De nombreux Palestiniens ont perdu la vie sur le barrages de l’armée d’occupation, certains à cause des coups de feu injustifiés et les autres au cours de leurs attentes longues et interminables, alors qu’ils étaient malades. Ces barrages, disséminés par l’occupation dans toute la terre palestinienne, sont devenus des centres d’arrestation et de torture, sinon des barrages de la mort lente, comme les appelent les Palestiniens. C’est sur ces barrages qu’ils subissent toutes les humiliations, toutes les mesures punitives de l’occupation, mais aussi toutes les souffrances de l’attente interminable. C’est sur ces barrages que les soldats de l’occupation rivalisent entre eux sur les moyens de plus en plus sophistiqués pour terroriser la population et montrer leur sadisme envers une population, dont la patience et l’espoir sont devenus légendaires face à ces barrages qui les enferment et transforment leur vie en un véritable enfer.
Mutiplication des barrages
Au cours de la deuxième moitié de l’Intifada al-Aqsa, avec l’intensification des opérations martyres et l’échec des mesures de l’occupation et la construction du mur visant à stopper ces attaques palestiniennes, le gouvernement de l’occupation a utilisé le moyen des barrages fixes ou mobiles pour démanteler l’unité de la terre palestinienne, transformer cette terre en cantons isolés les uns des autres, et imposer l’obtention de laisser-passer pour pouvoir se déplacer. Le déplacement d’une ville à l’autre ou même d’un village à l’autre est devenu, la plupart des fois, impossible. Les Palestiniens ont refusé les laisser-passer. Selon les statistiques palestiniennes, il y a actuellement plus de 30 barrages en Cisjordanie, une dizaine d’entre eux sont fixes et permanents. 5 autres barrages sont pratiquement clos, et les Palestiniens qui sont obligés d’y passer ne peuvent le faire qu’à des heures précises, et après avoir subi des mesures sécuritaires renforcées. Les forces de l’occupation y ont interdit aux voitures privées de passer par ces barrages, et ont obligé les voitures publiques d’avoir des laisser-passer.
Enbuscades et arrestations
Comme le dit Mahmoud Saïd, chauffeur d’un taxi collectif, "les forces de l’ocucpation ont pris l’habitude d’installer des barrages volants par surprise, sur les axes des principales routes, afin de procéder à des arrestations de Palestiniens prétendus recherchés. Plusieurs fois, ajoute-t-il, les soldats m’ont arrêté à ces barrages entre Jénine et Ramallah, et après les fouilles, ils arrêtent quelques jeunes, la plupart des étudiants universitaires, en prétendant qu’ils sont recherchés, alors que les personnes recherchées ne passent certainement pas pas ces routes ni ces barrages". Selon le bureau des institutions civiles nationales, les forces de l’occupation ont arrêté, depuis le début de cette année 2006, 30 Palestiniens, sans aucune raison et sans être accusés de quoi que ce soit.
Des comportements humiliants
Même les femmes ne sont pas épargnées par ces mesures humiliantes sur les barrages. Umm Bilal raconte que les soldats l’ont arrêtée avec un groupe de femmes, au barrage près de Toubas. Malgré le fait qu’ils aient examiné les papiers, "ils nous ont demandé d’accepter une fouille corporelle. Nous avons refusé. Ils ont amené une soldate pour cette tâche." Mais les soldats n’ont pas accepté que Suha Ahmad, voilée, de passer au barrage près de Nablus, alors qu’elle se rendait à Ramallah pour subir une intervention chirurgicale, qu’après avoir ôté son voile qui lui couvrait le visage, sous prétexte de contrôler son identité.
Les Palestiniens se sont plaints des insultes lancées par les soldats aux barrages, devant les femmes et même que ces soldats les contraignaient à se déshabiller. Ibrahim Salim rapporte que les soldats du barrage militaire dans la région de la vallée du Jourdain se sont jetés sur lui pour le frapper sauvagement, parce qu’il avait refusé d’ôter ses vêtements devant une longue file de gens et de voitures où se trouvaient des femmes. Il ajoute : "ils m’ont jeté par terre, ont déchiré mes vêtements et m’ont obligé à marcher ainsi avec mes sous-vêtements, sous la menace des armes, entre les voitures. C’est la preuve qu’ils sont sauvages, sadiques et terroristes. Ils n’ont aucun brin de miséricorde ou d’humanité".
Des pressions pour recruter des collaborateurs
Les barrages sont également devenus des lieux pour recruter les collaborateurs en faisant pression sur les Palestiniens. Plusieurs d’entre eux ont témoigné que les officiers des renseignements mettent à profit les difficultés et les problèmes des citoyens pour faire pression sur eux et les rattacher à leurs services. Les hommes des renseignements ne se proposent pas tout de suite, mais se cachent dans des tentes installées près des barrages. Ils choisissent les jeunes, et surtout les étudiants, qui sont amenés devant eux. Les officiers essaient de les recruter, en les menaçant d’arrestations ou d’interdictions de déplacements, s’ils refusent de se plier à leurs instructions.
Naissances au barrage
Souvent, les forces de l’occupation ferment les routes par des barrages volants, ou bien ferment complètement les barrages fixes, pour plusieurs heures, sur les axes des routes principales, pour asphyxier et paralyser la vie dans les régions. Un rapport du comité de défense des droits de l’homme a signalé que plusieurs cas d’accouchements ont eu lieu sur les barrages militaires. Les citoyens arrivaient aux barrage, les femmes étant en situation critiquê, prêtes à accoucher. Malgré la certitude des soldats sur l’état des femmes et le danger qu’elles courent, ils empêchent les femmes enceintes de passer, laissant les femmes accoucher aux barrages. L’une des femmes du village de Mtilla, dans la vallée du Jourdain a accouché au barrage et nommé son fils "Mkhsoum" (nom hébreu du barrage). Un mécanicien de Qabatiya, près de Jénine, a fait accoucher sa femme dans la voiture, après que les soldats les aient empêchés de passer pour se rendre à l’hôpital.
Les malades arrêtés
Les ambulances ne sont pas épargnées par les barrages. Muhammad Baajawi, officier des urgences au Croissant rouge palestinien a raconté que les soldats ne respectent pas le signe du croissant, ni son message ni sa sacralité. Ils l’ont obligé à descendre les malades de l’ambulance, puis l’ont frappé et l’ont arrêté. Les forces de l’occupation ont également arrêté un autre ambulancier Ashraf Abahira, alors qu’il accomplissait son devoir humanitaire. Il fut emmené de l’ambulance vers la prison du Naqab, sans aucune charge ni accusation, et il est actuellement en détention administrative. Selon le rapport du Croissant rouge palestinien, les ambulances sont visées par les soldats de l’occupation qui tirent sans distinction et qui les empêchent de passer. A plusieurs reprises, les ambulances ont été interdites de passer aux barrages, les ambulanciers arrêtés et même frappés. Nadi al-Asir signale que 10 malades ont été arrêtés alors qu’ils se trouvaient dans les ambulances, au cours du mois passé.
Interdiction aux étudiants et employés de passer
Les forces de l’occupation rivalisent pour humilier les Palestiniens et se venger d’eux. Des centaines d’étudiants n’ont pu atteindre leurs écoles ou leurs universités. L’étudiant Amin Khaled de Tulkarm raconte qu’il n’a pu passer ses examens à l’université nationale d’al-Najah, à Nablus, parce que les soldats l’ont empêché de passer. Naser Abu Aziz, secrétaire de l’Union des étudiants palestiniens a rapporté que les forces de l’occupation ont arrêté l’an dernier plus de 200 étudiants aux barrages, alors que 300 étudiants ont été contraints de reporter leurs études à cause des entraves israéliennes qui ont touché toutes catégories de la population, y compris les employés. Une étude de la chambre de commerce à Jénine signale que des centaines d’employés et d’ouvriers de la région de Jénine, Tulkarm et Qalqylia ont perdu leurs postes et leur travail à Ramallah, al-Bireh, Bethlehem parce que les barrages les empêchent de se déplacer. Avec le maintien de ces barrages, le taux de chômage ira croissant.
Le barrage de Qalandia
La souffrance des Palestiniens atteint son paroxysme au barrage militaire fixe de Qalandia que les forces de l’occupation ont érigé à l’entrée de la ville de Ramalhha, après avoir fermé toutes les issues de la ville. Le journaliste Dhiab Hourani rapporte que la seule issue de Ramallah vers le monde extérieur est le passage de Qalandia, où les forces de l’occupation maintiennent avec des mesures renforcées. Muhammad Noubani, un autre journaliste, explique que ce barrage a transformé la ville en une prison, les soldats contrôlent la vie et le mouvement de tous les citoyens. Il y a des instructions qui changent en permanence, et la plupart du temps, les habitants de la Cisjordanie sont interdits d’y passer. Les forces de l’occupation le ferment souvent, sous des prétextes divers, mais le but essentiel reste, pour eux, l’humiliation et le châtiment des citoyens.
Le barrage de la souffrance et de l’enfer
Les Palestiniens décrivent le barrage de Huwwara comme celui de la souffrance et de l’enfer, à cause des pratiques des forces de l’occupation et des mesures répressives. Ce barrage a été érigé il y a plus de trois ans, le long de la route Nablus Ramallah al-Quds. Il est considéré comme le point de liaison entre les villes de la Cisjordanie, et sa fermeture représente, comme l’affirme Muhammad Titi, de Nablus, une fermeture totale de toutes les villes. Les forces de l’occupation ont installé des matériaux aigus le long de la route vers le barrage, qui est équipé de miradors et autres constructions sécuritaires. Munir Sulayman rapporte que le passage par le barrage est "un réel voyage de la souffrance, les soldats ne nous permettent pas de passer, qu’aà pieds, et après une fouille corporelle, il y a une autre faite par une machine, et souvent, il est interdit de passer. Les habitants de Cisjordanie ne peuvent y passer qu’avec des laisser-passer. De plus, il ferme entièrement durant la nuit. Des sources palestiniennes affirment que plusieurs attaques palestiniennes ont été menées contre ce barrage, les résistants poignardant les soldats à cause des souffrances que ces derniers font subir aux Palestiniens.
Les barrages de la mort
Les principaux barrages de la mort se situent aux entrées de Bethlehem, d’al-Khalil et d’al-Aghouar (vallée du Jourdain). Les habitants décrivent avec horreur les souffrances quotidiennes subies tous les jours, comme ce qui se passe à Bethlehem. Mufid Awn Allah rapporte que le citoyen meurt plusieurs fois avant de passer au barrage, avec toutes les mesures humiliantes. A l’entrée d’al-Khalil, Mu’tazz Shuyukhi décrit le barrage disant que "celui qui y entre disparaît et celui qui y sort naît de nouveau" pour témoigner de la cruauté des soldats. Sur le barrage d’al-Aghouar, les longues files d’attente s’alignent quotidiennement pendant des heures, dans des conditions très difficiles, comme l’explique Abdel Hakim Wishahi, les soldats interdisant aux gens de bouger, par mesures de sécurité, et la plupart du temps, l’attente prend fin avec la fermeture subite du barrage, ce qui oblige les gens à dormir sur place dans les champs voisins.
Les portes métalliques
Les forces de l’occupation ont transformé les barrages dans certaines régions en portes métalliques, comme c’est le cas à Tulkarm, Qalqylia, Barta’a de l’est. Ces portes métalliques sont installées, comme l’explique Ghassan Qubbaha, président du conseil de barta’a, pour resserer le siège sur les villages, après avoir fermé toutes les issues. Les portes métalliques sont les seules issues qui restent, mais les forces de l’occupation les ferment de façon presque permanente, pour empêcher les gens de se déplacer. Barta’a a longtemps souffert par le manque de produits de ravitaillement, du lait, médicaments, à cause de la porte. De plus, ajoute-t-il, plusieurs personnes ont été tuées devant ces portes, certains des enfants, assassinés par balles, d’autres des malades, empêchés de se rendre à l’hôpital et de se faire soigner.
Interdiction de circuler
Malgré la dure souffrance vécue par les Palestiniens, à cause de ces barrages, les forces de l’occupation ont trouvé une nouvelle fois un moyen d’enfermer la population de Jénine et de Tulkarm, en lui interdisant de se déplacer, en passant par les barrages, comme mesure punitive après les opérations de la résistance, des Saraya al-Quds. Mansour Bacha, de Jénine, affirme : "j’ai essayé pendant tout le mois de passer pour me rendre à Amman, pour me faire soigner. J’essaie de contourner plusieurs barrages, mais les forces de l’occupation m’empêchent de passer, et me disent que les gens de Jénine sont interdits de voyager jusqu’à nouvelle instruction".
par Ali Samoudi - Jénine, 22 février 2006
Traduit par Centre d’Information sur la Résistance en Palestine