J'ai une pratique intensive du vélo depuis plus de soixante
ans. J'allais au lycée à vélo, puis à l'hôpital au début de mes études de
médecine. Les randonnées cyclistes, les voyages à vélo, font partie de ma vie.
Quelques précisions permettent d'avoir une idée de cette pratique, entre un Paris-Dijon en vélo dans la journée effectué au début des années soixante et un
Paris-Vérone en deux semaines par la Suisse et l'Autriche en 2001, j'ai parcouru
avec ma femme la France et l'Europe en utilisant ce moyen de transport
silencieux, suffisamment lent pour profiter des pays traversés, permettant de
manger sans grossir et conservant un état cardio-respiratoire qui assure la
meilleure prévention possible de la dépendance. Aller à vélo de la région
parisienne à Stockholm ou à Venise (deux fois !), à Vienne ou à Milan, permet de
se faire une idée des différents développements routiers destinés aux cyclistes.
Le meilleur côtoie le pire et les réalisations ne sont pas toujours à la hauteur
des intentions. La difficulté est liée aux différentes des pratiques, il n'y a
pas une variété de cyclistes mais quatre :
- le cycliste qui utilise son vélo pour se déplacer dans un
but utilitaire. Il va à son travail, ou faire des courses avec un vélo dit de
ville, mais aussi avec un vélo de randonnée, voire un VTT, quand ce n'est pas
avec un vélo "de course" à jantes fines et au cintre (guidon) recourbé,
- le cyclo-sportif qui fait une ou plusieurs sorties par
semaine, souvent en groupe, pour maintenir sa forme et par plaisir. Il utilise
un vélo de course léger, aime sprinter en haut d'une côte, prend souvent des
libertés avec le code de la route et dans l'ensemble préfère circuler sur la
route plutôt que sur des voies réservées aux cyclistes,
- le randonneur et sa forme moins élaborée qui est le
cycliste aimant la promenade, seul ou en famille. Il utilise un vélo plus
confortable que le précédent, donc avec des jantes et des pneumatiques plus
larges, le plus souvent avec un cintre plat, un porte bagages et des
garde-boue. Il utilise parfois un VTT,
- le pratiquant du VTT qui fuit les infrastructures
routières autant qu'il le peut, mais doit cependant les utiliser pour des
parcours de jonction.
Quelles infrastructures pour ces pratiquants ?
- les bandes cyclables : ce sont des parties latérales de la
chaussée réservées aux cyclistes et séparées de la chaussée principale par une
ligne de peinture continue.
- les avantages sont la continuité avec la chaussée qui
assure la vision du cycliste par les autres usagers et facilite la jonction
avec les autres voies à l'arrivée dans une intersection, l'entretien est
également facilité par cette continuité,
- les inconvénients sont liés à l'absence de séparation
physique entre les différents types d'usagers qui favorise les empiètements
des véhicules à quatre roues sur la bande cyclable, notamment dans les
courbes, le stationnement abusif sur la bande cyclable est fréquent, enfin
lors d'une perte de contrôle d'un véhicule motorisé, le risque de heurt par
l'arrière est facilité par la faible distance séparant la voie de
circulation de ces véhicules et les cyclistes.
- bandes juxtaposant la circulation des cyclistes et des
piétons : très utilisées dans les villes où la circulation des cyclistes est
importante, elles placent sur un trottoir surélevé une bande pour les
cyclistes du côté le plus proche de la chaussée et une bande pour les piétons
entre la bande cyclable et les maisons ou la limite de l'emprise de
l'infrastructure. Au niveau des intersections ces bandes cyclables ont un
comportement calqué sur celui des piétons, avec une traversée des voies sur
une bande dessinée parallèlement au passage des piétons. Si la signalisation
est assurée par des feux, les cyclistes ont le comportement des piétons.
- les avantages : cette solution évite d'avoir à établir
une nouvelle voie de circulation et assure une bonne protection des
cyclistes au prix d'un aménagement des bordures de trottoir au niveau des
intersections,
- les inconvénients : les cyclistes qui aiment aller vite
répugnent à utiliser ce type d'infrastructure qui les exposent à des
trajectoires imprévisibles de piétons, notamment dans les centres villes. La
bonne vitesse pour un cycliste doit se situer entre 10 et 20 km/h pour
éviter les conflits.
- les pistes cyclables : ce sont des infrastructures
réservées aux cyclistes et séparées physiquement de la chaussée utilisée par
les véhicules à moteur. La séparation peut être limitée à une bordure
surélevée s'opposant aux franchissements volontaires, ou constitué par une
surface engazonnée, voire plantée d'arbustes. Dans les cas les plus
favorables, la piste cyclable est éloignée de la voie utilisée par les
véhicules à moteur et fait partie d'un réseau évitant tout conflit avec les
véhicules à moteur par la suppression des intersections à niveau.
- les avantages sont une meilleure protection lors d'une
perte de contrôle d'un véhicule à moteur sur la voie adjacente, une
protection du stationnement abusif des véhicules à quatre roues et dans
l'ensemble une plus grande tranquillité d'esprit pour le cycliste,
- les inconvénients sont principalement la faible qualité
de l'entretien, voire de la réalisation de la chaussée de ces pistes
cyclables en France. Rarement balayées, elles associent gravillons et
tessons de bouteilles à des nids de poule ou à des racines d'arbres en
relief, faute d'un soubassement de qualité. La jonction avec les
intersections des voies principales pose un problème difficile à traiter,
notamment quand une végétation réduit ou supprime la visibilité de la piste
cyclable. Le cycliste est alors mis en danger par les véhicules qui tournent
sur leur droite sans être attentif à la venue d'un cycliste sur la piste
qu'ils vont croiser, sauf si la fusion entre la piste et la chaussée
principale a été assurée avant le carrefour, ce qui pose d'autres problèmes.
Des exemples de réalisation de qualité ou acceptables
- bandes cyclables
- bandes juxtaposant la circulation des cyclistes et des
piétons
- pistes cyclables
- en agglomération, séparation physique sans gêne pour la
visibilité : Arcueil D
126 (PC7A)
- hors agglomération, piste de randonnée idéale totalement
séparée du réseau routier : Italie,
vallée de l'Adige
(PC2A)
- hors agglomération, piste sur un trottoir entre
Nice et Villefranche
(PC16A).
- la bonne gestion des détails
- raccordement sans dénivelée entre la piste et la
chaussée au niveau d'une intersection. Piste à
St Nom la Bretèche (PC9A).
Des exemples de ce qu'il ne faut pas faire
- les erreurs de tracé
- les défauts de qualité
- rupture dans la qualité d'une piste cyclable, une zone
asphaltée est suivie d'une zone gravillonnée dangereuse qui dissuade les
cyclistes de l'utiliser pour contourner le carrefour.
Carrefour Royal à St Nom la Bretèche (PC10E
et PC10B).
- quand le soubassement d'une piste a été fait "à
l'économie", les racines des arbres déforment la piste et des fissurations
apparaissent. Piste longeant la RN 10 entre
Saint Cyr l'Ecole et Versailles (PC14A).
- Etablir une dénivellation entre la chaussée et la piste
cyclable est une erreur technique, elle n'a aucune justification et elle est
désagréable voire dangereuse pour les utilisateurs qui ont des pneus étroits
et gonflés à plusieurs kilopascals. Piste dans la
forêt de Marly près de Fourqueux (PC8B).
- les défauts d'entretien
- absence de nettoyage. Cette bande cyclable située sur le
pont du Var entre Nice et Saint
Laurent du Var ne voit pas souvent une balayeuse ! Ces tessons de
bouteilles de bière ont été observables pendant plusieurs semaines. (PC15A).
- retard dans la taille des haies ou des arbustes bordant
une piste cyclable. Piste longeant la RN 186 entre le
Chesnay et Rocquencourt (PC11A).
Le pire dans le domaine de la piste cyclable !
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