, sont de grands anneaux de fer de forme parallélogrammatique, qui servent à suspendre la cloche au mouton, par le moyen des barreaux de fer qui traversent les anses de la cloche, & les barreaux de bois & de fer posés en-travers sur le mouton, sur lesquels les brides passent. Voyez la fig. 9. Planche de la Fonderie des cloches, & l'article FONTE des cloches.
BRIDES ; ce sont les extrémités des tuyaux de fer faites en platines, avec quatre écroues dans les angles, pour les joindre & les brider, en y mettant des rondelles de cuivre ou de plomb entre deux, avec du mastic à froid. (K)
BRIDE, BRIDES, termes dont on se sert dans la Manche. Voyez GUERLANDES.
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BRIDER | BRIDER
Se brider bien, se dit du cheval, lorsqu'il a la tête placée comme il faut, c'est-à-dire, qu'il n'a point le nez en-avant, ni en-dessous, ni trop bas. Se brider mal, se dit lorsqu'il tend le nez, ou qu'il l'avance trop. (V)
BRIDER l'ancre, en Marine ; c'est envelopper les pattes de l'ancre entre deux planches, afin d'empêcher que le fer de la patte ne creuse, & n'élargisse le sable ou la vase, lorsqu'on se trouve obligé de mouiller dans un fond où la tenue est mauvaise. (Z)
* BRIDER, terme de Maçonnerie de carriere, brider une pierre ; c'est l'attacher avec le bout du cable de la grande roue, d'où pend le crochet qui doit l'enlever. C'est la forme de la pierre qui détermine celle de la brider ; d'ailleurs les pierres ne se tirent pas autrement des carrieres, que les autres fardeaux.
BRIDER les serres d'un oiseau, en Fauconnerie ; c'est en lier une de chaque main, pour l'empêcher de charrier la proie.
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BRIDGENORTH | (Géog.) petite ville d'Angleterre, dans le Shropshire, sur la Saverne. Long. 15. 5. lat. 52. 34.
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BRIDGETOWN | (Géog.) ville d'Amérique dans l'île de la Barbade, aux Anglois ; elle est forte & bien peuplée. Long. 318. 40. lat. 13. 24.
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BRIDGEWATER | (Géog.) grande ville d'Angleterre, sur le Paret, dans la province de Sommerset, avec titre de comté.
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BRIDLINGTON | (Géog.) petite ville d'Angleterre, dans la province d'Yorck.
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BRIDON | S. m. en terme d'Eperonnier, c'est une seule embouchure, qui se termine par des anneaux, dans lesquels on passe les rênes : on les appelle bridons à la royale, parce que ce fut, dit-on, Louis XIV. qui s'en servit le premier dans une circonstance où la bride de son cheval se cassa. Voyez la fig. 19. Pl. de l'Eperonnier.
BRIDON à l'Angloise, en terme d'Eperonnier, ne differe du bridon à la royale, que par son anneau demi-rond, monté sur un fer rond, & passé dans l'anneau qui termine l'embouchure.
On ne mene les chevaux anglois qu'avec des bridons, & on ne leur met des brides qu'à l'armée. Il n'y a point de cheval sûr ou utile, qui puisse aller avec un bridon, s'il n'est premierement monté avec le mors.
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BRIDPORD | (Géog.) petite ville d'Angleterre, dans la province de Dorset.
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BRIDURE | (terme de Riviere & de Train) perche qui tient avec une longue roüette. Voyez TRAIN & ROUETTE.
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BRIE | (Géog.) pays de France, borné au nord par l'île de France, & le Soissonnois ; à l'orient par la Champagne, & au midi par la Seine. On la divise en haute & basse.
BRIE-COMTE-ROBERT, (Géog.) petite ville de France dans la Brie, à 6 lieues de Paris. Long. 20. 19. 24. lat. 48. 41. 26.
BRIE-COMTE-BRAINE, (Géog.) petite ville de France dans le Soissonnois, au bord de la Vesle, qui se jette près de-là dans l'Aisne.
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BRIECK | (Géog.) pays de la petite Pologne dans le palatinat de Cracovie.
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BRIEF | S. m. terme de Commerce de mer, en usage dans toute la Bretagne, pour signifier l'écrit ou le congé que les maîtres, patrons ou capitaines des vaisseaux sont obligés de prendre des commis des fermes du Roi, dans les ports de cette province. Voyez BREF & BRIEUX. (G)
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BRIEG | (Géog.) ville forte d'Allemagne, capitale d'une principauté de même nom, dans la basse Silésie, à six milles de Breslau. Long. 35. 10. lat. 50. 49.
BRIEG, (Géog.) ville d'Angleterre, dans la province de Galles, remarquable par des bains chauds.
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BRIENNE | (Géog.) petite ville de France en Champagne, près de la riviere d'Aube, avec titre de comté.
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BRIENNON | (Géog.) petite ville de France en Champagne, sur la riviere d'Armançon, dans le Sennonois.
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BRIESCIA | BRESSICI ou BRESCZ, (Géog.) province ou palatinat dans la Lithuanie, borné au nord par les palatinats de Novogrodek & de Troki, à l'occident par ceux de Bielko & de Lublin, au sud par la haute Wolhinie & le palatinat de Chelm, & à l'orient par le pays de Rziczica. La capitale porte le même nom que la province.
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BRIEUX | terme de Commerce usité en Bretagne pour signifier les congés que les maîtres, patrons, ou capitaines de vaisseaux sont obligés de prendre de l'amiral de l'amirauté ou des commis des fermes du Roi. Voyez BREF ou BRIEF, dans le Dictionn. du comm. de Savari, tome I. page 1114. La taxe des droits de brieux, que payent les barques ou vaisseaux, selon leur différent port à Nantes & dans sa prévôté, aussi-bien que pour les sels de Brouage, la Rochelle, Guerande, transportés tant à Nantes & comté Nantois qu'au Croisic. (G)
BRIEUX, (ST.) Géog. ville de France, dans la haute Bretagne, avec un bon havre à une demi-lieue de la mer. Long. 14. 47. lat. 48. 33.
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BRIEY | (Géog.) petite ville de France, dans le duché de Bar, près la riviere de Mance, à huit lieues de Saint-Michel.
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BRIEZEN | (Géog.) ville d'Allemagne dans l'électorat de Brandebourg. Il y a encore une autre ville de ce nom dans la Marche mitoyenne de Brandebourg, sur la riviere de Niepelitz, à 8 milles de Berlin.
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BRIFIER | (terme de Plombier) c'est une bande de plomb, qui fait partie des enfaîtemens des bâtimens couverts d'ardoise. Voyez ENFAITEMENT.
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BRIG-KAUSTEVEN | (Géog.) petite ville d'Angleterre dans la province de Lincoln.
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BRIGADE | S. f. (dans l'Art militaire) partie ou division d'un corps de troupe, soit à pié, soit à cheval, sous le commandement du brigadier. Voyez BRIGADIER.
Le mot brigade est dérivé, si l'on en croit quelques auteurs, du mot latin brigua, brigue, ou intrigue secrette. Ducange le fait venir de brigand, soldat mal discipliné, qui court le pays & le ravage sans attendre l'ennemi ; comme font les armées de Tartares, d'Arabes, &c. On tire encore l'étymologie de brigade, de brigandine, sorte d'armure ; dont on s'est servi autrefois en France. Voyez BRIGANDINE.
L'armée se divise en plusieurs brigades, c'est-à-dire en plusieurs corps particuliers. C'est un certain nombre de bataillons ou d'escadrons destinés à combattre & à faire le service militaire, sous les ordres d'un chef appellé brigadier.
Les troupes d'une même brigade sont sur la même ligne dans l'ordre de bataille, & placées immédiatement à côté les unes des autres ; elles ne sont point de différente espece, mais seulement ou d'infanterie ou de cavalerie.
Le nombre des bataillons ou des escadrons de chaque brigade n'est pas fixé : elles sont quelquefois de six bataillons ; elles ne sont pas toutes égales. Il y en a de plus fortes & de plus foibles ; dans les dernieres campagnes de Flandre, celles d'infanterie étoient de quatre bataillons. Les brigades de cavalerie peuvent aller jusqu'à huit escadrons.
Les brigades suivent entr'elles le rang du premier régiment qu'elles contiennent. Les autres régimens sont regardés comme joints avec le premier, & ne faisant en quelque façon que le même corps. Conformément au rang de ce régiment, on donne aux brigades les postes d'honneur qui lui conviennent. On appelle poste d'honneur à la guerre, celui qui est jugé le plus périlleux ; comme les flancs des lignes sont les endroits les plus exposés & les plus dangereux, on place par cette raison les premieres brigades aux flancs. Le Blond, Essai sur la Castramétation.
BRIGADE, dans l'Artillerie, est une certaine division de l'équipage & du train d'Artillerie, composée ordinairement de dix pieces de canon, & de toutes les différentes munitions nécessaires à leur service. Chaque brigade a un Commissaire provincial, plusieurs commissaires ordinaires & extraordinaires, des officiers pointeurs, &c. (Q)
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BRIGADIE | est un officier qui commande un corps de troupes appellé brigade. Voyez BRIGADE.
BRIGADIER des armées du Roi, est un officier créé du regne de Louis XIV. dont les fonctions sont subordonnées au maréchal de camp.
Le titre de brigadier n'étoit d'abord qu'une commission, & non une charge, ni proprement un grade dans l'armée : mais en 1667, quand la guerre commença, le Roi fit expédier divers brevets de cavalerie dont il honora plusieurs officiers ; & c'est alors que furent institués les brigadiers par brevet. Le Roi ayant été fort satisfait de ces brigadiers de cavalerie, en mit aussi dans l'infanterie l'année suivante, c'est-à-dire en 1668.
Le brigadier d'infanterie dans une bataille est à cheval, pour pouvoir se porter plus vîte aux divers bataillons de sa brigade, dont il doit ordonner tous les mouvemens. Il y a des brigadiers, non-seulement dans la cavalerie légere & dans l'infanterie, mais encore dans les dragons & dans la gendarmerie : ceux de la gendarmerie, au moins ceux qui étoient capitaines-lieutenans des quatre premieres compagnies, précédoient dans les promotions ceux de la cavalerie légere : mais cet usage n'est plus ; il n'est pas nécessaire d'avoir passé par la charge de colonel ou de mestre de camp pour parvenir au titre de brigadier ; le Roi a souvent promu à ce grade des capitaines aux gardes, des officiers de gendarmerie, des officiers des gardes du corps, des officiers des gendarmes de la garde, des officiers des chevaux-légers & des mousquetaires, des officiers d'artillerie, des ingénieurs, & des lieutenans-colonels. Ces officiers font leur chemin comme les autres, c'est-à-dire, que de brigadiers ils deviennent maréchaux de camp & lieutenans généraux par leur service.
Louis XIV. attacha aussi à la qualité de brigadier des honneurs militaires.
Le brigadier qui est logé dans le camp, & y a sa brigade, doit avoir une garde composée d'un caporal & de dix hommes de sa brigade : mais s'il est dans une place sous un autre commandant : il n'a pas même de sentinelle.
Quand le brigadier visite un poste l'officier tient sa garde en haie, sans autres armes que l'épée, & se met à la tête ayant son esponton près de lui.
Un officier, tandis qu'il n'est que brigadier, est pour l'ordinaire obligé de garder son régiment, s'il en avoit avant que d'être parvenu à ce grade : mais il peut le vendre à son profit dès qu'il est fait maréchal de camp.
Par ordonnance du 30 Mars 1668, le Roi donne aux brigadiers d'Infanterie la même autorité sur les troupes d'infanterie, que ceux de cavalerie ont sur celles de cavalerie.
Par celle du 10 Mars 1673, il a été réglé que tout brigadier qui aura lettres de service, commandera à tous colonels ou mestres de camp, tant d'infanterie que de cavalerie : que dans une place fermée celui d'infanterie commandera à celui de cavalerie ; mais dans un lieu ouvert & à la campagne celui de cavalerie commandera à celui d'infanterie.
L'ordonnance du 30 Juillet 1695 y ajoûte le brigadier des dragons, auquel elle donne le même rang qu'à celui de cavalerie, & ordonne qu'ils rouleront ensemble suivant leur ancienneté.
Par ordonnance du premier Avril 1696, il a été réglé que les brigadiers qui auront leur commission du même jour, garderont toûjours, comme colonels, le rang que leur régiment leur donne, & marcheront comme brigadiers suivant l'ancienneté de leur commission de colonels. Et par celle du 20 Mars 1704, sa Majesté expliquant mieux son intention à l'égard des colonels d'infanterie qui ont passé soit dans la gendarmerie, soit dans des régimens de cavalerie ou dragons, elle a ordonné que les brigadiers d'infanterie, de cavalerie ou de dragons, marcheront entr'eux du jour de leur commission de colonels ou de mestres de camp d'infanterie, de cavalerie ou de dragons, sans avoir égard aux changemens des corps, ni au tems où ils seront entrés dans celui où ils se trouveront.
Nonobstant le brevet que le Roi donne aux brigadiers, ils ne servent en cette qualité que par une lettre de service. Ils ont en campagne cinq cent livres par mois de quarante-cinq jours. (Q)
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BRIGAND | S. m. (Hist. mod.) vagabond qui court les campagnes pour piller & voler les passans. On donne quelquefois ce nom aux soldats mal disciplinés qui desolent les pays où ils font des courses, & qui n'attendent point l'ennemi pour le combattre. Ainsi les Hordes des Tartares, & ces pelotons d'Arabes qui insultent les voyageurs dans le Levant, ne sont que des troupes de brigands. On prétend que ce mot vient originairement d'une compagnie de soldats que la ville de Paris arma & soudoya en 1356, pendant la prison du roi Jean ; que toute cette troupe étoit armée de brigandines, sorte de cotte d'armes alors usitée ; & que les desordres qu'ils commirent leur acquirent le nom de brigands, qu'on appliqua ensuite aux voleurs de grand chemin. Borel le dérive de brugue, autre espece d'armure ancienne faite de lames de fer jointes, & dont ces brigands se servoient comme de cuirasses. Juste Lipse le fait venir de bragantes, qui étoient des fantassins. Fauchet en trouve la racine dans brig ou brug, vieux mot Gaulois ou Tudesque, qui signifie un pont ; parce que, dit-il les ponts sont des lieux où l'on détrousse communément les passans. D'autres le tirent d'un nommé Burgand, qui désola la Guienne du tems de Nicolas premier. Et d'autres enfin de certains peuples appellés Brigantins ou Brigands, qui demeuroient sur les bords du lac de Constance, & pilloient tout le monde indifféremment, amis ou ennemis. (G)
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BRIGANDAGE | S. m. (Jurisprud.) est un vol fait à force ouverte, comme le vol sur les grands chemins, ou autre semblable. Il est opposé à filouterie ou larcin. C'est un crime capital. Voyez VOL. FILOUTERIE, LARCIN.
Il se dit aussi, dans un sens figuré, d'extorsions ou concussions dont les particuliers ne peuvent pas se défendre : ainsi l'on dira en ce sens, qu'un gouverneur de province, un traitant, a commis des brigandages crians. (H)
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BRIGANDIN | ou BRIGANTINE, s. f. (Art milit.) espece de corcelet fait de lames de fer, attachées les unes aux autres sur leur longueur par des clous rivés ou par des crochets. Cette armure étoit en usage lors de l'établissement des francs-archers par Charles VII. qui la nomme dans le détail des armes dont ses troupes devoient être armées. (Q)
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BRIGANTES | S. m. pl. (Géog. hist.) nom d'un peuple composé de différentes nations, & soûtenu par des colonies que les anciens Gaulois envoyoient en Espagne, en Portugal, en Italie, en Allemagne, & dans la grande Bretagne. Ce peuple habitoit les lieux les plus élevés de ces pays ; aussi remarque-t-on que les villes qui finissent par brica, briga, bria, sont pour la plûpart situées sur des hauteurs. Voilà un peuple bien singulier. Il étoit dispersé dans différentes contrées, où il conservoit son nom, où il affectoit d'habiter les lieux hauts, & où il étoit entretenu par des colonies.
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BRIGANTIN | S. m. (Marine) c'est un petit vaisseau leger, & ouvert, c'est-à-dire, qui n'a point de pont : il est moins grand pour l'ordinaire que la galiote ; il va à rames & à voiles : on s'en sert pour faire la course. Il a communément douze à quinze bancs de chaque côté pour les rameurs, & un homme à chaque rame. Les corsaires se servent principalement de brigantins à cause de leur légéreté. Tous les matelots y sont soldats, & chacun a son fusil en état, au-dessous de sa rame. (Z)
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BRIGNAIS | (Géog.) petite ville de France dans le Lyonnois sur le Garon, à deux lieues de Lyon.
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BRIGNOLES | (Géog.) ville de France en Provence. Long. 23. 50. lat. 43. 24.
BRIGNOLES, (Géog.) riviere d'Italie dans l'état de Genes.
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BRIGONDIS | (LES) Géog. peuple d'Ethiopie dans la Cafrerie, au nord-oüest du cap de Bonne-Espérance.
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BRIGUEIL | (Géog.) petite ville de France dans la basse Marche, aux confins du Poitou & de l'Angoumois, sur la Vienne.
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BRIGUES | S. f. (Hist. anc.) étoient chez les Romains les démarches que faisoient ceux qui aspiroient aux honneurs pour se faire élire.
Ils alloient vêtus de blanc par toute la ville, & quêtoient des suffrages dans les places & les assemblées publiques ; & c'est en cela que consistoit l'ambitus, mot composé de l'ancienne préposition am, qui signifioit autour, & de ire, aller. Voyez CANDIDAT.
La brigue se faisoit tout ouvertement à Rome, & on y sacrifioit de grandes sommes d'argent : & Cicéron impute à cette cause le taux excessif auquel les intérêts étoient portés de son tems, lesquels rouloient entre quatre & huit pour cent. Cicer. Epist. II. ad Quint. frat. C'étoit plûtôt corrompre les citoyens que les solliciter. La brigue a coûté pour une seule tribu jusqu'à 80729 liv. or il y en avoit trente-cinq ; par où l'on peut juger des sommes immenses que coûtoient les charges à Rome, quoiqu'elles n'y fussent pas vénales. (G)
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BRIHUEGA | (Géog.) petite ville d'Espagne dans la Castille nouvelle, sur la riviere de Trajuna. Il s'y fait un grand commerce de laine.
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BRILINGEN | (Géog.) petite ville d'Allemagne dans la Soüabe, sur le Bujet.
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BRILLANT | LUSTRE, ECLAT, s. m. (Gram.) termes qui sont relatifs aux couleurs, quand ils sont pris au propre & au physique, & qu'on les transporte par métaphore aux expressions, au style, aux pensées ; alors il ne signifie autre chose que de même qu'entre les couleurs il y en a qui affectent plus ou moins vivement nos yeux, de même entre les pensées & les expressions, il y en a qui frappent plus ou moins vivement l'esprit. L'éclat enchérit sur le brillant, & celui-ci sur le lustre : il semble que l'éclat appartienne aux couleurs vives & aux grands objets ; le brillant, aux couleurs claires & aux petits objets ; & le lustre, aux couleurs récentes & aux objets neufs. La flamme jette de l'éclat ; le diamant brille ; le drap neuf a son lustre.
BRILLANT, c'est, parmi les Diamantaires, un diamant taillé dessus & dessous.
Le brillant vû par sa table est composé de quatre biseaux, qui formeroient un quarré sans les coins qui l'arrondissent. Voyez BISEAU, COIN, & TABLE.
BRILLANT, terme de Manége ; un cheval brillant est celui qui exécute son exercice & ses airs de manege avec un feu & une vivacité qui ébloüit, pour ainsi dire, les yeux des spectateurs. (V)
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BRILLE | (LA) Géog. ville maritime de la province d'Hollande, dans l'île de Voorn. Elle est fortifiée, & a un bon port près de l'embouchure de la Meuse. Long. 21. 51. lat. 51. 53.
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BRILON | (Géog.) petite ville d'Allemagne dans le cercle de Westphalie, appartenante à l'électeur de Cologne.
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BRIMBAL | ou BRINGUEBALE, s. f. (Fontain.) est la barre ou la verge qui fait joüer une pompe. Ce mot est un peu vieilli ; & il convient mieux de dire la tringle de fer qui est attachée d'un bout à la manivelle, & de l'autre au piston qui fait son jeu dans le corps de la pompe. (K)
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BRIMO | S. f. (Myth.) c'étoit un des noms de Proserpine ; il signifie terreur : il vient de , j'épouvante. Les anciens croyoient que les terreurs nocturnes venoient de Proserpine.
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BRIN | S. m. se dit en général de toute petite portion d'un corps foible & long ; ainsi on dit un brin de soie : Il se dit même quelquefois aussi d'un corps long & menu, comme un brin de paille.
BRIN de fougere, terme d'Architecture, sorte de pan de bois. Voyez PAN DE BOIS. (P)
BRIN ; les Artificiers appellent ainsi une tringle de bois de trois à quatre pouces de grosseur, sur laquelle on arrange les pots à feu, en les plantant par le moyen des chevilles attachées à leurs bases, dans les trous pratiqués le long de cette tringle.
BRIN, (Corderie ou Econom. rustiq.) on appelle ainsi les filamens du chanvre, sur-tout quand ils ont été affinés & peignés. Les filamens les plus longs qui restent dans les mains des peigneurs s'appellent le premier brin : on retire du chanvre qui est resté dans le peigne des filamens plus courts, qu'on appelle le second brin, le reste de l'étoupe qui sert à d'autres usages.
BRIN, en terme d'Eventailliste, c'est une de ces petites fleches qui forment ces especes de rayons de bois, d'ivoire, &c. qu'on voit aux éventails, qui en soûtiennent le papier, & qui se réunissent par leur extrémité comme à un centre où ils sont unis par un clou. Voyez fig. 4. Pl. de l'Eventailliste.
BRIN, maître brin, (terme d'Eventailliste) ce sont deux longs montans de bois, d'écaille, d'ivoire, &c. auxquels sont collées les deux extrémités du papier d'un éventail, & entre lesquels les fleches sont resserrées. Voyez éVENTAIL. Voyez les fig. 22. & 24. Pl. de l'Eventailliste.
BRIN, (Jardinage) on dit un arbre d'un beau brin, c'est-à-dire, d'une belle venue, d'une tige droite & unie, soit que ce soit un arbre fruitier ou sauvage.
En fait de Charpente, on dit une poutre, une solive de brin, quand la piece est prise dans le montant de l'arbre, & non dans les branches. (K)
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BRINDE | ou BRINDISI, (Géog. anc. & mod.) ville du royaume de Naples, dans le pays d'Otrante, près le golfe de Venise, avec un des meilleurs ports d'Italie. Long. 34. 40. lat. 40. 52. C'étoit le Brundusium des anciens.
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BRINDILLE | S. f. (Jardinage) est un petit rameau de bois que la tige d'un arbre a poussé. (K)
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BRINDONES | S. m. pl. (Hist. nat. bot.) fruit qui croît aux Indes orientales à Goa : il est rougeâtre en-dehors, d'un rouge de sang en-dedans, & d'un goût très-aigre. Il conserve toûjours sa couleur intérieure : quant à son goût, il perd quelquefois de son acreté, à mesure qu'il mûrit ; il devient aussi noirâtre à l'extérieur. Il y a des personnes qui l'aiment. Il sert aux Teinturiers. On conserve son écorce ; Ray dit qu'on l'employe en Portugal à faire du vinaigre. Cette description est si imparfaite, qu'il n'est pas possible de deviner si le fruit décrit est de l'espece des poires, des pommes, des pêches, des cerises, &c.
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BRINGUE | S. f. se dit, en Manege, d'un petit cheval d'une vilaine figure, & qui n'est point étoffé.
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BRINN | (Géog.) ville forte d'Allemagne, en Moravie, au confluent des rivieres de Schwart & de Schwitt. Long. 24. 43. lat. 49. 8.
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BRINNITZ | (Géog.) riviere d'Allemagne, dans la Silésie, qui se jette dans l'Oder.
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BRIOLON | (Géog.) petite ville forte de la Valachie, sur le Danube.
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BRIO | ou RINGEAU, s. m. (Marine) c'est la piece du haut de l'étrave, ou son allonge, lorsque l'étrave est de deux pieces : il vient à la hauteur de l'éperon. Les Hollandois ne font pas d'étrave de deux pieces. Voyez la Pl. IV. fig. 1. n°. 2. la situation de la piece de bois appellée brion, posée entre la quille 1. & l'étrave 3. (Z)
BRION, (Géog.) île de l'Amérique septentrionale, au Canada.
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BRIONI | (Géog.) c'est le nom de trois îles de la mer Adriatique, qui appartiennent aux Vénitiens, sur la côte orientale de l'Istrie.
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BRIONNE | (Géog.) ville de France, avec titre de comté, dans la province de Normandie, sur la Rille. Long. 18. 26. lat. 49. 35.
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BRIOUDE | (Géog.) ville de France, dans la basse Auvergne : il y en a deux ; l'une s'appelle la vieille, & l'autre, qui est la nouvelle, s'appelle Brioude l'Eglise. La vieille Brioude est sur l'Allier : il y a un chapitre de chanoines, qui sont obligés de faire preuve de noblesse pour y être admis. On les appelle les comtes de Brioude. Long. 21. lat. 45. 14.
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BRIQUAILLON | S. m. pl. les Fondeurs appellent ainsi les vieux morceaux de brique, dont on remplit tout l'espace renfermé par le mur de recuit. On met les plus petits contre le moule, pour le garantir de la violence du feu, & les plus gros contre le mur de recuit. Voyez leur usage au mot FONDERIE en bronze ou des statues équestres.
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BRIQUE | S. f. sorte de pierre factice, de couleur rougeâtre, composée d'une terre grasse, pétrie, mise en quarré long dans un moule de bois, & cuite dans un four, où elle acquiert la consistance nécessaire au bâtiment. Voyez PIERRE, TUILE.
Il paroît que l'usage de la brique est fort ancien. Les premiers édifices de l'Asie, à en juger par les ruines, étoient de briques séchées au soleil ou cuites au feu, mêlées de paille ou de roseaux hachés & cimentés de bitume. C'est ainsi, selon la Se. écriture, que la ville de Babylone fut bâtie par Nemrod. Les murs célebres dont Semiramis la fit enclorre, & que les Grecs compterent au nombre des merveilles du monde, ne furent bâtis que de ces matériaux. Voici comment un de nos plus exacts voyageurs parle des restes de ces murs : " A l'endroit de la séparation du Tigre, nous vîmes comme l'enceinte d'une grande ville.... Il y a des restes de murailles si larges, qu'il y pourroit passer six carrosses de front : elles sont de briques cuites au feu. Chaque brique est de dix pouces en quarré, sur trois pouces d'épaisseur. Les chroniques du pays assûrent que c'est l'ancienne Babylone, " Tav. voyag. du Lev. liv. II. ch. vij. D'autres parlent d'une masse d'environ trois cent pas de circuit, située à une journée & demie de la pointe de la Mésopotamie, & à une distance presqu'égale du Tigre & de l'Euphrate : & qu'on prend pour les ruines de la fameuse tour de Babel ; ils disent qu'elle est bâtie de briques séchées au soleil, qui est très-ardent dans ces quartiers ; que chaque brique a dix pouces en quarré, sur trois pouces d'épaisseur ; que chaque lit de briques est séparé par un lit de cannes ou de roseaux concassés & mêlés avec de la paille de blé, de l'épaisseur d'un pouce & demi, & que d'espace & espace, où l'on avoit besoin de forts appuis, on remarque d'autres briques des mêmes dimensions que les précédentes, mais cuites au feu, plus solides & maçonnées avec le bitume.
Il reste encore dans l'Arménie, dans la Géorgie, & dans la Perse, plusieurs anciens édifices bâtis des mêmes matériaux. A Tauris, autrefois Ecbatane, à Kom, à Teflis, à Erivan, & ailleurs, les vieilles maisons sont de briques.
Pendant plusieurs siecles les autres parties du monde ne furent pas plus magnifiques en édifices. L'usage de bâtir de briques composées de terre mêlée de pailles menues, qui avoit commencé dans l'Asie, passa en Egypte. Ce travail pénible fut un des moyens dont l'un des Pharaons se servit pour opprimer les Israélites. Les Grecs prirent aussi cette maniere de bâtir, des Orientaux. Vitruve, qui vivoit sous le regne d'Auguste, dit qu'on voyoit encore de son tems dans Athenes l'Aréopage bâti de terre & couvert de chaume.
Rome dans son origine & pendant les quatre premiers siécles de sa fondation, n'étoit qu'un amas informe de cabanes de briques & de torchis. Les Romains prirent dans la suite des Toscans, la maniere de bâtir avec de grosses pierres massives & quarrées. Vers les derniers tems de la république, ils revinrent à la brique. Le panthéon & d'autres grands édifices en furent construits. Sous Galien, on formoit les murs alternativement d'un rang de brique & d'un rang de pierre tendre & grise.
Les Orientaux faisoient cuire leurs briques au soleil : les Romains se servirent d'abord de briques crues, seulement séchées à l'air pendant quatre à cinq ans. Les Grecs avoient trois sortes de briques ; la premiere qu'ils appelloient didoran ou de deux palmes ; la seconde, tetradoran ou de quatre palmes ; & la troisieme, quintadoran ou de cinq palmes. Outre ces briques de jauge, ils en employoient de plus petites de moitié qui servoient de liaison & ornoient leurs édifices par la diversité des figures & des positions.
Les briques parmi nous ont différens noms, pris de leurs formes, de leurs dimensions, de leur usage, & de la maniere de les employer.
La brique entiere de Paris, est ordinairement de huit pouces de long sur quatre de large & deux d'épais.
La brique de Chantignole ou demi-brique, n'a qu'un pouce d'épais, les autres dimensions comme la brique entiere.
On appelle briques en liaison, celles qui sont posées sur le plat, liées, moitié par moitié, les unes sur les autres, & maçonnées avec plâtre & mortier.
Briques de champ, celles qui sont posées sur leur côté pour servir de pavé.
Briques en épi, celles qui sont placées sur l'angle diagonalement en maniere de point d'Hongrie ; tel est le pavé de Venise.
La brique de Chantignole ou demi-brique, sert entre des bordures de pierre aux autres & aux contre-coeurs de cheminée.
Maniere de faire la brique. Ne prenez ni terre areneuse ou graveleuse, ni bourbiers sablonneux ; ces matieres pesent trop & ne résistent point à la pluie. Si vous trouvez de la terre blanche qui tienne de la craie, de la terre rouge, ou même du sablon mâle rouge, servez-vous en : vos briques seront fermes & légeres ; deux conditions essentielles. Choisissez pour ce travail la saison qui convient le mieux pour faire sécher. En un mot, ayez de bonne argille, qui ne soit pas sablonneuse, ou de la terre courte, moins forte que la terre grasse ; ou si vous avez de l'argille & de la terre courte, faites-en un mélange en parties égales. Trempez votre mélange sans le noyer ; remuez-bien ; délayez avec une pelle ; & battez avec la tête d'un piquoir ou d'une houe : plus vous battrez, meilleure sera votre brique. Ayez des moules ou cadres de bois de la dimension intérieure que vous voulez donner à votre brique : mouillez-les : saupoudrez-les d'un peu de sable bien sec, afin que la matiere de vos briques ne s'y attache pas : remplissez les de terre : foulez la terre avec les mains : ayez ensuite un gros bâton rond ; achevez de presser la terre dans des moules, en faisant passer ce bâton fortement sur cette terre, que ce bâton soit poli & mouillé afin que la terre ne s'y prenne pas : cela fait, prenez votre moule & déchargez-le de plat dans un lieu bien uni : recommencez la même manoeuvre, saupoudrant le moule & foulant la terre avec les mains & le bâton : laissez sécher vos briques au soleil ; quand elles seront à demi seches, taillez-les, c'est-à-dire enlevez avec un couteau tout ce qui nuiroit à la régularité de la figure. Quand il est important que les briques soient bien régulieres, on a pour cette opération un nouveau moule de la forme même de la brique, seulement un peu plus petit ; mais n'ayant que deux côtés disposés en équerre : on applique la brique entre ces deux côtés, les deux autres dirigent le couteau. Quand on a taillé deux côtés, on taille les deux autres de la même maniere, & l'on a par ce moyen des briques bien équarries & bien égales entr'elles. Quand vos briques seront taillées, posez-les sur le côté deux à deux, à la hauteur d'un pié & demi : formez-en des rangées ; mettez de l'espace entre chaque rangée, & laissez les sécher. Ayez un four, & disposez-y vos briques de maniere qu'elles puissent être bien pénétrées par le feu, ou faites les cuire en plein air ; car il y a ces deux manieres de cuire la brique ; mais la premiere est la meilleure. Le four n'a rien de particulier ; i il est à grande volée ou à l'ordinaire, seulement de moitié plus grand que celui du Potier. On met les briques dans le four : on le ferme : on y met du bois : on fait un feu médiocre, jusqu'à-ce que la fumée du fourneau, d'un blanc obscur qu'elle paroîtra, devienne noire ; alors on cesse de mettre du bois ; on continue seulement d'entretenir la chaleur avec des fagots, de la paille, des genêts, &c. jusqu'à ce que le four paroisse blanc, & que la flamme s'éleve jusqu'au haut de la cheminée. Quand on a fait durer cette chaleur pendant quelque tems, on la ralentit, & on laisse refroidir le four par degrés. On réitere la même opération, échauffant le four, & le refroidissant alternativement jusqu'à ce que la brique paroisse avoir été bien pénétrée par le feu, ce qui n'est guere possible qu'au bout de quarante-huit-heures.
Les bons fours sont en voûte, & les bons ouvriers disposent les briques de maniere qu'elles laissent entr'elles des vuides entre lesquels la flamme puisse s'insinuer. Voici comment on s'y prend, on place les briques les unes sur les autres ; ensorte qu'elles empiétent pour se soûtenir : mais on laisse entre chacune le plus d'espace qu'on peut ; ensorte que la masse totale est proprement construite tant vuide que pleine. Elle ne doit pas remplir entierement le four, mais laisser aux deux côtés & sur le devant un espace nécessaire pour les matieres combustibles. On couvre cet espace d'un lit de bois ; on place sur ce lit une couche de charbon. On ne manque pas non plus d'insérer dans tous les vuides des briques, du charbon, & du petit bois ; il arrive de-là qu'en un moment toute la masse est pénétrée de flamme : on renouvelle ce feu, autant qu'il est nécessaire ; & on ne le laisse entierement éteindre, que quand on juge la brique cuite.
Voilà la maniere d'avoir de la brique assez bonne : mais il y a apparence qu'on l'auroit beaucoup meilleure, si les ouvriers y apportoient les précautions suivantes : 1°. n'employer à faire la brique, que la terre qui auroit été tirée & retournée au moins une fois, entre le premier de Novembre & le premier de Février ; 2°. ne la façonner en brique qu'au premier de Mars, & cesser au 29 Septembre ; 3°. n'y mêler rien qui puisse la détériorer ; 4°. y ajoûter une certaine quantité de cendre de charbon criblée & passée au tamis fin ; 5°. nommer des gens pour visiter les fourneaux, les briques & les terres qu'on y employe ; 6°. faire battre par des hommes, & fouler la terre par des animaux, avant que de l'employer ; 7°. y faire mettre du sable, quand elle est d'une nature trop molle ; 8°. faire tremper la brique dans l'eau, après qu'elle auroit été cuite une premiere fois, & la remettre au feu, elle en acquerroit le double de dureté ; 9°. veiller à ce qu'avant de les mettre au four, elles ne soient point exposées à sécher à un trop grand soleil ; 10°. les garantir pareillement du trop grand soleil en été, en les couvrant soit de paille soit de sable. Il y auroit encore un grand nombre d'autres précautions à prendre pour faire la brique si bonne, qu'elle seroit peut-être plus durable que la pierre même : mais à quoi bon les indiquer ? le commerce & la fabrication de la tuile sont libres ; & il n'y a point de regles prescrites, ni à l'ouvrier, ni au marchand, ni à l'acheteur. On se plaint que nos ouvrages en maçonnerie n'ont pas la force de ceux des anciens, & l'on ne voit pas qu'ils prenoient pour les faire durer, toutes les précautions qu'ils imaginoient nécessaires, au lieu que nous n'en prenons aucune.
Il nous vient de la brique de Bourgogne, de Melun, & de Corbeil ; celle de Bourgogne passe pour la meilleure : il faut la choisir bien cuite, sonnante & colorée. Elle s'achete au millier : on ne peut rien statuer sur son prix. Elle a valu d'abord dix liv. le millier, puis quinze ; & il y a apparence qu'elle vaut davantage, & qu'elle augmentera de prix à mesure que les matieres combustibles deviendront plus rares. Ceux qui ont de grands bâtimens de brique, soit à faire, soit à entretenir, épargneront beaucoup à loüer des ouvriers qui la travaillent sur leur terre : ils leur donneront quarante-cinq à cinquante sous par jour, ou plûtôt ils les payeront à raison de trois liv. pour chaque mille de briques bonnes & entieres après la cuisson. On leur fournit le bois à raison de vingt-cinq cordes pour trente milliers de briques cuites en plein air. Il faut un quart de bois de moins dans une briqueterie, ou four fait exprès : plus le four a servi, plus il s'échauffe facilement.
Un commentateur de Vitruve voudroit qu'on donnât aux briques la forme d'un triangle équilatéral, dont chaque côté eût un pié de long, sur un pouce & demi d'épais. Il prétend que ces briques s'employeroient plus commodément, coûteroient moins, & seroient plus solides & d'une plus belle apparence : elles ajoûteroient, dit-il, de la force & de la grace, sur-tout aux angles d'un ouvrage dentelé. M. Wotton s'étonne avec raison de ce qu'on a négligé l'avis du commentateur de Vitruve.
La brique est d'usage en Medecine ; on la fait chauffer, & on l'employe sur différentes parties du corps ; on en met quelquefois sur les cataplasmes pour les tenir chauds.
L'huile de brique, autrement appellée l'huile des philosophes, se fait comme il suit. On éteint des briques chaudes dans de l'huile d'olive, & on les y laisse jusqu'à ce qu'elles en ayent pris toute l'huile : on les distille ensuite par la retorte, & on retire l'huile que l'on sépare de l'esprit.
Cette huile est chargée de particules ignées, & de l'acide de la brique ; ainsi elle est résolutive, carminative, calmante, & bonne à l'extérieur dans les embrocations, & les linimens pour les tumeurs froides. (N)
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BRIQUET | S. m. c'est une sorte de couplet, à queue d'aronde, dont les deux parties sont jointes par un double anneau qui se place au milieu des deux noeuds des aîles, & qui y est retenu par deux broches qui traversent les noeuds de ces aîles ; de maniere que les deux aîles en tournant peuvent s'appliquer exactement l'une sur l'autre ; ce qui n'arrive pas aux autres sortes de couplets, à cause de l'éminence des noeuds. Comme le double anneau est plat par-dessus ; il ne paroît aucun noeud, lorsque les aîles sont étendues & déployées. Son usage est principalement aux tables de comptoirs, & à toutes les occasions où l'on veut que les surfaces se plient, & soient sans noeuds de charniere. Voy. Pl. de Serrurerie, & leur explicat.
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BRIQUETER | v. act. (terme d'Architecture) c'est contrefaire la brique sur le plâtre avec une impression de couleur d'ocre rouge, & y marquer les joints en plâtre.
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BRIQUETERIE | S. f. (en Architecture) voyez TUILERIE. (P)
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BRIQUETIER | S. m. ouvrier manufacturier de briques. Voyez BRIQUE & TUILE.
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BRIS | S. m. est un terme de Palais, qui signifie la rupture faite avec violence d'une chose fermée, ou de ce qui en fait la clôture ; c'est en ce sens qu'on dit bris de prison, bris de porte, bris de scellé.
Par l'article 25 du titre XVII. de l'Ordonnance criminelle, le procès doit être fait à l'accusé pour le crime du bris de prison par défaut & contumace.
Le bris de prison de la part d'un accusé, n'est pas regardé comme une confession décisive de son crime ; mais c'est un fort indice, qui seroit suffisant pour le faire appliquer à la question, s'il venoit à être repris.
C'est un crime dans la personne même de celui qui se trouveroit avoir été emprisonné sans cause légitime. Les complices du bris de prison sont punis encore plus sévèrement que le prisonnier qui cherche à s'évader. La peine de ce crime est arbitraire ; parce qu'il est toûjours accompagné de circonstances qui le rendent plus ou moins grave.
Le bris de scellé est un crime, & se poursuit extraordinairement. Voyez SCELLE.
BRIS de marché, est le vol des marchandises qu'on porte au marché, ou un monopole pratiqué à l'effet d'empêcher la vente du marché, ou toute autre entreprise violente faite dans la vûe d'empêcher le port ou le débit des marchandises dans les marchés. (H)
BRIS ou NAUFRAGE, (terme de Marine) Ce mot de bris se dit des vaisseaux qui échouent, ou qui viennent se briser sur les côtes ; d'où l'on dit droit de bris. C'est un droit qui appartient au seigneur du lieu où s'est fait le bris. C'est le droit le plus injuste & le plus universel qui soit au monde. Les anciens Gaulois l'avoient établi, parce qu'ils traitoient d'ennemis tous les étrangers. Les Romains en ayant abrogé l'usage, il fut rétabli sur le déclin de l'empire, à cause de l'incursion des nations du nord qui ravageoient les côtes de la Gaule. Enfin les ducs de Bretagne sollicités par saint Louis, modérerent cette rigueur ; & moyennant quelque taxe, ils accorderent des brefs ou congés que prenoient ceux qui avoient à naviger sur leurs côtes. Ce bris n'a plus de lieu en France, non plus qu'en Italie, en Espagne, en Angleterre, & en Allemagne, si ce n'est contre les pirates & contre les ennemis de l'état. L'empereur Andronic fut le premier qui, par un édit qu'on exécuta, fit défense de piller les vaisseaux brisés ou échoüés ; ce qu'on faisoit auparavant avec beaucoup de rigueur sur toutes les côtes de l'empire, nonobstant les défenses des princes qui l'avoient précédé. (Z)
BRIS, (terme de Blason) se dit d'une de ces happes de fer à queue patée, dont l'usage est de soûtenir les portes sur leurs pivots, & de les faire rouler sur leurs gonds ; & comme la plûpart des fenêtres & des portes sont brisées en deux par le moyen de deux de ces happes, dont les bouts entrent en pivot l'un dans l'autre, on les nomme bris. Les vieux blasonneurs appellent bris d'huis, les pivots sur lesquels se meuvent les portes ou fenêtres brisées, quand ils sont representés sur l'écu. (V)
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BRISACH | (le vieux) Géog. ville d'Allemagne, autrefois capitale du Brisgaw, sur le Rhin. Long. 25. 28. lat. 48. 8.
BRISACH, (le neuf) ville de France en Alsace, à une demi-lieue du Rhin ; elle est bien fortifiée. Long. 25. 21. lat. 48. 5.
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BRISANT | BRISANS, s. m. (Marine) sont des pointes de rochers qui s'élevent jusqu'à la surface de l'eau, & quelquefois au-dessus, ensorte que les houles y viennent rompre ou briser. Sur les cartes marines ils sont représentés par de petites croix figurées ainsi suivant leur étendue & leur situation.
On appelle aussi brisant, le rejaillissement de la mer contre des rochers élevés, ou contre une côte escarpée sur laquelle ses vagues sont portées. (Z)
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BRISE | S. f. (Architect. Hydrauliq.) c'est une poutre en bascule, posée sur la tête d'un gros pieu, laquelle sert à appuyer par le haut les aiguilles d'un pertuis. (K)
BRISE-COU, s. m. (Man.) on appelle ainsi un jeune homme hardi & de bonne volonté, à qui on fait monter les poulains & les jeunes chevaux, pour commencer à les accoûtumer à souffrir l'homme. (V)
BRISE-GLACE, s. m. (Architecture) c'est devant une palée de pont de bois du côté d'amont, un rang de pieux en maniere d'avant-bec, lesquels sont d'inégales grandeurs, ensorte que le plus petit sert d'éperon aux autres, & tous sont recouverts d'un chapeau incliné sur le devant, pour briser les glaces & conserver les palées. (P)
BRISE-VENTS, s. m. (Jard.) est une clôture faite avec des paillassons ou des pieux mis le long d'une couche garnie de paille longue bien liée avec de l'osier, pour garantir des vents froids les plantes qu'on y a semées. (K)
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BRISÉ | adj. en termes de Blason, se dit des armoiries des puînés & cadets d'une famille, où il y a quelque changement par addition, diminution, ou altération de quelque piece pour distinction des branches. Il se dit encore des chevrons dont la pointe est déjointe, comme celle de Viole. C'est une erreur d'appeller les autres brisés.
Viole à Paris, d'or à trois chevrons brisés de sable. (V)
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BRISÉE | S. m. (Salines) c'est une opération qui consiste à détacher la sangle qui soûtient la chevre, ôter les rouleaux, faire sauter le pivot d'un coup de massue, & donner du mouvement à la chevre, afin qu'elle coule par son propre poids, & se renverse sur le seuil du banc. Elle se fait par un ouvrier, en présence du contrôleur des cuites, de celui qui est de semaine pour ouvrir les bancs, & d'autres employés. Elle se fait des deux côtés en même tems ; car la poele est chargée de deux chevres égales. Voyez CHEVRE, BANC, CUITE, & SALINE.
BRISEES, en Vénerie, se dit des marques faites aux arbres sur les voies d'une bête.
Les brisées sont fausses, quand les marques éloignent de la voie ; on en pratique quelquefois pour tromper son compagnon.
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BRISER | ROMPRE, v. n. (Mar.) La mer brise, c'est-à-dire la mer, la lame, la vague vient frapper avec violence & se briser contre la côte, contre des rochers, ou sur un banc de sable. Lorsqu'on voit la mer briser, c'est marque de danger sous l'eau, qu'il faut éviter. (Z)
BRISER, parmi les Cardeurs, c'est démêler la laine & la rendre comme du chanvre sans aucuns flocons, en la passant & repassant plusieurs fois sur les droussettes.
BRISER, en termes de Blason, signifie charger un écu de brisure, comme lambel, bordure, &c. C'est ce que font les cadets pour être distingués des aînés qui portent les armes pleines. (V)
BRISER, en Vénerie, c'est marquer la voie d'une bête par des branches rompues. Briser bas, c'est rompre des branches & en jetter sur les voies. On dit ; nous brisâmes bas, quand nous eûmes remarqué que le cerf étoit passé. La pointe des branches fait voir d'où la bête vient, & le gros bout indique où la bête va.
Briser haut, c'est rompre les branches à demi-hauteur d'homme, & les laisser pendre au tronc de l'arbre.
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BRISEUS | (Myth.) surnom de Bacchus, qui lui venoit ou de celui de Brisis sa nourrice, ou du mot bris, relatif à l'usage du miel & du vin, dont on lui attribuoit la premiere invention, ou de Brisa, promontoire de l'île de Lesbos, où il avoit un temple.
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BRISGA | (LE), Géog. pays d'Allemagne, dans le cercle de Soüabe, qui est séparé de l'Alsace par le Rhin. Il appartient à la maison d'Autriche.
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BRISIGHELLA | (Géog.) petite ville d'Italie dans la Romagne, dépendante des états de l'église.
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BRISIS | S. m. se dit, en Architecture, de l'angle qui forme un comble brisé, c'est-à-dire la partie où se vient joindre le faux-comble avec le vrai, comme sont ceux à la mansarde, aussi ce nom n'est-il usité que dans cette sorte de couverture. (P)
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BRISSAC | (Géog.) petite ville de France en Anjou, sur la riviere d'Aubence, avec titre de duché-pairie, à quatre lieues d'Angers.
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BRISTADT | (Géog.) petite ville d'Allemagne en Franconie, dans le marggraviat d'Anspach.
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BRISTOL | (Géog.) grande ville d'Angleterre fort commerçante sur la riviere d'Avon, avec titre de comté : elle est en partie dans la province de Sommerset, & est en partie dans celle de Glocester renommée par la bonté des eaux minérales qui s'y trouvent. Long. 15. lat. 51. 17.
BRISTOL (la nouvelle), Géog. ville de l'Amérique septentrionale dans l'île de la Barbade. Elle appartient aux Anglois.
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BRISURE | BRISURE
BRISURE, s. f. terme de Blason, piece ou figure qu'on ajoûte aux armoiries, pour distinguer les cadets & les bâtards d'avec les aînés & les fils légitimes. Telles sont le lambel, la cotice, le bâton, &c. Voyez ces mots à leur lettre.
* BRISURE, se dit, dans plusieurs Arts méchaniq. d'une forme donnée à une ou plusieurs parties d'un tout, en conséquence de laquelle on peut les séparer, les réunir, les fixer dans une direction rectiligne, les disposer en angle, en plier les parties les unes sur les autres, les raccourcir, les étendre, &c. C'est dans l'un de ces sens qu'on dit, un compas brisé, un fusil brisé, une regle, &c.
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BRITANNIQUE | adj. (Géog. anc.) nom que les anciens géographes donnent à la mer qui s'étend entre l'Angleterre & la France, & que les modernes nomment la Manche. Ce nom lui vient de la grande Bretagne dont les terres resserrent d'un côté l'Océan Britannique.
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BRITIOGA | (Géog.) petite île de l'Amérique méridionale sur les côtes du Bresil. Elle appartient aux Portugais, qui y ont bâti un fort qui défend le port de Saint-Vincent qui est vis-à-vis.
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BRIVE | BRIVE
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BRIVIO | (Géog.) petite ville d'Italie, dans le duché de Milan, sur la riviere d'Adda.
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BRIX | (Géog.) ville de Bohème, à deux milles de Toplitz, & à dix de Prague.
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BRIXEN | (Géog.) grande ville & évêché d'Allemagne, entre le Tirol, l'évêché de Trente, & le territoire des Vénitiens : l'évêque en est souverain, & est un des états immédiats de l'empire. Long. 29. 25. lat. 46. 35.
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BRIXENSTADT | (Géog.) ville d'Allemagne en Franconie, à neuf milles d'Anspach.
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BRIZO | S. f. (Myth.) déesse des songes, adorée autrefois dans l'île de Delos. On lui offroit des nacelles pleines de toutes sortes d'offrandes, dont il n'y avoit que les poissons d'exceptés. Brizo vient de , dormir. Les songes qu'envoyoit Brizo étoient des oracles ; & ceux qui avoient fait une heureuse navigation, croyoient lui en devoir une action de grace.
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BRO | (Géog.) riviere de la Prusse Polonoise, qui se jette dans la Vistule.
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BROAD | (Géogr.) c'est le nom d'un lac d'Irlande dans la province d'Ulster, dans lequel se trouvent plusieurs petites îles.
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BROC | S. m. (Commerce) mesure des liquides qui contient environ deux pintes de Paris. On l'appelle en quelques endroits une quarte, en d'autres un pot. Voyez QUARTE & POT. (G)
BROC, (Géogr.) ville du royaume de Pologne, dans le palatinat de Mazovie.
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BROCALO | (Géogr.) petit royaume d'Afrique en Nigritie, à l'embouchure du Niger.
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BROCANTER | v. n. (Commerce) terme particulierement en usage à Paris chez les curieux, les Peintres, ou parmi quelques marchands merciers, pour dire acheter, revendre ou troquer des tableaux, des cabinets, des bureaux, des bronzes, tables, figures de marbre, peintures, porcelaines, pendules, paravents, & autres semblables marchandises, meubles ou curiosités. (G)
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BROCANTEUR | S. m. (Commerce) se disoit dans le sens propre de celui qui faisoit profession d'acheter des tableaux pour les revendre : ce commerce étoit anciennement fort à la mode en Italie. Les marchands génois, vénitiens, & florentins, commandoient au Guide, aux Carraches, & à d'autres excellens peintres, des tableaux qu'ils achetoient de la premiere main, & qu'ils revendoient ensuite en France, en Allemagne, & même en Turquie. Mais aujourd'hui le mot de brocanteur ne convient qu'à ceux qui font commerce des choses concernant la curiosité, comme vases, médailles, bronzes, tableaux, mais particulierement des tableaux des anciens peintres, dont ils savent se défaire, non suivant leur valeur, mais suivant le degré d'entêtement qu'on a pour eux. (R)
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BROCARD | S. m. (Morale) espece de raillerie grossiere, maligne, & insultante. Le brocard est, à proprement parler, une injure plûtôt qu'une raillerie. La raillerie, tant qu'elle ne sort point des bornes que lui prescrit la politesse, est l'effet de la gaieté & de la legereté de l'esprit. Elle épargne l'honnête homme ; & le ridicule qu'elle attaque est souvent si leger, qu'elle n'a pas même le droit d'offenser. Mais le brocard annonce un fond de malignité ; il offense & ulcere le coeur. La raillerie exige beaucoup d'esprit dans ceux qui la manient, sans quoi elle dégénere en brocard, pour lequel tout homme a toûjours assez d'esprit. Voyez RAILLERIE. (X)
* BROCARD, (Manufacture en or, argent, & soie) terme générique, sous lequel on comprend communément toutes les étoffes riches ou fonds d'or. Les ouvriers & fabriquans se servent préférablement des termes fond or, fond argent, &c. tissu, lustrine, &c. & ils entendent par brocards, fonds or, argent, &c. une étoffe d'or, d'argent, & de soie, relevée de fleurs, de feuillages, ou d'autres ornemens, suivant le goût du marchand & des ouvriers. Ils ne mettent d'autre différence entre les brocards & les fonds or & argent, qu'en ce que les brocards supposent plus de richesse, & que tout ce qui s'en présente à l'endroit est or ou argent, à l'exception de quelques legeres découpures ; au lieu que dans les fonds or & argent, on y voit des parties exécutées en soie.
Les brocards ou fonds or & argent, n'exigent pas un autre métier que celui dont on se sert communément. Nous parlerons à l'art. VELOURS A JARDIN, des variétés qui surviennent dans les parties, la disposition & le montage du métier, selon les différens ouvrages qu'on se propose d'exécuter. Nous renvoyons à cet article plûtôt qu'à un autre, parce que l'ouvrage que nous y expliquerons, demande un métier très-composé, & qu'il ne s'agit presque que d'en anéantir certaines parties, & d'y en substituer quelques autres pour le transformer dans un métier propre à quelque ouvrage que ce soit.
Il y a des brocards ou fonds d'or de differentes sortes. Nous allons indiquer ces différences, exhortant ceux qui ne sont pas versés dans cette matiere, de parcourir auparavant les différens articles de notre Dictionnaire qui y ont rapport, ne fût-ce que pour se familiariser avec les termes. Qu'ils voyent les articles ARMURE, LIAGE, POIL, ACCOMPAGNAGE, LISSE, & sur-tout l'article VELOURS, où ils trouveront au long & clairement ce qui concerne le métier, ses parties, le montage, la lecture du dessein, la tire, & le travail, &c.
Il y a des brocards ou fonds or à huit lisses de satin & quatre de poil ; à cinq lisses de fond, & cinq lisses de poil ; à cinq lisses de satin & quatre de poil, &c. Il y a des brocards dont la dorure est relevée, sans liage, ou liée par la corde ; & d'autres dont la dorure est relevée, & tous les lacs liés, excepté celui de la dorure relevée qui ne l'est jamais.
Des fonds or à huit lisses de satin, & quatre de poil. Ces fonds or sont composés de quatre-vingt-dix portées de chaînes & de quinze de poil : l'armure en est la même que celle de la lustrine à poil, en supprimant les quatre marches de rebordure & les quatre lisses de rabat, & formant après cette suppression l'armure du fond or dont il s'agit, comme nous allons dire. Dans l'armure de lustrine à poil, la marche de rebordure se trouve toûjours entre une marche de lustrine & une marche d'accompagnage. Supposez la marche de rebordure jettée sur la marche de lustrine, & celle-ci chargée non-seulement de ce qu'elle portoit, mais encore de ce que la marche de rebordure lui aura donné de plus qu'elle n'avoit, & vous aurez la premiere marche de fond de l'armure que vous cherchez. Supposez la même marche de rebordure jettée sur la marche d'accompagnage, & celle-ci chargée non-seulement de ce qu'elle portoit, mais encore de ce que lui aura donné de plus qu'elle n'avoit, la marche de rebordure, & vous aurez la premiere marche d'accompagnage de l'armure cherchée. Passez à la seconde marche de rebordure de l'armure de la lustrine ; jettez-la sur les marches de lustrine & d'accompagnage, entre lesquelles elle est placée, & vous aurez la seconde marche de fond & la seconde marche d'accompagnage de l'armure cherchée, & ainsi du reste ; d'où il s'ensuit, qu'au lieu de seize marches qui sont à la lustrine, l'étoffe dont il s'agit n'en a que douze.
EXEMPLE.
Démonstration de l'armure d'une lustrine à poil.
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BROCATELLE | S.f. (Manufacture de soie) étoffe composée d'une chaîne de soixante portées, & d'un poil de dix portées, avec cinq lisses de chaîne & trois lisses de poil : on employe la brocatelle en tapisserie. Le fond est tramé de fil, & le coup de tire, de soie : c'est la trame qui fait le fond, & c'est la chaîne qui fait la figure.
BROCATELLE, en Architecture ; voyez MARBRE DE BROCATELLE.
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BROCHANT | adj. terme de Blason ; il se dit des pieces qui passent sur d'autres, comme une fasce ou un chevron qui broche sur un lion : les chevrons de la Rochefoucault en Angoumois, burelé d'argent & d'azur, à trois chevrons de gueules brochant sur le tout. (V)
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BROCHE | S. f. terme fort usité dans les Arts & Métiers ; on le donne en général à tout outil, instrument, machine, ou partie de machine, d'une figure longue & menue, & dont la fonction ordinaire est de traverser & de soûtenir d'autres parties. Le mot broche a passé dans les boutiques & les atteliers, de la cuisine où la broche est un instrument de fer long de cinq à six piés, de cinq à six lignes de diametre, pointu par un bout, & coupé en équerre, ou garni d'une poulie par l'autre, & percé dans le milieu de plusieurs trous qui servent à fixer sur la broche la piece qu'on veut rôtir, par le moyen de brochettes de fer qu'on fiche à-travers la piece, & qui passant aussi dans les trous oblongs pratiqués au milieu de la broche, font angle droit avec la broche. C'est pour pratiquer ces trous oblongs, & empêcher les pieces embrochées de tourner si facilement sur la broche, que le milieu de cet instrument est applati & plus large que le reste. La broche des cuisines se tourne à la main, ou par le tournebroche. Voyez TOURNEBROCHE.
* BROCHE, est synonyme à cheville dans un grand nombre d'occasions, la seule différence qu'il y ait, c'est que la cheville est alors une petite broche, ou la broche une grosse cheville. Les marchands de vin donnent le nom de broche au morceau de bois pointu qu'ils inserent dans l'ouverture qu'ils ont faite à un tonneau mis en perce. C'est de-là qu'est venue l'expression, vendre du vin à la broche pour le vendre en détail.
* BROCHE, se dit dans quelques manufactures d'étoffes en laine, des dents du peigne ou rost ; c'est en ce sens que ce mot est pris dans les articles du statut des Manufacturiers d'Abbeville, où il est ordonné que les rosts pour les baracans seront de quatre cent soixante-huit broches. Voyez PEIGNE.
BROCHES à tricoter : ce sont des bouts de laiton ou de fer, polis & longs, qu'on appelle aussi aiguilles. On s'en sert pour tricoter ou brocher des bas, camisoles, gants, & autres ouvrages de bonnetterie. Ce sont les maîtres Aiguilliers-Epingliers qui font & vendent les broches ou aiguilles à tricoter. Voyez la Pl. du Tricot.
BROCHES, chez les Arquebusiers, ce sont des morceaux d'acier bien trempés, longs d'environ un demi-pié, emmanchés de bois comme une lime, & à six ou huit pans vifs, selon le besoin. Les Arquebusiers s'en servent pour arrondir un trou, en insinuant la broche dans le trou qu'ils veulent arrondir, & la faisant tourner de côté & d'autre.
BROCHE quarrée, outil d'Arquebusier, c'est une espece de petit ciseau quarré d'acier bien trempé, avec lequel les Arquebusiers font un trou de la même figure ; par exemple, celui du chien, ou de cette partie qui est montée sur le pivot quarré de la noix : ils placent ce ciseau sur la piece qui est rouge de forge, & frappent dessus jusqu'à ce que le trou soit formé.
BROCHE ronde, outil d'Arquebusier, c'est un morceau de fer rond, de la grosseur d'une baguette de fusil, long d'un pié, & emmanché d'un manche de lime, on pose sur cet outil les portes-baguettes, pour les façonner & limer plus commodément.
BROCHE pointue, outil d'Arquebusier, c'est une espece de poinçon rond d'acier fin & bien trempé, long d'un demi-pié, fort pointu, & emmanché comme une lime. Les Arquebusiers s'en servent pour marquer la place d'un trou pour poser une vis, & en commencer le trou.
BROCHE ; les Artificiers appellent ainsi une petite verge ronde conique de fer ou de bois fort, tenant au culot du moule d'une fusée volante, pour ménager un trou de même figure dans la matiere combustible dont on la charge ; ce qui se fait par le moyen des baguettes de refouloir percées suivant leur axe d'un trou capable de recevoir cette broche, ensorte qu'elle n'empêche point que la matiere ne soit foulée tout-autour à coups de maillet ; d'où résulte ce qu'on appelle l'ame, Voyez AME.
* BROCHE, chez les Balanciers, se dit des clous ou pivots de fer qui traversent la verge de la balance romaine, & qui servent à soûtenir la garde du crochet, la garde forte, & la garde foible. Voyez ROMAINE.
* BROCHE, se dit chez les Bonnetiers d'un instrument qui soûtient le chardon qui leur sert à carder leurs ouvrages. Ils ont deux sortes de broches, la simple & la double : la broche simple ne porte qu'un chardon ; & la double broche en porte deux. Voyez à l'article BONNETTERIE, l'usage & la description de la broche & de la double broche.
BROCHE, terme & outil de Brodeur ; cette broche est un petit morceau de bois tourné, de la longueur de six pouces, posé sur une petite patte plate ou triangulaire ; la tête en est plus grosse, ronde, longue de deux pouces, & fendue jusqu'au milieu de la largeur d'une ligne ou deux. Les Brodeurs tournent l'or frisé autour du pivot & de la tête de cette broche, & passent le bout qu'ils veulent employer par ladite fente, & ensuite l'appliquent sur leurs ouvrages.
BROCHE, chez les Bouchers, c'est un instrument de fer dont ils se servent pour apprêter & parer leurs viandes. Il y en a de deux sortes ; l'une de fer, & l'autre d'os de mouton : celle de fer est longue de deux piés, ronde, grosse d'un demi-pouce, & garnie d'un anneau par le bout ; elle sert à percer la peau des boeufs pour y insérer la douille du soufflet avec lequel on les enfle quand ils ont été tués : celle d'os de mouton se fait avec le tibia qu'on vuide de sa moelle, & dont on affute un des bouts qu'on insere dans les rognons de veau pour les souffler avec la bouche.
BROCHE, chez les Cardeurs, c'est une petite verge de fer, garnie à sa partie enfermée entre les deux marionnetes, d'une noix ou espece de petite poulie qui retient la corde que la roue met en mouvement ; & par le bout sur lequel on dévide le fil, d'un rebord de bois assez haut, & voisin du fraseau, afin que le fil s'éleve sur la broche.
* BROCHE, chez les Chandeliers & les Ciriers, c'est une baguette longue & menue sur laquelle ils dressent & suspendent les meches qui doivent être plongées dans la bassine ou dans l'abysme, afin qu'elles se couvrent de cire & de suif. Ces broches ont deux piés & demi de long, & peuvent contenir seize chandelles des huit à la livre.
BROCHE, chez les Blanchisseurs de cire, & chez un grand nombre d'autres ouvriers qui se servent de cuves ou de tonneaux pleins d'un fluide qu'il faut avoir la commodité d'arrêter ou de laisser couler à discrétion, se dit d'un morceau de bois ou de fer qui s'insere dans une douille, ou cannelle ou cannule, fixée au bas du tonneau ou de la cuve, par laquelle le fluide peut s'échapper, quand on tire de la douille le corps ou la broche qui la remplissoit.
* BROCHE, chez les Ciriers, est le nom de petits morceaux de bois de bouis polis, en cone, avec lesquels ces ouvriers pratiquent au gros bout des cierges les ouvertures par lesquelles ils reçoivent les fiches des chandeliers.
BROCHE, chez les Cordonniers, est l'outil qui sert à faire les trous dans les talons des souliers, pour les chevilles de bois qui attachent les bouts dessous les talons : c'est une sorte d'alène, mais qui est droite, emmanchée dans un fort manche de bois de trois ou quatre pouces de long, sur la tête duquel on frappe avec le marteau. Voyez la figure 27. Pl. du Cordonnier. Bottier, qui représente le fer de cet instrument, & une petite portion du manche.
BROCHE, en terme d'Epinglier, sont deux baguettes de fer emboîtées perpendiculairement dans la base & dans la traverse de bois du métier ; c'est à leur aide que le contrepoids retombe toûjours sur le même point. Les broches n'entrent point dans le métier par en-bas ; elles posent seulement avec force sur une plaque de plomb sur laquelle on l'arrête à volonté, & selon que la situation du poinçon l'exige. Voyez la figure 10. Planche II. de l'Epinglier.
BROCHE du rouleau, s'entend dans l'Imprimerie en lettres, d'une piece de fer de l'épaisseur d'un doigt, ronde par les deux bouts, quarrée dans le milieu, & longue de deux piés, non compris le coude & la poignée : le premier bout est coudé de façon à recevoir un revêtissement de bois creusé que l'on appelle manivelle, & qui est pour la commodité de la main de l'ouvrier. Cette broche traverse en-dessous tout le train de la presse, en passant par le milieu du corps du rouleau, & est arrêtée par sa derniere extrémité par une clavette. Ces deux agens réunis servent à faire passer le train de la presse sous la platine, & à faire revenir ce même train sur son point d'appui. Voyez ROULEAU, MANIVELLE, & Pl. IV. fig. 2. M la manivelle, N le rouleau.
BROCHE, en Pâtisserie, est un gâteau de forme pyramidale, fait d'une pâte détrempée avec du sucre, des jaunes d'oeufs, & de la levure.
* BROCHE, chez les Regrattiers, est une longue verge de bois menu sur laquelle ils enfilent & suspendent les harengs qu'ils ont fait dessaler, afin qu'ils s'égouttent plus facilement.
BROCHE ou BOULON de fer, chez les Rubaniers ; il y en a de diverses sortes, comme ceux qui enfilent les marches par la tête, & dont les deux bouts passent à-travers les planches du pont.
Les deux broches qui servent aussi à enfiler les lames dans le porte-lames ; les deux broches qui enfilent les poulies dans le châtelet ; celle qui enfile les retours dans leur chassis ; celles qui servent à devider la soie ; & d'autres dont on parlera ailleurs.
BROCHE, en Serrurerie, est une sorte de petit fer rond qui passe dans les noeuds des fiches.
Broches à bouton, ce sont les broches des fiches auxquelles l'on remarque une petite tête ronde au-dessus de la fiche.
Broches à lambris, ce sont des especes de clous ronds sans tête, qui servent à poser les lambris.
* BROCHE ; on en distingue plusieurs chez les Manufacturiers en soie, qui, de même que chez les Rubaniers, se distinguent par leur usage. Il y a les broches des marches ; ce sont des especes de boulons qui enfilent les marches & les arrêtent.
Les broches du cassin, qui ne sont que de petites verges de fer rondes, qui traversent les poulies du cassin.
Les broches du carete, ou baguettes rondes de fer ou de bois, qui servent d'axe aux aleirons.
Les broches des roüets ; elles sont de fer, & garnies d'une noix plus ou moins grosse, sur laquelle passe la corde ou la lisiere qui les fait tourner.
Les broches de la cantre, petites verges de fer très-longues, & très-menues, sur lesquelles tournent les roquetins.
Il y a encore d'autres broches : mais c'est assez qu'il en soit parlé dans les descriptions des machines où elles seront employées.
BROCHE, petit instrument dont se servent les Haute-lissiers ; elle leur tient lieu de la navette qu'on employe dans la fabrique des étoffes & des toiles. Cette broche est ordinairement de bouis, ou de quelqu'autre bois dur, longue en tout de sept à huit pouces, y compris le manche, & de sept ou huit lignes de grosseur dans son plus grand diametre : elle se termine en pointe, pour passer plus facilement entre les fils de la chaîne. C'est sur la broche que sont devidés l'or, l'argent, les soies & les laines qui entrent dans la fabrique des haute-lisses. Voyez HAUTE-LISSE.
BROCHE, terme de Tonnelier, qui signifie une cheville avec laquelle ils bouchent le trou qu'ils ont fait avec le forêt ou vrille à un tonneau pour en goûter le vin. Ce mot se dit aussi quelquefois de la fontaine de cuivre qu'on met à une piece de vin qu'on vient de percer.
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BROCHÉE | S. f. en général, c'est la quantité de quoi que ce soit que soûtient une broche.
BROCHEE, chez les Chandeliers, c'est la quantité de chandelles mise sur une broche, & qu'on peut faire à la fois. Voyez par rapport à cette quantité l'article BROCHE.
BROCHEE, chez les Rotisseurs, c'est la quantité de viande qu'on peut mettre sur une broche ; & ainsi des autres occasions où l'on employe le terme brochée.
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BROCHET | S. m. lucius, (Hist. nat.) poisson de riviere qui se trouve aussi dans les lacs & les étangs, il est fort commun dans toutes les eaux douces. Le brochet est long, son dos est presque quarré, lorsqu'il est gras. Il a le ventre gros, la queue courte, la tête quarrée & percée de petits trous ; le bec allongé à-peu-près comme celui d'une oie : il y a sur le devant de la mâchoire inferieure de petites dents recourbées en-dedans. La mâchoire supérieure n'en a point de correspondantes à celles de l'autre mâchoire : mais il y en a deux rangs sur le palais. Les yeux sont de couleur d'or, les écailles sont petites & minces ; desorte que lorsque ce poisson est jeune, il semble n'avoir point d'écailles : mais elles deviennent dans la suite dures & apparentes. Le corps est parsemé de taches jaunâtres, le dos est noirâtre, le ventre blanc, les côtés de couleur d'argent : mais lorsque le brochet est vieux, ils sont de couleur d'or ; plus ce poisson est jeune, plus il approche de la couleur verte. Il a deux nageoires au bas des ouies, deux autres au bas du ventre qui sont fortes. Il y a auprès de la queue une nageoire de couleur dorée & tachetée de noir, posée en-dessus, & une autre en-dessous ; la queue est fourchue & parsemée de taches brunes. La ligne qui s'étend le long du corps dans le milieu n'est marquée que par de petits points. Les brochets des grandes rivieres & des lacs ont la chair ferme ; ceux au contraire qui sont dans les eaux dormantes & fangeuses, ne sont pas bons à manger. Ces poissons sont très-voraces ; ils s'efforcent quelquefois pour avaler d'autres poissons qui sont presqu'aussi gros qu'eux : ils commencent par la tête, & ils attirent peu-à-peu le reste du corps à mesure qu'ils digerent ce qui est dans leur estomac ; on les a vûs avaler de petits chiens & de petits chats que l'on avoit noyés dans des rivieres. Souvent ils se nourrissent de grenouilles : mais on dit que s'ils avalent un crapaud de terre ils le vomissent. On prétend qu'ils n'attaquent point les perches à cause des aiguillons qu'elles ont sur le dos ; cependant on a rapporté qu'ils prenoient les perches en-travers dans leur bouche, & qu'ils les y tenoient jusqu'à ce qu'elles fussent mortes avant que de les avaler. Ce qu'il y a de certain, c'est qu'ils n'épargnent pas même les poissons de leur espece. Rondelet, Willughby. Voyez POISSON. (I)
BROCHET de mer voyez SPET. (I)
* On lit dans du Bravius de piscinis piscium, lib. I. chap. ij. que la grenouille saute quelquefois sur la tête du brochet, l'embrasse de ses pattes, qu'elle les lui met dans les yeux, & les lui creve. Aldrovande & Cardan prétendent que si l'on jette un brochet à qui on aura ouvert le ventre, dans un étang ou un réservoir où il y ait des tanches, il ne mourra pas de sa blessure ; l'humeur gluante de la tanche, contre laquelle il va se frotter, l'ayant bien-tôt fait cicatriser. Voilà des faits qu'il seroit aisé de vérifier : il ne s'agiroit pour le premier, que de tenir pendant longtems un brochet dans un réservoir où il y auroit bien des grenouilles, & où il n'y auroit que cela ; & pour le second, que de blesser un brochet & le jetter entre des tanches.
On croit que le brochet vit long-tems. On dit qu'il en fut trouvé un dans un étang d'Allemagne en 1497, qui avoit un anneau d'airain passé dans la couverture de ses ouies, sur lequel il y avoit une inscription greque, faisant mention que c'étoit l'empereur Frédéric II. qui l'avoit mis dans cet étang ; ce poisson avoit au moins 267 ans, si le fait est vrai.
Il y a des brochets auxquels on trouve des oeufs & une laite en même tems ; d'où l'on conclut qu'ils sont hermaphrodites.
* La pêche du brochet n'a rien de particulier, si ce n'est celle qui se fait à la bricole. On a un réservoir de petits poissons, mais il faut donner la préférence au carpeau. Ayez un hameçon à deux crochets, x y, faites entrer une ligne par la queue du carpeau, & la faites sortir par sa bouche. Attachez au bout de la ligne qui sortira par la bouche du poisson au hameçon à deux crochets recourbés vers la queue du poisson. Passez un morceau de liége F. dans votre ligne, afin que le poisson reste suspendu entre deux eaux en l'endroit qu'il vous plaira, entortillez le reste de votre ligne à un piquet placé sur le bord de la riviere. Disposez plusieurs appâts de cette nature dans les endroits où vous croyez qu'il y a du brochet, bien-tôt cet animal vorace avalera & les poissons & les hameçons. Il faut que la corde soit entortillée au piquet de maniere qu'elle puisse se devider ; pour cet effet on prend une branche fourchue, A B C D, Pl. de Pêche : on fend les bouts des fourchons C D. On entortille la ligne E autour de ces fourches ; & quand on est parvenu à leurs extrémités, C D, on fiche la ligne E dans la fente d'un des fourchons C. Le brochet, en se débattant, a bien-tôt fait sortir la ligne de la fente ; lorsqu'elle n'y est plus détenue, elle se devide & permet au brochet de s'écarter.
Cuisine. On prépare le brochet de plusieurs manieres : au court-bouillon, à la sauce d'anchois, & à la Polonoise. On le frit, on le met en ragoût, ou on le farcit.
On employe, en Medecine, ses mâchoires & sa graisse : cette derniere est fort en usage, & on en oint la plante des piés pour détourner un catarrhe & pour appaiser la toux. Dale dit qu'on en frotte avec succès la poitrine des enfans dans le rhûme & dans la toux.
La mâchoire inférieure est dessicative & détersive : on la regarde comme spécifique dans la pleurésie ; elle sert, de même que les autres os de la tête, contre le calcul, les fleurs blanches, & pour faciliter l'accouchement. Ses cendres employées à l'extérieur, arrêtent l'évacuation de la sanie, détergent les vieilles plaies, & dessechent les hémorrhoïdes. L'eau distillée du fiel du brochet est estimée bonne contre les maladies des yeux.
On recommande son fiel dans les maladies froides accompagnées de l'inactivité de la bile ; il passe aussi pour guérir les fievres intermittentes, étant pris au commencement de l'accès. La dose est de sept ou huit gouttes dans une liqueur appropriée.
Son coeur produit le même effet.
Les petites pierres ou osselets de la tête sont recommandés pour hâter l'accouchement, purifier le sang, faire venir les regles, exciter l'urine, chasser la pierre des reins & de la vessie, & contre l'épilepsie. On en peut donner depuis vingt-cinq grains jusqu'à un gros.
On doit éviter de manger les oeufs du brochet, parce qu'ils excitent des nausées, & qu'ils purgent assez violemment.
Il contient beaucoup d'huile & de sel volatil, & médiocrement de phlegme, ce qui le rend assez nourrissant ; cependant il ne convient pas à tout le monde, il est indigeste chez bien des gens. (N)
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BROCHETÉ | adj. se dit des artifices percés d'un trou plus petit ou plus court que l'ame des fusées volantes, soit en les chargeant avec des baguettes percées, soit après-coup, en les chargeant massifs, & les perçant ensuite suivant leur axe, pour leur donner un mouvement plus vif, comme à quelques serpenteaux qu'on appelle fougues, lardons, ou serpenteaux brochetés. Voyez FOUGUE, LARDON, &c.
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BROCHETER | v. act. en général percer de broches ou de brochettes. C'est en ce sens qu'on dit que les boucaniers de l'île de Saint-Domingue brochettent leurs cuirs, en les étendant sur la terre, au moyen d'un grand nombre de chevilles, & les laissent sécher dans cet état. Cette préparation empêche les cuirs de se retrécir, & les met en état d'être embarqués sans se gâter. L'un est l'effet des brochettes, l'autre du desséchement.
BROCHETER, en Marine, c'est mesurer les membres & les bordages d'un vaisseau.
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BROCHETTE | S. f. se dit en général & au propre, d'un petit morceau de bois ou de fer, long & pointu, dont l'usage ordinaire est d'être passé dans quelques corps mous, pour en unir, soûtenir, ou rapprocher les parties. On a transporté ce terme au figuré, à d'autres outils qui avoient à-peu-près la même forme & la même fonction.
BROCHETTE, en termes de Boutonniers : c'est une petite broche sur laquelle on fait le bouton de ce nom. Elle sert à tenir le moule, & à faciliter le jet des premiers tours qui se font, comme nous avons dit, sans pointes. Voyez POINTE & BOUTON à la brochette.
BROCHETTE à lier, en termes de Boutonnier, est un morceau de bois tourné, plus gros par le bout qu'on tient à la main, que par celui qui entre dans la bobine. Il tire son nom de son usage, puisqu'il sert à lier la cannetille autour du vélin découpé.
BROCHETTE, est, en terme de Fondeur de Cloches, une regle sur laquelle sont tracées différentes mesures. Il y en a deux especes : la brochette des épaisseurs, sur laquelle sont marquées les différentes épaisseurs & diametres des parties d'une cloche. Voyez la fig. 2. Planche de la fonte des cloches.
L'autre espece de brochette n'est autre chose qu'une regle, sur laquelle sont marqués les différens diametres des cloches, qui sont les différens degrés de l'octave, la longueur de la regle étant prise pour le diametre de la cloche. Mais la maniere dont les Fondeurs font cette division est fautive, ainsi que le P. Mersenne l'a démontré : c'est pourquoi nous en avons donné une autre plus exacte à l'article FONTE des Cloches, fondée sur la connoissance du diapason. Voyez DIAPASON des Orgues.
BROCHETTES, dans l'Imprimerie, sont deux petites tringles de fer, chacune de quatre à cinq pouces de long, sur huit à dix lignes de circonférence. Elles attachent la frisquette au chassis du tympan au moyen de petits couplets, & vont un peu en diminuant d'une extrémité à l'autre, afin qu'on puisse les ôter facilement, quand on veut détacher la frisquette du tympan, pour en substituer une autre, en changeant d'ouvrage. Voy. TYMPAN, & Pl. IV. de l'Imprimerie.
BROCHETTE, terme de Rubanier, est une petite portion de baleine ou de bois, taillée en rond, menue, longue, & capable d'entrer dans le canon, & ensuite dans les trous des deux bouts de la navette. La brochette doit être assez menue pour ne pas empêcher le canon qu'elle porte de se dérouler suivant le besoin. Voyez NAVETTE.
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BROCHEUR | BROCHEUSE, ouvrier ou ouvriere dont le métier est de brocher des livres.
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BROCHOIR | S. m. (Maréchal-Ferrant) c'est le marteau dont les ouvriers se servent pour ferrer les chevaux. Ils le portent attaché à leur ceinture. Voyez BROCHER.
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BROCHURE | S. f. (Librairie) On donne ordinairement le nom de brochure à un livre non relié, mais dont les feuilles ont été simplement cousues & couvertes de papier, & dont le volume est peu considérable. Les meilleurs livres se brochent ainsi que les plus mauvais ; cependant c'est aux derniers que le nom de brochure paroît le plus singulierement consacré. On dit assez ordinairement : nous avons été cette année inondés de brochures ; c'est une mauvaise brochure, &c. quand on veut se plaindre de la quantité de ces petits ouvrages nouveaux dont la lecture produit deux maux réels ; l'un de gâter le goût ; l'autre d'employer le tems & l'argent que l'on pourroit donner à des livres plus solides & plus instructifs. Au reste cette frivolité du siécle n'est pas un mal pour tout le monde ; elle fait vivre quelques petits auteurs, & produit, proportions gardées, plus de consommation de papier que les bons livres. Une brochure passe de la toilette d'une femme dans son anti-chambre, &c. cette circulation se renouvelle, & fait valoir le commerce de nos fabriques.
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BROCKAU | (Géog.) petite riviere d'Allemagne dans le duché de Holstein, dans la province de Wagrie.
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BROCOLI | S. m. (Jardinage) c'est une espece de choux qui se cultive en Angleterre, & surtout en Italie : on l'y mange avec la viande, & souvent en salade chaude. Quelques Jardiniers en France coupent les têtes des choux pommés sans en arracher les troncs, & ils font passer pour brocolis les petits rejettons qu'ils poussent. (K)
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BRODEQUIN | S. m. (Hist. anc.) sorte de chaussure en usage parmi les anciens, qui couvroit le pié & la moitié de la jambe, & qu'on pourroit comparer pour la forme aux bottines des houssards ou des heiduques, quoiqu'elle en différât pour la matiere : car si le calceus, ou la partie inférieure du brodequin étoit de cuir ou de bois, la partie supérieure ou le caliga étoit d'une étoffe souvent précieuse ; tels étoient surtout ceux dont se servoient les princes, & les acteurs dans les tragédies.
On attribue l'invention du brodequin à Eschyle qui, dit-on, l'introduisit sur le théatre pour donner plus de majesté à ses acteurs. Le brodequin étoit quadrangulaire par en bas ; & l'espece de bottine qui le surmontoit, s'attachoit plus ou moins haut sur la jambe. Le calceus étoit si épais, qu'un homme de médiocre taille, chaussé du brodequin, paroissoit de la taille des héros. Cette chaussure étoit absolument différente du soc, espece de soulier beaucoup plus bas, & affecté à la comédie. De là vient que dans les auteurs classiques, & sur-tout les poëtes, le mot de brodequin ou de cothurne désigne spécialement la tragédie ; & qu'encore aujourd'hui l'on dit d'un poëte qui compose des tragédies, qu'il chausse le cothurne.
Au reste, les brodequins n'étoient pas tellement relégués au théatre, que les personnes d'une autre condition ne s'en servissent. Les jeunes filles en mettoient pour se donner une taille plus avantageuse ; les voyageurs & les chasseurs, pour se garantir des boues. On trouvera le brodequin dans nos Planches d'Antiquités. Voyez leur explication. (G)
BRODEQUINS, (Jurispr.) sorte de torture dont on se sert pour faire tirer des criminels l'aveu de leurs forfaits : elle consiste en quelques endroits en une sorte de boîte ou de bas de parchemin, que l'on mouille & que l'on applique ainsi à la jambe du patient ; ensuite on approche cette jambe proche du feu, qui occasionnant un violent rétrécissement au parchemin, serre la jambe vivement, & cause une douleur insupportable.
Il y a aussi une autre sorte de question appellée les brodequins, qui consiste en quatre fortes planches liées avec des cordes tout-autour. Deux de ces planches sont placées entre les jambes du criminel, & les deux autres sur les côtés extérieurs des jambes, que l'on serre aussi avec des cordes l'une contre l'autre : on passe ensuite un coin entre les deux planches qui sont entre les deux jambes ; ce qui tendant à faire écarter les planches & les cordes qui les resserrent, l'effort du coup tombe sur les os des jambes & les brise ou occasionne une luxation qui fait souffrir au criminel des douleurs horribles. Cette question n'est plus usitée en Angleterre : mais elle subsiste encore en France, en Ecosse, & en quelques autres pays. (H)
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BRODERA | (Géog.) ville des Indes orientales dans l'empire du Mogol, au royaume de Guzurate : il s'y fait un grand négoce de toiles de coton. Long. 90. 39. lat. 22. 25.
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BRODERIE | S. f. ouvrage en or, argent ou soie, formé à l'aiguille d'un dessein quelconque, sur des étoffes ou de la mousseline. Dans les étoffes on fait usage d'un métier qui sert à étendre la piéce, qui se travaille d'autant mieux qu'elle est plus étendue. Quant à la mousseline, les ornemens qu'on y applique dépendent de sa qualité : on la bâtit sur un patron dessiné qui se tient à la main ; quelquefois on l'empese avant que de la monter sur ce patron, quand l'ouvriere juge par la qualité qu'elle lui reconnoît, qu'elle sera difficile à manier. Les traits du dessein se remplissent, ainsi que quelques-unes des feuilles, de piqué & de coulé. Voyez ces mots. Les fleurs se forment de différens points-à-jour, au choix de l'ouvriere ; choix toûjours fondé sur le plus ou le moins d'effet que l'on pense qui résultera d'un point ou d'un autre.
La broderie au métier est d'une grande ancienneté Dieu ordonna qu'on en enrichît l'arche & d'autre ornemens du temple des Juifs. Mais la broderie en mousseline pourroit bien ne pas remonter si haut. Les broderies de cette espece suivant en tout les desseins des belles dentelles, & la plûpart des points des unes ayant pris le nom du pays où les autres se font, car on dit point d'Hongrie, point de Saxe, &c. il y a lieu de croire que la broderie qui n'est vraiment qu'une imitation de la dentelle, n'est venue qu'après elle ; surtout, si l'on fait attention que la broderie s'est plus perfectionnée dans les pays où les dentelles sont les plus belles, comme en Saxe, que par-tout ailleurs.
La broderie au métier paroît bien moins longue que l'autre, dans laquelle, du moins pour le remplissage des fleurs, il faut compter sans-cesse les fils de la mousseline tant en long qu'en travers : mais en revanche cette derniere est beaucoup plus riche en points, & dès-là susceptible de beaucoup plus de variété. La broderie en mousseline la plus estimée est celle de Saxe : on en fait cependant d'aussi belle dans d'autres contrées de l'Europe, surtout en France : mais la réputation des ouvrieres Saxonnes est faite ; les Françoises feroient mieux, qu'on les vanteroit moins. Il seroit bien à souhaiter que la prévention n'eût lieu que dans cette occasion.
Les toiles trop frappées ne sont guere susceptibles de ces ornemens : & en effet, on n'y en voit point. Les mousselines même doivent être simples, Les plus fines sont les meilleures pour être brodées. Les doubles, à cause de leur tissure pressée & pleine, rentrent pour la broderie dans la classe des toiles, sur lesquelles elle est au moins inutile.
BRODERIE APPLIQUEE, est celle dont les figures sont relevées & arrondies par le coton ou vélin qu'on met dessous pour la soûtenir.
BRODERIE EN COUCHURE, est celle dont l'or & l'argent est couché sur le dessein, & cousu avec de la soie de même couleur.
BRODERIE EN GUIPURE, se fait en or ou en argent. On dessine l'étoffe, ensuite on met du vélin découpé, puis l'on coud l'or ou l'argent dessus avec la soie. On met dans cette broderie de l'or ou de l'argent frisé, du clinquant, du bouillon de plusieurs façons. On y met aussi des paillettes.
BRODERIE PASSEE, est celle qui paroît des deux côtés de l'étoffe.
BRODERIE PLATE, est celle dont les figures sont plates & unies sans frisures, paillettes, ni autres ornemens.
BRODERIE, (Jardinage) c'est dans un parterre, un composé de rinceaux de feuillages, avec fleurons, fleurs, tigettes, culots, rouleaux de graines, &c. le tout formé par des traits de bouis nain, qui renferment du mâche-fer au lieu de sable, & de la brique battue, pour colorer ces broderies & les détacher du fond, qui est ordinairement sablé de sable de riviere. Voyez PARTERRE. (P)
BRODERIE, DOUBLES, FLEURTIS : tout cela se dit, en Musique, de plusieurs notes que le musicien ajoûte à sa partie dans l'exécution, pour varier un chant souvent répété, pour orner des passages trop simples, ou pour faire briller la légereté de son gosier ou de ses doigts. Rien ne montre mieux le bon ou mauvais gout d'un musicien, que le choix & l'usage qu'il fait de ces ornemens, La musique Françoise est fort retenue sur les broderies : les Italiens s'y donnent plus de carriere ; c'est chez eux à qui en fera davantage : les acteurs & actrices de leurs opéra rassemblent ordinairement, d'après les meilleurs maîtres, des recueils de doubles, qu'ils appellent passi, sur toutes sortes de traits de chant, & ils sont fort jaloux de ces sortes de recueils. (S)
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BRODEUR | S. m. est l'ouvrier qui orne les étoffes d'ouvrages de broderie. Voyez BRODERIE. Les Brodeurs, à Paris, font communauté. L'on ne comprend sous le nom de Brodeurs, que les ouvriers qui travaillent sur des étoffes. Les broderies en linge se font par des femmes, qui ne sont ni du corps des Brodeurs ni d'aucun autre.
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BRODI | (Géog.) ville fortifiée du royaume de Pologne, dans la Volhinie.
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BRODNICZ | (Géog.) ville de la Prusse Polonoise dans le palatinat de Culm.
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BRODRA | (Géog.) petite ville, dans l'empire du grand-mogol, au royaume de Guzurate, vis-à-vis le golfe de Cambaie.
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BRODT | ou BROD, (Géog.) petite ville forte de Sclavonie, sur la Save, dans le comté de Possega. Long. 36. lat. 45. 15.
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BRODZIEC | (Géog.) petite ville du grand duché de Lithuanie, dans le palatinat de Minsky, sur la riviere de Berezina.
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BROGLIO | (Hist. mod.) l'on nomme ainsi à Venise un endroit de la place saint Marc, où les nobles Vénitiens tiennent leurs assemblées ; lorsqu'ils y viennent avant midi, ils se mettent à couvert sous le portique : mais si l'assemblée se tient l'après-dinée, ils prennent un autre côté pour se mettre à l'abri du soleil ; il n'est permis à personne d'y passer pendant ce tems-là.
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BROITZCHIA | (Géog.) ville d'Asie, dans le royaume de Guzurate, dans l'empire du Mogol ; c'est une des plus considérables forteresses de l'Inde.
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BROJE | (Géog.) riviere de Suisse, dans le canton de Fribourg, qui va se jetter dans le lac de Neubourg.
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BROMELIA | subst. f. (Hist. nat. bot.) genre de plante, dont le nom a été dérivé de celui de Bromel, medecin Suédois. La fleur des plantes de ce genre est en rose, composée de trois pétales disposés en rond, & soûtenus par un calice, qui devient dans la suite un fruit ovoïde, divisé en trois loges remplies de semences un peu allongées & presque cylindriques. Plumier, Nova plant. Amer. gener. V. PLANTE. (I)
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BROMIUS | sub. m. (Myth.) ce mot vient de , bruit ; & Bacchus a été surnommé Bromius, ou parce qu'il naquit, dit-on, au bruit d'un coup de tonnerre, qui fit accoucher Semélé sa mere, ou parce que les Bacchantes, femmes particulierement attachées à son culte, étoient fort bruyantes.
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BRONCHADE | S. f. (Manege) faux pas que fait un cheval. (V)
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BRONCHER | v. neut. (Manege) mettre le pié à faux ; il se dit proprement des chevaux auxquels les jambes mollissent. Ce défaut leur vient d'avoir les reins & l'échine foibles, & les jambes usées. (V)
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BRONCHES | S. f. pl. on appelle ainsi, en Anatomie, les petits tuyaux dans lesquels se divise la trachée-artere à son entrée dans les poumons, & qui sont distribués dans chaque partie du poumon, pour servir de passage à l'air dans la respiration.
Le mot est Grec, , & signifie la même chose,
Les rameaux des bronches, en se subdivisant, deviennent capillaires : ils passent dans les petits lobules des poumons ; ils paroissent même former par leur expansion, les cellules avec lesquelles ils communiquent. Chaque tuyau forme donc à l'extrémité une cellule, comme l'a imaginé Malpighi ; ainsi s'il est tombé en erreur, c'est en représentant ces cellules comme des vésicules solitaires. Voyez POUMON.
Les bronches sont composées de cartilages comme la trachée artere, sinon que leurs cartilages sont parfaitement circulaires, sans avoir aucune partie membraneuse ni dure. Ils sont joints ensemble par une membrane qui les enveloppe : ils sont tirés en-dehors en longueur dans l'inspiration & en-dedans dans l'expiration. Voyez INSPIRATION & EXPIRATION. (L)
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BRONCHIAL | (Artere), c'est une artere des poumons, qui vient du tronc de l'aorte descendante ou des intercostales, & après avoir embrassé la trachée, poursuit son cours avec les bronches, dont elle accompagne toutes les branches dans tout leur cours. Voyez Planches Anat. fig. 1. n°. 29.
BRONCHIALE (Veine), cette veine vient des intercostales, accompagne l'artere, & se divise en autant de branches qu'elle. L'artere porte le sang aux bronches pour leur nourriture & pour celle des vésicules des poumons ; & la veine le rapporte à la veine cave dans laquelle elle se jette. L'artere bronchiale est quelquefois simple : mais elle est souvent double, & quelquefois triple. Voyez VEINE, ARTERE.
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BRONCHIQUE | en Anatomie ; épithete des muscles situés sur les bronches ; tels sont les sterno-hyoïdiens, les tyro-hyoïdiens, &c. Voy. BRONCHE. (L)
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BRONCHOCELE | S. f. (Chirurgie) ce mot vient du Grec , bronchus, la trachée, & de , enflure, tumeur. C'est une tumeur qui survient à la gorge, par le déplacement d'une partie de la membrane interne de la trachée-artere. Cette membrane, en se dilatant, passe entre les anneaux cartilagineux de ce conduit, & forme à la partie antérieure du cou une tumeur molasse, sans douleur, de même couleur que la peau, & qui s'étend quand on retient son haleine : c'est proprement une hernie de la trachée-artere. Cette maladie qui est rare, nuit beaucoup à la voix & à la respiration. Je crois que cette tumeur pourroit être comprimée par un bandage en bouton, comme quelques personnes le conseillent pour l'anevrysme : il ne faut pas confondre, comme on fait assez communément, la bronchocele avec une autre tumeur du cou qu'on nomme goitre. Voy. GOITRE. (Y)
On prétend qu'il y a des gens qui ont des secrets pour fondre cette tumeur, sans être obligé d'employer les ferremens : si la chose est vraie, il seroit à propos de les engager par des récompenses à rendre cette composition publique ; ce seroit rendre un service signalé à nombre de personnes qui sont attaquées de cette maladie également incommode & desagréable. (N)
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BRONCHORST | (Géog.) petite ville sur l'Issel, dans le comté de Zutphen, avec titre de comté de l'empire.
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BRONCHOTOMIE | S. f. opération de Chirurgie, qui consiste à faire une ouverture à la trachée-artere pour donner à l'air la liberté d'entrer dans les poumons & d'en sortir, ou pour tirer les corps étrangers qui se seroient insinués dans le larynx ou dans la trachée-artere. Ce terme vient du grec , trachée, & de , seco, je coupe. On a aussi appellé cette opération, laryngotomie, mais mal-à-propos, puisqu'elle n'ouvre point le larynx. Quelques modernes prétendent qu'on doit lui donner par préférence le nom de trachéotomie.
La possibilité de l'opération dont nous parlons, est établie sur la facilité avec laquelle certaines plaies de la trachée-artere, même les plus compliquées, ont été guéries : il y a peu d'observateurs qui ne nous en ayent laissé des exemples remarquables & assez connus.
Cette opération convient dans plusieurs circonstances, & demande d'être pratiquée différemment, selon le cas qui l'indique. J'en juge ainsi, pour avoir rapproché plusieurs faits les uns des autres, les avoir comparés exactement, & les avoir envisagés sous plusieurs aspects différens.
Les esquinancies, ou inflammations de la gorge, qui ont résisté à tous les remedes, ou qui menacent de suffocation, exigent cette opération. Voyez ESQUINANCIE.
Pour la pratiquer dans ce cas, il n'est pas nécessaire de faire à la peau & à la graisse une incision longitudinale, qui devroit commencer un demi-travers de doigt plus haut que la partie inférieure du cartilage cricoïde, & qui s'étendroit jusqu'au cinquieme ou sixieme anneau de la trachée-artere, pour séparer ensuite avec le bistouri les muscles sterno-hyoïdiens, & porter la pointe de cet instrument, ou celle d'une lancette, entre le troisieme & le quatrieme anneau. On peut faire cette opération par une ponction seule, qui en rendra l'exécution plus promte, plus facile & moins douloureuse. Pour opérer, il faut laisser le malade dans l'attitude où il respire le mieux, soit dans son lit, soit dans un fauteuil ; de crainte qu'en lui étendant ou renversant la tête, comme quelques auteurs le conseillent, on ne le suffoque. On pose le bout du doigt index de la main gauche sur la trachée-artere, entre le sternum & la partie inférieure du larynx ; on prend de la main droite une lancette, dont la lame est assujettie sur la châsse par le moyen d'une bandelette : on la tient avec le pouce, le doigt index & celui du milieu, comme une plume à écrire. On la plie transversalement dans la trachée-artere, en la faisant glisser sur l'ongle du doigt index de la main gauche, qui, appuyé sur la trachée-artere, sert en quelque façon de conducteur à la lancette. Je ne fixe pas l'entre-deux des cartilages qu'il faut ouvrir, parce que la tension de la gorge ne permet pas qu'on les compte. On pénetre fort aisément dans la trachée-artere ; qui est fort gonflée par l'air, auquel on ouvre un passage libre par la plaie qu'on y pratique. Il faut avoir soin de passer un stilet le long de la lancette avant de la retirer, & sur ce stilet on place dans la trachée-artere une cannule, de façon cependant qu'on se donne de garde qu'elle ne touche la paroi opposée à l'ouverture par où elle passe. Cette cannule doit être de plomb ou d'argent ; elle doit être plate, pour s'accommoder à l'entre-deux des cartilages. L'entrée doit être en forme de pavillon, & être garnie de deux petits anneaux qui servent à passer une bandelette dont on noue les extrémités à la nuque, afin d'assujettir la cannule dans la trachée-artere. Ces dimensions de cette cannule sont déterminées à avoir six lignes de longueur, une ligne de diametre à son bec, qui doit être légerement courbé & arrondi exactement ; & deux lignes & demie de largeur à l'endroit du pavillon. Cette longueur de six lignes suffit pour l'opération avec l'incision des tégumens ; mais elle n'est pas suffisante lorsqu'on ne fait qu'une seule ponction commune à la peau, à la graisse & à la trachée artere. Il faut que la cannule soit plûtôt plus longue que trop courte, afin qu'on puisse s'en servir pour des personnes grasses ; à moins qu'on ne veuille en avoir de plusieurs dimensions pour les différentes personnes qui pourroient en avoir besoin. Voyez fig. 12. Pl. XXVI.
Le pansement consiste à mettre sur l'embouchure de la cannule une petite toile fort claire, afin que l'air puisse passer facilement à-travers ; on met une compresse fenestrée qu'on contient par quelques tours de bande dont les circonvolutions ne portent pas sur le pavillon de la cannule, que la compresse fenestrée laisse libre. On sent que cette opération ne remédie qu'au danger de la suffocation, qui est l'accident le plus urgent ; il faut donc continuer les secours capables d'en détruire les causes. Voyez ESQUINANCIE.
Quand les accidens sont passés, on retire la cannule, & on pense la plaie à plat ; elle se réunit comme une plaie simple.
L'opération de la bronchotomie convient aussi lorsqu'il y a des corps étrangers qui sont tellement engagés dans le pharynx ou dans l'oesophage, qu'on n'a pû par aucun secours les retirer ni les enfoncer, & que ces corps étrangers sont d'un volume considérable qui comprime la trachée-artere, & met le malade dans le danger d'être suffoqué. Habicot, maître chirurgien en l'université de Paris, dans un traité intitulé, question chirurgicale sur la possibilité & la nécessité de la bronchotomie, rapporte avoir fait avec succès cette opération à un garçon de quatorze ans, qui ayant oüi dire que l'or avalé ne faisoit point de mal, voulut avaler neuf pistoles enveloppées dans un linge, pour les dérober à la connoissance des voleurs. Ce paquet, qui étoit fort gros, ne put passer le détroit du pharynx ; il s'engagea dans cette partie de maniere qu'on ne put le retirer ni l'enfoncer dans l'estomac. Ce jeune garçon étoit sur le point d'être suffoqué par la compression que ce paquet causoit à la trachée-artere ; son cou & son visage étoient enflés & si noirs, qu'il en étoit méconnoissable. Habicot, chez qui on porta le malade, essaya envain par divers moyens de déplacer ce corps étranger. Ce chirurgien voyant le malade dans un danger évident d'être suffoqué, lui fit la bronchotomie. Cette opération ne fut pas plutôt faite, que le gonflement & la lividité du cou & de la face se dissiperent. Habicot fit descendre le paquet d'or dans l'estomac par le moyen d'une sonde de plomb. Le jeune garçon rendit huit ou dix jours après par l'anus ses neuf pistoles à diverses reprises, il guérit parfaitement & très-promtement de la plaie de la trachée-artere. Voyez ŒSOPHAGOTOMIE.
La bronchotomie est non-seulement nécessaire pour faire respirer un malade comme dans le cas dont on vient de parler, mais encore pour tirer les corps étrangers qui se seroient glissés dans la trachée-artere. Dans cette derniere circonstance, il faut faire une incision longitudinale à la peau & à la graisse, comme nous l'avons dit au commencement de cet article, & inciser ensuite la trachée-artere en long, de façon qu'on coupe transversalement trois ou quatre cartilages, pour pouvoir saisir & tirer le corps étranger avec de petites pincettes ou autres instrumens. Cette opération a été pratiquée avec succès par M. Heister, pour tirer un morceau de champignon qui s'étoit glissé dans la trachée-artere : & M. Raw, au rapport de cet auteur, a ouvert la trachée-artere, pour en tirer une feve qui s'y étoit introduite.
On voit que dans ce cas on ne pourroit pas se contenter d'une seule ponction, & qu'il faut nécessairement faire une incision ; la plaie à l'extérieur peut même être étendue de trois ou quatre travers de doigt, si le cas le requiert.
La ponction, comme je l'ai décrite, est moins avantageuse & plus embarrassante, même dans le cas de l'esquinancie, que celle qui se feroit avec un trocart armé de sa cannule. On en a imaginé de petits qui sont très-commodes pour cette opération. Voyez la fig. 1. Pl. XXVIII. A leur défaut on pourroit faire faire une petite cannule sur l'extrémité du poinçon d'un trocart ordinaire, en observant de le garnir depuis le manche jusqu'au pavillon de la cannule, afin de ne se servir que de la longueur qui est nécessaire. Je fonde la préférence de l'opération avec le trocart, sur une observation de M. Virgili, chirurgien-major de l'hôpital de Cadix, qu'on peut lire dans un mémoire de M. Hevin sur les corps étrangers arrêtés dans l'oesophage, inséré dans le premier volume de ceux de l'académie royale de Chirurgie. Un soldat espagnol prêt à être suffoqué par une violente inflammation du larynx & du pharynx, fut porté à l'hôpital de Cadix. M. Virgili jugeant que l'unique moyen de lui sauver la vie, étoit de lui faire sur le champ la bronchotomie, ne crut pas, par rapport au grand gonflement, devoir préférer la simple ponction à la trachée-artere ; il fit une incision aux tégumens avec le bistouri, sépara les muscles sterno-hyoïdiens, & ouvrit transversalement la trachée-artere entre deux anneaux. Cette ouverture ne fut pas plûtôt faite, que le sang qui sortoit des petits vaisseaux ouverts, & qui tomba dans la trachée-artere, excita une toux convulsive si violente, que la cannule qu'on introduisit dans la plaie, ne put être retenue en situation, quoiqu'on la remît plusieurs fois en place.
M. Virgili qui voyoit le danger auquel le malade étoit exposé par le sang qui continuoit de couler dans la trachée-artere, dont l'ouverture, dans certains mouvemens qu'excitoient les convulsions, ne se trouvoit plus vis-à-vis celle de la peau, se détermina à fendre la trachée artere en long jusqu'au sixieme anneau cartilagineux. Après cette seconde opération le malade respira facilement ; & le pouls, qu'on ne sentoit presque point, commença à reparoître. On fit situer le malade la tête panchée hors du lit, la face vers la terre, afin d'empêcher le sang de glisser dans la trachée-artere. M. Virgili ajusta à la plaie une plaque de plomb percée de plusieurs trous, & par ses soins le malade guérit parfaitement.
L'entrée du sang dans la trachée-artere, a été la cause des accidens terribles qui ont presque fait périr le malade dont on vient de parler. Une simple ponction avec la lancette, ne l'auroit peut-être point mis dans la triste extrémité où il a été réduit par le moyen qu'on employoit pour lui sauver la vie. La ponction avec le trocart évite encore plus sûrement l'hémorrhagie, parce que la cannule ayant plus de volume que le poinçon qu'elle renferme, comprime tous les vaisseaux que la pointe divise pour son passage.
Cette opération a été pratiquée avec succès à Edimbourg en Ecosse : le malade en reçut d'abord tout le soulagement qu'on avoit lieu d'espérer ; mais la cannule s'étant bouchée par l'humeur que filtrent les glandes bronchiques, le malade fut menacé d'une suffocation prochaine. Un ministre, homme de génie, qui étoit près du malade, conseilla l'usage d'une seconde cannule, dont le diametre seroit égal à celui du poinçon d'un trocart. Cette cannule fut placée dans la premiere ; & lorsque la matiere des crachats s'opposoit au passage libre de l'air, on retiroit cette cannule, on la nettoyoit, & on la remettoit en place. Cette manoeuvre étoit très-importante pour le malade, & avoit l'avantage de ne lui causer aucune fatigue. Je tiens cette observation de M. Elliot, qui l'a oüi raconter à M. Monro, célébre professeur en Anatomie & en Chirurgie à Edimbourg.
Enfin on a cru que la bronchotomie étoit un secours pour rappeller les noyés d'une mort apparente à la vie. La persuasion où l'on est que les noyés meurent faute d'air & de respiration, comme si on leur eût bouché la trachée-artere, est le motif de cette application ; mais il est constant que les noyés meurent par l'eau qu'ils inspirent, & dont leurs bronches sont remplies. J'ai présenté un mémoire à l'académie royale des Sciences sur la cause de la mort des noyés, où je donne le détail de plusieurs expériences & observations convaincantes sur ce point. J'ai noyé des animaux dans des liqueurs colorées, en présence de MM. Morand & Bourdelin, que l'académie avoit nommés commissaires pour vérifier mes expériences, & ils ont vû que la trachée-artere & les bronches étoient absolument pleines de la liqueur dans laquelle j'avois noyé les animaux sujets de mes démonstrations. (Y)
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BRONNO | (Géog.) petite ville d'Italie dans le duché de Milan, dans le Pavésan, à 4 lieues de Pavie.
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BRONTEUS | S. m. (Myth.) de , tonnerre ; ainsi Jupiter bronteus n'est autre chose que Jupiter qui lance le tonnerre.
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BRONTIAS | (Hist. nat.) c'est une pierre que l'on nomme aussi batrachite & chelonite. On prétend, mais sans fondement, qu'elle tombe des nuages avec la grêle. Elle ressemble assez aux boutons qu'on porte sur les habits ; car un côté est convexe, & l'autre est concave ; en-dessus il part du centre à la circonférence dix rayons deux à deux. Cette pierre est fort dure ; la couleur en est d'un brun tantôt clair, tantôt foncé : il s'en trouve beaucoup en Danemark ; on dit qu'elle est plus grosse qu'un oeuf de poule. Gesner en compte six especes, qui ne different que dans la couleur plus ou moins foncée. (-)
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BRONZE | S. f. terme de Fonderie, est composé de deux tiers de cuivre rouge & d'un tiers de jaune, pour qu'elle soit plus douce & plus facile à travailler ; cependant pour la rendre moins soufflante & plus solide, on met un peu plus d'un tiers de cuivre jaune, auquel on joint un peu d'étain fin, qui empêche la bronze de refroidir trop vîte, & lui donne le tems de parvenir dans les parties extrèmes de l'ouvrage qui sont opposées au fourneau. Le poids de la bronze qui doit être employée, est de dix fois celui des cires ; ainsi sur 500 liv. de cire, il faut 5000 liv. de bronze : cependant on ne risque pas d'y en mettre un sixieme davantage, à cause du déchet du métal dans la fonte, & de la diminution du noyau au recuit.
Fonderie en bronze, ou art d'exécuter avec la bronze de grands ouvrages, comme les statues équestres, que nous prendrons ici pour exemple, parce qu'il sera facile d'y rapporter les autres morceaux de ce travail.
Tous les arts ont une sorte d'attelier qui leur convient, soit par sa construction, soit par la disposition de ses parties ; & c'est aux ouvrages qu'on y travaille à déterminer l'une & l'autre. Celui du fondeur en grand est un espace profond revêtu de murs au pourtour, au centre duquel l'ouvrage à fondre est placé. L'étendue de cet espace doit être proportionné à la grandeur de l'ouvrage, & laisser entre le moule de portée & le mur de recuit un pié de distance au moins. Cette espece s'appelle la fosse. La fosse peut être ronde ou quarrée. La fosse ronde se fait à moins de frais, parce qu'elle a moins de murs de pourtour ; & elle est plus solide, sur-tout quand elle est enfoncée en terre, parce que toutes les coupes de ses pierres sont dirigées vers un centre. On la creuse au-dessous du rez-de-chaussée, observant que la hauteur des eaux dans les lieux circonvoisins soit au-dessous de son aire, pour éviter l'humidité, qui est contraire dans toutes les occasions où le feu est employé à résoudre. C'est dans la fosse qu'on travaille le modele, le moule de plâtre, &c. lorsque les ouvrages sont grands, & qu'on risqueroit d'en tourmenter les pieces en les transportant. Pour mettre les ouvriers & les ouvrages à l'abri, on couvre la fosse d'un attelier provisionnel de charpente.
Au-dedans de la fosse est un mur fait d'une matiere capable de résister au feu : il laisse de l'espace entre son pourtour extérieur & le parement intérieur de la fosse. Cet espace sert pour retirer les cires, mettre le feu aux galeries, observer sans inconvénient si le moule de potée & le noyau sont bien recuits ; & ce mur est fait de grès ou de briques maçonnées avec de l'argile au pourtour, vers le dedans de la fosse. On peut le construire après coup ; il s'appelle mur de recuit.
Les galeries sont des espaces vuides, séparés par des murs de grès, élevés de deux assises de seize pouces d'épaisseur chacune, d'un pié de hauteur, & maçonnées avec de l'argile : elles sont ménagées au fond de la fosse sur un massif de deux rangs de briques, dont celles du premier rang sont sur le plat, & celles du second sur le champ. On distribue les assises de grès de maniere qu'il se trouve un mur plein sous les principaux fers de l'armature, comme les pointals, les jambes du cheval, &c. si l'on fond une statue équestre. C'est ainsi qu'on prévient leur inflexion, que la chaleur pourroit occasionner. Il y a sur les murs des galeries de fortes plates-bandes de fer, entaillées moitié par moitié aux endroits où elles se croisent : elles servent de base à l'armature, & c'est sur ces barres que la grille est posée.
La grille est un assemblage de plusieurs barres de fer plus ou moins espacées, & couchées de niveau en croisant les galeries. Son usage est 1°. de soûtenir le massif sur lequel on éleve le modele de plâtre ; 2°. de porter les briquaillons ; 3°. de lier par en haut les murs des galeries, qu'on contient encore en ajustant sur leur pourtour extérieur une embrassure de fer, bandée avec des mouffles & des clavettes.
Voyez fig. 1. Pl. de la Fonderie en bronze, le plan de la fonderie. A est la fosse ; B le fourneau ; C la chauffe ; D les galeries ; E les plates-bandes de fer ; F l'écheno ; G la grille ; H les portes. Fig. 2. le profil de la fonderie par sa largeur. A le comble de l'attelier ; B la fosse ; C le fourneau ; D les galeries ; E, E, passages pour tourner autour du mur de recuit. Fig. 3. le profil de la fonderie par sa longueur. A, A, le comble de l'attelier ; B la fosse ; C le fourneau ; D la chauffe ; E les galeries ; F passage pour tourner autour des galeries. Fig. 4. les galeries & la grille. A les galeries ; B les murs de grès des galeries ; C la grille de fer ; D les plates bandes ; E lieu des galeries.
Le modele est en Fonderie l'ouvrage même dont le métal doit prendre la forme. On fait les modeles de différentes matieres selon la grandeur des ouvrages : ils sont de cire jusqu'à la hauteur de deux piés ; d'argile ou de terre à potier, depuis deux piés jusqu'à hauteur d'homme ; & de plâtre, depuis ce terme jusqu'à tout autre. On commence à faire un petit modele, même quand il s'agit d'un grand ouvrage : quand les formes, les grandes parties, l'ensemble, sont arrêtés sur ce petit modele, on fait des études particulieres de chacune de ses parties ; on travaille ensuite au grand modele. Comme il est important que ce grand modele reste tel qu'on le travaille, & comme ses parties sont très-pesantes, & qu'on est long-tems à les terminer, on les construit avec beaucoup de solidité, & on les soûtient en-dedans sur un bâti de fer. Pour faire ce bâti, & donner aux fers dont il est assemblé les contours des parties à soûtenir ; on dessine contre un mur l'ouvrage dans toute sa grandeur, sous trois points de vûe, de front & des deux côtés : ce dessein dirige le forgeron. Quand les fers sont préparés, on les assemble sur une piece de bois qui traverse l'ouvrage dans sa longueur, & l'on assemble cette piece de bois avec son armature de fer sur une autre qui porte solidement dans les galeries, dans le massif, & sur l'argile : c'est là dessus qu'on forme le modele avec du plâtre gâché le plus également qu'il est possible. Il ne faut rien épargner pour la perfection du modele, car le métal fluide prendra toutes ses formes, & rendra ses défauts ainsi que ses beautés.
Le modele achevé, on travaille aux moules : on en fait deux ; l'un en plâtre qui donne le creux du modele ; & l'autre de potée & d'une terre composée, dont on verra dans la suite l'usage.
Pour faire le moule de plâtre, on commence par déterminer les dimensions de ses parties par des lignes tracées sur l'aire de la fosse ; & ces lignes sont données de position & de grandeur, par des à-plombs qu'on laisse tomber des parties saillantes de l'ouvrage. On prend autant de ces points qu'on en a besoin, & quand ils ont déterminé le pourtour des assises du moule, on ajoûte au-delà de ce pourtour exact quelques pouces pour l'épaisseur même du moule : cette addition donne une nouvelle figure semblable & circonscrite à la précédente. On a soin que les jointures des assises tombent aux endroits les moins remarquables, afin que les balevres occasionnées par les cires soient plus aisées à réparer. La premiere assise se pose sur l'aire de la grille, & à la hauteur du pié de l'ouvrage. On passe à la seconde : il faut que les lits des assises soient bien de niveau, & que les pieces du moule portent bien à-plomb les unes sur les autres ; elles en auront plus de solidité, & se replaceront plus facilement.
Entre les pieces de la premiere assise, il est à propos qu'il y en ait une qui traverse sans joint d'un des paremens du moule à l'autre ; elle servira de base à toutes les autres ; elle sera, pour ainsi dire, le centre auquel on les rapportera. On ne manquera pas de pratiquer aux différentes pieces du moule des entailles ou hoches, & des saillies latérales, par le moyen desquelles elles s'assemblent les unes avec les autres, & forment un tout solide.
Mais pour avoir ces parties, voici comment on s'y prend. On huile bien le modele, puis on lui applique du plâtre ; on prend les parties grandes, larges, & plates, tout d'un morceau ; pour les parties creuses & fouillées, comme les draperies, on en fait de petites pieces dans lesquelles on met des morceaux de fil-d'archal, tortillés par le bout en spirale ou anneau ; on passe une ficelle dans cet anneau, & on les lie avec une grande piece qui les renferme, & qu'on appelle leur chape : quand on a pris toutes les parties, on les laisse reposer & faire corps ; on les marque pour en reconnoître l'ordre & la suite, & on les sépare du modele, qu'on repare par-tout où cette opération peut l'avoir gâté.
Voyez Planche III. fig. 2. le moule de plâtre qui est le creux du modele de plâtre de la figure équestre. 1. Entaille ou hoches creuses : 2. entailles ou hoches de relief ; 3 premiere assise du moule. Fig. 3. le plan de la premiere assise du moule de plâtre, où l'on voit toutes les pieces du moule numérotées dans l'ordre qu'elles ont été faites, depuis 1 jusqu'à 25 ; 26 poitrails de l'armature de fer. Les autres assises du moule sont faites dans la même intention, en observant d'assise en assise que les pieces du dessus soient en liaison avec celles du dessous.
Quand on a le moule en plâtre, on s'en sert pour former un modele en cire, tout semblable au modele en plâtre : on donne à la cire l'épaisseur que l'on veut donner à la bronze. Les anciens, dit M. de Boffrand, ne prenoient pas la peine de faire le premier modele de plâtre, qui sert à déterminer l'épaisseur des cires : après avoir fait leur modele avec de la terre à potier préparée, ou avec du plâtre, ils l'écorchoient, en enlevant par-tout l'épaisseur qu'ils vouloient donner à la bronze ; desorte que leur modele devenoit leur noyau : ils faisoient recuire ce noyau, le couvroient de cire, terminoient ces cires, faisoient sur ces cires terminées le moule de potée, & achevoient l'ouvrage comme nous : mais on ne suit plus cette méthode que pour les bas-reliefs & les ouvrages d'exécution facile.
Quant aux grands ouvrages, quand on a assemblé toutes les pieces dans leurs chapes, on y met de la cire autant épaisse que l'on veut que la bronze le soit. Cette épaisseur totale des cires varie selon la grandeur des ouvrages ; & chaque épaisseur particuliere d'une piece, suivant la nature des parties de cette piece : on donne deux lignes d'épaisseur aux figures de deux piés ; un demi-pouce aux figures de grandeur humaine ; au-delà de ce terme il n'y a presque plus de regle. M. de Boffrand dit qu'au cheval de la statue équestre de la place de Louis le grand, on fit les cires massives jusqu'au jarret, pour être massives en bronze, & qu'on donna un pouce d'épaisseur aux cuisses, dix lignes aux autres parties jusqu'à la tête, & six lignes à la queue.
Il faut que la cire dont on se sert ait deux qualités presqu'opposées ; celle de prendre facilement les formes, & de les conserver après les avoir prises. Prenez cent livres de cire jaune, dix livres de térébenthine commune, dix livres de poix grasse, dix livres de sain doux ; mêlez, & faites fondre sur un feu modéré, de peur que la cire ne bouille, ne devienne écumeuse, & ne soit difficile à travailler : vous aurez ainsi un mélange qui satisfera aux deux conditions que vous requerez.
Quand cette composition sera prette, imbibez bien les pieces du moule en plâtre d'huile d'olive, de saindoux, & de suif fondus ensemble ; prenez de la composition que j'appellerai cire, avec des brosses de poil de blereau : répandez-la liquide dans les pieces du moule en plâtre ; donnez aux couches environ une ligne d'épaisseur ; abandonnez ensuite la brosse ; servez vous de tables faites au moule : ces moules sont à-peu-près semblables à ceux des fondeurs de tables de cuivre, où des tringles de fer plus ou moins hautes fixées entre deux surfaces unies déterminent l'épaisseur des tables ; ayez deux ais ; ajustez sur ces ais deux tringles ; amollissez vos cires dans l'eau chaude ; maniez-les bien comme de la pâte ; étendez-les avec un rouleau qui passe sur les tringles ; & mettez ainsi ces tables d'une épaisseur qui vous convienne.
Prenez vos pieces en plâtre couvertes d'une couche en cire ; ratissez cette couche ; faites-en autant à une des surfaces de vos tables de cire ; faites chauffer modérément ces deux surfaces écorchées, & appliquez-les l'une contre l'autre.
La quantité de cire employée détermine la quantité de métal nécessaire pour l'ouvrage. On compte dix livres de métal pour une livre de cire, non compris les jets, les évents, & les égoûts. M. de Boffrand dit qu'on employa pour la statue équestre de la place de Louis le grand 5326 livres de cire : ce qui demandoit par conséquent 53260 livres de métal, non compris les jets, les évents, & les égoûts.
Quand on a donné à toutes les cires les épaisseurs convenables, on démolit le modele en plâtre, en le coupant par morceaux, qui servent ensuite à reparer les cires. On remonte toutes les assises du moule jusqu'à la moitié de la hauteur du cheval, s'il s'agit d'une statue équestre ; & on établit au-dedans & au-dehors des assises l'armature du noyau.
L'armature est un assemblage des différens morceaux de fer destinés à soûtenir le noyau & le moule de potée d'un grand ouvrage de fonderie : entre ces fers, les uns restent dans le corps de l'ouvrage fondu, d'autres en sont retirés après la fonte : dans une statue équestre, ceux qui passent d'un flanc à l'autre du cheval, qui descendent dans la queue, & qui passent dans les jambes, sont assemblés à demeure ; les fers des jambes s'étendent même à trois piés au-delà des piés du cheval, & sont scellés dans le corps du pié-d'estal.
Voyez figure 1. Plan. III. l'armature de fer qui a été faite dans le corps du cheval, avec les pointals & piliers butans pour soûtenir la figure équestre.
Le noyau est un corps solide qui remplit l'espace contenu sous les pieces du modele en cire, quand elles sont assemblées : la matiere qui le compose doit avoir quatre qualités ; la premiere, de ne s'étendre ni resserrer sous les cires ; la seconde, de résister à la violence du feu, sans se fendre ni se tourmenter ; la troisieme, d'avoir du pouf, c'est-à-dire de résister au métal en fusion, & de céder au métal se refroidissant ; la quatrieme, de ne lui pas être analogue, c'est-à-dire de ne le point boire, & de ne point lui être contraire, ou de ne le point repousser ; ce qui occasionneroit dans le premier cas des vuides, & dans le second des soufflures.
Mêlez deux tiers de pâte avec un tiers de briques bien battues & bien sassées, & vous aurez la matiere requise. On mélange, on gâche cette matiere, & on en coule dans les assises du moule quand l'armature est disposée, allant d'assises en assises jusqu'au haut de la figure. Il est cependant à propos de savoir qu'on observe différens mélanges, & que le noyau des grandes figures n'est pas tout entier de la même matiere. Dans la formation du noyau de la statue équestre dont j'ai déjà parlé, les jambes qui portent devant être solides n'eurent point de noyau, on fit la queue, la jambe qui est levée, la tête, le cou, &c. de plâtre & de briques battues & sassées : le corps du cheval d'un mélange de deux tiers de terre rouge & sablonneuse, qu'on trouve derriere les Chartreux, & qui passe pour la meilleure de l'Europe pour ces sortes d'ouvrages, & d'un tiers de crotin de cheval & de bourre passés par les baguettes.
Avant que de commencer le noyau, on passe des verges de fer en botte entre les vuides des grands fers de l'armature, auxquels on les attache avec de gros fil d'archal ; ces verges tiennent les terres du noyau en état : on laisse cependant des trous pour passer la main & ranger les gâteaux de terre. Sous les parties inférieures, comme le ventre d'un cheval, où les terres tendent à se détacher de tout leur poids, on place des crochets en S qui les arrêtent. Quand le noyau est fait, on prend de la composition du noyau détrempée à une certaine consistance ; on en applique sur les cires avec les doigts, par couches d'environ un pouce d'épaisseur, qu'on fait bien sécher : on continue ainsi de couche en couche, se servant de gâteaux de la même composition de quatre pouces en quarré sur neuf lignes d'épaisseur, qu'on applique sur leur plat avec la même composition liquide, & qu'on unit avec les couches qu'on a déjà données aux cires, faisant toûjours sécher nuit & jour sans interruption, jusqu'à ce que les couches de terre à noyau ayent au pourtour des cires environ six pouces d'épaisseur ; ce qui suffira pour achever de recouvrir tous les fers de l'armature. Mais avant que ces fers soient recouverts, on pose dans le noyau un rang de briques en ceintre, maçonnées avec de la terre de la même composition que le noyau ; ce qui forme dans son intérieur une sorte de voûte. On a soin de bien faire sécher les parties intérieures du noyau, par des poêles qu'on dispose en-dedans, en y descendant, par une ouverture pratiquée à la croupe, si c'est une statue équestre ; & pour que le feu ne soit pas étouffé, on pratique au noyau des cheminées de trois pouces en quarré : ces cheminées sont au nombre de trois. Quand il est bien sec, on acheve de le remplir très-exactement avec de la brique bien seche, qu'on maçonne avec de la terre à noyau. S'il lui arrive de se resserrer & de diminuer en séchant, on le hache & on le renfle avec la même terre dont on l'a construit. Pour s'assûrer s'il est solide, on le frappe ; s'il sonne creux, il a quelque défaut, il n'est pas plein.
Quand le noyau du cheval d'une statue équestre est dans cet état, on éleve les assises de la figure ; on y ajuste les armatures, & l'on coule le restant du noyau avec la même composition, observant de pratiquer au-dedans de la figure des jets qui conduisent le métal aux parties coudées en montant : sans cette précaution ces parties resteroient vuides.
Quand le noyau est achevé, on démonte toutes les assises, en commençant par le haut ; on soûtient par des piliers butans les traverses principales de l'armature, qui percent les cires à mesure qu'on les découvre : on dépouille ensuite toutes les pieces de cire ; on pratique sur le noyau des repaires, pour les mettre à leur place ; on les place, & on a une figure en cire toute semblable au modele.
Pour fixer les cires sur le noyau, on y enfonce d'espace en espace des clous à tête large, sur lesquels on construit une espece de treillis avec du fil-d'archal. Ce treillis sert à soûtenir les cires. On les lie encore entr'elles avec de la cire chaude, qu'on coule dans leurs jointures, ensorte qu'il ne reste aucun vuide. On acheve alors de réparer les cires assemblées, car on avoit déjà fort avancé le reparage, quand elles étoient par pieces détachées. On se sert dans cette manoeuvre de l'ébauchoire & d'une toile dure & neuve, imbibée d'huile, avec laquelle on suit les contours du nud & des draperies : on pose ensuite les égoûts des cires, les jets & les évents.
Les jets, les évents, & les égoûts des cires sont des tuyaux de cire que l'on pose sur une figure après que la cire a été réparée. Ces tuyaux de cire étant ensuite enduits de la même terre que le moule, forment sur toute la figure & dans le moule de potée des canaux à trois usages : les uns servent d'égoûts aux cires, & se nomment égoûts ; les autres conduisent le métal du fourneau à toutes les parties de l'ouvrage, & s'appellent jets ; les autres sont des évents qui font une issue à l'air renfermé dans l'espace qu'occupoient les cires, & retiennent le nom d'évents. Sans cette précaution, l'air comprimé par le métal à mesure qu'il descendroit, pourroit faire fendre le moule.
On fait les tuyaux de cire creux comme des chalumeaux, ce qui les rend legers, & emporte moins de cire que s'ils étoient solides. Voici comment on les coule. On a des morceaux de bois tournés du diametre qu'on veut donner à ces canaux, & de deux piés de long ou environ : on construit sur ces petits cylindres un moule de plâtre de deux pieces égales, & fermé par un des bouts : on l'imbibe bien d'huile ; on le remplit de cire : quand il est plein, on le secoue bien : à l'approche du plâtre, la cire se fige : on renverse ce qui n'est pas figé, il reste une douille creuse, à laquelle on donne l'épaisseur qu'on veut, en recommençant de remplir de cire & de renverser.
Quand ces douilles ou tuyaux sont préparés en quantité suffisante, on les dispose sur la figure à deux pouces de sa surface. On commence par les égoûts de cire, qui servent par la suite de jets : ils sont soûtenus autour de l'ouvrage par des attaches ou bouts de tuyaux menus, soudés par un bout contre les cires de l'ouvrage, & de l'autre contre les égoûts. Il faut des égoûts à tous les endroits qui ont une pente marquée. Il y en a aux statues équestres à chaque pié du cheval, à chaque pié de la figure, à la queue du cheval, deux sous le ventre : on pose ensuite & de la même maniere, les jets & les évents.
Chaque ouvrier a sa maniere d'attacher. La bonne, c'est d'incliner les attaches des jets en descendant vers la figure, & par conséquent de couler la figure par le haut. Le diametre des jets, des égoûts, & des évents, est déterminé par la grandeur de l'ouvrage. Ils avoient les dimensions suivantes dans la fonte de la statue équestre de Louis XIV. dont nous avons déjà parlé. Les trois principaux jets, trois pouces quatre lignes de diametre ; les jets moins forts, 21, 18, 15, 12, 9 lignes ; les évents par le haut, 30 & 24 lignes de diametre, & en descendant, 13, 12, 9 lignes : les égoûts avoient les mêmes dimensions que les évents.
Quand on a poussé l'ouvrage jusqu'au point où nous venons de le conduire, on travaille au moule de potée & de terre. On prend trois sixiemes de terre de Châtillon, village à deux lieues de Paris, qu'on mêle avec une sixieme partie de fiente de cheval ; on a laissé pourrir ce mêlange dans une fosse pendant un hyver. A ce mêlange, on ajoûte ensuite deux sixiemes de creusets blancs & passés au tamis. On détrempe le tout avec de l'urine ; on le broye sur une pierre ; on en fait ainsi une potée très-fine. On commence par en mettre sur la cire, avec une brosse, quatre couches mêlées de blanc d'oeuf ; puis on mêle un peu de poil fouetté & passé par les baguettes, avec la composition précédente. On donne avec ce nouveau mêlange vingt-quatre autres couches ; observant de ne point appliquer une couche que la précédente ne soit bien seche : le moule prend ainsi environ un demi-pouce d'épaisseur. On ajoûte alors à la composition nouvelle moitié de terre rouge, de même qualité que celle du noyau, ayant soin de remplir les creux & autres lieux étroits où la brosse n'a pû pénétrer, avec cette composition un peu épaisse. Le moule a, à la quarantieme couche, environ deux pouces d'épaisseur. On met alors sous la figure, s'il en est besoin, sous le ventre du cheval, si c'est une statue équestre, des barres menues de fer plat ; croisées les unes sur les autres, entrelacées de fil-de-fer, & attachées aux gros fers de l'armature du noyau, qui percent les cires. Ces barres servent à soûlever les parties inférieures du moule, & à les empêcher de se détacher des cires. On pratique le même bandage sur le reste de la figure, par-tout où l'on craint que le moule ne fléchisse. On couvre ce premier bandage de terre rouge seule, délayée avec la bourre qu'on couche avec les doigts, jusqu'à ce que le moule ait environ huit pouces d'épaisseur par bas, & six pouces par haut.
Il faut avoir soin, avant que de commencer le moule de potée, de couper la cire en quelques endroits, afin d'avoir une ouverture à la bronze pour tirer du dedans de la figure les fers superflus de l'armature avec le noyau. En ces endroits on joint les terres du noyau avec le moule : mais on pratique des rebords de cire, dont le métal remplira l'espace ; ce métal débordant sera rabattu dans la suite, & servira à boucher l'ouverture pratiquée.
Cent cinquante couches achevent l'épaisseur du moule, sur lequel on pose ensuite des bandages de fer pour le rendre solide, & empêcher que la terre qui perd de sa force par le recuit, ne s'éboule. Ces bandages sont des fers plats, disposés en réseau : toute la figure en est couverte. On en remplit les mailles de terre & de tuileau. On place les tuileaux aux endroits où les fers du bandage ne touchent pas le moule. Sur ce bandage, on en pose un second, de maniere que les fers qui forment les mailles ou quarrés de ce second, croisent & coupent les mailles ou quarrés du premier. On remplit pareillement les endroits où ces barres ne touchent pas le moule, de terre & de tuileaux ; & le reste des mailles, de la même terre Dans toutes ces opérations, le moule a pris dix pouces d'épaisseur par bas, & sept par en haut.
On voit, fig. 1. Pl. III. à la partie antérieure, la figure équestre de cire, avec les jets, les évents, & les égoûts de cire. 1, jets ; 2, évents ; 3, égoûts de cire ; 4, attaches ; à la partie postérieure, le bandage de fer plat.
On songe alors à recuire le moule & à faire sortir les cires, car elles tiennent la place du métal ; pour cet effet on construit le mur de recuit ; on le fait d'assises de grès & briques posées avec du mortier de terre à four, afin qu'il résiste à la violence du feu. Sa premiere assise est sur le massif du fond de la fosse, d'où il s'éleve jusqu'au haut de l'ouvrage. Son parement intérieur est environ à dix-huit pouces de distance des parties les plus saillantes du moule de potée. On laisse à ce mur, des ouvertures correspondantes aux espaces pratiqués entre les murs des galeries, pour allumer le feu & l'entretenir. Ces ouvertures se bouchent avec des plaques de tole, afin de conserver la chaleur.
Quand une fosse est assez grande, le mur de recuit est isolé, & on en fait le tour aisément. Sur la grille qui couvre les galeries, on construit avec de la brique blanche de Passy, de petits murs de quatre pouces d'épaisseur par arcade, en tiers point, espacés de quatre pouces. On remplit le reste de l'espace du mur de recuit & du moule, de briquaillons, rangeant les plus petits vers le moule, & les plus gros vers le mur. On soûtient les fers de l'armature par des piliers de brique. A mesure que les briquaillons s'élevent, on place à l'issue des égoûts des conduits de tole qui traversent le mur de recuit & conduisent les cires. Pour s'assûrer si le moule & le noyau sont suffisamment recuits, on les perce avec une tariere en différens endroits ; & on place dans les trous des tuyaux de tole, qui passent aussi à travers le mur de recuit, & par lesquels on peut voir le moule & le noyau, & juger du recuit à la couleur. On conduit encore à-travers les briquaillons, de petites cheminées de trois à quatre pouces en quarré, qui montent du haut en bas de la fosse : elles donnent issue à la fumée. On éleve les principaux jets & évents, avec des tuyaux de tole ; & l'on couvre toute la face supérieure de la fosse & des briquaillons, d'une couche d'argile d'environ trois pouces d'épaisseur.
Cela fait, on allume un petit feu dans trois galeries de chaque côté. Ce feu dure un jour & une nuit. On l'augmente de celui qu'on fait ensuite dans deux autres galeries : on continue ainsi de galeries en galeries, finissant par celles qui sont les plus voisines de la figure ou de ses parties saillantes. On continue pendant neuf jours de suite ce feu de charbon modéré. Les cires coulent deux jours après que le feu a été allumé. On en avoit employé pour la statue équestre de la place de Louis le Grand 5568 livres, tant en ouvrage qu'en jets, égoûts, & évents ; & il n'en est sorti en tout que 2805 livres : le déchet s'est perdu dans le moule, dans le noyau, & en fumée.
Quand on s'est apperçu que le moule a rougi, on discontinue le feu peu-à-peu, puis on le cesse entierement : mais le moule & le noyau restent encore long-tems chauds. On attend qu'ils soient refroidis pour travailler à l'enterrage & à la fonte.
On commence par debarrasser entierement la fosse de tout ce qui remplissoit les galeries & l'espace qui est entre le mur de recuit & le moule. Ensuite on procede à l'enterrage ou au massif de terre dont on remplit la fosse autour du moule : on comble d'abord les galeries jusqu'à la hauteur de la grille, de moëllons maçonnés avec deux tiers de plâtre, & un tiers de terre cuite & pilée. On fait ensuite un solide sous les parties inférieures de la figure, du ventre du cheval si c'est une statue équestre ; ce solide est de briques maçonnées aussi avec le mêlange de plâtre & de terre cuite & pilée. On ferme toutes les ouvertures des murs de la fosse ; on acheve de la remplir jusqu'à deux piés au-dessus du moule avec de la terre ferme ; on met cette terre par couches de six pouces d'épaisseur, qu'on réduit à quatre avec des pilons de cuivre : mais de peur que l'humidité de cette terre ne nuise au moule, on y répand un peu de plâtre passé au sas. On avoit même goudronné le moule depuis le bas jusqu'à la moitié de la figure, dans la fonte de la statue équestre de la place de Louis le Grand.
A mesure que l'enterrage s'avance, on bouche les issues des égoûts & les trous de tariere, avec des tampons de terre : quant aux jets & aux évents, on les éleve avec des tuyaux de même composition que le moule de potée ; on fait bien sécher ces tuyaux avant que de les employer ; on les conduit jusqu'à l'écheno.
L'écheno est un bassin dont nous parlerons plus au long, où aboutissent les principaux jets, & dans lequel passe le métal liquide au sortir du fourneau, pour se précipiter dans les jets dont l'entrée est en entonnoir. Ces entonnoirs sont bouchés avec des barres de fer arrondies & de même forme, qu'on appelle quenouillettes.
Tout est alors disposé pour la fonte dans la fosse ; il ne s'agit plus que d'avoir un fourneau pour mettre la matiere en fusion : on commence par construire un massif profondément en terre, sur lequel on assied le fourneau de maniere que l'âtre en soit à-peu-près trois piés plus haut que le sommet de la figure à jetter ; & sur l'arase des murs, on a élevé en pans de bois trois côtés de l'attelier ; pour le quatrieme côté qui regarde la chauffe du fourneau, il est construit de moilon, & c'est un mur. Le fourneau doit être le plus près qu'il est possible de la fosse ; c'est pourquoi, en construisant le massif du fourneau qui forme un des côtés de la fosse, on y a fait deux renfoncemens en arcades, avec un pilier au milieu, derriere lequel on a pratiqué un passage vouté, pour communiquer d'une arcade à l'autre. Le parement du pilier du côté de la fosse a été fait avec des assises de grès pour résister au feu, qu'il devoit supporter comme partie du mur de recuit.
C'est la quantité de métal nécessaire à l'ouvrage qui détermine la grandeur du fourneau ; & c'est, comme nous l'avons déjà insinué, la quantité des cires employées, qui détermine la quantité du métal. Il fallut pour la statue équestre de la place de Louis le Grand, tant pour les égoûts, évents, jets, que pour le noyau, 6071 liv. de cire, ce qui demandoit 60710 livres de métal, à quoi l'on ajoûta 22942 livres de métal, à cause du déchet dans la fonte, de la diminution du noyau au recuit, & pour en avoir plûtôt de reste que moins.
Quand on a la quantité de métal que le fourneau doit contenir, on cherche quel diametre & quelle hauteur de bain de métal il doit avoir. Dans la fonte de la statue équestre qui nous sert d'exemple, sachant qu'un pié cube de métal allié pese 648 livres, on divisa 83652 par 648, & l'on trouva qu'il falloit que le fourneau contînt 129 piés cubes 60/648. On prit le diametre du fourneau pour cette fonte de dix piés neuf pouces en quarré, sur seize pouces & demi de hauteur, ce qui donne 129 piés cubes.
Le fourneau doit être percé par quatre ouvertures, une du côté de la chauffe par laquelle la flamme entre dans le fourneau, & qu'on appelle l'entrée de la chauffe ; une à l'autre extrémité vers la fosse par laquelle le métal fondu sort : deux autres qu'on nomme portes, sont par les deux côtés. Elles servent pour pousser le métal dans le fourneau, & pour le remuer quand il fond. On pratique encore deux ou quatre ouvertures dans la voute, qui sont comme les cheminées, & qu'on tient couvertes ou libres selon le besoin.
A côté du fourneau, à l'opposite de la fosse, on fait la chauffe. C'est un espace quarré dans lequel on fait le feu, & d'où la flamme est portée dans le fourneau. Le bois y est posé sur une double grille qui sépare sa hauteur en deux parties : l'inférieure s'appelle le cendrier. On retire les cendres par une porte ouverte du côté du nord ; parce que le feu qui met le métal en fusion, étant de reverbere, il est avantageux que l'air qui passe par cette porte, & qui le souffle, soit un vent froid qui donne au feu de l'activité.
Le fondement du fourneau ayant été fait solide, on pose l'âtre à la hauteur nécessaire pour qu'il ait pente vers l'écheno. On donna dans l'exemple de grande fonderie dont nous nous sommes servis, à l'âtre douze piés neuf pouces de diametre, pour que le mur du fourneau portât en recouvrement un pié dessus au pourtour avec trois rangs de briques, les deux premieres sur le plat, & la troisieme de carreaux de Sinsanson, proche Beauvais en Picardie, de huit pouces en quarrés, posés de champ, & maçonnés avec de la terre de même qualité que celle de noyau. Cet âtre avoit une pente de six pouces depuis la chauffe jusqu'au tampon, & un revers de trois pouces de pente depuis les portes jusqu'au milieu, ce qui formoit un ruisseau dans le milieu, pour en faire écouler le métal.
Au-dessus de l'âtre, on construit les murs & la voûte du fourneau avec des briques gironnées, c'est-à-dire plus larges & plus épaisses par un bout que par l'autre, de la tuilerie de Sinsanson, posées en coupe suivant le pourtour & le diametre de la voûte, maçonnées avec de la terre, & garnies par-derriere de briques du pays, posées avec de la terre en liaison & en coupe.
Le trou du tampon est en façon de deux cones unis par leurs bouts tronqués ; on bouche celui qui est du côté du fourneau, avec un tampon de fer de la figure de l'ouverture qu'il doit former, & de la terre qui remplit les joints : le tampon étant en cone, & bouchant par sa pointe, le métal ne peut le chasser. Ce trou de tampon est pratiqué dans son parement avec un rang de briques de Sinsanson, garni par-derriere de briques du pays, posées en terre, de même que les portes du fourneau.
La chauffe & son ouverture doivent être d'un contour aisé & allongé, afin que la flamme aille sans empêchement frapper au trou du tampon, d'où elle se répand & circule dans le fourneau. Au haut de la voûte de la chauffe il y a un trou par où l'on jette le bois ; on bouche ce trou avec une pelle de fer qui glisse entre deux coulisses de fer au-dessus de cette ouverture. Dans l'épaisseur du mur du fourneau du côté de la chauffe, on met une plaque de fer fondu de quatre piés de long, qui descend huit pouces plus bas que l'âtre du fourneau, à un pié de distance du parement du mur de la chauffe, de crainte que si le feu faisoit quelque fracture aux murs du fourneau, le métal ne s'écoulât dans la chauffe. Par la même raison on fortifie le fourneau en tout sens avec des tirans de fer qui passent sous l'âtre, & sur la voûte du fourneau, & qui sont pris par leurs bouts dans des ancres de fer qui saisissent d'autres barres posées de niveau sur les paremens des murs du fourneau.
Les ouvertures du comble qui donnent du jour dans ces atteliers doivent être en lucarnes damoiselles, c'est-à-dire plus élevées sur le devant que sur le derriere, afin de donner plus de jour, & laisser plus facilement échapper la fumée. Voyez Pl. II. fig. 5. plan du fourneau où l'on fait fondre la bronze ; A, le fourneau ; B, portes ; C, la chauffe ; D, la grille ; E, le conduit à l'écheno ; F, l'écheno, fig. 6. profil du fourneau ; 1, le fourneau ; 2, les portes ; 3, la chauffe ; 4, la grille ; 9, ouverture pour jetter le bois dans le fourneau, fig. 7. profil du fourneau en largeur ; 1, 1, le fourneau ; 2, les portes ; 3, la chauffe, 12, 12, les cheminées.
Voilà les regles générales pour la construction d'un fourneau ; l'expérience & le bon sens apprendront au Fondeur, quand & comment il doit ou les modifier ou s'en écarter.
Lorsque le fourneau pour la statue équestre de la place de Louis-le-grand fut construit, comme nous avons dit, on fit trois épreuves à la fois ; l'une de la bonté du fourneau ; l'autre sur la durée du métal en état de fusion, & la troisieme sur la diminution pendant la fonte. On y fondit 19090 livres de vieilles pieces de canons, lingots de cuivre moitié rouge, moitié jaune ; le mélange fut mis en fusion en vingt-quatre heures, coula près de 50 piés de longueur à l'air sans se figer, & l'on n'en retira que 15714 livres nettes. Le déchet venoit de l'évaporation du métal jaune, & de la perte de la quantité dont l'âtre neuf s'étoit abreuvé.
L'alliage ordinaire de la bronze pour les figures est de deux tiers de cuivre rouge, & d'un tiers de cuivre jaune ; mais on rendra la bronze plus solide & moins soufflante, si l'on met un peu plus de cuivre jaune. On prit pour la grande fonte de la statue équestre de la place de Louis-le-grand, en lingots de la premiere fonte, 15714 ; en culasses de vieilles pieces de canon, 6188 ; en lingots faits de deux tiers de cuivre rouge & d'un tiers de cuivre jaune, 4860 ; en autres lingots de cuivre, moitié rouge & moitié jaune, 45129 ; en métal rouge, 3539 ; en métal jaune, 3500 ; en lingots provenant de la fonte de la statue de Sextus Marius, 2820 ; en étain fin d'Angleterre, 2002. Total, 83752.
Pour commencer la fonte, on couvre l'âtre du fourneau de lingots élevés par bouts les uns sur les autres, afin que la flamme puisse circuler entr'eux. On allume le feu dans la chauffe avec du bois sec. La flamme est portée dans le fourneau par l'ouverture de la chauffe, & s'y répand. Quand les premiers lingots sont en fusion, on continue d'en mettre d'autres qu'on a tenu exposés au feu sur les glacis des portes du fourneau, d'où ils coulent quelquefois d'eux-mêmes en fusion dans le fourneau. Si on les y jettoit froids, ils feroient figer le métal en fusion, qui s'y attacheroit, & formeroit un gâteau. Ce n'est pas là la seule maniere dont le gâteau se puisse faire. L'humidité d'une fumée épaisse qui se répandroit dans le fourneau ; le rallentissement de la chaleur d'un feu mal conduit ; la moiteur d'un mauvais terrein, &c. suffisent pour causer cet accident, à la suite duquel il faut quelquefois rompre le fourneau, retirer le métal, le diviser & le remettre en fonte.
Quand tout le métal est fondu, on continue le feu ; & on ne le présume assez chaud, que quand la flamme du fourneau devient rouge, que quand les crasses se fendent à sa surface, & montrent en s'écartant d'elles-mêmes un métal brillant comme un miroir, & qu'en le remuant avec des pelles de bois, il s'en éleve une fumée blanche : alors on débouche le fourneau en enfonçant le tampon avec une barre de fer suspendue, qu'on appelle perrier ; le tampon enfoncé, le métal coule dans l'écheno qu'on a eu soin de faire bien chauffer. On leve les quenouillettes par le moyen d'une bascule, & le métal se précipite dans les jets ; on peut espérer du succès, quand il coule sans bouillonner ni cracher, qu'il en reste dans l'écheno, & qu'il remonte par les évents. Pour la statue équestre de Louis XIV. le fourneau fut en feu pendant 40 heures ; & il resta dans l'écheno 21924 l. de métal. Voy. Pl. I. l'attelier de la fonderie dans le tems que l'on fond le métal dans le fourneau, & que l'on coule la figure en bronze ; 1, le fourneau ; 2, portes par lesquelles on remue le métal dans le fourneau ; 3, cheminées par lesquelles la fumée sort du fourneau ; 4, bascules par lesquelles on leve & ferme les portes du fourneau ; 5, trou du tampon par lequel sort le métal pour couler dans l'écheno ; 6, perrier avec lequel on pousse le tampon dans le fourneau pour en faire sortir le métal, afin qu'il coule dans l'écheno. Ce perrier est suspendu par une chaîne de fer ; 7, 7, 7, trois quenouilles dans l'écheno où elles bouchent les entrées du métal, au haut des trois jets, par lesquels le métal se répand dans tous les jets de la figure ; 8, 8, bascule pour lever en même tems les trois quenouillettes, afin que le métal entre dans les trois principaux jets ; 9, 9, écheno en maniere de bassin, dans lequel coule le métal au sortir du fourneau, pour entrer dans les trois principaux jets en même tems, quand on a levé les quenouillettes.
On laisse reposer le métal dans le moule pendant trois ou quatre jours afin qu'il y prenne corps, & quand la chaleur est entierement cessée, on le découvre, & l'on a une figure toute semblable à celle qu'on avoit exécutée en cire. On a poussé la fonderie si loin, que la cire n'étoit quelquefois guere plus nette que ne l'est l'ouvrage fondu, & qu'on pourroit presque se contenter de le laver, & de l'écurer avec la lie de vin : mais les gens habiles qui sont toûjours difficilement contens d'eux-mêmes, retouchent les contours de leurs figures. D'ailleurs il y a des trous à boucher, des jets à couper, des évents & d'autres superfluités à enlever ; c'est ce qu'on exécute avec des ciseaux. On se sert de la marteline pour détacher une crasse qui se forme sur l'ouvrage du mélange de la bronze même & de la potée, & qui est plus dur que la bronze même. La marteline est une espece de marteau d'acier pointu par un bout, & à dents de l'autre, avec lequel on frappe sur l'ouvrage, pour ébranler la crasse qu'on enleve ensuite au ciseau. On employe aussi le grattoir, le rifloir, & le gratte-bosse ; on acheve de nettoyer avec l'eau-forte, dont on frotte l'ouvrage avec une brosse, usant aussi du grattoir & du gratte-bosse. On réitere cette manoeuvre trois ou quatre fois ; puis on écure avec la lie de vin.
Quant aux petits ouvrages, quand on en a ôté les jets, on les laisse tremper dans l'eau-forte pendant quelque tems ; la crasse se dissout & se met en une pâte qu'on ôte aisément.
On bouche en suite les trous en y coulant des gouttes de métal. On appelle goutte, ce que l'on fond après coup sur un ouvrage ; ces gouttes remplissent quelquefois les plus grands creusets.
Pour les couler, on taille la piece en queue d'aronde, en la fouillant jusqu'à moitié de l'épaisseur de la bronze. On y met de la terre que l'on modele suivant le contour qu'elle doit avoir, & sur laquelle on fait un moule de terre, ou de plâtre & brique, au-dessus duquel on pratique un évent & un petit godet qui sert de jet pour y faire couler le métal ; on déplace ensuite cette piece du moule, pour la faire recuire comme le moule de potée, & après avoir ôté la terre du trou où l'on doit couler la goutte, on remet cette portion recuite dans sa place, en l'attachant avec des cordes à l'ouvrage, pour qu'elle y soit jointe ; de maniere que le métal ne puisse s'écouler. Après avoir fait bien chauffer le tout, on y coule le métal, fondu très-chaud dans un creuset, ensorte qu'il fasse corps avec la bronze : on pratique la même chose aux fentes : mais si elles se trouvent dans un endroit où il seroit difficile de jetter du métal, on lime une piece de la même étoffe que l'ouvrage, & de la mesure de la fente, & on l'enfonce à force, après avoir entaillé cette fente en queue d'aronde, de la moitié de l'épaisseur de la bronze.
On acheve enfin tout ce grand travail en vuidant la piece fondue de son noyau ; si c'est une statue équestre, on descend dedans par l'ouverture pratiquée au-dessus de la croupe : on retire une partie des fers de l'armure & du noyau par le haut ; le reste s'écoule par les ouvertures du ventre. On bouche bien tous ces trous. Si on négligeoit ce soin, les ouvrages venant à se charger d'eau en hyver ; & cette eau descendant dans les parties inférieures, dans les cuisses & dans les jambes, elle pourroit s'y glacer, & détruire les formes de ces parties, peut-être même les ouvrir. On coupe les jets ; on enleve avec un ciseau les barbures ; on repare l'ouvrage jusqu'à ce qu'il n'y ait plus rien à desirer, & on le tire de la fosse, pour le placer sur son pié-d'estal.
Quels travaux, quelles dépenses, quelle industrie ! Mais doit-on rien épargner quand il s'agit d'éterniser la mémoire des souverains, qui ont rendu leurs peuples heureux ? Pour les princes oisifs ou méchans sont-ils dignes des honneurs du bronze ? Perdez-vous, art divin, sous les regnes des Claudes, des Nérons, & des Caligulas, & ne vous retrouvez que sous les regnes des Tites, des Trajans, & des Antonins.
La statue équestre élevée par la ville de Paris dans la place de Louis-le-grand en 1699, est la plus grand ouvrage qui ait peut-être jamais été fondu d'un seul jet ; il a vingt-un piés de haut. Les statues équestres de Marc-Aurele à Rome, de Cosme de Medicis à Florence, d'Henri IV. & de Louis XIII. à Paris, ont été fondues par pieces séparées. Il en est de même de la chaire de l'église de S. Pierre de Rome ; cet ouvrage, qui a quatre-vingt piés de haut, est fait de pieces remontées sur une armature.
Les Egyptiens, les Grecs, ont connu l'art de fondre : mais ce qui reste de leurs ouvrages, & ce que l'histoire nous apprend des autres, n'est que médiocre pour la grandeur. Le colosse de Rhodes, ainsi que quelques autres ouvrages qui nous paroissent prodigieux aujourd'hui, n'étoient, selon toute apparence, que des platines de cuivre rapportées : c'est ainsi qu'on a fait la statue du connétable de Montmorency, élevée à Chantilly.
On peut exécuter de très-grands ouvrages d'un seul jet ; l'expérience qu'on fit du fourneau de la statue équestre de la place de Louis-le-grand, prouve que le métal en fusion peut couler à cinquante piés à l'air sans se figer ; c'est ce que Landouillet n'ignoroit pas. Quand on proposa de faire dans le choeur de Notre-Dame de Paris un autel en baldaquin de bronze de cinquante piés de haut, pour acquiter le voeu de Louis XIII. cet habile fondeur, commissaire de la fonderie de Rochefort, s'offrit de le fondre d'un seul jet dans le choeur même de Notre-Dame, dans la place où le modele étoit fait, établissant ses fourneaux dans l'église, ensorte qu'il n'y eût eu aucun embarras de transport. Ce projet étoit beau & possible, mais au-dessus des lumieres de son tems ; & l'on pourroit dire que Landouillet naquit un peu trop-tôt.
Lorsque M. le Moine, habile sculpteur, exécuta la statue équestre de Louis XV. pour la ville de Bordeaux, il y avoit 50 ans que celle de Louis XIV. pour la ville de Paris avoit été fondue ; les mouleurs, les forgerons, & les fondeurs qu'on y avoit employés n'étoient plus vivans ; & la pratique en étoit presque perdue, sans les mémoires & les desseins recueillis par M. Boffrand, & communiqués à M. le Moine : ce fut à l'aide de ces mémoires que l'art de fondre d'un jet des statues équestres se retrouva. A l'égard de la statue équestre de Louis XIV. dont M. de Boffrand a expliqué la fonte & les ouvrages dans un ouvrage intitulé, Description de ce qui a été pratiqué pour fondre la statue équestre, &c. la sculpture est de François Girardon, dont les ouvrages font l'éloge mieux que je ne pourrois faire ; & la fonte & ses opérations ont été conduites par Jean-Baltasar Keller, suisse de nation, homme très-expérimenté dans les grandes fonderies.
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BRONZER | c'est appliquer la bronze sur les figures & autres ornemens de bois, plâtre, ivoire, &c. ensorte que la bronze résiste à l'eau. On prend du brun rouge d'Angleterre broyé bien fin, avec de l'huile de noix & de l'huile grasse, on en peint toute la figure qu'on veut bronzer, puis on laisse bien sécher cette peinture : quand elle est bien seche, on y donne une autre couche de la même couleur, qu'on laisse encore sécher ; après quoi l'on met dans une coquille ou godet du vernis à la bronze (voyez VERNIS à la bronze), & avec un pinceau imbibé de ce vernis, & que l'on trempe dans de l'or d'Allemagne en poudre, on l'étend le plus également qu'il est possible sur la figure qu'on veut bronzer. Au lieu d'or d'Allemagne on peut prendre de beau bronze qui n'est pas si cher, & qui fait un bel effet : il y en a de plusieurs couleurs.
BRONZER, terme d'Arquebusier & autres ouvriers en fer, c'est faire prendre au canon d'un fusil une couleur d'eau. Les Arquebusiers font chauffer ce canon jusqu'à un certain point, le posent dans les tenailles en bois qu'ils assujettissent dans l'étau, & le frottent ensuite un peu fort avec la pierre sanguine, jusqu'à ce que le canon ait pris la couleur.
BRONZER, terme de Chamoiseur, Peaussier & Corroyeur, façon qui se donne aux peaux de maroquin & de mouton, par laquelle au lieu d'en former le grain, on y éleve à la superficie une espece de bourre ou velouté, semblable à celle qu'on remarque sur les basannes velues. Le bronzé se fait toûjours en noir ; c'est avec les peaux qui ont été bronzées qu'on fait des souliers & des gants de deuil, qu'on appelle souliers bronzés, & gants bronzés, Voyez CHAMOISEUR.
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BRONZES | S. m. pl. (Antiquit.) les Antiquaires donnent ce nom aux figures humaines, aux animaux, aux urnes, aux tables, & en général à tout morceau de sculpture, ou même d'architecture un peu considérable, fondus de ce métal par les anciens, & échappés aux ravages des tems.
On tire de ces morceaux des instructions très-certaines sur un grand nombre de faits. Nous en possédons beaucoup ; & il n'y a aucun doute que le nombre n'en fût beaucoup plus considérable, si les plus grands bronzes n'avoient été fondus dans les tems de barbarie : alors on saisissoit avidement ces métaux, comme des matériaux dont le poids faisoit tout le prix.
Nous donnons aussi le nom de bronzes à toutes les pieces un peu importantes que nous faisons fondre de ce métal, soit que ces pieces soient des copies de l'antique ; soit que ce soient des sujets nouvellement inventés.
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BROQUELEUR | S. m. (Econom. rustiq.) c'est ainsi qu'on appelle un trou du diametre de quatre à cinq lignes, pratiqué sur le devant des tonneaux : on le laisse ouvert pendant dix à douze jours après qu'on a abandonné les vins nouveaux ; passé ce tems, on y place une cheville haute de deux pouces, qu'on puisse ôter & mettre facilement, pour donner de l'air au vin nouveau dans le cas qu'il vînt encore à s'émouvoir. On se sert de la même ouverture pour remplir les tonneaux pendant deux ou trois semaines, tous les huit jours une fois ; pendant un mois ou deux, tous les quinze jours une fois ; & enfin tous les deux mois une fois. On prétend qu'il faut être très-exact à faire ces remplissages dans les commencemens, lorsque le vin bouillonne encore, & cherche à se débarrasser de ses impuretés ; & qu'il ne faut pas les négliger dans la suite ; le vin restât il des années entieres dans la cave.
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BROQUETTE | S. f. (Cloutier) c'est la plus petite sorte de clous ; il y en a depuis quatre onces jusqu'à deux livres le millier : on donne le nom de broquette emboutie ou estampée à ces dernieres. Il y a une grosse broquette de trois livres au millier qui se vend au cent. Les broquettes au-dessous de celles-ci se vendent à la somme, qui est de douze milliers. Voyez CLOU.
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BRORA | (Géog.) ville de l'Ecosse septentrionale dans le comté de Southerland, à l'embouchure de la riviere de même nom.
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BROSSÆA | S. f. (Hist. nat. bot.) genre de plante dont le nom a été dérivé de celui de Guy de la Brosse, premier intendant du jardin du Roi. La fleur des plantes de ce genre est monopétale, campaniforme, & cependant ressemblante à un cone tronqué. Cette fleur est soûtenue sur un calice profondément découpé, du milieu duquel il s'éleve un pistil qui devient dans la suite un fruit composé de cinq capsules, rempli de semences menues, & renfermé dans le calice de la fleur, qui devient charnu, mou, sphérique, qui est ouvert par cinq fentes. Plumier, Nova plant. Amer. gener. Voyez PLANTE. (I)
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BROSSE | S. f. se dit en général de tout instrument à poil, ou à fil-d'archal, ou de laiton, qui sert soit à nettoyer, soit à d'autres usages semblables : ce sont les Vergettiers qui font les brosses ; & l'on en distingue un grand nombre de sortes, tant par la forme que par l'emploi. Quant à la maniere de les fabriquer, elle est fort simple ; on perce une planche de plusieurs trous, on y insere les poils pliés ; on arrête ces poils dans les ouvertures par des ficelles ou du fil d'archal qui les embrassent par le milieu ; on couvre ces attaches de peau, de maroquin, &c. on coupe les poils pour les égaliser & la brosse est faite. Voyez VERGETTE.
BROSSE à l'apprêt, ce sont des brosses courtes qui n'ont rien de particulier que cette forme. Elles servent dans toutes les occasions où le frottement devant être violent, il faut que le poil ait une certaine consistance.
BROSSES de carrosse, sont celles qui sont à queue, larges vers la poignée ou la queue, allant toûjours en rétrécissant jusqu'à l'autre bout, & dont on se sert pour nettoyer le dehors & l'intérieur du carrosse.
BROSSES à cheval, celles dont on se sert pour étriller les chevaux & leur polir le poil : elles sont à poil de sanglier coupé court, & monté sur un bois rond, avec une courroie par-dessus qui prend la main entr'elle & le bois.
BROSSES à chirurgien, celles dont quelques medecins ordonnent l'usage à ceux qui sont incommodés de rhûmatismes, prétendant que cette espece de friction ouvre les pores, & fait transpirer l'humeur qui cause la douleur.
BROSSE à dent, est celle dont le poil court est attaché dans les trous d'un fût d'os ou d'ivoire avec du fil-d'archal : elle est ainsi nommée parce qu'elle sert à nettoyer les dents.
BROSSE à trois faces, celle qui a trois faces, dont chacune a son usage particulier. On s'en sert pour brosser les tapisseries, le plancher, & les housses des lits. Elle est faite de soie de sanglier.
BROSSE d'Imprimerie, celle qui sert à laver les formes dans la lessive, d'abord avant de les mettre sous presse, ensuite le soir quand la journée est faite, & enfin quand le tirage est fini. Cette brosse est grande, & doit être de poil de sanglier.
BROSSES à ligner, sont celles dont les Peintres se servent pour tracer des moulures dans leurs tableaux, & autres ornemens semblables. Voyez PINCEAU.
BROSSE à lustrer, celle dont les Gainiers se servent, à peu-près comme des vergettes un peu douces, qu'ils trempent dans de l'encre s'ils veulent lustrer leurs ouvrages en noir : ils en ont aussi pour les autres couleurs.
BROSSES à lustrer, celles dont les Chapeliers se servent pour lustrer les chapeaux : elles sont de poil de sanglier, & de douze loquets sur six.
BROSSES à morue ; elles sont ainsi nommées parce qu'elles servent à laver & dessaler la morue ; elles sont faites de chien-dent, & ont huit loquets sur cinq.
BROSSE à borax, en terme d'Orfévre en grosserie, celle qui sert à ôter le borax qui est resté sur une piece qu'on a soudée. Voyez DEROCHER.
BROSSES à peigne ; celles dont on se sert pour nettoyer le peigne : elles sont à queue, & rondes.
BROSSE à Peintre, est un gros pinceau de poil de porc médiocrement fin, & garni d'un manche assez long. Les Peintres s'en servent pour leurs grands ouvrages en détrempe & en huile.
BROSSES à plancher, sont des brosses de quatorze sur sept, c'est-à-dire qui ont de long quatorze loquets ou paquets de soie, sur sept de large. On les appelle brosses à plancher, parce que ce sont celles dont les frotteurs se servent pour frotter les planchers : elles sont garnies d'une courroie pour mettre le pié, afin que le frotteur puisse les promener par-tout sans qu'elles lui échappent du pié.
BROSSE de Relieurs-Doreurs, elle est d'une forme ordinaire ; ces ouvriers s'en servent pour nettoyer leurs fers à dorer, & en ôter la cendre qui peut y être entrée en les faisant chauffer au fourneau.
BROSSE à Tapissier. Voyez RATEAUX.
BROSSES à tête, sont des brosses faites en forme de cylindre ou de rouleau. Elles sont de poil de sanglier ou de chien-dent, simples ou doubles : les unes & les autres se ficellent par un bout, si elles sont simples, & par le milieu si elles sont doubles ; & l'endroit par où elles ont été ficelées se couvre d'étoffe, de drap, de cuir, &c. & leur sert de poignée.
BROSSES de Tisserand, sont des brosses faites de bruyere à l'usage des Tisserands ; ils s'en servent pour mouiller leur brin sur le métier.
BROSSES de toilette, celles qui servent à vergeter les habits ; elles tiennent leur nom de la toilette des hommes ou des femmes, dont elles sont un des principaux ustensiles.
BROSSE de Tondeur, est celle qui est en forme de vergette, fort rude, dont les tondeurs se servent pour donner la premiere façon, & commencer à coucher la laine sur le drap. Voyez DRAPERIE.
BROSSE à tuyau, celle dont les Doreurs sur bois se servent pour coucher d'assiette dans les filets : elle est montée sur un manche fort petit & garni d'un bouton. Ce manche passe dans un tuyau comme un crayon, & par le moyen du bouton qui glisse le long du tuyau par la fente qu'on y a faite, le poil de la brosse se resserre ou s'écarte à proportion qu'on le fait entrer plus ou moins dans le tuyau. Voyez la figure 14. Planche du Doreur.
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BROSSER | v. act. se dit, en général, de l'action de nettoyer avec une brosse.
BROSSER un cheval, (Manége) c'est le frotter avec la brosse, pour ôter la poussiere de dessus son corps. (V)
BROSSER, chez les Tondeurs, c'est arranger & coucher avec une brosse la laine sur le drap, & en faire sortir la poussiere & la crasse qui pourroit s'y trouver.
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BROSSURE | S. f. c'est ainsi qu'on appelle, en Teinture en peaux & en cuir, la couleur que l'on donne avec la simple brosse. Cette teinture est la moindre qu'il soit permis de donner par les statuts.
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BROU | S. m. (Teinture) c'est ainsi qu'on appelle la coque verte de la noix. Il est permis aux teinturiers de l'employer dans quelques couleurs, mais non dans toutes. Les Tourneurs, Menuisiers, &c. s'en servent pour donner aux bois blancs la couleur du boüis, & les Distillateurs en tirent un ratafia, dont on fait cas.
BROU, (Géog.) ville de France, dans le Perche, sur la riviere de Douxaine, près de Châteaudun.
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BROUAGE | (Géog.) ville forte de France, en Saintonge, avec un havre, fameuse par ses salines. Long. 16. 35. 26. lat. 45. 50. 11.
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BROUAY | (Géog.) petite ville de France, avec titre de comté, près de Bethune, dans la province d'Artois.
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BROUCK | (Géog.) petite ville d'Allemagne, dans le cercle de Westphalie, au duché de Berg, sur la Roer.
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BROUEK | (Géog.) ville de Suisse, dans l'Argon sur l'Aar.
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BROUET NOIR | (Littérat.) c'étoit un des mets exquis des anciens Spartiates, mets dont les auteurs grecs & latins ont parlé tant de fois, & que le docte Meursius, par des conjectures tirées d'Athénée, croit avoir été composé de chair de porc, de vinaigre & de sel. Le lecteur a peut-être bien vu dans les questions tusculanes ce que Cicéron rapporte agréablement de Denys, tyran de Sicile, qui avoit été si fort tenté de goûter du brouet noir, qu'il fit venir exprès un cuisinier de Lacédémone pour le mieux apprêter. Au premier essai le tyran s'en rebuta, & s'en plaignit au cuisinier qui lui dit qu'il avoit raison, & qu'il y manquoit une sauce. Denys ayant demandé quelle sauce : " c'est le travail de la chasse, poursuivit le cuisinier ; ce sont les courses sur le rivage de l'Eurotas, & la faim & la soif des Lacédémoniens ".
(Le Chevalier DE JAUCOURT.)
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BROUETTE | S. f. petite machine faite en forme de charrette, qui n'a qu'une roue, & que celui qui s'en sert pousse devant soi par le moyen de deux especes de timons soûtenus d'un côté par l'essieu de la roue, & de l'autre par les mains de celui qui conduit la machine, qui pour cet effet se met au milieu.
La broüette est un instrument à l'usage de beaucoup d'ouvriers différens, comme les Vinaigriers, les Jardiniers, les Tanneurs, Mégissiers, &c.
On appelle encore broüette une voiture fermée, à deux roues, & traînée par un seul homme.
BROUETTE, en terme de Blanchisserie, c'est un instrument de bois à deux piés, à deux bras ou manches, & terminé à l'autre extrémité par une petite roue montée sur un boulon de fer en-travers, & arrêté à chaque bout dans la principale piece, qui est à la broüette ce que les limons sont à une charrette. Les broüettes de Blanchisserie sont à plat sans aucun bord, & servent à transporter la cire en rubans, dans des mannes, de la baignoire aux toiles, & des toiles dans la chaudiere au magasin, &c. Voyez RUBANS, TOILES, BAIGNOIRE, &c. Voyez Planche du Blanchissage de cire & l'article BLANCHIR.
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BROUILLAMINI | sub. m. (Pharmacie) nom que l'on donne à des masses de bol qui sont de la grosseur du doigt : on les appelle aussi bol en bille.
Ce mot convient à tous les mélanges de remedes faits sans beaucoup de méthode & d'égard aux facultés & aux indications : on peut confondre ce mot avec le pot-pourri, qui signifie à-peu-près la même chose. (N)
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BROUILLARD | S. m. (Physiq.) espece de météore, composé de vapeurs & d'exhalaisons qui s'élevent insensiblement de la terre, ou qui tombent lentement de la région de l'air, desorte qu'elles y paroissent comme suspendues. Lorsque le brouillard n'est composé que de vapeurs aqueuses, il n'est point du tout nuisible à la santé des animaux, & il ne sent pas mauvais : mais lorsqu'il est composé d'exhalaisons, il rend alors une mauvaise odeur, & est très-mal sain. Lorsque le brouillard est composé d'exhalaisons, on trouve quelquefois sur la surface de l'eau après la chûte du brouillard, une pellicule grosse & rouge, assez semblable à celle que les Chimistes observent lorsqu'ils préparent leur soufre doré d'antimoine.
Il tombe souvent en France, quand les années sont trop pluvieuses, une espece de brouillard gras, que les Laboureurs & les Jardiniers nomment nielle, & qui gâte les grains : le seigle sur-tout se corrompt à un tel point, que le pain dans lequel il entre, devient pernicieux à cause de la gangrene. Voyez NIELLE.
Lorsqu'il y a du brouillard, l'air est calme & tranquille, & il se dissipe dès que le vent vient à souffler.
Le brouillard paroît plus sensiblement le soir & le matin. Voici pourquoi. Le soit, après que la terre a été échauffée par les rayons du soleil, l'air venant à se refroidir tout-à-coup après le coucher de cet astre, les particules terrestres & aqueuses qui ont été échauffées, s'élevent dans l'air ainsi refroidi ; parce que dans leur état de raréfaction, elles sont plus legeres que l'air condensé. Le matin, lorsque le Soleil se leve, l'air se trouve échauffé par ses rayons beaucoup plûtôt que les exhalaisons qui y sont suspendues ; & comme ces exhalaisons sont alors d'une plus grande pesanteur spécifique que l'air, elles retombent vers la terre.
Le brouillard est plus fréquent en hyver qu'en aucun autre tems, parce que le froid de l'atmosphere condense fort promtement les vapeurs & exhalaisons. C'est par la même raison qu'en hyver l'haleine qui sort de la bouche forme une espece de nuage qui ne paroît pas en été. De-là vient encore que le brouillard regne plusieurs jours de suite dans les pays froids du Nord.
Le brouillard se manifeste, soit que le barometre se trouve haut ou bas. Le brouillard étant une espece de pluie, n'a rien d'étonnant, quand le mercure est bas : mais lorsqu'il se tient haut, on aura du brouillard : 1°. si le tems a été long-tems calme, & qu'il se soit élevé beaucoup de vapeurs & d'exhalaisons qui ayent rempli l'air & l'ayent rendu sombre & épais : 2°. si l'air se trouvant tranquille, laisse tomber les exhalaisons, qui passent alors librement à-travers.
Le brouillard tombe indifféremment sur toute sorte de corps, & pénetre souvent dans l'interieur des maisons lorsqu'il est fort humide. Il s'attache alors aux murs & s'écoule en-bas, en laissant sur les parois de longues traces qu'il a formées.
L'opacité du brouillard est causée, selon quelques auteurs, par l'irrégularité des pores que forment les vapeurs avec l'air. Cette irrégularité dépend de la grandeur de ces pores, de leur figure, & de leur disposition. Cela peut venir aussi de la différence de la densité qu'il y a entre les exhalaisons de l'air ; car, lorsque la lumiere du soleil fait effort pour pénétrer à-travers l'air, elle est continuellement forcée de se détourner de son droit chemin, & de changer de route. C'est pour cela qu'il arrive souvent que l'air, quoique fort peu chargé de vapeurs, paroît être fort nébuleux & fort sombre ; au lieu qu'il devient transparent & plus clair, lorsqu'il se remplit d'une plus grande quantité de vapeurs, qui se distribuent d'une maniere plus uniforme par toute l'atmosphere.
Le brouillard est quelquefois fort délié, & dispersé dans une grande étendue de l'atmosphere ; de sorte qu'il peut recevoir un peu de lumiere : on peut alors envisager le soleil à nud sans en être incommodé. Cet astre paroît pâle, & le reste de l'atmosphere est bleu & serein. Le premier Juin 1721, on observa à Paris, en Auvergne, & à Milan, un brouillard qui paroît avoir été le même dans tous ces endroits, & qui doit avoir occupé un espace considérable dans l'atmosphere.
On demande, 1°. pourquoi il fait beau en été lorsque l'air se trouve chargé de brouillards le matin. Cela vient apparemment de ce que le brouillard se trouvant mince & délié, est repoussé vers la terre par les rayons du soleil ; desorte que ces parties devenues fort menues, & étant séparées les unes des autres, vont flotter çà & là dans la partie inférieure de l'atmosphere, & ne se relevent plus.
2°. Pourquoi il se forme tout-à-coup de gros brouillards à côté & sur le sommet des montagnes. On ne sauroit en imaginer de cause plus vraisemblable que les vents, qui venant à rencontrer des vapeurs & des exhalaisons déliées & dispersées dans l'air, les emportent avec eux, & les poussent contre les montagnes, où ils les condensent. Lorsque l'on se tient dans une vallée, d'où l'on considere de côté une montagne, à l'endroit où le soleil darde ses rayons, on en voit sortir une épaisse vapeur, qui paroît s'élever comme la fumée d'une cheminée : mais lorsqu'on regarde de front l'endroit éclairé de cette montagne, on ne voit plus cette vapeur. Cela vient de la direction des rayons de lumiere. Lorsque dans une chambre obscure on laisse entrer les rayons du soleil par une petite ouverture, on voit en regardant de côté, de petits filets & une poussiere fort fine dans un mouvement continuel : mais lorsque les rayons viennent frapper directement la vûe, ou qu'ils tombent moins obliquement dans l'oeil, on n'apperçoit plus ces filets flottans. C'est le cas des vapeurs qui s'élevent de la montagne, que l'on envisage de côté ; car on voit alors les vapeurs qu'elle exhale : au lieu qu'elles disparoissent, quoiqu'elles montent toûjours également, lorsqu'on regarde la montagne de front.
Les brouillards ne sont que de petits nuages, placés dans la plus basse région de l'air ; & les nuages que des brouillards qui se sont élevés plus haut. Voyez NUAGE.
Les objets que l'on voit à-travers le brouillard paroissent plus grands & plus éloignés, qu'à-travers l'air ordinaire. Voyez VISION.
L'on choisit pour pêcher les harengs un tems rempli de brouillards. Voyez HARENG.
Nous devons presque tout cet article à M. Formey, qui l'a tiré en grande partie de M. Musschenbroeck, (O)
BROUILLARD, (Papeterie) épithete que l'on donne à une sorte de papier gris, qu'on appelle autrement papier à demoiselle. Voyez PAPIER.
BROUILLARD ou BROUILLON, s. m. c'est ainsi que dans le Commerce on nomme quelquefois un livre dont se servent les négocians, marchands, & banquiers, pour les affaires de leur commerce. C'est proprement un livre-journal qui n'est pas tout-à-fait au net, & qu'on appelle plus ordinairement mémorial. Voyez MEMORIAL & LIVRE. (G)
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BROUILLÉ | adj. se dit par les Jardiniers-fleuristes, quand ils veulent exprimer qu'une fleur n'est pas venue belle comme ils l'espéroient, c'est-à-dire panachée & nette : on dit, un oeillet brouillé, une tulipe brouillée. (K)
BROUILLER un cheval, en termes de Manége ; c'est le conduire si mal-adroitement & avec tant d'incertitude, qu'on l'oblige à agir avec confusion & sans regle.
Se brouiller, se dit d'un cheval communément trop ardent, qui à force de vouloir précipiter son exercice, le confond de façon qu'il ne sait plus ce qu'il fait. Un cheval qui a les aides fines se brouille aisément, on l'empêche de manier pour peu qu'on serre trop les cuisses, ou qu'on laisse échapper les jambes. (V)
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BROUINE | (Physique) est la même chose que bruine. Voyez BRUINE.
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BROUIR | BROUISSURE, (Jardinage) se dit des feuilles qui ont essuyé un vent qui les a broüies & toutes recoquillées. (K)
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BROUME du bl | voyez NIELLE & BROUILLARD.
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BROUSALM | ou BRESALME, (Géog.) riviere d'Afrique dans la Nigritie, qui se jette dans la mer à deux lieues de la riviere de Gambie.
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BROUSSAILLES | S. m. pl. (Jardin.) s'entend du mauvais bois qui profite peu, tel que les haies, les buissons, les ronces, les épines, bruyeres, serpolet, genêt, jonc marin, &c. (K)
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BROUSSEAU | (Géog.) riviere de France en Gascogne.
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BROUSSIN | BROUSSIN
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BROUTER | se dit des animaux qui rompent avec la dent, les herbes, l'extrémité des plantes, celles des branches menues, dans les prés, ou dans les jeunes taillis qui repoussent. On dit le brout des bêtes fauves : ce brout n'est autre chose que la pâture qu'elles trouvent dans les jeunes bois.
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BROUWERS | (LE DETROIT DE) Géog. c'est le nom d'un détroit de l'Amérique méridionale dans la mer de Magellan, au midi du détroit de le Maire, découvert par les Hollandois en 1643.
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BROUWERSHAVEN | (Géog.) petite ville des Provinces-Unies dans l'île de Schouwen en Zélande. Il y a un port.
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BROWNISTES | S. m. pl. (Hist. ecclés.) nom d'une secte, qui se forma de celle des Puritains vers la fin du seizieme siecle : elle fut ainsi nommée de Robert Brown son chef.
Ce Robert Brown qui a écrit plusieurs livres pour appuyer ses sentimens, n'étoit point, comme le prétend Moréri, un maître d'école de Southwark, mais un homme de bonnes moeurs, & même savant. Il étoit d'une assez bonne famille de Rutlandshire, & allié au lord-thrésorier Burleigh. Il fit ses études à Cambridge, & commença à publier ses opinions & à déclamer contre le gouvernement ecclésiastique à Norwich en 1580 ; ce qui lui attira le ressentiment des évêques. Il se glorifioit lui-même d'avoir été pour cette cause mis en trente-deux différentes prisons, si obscures qu'il ne pouvoit pas y distinguer sa main, même en plein midi. Par la suite il sortit du royaume avec ses sectateurs, & se retira à Middelbourg en Zélande, où lui & les siens obtinrent des états la permission de bâtir une église, & d'y servir Dieu à leur maniere. Peu de tems après, la division se mit parmi le petit troupeau : plusieurs s'en séparerent ; ce qui dégoûta tellement Brown, qu'il se démit de son office, retourna en Angleterre en 1589, y abjura ses erreurs, & fut élevé à la place de recteur dans une église de Northampthonshire. Il mourut en 1630.
Le changement de Brown entraîna la ruine de l'église de Middelbourg : mais les semences de son système ne furent pas si aisées à détruire en Angleterre. Sir Walter Baleigh, dans un discours composé en 1692, compte déjà jusqu'à vingt mille personnes imbues des opinions de Brown.
Ce n'étoit pas pour les articles de foi qu'ils se séparoient des autres communions, mais à cause de la discipline ecclésiastique, & sur-tout de la forme du gouvernement de l'église anglicane, qu'ils improuvoient hautement, sans adopter davantage celui des Presbytériens, & blâmant également les consistoires & les synodes, les évêques & les ministres. Ils ne vouloient se joindre à aucune église réformée, n'étant pas assûrés, disoient-ils, de la sainteté & de la régénération des membres de ces églises, puisqu'elles souffroient les pécheurs & communiquoient avec eux ; ce qui, selon les Brownistes, étoit le comble de l'impiété. Ils condamnoient la célébration solemnelle des mariages, qui n'étant, disoient-ils, que des engagemens civils, n'avoient besoin que de l'intervention du magistrat séculier, & nullement de celle des ecclésiastiques. Ils ne vouloient pas non plus que les enfans fussent baptisés par les prêtres anglicans, ou les ministres presbytériens, qu'ils ne regardoient pas comme membres de l'Eglise, & qui, ajoûtoient-ils, ne prenoient nul soin de ceux qu'ils avoient baptisés. Ils rejettoient toute forme de priere, disant que l'oraison dominicale ne devoit pas être regardée comme une priere, mais seulement comme un modele de priere que Jesus-Christ nous a donné. Voyez SEPARATISTES & NON-CONFORMISTES.
Ils établissoient un gouvernement ecclésiastique de forme démocratique. Quand une de leurs églises étoit assemblée, celui qui vouloit être incorporé à leur société, faisoit une profession de foi, & signoit une formule, par laquelle il s'obligeoit de suivre l'évangile dans le même sens qu'eux. Le pouvoir d'admettre ou d'exclure les membres, & la décision de toutes les contestations, appartenoit à toute la société. Ils choisissoient entr'eux leurs officiers & leurs ministres, pour prêcher & prendre soin des pauvres. On instituoit ces ministres, & on leur départoit leurs différentes fonctions par le jeûne, la priere, & l'imposition des mains de quelques-uns de la société, sans croire néanmoins qu'ils eussent d'ordre ou de caractere ; car ils les réduisoient quelquefois à l'état des laïques, persuadés qu'à cet égard ils pouvoient détruire leur propre ouvrage ; & comme ils enseignoient qu'une église n'étoit que l'assemblée d'un certain nombre de personnes dans un même endroit, ils pensoient conséquemment que le pouvoir du ministre préposé à cet endroit, y étoit tellement limité, qu'il ne pouvoit ni administrer la communion, ni baptiser ni exercer aucune autre fonction, dans une autre église que la sienne. Il étoit permis à tous ceux de cette secte, même aux laïques, de faire des exhortations à l'assemblée, de proposer des questions après le prêche, & de raisonner sur ce qui avoit été prêché. En un mot chaque église des Brownistes étoit une assemblée où chaque membre avoit la liberté de tendre au bien général de la société, sans être comptable de ses actions devant aucun supérieur, synode, ou tribunal. Les indépendans qui se formerent par la suite d'entre les Brownistes, adopterent une partie de ces opinions. Voyez INDEPENDANS.
La reine Elisabeth poursuivit vivement cette secte. Sous son regne les prisons furent remplies de Brownistes ; il y en eut même quelques-uns de pendus. La commission ecclésiastique & la chambre étoilée sévirent contr'eux avec tant de vigueur, qu'ils furent obligés de quitter l'Angleterre. Plusieurs familles se retirerent à Amsterdam, où elles formerent une église, & choisirent pour pasteur Johnson, & après lui, Aynsworth connu par un commentaire sur le Pentateuque. On compte encore parmi leurs chefs, Barrow & Wilkinson. Leur église s'est soûtenue pendant environ cent ans. (G)
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BROY | ou BRAYE, (Econ. rustiq.) machine qui sert à briser le chanvre pour en pouvoir mieux séparer les chenevottes ; c'est une sorte de banc e (fig. 4. Pl. de Corderie) fait d'un soliveau de 5 à 6 pouces d'équarrissage, sur sept à huit piés de longueur, soûtenu par 4 jambes ou piés, à hauteur d'appui. Ce soliveau est percé dans toute sa longueur de deux grandes mortoises d'un pouce de large, qui traverse toute son épaisseur. On taille en couteau les trois parties que les deux mortoises ont séparées.
Sur cette piece on en ajuste une autre, qui est assemblée à charniere sur le banc par une de ses extrémités ; l'autre est terminée par une poignée capable d'être saisie par la main du broyeur.
Cette piece qu'on appelle la mâchoire supérieure, porte dans toute sa longueur deux longuettes taillées en couteau, qui doivent entrer dans les mortoises de la mâchoire inférieure. Voyez BROYEUR.
BROYE, terme de Blason, se dit de certains festons qu'on trouve dans quelques armoiries, posés en différentes situations. Le pere Menestrier dit que les Anglois les nomment bernacles ; que la maison de Broye les a portés par allusion à son nom ; & que celle de Joinville y ajoûta un chef, avec un lion naissant. (V)
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BROYE | (Géog.) riviere de Suisse, au canton de Fribourg.
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BROYEMENT | S. m. (Physique) marque l'action de réduire, de diviser, ou de rompre un corps quelconque en petites parties. L'effet de la mastication des alimens, n'est autre chose que leur division ou leur broyement. Voyez MASTICATION. &c. (O)
BROYEMENT, (Opération de Pharmacie) elle se fait ou au moyen d'un pilon & d'un mortier, ou au moyen d'une molette & du porphyre (l'une & l'autre façon de broyer demandent des précautions, & doivent se varier selon les substances & les mixtes dont on veut faire la division.
Par exemple, si les corps sont volatils, & que les particules qui s'en détachent soient utiles pour les malades, ou nuisibles à ceux qui font l'opération, on doit empêcher ces parties de s'élever ; ainsi on humectera les matieres avec des liqueurs appropriées. De plus, on enveloppera le pilon dans une espece de sac, dont on couvrira le mortier ; ce sac sera de peau ; c'est ainsi que l'on fera pour l'euphorbe. Si on voit que les mixtes huileux jaunissent dans l'opération, on y ajoûtera quelques gouttes d'eau pour diviser les huiles.
Mais les instrumens doivent être variés, selon les drogues. Si les sels sont acides ou alkalins, on évitera de se servir de vaisseaux de cuivre ; parce que ces sels tireroient une teinture des parties cuivreuses : alors on employera des mortiers de marbre, de verre, de fer ou bois. Les pilons seront de même matiere.
La préparation des amalgames, les formations de nouveaux sels, sont d'une conséquence infinie dans la pratique ; des remedes deviennent émétiques, purgatifs, venimeux, pour avoir été chargés de particules qui se sont détachées des instrumens ; Voyez POUDRE, voyez aussi EMULSION (N)
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BROYER | v. act. marque en général l'action de réduire un corps en particules plus menues : de quelque maniere & avec quelque instrument qu'elle s'exécute. Voyez BROYEMENT.
BROYER des couleurs seches ou liquides, c'est les écraser jusqu'à ce qu'elles soient très-fines, avec une pierre très-dure qu'on appelle molette, sur une autre pierre aussi dure qu'est ordinairement une écaille de mer.
L'on dit, broyer les couleurs, le broyement des couleurs. On broye les couleurs à l'eau ou à l'huile, suivant l'usage qu'on veut en faire.
Broyer & mêler les couleurs, sont des termes qu'on ne doit pas confondre.
On broye les couleurs sur la pierre, comme on vient de dire ; on les mêle sur la palette avec le pinceau, & en les employant sur la toile. (R)
BROYER, (terme de Corderie) c'est l'action de briser le chanvre entre les deux mâchoires de la broye après qu'il a été roüi (voyez BROYE, & la fig. 4. Pl. de Corderie) pour en séparer les chenevottes ou la moelle qui n'est d'aucune utilité pour le travail des Corderies. Pour cet effet le broyeur prend de sa main gauche une grosse poignée de chanvre ; & de l'autre, la poignée de la mâchoire supérieure de la broye ; il engage le chanvre entre les deux mâchoires ; & en élevant & abaissant à plusieurs reprises, & fortement, la mâchoire supérieure, il brise les chenevottes qu'il sépare du chanvre en le tirant entre les deux mâchoires : ensorte qu'il ne reste que la filasse : quand la poignée est ainsi broyée à moitié, il la prend par le bout broyé, pour donner la même préparation à celui qu'il tenoit dans sa main.
Quand il y a environ deux livres de filasse bien broyée, on la ploye en deux ; on tord grossierement les deux bouts l'un sur l'autre ; & c'est ce qu'on appelle des queues de chanvre, ou de la filasse brute.
Il y a une autre maniere de séparer le chanvre, qu'on appelle tiller. Voyez Tiller, & l'article CORDERIE.
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BROYEUR | S. m. celui qui broye le chanvre pour en séparer les chenevottes. Son travail est représenté. Pl. I. de Corderie, fig. 4.
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BROYON | S. m. (Oeconom. rust.) piége pour les bêtes puantes ; on tend ce piége sur le passage des blairaux, des renards, des foüines & autres animaux malfaisans. Pour cet effet, on plante en terre deux fourchons de bois A A ; voyez Pl. d'Agriculture. On place entre ces fourchons un bâton de traverse B B ; ce bâton porte une corde C C ; à l'extrémité de cette corde est attachée une petite clavette E E ; sur un bout de la clavette E E, passe un autre bâton de traverse F F ; l'autre bout de la clavette est legerement arrêté par un petit obstacle G H : cet obstacle tient en terre, & il est planté à quelque distance des fourchons. On a attaché l'appât au bout de la clavette qui passe sous l'obstacle ; on passe sur le bâton de traverse F F, deux longs bouts de perche H H, H H, que le bâton de traverse F F tient élevés ; ces bouts de perche sont chargés sur le milieu d'un gros poids I. On ferme bien le devant de ce piege ; ensorte que l'animal ne pouvant entrer que par les côtés, il se trouve nécessairement sous les bouts de perche. Il ne peut mordre à l'appât sans arracher l'obstacle G ; l'obstacle G ne peut être déplacé, que le bout de la clavette qui y touchoit ne s'échappe : ce bout ne peut s'échapper que le bâton de traverse F F ne tombe ; le bâton de traverse ne peut tomber que le poids I ne fasse tomber les perches H H, H H, sous lesquelles l'animal se trouvera pris. Si on veut se servir du même piége pour empêcher les animaux de passer par des ouvertures, il faut faire le bout de la clavette qui passe sous l'obstacle, tel que l'animal ne puisse passer sans le déplacer.
BROYON, (ustencile d'Imprim.) c'est une piece de bois tourné, longue de trois à quatre pouces, sur neuf à dix de circonférence, uni par le bout, surmonté d'un manche rond de quatre à cinq pouces de long pris dans le même morceau de bois. Il sert à remuer l'encre pour l'empêcher de sécher ou de se consolider, & à étendre quelque partie sur le bord de l'encrier, afin que quand l'Imprimeur prend de l'encre, elle soit préparée à se distribuer facilement sur les balles. Voyez Pl. IV. de l'Imprimerie, fig. 1. B.
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BROZOW | (Géog.) ville de Pologne, dans le Palatinat de Russie.
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BRU | S. f. terme d'affinité, qui exprime l'alliance qui se forme par le mariage entre la femme & le pere & la mere du mari ; lesquels sont par rapport à elle beau-pere & belle-mere. Belle-fille est plus du bel usage. (H)
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BRUCA | (Géog.) riviere de Sicile, qui passe dans le val di Noto, & se jette dans la Méditerranée dans le golfe de Catane. Il y a une petite ville de même nom bâtie sur cette riviere, avec un havre.
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BRUCELLES | S. f. espece de petite pincette représentée fig. 66. & 67. Pl. XVI. de l'Horlogerie, dont les branches B B, font ressort : les Horlogers s'en servent pour tenir des pieces délicates, comme des roues finies & des ressorts spiraux, & pour donner la forme requise à ces derniers, au moyen de la courbure concave de l'une des branches, & de la courbure convexe de l'autre qui s'applique dans la premiere. Voyez la fig. 67.
Les brucelles sont composées de deux lames d'acier élastique rivées sur un morceau de cuivre A A, fig. 66. & 67. par plusieurs chevilles qui traversent les trois pieces.
Elles le sont aussi quelquefois de deux lames de laiton ; ces sortes de brucelles sont plus propres que celles d'acier à saisir de petites pieces du même métal qui s'attacheroient à la brucelle d'acier, pour peu que celle-ci fût aimantée.
Les brucelles sont à l'usage d'un grand nombre d'ouvriers ; les Argenteurs ont les leurs, voyez Plan. de l'Arg. fig. 13. les Boutonniers en cuivre ; les Doreurs, fig. 11 & 31. les Lapidaires, voyez fig. 5. Pl. du Lapidaire.
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BRUCHHAUSEN | (Géog.) comté d'Allemagne, dans la Westphalie, sur les bords du Weser, appartenant à la maison de Brunswick.
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BRUCHSAL | (Géog.) ville d'Allemagne, sur la Saltz, dans l'évêché de Spire, à deux lieues de Philipsbourg.
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BRUCK | (Géog.) petite ville d'Allemagne, dans l'électorat de Saxe.
BRUCK, (Géog.) petite ville d'Allemagne, dans la basse Autriche, sur les frontieres de Hongrie, sur la riviere de Leutha.
BRUCK, (Géog.) petite ville de Stirie, sur la Muer.
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BRUCKEN | (Géog.) petite ville d'Allemagne, dans la Thuringe.
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BRUCKENAU | (Géog.) petite ville d'Allemagne, sur le Sinna, dépendante de l'abbaye de Fulde.
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BRUCKENSTADT | (Géog.) petite ville d'Allemagne, en Franconie, dépendante du marggraviat d'Anspach.
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BRUDINICK | (Géog.) petite riviere d'Allemagne, en Silésie, qui prend sa source dans la principauté de Neiss, & se jette dans l'Oder, près de Krappitz.
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BRUE | ou BRUL, (Géog.) petite ville d'Allemagne, dans l'électorat de Cologne, lieu ordinaire de la résidence de l'électeur.
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BRUGES | (Géog.) grande ville des Pays-Bas, dans la Flandre Autrichienne, il s'y fait un assez grand commerce ; elle est à 8 lieues de Gand, & il y a un canal de communication entre ces deux villes. Lat. 51. 11. 30. long. 20. 47. Le territoire qui en dépend, s'appelle le franc de Bruges.
BRUGES, (Géog.) petite ville de France, dans la principauté de Bearn, sur la Nès.
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BRUGGEN | (Géog.) petite ville d'Allemagne, au cercle de Westphalie, dans le duché de Juliers.
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BRUGNETO | (Géog.) petite ville d'Italie, dans l'état de Genes, sur la Verra, dans l'Apennin. Long. 27. 20. lat. 44. 15.
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BRUGNOLES | S. f. (en Epicerie) ce sont des prunes de Provence séchées au soleil : elles nous viennent dans des boîtes à confitures.
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BRUGNON | BRIGNON, espece de pêche. Voyez PECHER.
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BRUGUERE | (Géog.) petite ville de France, dans le Roüergue, sur la riviere de Tarn.
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BRUINE | S. f. (Physiq.) sorte de petite pluie fine qui tombe fort lentement. Lorsqu'une nuée se dissout & change par-tout également, mais lentement, ensorte que les particules aqueuses dont la nuée est composée, ne se réunissent pas en trop grand nombre, ces particules forment de petites gouttes, dont la pesanteur spécifique n'est presque pas différente de celle de l'air ; & alors ces petites gouttes tombent fort lentement. & forment une bruine qui dure quelquefois tout un jour, lorsqu'il ne fait point de vent. Elle a aussi lieu, lorsque la dissolution de la nuée commence en-bas, & continue de se faire lentement vers le haut ; car alors les particules de vapeur se réunissent & se convertissent en petites gouttes, à commencer par les inférieures, qui tombent aussi les premieres ; ensuite celles qui se trouvent un peu plus élevées, suivant les précédentes ; & celles-ci ne grossissent pas dans leur chûte, parce qu'elles ne rencontrent plus de vapeurs en leur chemin ; elles tombent sur la terre avec le même volume qu'elles avoient en quittant la nuée. Mais si la partie supérieure de la nuée se dissout la premiere & lentement de haut en-bas, il ne se forme d'abord dans la partie supérieure que de petites gouttes, qui venant à tomber sur les particules qui sont plus bas, se joignent à elles, & augmentant continuellement en grosseur par les parties qu'elles rencontrent sur leur passage, produisent enfin de grosses gouttes qui se précipitent sur la terre. Cet article est presque tout entier de M. Formey. Voyez Mussch. (O)
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BRUIR | v. act. (terme de Draperie) bruir des pieces d'étoffes, c'est les étendre proprement, chacune à part, sur un petit rouleau, & coucher tous les rouleaux ensemble dans une grande chaudiere de cuivre rouge & de forme quarrée, sur un plancher criblé de trous, & élevé à quelque distance du fond de la chaudiere. On fait chauffer de l'eau dans l'intervalle qui sépare le fond du plancher. La vapeur portée contre l'étoffe la pénetre & assouplit tout ce qui y peut avoir de la roideur. Voyez à article DRAPERIE, le moment & le but de cette opération, qui s'appelle bruisage.
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BRUISINER | (terme de Brasserie) c'est moudre le grain germé, en gros.
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BRULANT | (miroir ou verre brûlant) se dit d'un miroir ou d'un verre par le moyen duquel on brûle, en ramassant les rayons du soleil. Voyez ARDENT.
BRULANT, (montagne brûlante) Voyez VOLCAN, MONTAGNE, TREMBLEMENT de terre, &c. (O)
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BRULER | (l'action de) Physique : c'est l'action du feu sur les matieres qu'il consume, par laquelle les plus petites parties de ces matieres sont détachées les unes des autres, & mises dans un mouvement excessivement violent ; ensorte que quelques-unes d'elles deviennent elles-mêmes de la nature de feu, ou au moins sont pénétrées par la matiere du feu, pendant que les plus subtiles s'évaporent ou sont réduites en cendres. Voyez FEU, VAPEUR, FUMEE, CENDRE, &c. (O)
BRULER l'acier, le fer, & les autres métaux ; chez tous les ouvriers qui les employent, c'est leur ôter leur qualité, en les laissant trop chauffer ; le fer & l'acier brûlés se réduisent en une matiere spongieuse, fragile, & qui n'est plus bonne à rien.
* BRULER, (Hist. anc.) la coûtume de brûler les corps étoit presque générale chez les Grecs & chez les Romains. Elle a précédé chez les premiers le tems de la guerre de Troie. Il ne faut pourtant pas s'imaginer que ç'ait été la plus ancienne même chez ces peuples. " La premiere maniere d'inhumer, dit Cicéron, est celle dont se sert Cyrus dans Xénophon, le corps est ainsi rendu à la terre ; & il est couvert du voile de sa mere. Sylla, victorieux de Caius Marius, le fit déterrer & jetter à la voirie. Ce fut peut-être par la crainte d'un pareil traitement, qu'il ordonna que son corps fût brûlé. C'est le premier des patrices Corneliens à qui on ait élevé un bûcher ". L'usage de brûler les corps & celui de les inhumer ont subsisté à Rome dans le même tems. " L'usage de les brûler n'est pas, dit Pline, fort ancien dans cette ville. Il doit son origine aux guerres que nous avons faites dans des contrées éloignées ; comme on y déterroit nos morts, nous prîmes le parti de les brûler ".
La coûtume de brûler les corps dura jusqu'au tems du grand Théodose. Voyez BUCHER, SEPULTURE, USTRINUM.
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BRULINGEN | (Géog.) petite ville d'Allemagne, dans la forêt Noire, appartenante à la maison d'Autriche.
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BRULLOIS | (Géog.) petit pays de France en Gascogne, entre le Condomois & la Garonne, avec titre de vicomté.
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BRULOT | S. m. (Marine) c'est un vieux bâtiment chargé de feux d'artifice & de matieres combustibles, que l'on accroche aux vaisseaux ennemis, au vent desquels on les met pour les brûler. Il y en a qui l'appellent aussi navire sorcier.
Les bâtimens qu'on estime les plus propres pour faire des brûlots, sont des flûtes ou des pinasses de 150 à 200 tonneaux environ ; qui ont un premier pont tout uni, sans tonture, & au-dessus un autre pont courant devant-arriere. On entaille en divers endroits du premier pont, des ouvertures à-peu-près d'un pié & demi en quarré, entre les baux, & elles répondent dans le fond de cale ; ensuite on fait des dalles ou petits conduits de planches qu'on joint, & on leur donne un pouce & demi de large ; on les fait aussi de fer-blanc : on pose trois de ces dalles à trois côtés de chaque mât, & elles s'étendent tout du long du bâtiment à stribord & à bas-bord, & vont se rendre toutes ensemble dans une autre grande dale qui est en-travers, à six ou sept piés de la place où se met le timonnier. On fait encore une dale assez longue, qui descend du gaillard d'arriere en biais, jusqu'à la grande dale qui est en-travers sur le premier pont, laquelle longue dale vient encore se rendre dans une autre petite, qui est sur le gaillard d'arriere où se tient le timonnier, & à l'un des deux côtés, selon qu'il est le plus commode. Dans le bordage du gaillard d'arriere, on fait une trape large, au-dessous de laquelle se peut poster une chaloupe de bonne nage, afin que le timonnier, après avoir mis le feu dans les conduits, y puisse promtement descendre. Ensuite on remplit les dalles d'artifice, savoir d'une certaine portion de poudre, comme la moitié, d'un quart de salpetre ; d'un demi-quart de soufre commun ; le tout bien mêlé ensemble, & imbibé d'huile de graine de lin, mais non pas trop, parce que cela retarderoit l'embrasement, & que l'effet doit être promt. Après cela on couvre ces dalles de toile soufrée, ou de gros papier à gargousses, & l'on apporte des fagots, de menus copeaux, ou d'autres menus bois, trempés dans l'huile de baleine, qu'on arrange en forme de toît sur les dalles, en les mettant bout-à-bout. Ces fagots sont préparés & trempés dans des matieres combustibles, comme du soufre commun pilé & fondu, du salpetre, & les trois quarts de grosse poudre, de l'étoupe, & de l'huile de baleine, le tout bien mêlé ensemble. On pend aussi au second pont par-dessous, toutes sortes de matieres combustibles, & l'on en met par-tout avec des paquets de vieux fils de carret bien goudronnés ; l'on y pend encore des paquets de soufre ou de lisieres soufrées. Tout le dessous du premier pont est aussi fort bien goudronné, de même que le dessous du second pont : & avec le goudron dont le dessus du premier pont est encore enduit, il y a partout des étoupes que le goudron retient, & qui sont mêlées avec du soufre. On remplit encore les vuides du bâtiment de tonnes poissées pleines de ces copeaux minces & serpentans, qui tombent sous le rabot des Menuisiers.
Les cordages, les vergues, les toiles sont poissées & soufrées ; les extrémités de la grande vergue sont garnies de grapins de fer, de même que celles de misene & de beaupré. Lorsqu'on construit des brûlots de bois neuf on n'y employe que du plus chétif & du plus léger, & où le feu prend plus aisément.
Quand on veut se servir de brûlots, on ouvre tous les sabords, les écoutilles, & les autres endroits destinés à donner de l'air ; ce qui se fait souvent par le moyen des boîtes de pierrier qu'on met tout proche, & qui faisant ensemble leur décharge par le moyen des traînées de poudre, s'ouvrent tout à la fois. A l'avant sous le beaupré, il y a un bon grapin qui pend à une chaîne & un à chaque bout de chaque vergue, & chacun de ces grapins est amarré à une corde qui passe du lieu où ils sont tout le long du bâtiment, & va se rendre au gaillard d'arriere, à l'endroit où se tient le timonnier ; laquelle corde, aussi-tôt que le brûlot a abordé le vaisseau, le timonnier doit couper avant que de mettre le feu au brûlot ; il fait ses efforts pour accrocher le navire ennemi par l'avant, & non par les côtés.
On arme les brûlots de 10 ou 12 hommes qui ont la double paye à cause des dangers qu'ils courent, & de quelques passe-volans pour faire montre seulement, hormis à l'arriere où il y a deux canons de fer, pour se défendre contre les chaloupes & canots.
On dit adresser ou conduire un brûlot, & détourner un brûlot, lorsqu'on l'empêche d'aborder. (Z)
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BRULURE | S. f. les Chirurgiens nomment ainsi la solution de continuité qu'occasionne la force du feu dans une partie du corps. Ils distinguent ordinairement la brûlure en différens degrés, desquels le premier est quand la brûlure fait seulement élever sur la peau quelques pustules accompagnées de rougeur, & qu'elle occasionne une séparation entre l'épiderme & la peau naturelle.
Le second degré est quand la peau est brûlée, séchée & retirée, mais qu'il ne s'y est pas formé de croûte ou de gale.
Le troisieme est quand la chair, les veines, les nerfs, &c. sont retirés par la force de la brûlure, & qu'il s'est formé une croûte. Lusitanus recommande pour la brûlure, un onguent fait de cendres de feuilles de laurier, avec de la graisse de cochon, ou du sain-doux ; ou bien l'unguentum populeum, avec des feuilles de vigne dont on enveloppe la partie malade. Panarole observe que si on met de la boue sur une brûlure, on diminue la douleur. Les brasseurs d'Hollande se servent d'une décoction de lierre pour guérir la brûlure. Quelques auteurs prescrivent dans les brûlures l'usage des médicamens terreux en forme seche, tels que le bol d'Arménie, la terre sigillée, l'argille, &c. pour éteindre, disent-ils, les particules ignées comme on éteint le feu lorsqu'on lui interdit la communication de l'air qui l'environne, ce que l'on appelle communément étouffer : mais ces médicamens bouchant les pores par leur adhérence, empêchent aussi par la grossiereté de leur matiere, la détente des solides, & la suppuration qu'on ne peut trop promtement procurer. S'ils avoient lieu, ce seroit tout au plus à l'instant d'une brûlure legere, & ils agiroient comme repercussifs & astringens, de même que la boue dont on a coûtume d'envelopper la partie au moment qu'elle vient d'être brûlée, & qui étant moins seche doit être préférée, outre qu'elle se trouve plus promtement sous la main. En général les anodyns sont fort indiqués dans la brûlure, parce qu'ils relâchent les vaisseaux dont la crispation est la cause des douleurs aiguës qu'on sent à la partie brûlée. Voyez ANODYN. On employe avec assez de succès les fomentations avec l'esprit de vin dans les premiers pansemens ; les saignées sont fort utiles pour calmer ou prévenir les accidens.
La brûlure qui est une maladie, sert quelquefois de remede. Mr. Homberg remarque que les habitans de l'île de Java se guérissent d'une colique qui leur donneroit la mort, en se brûlant la plante des piés, & qu'ils se guérissent les panaris, en trempant leurs doigts dans l'eau bouillante à diverses reprises.
Les voyageurs rapportent beaucoup d'autres exemples de maladies, que l'on guérit par l'application du feu ; & nous en voyons les effets nous-mêmes, qui pratiquons cette maniere de guérir les chevaux, les chiens de chasse, les oiseaux de proie, &c.
On s'est servi contre la goutte, d'une sorte de mousse apportée des Indes, que l'on brûloit sur la partie affligée. Voyez MOXA. M. Homberg a rapporté les exemples de deux femmes guéries, l'une d'une violente douleur de tête & d'yeux, & l'autre d'une douleur de jambes & de cuisses, par la brûlure accidentelle de ces parties. Il y ajoûte que la brûlure peut guérir par l'une de ces trois manieres, ou en mettant les humeurs peccantes dans un plus grand mouvement, & en leur facilitant un nouveau passage, ou en brisant & en dissolvant leur viscidité ; ou en détruisant les canaux qui charrioient ces mêmes humeurs en trop grande quantité. Voy. CAUSTIQUE & CAUTERE. (Y)
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BRUMAL | adj. se dit quelquefois de ce qui a rapport à l'hyver : ce mot est plus usité en latin qu'en françois. Ainsi on dit solstitium brumale pour le solstice d'hyver. (O)
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BRUMALES | brumalia, adj. f. (Hist. anc. & Myth.) nom d'une fête que les anciens Romains célébroient en l'honneur de Bacchus, & qui duroit trente jours. Elle commençoit le 24 jour de Novembre, & finissoit le 25 jour de Décembre. Voyez FETE.
Ce mot vient de bruma, qui veut dire hyver, parce que cette fête tomboit au commencement de l'hyver : d'autres dérivent le nom de brumales, de brumus ou bromios, qui sont des noms qu'on donnoit à Bacchus, à cause du bruit que faisoient les bacchantes, voyez BROMIUS. Les brumales furent instituées par Romulus, qui avoit coûtume durant ce tems-là de donner des repas au sénat. (G)
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BRUMAZAR | S. m. (Minéralogie & Chimie) Becker dit qu'on désigne par ce nom une graisse onctueuse, formée par les vapeurs & exhalaisons sulphureuses & mercurielles qui viennent des entrailles de la terre, & qui mises en mouvement par une chaleur continuelle, s'unissent étroitement. Selon cet auteur, personne ne veut admettre pareille chose dans les métaux, quoiqu'on l'y apperçoive clairement : c'est selon lui, la matiere premiere des métaux, & le ferment qui les conduit à perfection. (-)
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BRUME | S. f. on nomme ainsi sur mer le brouillard : on dit le tems est embrumé, quand l'air est couvert de brouillards. Les Marins ont pour proverbe, que dans la brume tout le monde est matelot, parce que dans le tems d'un brouillard épais, où l'on ne voit ni le soleil, ni les étoiles, chacun dit son sentiment sur la route, qui est fort sujette à erreur en pareil tems. (Z)
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BRUMP | ou BRUMAT, (Géog.) petite ville de la basse Alsace, sur la Sorra, entre Strasbourg & Haguenau.
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BRUN | adj. pris substantivement, c'est en Peinture, le sombre obscur ; les ombres du tableau se font de brun plus ou moins foncé, selon que les corps sont plus ou moins opposés à la lumiere : on dit les bruns d'un tableau, les ombres d'un tableau. Il y a des bruns rougeâtres, grisâtres, &c.
BRUN ROUGE, qu'on appelle aussi ocre, est une pierre naturelle d'un rouge foncé ; elle est d'un grand usage dans la Peinture, soit à l'huile soit à détrempe. Voyez PEINTURE. Voyez OCRE. (R)
BRUN DE PLASTRE, est une petite pierre luisante, qu'on trouve dans les carrieres de plâtre, & dont les Batteurs d'or se servent pour couper l'or sur le coussin, en le saupoudrant de cette pierre, calcinée & pulvérisée. Voyez TALC, qui est le nom de cette pierre. Voyez BATTEUR D'OR.
BRUN, (Manege) bay brun, se dit des chevaux qui sont de couleur de châtaigne obscure. Voyez BAY. (V)
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BRUNDUS | (Géog.) ville du royaume de Bohème, dans le cercle de Chrudim.
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BRUNEGG | (Géog.) petite ville d'Allemagne, dans le Tirol, à 4 milles de Brixen, sur la riviere de Rientz.
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BRUNELLE | S. f. Brunella, (Hist. nat. bot.) genre de plante à fleur monopétale labiée ; la levre supérieure est faite en forme de casque ; l'inférieure est divisée en trois parties. La partie moyenne est creusée en cuilleron. Il sort du calice un pistil qui est attaché comme un clou à la partie postérieure de la fleur, & qui est environné de quatre embryons. Ces embryons deviennent dans la suite des semences arrondies & revêtues d'une capsule qui a servi de calice à la fleur. Ajoûtez au caractere de ce genre, que les fleurs forment un épi fort garni, & que les étamines n'ont pas la figure d'un os hyoïde, comme celle de l'ormin, de la toute-bonne, & de la sauge. Tournefort, Inst. rei herb. Voyez PLANTE. (I)
La brunella major, folio non dissecto, C. B. Pit. Tournef. est d'usage, & contient beaucoup d'huile & un peu de sel essentiel.
Elle est vulnéraire, détersive, consolidante ; on s'en sert en décoction dans les ulceres du poumon, contre les hémorrhagies, les maux de gorge ; elle entre dans les gargarismes ; on l'employe aussi extérieurement.
On croit que son nom lui vient de ce que les Allemands l'employent dans l'esquinancie qu'ils appellent diebrune. (N)
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BRUNES | (Commerce) sortes de toiles qui se fabriquent à Roüen & dans ses environs.
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BRUNETTE | (LA) Géog. forte place & très-importante du Piémont, près de Suse.
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BRUNIR | v. act. (Arts méchan.) c'est polir un corps, non pas en l'usant, mais en abattant les petites éminences qui sont sur sa surface ; ce qui se fait par le moyen d'un brunissoir. Voyez BRUNISSOIR.
Dans l'Horlogerie, on brunit les pieces ou les parties, qui par leur grandeur ou par leur figure ne pourroient pas être polies commodément. Notez que cette méthode de polir est la plus expéditive, & celle qui donne le plus d'éclat aux corps polis. Elle est à l'usage des Couteliers, Serruriers, & de la plûpart des ouvriers en or, en argent, en fer & en acier. Elle enleve les traits de l'émeril, de la potée, & de la polissoire, & donne aux pieces brunies un lustre noir qui imite celui des glaces.
Les Doreurs brunissent l'or & l'argent, ce qu'ils exécutent avec la dent de loup, la dent de chien, ou la pierre sanguine, qu'ils appuient fortement sur les endroits des pieces à brunir. Lorsqu'on brunit l'or sur les autres métaux, on mouille la sanguine dans du vinaigre : mais lorsqu'on brunit l'or en feuille, sur les couches à détrempe, il faut bien se garder de mouiller la pierre ou la dent de loup.
Les Relieurs brunissent les tranches des livres ; pour cet effet ils mettent les livres dans une presse à endosser, avec des ais devant & derriere la pressée, & deux ou trois autres ais distribués entre les volumes : on prend une dent de loup ou d'acier que l'on frotte fortement plusieurs fois sur la tranche pour la lustrer. Après que la jaspure a été mise & qu'elle est seche, on commence à brunir les gouttieres, puis tournant la pressée on brunit les tranches du haut & du bas du volume. Voyez TRANCHE, JASPURE, DENT A BRUNIR.
On brunit de même les livres dorés sur tranche, après y avoir appliqué l'or : mais on observe pour la dorure, de mettre l'or d'abord sur la gouttiere, de le faire sécher sur le baquet, & on n'y passe la dent que lorsqu'il est bien sec. Puis desserrant la pressée, on prend chaque volume pour en abaisser les bords du carton au niveau des tranches ; & remettant la pressée dans la presse à endosser, on fait la même opération, soit pour y mettre l'or, le faire sécher, & le brunir. On retourne de nouveau la pressée avec la même précaution, on dore & on brunit la derniere tranche. Voyez DORER SUR TRANCHE & DENT A BRUNIR.
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BRUNISSOIR | S. m. (Art méchan. en métaux) outil à l'usage de presque tous les ouvriers qui employent le fer, l'or, l'acier, l'argent, l'étain ; ils s'en servent pour donner de l'éclat à leurs ouvrages après qu'ils sont achevés. Le brunissoir passé fortement sur les endroits de la surface de l'ouvrage qu'on veut rendre plus brillans que les autres, produit cet effet en achevant d'enlever les petites inégalités qui restent du travail précédent. D'où l'on voit que, de quelque matiere que l'on fasse le brunissoir, cet outil n'emporte rien de la piece, & doit être plus dur qu'elle.
Le brunissoir de l'Argenteur est un morceau d'acier fin, trempé & fort poli, monté sur un manche de bois. Voyez figure de l'Argenteur, Pl. VII.
Le brunissoir des Couteliers est d'acier fin, trempé & bien poli ; il varie selon les ouvrages : il y en a à main, & il y en a à étaux. Les brunissoirs à main n'ont rien de particulier ; ceux à étaux sont montés par un bout sur un long morceau de bois qu'on serre dans l'étau : on pose la piece à brunir sur ce morceau de bois, & l'on appuie sur elle fortement le brunissoir, qu'on tient par le manche qui est à l'autre bout. Le brunissoir fait levier. Quant à sa forme, on lui donne celle de deux petits cones opposés au sommet, pour l'intérieur des pieces concaves. Il faut donc imaginer ces deux petits cones bien polis, montés sur un pié, & ce pié élevé perpendiculairement sur le milieu d'un arbre un peu concave dont il fait partie, de façon que les deux petits cones, tenus à quelque distance de l'arbre par le pié, soient dans une direction parallele à l'arbre. Cet arbre a une de ses extrémités faite en crochet : ce crochet recourbé en-dessus se place dans un piton fixé sur un morceau de bois étroit, mais de la longueur de l'arbre ; son autre extrémité est emmanchée. On place le bois dans l'étau, & on passe l'un ou l'autre des cones dans l'anneau ou sur la surface de la piece à brunir, & on applique ce cone fortement sur elle, à l'aide d'un piton qui retient un des bouts du brunissoir, & du manche qui sert à appuyer à l'autre bout. L'arbre du brunissoir, quand l'ouvrier s'en sert, est parallele au bois pris dans l'étau, & perpendiculaire à la piece à brunir.
Le brunissoir dont les Doreurs se servent, est fait ordinairement d'une dent de loup, de chien, ou de la pierre sanguine. On met ces dents en cette piece au bout d'un manche de fer ou de bois. Il y a aussi des brunissoirs d'acier communs à plusieurs ouvriers. Voyez la fig. 38. Pl. II. du Doreur.
Le brunissoir du Doreur sur cuir est un caillou dur & poli, emmanché, dont ces ouvriers se servent pour lisser les cuirs dont ils font les tapisseries. Voyez les fig. 6. & 7. Planc. du Doreur sur cuir ; & la fig. 3. de la vignette, qui représente un ouvrier qui lisse une peau sur une pierre posée sur un établi.
Le brunissoir ordinaire des Graveurs est une lame d'acier de 6 ou 7 pouces de long 3 ou 4 lignes d'épaisseur, courbée en S par les deux bouts, qui sont amenuisés pour entrer dans les manches ou poignées A B (fig. 20. Planche de la Gravûre), qui servent à le tenir. La partie du milieu c d, qui est plate, est arrondie du côté convexe, & est aussi un peu courbe : l'arrondissement doit être bien poli, & tout l'outil trempé dur.
On se sert du brunissoir pour donner le dernier poli aux planches de cuivre en les frottant avec, & ayant soin de mettre de l'huile d'olive pour les lubrifier. Les autres brunissoirs consistent en un bâton, pour servir de manche, & en une piece d'acier arrondie sur la convexité, ainsi que la figure 21. de la même Planche le représente. Il y en a de différentes formes & grandeurs.
Les Horlogers en ont de différentes figures ; de formés en lime à feuille de sauge, comme dans la fig. 27. n°. 2. Pl. XIV. de l'Horlog. d'autres comme des limes ordinaires. Ils sont tous d'acier trempé, & bien polis. Les premiers servent ordinairement à brunir des vis, des pieces de cuivre ; les autres servent pour des pieces plates : ils en ont de petits de cette derniere espece, pour brunir les pivots, & ils les appellent brunissoirs à pivots. Voyez BRUNIR. (T)
Le brunissoir des Orfévres en grosserie est un instrument d'acier très-poli, ou une pierre sanguine, ou même une pierre plus fine, montée sur un manche : C'est en l'appuyant également sur tous les endroits du champ d'une piece, qu'on lui donne ce beau poli, cet éclat que les yeux ont quelquefois peine à soûtenir.
Les brunissoirs dont les Facteurs d'orgue se servent pour brunir les tables d'étain qu'ils employent à faire les tuyaux de montre ou d'anches, sont des morceaux d'acier arrondis & très-polis, avec lesquels, en frottant sur les tables d'étain, ils les rendent unies & luisantes : la fig. 64. Pl. d'Orgue, en représente deux. A, le manche ; B, le brunissoir, que l'on applique par le côté convexe sur la table que l'on veut brunir ; C D, un autre brunissoir qui sert au même usage ; C, la poignée de bois dans laquelle le fer D entre au moyen d'une entaille qui y est pratiquée : Voyez l'article ORGUE, où le travail de l'étain & du plomb est appliqué.
Le brunissoir du Potier d'étain lui sert après que son ouvrage a été tourné & reparé au grattoir : il en a de différentes formes ; les uns pour brunir la vaisselle, les autres la poterie & menuiserie, & les autres ce qui est reparé à la main. Ces outils sont d'acier pur, trempés bien dur ; ensuite bien polis, & frottés de tems en tems sur la potée d'étain. Lorsqu'on s'en sert, il faut mettre de l'eau de savon sur les pieces d'ouvrage avant de les brunir. Voyez la Planche du Potier d'étain.
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BRUNITURE | S. f. se dit, en Teinture, de la maniere d'éteindre l'éclat d'une couleur, afin de la réduire à la nuance qu'on veut, sans toutefois la faire changer d'espece. C'est en conséquence de la nécessité où sont les Teinturiers du grand teint, de recourir de tems en tems à cette opération, qu'il leur est permis de tenir, en petite quantité, des ingrédiens particuliers aux teintures en petit teint. V. TEINTURE.
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BRUNNER | (GLANDES DE) Anatom. elles sont situées à l'entrée du duodenum ; elles portent le nom du médecin Brunner qui les découvrit, & les décrivit dans une observation communiquée à la société des curieux de la nature. (L)
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BRUNO | (Géogr.) riviere d'Italie dans le grand duché de Toscane, qui prend sa source au mont Massi, & se jette dans la mer de Castiglione.
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BRUNSBUTTEL | (Géogr.) petite ville à l'embouchure de l'Elbe, appartenante au roi de Danemark.
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BRUNSFELSIA | S. f. (Hist. nat. bot.) genre de plante dont le nom a été dérivé de celui d'Othon Brunsfels, medecin. La fleur des plantes de ce genre est monopétale, en forme d'entonnoir, tubulée & découpée. Il s'éleve du fond du calice un pistil qui est attaché au fond de la fleur, comme un clou, & qui devient dans la suite un fruit arrondi, mou, charnu, & rempli de semences ovoïdes qui se trouvent entre la peau & la chair du fruit. Plumier, nova plant. amer. gen. Voyez PLANTE. (I)
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BRUNSWICK | (Géogr.) grande & forte ville d'Allemagne, dans le cercle de la basse Saxe ; elle étoit autrefois impériale & libre, sur la riviere d'Ocker. Long. 28. lat. 52. 15.
BRUNSWICK, (le duché de) Géog. c'est une grande province d'Allemagne, dans le cercle de la basse Saxe, bornée au nord par le duché de Lunebourg, à l'occident par le cercle de Westphalie, au midi par le landgraviat de Hesse, & à l'orient par la Thuringe & le duché de Magdebourg : la capitale est Brunswick.
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BRUNTZENY-MEYDAN | (Géog.) ville forte de Croatie, qui sert de barriere contre les Turcs, près de la riviere d'Unna.
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BRUSILOW | (Géogr.) ville de Pologne, dans le palatinat de Kiovie.
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BRUSQUEMBILLE | (JEU DE LA) On peut joüer à la brusquembille deux, trois, quatre ou cinq ; mais il est bon d'observer qu'à deux & à quatre on ne joue qu'avec trente-deux cartes, qui sont les mêmes que celles avec lesquelles on joue au piquet ; & lorsque l'on joue trois ou cinq, il faut que le jeu soit composé de trente cartes seulement ; c'est-à-dire qu'on enlevera deux sept, n'importe lesquels. Lorsqu'on joue à quatre, l'on est deux contre deux ; & l'on se met ensemble, afin de pouvoir se communiquer le jeu.
Les brusquembilles sont les as & les dix : elles enlevent les autres cartes de la même couleur, mais elles sont enlevées par les triomphes : le reste des cartes conserve le rang & la supériorité ordinaires.
Lorsque l'on joue en partie, c'est-à-dire un contre un, deux contre deux, on convient d'abord de ce qu'on jouera ; & si l'on joue trois ou cinq, on prend un certain nombre de jettons que l'on fait valoir ce qu'on veut ; & celui qui mêle, donne à couper à sa gauche, & distribue ensuite à chaque joüeur trois cartes, une à une ou toutes ensemble, en prend autant pour lui, & en retourne une dessus le talon, qui est celle qui fait la triomphe, & qu'il met retournée à moitié sous le talon, de maniere qu'on puisse la voir. Celui qui est premier, jette la carte qu'il veut de son jeu ; le second joue ensuite sur cette carte celle de son jeu qu'il juge à-propos, & ainsi des autres, chacun à son tour. Celui qui gagne la main, prend une carte au talon ; chacun des autres joüeurs en fait autant, en allant de droite à gauche : l'on recommence à joüer comme au premier coup, & l'on continue jusqu'à ce que toutes les cartes du talon soient prises, chaque joüeur y en prenant une pour remplacer celle de son jeu qu'il jette à chaque coup ; & celui qui prend la derniere carte, prend la triomphe qui retourne.
J'ai dit que le second à joüer jettoit la carte que bon lui sembloit, parce qu'on n'est point obligé de fournir à ce jeu de la couleur de la carte joüée, encore qu'on en ait : il n'y a point de renonce : on peut couper une carte à laquelle on auroit pû fournir : voilà la maniere de joüer le jeu. On recommence chaque tour de la même façon, jusqu'à ce que l'on ait joüé les coups dont on est convenu. Il y a quelques personnes qui prétendent qu'on ne peut renoncer, lorsqu'une fois toutes les cartes du talon sont levées, & qu'il faut couper absolument, si l'on n'a pas de la couleur joüée ; mais je crois que cela dépend de la volonté des joüeurs. Passons aux droits qui se payent à ce jeu.
Celui qui joüe la brusquembille de l'as de triomphe, reçoit deux jettons de chacun. Il retire également deux jettons de chaque joüeur, pour tous les as qu'il joüera après, pourvû qu'il fasse la levée ; car s'il ne la faisoit, au lieu de gagner deux jettons de chaque joüeur, il est obligé de leur en payer deux à chacun. Il en est de même des dix, qui valent de chaque joüeur un jetton chacun ; mais s'il ne leve pas la main, il est obligé d'en donner un à chaque joüeur. Celui qui a plus de points dans les levées qu'il a faites, gagne enfin la partie. Voici la maniere de compter ces points. Après que toutes les cartes du talon ont été prises, & qu'on a joüé toutes les cartes que l'on avoit en main, chacun voit les levées qu'il a, & compte onze points pour chaque as, dix pour chaque dix, quatre pour chaque roi, trois pour chaque dame, deux pour chaque valet, & les autres ne sont comptées pour rien. Celui qui en comptant ainsi se trouve avoir plus de points, gagne la partie, l'on doit par conséquent tâcher de faire des levées où il y ait beaucoup de points, des as, des rois, des dames, des dix & des valets, afin de pouvoir gagner le jeu. L'usage & le bon sens apprendront mieux à joüer ce jeu, que tout ce que nous pourrions en dire, la situation du jeu demandant de joüer un même coup tantôt d'une façon, tantôt d'une autre. Il est quelquefois bon d'avoir la main, d'autres fois de l'abandonner à son adversaire. En général, pour bien joüer la brusquembille, il faut une grande attention, pour voir non-seulement les triomphes qui sont déjà sorties, mais encore les brusquembilles qui sont passées & celles qui sont encore dans le jeu, afin d'en faire son avantage en joüant.
Voici quelques regles qui pourront rendre plus complete la connoissance qu'on a déjà de ce jeu, sur ce que nous en avons dit. Celui qui mêle & trouve une ou plusieurs cartes retournées, ou en retourne lui-même, refait, sans autre peine. Si le jeu de carte est faux par une carte de moins, tout ce qui a été payé dans le coup est bien payé ; mais on ne peut gagner la partie, & l'on cesse de joüer pour deux cartes qui manqueroient, aussi-tôt qu'on s'en apperçoit ; si le coup est fini, il est bon. Celui qui joüe avant son rang, ne peut reprendre sa carte. Celui qui a jetté sa carte, ne sauroit y revenir sous quelque prétexte que ce soit. Celui qui prendroit avant son tour une carte du talon, s'il a joint à son jeu la carte prise au talon, paye à celui à qui elle auroit été de droit, la moitié de ce qui est au jeu, & il la lui rend ; & s'il ne l'avoit pas jointe à son jeu, mais vûe seulement, il donneroit deux jettons à chaque joüeur, & la laisseroit aller à qui doit la prendre de droit. Celui qui en tirant sa carte du talon en voit une seconde, paye deux jettons à chaque joüeur. Lorsque l'on joue en partie deux contre deux, si l'un des joüeurs, en prenant sa carte du talon, voit celle qui doit aller à son adversaire, il leur est libre de recommencer la partie ; & si la carte vûe revient à lui ou à son compagnon, le jeu se continue. Il n'y a point de renonce, & l'on n'est point forcé à mettre plus haut sur une carte joüée. Celui qui ayant accusé avoir un certain nombre de points, en auroit davantage, & ne les accuseroit qu'après que les cartes seroient brouillées, ne pourroit y revenir, & perdroit la partie, si un autre joüeur avoit plus de points dans ses levées qu'il n'en auroit accusé. Celui qui quitteroit le jeu avant la partie finie, la perdroit.
BRUSQUEMBILLE, au jeu de ce nom, est le nom qu'on donne aux as & aux dix, qui sont les premieres cartes du jeu ; les as enlevent cependant les dix. Voyez l'article précédent.
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BRUT | adj. (Gramm.) est l'opposé de travaillé ; ainsi on dit de la mine brute, un diamant brut, du sucre brut : en un mot, on donne cette épithete à tous les objets dans l'état où la nature nous les présente lorsqu'ils sont destinés à être perfectionnés par l'art. Le naturaliste ne dit point une plume brute, parce qu'il ne la considere jamais comme une production qui puisse être perfectionnée par l'art ; mais le plumassier le dit. On ne dit jamais une plante brute. On donne quelquefois aussi le nom de brut à des productions artificielles, lorsqu'elles en sont au premier apprêt, & que la main-d'oeuvre doit en enlever dans la suite des traits grossiers & autres imperfections semblables ; ainsi on dit d'une piece de fonderie au sortir du moule, qu'elle est toute brute.
BRUT ou ORT, terme de Commerce, qui s'entend du poids de la marchandise quand elle est pesée avec son emballage : on dit en ce sens, cette balle de poivre pese brut ou ort 600 livres, pour marquer que l'emballage & le poivre qu'il contient, pesent ensemble 600 livres. Il y a des marchandises qui payent les droits d'entrée & de sortie du royaume net, & d'autres brut ou ort. On se sert aussi du mot bruto, qui signifie la même chose ; mais il est étranger, & peu usité en France. (G)
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BRUTE | S. f. se dit de l'animal considéré comme privé de raison, & par opposition à l'homme. Voyez ANIMAL & BETE.
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BRUTIENS | S. m. pl. (Hist. anc. & Géogr.) peuples originaires de Lacédémone, selon Justin ; ils habitoient cette extrémité de l'Italie qu'on appelloit la grande Grece : on les distinguoit en transmontains & cismontains.
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BRUXANELLI | S. m. (Hist. nat. bot.) grand arbre de la grosseur d'un pommier, qui croît dans les bois & sur les montagnes du Malabar. Il fleurit en Juillet & en Août, & son fruit est mûr en Novembre & en Décembre. Il vit long-tems, & on lui attribue quelques propriétés médicinales, pour la cure du charbon, & contre les douleurs de la pierre.
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BRUXELLES | (Géog.) belle & grande ville des Pays-bas, capitale du Brabant autrichien, sur la riviere de Senne, qui s'y partage en plusieurs canaux. C'est la résidence des gouverneurs généraux des Pays-bas. Long. 21. 56. lat. 50. 51.
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BRUYAN | VERDUN, ou VERDRIER, sub. m. (Hist. nat.) cirlus, luteae primum genus, Aldr. oiseau de la grosseur du moineau ; le bec est court & épais ; le ventre & la poitrine sont jaunâtres, & marqués de taches brunes ; la tête, le dos, les aîles, & la queue, sont de couleur de terre cuite, mêlée de brun ; les deux plumes extérieures de chaque côté de la queue sont en partie blanches, & en partie de la même couleur que les autres plumes. Le mâle est différent de la femelle en ce qu'il a plus de jaune. Cet oiseau se tient presque toûjours sur la terre ; c'est pourquoi on lui trouve le bec plein de limon lorsqu'on le prend. Willughby, Ornit. Voyez OISEAU. (I)
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BRUYERE | S. f. (Hist. nat. bot.) erica, genre de plante à fleur monopétale en forme de cloche ; il sort du fond du calice de la fleur un pistil, qui devient dans la suite un fruit ordinairement arrondi : ce fruit s'ouvre en quatre parties ; il est le plus souvent partagé en quatre loges, & il renferme des semences fort petites pour l'ordinaire. Tournefort, inst. rei herb. Voyez PLANTE. (I)
L'erica vulgaris glabra, C. B. Pin. a la décoction diurétique. Mathiole prétend qu'elle brise le calcul, lorsqu'on la prend soir & matin trois heures avant les repas, à la dose de cinq onces ; il ajoûte que son effet réussit mieux si l'on se baigne plusieurs jours de suite dans cette décoction, après en avoir usé intérieurement pendant trente jours.
Rondelet, au rapport de Clusius, employoit l'huile de ses fleurs pour les dartres du visage.
Le suc de bruyere, ou l'eau distillée de ses fleurs, dissipe la rougeur des yeux, & en fait cesser les douleurs.
Tabernaemontanus assûre que la fermentation de ses fleurs calme la goutte. Le bain de vapeur avec les feuilles & les fleurs de la même plante, produit le même effet. Tournefort, hist. des Plantes. (N)
BRUYERE, en termes de Vergettier, est un petit arbrisseau dont les rameaux sont petits & très-souples ; c'est pour cela qu'on l'appelle scopa, c'est-à-dire ballet, en Italie où il est très-commun, & d'où les marchands Vergettiers de Paris le tirent, comme le meilleur qui soit à leur usage.
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BRUYERES | (Géog.) petite ville de Lorraine, dans le pays de Vosge.
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BRUYUIERE | (LA) Géog. petite ville de France dans le Languedoc, au diocèse de Lavaur.
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BRYONE | S. f. (Hist. nat. bot.) bryonia : il y a deux especes de bryone ; la blanche, & le sceau notre-dame. La blanche est encore de deux sortes ; l'une à baies rouges, & l'autre à baies noires.
La bryone à baies rouges a la racine plus grosse que le bras quand elle est jeune, & aussi grosse que la cuisse quand elle est vieille, divisée en grosses fibres, charnue & fongueuse quand elle est seche. Sa substance est distinguée par des cercles & des rayons ; sa saveur est acre, desagréable, & un peu amere, & son odeur fétide quand elle est fraîche. Ses tiges sont longues, grêles, grimpantes, cannelées, un peu velues, & garnies de mains ou longs filets tortillés : ses feuilles placées alternativement, anguleuses, assez semblables à celles de la vigne, mais plus petites & plus rudes : ses fleurs sortant plusieurs ensemble des aisselles des feuilles, d'une seule piece, en cloche, évasées, partagées en cinq parties, arrondies, d'un blanc verdâtre, parsemées de veines, & tellement adhérentes à leur calice, qu'on ne les en peut séparer. Parmi ces fleurs il y en a de stériles, qui sont les plus grandes, & qui ne sont pas portées sur un embryon ; les autres sont plus petites, fécondes, appuyées sur un embryon, se changeant en une baie sphérique de la grosseur d'un pois, verte d'abord, ensuite rouge, molle, pleine d'un suc qui cause des nausées, & des graines arrondies couvertes d'un mucilage. Cette plante se trouve dans les haies & dans les forêts.
La bryone blanche à baies noires ne differe de la précédente que par la couleur de ses racines & de ses baies. Les racines de celles-ci ont intérieurement la couleur de boüis ; les racines de la précédente sont d'un blanc jaunâtre : les baies de celle-ci sont noirâtres ; celles de la premiere sont rouges. On fait moins d'usage de la bryone à baies rouges.
Le sceau notre-dame a la racine épaisse, grosse, longue, tubéreuse, noire en-dehors, blanche en-dedans, remplie d'un suc gluant & visqueux, d'une saveur acre qui n'est pas desagréable ; les tiges sarmenteuses grosses, longues, grimpantes, ligneuses, rougeâtres, noirâtres, & sans mains ; les feuilles alternes, molles, d'un verd gai, luisantes, assez semblables à celles du smilax, garnies de plusieurs nervures sinuées, & d'une saveur visqueuse ; les fleurs en grappe à l'aisselle des feuilles, petites, d'une seule piece, en cloche, évasées, partagées en six parties, d'un jaune verd, à six étamines, & stériles.
Il y a une autre racine vierge, femelle, & appellée bryonia levis, sive nigra baccifera : elle a la fleur plus grande que la précédente, blanche, garnie d'un pistil qui se change en une baie sphérique, rougeâtre, ou d'un rouge foncé, de la grosseur d'une cerise, & contenant une coëffe membraneuse remplie de graines arrondies.
Les racines des deux premieres especes purgent les sérosités par le ventre & par les urines, levent les obstructions, excitent les mois aux femmes, poussent l'arriere-faix, sont propres contre l'asthme & l'hydropisie : rapées, chauffées & appliquées sur l'estomac, elles purgent comme si on les avoit prises intérieurement. Elles operent plus violemment récentes que seches.
Onguent de bryone. Prenez racine de bryone blanche une demi-livre, coupez-la par petites tranches, & faites-la frire dans une poêle jusqu'à ce qu'elle soit seche ; passez la liqueur, & donnez-lui la consistance d'onguent, avec la cire à la dose de cinq onces, & demi-livre de résine de sapin. Il résout les écroüelles y étant appliqué soir & matin.
Eau de bryone composée par Lemery. Prenez du suc de racine de bryone 4 livres ; des feuilles de rue, d'armoise, de chaque 2 livres ; des feuilles de sabine seche 3 poignées ; des feuilles de matricaire, d'herbe à chat, de pouliot, de basilic, de dictame de Crete, de chacune 2 poignées ; d'écorce d'orange nouvelle 4 onces ; de myrrhe 2 onces ; de castoreum une once ; de vin de Canarie 6 pintes : laissez le tout en digestion pendant quatre jours dans un vaisseau convenable, puis faites-en la distillation au bain-marie ; quand elle sera à moitié faite, on exprimera ce qui sera resté dans l'alembic, on continuera à distiller la liqueur exprimée, puis on en tirera l'extrait en faisant épaissir ce qui restera de liqueur au fond de la cucurbite.
Remarques. On prend la bryone récente, on la rape, & on en tire le suc par expression. On aura des feuilles de rue & d'armoise récentes, on les pilera bien, & on en tirera le suc de la maniere ordinaire. La sabine, le dictame seront secs ; on les concassera & mêlera avec de l'écorce extérieure d'orange amere, la myrrhe & le castoreum ; on les mettra dans une cucurbite ; on versera dessus les sucs & le vin de Canarie ; on bouchera le vaisseau exactement ; on le laissera en digestion pendant quatre jours, puis on la distillera au bain-marie. Après en avoir tiré la moitié, on exprimera le résidu, & on redistillera de nouveau ; ensuite on réduira le reste en consistance d'extrait. Ces eaux mêlées feront l'eau de bryone composée.
Cette eau est hystérique, apéritive ; elle excite les regles ; elle est fortifiante, diaphorétique, la dose est depuis demi-once jusqu'à trois onces.
Electuaire de Bryone. Prenez du suc de racine de bryone mondée, nouvellement tirée, quatre livres ; du meilleur miel deux livres ; cuisez-les en consistance de miel ; puis ajoûtez-y de la poudre de turbith, d'hermodactes, de jalap, d'agaric, du sel de bryone, de chacun six gros ; des fécules de bryone demi-once ; faites-en un électuaire selon l'art, dont la dose sera depuis une dragme jusqu'à une once. Lémery, pharm. univ.
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BRZEST | BRZESTIE, ou BRISCH, (Géog.) province ou palatinat de la grande Pologne dans la Cujavie, dont la capitale porte le même nom. Long. 37. 10. lat. 52. 19.
Il y a un palatinat & une ville de même nom en Lithuanie.
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BRZEZAN | (Géog.) ville de Pologne, dans le palatinat de Russie.
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BUA | (Géog.) île du golfe de Venise sur la côte de Dalmatie, appartenante aux Vénitiens.
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BUABIN | S. m. (Hist. mod.) idole des peuples de Tonquin, qui habitent entre la Chine & l'Inde ; ils l'invoquent lorsqu'ils veulent bâtir une maison ; ils font dresser un autel, où ils appellent des bonzes pour y sacrifier à cette idole ; après le sacrifice on prépare un festin de viandes qui ont été sacrifiées, puis on présente au Buabin plusieurs papiers dorés où l'on a écrit quelques paroles magiques ; ensuite on les brûle avec des parfums devant l'idole, pour l'obliger par cette cérémonie à ne point souffrir qu'il arrive jamais de malheur dans la maison qu'on va bâtir. Tavernier, voyage des Indes. (G)
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BUADA | (Géog.) petite île de l'Amérique septentrionale, dans le lac d'Ontario.
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BUADE | S. f. (Manége) c'est la même chose que bride à longue branche. Les branches de cette espece de bride sont droites & non coudées. (V)
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BUANDERIE | S. f. en Architecture, est un bâtiment particulier dans une communauté ou dans une maison de campagne, composé de plusieurs salles au rez-de-chaussée, avec un fourneau & des cuviers pour faire la lessive. (P)
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BUANDIER | S. m. est celui qui fait le premier blanchiment des toiles neuves ; le blanchisseur au contraire est celui qui fait les blanchissages dont la toile a besoin à mesure qu'on s'en sert.
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BUANES | (Géog.) ville de France sur la riviere de Bahu, dans la Gascogne, près d'Aire.
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BUARCOS | (Géog.) ville de Portugal dans la province de Beira, proche de la mer.
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BUBASTE | (Myth.) nom que l'on donne à la Diane d'Egypte. Diane Bubaste est la même chose que Diane la Chate : elle fut ainsi appellée, parce qu'elle se transforma, dit-on, en chate, lorsque les dieux se réfugierent en Egypte. La fête de Diane Bubaste étoit une des plus grandes de cette contrée : elle se célébroit particulierement à Bubaste ville de la basse Egypte ; on s'y rendoit dans des bateaux remplis de symphonie.
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BUBON | bubo, s. m. terme de Chirurgie ; c'est une tumeur qui vient aux glandes des aînes & des aisselles. Cette tumeur est skirrheuse ou phlegmoneuse. Voyez SKIRRHE & PHLEGMON.
Ce mot vient du grec , inguen, aine, le siége ordinaire de ces sortes de tumeurs.
Il y a deux sortes de bubons : on appelle les uns benins, & les autres malins. Les malins se divisent en pestilentiels & en vénériens : les pestilentiels surviennent aux fievres pestilentielles ; les seconds sont une suite d'un commerce impur, & sont des symptomes de la vérole. Quand un bubon est entouré d'un cercle de différentes couleurs, c'est une marque qu'il est pestilentiel & le plus souvent mortel.
Les bubons vénériens sont souvent durs & skirrheux, & se fondent difficilement, même par l'usage des plus puissans résolutifs. Ils se terminent quelquefois par suppuration, & alors on est souvent obligé après l'ouverture de la tumeur, d'extirper les glandes tuméfiées, ou de les consommer avec des caustiques. Ambroise Paré donne une étymologie du mot de bubon, qui est différente de celle de Chambers & de tous les auteurs. Il dit qu'on appelle ces tumeurs bubons du mot latin bubo, hibou ; parce que ces tumeurs se cachent sous les aisselles & dans les aînes, comme le hibou dans le creux des arbres. Ce qui pourroit autoriser cette étymologie, c'est que les anciens ont donné par des rapports beaucoup plus éloignés des noms d'animaux à plusieurs tumeurs, & qu'ils n'ont pas moins nommés bubons, les tumeurs des aisselles & de derriere les oreilles, que celles des aines, auxquelles ce terme devoit appartenir exclusivement à toute autre par la premiere étymologie. (Y)
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BUBONA | (Myth.) déesse honorée chez les Romains ; les boeufs étoient sous sa protection, & on l'invoquoit pour leur conservation.
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BUBONOCELE | S. f. terme de Chirurgie, tumeur dans l'aine, occasionnée par la descente de l'épiploon ou des intestins par les anneaux des muscles épigastriques. Voyez EPIPLOON, INTESTIN, &c.
Ce mot vient du grec , inguen, & , tumor.
La bubonocele est encore appellée ramex & hernie inguinale. Voyez HERNIE. C'est une espece de descente que les Chirurgiens appellent incomplete , & elle est commune aux hommes & aux femmes.
Les femmes y sont beaucoup moins sujettes que les hommes, parce qu'elles le sont plus aux hernies crurales ; les parties flottantes du bas-ventre trouvent dans les femmes une issue plus libre sous le ligament de Falloppe ou de Poupart ; parce qu'ayant les os du bassin plus spacieux que les hommes, il y a un plus grand intervalle depuis l'épine antérieure & supérieure de l'os des îles, jusqu'à la tubérosité de l'os pubis, quoiqu'il n'y passe pas plus de parties que dans les hommes. Le moindre effort doit donc déterminer les parties flottantes du bas-ventre à former dans les femmes la hernie crurale, plûtôt que l'inguinale. Celle-ci a son siege dans l'aine, & l'autre se manifeste plus extérieurement à la partie supérieure de la cuisse. Voyez HERNIE. (V)
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BUCARO | ou BARROS, s. m. (Hist. nat.) c'est le nom qu'on donne en Espagne & en Portugal à une espece de terre sigillée, qui se trouve dans ces pays. On lui attribue beaucoup de propriétés & de vertus : en effet, cette terre est fort styptique & astringente ; on la dit bonne dans plusieurs maladies, & on prétend que c'est un excellent antidote contre toutes sortes de poisons ; les dames espagnoles se font une habitude si enracinée de mâcher & de prendre continuellement du bucaros, qu'on prétend que la pénitence la plus sévere que les confesseurs de ce pays-là puissent imposer à leurs pénitentes, est de s'en priver seulement pendant un jour, soit que les vertus qu'on lui attribue les déterminent à en prendre si opiniâtrement, soit que la force de l'habitude la leur rende nécessaire. Le vin conservé dans des vases faits de cette terre, en prend le goût & l'odeur qui sont assez agréables. Il en est de même de l'eau : mais quand on l'y verse il se fait une espece de bouillonnement & d'effervescence ; & si elle y séjourne quelque tems, elle en sort à la fin, parce que la matiere de ces vases est très-poreuse & spongieuse. (-)
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BUCCAFERREA | S. f. (Hist. nat. bot.) genre de plante dont le nom a été dérivé de celui du comte Camille Antoine Buccaferro de Boulogne. Les plantes de ce genre croissent dans l'eau ; leur fleur est sans pétales ; elle n'a qu'une seule étamine sans filet, faite en forme de rein, & composée de deux valvules ; cette fleur est stérile, & plusieurs ensemble forment un épi à double rang. Les embryons se trouvent auprès de quelques-unes de ces fleurs, & deviennent dans la suite des fruits composés de plusieurs capsules qui tiennent à de longs pédicules, & qui ressemblent à des têtes de petits oiseaux ; chaque capsule renferme une semence arrondie. Micheli, nova plant. gener. &c. Voyez PLANTE. (I)
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BUCCALE | (GLANDES) Anatomie ; ce sont de petites glandes dispersées sur le côté intérieur des joues & des levres, qui séparent du sang la salive qui sert à la mastication & à la digestion. Voyez GLANDE, voyez BOUCHE. (L)
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BUCCARI | (Géog.) ville d'Istrie, sur un petit golfe de la mer Adriatique, qui forme une des meilleures rades qu'il y ait dans l'Europe ; elle appartient à la maison d'Autriche.
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BUCCARIZA | (Géog.) petite ville de Hongrie, en Croatie, sur un golfe de même nom, qui fait partie de celui de Venise.
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BUCCELLARIENS | S. m. (Hist. anc.) on nommoit ainsi une compagnie de soldats instituée par les empereurs de Constantinople pour distribuer une sorte de pain de munition de forme ronde, & qu'on appelloit buccellus ; nom qu'on peut rendre en notre langue par munitionnaires ou distributeurs des vivres ; on les trouve encore nommés mariandini, & gallograeci ou hellenogalatae, de la Galatie ou Gallogrece d'où on les tiroit communément. On ne connoît pas en détail les fonctions de l'emploi de ces buccellaires.
D'autres auteurs donnent ce nom aux parasites qui étoient entretenus aux dépens des princes ou seigneurs ; les Visigots au moins appelloient ainsi tous les cliens ou vassaux entretenus & nourris par les seigneurs. Quelques-uns croyent que les buccellaires étoient des soldats stationnaires qui accompagnoient l'empereur en qualité de gardes ; & selon d'autres, c'étoient des hommes dont ces princes se servoient pour faire mourir secrettement ceux qui étoient tombés dans leur disgrace. (G)
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BUCCELLATION | S. f. terme dont se servent quelques chimistes pour exprimer l'opération par laquelle on divise en morceaux, comme par bouchées, différentes substances pour les travailler. (M)
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BUCCIN | buccinum, s. m. (Hist. nat. Conchiolog.) coquillage ainsi nommé parce qu'il ressemble en quelque façon à un cornet musical ; il est allongé : l'ouverture de la coquille est à l'extrémité la plus grosse, & la coquille diminue peu-à-peu jusqu'à l'autre extrémité qui se termine en pointe. On trouve des buccins sur la terre, dans l'eau douce, & dans la mer, d'où est venue la division de ces coquillages en buccins de terre, buccins d'eau douce, & buccins de mer ; ceux-ci sont les plus nombreux : Lister en fait vingt-quatre genres, qu'il rapporte à la même classe. Lister, hist. seu synop. meth. conch. Voyez COQUILLAGE, COQUILLE. (I)
* Il y a une espece de buccin commune sur les côtes d'Angleterre, qui fournit la pourpre. Cette propriété a été découverte il y a environ 70 ans, par la société royale. M. de Reaumur en a trouvé une autre sur les côtes de Poitou, qui donne aussi cette couleur. Cette espece est apparemment une de celles que Pline a décrites : Les buccins de Poitou qui donnent la pourpre, se trouvent ordinairement assemblés autour de certaines pierres ou sables couverts de grains ovales, longs de trois lignes, & larges d'un peu plus d'une ligne, pleins d'une liqueur blanche un peu jaunâtre, assez semblable à celle qui se tire des buccins mêmes : & qui après quelques changemens, prend la couleur de pourpre. Par les expériences de M. de Reaumur, ces grains ne sont point apparemment les oeufs des buccins ; ce ne sont point non plus des grains de quelque plante marine, ni de plantes naissantes ; il reste que ce soit des oeufs de quelque poisson. Ils ne commencent à paroître qu'en automne.
Ces grains écrasés sur un linge blanc, ne font d'abord que le jaunir presque imperceptiblement ; mais en trois ou quatre minutes, ils lui donnent un très beau rouge de pourpre, pourvû cependant que ce linge soit exposé au grand air : car ce qui est bien digne de remarque, & fait bien voir de quelle extrème délicatesse est la génération de cette couleur, l'air d'une chambre, dont même les fenêtres seroient ouvertes, ne suffiroit pas. La teinture de ces grains s'affoiblit un peu par un grand nombre de blanchissages.
M. de Reaumur a reconnu par quelques expériences, que l'effet de l'air sur la liqueur des grains, consiste, non en ce qu'il lui enleve quelques unes de ses particules, ni en ce qu'il lui en donne de nouvelles, mais simplement en ce qu'il l'agite, & change l'arrangement des parties qui la composent. Nous avons dans la cochenille une très-belle couleur de rouge, mais qui n'est bonne que pour la laine. Le carthame donne le beau ponceau & le cramoisi, mais ce n'est qu'à la soie. Peut-être, dit M. de Fontenelle, les grains de M. de Reaumur nous fourniront-ils le beau rouge pour la toile.
M. de Reaumur n'a pas manqué de comparer sa nouvelle pourpre avec celle qui se tire de ses buccins de Poitou. Les buccins ont à leur collier un petit réservoir appellé improprement veine par les anciens, qui ne contient qu'une bonne goutte de liqueur un peu jaunâtre. Les linges qui en sont teints, exposés à une médiocre chaleur du soleil, prennent d'abord une couleur verdâtre, ensuite une couleur de citron, un verd plus clair & puis plus foncé, de-là le violet, & enfin un beau pourpre. Cela se fait en peu d'heures : mais si la chaleur du soleil est fort vive, les changemens préliminaires ne s'apperçoivent point, & le beau pourpre paroît tout-d'un-coup. Un grand feu fait le même effet, à cela près qu'il le fait un peu plus lentement, & ne produit pas une couleur si parfaite. Sans-doute la chaleur du soleil beaucoup plus subtile que celle du feu de bois, est plus propre à agiter les plus fines particules de la liqueur. Le grand air agit aussi, quoi que moins vîte, sur la liqueur des buccins, surtout si elle est détrempée dans beaucoup d'eau ; d'où M. de Reaumur conjecture avec assez d'apparence, que la liqueur des buccins & celle des grains sont à-peu-près de même nature, excepté que celle des grains est plus aqueuse. Elles different encore par le goût ; celle des grains est salée, celle des buccins extrèmement poivrée & piquante, peut-être parce qu'elle a moins d'eau.
Si on vouloit les employer dans la teinture, celle des grains seroit d'un usage plus commode, & coûteroit moins, parce qu'il est aisé de la tirer d'une grande quantité de grains qu'on écraseroit à la fois : au lieu que pour avoir celle des buccins, il faut ouvrir le réservoir de chaque buccin en particulier, ce qui demande beaucoup de tems : ou si pour expédier on écrase les plus petits de ces coquillages, on gâte la couleur par le mélange des différentes matieres que fournit l'animal.
La Chimie indiqueroit peut-être des moyens qui feroient paroître la couleur plus vive & plus belle, & qui la rendroient plus ténace. M. de Reaumur a prouvé que le sublimé corrosif produit cet effet sur la liqueur des buccins, mais la pratique, & sur-tout un principe qui viendroit à faire partie d'un métier, demanderoit beaucoup d'autres observations, & des vûes nouvelles. Il y a bien de la différence entre un physicien qui veut connoitre, & un artisan qui veut gagner. C'est par cette réflexion que M. de Fontenelle finit son extrait du mémoire de M. de Reaumur. Voyez hist. de l'acad. 1711. p. 11. Le savant académicien le commence par une autre, qui ne me paroît pas aussi vraie ; c'est qu'il y a plus de choses trouvées dans ces derniers siecles, qu'il n'y en a de perdues des anciens : mais qu'il ne peut y avoir rien de perdu que ce qu'on veut bien qui le soit ; qu'il ne faut que le chercher dans le sein de la nature, où rien ne s'anéantit & que c'est même une grande avance pour le retrouver, que d'être sûr qu'il se peut trouver. Mais on peut répondre à M. de Fontenelle, que le sein de la nature est vaste ; que proposer à un physicien ce champ à battre pour y retrouver quelque ancienne découverte, c'est lui donner à chercher un diamant tombé dans le fond de la mer. Une découverte se fait souvent par hasard ; & il peut se passer bien des siecles avant que le même hasard se représente : en un mot, je croi que quand une invention est perdue, non-seulement on ne la retrouve pas quand on veut, mais qu'il se peut faire qu'avec beaucoup de soins & de travail, on ne la trouve jamais. Quant au nombre des choses nouvellement trouvées, & à celui des anciennes découvertes perdues, c'est un examen impossible : nous savons très-bien ce qu'il y a de récemment découvert, mais nous ne savons point tout ce que nous avons perdu des anciens ; & sans l'une & l'autre de ces connoissances, il n'y a point de comparaison à faire.
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BUCCINATEUR | S. m. pris adject. en Anatomie, nom d'un muscle situé transversalement sur les joues dont il fait partie. Il s'attache à la partie antérieure & inférieure de l'apophyse coronoïde de la mâchoire inférieure, & vis-à-vis les racines des dernieres dents molaires de l'une & l'autre mâchoire, & se termine à la commissure des deux levres. Il est percé vers son milieu par le conduit salivaire de Stenon. Voy. CONDUIT & SALIVAIRE. (L)
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BUCCINE | S. f. (Art. milit.) étoit un ancien instrument militaire, ou plûtôt un ancien instrument de musique, dont on se servoit à l'armée pour avertir les gardes de nuit, & pour faire savoir aux soldats quand ils devoient descendre ou monter la garde.
Le mot latin buccina, dont celui-ci est fait, vient de bucca, bouche, & de cano, je chante ; parce qu'on s'en sert avec la bouche. D'autres croyent qu'il vient du grec , qui signifie la même chose, formé de , boeuf, & de cano, je chante ; parce qu'anciennement cet instrument étoit fait de corne de boeuf. D'autres de l'hébreu buk, une trompette. Varron dit qu'il a été ainsi nommé par onomatopée de bou, bou, en faisant allusion au son qu'il rend, & d'autres le font plus probablement venir de buccinum, qui est le nom d'une conque ou coquille de poisson.
Le cornet est regardé comme une sorte de trompette, de laquelle cependant il differe non seulement par la figure qui est droite dans la trompette, & recourbée dans le cornet, mais encore par le son, le son du cornet étant plus dur, plus fort, & plus facile à être entendu de loin, que celui de la trompette. Voyez TROMPETTE. Le cornet & la conque semblent avoir été le même instrument, que l'on a distingué ensuite en ce que le nom de conque est demeuré aux plus petits cornets, & celui de cornet est resté à ceux de la plus grande espece. Quelques-uns croyent que la conque étoit moins recourbée que le cornet, qui décrivoit un demi-cercle entier. Varron assûre que la conque étoit aussi appellée cornet, parce qu'on faisoit cet instrument avec les cornes des boeufs, comme cela se pratique encore dans quelques endroits. Servius assûre qu'on les faisoit anciennement de cornes de bélier ; & conséquemment ces instrumens dont on se servoit anciennement chez les Juifs à l'armée & dans le temple, se trouvent nommés dans l'Ecriture sopheroth haijobeliim, cornes de béliers. Voyez CORNE. (I)
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BUCENTAURE | S. m. (Hist. mod.) c'est le nom d'un gros bâtiment qui ressemble assez à un galion, dont se sert la seigneurie de Venise lorsque le doge fait la cérémonie d'épouser la mer ; ce qu'il fait tous les ans le jour de l'Ascension. La seigneurie sort du palais pour aller monter le bucentaure, qu'on amene pour ce sujet proche des colonnes de Saint-Marc. Cette machine est un superbe bâtiment, plus long qu'une galere, & haut comme un vaisseau, sans mâts & sans voiles. La chiourme est sous un pont, sur lequel est élevée une voûte de menuiserie & sculpture dorée par dedans, qui regne d'un bout à l'autre du bucentaure, & qui est soûtenue tout-autour par un grand nombre de figures, dont un troisieme rang qui soûtient la même couverture dans le milieu, forme une double galerie toute dorée & parquetée, avec des bancs de tous les côtés, sur lesquels sont assis les sénateurs qui assistent à cette cérémonie. L'extrémité du côté de la poupe est en demi-rond avec un parquet élevé de demi-pié. Le doge est assis dans le milieu ; le nonce & l'ambassadeur de France sont à sa droite & à sa gauche, avec les nobles qui forment le conseil. (Z)
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BUCEPHALON | S. f. (Hist. nat. bot.) genre de plante dont la fleur est sans pétales, composée seulement de deux étamines qui tiennent à l'embryon, & qui ressemblent en quelque façon aux cornes d'un taureau. L'embryon devient dans la suite un fruit charnu, ovoïde, & cannelé. Ce fruit renferme un noyau qui se casse aisément, & dans lequel il y a une amande. Plumier, nova plantar. amer. gen. Voyez PLANTE. (I)
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BUCH | (Géog.) petite ville de France en Guienne. On nomme le territoire qui en dépend, le capitalat de Buch.
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BUCHAN | (Géog.) province de l'Ecosse septentrionale, bornée au nord & à l'orient par la mer ; au sud par le comté de Marr ; & au couchant par celui de Murray. Il s'y trouve beaucoup d'agates. On prétend qu'il n'y a point de souris ; & que si on y en transportoit d'ailleurs, elles ne pourroient y vivre.
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BUCHAW | (Géog.) ville libre & impériale d'Allemagne dans la Soüabe, sur le Federzée, à neuf lieues d'Ulm. Long. 27. 20. lat. 48. 2.
BUCHAW (LE), Géog. petit pays d'Allemagne dans le cercle du haut Rhin. Fulde en est la capitale.
BUCHAW, (Géog.) ville de Pologne dans le palatinat de Mciselau, dans la Russie lithuanienne. Il y a encore une petite ville de ce nom en Bohème, dans le cercle de Satz.
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BUCHE | S. f. que l'on écrit aussi busche, & que quelques-uns appellent buze ou flibot. (Mar. La bûche est un petit bâtiment dont on se sert à la mer pour la pêche. Les Anglois & les Hollandois se servent de cette sorte de bâtiment pour la pêche du hareng. La forme de ce bâtiment se connoîtra bien mieux par l'inspection de la figure. Voyez Planche XII. fig. 2. qui représente une bûche ou flibot, dont voici les proportions les plus ordinaires.
Une bûche a ordinairement 52 piés de long de l'étrave à l'étambord ; 13 piés 6 pouces de ban, & 8 piés de creux. L'étrave a 20 piés de haut, 12 piés de queste, 9 pouces d'épaisseur en dedans, & un pié 9 pouces de largeur par le haut & par le bas.
L'étambord a 22 piés de haut, 2 pies 1/2 de queste, un pié de large par le haut, & 3 piés 6 pouces par le bas.
La plus basse préceinte a 8 pouces de large, & la fermure qui est au-dessus a 5 pouces & demi : la seconde préceinte a 7 pouces de large, & la fermure en a 5 : la troisieme préceinte a 5 pouces & demi de large, la fermure qui est au-dessus en a 15 par son milieu, & 16 au bout ; la lisse est large de 4 pouces ; les lattes ont 2 pouces de largeur & 2 d'épaisseur.
Les bûches ont deux sortes de petites couvertes ou chambres à l'avant & à l'arriere : celle de l'avant sert de cuisine.
Le maître ou patron de ces bâtiments y commande. Il y a un aide ; le contre-maître vient après. Sous lui sont ceux qui virent à bord les aussieres ou funes ; ceux qui sont employés à saisir les filets ; & les caqueurs qui égorgent les harengs ; & qui les vuident de leurs breuilles ou entrailles à mesure qu'on les pêche. On ne se sert que de biscuit, de poisson sec ou salé, & de gruau, l'équipage se contentant du poisson frais qu'il pêche. C'est le patron qui donne l'ordre pour jetter les rets & pour les retirer. Les matelots se louent pour l'ordinaire pour tout le voyage en gros. (Z)
* BUCHE ou BUSCHE, (Commerce de bois) morceau de bois de chauffage, de grosseur & longueur déterminée. Plusieurs de ces morceaux forment la corde. Voyez BOIS.
* BUCHE, (contrôleurs de la) Police, petits officiers établis sur les chantiers. Leur emploi est de veiller à ce que les bois de chauffage ayent les dimensions & les qualités requises par les ordonnances. Voyez BOIS.
BUCHE, (réparation à la) terme d'Eaux & Forêts, est l'amende ordonnée par jugement des maîtres des eaux & forêts, pour avoir abattu ou enlevé des arbres dans les forêts du roi. (H)
BUCHE, en Jardinage ; on appelle ainsi la tige des orangers étêtés, que l'on amene en France de Provence & de Gènes. (K)
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BUCHEIR | ou BUCHIARA ; (Géog.) c'est ainsi qu'on nomme un lac d'Egypte, à sept milles d'Alexandrie.
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BUCHEN | (Géog.) petite ville d'Allemagne dans l'Odenwaldt, appartenante à l'électorat de Mayence.
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BUCHER | S. m. en Architecture, est un petit bâtiment ou engard, pratiqué dans une basse-cour ou dans une maison de campagne, où l'on serre le bois : dans les maisons particulieres, c'est un lieu obscur dans l'étage soûterrain ou au rez-de-chaussée. Les bûchers, chez les princes, s'appellent fourrieres, en latin cella lignaria. (P)
* BUCHERS, s. m. (Hist. anc.) amas de bois sur lesquels les anciens brûloient leurs morts : ces amas étoient plus ou moins grands, selon la qualité des personnes. La loi des douze Tables défendoit d'y employer du bois poli & menuisé. On les construisoit principalement de larix, d'if, de pin, de frêne, & d'autres arbres qui s'enflamment facilement. On y ajoûtoit aussi la plante appellée papyrus. On les environnoit de cyprès, dit Varron, pour corriger par son odeur celle du cadavre, qui auroit incommodé ceux qui assistoient à la cérémonie, & qui répondoient aux lamentations de la Praefica, jusqu'à ce que le corps étant consumé & les cendres recueillies, elle disoit ilicet, retirez-vous.
Le bûcher étoit de forme quarrée, à trois ou quatre étages, qui alloient toûjours en diminuant comme une pyramide : on l'ornoit quelquefois de statues. On versoit sur le cadavre du vin, du lait, & du miel. On répandoit sur le bûcher des parfums, des liqueurs odoriférantes, de l'encens, du cinamome, des aromates, & de l'huile. On donnoit au mort la potion myrrhine. Voyez MYRRHE. Cette profusion coûteuse d'aromates, de liqueurs, de potions, fut défendue par la loi des douze Tables : outre la dépense superflue, qu'il étoit de la bonne police d'arrêter, l'exhalaison de tant d'odeurs étouffoit quelquefois ceux qui approchoient trop près du bûcher.
Après qu'on avoit oint le corps, on lui ouvroit les yeux qu'on avoit fermés après le dernier soûpir. On mettoit au mort une piece de monnoie dans la bouche ; cette coûtume a été fort générale en Grece : il n'y avoit que les Hermoniens qui prétendoient passer la barque gratis. C'étoient les plus proches parens du défunt qui mettoient le feu au bûcher : ils lui tournoient le dos, pour s'ôter la vûe d'un si triste spectacle.
Quand le bûcher étoit allumé, on prioit les vents de hâter l'incendie. Achille appelle, dans Homere, le vent du septentrion & le zéphyr sur le bûcher de Patrocle, & cette coûtume passa des Grecs chez les Romains. Quand le bûcher étoit bien allumé, on y jettoit des habits, des étoffes précieuses, & les parfums les plus rares. On y jettoit aussi les dépouilles des ennemis. Aux funérailles de Jules César les vétérans y précipiterent leurs armes. On immoloit de plus des boeufs, des taureaux, des moutons, qu'on mettoit aussi sur le bûcher. Quelques-uns se coupoient ou s'arrachoient des cheveux qu'ils y semoient.
Il y a des exemples de personnes qui se sont tuées sur le bûcher de celles qu'elles aimoient. Aux funérailles d'Agrippine, Mnestor, un de ses affranchis, se tua de douleur. Plusieurs soldats en firent autant devant le bûcher de l'empereur Othon. Pline dit qu'un nommé Philotimus, à qui son maître avoit legué ses biens, se jetta sur son bûcher. Plusieurs femmes ont eu ce courage. Cette coûtume subsiste encore, comme on sait, chez les Banianes. Achille tua douze jeunes Troyens sur le bûcher de Patrocle.
Lorsque le cadavre étoit réduit en cendres, & qu'il n'en restoit que les ossemens parmi les cendres, on achevoit d'éteindre le bûcher avec du vin : on recueilloit les restes, & on les enfermoit dans une urne d'or. La loi des douze Tables défendit les libations de vin.
Mais tout ce qui précede, ne concerne que les grands & les riches. On brûloit les pauvres dans de grands lieux enfermés, appellés ustrina. Voyez USTRINUM.
C'étoit la mere, les soeurs ou les parentes du défunt qui ramassoient les cendres & les os : elles étoient vêtues de noir : elles les mettoient sous leurs habits. Les fils recueilloient les restes de leurs peres ; au défaut d'enfans, ce devoir étoit rendu par les autres parens ou par les héritiers. Les consuls ou les premiers officiers des empereurs ramassoient leurs ossemens. Au décès d'Auguste, les premiers de l'ordre équestre, les ramasserent nuds piés. On enveloppoit ces restes dans un linge. Avant que de se retirer, ils crioient tous au défunt, vale, vale, vale, nos te ordine quo natura permiserit cuncti sequemur : " adieu, adieu, adieu nous te suivrons tous, quand la nature l'ordonnera ".
On emportoit les os & les cendres du défunt. Voyez les articles FUNERAILLES, BRULER, TOMBEAU, JEUX FUNEBRES, URNE, SEPULCRE, éPITAPHE, MAUSOLEE.
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BUCHERES | ou BUCHOREST, (Géog.) grande ville de Valachie, résidence du Hospodar, qui est sous la protection des Turcs, sur la riviere de Dembrowitz. Long. 44. 10. lat. 44. 30.
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BUCHERI | (Géog.) ville de Sicile, dans la vallée de Noto, avec titre de principauté, à trois milles de Vizini.
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BUCHERON | S. m. ouvrier occupé dans les forêts à abattre les arbres, & à fabriquer le bois de chauffage.
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BUCHHOLTZ | (Géog.) petite ville d'Allemagne, dépendante de l'électorat de Saxe.
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BUCHORN | (Géog.) petite ville libre & impériale d'Allemagne, au cercle de Soüabe, sur le lac, & à cinq lieues de Constance. Long. 27. 16. latit. 47. 41.
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BUCHSGA | (Géog.) pays dans la Suisse, au canton de Soleure, avec titre de landgraviat.
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BUCK | (Géog.) petite ville de Pologne, dans la Russie rouge au palatinat de Belezo, au confluent des rivieres de Buck & de Potaw.
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BUCKAW | (Géog.) ville d'Allemagne, dans la marche de Brandebourg.
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BUCKENBOURG | (Géog.) ville d'Allemagne, du comté de Schaumbourg, sur la riviere d'Aa, en Westphalie.
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BUCKENFIOR | ou AARDALFIORT (GOLFE DE), c'est un golfe de la mer du Nord, sur les côtes de Norvege, près de la ville de Stavanger.
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BUCKINGHAM | (Géog.) ville & duché d'Angleterre, dans la province du même nom, sur la riviere d'Ousse : elle est à 15 lieues de Londres. Long. 16. 33. lat. 51. 57.
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BUCKINGHAMSHIRE | province d'Angleterre, au diocese de Lincoln, dont les laines, le pain & le boeuf sont fort estimés.
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BUCKOR | ville d'Asie, dans l'Indostan, capitale de la province du même nom, dans une île que forme l'Inde.
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BUCKOW | (Géog.) il y a deux petites villes de ce nom en Allemagne, dans le duché de Meckelbourg, au cercle de basse Saxe, l'une s'appelle le vieux Buckow, l'autre, le neuf.
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BUCOLIASME | S. m. (Belles-Lettres) chanson en usage parmi les bergers ou pasteurs de l'ancienne Grece. Ils la chantoient en conduisant le bétail aux pâturages. Selon Athenée, liv. XIV. Diomus, berger de Sicile, en fut le premier auteur ; & Epicharme en faisoit mention dans l'Alcyon & dans l'Ulysse faisant naufrage. On appelloit encore bucoliasme un air à danser qu'on joüoit sur la flûte, & qu'Athenée lui-même distingue de la chanson dont nous venons de parler. Mém. de l'Acad. tome IX. (G)
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BUCOLIQUE | S. f. (Belles-Lettres) ce mot veut dire pastoral, & signifie des poësies qui regardent les bergers & les troupeaux. Voyez PASTORAL.
Ce mot vient de , bos, & , cibus ; de-là , boves pasco ; & , qui pait les boeufs, bouvier bubulus.
La poësie bucolique est la plus ancienne de toutes les poësies, & l'on croit qu'elle a pris naissance en Sicile, parmi les divertissemens des bergers. Elle fut inspirée par l'amour & par l'oisiveté. On ajoûta ensuite des regles à ces divertissemens champêtres, & l'on en fit un art. Le soin des troupeaux, les beautés de la nature, & les plaisirs de la vie rustique en faisoient les plus nobles sujets. Moschus, Bion, Théocrite & Virgile sont les plus agréables poëtes bucoliques de l'antiquité. Voyez ECLOGUE & IDYLLE.
Selon M. de Fontenelle, Théocrite a quelquefois le style un peu trop bucolique. Il est des auteurs qui attribuent l'invention de la poësie bucolique à un berger nommé Daphnis ; d'autres à Bucolius, fils aîné de Laomédon.
Le grammairien Donat, dans la vie de Virgile, rapporte encore diverses autres opinions sur l'origine des bucoliques, que les uns attribuent aux Lacédemoniens, les autres à Oreste fugitif en Sicile, ceux-ci à Apollon, lorsqu'il gardoit les troupeaux d'Admete ; ceux-là à Mercure : & comme dans cette diversité de sentimens, il est difficile de décider quel est le véritable auteur des bucoliques ; ce grammairien conclut qu'elles ont pris naissance dans ces tems heureux, où la vie pastorale étoit encore en honneur.
Les bucoliques, dit Vossius, ont quelque conformité avec la comédie ; elles sont, comme celle-ci, une image, une imitation, de la vie commune & ordinaire ; avec cette différence toutefois, que la comédie représente les moeurs des habitans de la ville, & les bucoliques les occupations des gens de la campagne : tantôt, ajoûte-t-il, ce dernier poëme n'est qu'un monologue, & tantôt il a la forme de dialogue ; & quelquefois il est en action, quelquefois en récit, & enfin mêlé de récits & d'actions, ce qui en constitue diverses especes. Le vers hexametre, pour la poësie greque & latine, est le plus propre pour les bucoliques, & toutes celles de Virgile ont cette forme. On trouve cependant quelques vers pentametres dans Théocrite, mais seulement faisant partie des chansons qu'il met dans la bouche de ses bergers. Dans la poësie françoise, toute mesure de vers est admise pour les pastorales ; les vers libres & irréguliers paroissent même convenir principalement à l'aisance nécessaire à ce genre, beaucoup plus négligé aujourd'hui qu'il ne l'étoit des anciens par les raisons que nous détaillerons au mot ECLOGUE.
On représentoit quelquefois des bucoliques, c'est-à-dire des pastorales, sur les théatres ; les décorations étoient alors simples, composées de branches d'arbres & de feuillages ; & l'instrument dont s'accompagnoient les acteurs, étoit la flûte de roseau, nommée par les anciens , dont l'extérieur répondoit à la simplicité du poëme.
Au reste, toutes les éclogues ou les idylles ne doivent pas être mises au rang des bucoliques : les trois éclogues de Virgile, par exemple, intitulées Pollion, Silene, & Gallus, sont d'un style beaucoup plus noble que les sept autres, & roulent sur des matieres fort différentes de la vie champêtre. C'est le sentiment de Servius, dans la vie de Virgile. Vossius, Instit. poet. lib. III. cap. viij. (G)
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BUCORNE | (Myth.) surnom qu'on a donné à Bacchus, que l'on représentoit quelquefois avec une corne de taureau à la main, symbole ancien du vaisseau à boire.
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BUCORTA | (Géog.) petite riviere du royaume de Naples, qui se jette dans la mer au golfe de Girace, dans le duché de Calabre.
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BUCQUOY | (Géog.) comté de France, dans la province d'Artois, sur les frontieres de la Picardie.
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BUCZAV | ou BUTSKO, (Géog.) ville de Pologne, dans le Palatinat de Russie.
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BUDACK | (Géog.) ville capitale de la Croatie, dans la province de Corbavia, en Hongrie.
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BUD | ou OFFEN, (Géog.) grande & forte ville, capitale de la basse Hongrie & de tout ce royaume, avec une bonne citadelle : la situation en est agréable, & le terrein de ces environs est fertile en vins excellens. Il y a des sources d'eau chaude, où l'on cuit des oeufs en très-peu de tems, quoiqu'on y voye nager des poissons vivans. Diction. géog. de M. Vosgien. Elle est sur le Danube. Long. 36. 45. lat. 47. 20.
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BUDINGEN | (Géog.) ville d'Allemagne, avec un château, au comté d'Isenbourg, dans la Weteravie, sur la riviere de Nidder.
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BUDJADINGER-LAND | (Géog.) petit district d'Allemagne, dans le comté d'Oldenburg, au cercle de basse Saxe, entre l'embouchure du Weser & du Jhade.
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BUDNOC | ou PUTNOCK, (Géog.) petite ville de la haute Hongrie, dans le comté de Barsod, sur la riviere de Gaya.
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BUDOA | petite, mais forte ville maritime de la Dalmatie : elle est aux Vénitiens, & a un évêque suffragant d'Antivari, dont elle est à six lieues. Long. 36. 30. lat. 42. 12.
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BUDOWIES | (Géog.) petite riviere de Lithuanie, dans le palatinat de Poloczk, qui se jette dans l'Obola.
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BUDWEISS | ville d'Allemagne en Boheme, sur la Moldaw, à 29 lieues de Prague. Long. 32. 37. lat. 42. 15. Il y a encore une ville de ce nom en Moravie, entre Trebitz & Znaim.
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BUDYNIE | (Géog.) ville du royaume de Boheme, sur l'Eger, à cinq milles de Prague.
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BUDZIA | ou BESSARABIE, (Géog.) pays situé entre la Moldavie, le Danube, la mer Noire, & la petite Tartarie, arrosé par le Niester. L'on appelle les peuples qui l'habitent Tartares Budziacs.
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BUEIL | (Géog.) petit pays avec titre de comté, dans le comté de Nice, arrosé par le Var, dépendant du duc de Savoie. La capitale porte le même nom.
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BUELTA | S. m. terme de Chimie, dont on se sert au Potosi, pour signifier le changement qui se fait à l'argent dans la coupelle sur la fin de l'opération, lorsqu'il se couvre d'une espece de toile rouge. Voyez BOUTON.
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BUENAVENTURA | baie que forme la mer du sud sur la côte occidentale de l'Amérique méridionale, & dans le gouvernement de Popayan. Lat. 4. degrés nord. long. 301.
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BUENOS AYRES | ou CIUDAD DE LA TRINIDAD, (Géog.) belle ville aux Espagnols, dans l'Amérique méridionale, capitale du gouvernement de Rio de Plata, dans le Paraguai ; elle est peuplée d'Espagnols & d'Indiens : on y fait un grand commerce de Negres. Long. 323. latitude mérid. 34. 55.
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BUFFALARA | (Géog.) petite ville du royaume de Naples, dans la Calabre citérieure, à l'embouchure du Sibari.
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BUFFET | S. f. terme d'Architecture, c'étoit chez les anciens de petits appartemens séparés du reste de la salle, pour y ranger la porcelaine, les vases ; & en France dans les derniers siecles, les buffets se mettoient dans les salles à manger, & servoient autant pour y dresser les choses utiles pour le service de la table, que pour y étaler la richesse & la magnificence des princes ou des particuliers qui donnoient des festins. Aujourd'hui dans les maisons de quelqu'importance, on place les buffets dans des pieces séparées ; alors on les décore de tableaux relatifs au sujet, de fontaines, de cuvettes, de rafraîchissoirs & de vases, & ils sont revêtus de marbre & de bronze ; au lieu que dans les bâtimens ordinaires, ces buffets se dressent dans les vestibules ou antichambres, pour éviter l'humidité qu'ils causeroient dans les salles à manger. Voyez SALLE A MANGER. (P)
BUFFET, (Fontainier) est une demi-pyramide d'eau adossée contre un mur, ou placée dans le fond d'une niche, avec plusieurs coupes & bassins formant des nappes, & accompagné au moins d'un bouillon sur le haut qui les fournit. Il y a de ces buffets plus composés, & qui ont plusieurs bouillons & jets d'eau : (K)
BUFFET D'ORGUE, voyez FUST D'ORGUE ; c'est le menuisier qui fait la caisse de l'orgue : elle est ordinairement enrichie de sculpture & autres ornemens.
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BUFFETER | en Fauconnerie ; c'est donner en passant contre la tête d'un plus fort ; ou contre la tête d'un leurre, quand on le fait battre aux oiseaux. On dit cet oiseau a buffeté la proie.
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BUFFETEUR | S. m. voiturier des vins ou autres liqueurs, qui boit au tonneau sur la route ; l'ordonnance décerne contre ces voituriers infideles la peine des galeres.
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BUFLE | S. m. (Hist. nat. Zoolog.) bubalus, animal quadrupede du genre des boeufs, il est plus grand que les nôtres ; son corps est plus gros, & sa peau plus dure. Ses cornes sont grandes, contournées, fortes & de couleur noire. Les bufles sont fort fréquens en Italie, sur tout dans les terres du Pape & dans le royaume de Naples ; & aussi en Grece & en Asie, au rapport de Belon. On les nourrit pour faire des fromages de leur lait, casei di cavallo ; on leur fait aussi traîner des voitures, & on les conduit par le moyen d'une corde attachée à un anneau de fer ou de cuivre, qui est passé dans leurs narines ; car quoique ces animaux soient domptés, il leur reste toûjours de leur férocité naturelle. Il est à croire que le bufle d'Italie n'est pas différent du bubalus des anciens, qui étoit dans les Indes & dans l'Asie. Voyez QUADRUPEDE. (I)
On employe en Médecine ses cornes, ses ongles, sa graisse, & sa fiente : les deux premieres sont bonnes contre les convulsions ; & les autres parties ont, dit-on, les mêmes vertus que celles du boeuf. (N)
BUFLE, s. m. nom que l'on donne à la peau de l'animal appellé bufle, quand elle a été passée à l'huile, comme le chamois. Les militaires s'en servoient anciennement pour armure ; & les grenadiers Anglois, de même que la cavalerie Françoise, l'employent encore à present, à cause de sa dureté & de sa résistance, on s'en sert à faire des ceinturons, des bourses, &c. Le bufle fait un des articles importans du commerce des Anglois, des François, & des Hollandois, qui en trafiquent à Constantinople, à Smyrne, & le long des côtes d'Afrique.
Les peaux d'élans, de boeufs & des animaux de la même espece, étant passées à l'huile, & préparées comme celles du bufle, en prennent le nom, & servent de la même maniere. Il y a en France un grand nombre de manufactures pour la préparation de ces peaux, particulierement à Paris, à Roüen, à Corbeil. Ce fut le sieur Jabac, natif de Cologne, qui établit les premieres de ces manufactures. Voyez la maniére de préparer ces peaux à l'article CHAMOIS.
BUFLE, (Moulin à) c'est un moulin dans lequel on foule & prépare avec de l'huile les peaux de bufles, d'élans, d'orignaux, de boeufs, &c. pour en faire ce qu'on appelle des bufles à l'usage des gens de guerre, ce qui se fait au moyen de plusieurs gros pilons, qui se haussent & tombent dessus ces cuirs dans de grandes auges de bois, par le moyen d'une roue qui est en-dehors, & que la force de l'eau fait tourner. Le sieur Jabac, de Cologne, est celui qui a établi le premier de ces moulins en France ; & celui qu'on voit à Essone est de son invention. Voyez BUFLE, & MOULIN A FOULON.
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BUFLETIN | c'est le nom du bufle quand il est encore petit ; on prépare la peau du bufletin ; & on l'employe aux mêmes usages que celle du bufle.
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BUG | (Géog.) grande riviere de Pologne, qui prend sa source près d'Olesco, & qui se jette dans la Vistule, près de Wissegrod.
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BUGEN | (Géog.) ville & royaume d'Asie, dans l'île de Ximo, dépendant de l'empire du Japon.
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BUGEY | (LE) Géog.) petit pays de France, entre le Rhône, qui le sépare de la Savoie & du Dauphiné, & la riviere d'Ains, qui le sépare de la Bresse & du comté de Bourgogne. Belley en est la capitale. Ce pays fait commerce de bestiaux ; il a aussi des vins & du blé, mais en médiocre quantité.
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BUGIE | (Géog.) ville forte & peuplée d'Afrique au royaume d'Alger, capitale de la province de son nom, avec une baie commode. Long. 22. 25. lat. 36. 34.
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BUGIHA | (Géog.) ville d'Afrique, dans le royaume de Nubie, sur les frontieres de l'Egypte.
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BUGLA | ou L'ISLE DES NEGRES, (Géog.) île de l'Océan oriental, l'une des Philippines. Long. 140d. lat. 10.
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BUGLE | S. f. (bugula, Hist. nat. bot.) genre de plante à fleur monopétale labiée, qui n'a qu'une seule levre divisée en trois parties : celle du milieu est échancrée ; il y a de petites dents à la place de la levre supérieure ; il sort du calice un pistil qui est attaché comme un clou à la partie postérieure de la fleur, & environné de quatre embryons ; ces embryons deviennent dans la suite autant de semences arrondies, renfermées dans une capsule qui a servi de calice à la fleur, & qui est faite en forme de cloche. Tournefort. Inst. rei herb. Voyez PLANTE. (I)
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BUGLOSE | S. f. buglossum, (Hist. nat. bot.) genre de plante à fleur monopétale, faite en forme d'entonnoir & découpée ; le calice est fendu jusqu'à sa base, il en sort un pistil attaché comme un clou à la partie inférieure de la fleur, & environné de quatre embryons qui deviennent dans la suite autant de semences ressemblantes à des têtes de vipere. Ces semences mûrissent dans le calice même de la fleur, qui s'étend à mesure qu'elles grossissent. Tournefort, Inst. rei herb. Voyez PLANTE. (I)
La buglose des jardins a les racines fort gluantes, & qui rougissent fort le papier bleu ; les fleurs ont à peu-près la même propriété ; les feuilles ne le rougissent presque pas, d'où on conclud que le sel ammoniac qui est dans cette plante, est enveloppé par un suc gluant où la terre & le soufre dominent.
La buglose humecte, rafraîchit, soulage beaucoup les mélancoliques ; elle est propre pour dissiper les fluxions de poitrine & la toux opiniâtre ; on en fait boire le suc depuis trois onces jusqu'à six.
On employe les racines & les feuilles dans les bouillons rafraîchissans, & cette plante ne rafraîchit qu'en rétablissant le mouvement du sang qui croupit, & qui échauffe les parties où il circule avec peine.
On se sert des fleurs de buglose à la maniere du thé ; on en fait de la conserve, on les compte parmi les fleurs cordiales.
Le sirop fait avec le suc des feuilles soulage beaucoup les mélancoliques ; ce suc est employé dans le sirop bisantin simple, & composé de même : il entre aussi dans le sirop de scolopendre de Fernel. Tournefort. Hist. plant. (N)
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BUGRANDE | voyez ARRETE-BOEUF.
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BUGSIN | (Géog.) petite ville d'Allemagne, en Franconie, dans le comté de Reineck.
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BUHOT | S. m. se dit dans les manufactures d'Amiens, de ce qu'on entend plus communément par le mot espoulin ou espolin. Voyez ce mot.
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BUI | ou BOUIS, s. m. buxus (Hist. nat. bot.) genre de plante dont les fleurs n'ont point de pétales ; ces fleurs sont composées de plusieurs étamines qui sortent du fond d'un calice composé de feuilles. Ce fond du calice est ordinairement quarré : les embryons naissent séparément des fleurs, & deviennent dans la suite des fruits ressemblant en quelque façon à une marmite renversée. Ces fruits s'ouvrent en trois parties par la pointe ; ils sont divisés en trois loges, & renferment des semences revêtues d'une capsule élastique. Tournefort, Inst. rei. herb. Voyez PLANTE. (I)
Le buxus offic. pousse des feuilles qui sont ameres, & rougissent le papier bleu ; on tire de son bois un esprit acide, & une huile fétide.
Quercetan estime fort cette huile contre l'épilepsie, les vapeurs & le mal de dents ; rectifiée & circulée ensuite avec un tiers de bon esprit de vin, elle est adoucissante & apéritive ; on en fait prendre quinze ou vingt gouttes avec du sucre, ou de la poudre de réglisse ; on met cette huile rectifiée avec du beurre, pour en frotter le cancer ; on en fait un liniment avec l'huile de mille-pertuis, contre les rhûmatismes & la goutte.
Ettmuller & plusieurs autres auteurs soûtiennent que l'on peut substituer le buis au gaiac ; le bois de genievre au sassafras, & les racines de bardane & de benoite à la squine & à la salse-pareille. Tournefort, Hist. plant.
BUIS EPINEUX, lycium buxi foliis, C. B. P. 478. Cette plante vient dans les pays chauds ; on employoit autrefois en medecine le rob ou le suc épaissi des feuilles & des branches dont Dioscoride donne la préparation ; mais on ne s'en sert plus : le vrai lycium est inconnu aujourd'hui. Le lycium qu'on trouve dans les boutiques, est fait, à ce que dit Schroder, avec les baies du periclimenum ou chevre-feuille : d'autres le préparent avec le fruit du ligustrum ou troêne : d'autres enfin avec des prunes sauvages. C. Bauhin observe qu'il vaut mieux leur substituer l'oxyacantha ou le rhamnus.
On donne aussi le nom de lycium à différentes especes de rhamnus ou nerprun.
Lycium Indien, voyez ACACIA.
Dioscoride étend bien loin les vertus du vrai lycium : mais il est à penser qu'il faut beaucoup en rabattre ; ce qui est fort indifférent, puisqu'il n'est plus d'usage. (N)
BUIS, (Jardinage.) il est des plus employés dans les jardins. Il y en a de deux especes : celui qui est nain, & qui a les feuilles comme le myrte, sert à former la broderie des parterres & les bordures des plates-bandes ; la seconde est le buis de bois, qui s'élevant bien plus haut, sert à former des palissades : son bois est jaunâtre, d'une odeur forte, & si dur qu'on l'employe à faire des peignes, des boules, & autres ouvrages. On les multiplie de graine & de bouture.
Il y a encore le buis panaché, dont la feuille est beaucoup plus belle que celle des autres. (K)
Le buis est un bois jaune & fort dur, dont on fait un grand usage dans différens arts, soit qu'on l'employe comme la matiere sur laquelle l'artiste doit opérer, ou seulement comme une matiere propre à faire différens outils.
BUIS, subst. masculin, outil de Cordonnier, est un morceau de ce bois de quatre à cinq pouces de longueur, & d'environ un pouce d'équarrissage, & dont les angles sont un peu abattus dans la partie du milieu, pour ne point blesser la main de l'ouvrier. Les deux extrémités de ce morceau de bois sont des especes de languettes ou entailles de différentes largeur & hauteur. Il sert à lisser les bords des semelles après que le tranchet leur a donné la forme qu'elles doivent avoir. Pour cela on applique une des faces latérales de la languette, contre le dessous de la semelle dont on veut lisser l'épaisseur, par conséquent l'une des bases de l'outil est appliquée sur cette épaisseur, sur laquelle on frotte en appuyant fortement, jusqu'à ce qu'elle ait pris un beau poli. Cette façon est une des dernieres que l'on donne à l'ouvrage.
Voyez CORDONNIER, & la fig. 5. Pl. du Cordonnier-bottier.
BUIS ou le BUY, (Géog.) petite ville de France, dans le bas Dauphiné, dans un district qu'on nomme le bailliage du Buis, sur la riviere d'Ouvese.
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BUISSE | S. f. billot de bois dans lequel est un creux qui sert à donner la forme aux semelles des souliers, qu'on bat sur ce billot avec un marteau. Voyez la fig. 33. Pl. du Cordonnier-Bottier.
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BUISSON | S. m. (Jardinage) on appelle ainsi un arbre nain. Voyez ARBRE, BOIS.
Un bois de 1500 à 1600 arpens, se nomme aussi buisson, parce qu'il n'a pas assez d'étendue pour être appellé forêt.
Boqueteau est le nom que l'on donne à un bois moindre qu'un buisson, lequel a, par exemple, trente à quarante arpens.
BUISSON ARDENT ou PYRACANTHA, doit ce nom à ses fruits rouges qui subsistent en hyver, & le font paroître comme plein de feu. Ce sont ses fruits qui portent la graine. Le bois de cet arbrisseau est net & garni de piquans avec une écorce noirâtre, & sa feuille ressemble à celle du poirier. Plusieurs botanistes l'appelle aubepin, & Dioscoride le nomme oxyacantha. Voyez AUBEPIN. (K)
BUISSON CREUX, se dit, en Vénerie, de celui dans l'enceinte duquel le valet de limier qui a détourné, ne trouve rien.
Prendre buisson, se dit des cerfs, lorsqu'ils vont choisir un lieu secret pour faire leur tête, après avoir mis bas.
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BUISSONNIER | en terme de Police, est un officier de ville ou garde de la navigation, dont la fonction est de donner avis aux échevins des contraventions qui se font aux reglemens ; qui doit dresser des procès-verbaux de l'état des ponts, moulins, pertuis, & rivieres. (H)
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BUISSURES | S. m. pl. en terme de Doreur, ce sont des ordures que le feu a rassemblées sur une piece que l'on a fait cuire ; on les ôte avec la gratte boesse. Voyez GRATTEBOESSER & GRATTEBOESSE.
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BUITRAGO | (Géog.) petite ville d'Espagne, dans la nouvelle Castille.
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BUKOVANY | (Géog.) ville du royaume de Boheme, à peu de distance de Prague.
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BULACH | (Géog.) petite ville d'Allemagne en Soüabe, au duché de Wirtemberg. Il y a encore une petite ville de ce nom en Suisse, dans le canton de Zurich.
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BULAFO | nom d'un instrument de musique dont les Negres de la côte de Guinée se servent beaucoup. Cet instrument est composé de plusieurs tuyaux d'un bois fort dur, arrangés artistement, & diminuant peu-à-peu de longueur ; ces tuyaux sont attachés les uns aux autres avec de petites bandes de cuir entortillées sur de petites baguettes, de maniere à laisser un certain espace entre les différens tuyaux : on en joue en les frappant avec des bâtons dont les bouts sont garnis de cuir, pour en rendre le son moins aigu. Voyage de Froger, page 36. &c. Voyez les Planches de Lutherie & leur explication.
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BULAGUANSKI | (Géog.) ville & forteresse des Russiens en Sibérie, sur la riviere d'Angara, dans le pays de Buratte.
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BULAGUE | ou BULAHUANA, (Géog.) ville d'Afrique au royaume de Maroc, sur le fleuve d'Ommirabi, dans la province de Duquela.
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BULA | ou BOULAM, (Géog.) île d'Afrique inhabitée, quoique fertile, de la côte de Guinée.
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BULBE | S. f. on donne ce nom, en Botanique, à un oignon ou à une racine ronde, composée de plusieurs peaux ou tuniques emboîtées les unes dans les autres. Bulbeux s'applique à une plante qui participe de la nature d'une bulbe, d'un oignon. (K)
BULBE, en Anatomie ; se dit de l'oeil & d'une espece de tumeur naturelle du canal de l'urethre. Voyez OEIL & URETHRE.
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BULBO-CAVERNEUX | en Anatomie, épithete de deux muscles de la verge, qui sont aussi appellés accélérateurs. Voyez ACCELERATEUR.
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BULBOCODIUM | (Hist. nat. bot.) genre de plante à fleur liliacée, monopétale, divisée en six parties. Le pistil de cette fleur devient dans la suite un fruit oblong, divisé en trois cellules, & rempli de semences arrondies : Ajoutez aux caracteres de ce genre, que la racine est composée de deux tubercules qui forment une sorte de bec. Tournefort, Corol. Inst. rei herb. Voyez PLANTE. (I)
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BULBONAC | S. f. (Hist. nat. bot.) la tige de cette plante croît à la hauteur d'une coudée & demie, ou même davantage ; cette tige est quelquefois de la grosseur du petit doigt, bleue, d'un rouge foncé, & velue ; elle a la feuille de l'ortie, mais deux ou trois fois plus large, velue, dentelée, tantôt seule, tantôt opposée ou placée à la division des branches. Les rameaux sont chargés de fleurs disposées à-peu-près comme celles du chou, purpurines, de la grandeur de celles du chou ordinaire, plus petites que celles du leucoium, quoiqu'elles lui ressemblent assez à d'autres égards ; d'une odeur foible, avec un onglet blanc. Son calice est oblong ; il en sort quatre étamines verdâtres, avec des sommités jaunes ; il est oblong, rouge, & composé de quatre feuilles, dont deux sont plus petites que les deux autres ; ses cosses sont larges, rondes, plates, & ses lames extérieures traversées des deux côtés par un bord de couleur d'argent : elles ont un filament à leur extremité ; elles contiennent un bout de semence orbiculaire & plate. Sa racine est bulbeuse, sa graine d'un rouge foncé, & très-grosse pour une plante de cette espece. La seconde année sa tige se fane, lorsque la graine est mûre. Elle est commune en Allemagne & en Hongrie. On la cultive dans nos jardins.
On fait usage de sa racine & de sa semence. Sa semence est chaude au gout, amere, & aromatique. On mange ses racines en salade.
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BULGARES | S. m. (Hist. eccles.) hérétiques qui sembloient avoir ramassé diverses erreurs des autres hérésies pour en composer leur croyance, & dont la secte & le nom comprenoit les Patarins, les Cathares, les Joviniens, les Vaudois, les Albigeois, & encore d'autres hérétiques. Les Bulgares tiroient leur origine des Manichéens, & ils avoient emprunté leurs erreurs des Orientaux & des Grecs leurs voisins, sous l'empire de Basile le Macédonien, dans le jx. siecle. Ce mot de Bulgares qui n'étoient qu'un nom de nation, devint en ce tems-là un nom de secte, & ne signifia pourtant d'abord que ces hérétiques de Bulgarie : mais ensuite cette même hérésie s'étant répandue en plusieurs endroits, quoiqu'avec des circonstances qui y apportent de la diversité, le nom de Bulgares devint commun à tous ceux qui en furent infectés. Les Pétrobrusiens, disciples de Pierre de Brüis qui fut brûlé à S. Gilles en Provence ; les Vaudois, sectateurs de Valdo de Lyon, un reste même des Manichéens qui s'étoient long-tems cachés en France ; les Henriciens, & tels autres novateurs, qui dans la différence de leurs dogmes s'accordoient tous à combattre l'autorité de l'Eglise romaine, furent condamnés en 1176 dans un concile tenu à Lombez, dont les actes se lisent au long dans Roger de Hoveden, historien d'Angleterre : il rapporte les dogmes de ces hérétiques, qui tenoient entr'autres erreurs qu'il ne falloit croire que le nouveau-Testament ; que le baptême n'étoit point nécessaire aux petits enfans ; que les maris qui joüissoient de leurs femmes ne pouvoient être sauvés ; que les prêtres qui menoient une mauvaise vie ne consacroient point ; qu'on ne devoit point obéir ni aux évêques, ni aux autres ecclésiastiques qui ne vivoient pas selon les canons ; qu'il n'étoit point permis de jurer en aucun cas ; & quelques autres articles qui n'étoient pas moins pernicieux. Ces malheureux ne pouvant subsister sans union & sans chef, se firent un souverain pontife qu'ils appellerent pape, & qu'ils reconnurent pour leur premier supérieur, auquel tous les autres ministres étoient soumis ; & ce faux pontife établit son siége dans la Bulgarie, sur les frontieres de Hongrie, de Croatie, de Dalmatie, où les Albigeois qui étoient en France alloient le consulter & recevoir ses décisions. Reyner ajoûte que ce pontife prenoit le titre d'évêque, & de fils aîné de l'église des Bulgares. Ce fut alors que ces hérétiques commencerent d'être nommés tous généralement du nom commun de Bulgares ; nom qui fut bien-tôt corrompu dans la langue françoise qu'on parloit alors ; car au lieu de Bulgares, on dit d'abord Bougares & Bougueres, dont on lit le latin Bugari & Bugeri ; & de-là un mot très-sale en notre langue, qu'on trouve dans les histoires anciennes, appliqué à ces hérétiques, entr'autres dans une histoire de France manuscrite qui se garde dans la bibliotheque du président de Mesmes, à l'année 1225, & dans les ordonnances de S. Louis, où l'on voit que ces hérétiques étoient brûlés vifs lorsqu'ils étoient convaincus de leurs erreurs. Comme ces misérables étoient fort adonnés à l'usure, on donna dans la suite le nom dont on les appelloit à tous les usuriers, comme le remarque Ducange. Marca, hist. de Bearn. La Faille, annales de la ville de Toulouse. Abregé de l'ancienne hist. Ducange, gloss. latin. (G)
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BULGARIE | (la grande) Géog. province d'Asie dans la Tartarie russienne, bornée au nord par le royaume de Casan, à l'est par la Baskirie, au sud par le royaume d'Astracan, & à l'oüest par le Wolga. La capitale est Bulgar ou Belojer. Ce pays est soumis à l'empire Russien.
BULGARIE, (la petite) ou le royaume de Bulgarie, Géog. pays de la Turquie en Europe, bornée au nord par le Danube & la Valachie, à l'orient par la mer Noire, au midi par la Romanie & la Macédoine, & au couchant par la Servie. Elle est sous la domination des Turcs. La capitale est Sophonie.
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BULGOLDA | (Hist. nat.) c'est une pierre qui (au rapport de Ferdinand Lopez dans son histoire des Indes) se trouve dans la tête d'un animal de même nom. Les Indiens y ont beaucoup de foi, & lui attribuent les mêmes vertus qu'au bézoar : ils la regardent comme un remede souverain contre toute-sorte de poison. On la dit fort rare. Elle est de la grandeur d'une noisette. (-)
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BULIMI | ou BOULIMIE, s. f. (Medecine) faim canine, appétit extraordinaire, accompagné d'évanoüissement & de froid aux extrémités du corps. Voyez FAIM.
Ce mot est tiré du grec ou , formé de , boeuf, & de , faim ; ou, comme d'autres l'expliquent, faim assez grande pour manger un boeuf ; ce qui cependant conviendroit mieux au mot qu'à . Suidas & Varron donnent à ce mot une étymologie qui semble plus naturelle, en le faisant venir de , particule dont les Grecs se servent pour augmenter, & de , faim ; car ces mots , un grand garçon, , une grosse figue, montrent que les Grecs se servoient de la particule , jointe avec les mots auxquels ils donnoient une signification augmentative.
Il est parlé dans les Transactions philosophiques d'une personne malade de bulimie, qui fut guérie en rendant plusieurs vers de la longueur & de l'épaisseur d'un tuyau de pipe. (N)
Il paroît par plusieurs expériences, que la présence des vers est souvent la cause de la bulimie.
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BULL | ou BULIA, (Géog.) petite riviere de Grece dans la province de Livadie, qui se jette dans le golfe de Lepante.
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BULLE | S. f. (Hist. anc.) petite boule concave d'or, d'argent, ou d'autres métaux, que les enfans des Romains portoient au cou : on la donnoit aux enfans de qualité en même tems que la robe prétexte ou bordée de pourpre, & ils ne la quittoient qu'en quittant cette robe, c'est-à-dire à l'âge de dix-sept ans. Quoiqu'il paroisse constant par le témoignage de tous les auteurs qu'il n'y avoit que les enfans des magistrats curules qui eussent droit de porter la bulle d'or ; il n'est pas moins certain qu'ils n'étoient pas les seuls qui la portassent ; ceux à qui les honneurs du triomphe étoient décernés prenoient aussi cet ornement : Bulla, dit Macrobe, gestamen erat triumphantium, quam in triumpho prae se gerebant : mais cette bulle étoit d'un plus grand volume que celle des enfans. La grande vestale & les dames romaines en portoient aussi : la premiere par distinction ; les autres comme une parure. On regardoit encore ces bulles comme de très-puissans préservatifs contre l'envie, & contre les génies mal-faisans. La superstition n'avoit guere moins de part que la vanité dans la coûtume d'attacher ces bulles au cou des enfans des patriciens. (G)
BULLE, (Hist. anc. & mod.) ce mot désignoit autrefois le sceau attaché à un instrument ou charte quelconque : il y en avoit d'or, d'argent, de cire, & de plomb. Les empereurs & les rois, dans les affaires de grande importance, se servoient de sceaux d'or ; aujourd'hui on se sert presque par-tout de cire : mais le sceau attaché aux constitutions des papes est toûjours de plomb. (-)
BULLE, (Hist. ecclés. & Droit canon.) expédition de lettres en chancellerie romaine, scellées en plomb, qui répondent aux édits, lettres-patentes, & provisions des princes séculiers.
On dérive le mot bulle de bulla, un sceau, & celui-ci de bulla, une boule ou bouteille ronde qui se forme dans l'eau. D'autres le dérivent du grec , conseil. Le pere Pezron prétend qu'il est tiré du celte buil ou bul, une boule ou bouteille qui se forme sur l'eau.
La bulle est la troisieme sorte de rescrit apostolique qui est le plus en usage, tant pour les affaires de justice que pour les affaires de grace : elle est écrite sur parchemin, à la différence de la signature qui est écrite en papier. La bulle est proprement une signature étendue, & ce qu'elle contient en peu de paroles, la bulle l'étend : néanmoins elle ne doit pas être, quoiqu'étendue, plus ample que la signature, si ce n'est pour les clauses qu'on a coûtume d'étendre selon le style. Voyez BREF.
Si les bulles sont lettres gracieuses, le plomb est pendant en lacs de soie ; & si ce sont des lettres de justice & exécutoires, le plomb est pendant à une cordelle de chanvre : elles sont écrites en caractere rond ou gothique.
La bulle en la forme qu'elle doit être expédiée, se divise en quatre parties, qui sont la narration du fait, la conception, les clauses, & la date. Dans la salutation le pape prend la qualité d'évêque, serviteur des serviteurs de Dieu ; servus servorum Dei. Voyez SERVITEUR.
La bulle n'est proprement que le sceau ou le plomb pendant qui donne son nom au titre, par ce qu'il lui donne seul autorité ; & généralement tout rescrit où il y a du plomb pendant s'appelle bulle. Ce plomb représente d'un côté les têtes de S. Pierre à droite, & de S. Paul à gauche ; de l'autre côté est écrit le nom du pape regnant, & l'an de son pontificat. Voyez PONTIFICAT.
Les jubilés s'octroyent par bulles : on ne sacre point les évêques qu'ils n'ayent leurs bulles. En Espagne on expédie des bulles pour toutes sortes de bénéfices : mais en France on n'a que de simples signatures en papier, à la reserve des archevêchés, des abbayes, & de quelques prieurés conventuels. Les bénéfices dont le revenu excede vingt-quatre ducats, ne sont possédés que sur des provisions qui s'expédient par bulles, & non pas par simples signatures, suivant une regle de la chancellerie. La France n'a point voulu se soûmettre à cette regle ; & à l'exception des bénéfices qui sont taxés dans les livres de la chambre apostolique, elle s'est conservée dans le droit de n'exprimer le revenu du bénéfice qu'on impetre qu'en général & de cette maniere : Cujus & illi forsan annexorum fructus 24 ducatorum auri, de camera secundum communem estimationem, valorem annuum non excedunt.
Les bulles qui viennent de Rome en France, sont limitées & modérées selon les usages du royaume, avant que d'être enregistrées. On n'y en reçoit aucunes, qu'après avoir bien examiné si elles ne contiennent rien de contraire aux libertés de l'église Gallicane. Il suffit en France que ces mots proprio motu, de notre propre mouvement, se trouvent dans une bulle, pour la rejetter toute entiere.
Les Espagnols ne reçoivent pas non plus aveuglément les bulles des papes : elles sont examinées dans le conseil du roi ; & si l'on trouve qu'il y ait des raisons pour ne pas les mettre en exécution, l'on en donne avis au pape par une supplique ; & par ce moyen ces bulles demeurent sans effet. Cette maniere d'agir avec la cour de Rome est établie dans la plûpart des états & des royaumes.
Fulminer des bulles, c'est en faire la publication ou vérification par l'un des trois commissaires auxquels elles sont adressées, soit qu'il soit évêque ou official. On s'oppose quelquefois à la publication des bulles ou des rescrits du pape. Mais quand il s'y trouve de l'abus, l'on a pour lui le respect de n'appeller pas directement de la concession de la bulle, on interjette simplement appel comme d'abus de l'exécution ou fulmination de la bulle. C'est un expédient pour ne point choquer le pape, en ne se plaignant que de la procédure & de la partie qui a obtenu la bulle.
Cependant il y a des cas importans, dans lesquels on appelleroit sans détour comme d'abus de la bulle du pape : par exemple, s'il prononçoit l'excommunication contre la personne du roi ; s'il entreprenoit sur le temporel du royaume ; s'il disposoit des bénéfices dont la nomination appartient au roi par le concordat. Voyez FULMINATION.
Quand le pape est mort ; on n'expédie plus de bulles durant la vacance du siége, & jusqu'à l'élection du successeur : ainsi pour prévenir les abus qui pourroient se glisser, aussi-tôt que le pape est mort, le vice-chancelier de l'Eglise romaine va prendre le sceau des bulles, puis il fait effacer en présence de plusieurs personnes, le nom du pape qui vient de mourir ; il couvre d'un linge le côté où sont les têtes de S. Pierre & de S. Paul ; il y met son sceau, & donne ce sceau des bulles ainsi enveloppé, au camérier pour le garder, afin qu'on n'en puisse sceller aucune lettre.
BULLE in coenâ Domini : on appelle ainsi une bulle fameuse, qui se lit publiquement tous les ans à Rome le jour de la cene, c'est-à-dire le jeudi-saint, par un cardinal diacre, en présence du pape, accompagné des autres cardinaux & des évêques. Elle contient une excommunication contre tous les hérétiques, les contumaces & les desobéissans au saint siége. Après la lecture de cette bulle, le pape jette un flambeau allumé dans la place publique, pour marque d'anathème. Dans la bulle du pape Paul III. de l'an 1536, il est énoncé dès le commencement, que c'est une ancienne coûtume des souverains pontifes, de publier cette excommunication le jour du jeudi-saint, pour conserver la pureté de la religion chrétienne, pour entretenir l'union des fideles : mais on n'y marque pas l'origine de cette cérémonie. Les principaux chefs de la bulle in coenâ Domini regardent les hérétiques & leurs fauteurs, les pirates & les corsaires ; ceux qui imposent de nouveaux péages ; ceux qui falsifient les bulles & les autres lettres apostoliques ; ceux qui maltraitent les prélats de l'Eglise ; ceux qui troublent ou veulent restraindre la jurisdiction ecclésiastique, même sous prétexte d'empêcher quelques violences, quoiqu'ils soient conseillers ou procureurs généraux des princes séculiers, soit empereurs, rois ou ducs ; ceux qui usurpent les biens de l'Eglise, &c. ce qui a donné lieu d'accuser cette bulle d'établir indirectement le pouvoir des papes sur le temporel des rois. Tous ces cas y sont déclarés réservés, ensorte que nul prêtre n'en puisse absoudre, si ce n'est à l'article de la mort.
Le concile de Tours, en 1510, déclara la bulle in coena Domini insoûtenable à l'égard de la France, qui a souvent protesté contre cette bulle en ce qui regarde les droits du roi & les libertés de l'église gallicane. En 1580, quelques évêques pendant le tems des vacations tâcherent de faire recevoir dans leurs dioceses la bulle in coena Domini. Le procureur général s'en étant plaint, le parlement ordonna que tous les archevêques & évêques qui auroient reçû cette bulle & ne l'auroient pas publiée, eussent à l'envoyer à la cour : que ceux qui l'auroient fait publier fussent ajournés, & cependant leur temporel saisi ; & que quiconque s'opposeroit à cet arrêt, fût réputé rebelle & criminel de lese-majesté. Mézer. hist. de France, sous le regne d'Henri III. (G)
BULLE D'OR, (Hist. & Jurisp.) on donne en Allemagne ce nom par excellence à une pragmatique-sanction ou constitution de l'empereur Charles IV. approuvée par la diete ou l'assemblée générale des princes & états de l'Empire, qui contient les fonctions, priviléges, & prérogatives des électeurs, tant ecclésiastiques que séculiers, & toutes les formalités qui doivent s'observer à l'élection d'un Empereur. Elle fut faite en 1356 en partie à Metz, & en partie à Nuremberg. La bulle d'or a toûjours été regardée depuis ce tems comme loi fondamentale de l'Empire : elle est au nombre de celles que les empereurs sont tenus d'observer par la capitulation qu'on leur a fait jurer à leur couronnement. Cette constitution fut faite pour terminer les disputes, quelquefois sanglantes, qui accompagnoient autrefois les élections des empereurs, & prévenir pour la suite celles qui pourroient arriver à ce sujet, & empêcher les longs interregnes dont l'Empire avoit beaucoup souffert auparavant. L'original le plus authentique de la bulle d'or se conserve à Francfort sur le Mein ; & c'est le magistrat de cette ville qui en est le dépositaire. On a un respect si scrupuleux pour cet exemplaire, qu'en 1642 l'électeur de Mayence eut de la peine à obtenir qu'on renouvellât les cordons de soie presque usés, auxquels le sceau de la bulle d'or est attaché ; & il n'en vint à-bout, qu'à condition que la chose se passeroit en présence d'un grand nombre de témoins.
BULLE D'OR de Bohème ; (Hist.) c'est un privilége accordé en 1348 au roi & au royaume de Bohème, par l'empereur Charles IV. Ce prince y confirme toutes les prérogatives accordées par Frédéric II. en 1212. à Ottocare, roi de Bohème.
BULLE D'OR du Brabant, (Hist. mod. & Jurisp.) on nomme ainsi une constitution de l'empereur Charles IV. donnée à Aix-la-Chapelle en 1349, par laquelle ce prince accorde aux Brabançons le privilége de ne pouvoir être traduits à aucuns tribunaux étrangers ou hors de leur pays, ainsi que de ne pouvoir point être arrêtés ailleurs que chez eux, ni pour crimes, ni pour dettes. La trop grande extension de ce privilége remarquable a quelquefois fait murmurer les états de l'Empire leurs voisins. (-)
BULLES D'EAU, sont de petites boules d'eau dont l'interieur est rempli d'air, & dont la formation vient de différentes causes. Voy. BOUTEILLES D'EAU. (O)
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BULLERBORN | (Géog. & Hist. nat.) c'est le nom d'une fontaine très-singuliere, qui est dans la forêt de Teuteberg en Westphalie, dans l'évêché de Paderborn : on dit qu'elle ne coule pas toûjours ; mais qu'après avoir coulé pendant une heure, elle cesse de fournir de l'eau, & qu'au bout de trois heures elle recommence, & ainsi de suite. Avant qu'elle commence à couler, on prétend qu'on entend un bruit comme d'un vent qui voudroit s'élever ; après quoi l'eau sort avec impétuosité & bouillonnement. On ne manque pas de raconter bien d'autres merveilles de cette fontaine dans le pays, qui ne peuvent trouver créance que chez les crédules Westphaliens.
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BULLETIN | S. m. terme de Police, est un ordre que donnent des échevins ou magistrats d'une ville pour le logement des soldats.
Ce terme se dit aussi des certificats de santé que donnent les magistrats en tems de peste, à ceux qui veulent passer d'un lieu à un autre. (H)
BULLETIN, (Mar.) c'est un écrit en parchemin que les commissaires & commis des classes délivrent gratis à chaque officier marinier & matelot. Il contient leurs signaux, leurs priviléges, & les années qu'ils doivent servir.
C'est aussi un billet que l'on donne pour servir de certificat qu'on a payé les droits d'entrée & de sortie : il est différent de l'acquit. (Z)
BULLETIN, (Commerce) est aussi un nom qu'on a donné aux billets que ceux qui avoient des comptes ouverts dans les livres de la banque royale de France, devoient envoyer ou porter aux teneurs de livres pour s'y faire ou créditer ou débiter. (G)
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BULLINGBROOK | (Géog.) ville & comté d'Angleterre dans la province de Lincoln. Long. 17. 20. lat. 53.
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BULLINGHAUSEN | (Géog.) petite ville d'Allemagne dans le duché de Franconie, dans le comté de Castell.
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BULLOQUES | (LES) ou BULLOITES, (Géog.) peuples d'Asie ; partie dans la Perse & partie dans l'Indostan, qui est fort peu connu.
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BULLO | ou BOL, (Géog.) petite ville avec un château en Suisse, au canton de Fribourg.
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BUMICILI | S. m. (Hist. mod.) nom d'une secte Mahométane en Afrique. Les Bumicilis sont grands sorciers. Ils combattent contre le diable, à ce qu'ils disent, & courent meurtris, couverts de coups, & tout effrayés. Souvent en plein midi ils contrefont un combat en présence de tout le monde l'espace de deux ou trois heures, avec des javelots ou zagaies, jusqu'à ce qu'ils tombent de lassitude : Mais après s'être reposés un moment, ils reprennent leurs esprits, & se promenent.
On ne sait point encore quelle est leur regle, mais on les tient pour fort religieux. (G)
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BUNEA | (Myth.) épithete de Junon : elle fut ainsi appellée de Bunus, fils de Mercure.
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BUNGO | (Géog.) ville d'Asie au Japon dans un royaume du même nom, dont elle est capitale, près du royaume de Bugen.
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BUNTZ | (Géog.) petite riviere de la Suisse qui se jette dans l'Aar.
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BUNTZE | ou BUNTZLAU, (Géog.) Il y a deux villes en Bohème de ce nom ; l'ancienne qui est sur l'Elbe : la nouvelle (c'est la plus considérable) est sur la Gizare, à huit lieues de Lignitz. Long. 33. 25. lat. 51. 12. Il y en a outre cela encore une de ce nom en Silésie, dans la principauté de Jauer.
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BUONCONVENTO | (Géog.) bourg d'Italie dans le Siennois, sur l'Ombrone.
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BUPHAGE | (Myth.) surnom qu'on a donné à Hercule. On dit que sa faim étoit si grande, que les Argonautes craignant qu'il n'épuisât leurs provisions, l'obligerent à sortir de leur vaisseau ; & qu'ayant enleve des boeufs à un paysan, il en dévora un tout entier dans un seul repas : aussi lui a-t-on donné trois rangs de dents.
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BUPHONIES | (Myth.) fêtes que l'on célébroit à Athenes en l'honneur de Jupiter Polien. On lui immoloit un boeuf ; & c'est de là que les fêtes ont pris le nom de Buphonies.
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BUPRESTE | buprestis, s. f. (Hist. nat. Insectol.) insecte que plusieurs auteurs ont mis dans le genre des cantharides ; cependant son corps est plus allongé ; les enveloppes des ailes sont d'un verd jaunâtre ou doré ; les pattes sont plus longues & plus grosses ; les yeux sont ronds & saillans ; il a deux antennes longues & composées de plusieurs pieces articulées ; la tête est petite, la bouche est grande, & les levres sont dures & fortes ; il a des serres & des dents, au moyen dequoi sa morsure est très-sensible ; le ventre est allongé. Cet insecte attaque les scarabées & les lésards ; il les mord sous le ventre, qui est l'endroit le plus foible. On dit qu'il a un mauvais goût qui approche de celui du nitre. On prétend que la bupreste fait enfler le bétail qui l'a avalée avec l'herbe qu'il paît ; c'est pourquoi on l'a nommée vulgairement enfle-boeuf. Voyez Mouffet, Insect. théat. Voyez CANTHARIDE, INSECTE. (I)
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BUPTHALMU | ou ŒIL DE BŒUF, (Jard.) plante qui se nomme ainsi à cause de sa ressemblance avec l'oeil d'un boeuf. Ses tiges assez hautes, ont des feuilles grandes, découpées en leurs bords. Ses fleurs à rainures sont composées de plusieurs fleurons jaunes en maniere de gouttiere ; & à leur place, il naît un fruit qui en contient la graine.
La semence & les racines éclatées sont les deux moyens de multiplier cette fleur qui est vivace. Elle vient en toute sorte de terre, & se plante dans les parterres, parmi les fleurs de la grande espece. On la voit fleurie en été.
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BUR-SALUM | royaume en Afrique, au nord de la riviere de Gambie, & qui touche à la côte occidentale de cette partie du monde.
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BURAGRAG | (Géog.) riviere d'Afrique au royaume de Fez, qui prend sa source dans les monts Atlas, & se jette dans l'Océan Atlantique.
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BURAIL | S. m. (Commerce) étoffe de soie tramée, quelquefois de soie, plus ordinairement de laine, de poil, de fil, ou de coton. Le burail dit à contre-poil, se monte en vingt-huit buhots, trente portées, & doit avoir un pié & demi de roi entre deux gardes, & vingt-une aune & demie au sortir de l'estille. Le burail de Zurich est une espece de crépon. Il y a un grand nombre d'autres burails, distingués ou par les noms de lieux, ou par leur façon.
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BURAIQUE | voyez BARAICUS.
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BURAMO | (LES) ou les PAPAIS, Géog. peuple d'Afrique dans la Nigritie : ils demeurent autour de la riviere de Saint-Domingo. Leur pays s'étend jusqu'à l'embouchure du Riogrande. Cette nation est idolâtre. On dit que dans ce pays les femmes, pour s'empêcher de parler, prennent dans leur bouche une gorgée d'eau qu'elles gardent la moitié d'une journée, sans que cela les empêche de travailler. Voyez Dict. de la Martiniere.
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BURATTES | (LES) Géog. nation barbare & idolâtre qui occupe une partie de la Sibérie. Il y a une forteresse nommée Buratte ; qui appartient aux Russiens, qui y tiennent garnison.
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BURBAS | S. m. (Commerce) petite monnoie Algérienne, qui porte des deux côtés les armes du dey ; elle ne vaut guere que la moitié d'un aspre.
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BURBURATA | (Géog.) île de l'Amérique méridionale, sur la côte de la province de Venezuela.
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BURCHAUSEN | (Géog.) ville d'Allemagne dans la basse Baviere, sur la riviere de Saltz, à 11 lieues de Saltzbourg. Long. 30. 25. lat. 48. 5.
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BURCKEN | (Géog.) petite ville d'Allemagne dans le Brisgau, sur le Rhin, au-dessous du vieux Brisach.
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BURCKERSDORFF | (Géog.) petite ville d'Allemagne, à peu de distance de Vienne en Autriche.
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BURCZ | ou BURCZLAND, (Géog.) petit pays de la Transylvanie, sur la riviere de même nom, aux frontieres de la Moldavie & de la Valachie, fertile en blé & en vin.
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BURD | (Géog.) petite riviere de France en basse Normandie, qui traverse le Cotentin, & se jette dans la mer.
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BURDALO | (Géog.) riviere d'Espagne dans l'Estramadure de Léon : elle prend sa source dans le voisinage de Truxillo, & se jette dans la Guadiana.
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BURDUGNO | (Géog.) petite ville de la Morée sur le Vasilipotamo.
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BURE | S. f. (Commerce) grosse étoffe de laine, à poil long, croisée, qui se fabrique sur un métier à deux marches, avec la navette ; elle a une aulne de large. On fait souvent entrer dans le filage des laines dont on la fabrique, une portion de bonne tontisse.
BURES, s. f. ou m. (Métallurgie) c'est ainsi qu'on appelle les puits profonds que l'on pratique dans une mine. On en fait deux ordinairement à la fois ; l'un pour l'établissement des pompes à épuisement, l'autre pour remonter les matieres & donner de l'air. On appelle ces derniers bures d'airage. Les bures à épuisement se pratiquent plus profondes, afin de donner lieu à l'écoulement facile des eaux. Voyez l'article CALAMINE. Quand on ne fait qu'une bure, elle doit être assez grande, pour que les eaux puissent être pompées d'un côté, & les matieres remontées de l'autre.
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BUREAU | en termes d'Aides ou de Finances, est le lieu où se sont les recettes ou les payemens.
BUREAU, en terme de Palais, est la table sur laquelle sont posées les pieces d'un procès par écrit, par le conseiller qui le rapporte. Voy. RAPPORTEUR.
Ce terme se dit aussi de l'assemblée ou séance des commissaires nommés pour l'instruction & le jugement d'une affaire. Voyez COMMISSION.
C'est aussi un terme propre pour désigner plusieurs jurisdictions ordinaires : ainsi l'on dit, bureau des finances. Voyez l'article suivant.
On appelle aussi bureau de la ville, la jurisdiction du prevôt des marchands & des échevins. (H)
BUREAU DES FINANCES, (Jurisprudence) c'est la jurisdiction des thrésoriers de France, généraux des finances, & grands-voyers. Ces officiers, qui sont de très-ancienne création, ont souvent varié pour le nombre. En 1310, il n'y avoit qu'un seul thrésorier de France : en 1577, on en établit trois dans chaque généralité, & on réunit à leurs charges celles de généraux des finances ; ce qui fit le nombre de cinq en chaque généralité. Ils furent considérablement augmentés par la suite. Louis XIII. en l'année 1626, réunit à leurs charges, chacun dans leurs généralités, l'office de grand-voyer, qui avoit été créé en faveur de Maximilien de Bethune marquis de Rôni. En 1693, Louis XIV. supprima la chambre du thrésor, & incorpora cette jurisdiction à la leur. On voit par-là que ce tribunal a changé de face bien des fois, & qu'il seroit trop long & trop difficile de suivre dans ces différentes époques, l'étendue de ses fonctions & de son pouvoir, les matieres de sa compétence, & la forme de ses jugemens. Voyez pour cela, GENERAL DES FINANCES, THRESORIER DE FRANCE, CHAMBRE DU DOMAINE, THRESOR, VOYER, VOYERIE, COMMISSAIRE DE LA VOYERIE.
Les membres de cette compagnie joüissent des plus beaux priviléges ; ils sont du corps des cours supérieures, dans lesquelles ils ont ordinairement séance avec les conseillers, & voix délibérative dans le cas d'affaires importantes, & où l'intérêt public exige leur présence. Ils sont commensaux de la maison du roi, & en cette qualité joüissent de toutes les prérogatives des officiers de sa majesté. Ils ont la noblesse héréditaire, l'exemption des droits seigneuriaux dans la mouvance du roi, &c. ainsi que les officiers des parlemens, chambres des comptes, & autres compagnies supérieures.
Aujourd'hui le bureau des finances de Paris est composé d'un premier & d'un second président en titre d'office, de quatre présidens d'ancienneté, & de 30 autres thrésoriers de France, d'un avocat du roi, & d'un procureur du roi qualifié même, dans quelques édits & lettres patentes, de procureur général pour le service du bureau & de la chambre des finances ; pareillement d'un avocat & d'un procureur du roi pour le service de la chambre du domaine : outre cela il y a quatre commissaires généraux de la voyerie, des greffiers & des huissiers.
L'édit déjà cité, de 1693, établit ainsi l'ordre qui doit être observé dans ce tribunal : " Voulons qu'il y soit établi deux chambres, dans l'une desquelles se jugeront les affaires concernant nos finances, voyerie, & autres qui ont été jusqu'à-présent de la compétence de nosdits thrésoriers de France ; & dans l'autre toutes les affaires concernant nos domaines de l'étendue de notre généralité de Paris, l'enregistrement & exécution des brevets & lettres de dons par nous accordés, ensemble des lettres de naturalité & de légitimation, & autres affaires qui ont été jusqu'à-présent de la compétence de notredite chambre du thrésor. Et seront lesdites deux chambres remplies de nombre égal desdits thrésoriers de France, lesquels y serviront alternativement & par semestre ; & seront présidées, l'une par le premier, & l'autre par le second président, &c.... Entendons que tous les brevets de dons qui seront par nous accordés de nos droits d'aubaine, bâtardise, deshérence, confiscation, droits seigneuriaux, & autres casuels dépendans de notre domaine, & lettres patentes expédiées sur iceux, ensemble toutes lettres patentes de naturalité & légitimation, soient à l'avenir enregistrées en ladite chambre, destinée aux affaites de notre domaine.... Et à l'égard des lettres de noblesse, érections, & autres semblables, l'enregistrement en sera fait en la chambre destinée pour les affaires de la compétence ordinaire de notredit bureau, à laquelle appartiendra pareillement la réception de tous les officiers d'élections, greniers à sel, receveurs généraux des finances, & receveurs des tailles & autres officiers de l'étendue de notredite généralité, qui ont coûtume de se faire recevoir en notredit bureau.... Voulons que tous nosdits thrésoriers de France soient à l'avenir reçûs en notre chambre des comptes, ainsi qu'ils ont accoûtumé ; & à l'égard des deux présidens & de nos avocats & procureurs, ils seront tenus en outre de se faire recevoir en la grand-chambre de notre parlement de Paris ".
Outre ces fonctions des thrésoriers de France dont parle l'édit que nous venons de rapporter, ils connoissent de ce qui concerne les bâtimens & réparations du palais à Paris, & des jurisdictions royales. La levée des tailles doit être faite en vertu de lettres patentes à eux adressantes, après qu'ils ont donné au roi en son conseil, le département qu'ils en ont fait sur les élections, en conséquence du brevet que sa majesté leur envoye tous les ans à cet effet. Comme grands-voyers, les ponts & chaussées, pavé, & autres ouvrages publics, sont du ressort de leur jurisdiction. Il y a pour ces derniers objets qui demandent un soin vigilant & une promte exécution, des commissions du conseil toûjours remplies par des officiers de la compagnie, qui sont chargés de se donner les mouvemens nécessaires, pour y entretenir le bon ordre, & faire ce que le bien public exige. Voyez PONTS & CHAUSSEES, PAVE, &c.
BUREAU DE COMMERCE ou DU COMMERCE, est un bureau composé de huit personnes choisies par sa majesté, parmi ceux de son conseil, qui ont le plus d'expérience en fait du commerce. Il a été établi par arrêt du 22 Juin 1722, à la place du conseil de commerce.
C'est à ce bureau que sont discutées & examinées toutes les propositions & mémoires qui y sont présentés, ensemble les affaires & difficultés qui surviennent concernant le commerce, tant de terre que de mer, au-dedans & au-dehors du royaume, & ce qui regarde les fabriques & manufactures. Les intendans du commerce, ainsi que le lieutenant-général de police & les députés du commerce, & quelques fermiers généraux, assistent au bureau du commerce qui se tient tous les jeudis. Voyez CONSEIL DU COMMERCE.
BUREAU, se dit du lieu où les marchands s'assemblent pour traiter & délibérer sur les affaires qui regardent leur corps. A Paris, chacun des six corps de marchands a son bureau particulier : mais c'est dans celui de la Draperie, comme le premier corps, que se tiennent les assemblées générales des six corps.
BUREAU, se dit encore d'un endroit établi pour la vente & le débit de certaines marchandises de manufacture particuliere, comme le bureau des cuirs de Hongrie, le bureau des maroquins, &c. Les Corroyeurs, Tanneurs, Mégissiers, Cordonniers, appellent petit bureau, le bureau des vendeurs de cuir.
BUREAU, se dit aussi des lieux destinés pour la perception des droits établis sur les marchandises, pour l'entrée & la sortie du royaume, & les provinces réputées étrangeres. On dit le bureau de la doüanne de Paris, le bureau des traites d'Ingrande, le bureau de la romaine de Roüen, le bureau de la connétablie ou comptablie de Bordeaux, &c. Il y a des bureaux généraux, des bureaux particuliers, des bureaux de recette, des bureaux de conserve, &c.
BUREAU de la Banque royale, c'étoit le nom que l'on donnoit en France à tous les lieux dans lesquels se faisoient, en 1719 & 1720, les diverses opérations de cette banque. Outre le bureau de Paris, qui étoit le principal de tous, & qui occupoit le palais Mazarin, l'hôtel de Nevers, &c. cette banque avoit encore ses bureaux dans toutes les villes du royaume où il y a des hôtels des monnoies. V. BANQUE ROYALE.
BUREAU des Congés. Voyez CONGE.
BUREAU des chartrons. Voyez CHARTRONS. (G)
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BUREBA | (Géog.) contrée d'Espagne, dans la vieille Castille ; sa principale ville est Birviesca.
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BURELE | S. f. en termes de Blason, est une fasce de huit pieces ou plus.
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BURELLA | (Géog.) petite ville du royaume de Naples dans l'Abruzze, près de la riviere de Sangro.
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BUREN | (Géog.) ville & comté des Provinces-Unies ; dans la Gueldres, au quartier de Betuwe, appartenant à la maison d'Orange.
BUREN, (Géog.) petite ville d'Allemagne au cercle de Westphalie, dans l'évêché de Paderborn, sur la riviere d'Alme.
BUREN, (Géog.) petite ville de Suisse, au canton de Berne, sur l'Aar.
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BURG | (Géog.) ville des Provinces-Unies, au comté de Zutphen, sur l'Issel.
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BURG-UMSTADT | (Géog.) petite ville d'Allemagne en Franconie, dans l'évêché de Bamberg.
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BURGAU | (LE) Géog. marggraviat d'Allemagne, en Soüabe, sur le Danube, entre le Lech & l'Iler, appartenant à la maison d'Autriche. La capitale porte le même nom ; elle est située sur le Minden, à quatre milles d'Illon. Long. 28. 6. lat. 48. 28.
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BURGDORFF | (Géog.) petite & jolie ville d'Allemagne, dans le duché de Lunebourg, sur la petite riviere d'Owe, entre Zelle & Hanovre.
BURGDORFF, (Géog.) petite ville avec château, en Suisse, dans le canton de Berne. Long. 25. 10. lat. 47. 6.
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BURGEL | (Géog.) petite ville d'Allemagne dans la Misnie.
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BURGGRAVE | S. m. (Hist. mod.) ce mot est composé de deux mots allemands, burg, ville, forteresse, château, & de graff ou grave, qui signifie comte. On appelloit ainsi autrefois en Allemagne des officiers, à qui les empereurs avoient confié la défense d'une ville ou d'un château. Ces Burggraves n'étoient pas toûjours sur le même pié ; il y en avoit qui remplissoient certaines fonctions de magistrature ; d'autres rendoient la justice en matiere criminelle ; d'autres enfin se mêloient aussi du civil au nom de l'empereur, ou de ceux qui les avoient établis. Par la suite l'office de burggrave est devenu héréditaire, & même ceux qui en étoient revêtus se sont rendus pour la plûpart souverains des villes dont ils n'étoient auparavant que les gardiens. Aujourd'hui ceux qui portent ce titre dans l'Empire, reçoivent de l'Empereur l'investiture féodale des villes ou châteaux dont ils sont burggraves. Il y en a aujourd'hui quatre en Allemagne qui ont le titre de princes de l'Empire ; savoir les burggraves de Magdebourg, de Nuremberg, de Stromberg, & de Reineck. La maison de Brandebourg descend des anciens burggraves de Nuremberg, & en porte encore le titre. Elle prétend en cette qualité avoir des droits sur cette ville, que le magistrat lui conteste. La ville de Nimegue dans la Gueldres hollandoise, a aussi un burggrave. (-)
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BURGGRAVIAT | (Hist. mod.) on donne ce nom à l'étendue de la jurisdiction d'un burggrave. V. ce mot.
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BURGHELLI | (Hist. mod.) on donne ce nom à des petites barques dont on se sert à Venise pour aller prendre l'air en met ; elles ont une salle où il peut tenir une compagnie de dix à douze personnes : on les nomme aussi petits bucentaures. (-)
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BURGHUHN | (Géog.) petite ville d'Allemagne, dans le territoire de Buchau en Hesse, sur la riviere de Huhn.
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BURGIAN | (Géog.) ville considérable d'Asie, en Perse, dans le Korasan, près du lac de même nom.
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BURGLANGENFELD | (Géog.) petite ville forte d'Allemagne dans le duché de Neubourg, entre Amberg & Ratisbonne, sur la Nabe.
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BURGLEHN | (Hist. mod.) l'on nommoit ainsi autrefois en Allemagne une sorte de ligne défensive entre deux familles, qui devoit avoir lieu non-seulement entre les parties existantes, mais aussi entre leurs héritiers & descendans à perpétuité ; & en vertu de laquelle l'une des deux familles venant à s'éteindre, l'autre devoit lui succéder dans tous ses biens, droits & prérogatives.
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BURGMANN | (Hist. mod.) c'est le nom qu'on donne en Allemagne dans les deux villes de Fridberg & de Gelnhausen, aux conseillers de ville : pour être admis parmi eux, il faut faire preuve de noblesse ; les princes & les comtes en sont néanmoins exclus ; ce sont ces conseillers qui élisent le burggrave, qui releve immédiatement de l'empereur. (-)
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BURG | ou BURGOW, (Géog.) petite ville d'Allemagne, dans le comté de Tirol, sur la route de Trente à Venise.
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BURGOS | (Géog.) ville d'Espagne, capitale de la Castille vieille, sur une montagne. Long. 14. 20. lat. 42. 20.
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BURGSTADTEL | (Géog.) petite ville d'Allemagne. en Misnie.
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BURIA | (Hist. nat.) c'est le nom que les habitans de la Carinthie donnent à un vent d'est très-violent, aux ravages duquel ils sont quelquefois exposés. Ce vent, lorsqu'il se leve, est capable de renverser tout ce qu'il rencontre, & de mettre en danger de la vie les voyageurs qu'il surprend, en les emportant eux & leurs montures : lorsqu'il regne, personne ne peut aller de Senoseth à Trieste. (-)
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BURICK | (Géog.) petite ville d'Allemagne, au cercle de Westphalie, dans le duché de Cleves appartenant au roi de Prusse. Long. 24. 20. lat. 51. 38.
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BURIN | est un instrument d'acier, dont on se sert pour graver sur les métaux ; les burins doivent être faits avec l'acier le plus pur, & le meilleur d'Allemagne ou d'Angleterre : sa bonté consiste en ce que le grain en soit fin & de couleur de cendre ; elle dépend aussi beaucoup de la trempe. Quant à la forme du burin, il est comme inutile d'en parler, chacun les prenant à sa volonté. Les uns les veulent fort losanges, les autres tout-à-fait quarrés : il y en a qui les aiguisent extrèmement déliés, & d'autres gros & courts. Pour moi, je crois qu'il est bon qu'un burin soit d'une bonne longueur, comme à peu-près de cinq à six pouces ; que sa forme soit entre le losange & le quarré ; qu'il soit assez délié par le bout, mais que cela ne vienne pas de loin, afin qu'il conserve du corps pour pouvoir résister suivant les nécessités de l'ouvrage ; car s'il est trop délié & affûté de loin, il ploye, ce qui le fait casser, à moins que ce ne soit pour de très-petits ouvrages. Le graveur doit avoir soin que le ventre de son burin soit aiguisé fort à plat, & qu'il coupe parfaitement, le faisant lever un peu vers l'extrémité de sa pointe, pour le dégager plus facilement du cuivre ; il doit être aussi averti de ne graver jamais avec un burin dont la pointe soit émoussée, s'il veut que la gravure soit vive, autrement elle ne sera qu'égratignée. On l'emmanche dans un petit morceau de bois, de buis, d'os, &c. Voyez Pl. II. de Gravure, fig. 30.
Le burin est aussi d'un grand usage parmi les Orfevres, les Horlogers, les Armuriers, les Serruriers, &c. Voyez les Planches de ces arts.
On se sert du burin en le tenant avec la main, ensorte que la partie convexe A du manche soit dans le creux de la main, & la partie applatie vers la planche, le doigt indice sur le dos, qui est l'arrête opposée à la pointe, le burin presque couché sur la planche, ainsi qu'on peut le voir dans la fig. 14. Pl. I. de Gravure, où une main paroît travailler. Le chiffre 2. marque la planche ; le chiffre 3. le coussinet (voyez COUSSINET) sur lequel elle est posée.
BURIN, c'est en Serrurerie, une espece de ciseau à deux biseaux, qui sert à couper le fer à froid. Il y en a en bec d'âne, en grain d'orge, à gouge, &c.
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BURITACA | (Géog.) contrée de l'Amérique méridionale, au gouvernement de Sainte-Marthe.
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BURLESQUE | adj. qui se prend quelquefois substantivement, (Belles-lett.) sorte de poésie triviale & plaisante qu'on employe pour jetter du ridicule sur les choses & sur les personnes. Voyez TRAVESTI.
La poésie burlesque paroît être moderne, aussi-bien que le nom qu'on a donné à ce genre singulier. Le P. Vavasseur, jésuite, dans un traité qu'il a donné sur cette matiere, intitulé de ludicrâ dictione, assûre que le burlesque étoit entierement inconnu aux anciens. Cependant quelques auteurs parlent d'un certain Raintovius, qui du tems de Ptolomée Lagus travestit en burlesque quelques tragédies grecques : mais ce fait, s'il est constant, prouve plûtôt l'antiquité de la farce que celle du burlesque. D'autres, qui veulent qu'on trouve dans l'antiquité des traces de tous les genres, même les moins parfaits, font remonter l'origine du burlesque jusqu'à Homere, dont la batrachomyomachie, disent-ils, n'est composée que de lambeaux de l'Iliade & de l'Odyssée travestis & tournés en ridicule, par l'application qu'on y fait de ce qu'il a dit des combats des héros, à la guerre des rats & des grenouilles. Voy. BATRACHOMYOMACHIE.
On regarde pourtant les Italiens comme les vrais inventeurs du burlesque. Le premier d'entr'eux qui se signala en ce genre fut Bernia, imité par Lalli Caporali, &c. D'Italie, le burlesque passa en France, où il devint tellement à la mode, qu'il parut en 1649 un livre sous le titre de la Passion de Notre-Seigneur en vers burlesques. En vain a-t-on voulu l'introduire en Angleterre ; le flegme de la nation n'a jamais pû goûter cette extravagance, & à peine compte-t-on deux auteurs qui y ayent réussi.
Boileau, dans son Art poétique, a frondé le burlesque, dont il avoit pû voir le regne, qu'il attribue à la nouveauté.
" Il semble, dit à cette occasion un auteur qui a écrit depuis peu sur la poésie, que la premiere aurore du bon goût ne dût luire qu'à-travers les nuages ténébreux que le mauvais goût s'efforçoit de lui opposer. En effet, rien étoit-il plus contraire au bon sens & à la nature, qu'un style qui choquoit directement l'un & l'autre, & dont les termes bas, les expressions triviales, les imaginations ridicules, formoient les prétendues graces, sans parler du mépris que ses partisans faisoient des bienséances ? On a peine à comprendre comment une nation qui les connoît & qui les observe si exactement aujourd'hui, les négligeoit & se faisoit en quelque sorte honneur de les violer, il n'y a pas cent ans. Quoique l'Académie Françoise eût été établie par le cardinal de Richelieu, pour ramener & fixer le bon goût, quelques membres de cette compagnie, tels que Voiture, Benserade, &c. étoient encore partisans du burlesque.
Il est cependant croyable, ajoûte-t-il, & il faut le dire pour l'honneur de notre nation, que ce genre si justement méprisé doit son origine à une erreur par laquelle ceux qui ont donné dans le burlesque, ont été entraînés insensiblement & comme par degrés, ne distinguant pas assez le naïf du plat & du bouffon, comme l'insinue M. Despreaux. En conséquence on a d'abord employé le burlesque à décrire des aventures ordinaires, comme ayant plus d'aisance & plus de simplicité que le style noble affecté aux grands sujets. On l'a donc confondu avec le style naïf qui embellit les plus simples bagatelles. La facilité apparente de celui-ci a séduit ceux qui s'y sont attachés les premiers : mais elle a bientôt dégénéré en négligence ; celle-ci a entraîné la bassesse, & la bassesse a produit la licence. Cette conjecture est fondée : 1°. sur ce que la plus grande partie des vers burlesques de ce tems-là consiste en récits : 2°. sur ce que des auteurs contemporains, tels que Balzac, ont confondu ces deux genres, néanmoins si différens. Abusés par la facilité d'un style bas, ils se sont persuadés faussement qu'ils avoient trouvé l'art d'écrire avec cette molle aisance, avec ce badinage délicat dans lequel Marot a excellé ". Voyez MAROTIQUE. Princip. pour la lect. des Poët. tom. I.
Tout le monde sait que Scarron a mis l'Eneïde en vers burlesques, sous le titre de Virgile travesti, & d'Assouci les Métamorphoses en même style, sous celui d'Ovide en belle humeur ; & que ces ouvrages sont aujourd'hui aussi décriés qu'ils étoient autrefois goûtés. (G)
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BURONZO | (Géog.) petite ville du Piémont, dans le comté de Verceil, sur les frontieres de la principauté de Masserano.
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BURRA | (Géog.) île de l'Océan, une des Orcades ; elle est très-fertile.
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BURRIANA | (Géog.) petite ville d'Espagne, au royaume de Valence, sur le bord de la mer.
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BURRO | (Géog.) grande île d'Asie, dans la mer des Indes, entre l'île d'Amboine & celle des Celebes.
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BURSAL | adj. terme de Palais, qui n'est en usage que conjointement avec le mot édit. Les édits bursaux sont ceux qui sous apparence de réglement, ont pour principal objet de faire rentrer de l'argent au prince, & dont en effet il consent pour l'ordinaire l'inexécution moyennant finance. (H)
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BURSE | PRUSE, BOURSE, ou BROUSSE, (Géog.) ville de la Turquie, en Asie, dans la Natolie, étoit autrefois le lieu de résidence des Sultans Ottomans avant la prise de Constantinople.
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BURSI | (Géog.) petite île de la Grece, à peu de distance de celle de Corfou.
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BURTENBACH | (Géog.) petite ville d'Allemagne, en Soüabe, sur la Mindel, entre Augsbourg & Ulm.
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BURY | (S. Edmunds) Géog. petite ville d'Angleterre, dans la province de Lancastre, sur la riviere d'Itwell. Il y a encore une autre ville de ce nom en Angleterre, dans la province de Suffolk, à 7 ou 8 milles de Newmarcket.
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BUS | (Géog.) île de l'Océan septentrional, entre l'Islande & Terre-neuve.
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BUSC | S. m. (Architect. Hydraulique) Le busc est un assemblage de charpente composé d'un seuil, des heurtoirs contre lesquels s'appuient les bas des portes d'une écluse, avec un poinçon qui joint ensemble le seuil avec les heurtoirs & quelques liens de bois pour entretenir le tout. On dit une porte busquée, quand elle est revêtue de cet assemblage de charpente, & que ses venteaux s'arcboutent réciproquement, s'ouvrent, & se ferment à volonté pour l'écoulement des eaux & le passage des bateaux. (K)
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BUSCA | (Géog.) petite ville du Piémont, sur la riviere de Macra, autrefois capitale d'un marquisat de même nom.
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BUSCH | (Géog.) petite île de la mer du Nord, appartenante à la province de Groningue.
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BUSE | BUSARD, BUYSARD, BOUSAN, LANIER, or BOUDRéE, buteo vulgaris, (Hist. nat. Ornith.) oiseau de la grosseur d'un faisan, ou d'une jeune poule ; il pese trente-deux onces ; il a environ vingt pouces de longueur depuis la pointe du bec jusqu'à l'extrémité de la queue ; l'envergeure est de quatre piés & plus ; la tête est grande, & le sommet est fort large & applati ; le bec est court, crochu, & d'un bleu noirâtre ; la partie supérieure est recouverte par une peau jaune ; l'angle de la bouche est aussi de couleur jaune ; la bouche est grande, & la langue épaisse & charnue, & obtuse comme dans les autres oiseaux de ce genre. Quand cet oiseau est en colere, il ouvre le bec, & il tient pendant quelque tems la langue avancée jusqu'à l'extrémité du bec ; l'empreinte de la langue est marquée sur le palais ; les yeux sont grands ; l'iris est d'un jaune blanchâtre, ou de couleur blanche mêlée d'un peu de rouge, ou entierement blanchâtre ; la paupiere inférieure est couverte de duvet.
Toute la face supérieure de cet oiseau est rousse, ou de couleur fauve obscure, tirant sur le noir, ou plutôt, comme dit Willughby, de couleur de rouille mêlée de noir ; les plumes de l'épaule & celles qui recouvrent les grandes plumes des aîles, ont les bords jaunâtres & les tuyaux noirs. Il y a quelques oiseaux de cette espece qui ont sur les grandes plumes des ailes plusieurs taches blanches disposées desorte que, quand on étend l'aile, elles forment une espece de ligne blanche, & on voit aussi de pareilles taches sur les grandes plumes de l'épaule qui s'étendent sur le dos ; toute la face inférieure est d'un blanc jaunâtre ; la gorge & le cou ont des bandes oblongues de couleur brune, légerement teintes de jaune : ces taches ne sont pas transversales, mais elles suivent longitudinalement le tuyau de chaque plume, & s'étendent de chaque côté ; le tuyau est noir sur la poitrine & sur le ventre ; il y a plusieurs taches assez grandes de la même couleur, qui sont situées dans la même direction longitudinale à quelque distance les unes des autres sur plusieurs plumes ; mais sur le plus grand nombre, il y a une ligne de la même couleur qui va d'une tache à l'autre ; ces mêmes taches forment des bandes irrégulieres & longitudinales sur les plumes des côtés du corps & sur celles des cuisses & du dessous de l'aîle dont le fond est de la même couleur blanche jaunâtre. On voit entre les yeux & les narines de longs poils noirs ; il n'y a point de plumes sur le milieu du dos, mais seulement du duvet ; car les plumes de l'épaule couvrent le dos en entier ; il y a vingt-quatre grandes plumes dans chaque aile ; l'extérieure est courte ; la troisieme & la quatrieme sont les plus longues ; les quatre premieres ont l'extrémité plus noire & plus étroite que les autres qui ont la pointe de couleur blanchâtre ; elles ont toutes les barbes intérieures marquées par des bandes transversales brunes, & des bandes blanchâtres qui sont parsemées de petites taches brunes ; la face inférieure des ailes est de couleur blanche avec des bandes noires transversales & paralleles, à l'exception de l'extrémité de toutes les plumes qui est brune ; & cette couleur s'étend jusqu'au tiers de la longueur des cinq premieres plumes. Quand les ailes sont pliées, elles s'étendent presque jusqu'au bout de la queue qui a 9 ou 10 pouces de longueur ; elle est composée de douze plumes, & elle n'est point du tout fourchue ; mais les dernieres plumes sont moins longues que les autres, & donnent une courbure à l'extrémité de la queue ; la pointe est de couleur cendrée, blanchâtre, il y a sur le reste de ces plumes plusieurs bandes transversales, dont les unes sont de couleur cendrée, & les autres brunes ; le bas de la plume est blanc ; les cuisses sont longues, fortes, & bien musclées ; les jambes sont courtes, fermes, charnues, & couvertes de plumes jusqu'au-dessous de l'articulation ; les jambes & les pattes sont jaunes & couvertes d'écailles ; le doigt extérieur tient au doigt du milieu par une membrane ; les ongles sont longs, forts, & noirs ; l'ongle du doigt extérieur est le plus court, & celui du doigt de derriere est le plus long. La buse se nourrit de rats, de taupes, & d'oiseaux : Willughby dit qu'il a trouvé un oiseau entier dans l'estomac d'une buse qu'il avoit disséquée, & une grive dans celui d'une autre. Les buses tuent & mangent les lapins ; & faute de meilleure nourriture, elles prennent des scarabées, des vers de terre & d'autres insectes, & même l'excrément des vaches. On dit que ces oiseaux ont la tête de couleur cendrée lorsqu'ils sont âgés, & que les plumes du dos deviennent blanchâtres. Au reste, soit par l'âge, soit par le sexe, il est sûr qu'on trouve des variations dans ces oiseaux ; car il y en a qui n'ont point du tout de taches blanches ni sur la tête, ni sur le dos, ni même sous les aîles, tandis qu'il y en a qui en ont un grand nombre. Les oeufs de la buse sont blancs & parsemés de quelques taches assez grandes, roussâtres, placées sans ordre ; quelquefois ils sont blancs, sans aucune tache : on a cru que cet oiseau avoit trois testicules ; mais cette observation n'a pas été confirmée par l'expérience. Voyez Willughby. Voyez OISEAU. (I)
BUSE, s. f. on donne ce nom dans les grosses forges à un canal qui conduit l'eau sur la roue qui fait tourner l'arbre par le moyen duquel le martinet marche.
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BUSEN | (Géog.) petite île de la mer du Nord, vis-à-vis le pays de Ditmarse, près de l'embouchure de l'Elbe.
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BUSENTO | (Géog.) petite riviere d'Italie au royaume de Naples, qui se jette dans la mer de Toscane.
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BUSES | (Hydrauliq.) dans une digue sont composées de gros arbres de dix-huit pouces de diametre, coupés par tronçons, sciés sur leur largeur, pour les creuser de cinq pouces de profondeur & de dix de largeur. On rejoint ces tronçons par entailles bien calfatées & goudronnées avec des chevilles de bois ; ce qui forme un corps ou conduite pour communiquer l'eau d'un réservoir supérieur dans une écluse, ou pour la jetter quand elle est superflue. (K)
Nous avons averti que le dictionnaire de Trévoux est en grande partie copié du Furetiere de Basnage. Ainsi quand nous citerons dans la suite le dictionnaire de Trévoux, c'est seulement parce que le nom de celui-ci est plus connu, & sans prétendre faire tort à l'autre qui a été son modele. Plusieurs des articles de l'Encyclopédie qu'on a prétendu être imités ou copiés du Trévoux, sont eux-mêmes imités ou copiés de Basnage. De ce dernier nombre sont entr'autres Armoiries, Abysme, (Blason.) Avocat, (en partie) Amiral, &c. qu'on a particulierement relevés. Peras imposuit Jupiter nobis duas, &c.
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BUSKO | (Géog.) ville de Pologne dans le Palatinat de Belsko.
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BUSSAR | ou BUSSE, (Commerce) est une des neuf especes de vaisseaux ou futailles régulieres dont on se sert en France, particulierement en Anjou & en Poitou, pour mettre les vins & autres liqueurs.
Le bussard est la moitié d'une pipe, & est égal à une demi-queue d'Orléans, de Blois, de Nuys, de Dijon, de Mâcon ; ce qui revient aux trois quarts du muid de Paris, qui font vingt-sept septiers, chaque septier de huit pintes ; ensorte que le bussard est composé de deux cent seize pintes de Paris. (G)
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BUSSERETH | (Géog.) ville d'Asie dans l'Arabie Petrée.
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BUSSETTO | (Géog.) petite ville de l'Italie au duché de Parme, dans un petit canton qui s'appelle l'état de Bussetto, près du Pô.
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BUSSIERE | (la) Géog. petite ville de France en Bourgogne, près d'Autun.
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BUS | ou BOST, (Géog.) ville forte d'Asie, en Perse, capitale du Sablestan. Long. 87. 50. lat. 31. 50.
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BUSTE | S. m. en Sculpture, est un portrait en ronde-bosse (voyez RONDE-BOSSE) qui n'a que la tête, les épaules, & la poitrine. On dit le buste de César, du Roi.
BUSTE, en Peinture, est aussi un portrait à demi-corps ; c'est-à-dire, où l'on ne voit la personne que jusqu'à la ceinture : mais on ne dit pas en Peinture, le buste de César, le buste du Roi ; j'ai vû le buste de M. un tel, ou j'ai fait faire mon buste : cependant on dira bien tel peintre ne fait pas un buste à moins de 20 louis. (R)
* Une question qu'on pourroit faire ici, c'est de demander pourquoi dans le buste on a ajoûté à la tête une partie des épaules & de la poitrine, & par quelle regle on a limité l'étendue de ces parties accidentelles qu'on joint à la tête, & qui n'ajoûtent rien à la ressemblance. Quant à la premiere partie de la question, il me semble qu'on ajoûte à la tête le cou entier, & une partie des épaules & de la poitrine, afin d'annoncer le reste du corps, & sauver au spectateur l'idée d'une amputation chirurgicale ou même d'une exécution : & pour ce qui est de la seconde partie, je crois qu'on a mesuré naturellement l'étendue des parties qu'on ajoûtoit au buste sur l'espace que l'oeil embrasse, à la distance où il se place d'un objet pour le bien considérer ; espace qui ne differe guere de celui qu'on donne au buste de grandeur naturelle.
BUSTE, terme de Blason, image d'une tête avec la poitrine, mais sans bras,
BUSTES, (Commerce) boîtes de sapin legeres & à demi-rondes dans lesquelles on apporte les raisins de Damas.
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BUSTERICHUS | (Myth.) dieu des anciens Germains, dont l'idole se voit encore aujourd'hui dans la forteresse de Sondershusa : elle étoit autrefois dans celle de Rottembourg. Elle est d'une sorte de métal inconnu. Elle a la main droite sur la tête ; la gauche qu'elle avoit sur la cuisse est cassée ; elle a un genou en terre.
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BUSTO-GRANDE | (Géog.) petite ville d'Italie dans le duché de Milan, entre les rivieres d'Olana & d'Arno.
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BUSTUAIRES | S. m. pl. (Hist. anc.) gladiateurs qui se battoient autrefois chez les Romains auprès du bûcher d'un mort, à la cérémonie de ses obseques, Voyez GLADIATEUR, BUCHER, &c.
La coûtume fut d'abord de sacrifier des captifs sur le tombeau ou près du bûcher des guerriers. On en voit des exemples dans Homere, aux obseques de Patrocle, & dans les tragiques grecs : on croyoit que leur sang appaisoit les dieux infernaux, & les rendoient propices aux manes du mort.
Dans la suite cette coûtume parut trop barbare ; & au lieu de ces victimes on fit combattre des gladiateurs, dont on crut que le sang auroit le même effet. Au rapport de Valere Maxime & de Florus, Marcus & Décius, fils de Brutus, furent les premiers qui honorerent à Rome les funérailles de leur pere par ces sortes de spectacles, sous le consulat d'Appius Claudius & de Marcus Fulvius, l'an 489 de Rome. On croit que les Romains prirent cet usage cruel des Etruriens, qui peut-être l'avoient pris des Grecs. Voyez FUNERAILLES. (G)
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BUSWALTHAM | (Géog.) ville d'Angleterre en Barkshire.
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BUT | VUE, DESSEIN, (Gramm.) termes relatifs à la conduite d'un être, ou pensant ou considéré comme pensant. Le but se dit d'un objet fixe & déterminé, auquel les actions de l'être pensant sont dirigées : les vûes sont plus vagues, & embrassent un plus grand nombre d'objets : le dessein est proprement ce mouvement de l'ame par lequel on se détermine à tenter ou à ne pas tenter une chose. Le dessein & les vûes sont en nous ; le but est hors de nous. Le dessein offre une idée de résolution qui n'est pas si marquée dans les vûes. On se propose un but ; on a des vûes ; on forme un dessein.
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BUT-EN-BLANC | en terme d'Artillerie, signifie la portée d'un mousquet ou fusil tiré horisontalement, c'est-à-dire dont la bouche ne hausse ni ne baisse.
Quand on tire de but-en-blanc, on suppose que le boulet ne s'écarte point de la ligne droite avant que d'arriver au but, & qu'il n'est pas porté dans une ligne courbe, comme le sont les bombes & les boulets que l'on tire à toute volée, en leur donnant une élévation sensible. Voyez MORTIER, PROJECTILE, PORTEE, &c. (Q)
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BUTE | S. f. se dit, en terme de Blason, du fer dont les Maréchaux se servent pour couper la corne des chevaux. Le pere Ménestrier dit que la maison de Butet en Savoie en porte trois en poignée.
BUTE ou BUTHE, (Géog.) île d'Ecosse, l'une des Westernes.
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BUTER | v. n. en terme d'Architecture, c'est par le moyen d'un arc ou pilier butant ou boutant, contretenir ou empêcher la poussée d'un mur ou l'écartement d'une voûte. On dit buté ou bouté, pour signifier l'effet de cet arc ou pilier butant. Voyez CULEE. (P)
BUTER, en Jardinage ; on dit buter un arbre, quand on le contient avec de la terre amassée autour de son pié ; pratique usitée dans les terres extrèmement fraîches, pour garantir les végétaux d'une trop grande humidité.
On dit encore buter un jalon haut ; c'est y faire apporter de la terre au pié pour le mettre à la hauteur du nivellement, de même qu'on décharge un jalon du pié quand il se trouve trop bas.
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BUTERA | (Géog.) petite ville avec titre de principauté en Sicile, dans la vallée de Noto.
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BUTHO | ou BUTON, (Géog.) ville de la Cassubie, aux frontieres de la Prusse royale, capitale d'un petit pays de même nom qui appartient au roi de Prusse. Elle est sur la riviere de Stolpe à dix milles de Dantzic.
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BUTIN | S. m. (Art milit.) on donne en général ce nom à tout ce que l'on enleve à l'ennemi. Quelques-uns distinguent le butin du pillage ; ils disent que le butin est le gros de la prise, & le pillage, la dépouille des habits, hardes & coffres de l'ennemi, & l'argent qu'il a sur sa personne jusqu'à trente livres. (Z)
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BUTOR | S. m. (Hist. nat. Ornith.) butorius, botaurus, ardea stellaris ; oiseau aquatique que l'on a aussi appellé héron paresseux. Il est de la grosseur du héron gris ; il a environ trois piés de longueur depuis la pointe du bec jusqu'au bout des ongles, & près de deux piés & demi jusqu'à l'extrémité de la queue : la tête est petite, étroite, c'est-à-dire applatie par les côtés ; le sommet est noir ; il y a de chaque côté auprès des coins de la bouche une tache noire ; la gorge & les côtés du cou sont roussâtres, & marqués de petites bandes transversales de couleur noire : le cou est couvert de grandes plumes, desorte qu'il paroît plus court & plus gros qu'il ne l'est en effet : les plus longues plumes de la poitrine sont noires dans le milieu ; la face intérieure des cuisses & le bas-ventre, sont d'un blanc mêlé de roux, & la face extérieure est parsemée de taches noires ; le dos est marqueté de roux pâle & de noir, avec un peu de cendré, & des taches noires qui sont plus larges & plus grandes que sur toute autre partie du corps ; le bas des plumes de la gorge est blanc ; les grandes plumes des aîles sont plus courtes que dans le héron gris ; la pointe des grandes plumes est noirâtre ; le reste est marqueté de taches transversales, rousses & noires ; les petites plumes qui recouvrent les grandes sont d'un roux foncé ; la queue est courte, petite, composée de dix plumes qui sont de même couleur que les grandes plumes des aîles ; les raies & les taches noires qui se trouvent entre les épaules, sont larges & inclinées en-bas : le bec est droit & fort ; il est gros à sa racine ; il diminue insensiblement de grosseur jusqu'à son extrémité qui est pointue ; il est tranchant par les côtés, & entierement de couleur verdâtre ; les côtés de la piece inférieure du bec entrent dans la piece supérieure : la langue est pointue ; elle ne s'étend pas jusqu'au milieu du bec : l'iris des yeux est de couleur jaune, mêlée de couleur de noisette ; on l'a vûe rougeâtre dans un autre oiseau de cette espece : l'ouverture de la bouche est fort grande ; elle s'étend jusqu'au-delà des yeux, desorte qu'ils paroissent être dans le bec : il y a sous les yeux un petit espace qui est dégarni de plumes, & de couleur verte : les oreilles sont grandes ; les jambes sont dégarnies de plumes au-dessus de l'articulation ; les piés sont verts ; les doigts allongés, & les ongles longs & forts : le doigt extérieur tient au doigt du milieu à sa naissance : l'ongle du doigt du milieu a le côté intérieur dentelé, comme tous les autres oiseaux de ce genre ; ils se servent de ces pointes pour retenir les anguilles & les autres poissons glissans : l'ongle du doigt de derriere est le plus gros & le plus long. On dit qu'à chaque ponte les petits du butor sont en nombre impair, comme trois ou cinq. Les oeufs sont arrondis & blanchâtres avec quelques teintes de cendré ou de verd. Le nid est fait en terre. On a comparé le cri de cet oiseau au mugissement d'un boeuf ou d'un taureau ; d'où vient le nom de botaurus, butor. Il se cache dans les joncs des marais : souvent il se tient dans les buissons la tête levée. Willughby. Voyez OISEAU.
L'oiseau que l'on nomme grand butor rougeâtre est une espece moyenne entre le butor & le héron gris, desorte que l'on pourroit dire que c'est un héron gris, dont la poitrine & les côtés sont roux.
Le butor hupé, ardea haematopus, seu Cirris Virgilii Scaligero Ald. est presque le plus petit de tous les oiseaux de ce genre, il a le cou fort & court ; sa couleur dominante est roussâtre, plus foncée sur le dessous de l'oiseau, plus pâle sur le dessus & sur les aîles ; la queue est si petite qu'elle ne paroît pas ; l'iris des yeux est jaune & environné d'un cercle rouge, qui est dans un autre cercle de couleur noire. Il y a sur la tête une aigrette, qui est renversée en arriere & formée par des plumes en partie jaunes & en partie noirâtres. Le bec est long, pointu, fort, & mi-parti de deux couleurs. La base est verte ou bleuâtre, & la pointe est noire ; les jambes & les piés sont d'un rouge foncé, & les ongles noirs ; les doigts sont fort longs & joints par une petite membrane. Willughby. Voyez OISEAU. (I)
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BUTRINTO | (Géog.) ville & port de Grece, dans l'Epire ou Albanie, sur le golfe de même nom, appartenant aux Vénitiens.
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BUTTELSTAD | (Géog.) petite ville d'Allemagne, dans le Thuringe, à deux milles de Weimar.
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BUTTIMAN | (Commerce) c'est un poids d'usage en Perse, qui revient aux environs de 25 livres.
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BUTTONS-BA | ou la BAYE DE BUTTON, (Géog.) golfe de l'Amérique septentrionale, dans les terres Arctiques ; c'est la partie occidentale de la baie de Hudson.
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BUTUA | (Géog.) ville & royaume d'Afrique, au Monomotapa, sur la riviere de Zambre.
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BUTZBACH | (Géog.) petite ville d'Allemagne, dans la Weteravie, à quatre milles de Francfort, sur le Mein.
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BUTZOW | (Géog.) petite ville d'Allemagne, dans la principauté de Schwerin, sur le Warnon.
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BUVETTE | S. f. (Hist. mod.) endroit établi dans la plûpart des cours & jurisdictions de France ; c'est là que les magistrats & autres gens de robe vont se rafraîchir, après le long & pénible exercice de leurs fonctions.
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BUVETTIER | S. m. c'est le nom de celui qui tient la buvette.
BUVETTIER, (Art méchan.) celui chez qui l'on va boire. Les maîtres Vinaigriers-Moutardiers de Paris prennent la qualité de bûvettiers, parce qu'il leur est permis de donner à boire dans leurs boutiques, l'eau-de-vie qu'ils ont la permission de distiller. Voyez VINAIGRIER.
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BUVEUR | en Anatomie ; on donne ce nom à un muscle droit de l'oeil, autrement appellé adducteur de l'oeil. Voyez OEIL & DROIT. (L)
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BUXHEIM | (Géog.) petite ville d'Allemagne, dans le comté de Richebourg, cercle de Soüabe.
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BUZANçOIS | (Géog.) petite ville de France, en Berri, sur la riviere de l'Indre, aux frontieres de la Touraine.
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BUZARD | BUZARD
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BUZE | (Marine) voyez BUCHE.
BUZE : on appelle ainsi dans l'Artillerie, un tuyau de bois ou de plomb dont on se sert pour conduire l'air dans les galeries des mines, par des ouvertures ou des puits. (Q)
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BYBENSCHITZ | (Géog.) ville d'Allemagne en Moravie.
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BYCHOW | (Géog.) petite ville de Lithuanie, au palatinat de Misiczlaw, sur le Nieper. Long. 49. 10. lat. 53. 37.
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BYDZOW | (Géog.) ville du royaume de Boheme.
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BYELSK | (Géog.) ville de la Podlachie, dans un petit pays de même nom.
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BYSANCE | nommée depuis Constantinople, (Géog. anc.) ville de Thrace, sur la pointe du Bosphore. Voyez CONSTANTINOPLE.
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BYSANTAGAR | (Géog.) grande ville d'Asie dans l'Inde, au royaume de Guzurate, habitée par des Bramines.
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BYSANTINE | (HISTOIRE) Littér. nom que l'on a donné à un corps d'histoire de Constantinople imprimé au Louvre dans le courant du xvij. siecle. Il est composé de différens auteurs grecs, éclaircis, commentés & publiés successivement par différens savans. Les premiers parurent en 1645.
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BYSDAIL | (Géog.) ville & port d'Ecosse, dans l'île d'Ulst.
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BYSS | ou BYSSUS, voyez BYSSUS.
BYSSE, (Hist. des Arts) Il est singulier que ce mot soit le même en hébreu, en grec, en latin & en françois, sans qu'on connoisse précisément ce qu'il désigne, on sait seulement que c'est le nom de la matiere qui servoit au tissu des plus riches habillemens : il en est beaucoup parlé dans les auteurs prophanes & dans l'écriture. Ezechiel, xxvij. 16. I. liv. Paralip. xv. 27. Esther, viij. 15. &c. On y lit que David avoit un manteau de bisse, aussi-bien que tous les chantres & tous les lévites ; sur quoi la plûpart des Naturalistes prétendent que ce bysse étoit la soie des pinnes-marines, ou de l'huître perliere mise en oeuvre. Voyez PINNE-MARINE.
Quelqu'amusante que soit cette idée, il est difficile de se persuader que du tems de David & de Salomon la soie du poisson pinne ait été assez commune dans ces pays-là, pour qu'un si grand nombre de gens pûssent en avoir des manteaux : ce qui est certain, c'est que le bysse dont il s'agit ici, étoit différent du lin ordinaire.
Le passage de S. Luc, chap. xvj. 19. où il est dit dans notre édition latine, conformément au grec, que le mauvais riche étoit vêtu de pourpre & de bysse, n'embarrasse pas moins les interpretes du nouveau Testament.
Il est d'abord incontestable que toutes les versions espagnole, italienne, françoise ou autres, qui, pour s'accommoder à nos usages modernes, ont traduit qui étoit vêtu de pourpre & de soie, s'éloignent également de l'exactitude & du vrai. En effet, le byssus étoit une toute autre matiere que notre soie, comme on peut le prouver évidemment par un grand nombre d'anciens écrivains ; &, pour abreger, par le seul dictionnaire de Pollux, liv. VII. ch. xvij.
On ne sauroit approuver davantage la traduction des jésuites, qui s'habilloit d'écarlate & de toile fine, parce que byssus ne signifie point une toile fine dans le sens que nous attachons au mot de toile.
M M. de Port-Royal ont rendu plus exactement le terme grec, qui étoit vêtu de pourpre & de lin ; mais ils n'en ont pas dit assez, car il s'agit ici nécessairement de quelque chose qui est au-dessus du simple lin.
M. Simon l'a bien vû ; aussi a-t-il traduit, qui se vêtoit de pourpre & de fin lin. Il appuie sa traduction d'une très-bonne note. " Il y avoit, dit-il, une espece de fin lin qui étoit fort cher, & dont les plus grands seigneurs se vêtoient en ce pays-là & dans l'Egypte. Ce riche en avoit un habit de couleur de pourpre ".
M M. de Beausobre & Lenfant ont traduit de même, qui alloit vêtu de pourpre & de lin très fin ; c'est-à-dire ; ajoûtent-ils dans leur note, d'une étoffe de lin fin teinte en pourpre.
Ceci s'accorde parfaitement avec Pline, qui assûre que le bysse étoit une espece de lin très fin. Pausanias dit la même chose, & remarque que dans toute la Grece il ne croissoit de bysse qu'en Elide. Plusieurs modernes sont du même avis, & en particulier Bochart, qui remarque que le byssus étoit un lin fort fin, qu'on teignoit souvent en pourpre. On peut aussi consulter le vocabulaire grec d'Hésychius, & Leydekker dans sa république des Hébreux.
Ceux qui soûtiennent que le byssus n'étoit autre chose qu'une toile de coton fort fine, connue seulement aux Indes, & par conséquent très-chere dans les autres pays ; s'appuient du récit de Philostrate, qui raconte qu'Apollonius de Tyane étant aux Indes, observa que tout le byssus dont on se servoit en Egypte, venoit uniquement des Indes ; mais l'autorité de Philostrate, auteur d'un vrai roman fait sous le titre de la vie d'Apollonius de Tyane, ne sauroit détruire des témoignages formels, qui prouvent qu'il y avoit d'autre bysse que celui des Indes.
Enfin Philon assûre (Philo, de somniis, p. 597. édit. in-fol.) que le byssus est de tous les lins le plus beau, le plus blanc & le plus fort : qu'il n'est point tiré d'une chose mortelle, mais de la terre ; & qu'il devient toûjours plus blanc & plus brillant, lorsqu'on le lave comme il faut. Voilà donc l'amiante ou le lin incombustible sous le nom de byssus, dans Philon.
S'il est permis de dire notre sentiment après tant d'habiles critiques qui ont tâché d'éclaircir ce que l'on doit entendre par le byssus des anciens, nous croyons pouvoir conjecturer avec vraisemblance, que ce mot est un terme générique qui signifie dans leurs écrits une matiere rare tirée du regne végétal & même minéral, en divers lieux & en divers pays ; de laquelle matiere ils faisoient diverses étoffes riches & précieuses. Il y avoit le bysse des Indes, d'Egypte, de Grece, comme nous avons de la porcelaine de divers pays.
Nous ne doutons point encore que sous ce nom les anciens n'ayent confondu les cotons, les oüattes, en un mot tout ce qui se filoit, & qui étoit d'un plus grand prix que la laine.
Mais s'il est certain qu'il y avoit chez les anciens du bysse tiré du regne végétal, il y a tout lieu de penser qu'ils tiroient aussi du byssus des pinnes-marines. Que dis-je, de penser ? Aristote l'assûre positivement, car il nomme byssus la soie de ces coquilles.
On a connu de tout tems l'art de la filer : ainsi l'on ne peut douter qu'elle n'ait été souvent employée pour les habits des grands seigneurs, dans des siecles où la soie n'étoit que très-peu connue & ne se voyoit que rarement.
En effet ce byssus de coquillage, quoique filé grossierement, paroit beaucoup plus beau que la laine, & approche assez de la soie : on en fait encore à-présent des bas & d'autres ouvrages, qui seroient plus recherchés si la soie étoit moins commune.
Pour filer cette sorte de byssus, on le laisse quelques jours dans la cave pour l'humecter & le ramollir ; ensuite on le peigne pour en séparer la bourre & les autres ordures qui y sont attachées ; enfin on le file comme on fait la soie.
Si je connoissois quelqu'ouvrage, quelque traité particulier sur le byssus des anciens, j'y renvoyerois les curieux. Voyez cependant l'article BYSSUS. Article de M
(Le Chevalier DE JAUCOURT.)
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BYSSUS | S. m. (Hist. nat. bot.) genre de plante qui differe du coralloïde, en ce que les plantes du genre dont il s'agit, sont composées de filamens cylindriques qui ont des rameaux dans des especes, & n'en ont pas dans d'autres ; enfin d'autres especes de ce même genre ont sur le même pié des filamens sans rameaux & des filamens avec des rameaux : la longueur de ces filamens varie dans les différentes especes ; il y en a de fort courts & de fort longs. Le byssus differe du conferva, en ce que les filamens n'ont aucuns noeuds apparens, même lorsqu'ils sont desséchés. Le byssus est plus durable & plus consistant que le botrytis ; ses semences ne sont pas disposées en épi ou en grappe, mais placées le long des tiges. Il y a quelques especes de byssus dont la substance est assez dure, & d'autres qui ne sont qu'herbacées. On en trouve qui ressemblent, comme le conferva, à un amas de fils de soie, à un tapis, à une peau de rat ou de chat, à une toison de brebis, à un morceau de drap, ou enfin à une toile d'araignée. Les semences qui ont été apperçûes, sont longues ou oblongues. Micheli, nova plant. gen. Voyez PLANTE. (I)
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BYSTRIC | ou BYSTRYTZ, (Géog.) il y a trois villes de ce nom dans le royaume de Bohème.
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BYTHAU | (Géog.) petite ville de la Prusse polonoise.
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BYTTE | (Géog.) île de la mer d'Allemagne, près de celle de Falster.
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BZO | (Géogr.) ville d'Afrique, au royaume de Maroc.
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