Le
symbolisme des couleurs concerne l’historien, le
sociologue, le psychologue, le styliste... Une littérature
abondante lui est consacrée, et dans des domaines très
variés, du symbolisme ésotérique au symbole graphique
(panneau de signalisation routière), et passant par
l’art religieux et le compagnonnage. Suivant les
domaines, les lieux ou les époques, les réponses sont
semblables ou différentes, voire contradictoires, car
chaque civilisation, chaque groupe, s’est forgé un
symbolisme émanant de sa propre culture. En outre, il
apparaît que les couleurs ont un pouvoir physique,
physiologique et psychologique sur tout ce qui vit (voir
l’utilisation qu’en font les caméléons et certains
insectes pour leur défense, le paon et le publiciste
pour la séduction, etc.)
De
nombreux ouvrages examinent l’expression des couleurs
et leurs différents pouvoirs. Certains, étayés par
des travaux scientifiques, montrent l’action de la
couleur sur l’organisme humain ou animal, d’autres
se basent sur des tests psychologiques sérieux pour des
études de comportement, d’autres encore rejoignent le
symbolisme ou l’ésotérisme avec par fois des
contradictions car il s’agit là de sensations non
chiffrables et relatives, mais néanmoins intéressantes.
Une
couleur peut agir seul sur notre comportement. Il est
admis que, dans l’environnement, le vert détend,
l’orangé est tonique, le rouge est excitant, etc.
mais aucun instrument ne peut quantifier ce qu’une
couleur exprime. Il est cependant une notion souvent
utilisée par les coloristes ou les peintres que l’on
peut prendre en compte, c’est la sensation de chaud ou
de froid que l’on peut ressentir devant une couleur.
Est-ce
parce que le bleu d’un glacier est proche du cyan et
que le flamme d’un brasier est proche du vermillon que
ces deux couleurs sont réputées représenter le mieux
ces deux sensations ? Les robinets d’eau chaude et
froide sont repérés dans le monde entier par le bleu
et le rouge. C’est dire que ce lien est bien établi...
D’après différents auteurs, d’autres expressions,
regroupées dans le tableau suivant sont souvent associées
à cette notion de chaud et de froid.
FROID
|
CHAUD
|
bleu
|
rouge
|
moins
|
plus
|
ombragé
|
ensoleillé
|
apaisant
|
excitant
|
lointain
|
proche
|
transparent
|
opaque
|
fin
|
épais
|
aérien
|
terreux
|
léger
|
lourd
|
La
proximité d’une couleur sombre exalte une couleur
claire. Deux couleurs complémentaires sont en harmonie
pour l’œil. L’expression naît du choix des
couleurs, de leur forme, de leur grandeur et de leur
positions relatives. Elle naît aussi des contrastes
plus ou moins grands entre des tons, des saturations,
des clartés des grandeurs de surfaces, etc. La maîtrise
de cette notion nécessite des années d’observation,
de réflexion et d’expérience. Pour le décorateur,
l’architecte, et styliste et surtout le peintre,
c’est LA difficulté et en même temps la réussite
de l’œuvre d’art.
Les
couleurs occupent une place exceptionnelle dans la
symbolique traditionnelle depuis le début de
l’humanité. Elles eurent la même signification chez
tous les peuples de la haute antiquité. Leur langage,
intimement lié à la religion, passe dans l’Inde, en
Chine, en Egypte, en Grèce, à Rome... reparaît dans
le Moyen Âge, et les vitraux des cathédrales gothiques
trouvent leur explication dans les livres zends, les
Vedas, et les peinture des temples égyptiens... Elles
ont joué une fonction cosmique et ont représenté des
divinités dans diverses cosmogonies : chez les
Amérindiens (Mayas, Aztèques, Incas...), le rouge est
associé à l’Est, pays du soleil ; le bleu ou le
blanc au Nord (pays du froid) ; le Noir à l’Ouest
(pays de l’ombre) ; le jaune ou le blanc au
Sud...
Les
Japonais reconnaissent aux couleurs "des
significations particulièrement délicates dépassant
ce que l’homme est capable de décrire". Les
écoles shintoïstes enseignent à leurs initiés les
correspondances suivantes :
Noir
et Violet
|
Nord
- Primitif, origine, paradis.
|
Bleu
ou Vert
|
Est
- Vie, création.
|
Rouge
|
Sud
- Harmonie et expansion.
|
Blanc
|
Ouest
- Intégration et propulsion.
|
Jaune
|
Centre
- Créateur, unité
|
Cette série
de cinq couleurs domine le rituel : lorsque l’Empereur
fait à un dieu un don d’étoffes, il doit y en avoir
au moins une pièce de chaque couleur ; les bannières
sont composées de bandes de cinq couleurs ; les
bandelettes de cinq couleurs pendent aux grelots portés
par les danseurs lors de certaines danses sacrées...
Dans les
lignes qui suivent, nous allons évoquer les couleurs
suivantes : Blanc, Rouge, Jaune, Orangé, Vert, Bleu, Violet,
Rose, Noir, Gris, Brun.
Blanc
Synthèse
de toutes les couleurs, le blanc est la lumière,
et les anciens en avaient fait la couleur de la divinité
: les Egyptiens enveloppaient les défunts dans un
linceul blanc pour montrer que la mort délivre l’âme
pure de son enveloppe charnelle périssable. Chez les Hébreux,
la tunique de lin blanc représentait la pureté du
Sacrificateur et la justice divine. A Rome, le blanc était
la couleur des vestales (prêtresses qui étaient brûlées
vivez lorsqu’elles manquaient à leur voeux de chasteté...).
C’était aussi le couleur des druides, des initiés...
Participent
de la symbolique du blanc et emblèmes de pureté,
vertu et chasteté : la robe blanche de la
communiante et de la mariée, le bouquet de fleur
d’oranger, le lis, la colombe, le lin, l’ivoire, le
diamant, la neige... Par extension, c’est aussi
parfois la couleur du deuil d’un enfant, d’un
être pur... Sous son aspect maléfique : la lune
(le blanc lunaire est celui de la lividité cadavérique
et du linceul)
|
Rouge
En Egypte,
le rouge symbolisait l’amour divin. C’est la couleur
du sang frais et du feu qui, selon les anciennes
croyances a créée le monde et le détruira. Il
symbolise la vie, la chaleur et la génération, mais
aussi la destruction. Le rouge vif, ou clair est la
force vitale, la richesse et l’amour. Mais, sous son
aspect infernal, le rouge correspond à l’égoïsme,
à la haine et à l’amour infernal.
Dans les
textes sacrés des Chrétiens, des Egyptiens, des Hébreux
et des Arabes, cette couleur a toujours été associée
au feu et à l’amour divin, et a symbolisé la divinité
et le culte. Couleur des généraux, de la noblesse, des
patriciens et des empereurs à Rome, les cardinaux ont hérité
de ce symbole de la souveraineté. Au Pérou, elle était
liée à la guerre et désignait les soldats.
Au niveau
psychologique, le rouge représente la joie de vivre,
l’optimisme, la vigueur, l’instinct combatif et ses
tendances agressives, la pulsion sexuelle, le désir
amoureux, la passion, le besoin de conquête...
|
Jaune
Couleur
de la lumière, emblème de l’or, associé au miel, le
jaune était la couleur de la lumière céleste révélée
aux hommes et de la doctrine religieuse enseignée dans
les temples. Mais le jaune lunaire, couleur de l’or
terni est du soufre symbolise l’inconstance, la
jalousie, les passions dépravés, l’adultère, la
culpabilité, la trahison (dans l’iconographie, Judas
est vêtu de jaune ; dans plusieurs pays, les juifs
devaient porter des vêtements jaunes parce que Judas
avait trahi le Christ , ou une étoile jaune... ;
en France, on barbouillait de jaune la porte des traîtres,
les "briseurs de grève" étaient appelés
des "jaunes"...)
Au point
de vue psychologique, et dans les rêves, le jaune est
la couleur de l’intuition et symbolise la capacité de
renouvellement, l’entrain, la jeunesse et l’audace,
mais aussi souvent l’instabilité et la vanité. Il révèle
un besoin de supériorité et à l’extrême, la volonté
de puissance aveugle manifestée en prétentions exagérées
à une supériorité factice (souvent compensation
d’un sentiment d’infériorité mal liquidé ou
inconscient).
|
Orangé
L’orangé
qui procède du rouge et du jaune désigne la révélation
de l’amour divin à l’âme humaine et fut le symbole
du mariage indissoluble, mais aussi, par
renversement du symbole, de l’adultère, de la luxure,
et dans la langue héraldique, de la dissimulation
et de l’hypocrisie.
Dans les
rêves, cette tonalité chaude et brillante, emblème de
la luxure, exprime un intense besoin de jouissance et
d’expansion, et reflète un équilibre fragile et
la nécessité de contrôler ses impulsions.
Attribut
de Typhon (le monstre qui, en s’attaquant aux dieux de
l’Olympe, engagea la lutte entre la lumière et les
forces souterraines, le roux a symbolisé dans
toutes les mythologies les tendances animales de
l’homme, la fécondité extravagante, la perversion,
la concupiscence et leurs conséquences : intempérance,
débauche, violence, égoïsme...
|
Vert
Le vert,
couleur de la nature, est doué d’un pouvoir de régénération,
car il capte l’énergie solaire et la transforme en énergie
vitale. Il est le symbole de le régénération
spirituelle. Couleur des bourgeons printanier, signalant
la fin de l’hiver, il symbolise l’espérance.
En Egypte, la couleur verte est attribuée à Phtah, le
créateur et le stabilisateur, et à l’eau, parce que
dans la cosmogonie égyptienne, l’eau était l’élément
primordial de la création. Elle désignait la fondation
du temps, la création du monde et symbolisait la
naissance matérielle et spirituelle, c’est à dire
les mystères de l’initiation.
Produit
de l’association du jaune et du bleu, le vert possède
une dualité : c’est la couleur de Vénus,
symbole de renouveau, mais aussi de la vengeance ;
du dieu-serpent aztèque, inventeur des arts, identifié
au Thot-Mercure égypto-latin et au Lug gaulois, médecin,
magicien, satiriste et artisan ; du Kirs musulman
qui avait pour fonction de concilier les extrêmes
(fonction synthétisée par le Caducée). En Chine, le
vert désigne l’Est, le printemps, le bois et la
charité ; dans le christianisme, la régénération
dans les actes, c’est à dire la charité, et
par antinomie la dégradation morale et la folie,
le désespoir. Teinté de jaune (la couleur des
yeux du dragon et des serpents) le vert est la couleur
des eaux mortes, de la putréfaction et a une influence
néfaste.
Sur le
plan psychologique et dans les rêves, le vert, couleur
de la vigueur sexuelle, reflète le besoin d’épanouissement,
d’estime, de valorisation, de culture et de
connaissance.
Bleu
Le bleu
est associé à la divinité dans toutes les mythologies
: à Amon-Râ, dieu du soleil levant dans
l’ancienne égypte ; en Grèce à Jupiter, père
des dieux et des hommes, et à Junon, incarnation de la
féminité féconde et épanouie ; en Inde, à
Vishnou le justicier... En Chine, il symbolise le Tao,
la Voie sacrée, le principe insondable des êtres.
Le bleu
jupitérien, couleur froide du vide, est celle de la
vérité ; pour les Égyptiens, de la vérité
éternelle, de l’immortalité ; la fidélité,
la chasteté, la loyauté et la justice
dans la tradition chrétienne. Identifié à l’air, au
vent, il symbolise la spiritualité, la contemplation,
la passivité et favorise la méditation, le repos. Le
bleu clair reflète l’inaccessible, le merveilleux,
l’évasion.
Sur le
plan psychologique et dans les rêves, le bleu est la
couleur de la tolérance et représente l’équilibre,
le contrôle de soi, les tendances à la générosité,
à la bonté, un comportement réfléchi
et le besoin de sérénité.
Violet
Le bleu
et le rouge s’équilibrent dans le violet qui signifie
l’amour de la vérité et la vérité de l’amour. Il
fut le symbole des noces mystiques du Seigneur et de
l’Eglise, de la passion et des martyrs, et représente
l’identification totale du Père et du Fils. C’est
aussi la couleur des veuves, des évêques et des
martyrs, et un symbole de mort pour les Chinois.
En
psychologie, le violet, couleur de la fusion
amoureuse, de la soumission, traduit le
besoin d’union, d’approbation et
d’identification à un être aimé. Mais ce rouge
refroidi renferme quelque chose d’éteint et peut
exprimer un étant d’esprit mélancolique,
s’accompagnant du besoin de tendresse et de
douceur.
Rose
Association
du rouge et du blanc, le rose, couleur de la chair, de
la rosée régénératrice, de la séduction, symbolise l’amour,
la pureté, la fidélité (comme la fleur
du même nom)
Noir
Le noir,
négation de la lumière, est le symbole du néant, de
l’erreur, de ce qui n’est pas et s’associe à la
nuit, à l’ignorance, au mal, à ce qui est faux. Il
indique "l’ignorance enfantée par le mal et
par toutes les passions égoïstes et haineuses".
Couleur du charbon, il évoque le processus de la
combustion, prélude à la régénération et
renferme une idée de résurrection. Les rites
initiatiques de l’antiquité comportaient des épreuves
nocturnes : le postulant traversait une mort
symbolique dans un lieu obscur, pour devenir un homme
nouveau et renaître à la vie spirituelle.
On peut y
voir l’expression du complexe d’abandon, inséparable
de la mélancolie et souvent accompagné de la peur de
la vie et du désespoir, tendance reflétées dans les rêves,
ainsi que le besoin d’indépendance.
Gris
Union du
blanc de l’innocence et du noir de la culpabilité, le
gris fut l’emblème chrétien de la mort terrestre
et de l’immortalité spirituelle, de l’innocence
calomniée, noircie, condamnée par l’opinion ou les
lois. C’est aussi la tonalité de la tristesse,
de l’anxiété, de la rêverie vague. Dans la Bible,
c’est la couleur de la cendre, symbole de pénitence
et de deuil.
Couleur
équivoque, le gris traduit le manque de vigueur
des asthéniques, des déprimés, l’égoïsme, le
refus de l’engagement, l’enclos narcissique, et,
dans les rêves, l’excès d’indifférence,
l’ennui, la froideur, le besoin de tranquillité.
Brun
Le brun,
couleur de la terre, de la boue et du feuillage
d’automne renferme des idées de dégradation
et de mort. Dans la symbolique chrétienne, le
rouge-noir, mélange de feu, de fumée, de cendre et de
suie est le symbole de l’amour infernal et de la
trahison. Couleur de la matérialité, le brun
correspond à l’agressivité latente ou déclarée,
la méchanceté, l’obstination, l’avarice, l’égoïsme.
Dans les rêves, il traduit le besoin de confort
et de sécurité.
|