Le bal des faux-culs

Dans l'édition numérique du Monde, je suis tombée sur cette déclaration du Richelieu de Nicolas Sarkozy, le conseiller spécial, éminence grise, plume du président, monsieur Henri Guaino, qui m'a estomaquée :

"Connaissez-vous un lieu de pouvoir qui ne génère pas un phénomène de cour ? L'Elysée aujourd'hui n'en génère ni plus, ni moins que tous les autres lieux de pouvoir ou que l'Elysée n'en a généré jadis"

On pourra lui faire remarquer qu'il existe pourtant des Républiques dans les pays du Nord, comme la Suède où la transparence absolue et les trains de vie raisonnables de leurs dirigeants politiques leur évitent à eux d'être la risée du monde entier avec des accusations de népotisme, je dis cela, je dis rien hein.

Par contre, il est consternant, à moins que cela ne dénote d'un savant calcul de Guaino, dont la plume est suffisamment acérée pour ne pas choisir un mot plutôt qu'un autre par erreur, de voir qu'il utilise des termes tels que cour, de courtisan, ou encore de prince, alors même que son statut de porte-parole du chef de l'Etat devrait le lui faire éviter.

Guaino parle de "phénomène de cour", il utilise ici un langage et un type de vocabulaire qui induisent qu'on puisse comparer un gouvernement à un royaume, et prête ainsi le flanc à ceux qui dénoncent depuis des mois (dont moi) le retour à une monarchie.

Car la suite de la déclaration est à l'identique et enfonce même le clou :

"C'est un des rares hommes politiques à qui, toute sa vie, on a pu parler franchement (...) Maintenant, il y a sans doute des gens qui, refroidis par l'esprit courtisan, n'osent pas contrarier le prince. Ca s'est toujours vu et se verra sans doute toujours"

Donc, les dirigeants UMP ou sympathisants, oui tous ces "Ministres de l'ouverture" qui sont allés à qui mieux mieux de leur soutien au Prince Jean, nous offrant ainsi une dithyrambe sans précédent, tout aussi incroyable (au sens propre) que démonstration d'un cirage de pompes juste hallucinant ne sont pas des fidèles parmi les fidèles, mais juste des lèche-culs.

C'est Guaino qui l'affirme.

Donnant ainsi raison à Coluche qui l'avait dit avant lui : "Les politiciens, il y en a, pour briller en société, ils mangeraient du cirage" (remarquez qu'il disait aussi que "la moitié d'entre eux était bonne à rien, l'autre prête à tout").

Si le gouvernement tout entier n'a donc eu de cesse de nous convaincre de, je les cite (dans le désordre) :

"Son incroyable talent, sa grande maturité, sa sagesse, son immense courage, la force de ses convictions, sa légitimité" (on ne rit pas), etc, etc.

C'était bien pour défendre le fils, et non se faire bien voir du père.

Et surtout pas de craindre ses foudres.
(Qu'est ce que j'ai mauvais esprit, c'est dingue).

Pourtant, même si Guaino prétend l'inverse, affirmant que Nicolas Sarkozy est un des rares hommes politiques à qui on peut parler franchement, la presse et les livres regorgent de ses légendaires colères, impatiences et réactions parfois violentes face à la contradiction.

Pourissant en public Arlette Chabot, par exemple, pour l'absence d'émissions politiques, s'énervant sur Jean Claude Marin, procureur de Paris, à propos de l'affaire Clearstream, la liste est longue, comme le souligne le journal Le Point de ceux qui ont eu à souffrir des colères pour avoir osé agacer le Président.

Même Cécilia Sarkozy aurait dit de lui : "Nicolas, il ne fait pas président de la République, il a un réel problème de comportement. Il faut que quelqu'un le lui dise, j'ai fait cela pendant dix-huit ans, je ne peux plus le faire, je suis désormais la dernière à pouvoir le faire."

C'est Nicolas Sarkozy lui-même qui s'est auto-érigé en omniprésident, concentrant tous les pouvoirs dans ses seules mains, ne délégant pas, ne faisant pas cas des conseils et avis contraires.

Alors Guaino à beau jeu de dire que la faute de ces dérives auxquelles nous assistons depuis des mois en incombe aux seuls lèches bottes que sont les courtisans du prince, préférant ainsi traiter nos dirigeants politiques de cireurs de pompes plutôt que d'admettre surtout, qu'avec Sarkozy, si on n'est pas avec lui, on est bel et bien contre lui et qu'il se comporte bien en Monarque.

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