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De notre servitude involontaire. Lettre à mes camarades de gauche

Alain Accardo

Mars 2002

Comment être vraiment de gauche, à une époque où « le système capitaliste a revêtu la défroque socialiste » ? Pourquoi notre combat contre ce système n’a-t-il pas été, jusqu’à présent, « à la hauteur de nos indignations » ?

C’est, selon l’auteur de ce texte militant et chaleureux, que nous méconnaîtrions la double nature de son oppression. Si le capitalisme a pu établir sa domination, c’est à la fois au dehors par sa formidable puissance économique, et aussi, au dedans, par son aptitude à nous faire incorporer, au coeur de notre psychisme, ses valeurs et ses modèles. les classes moyennes, à travers leurs diverses pratiques sociales, ont intégré, comme issu de leur propre « nature », le « style de vie » (américanisé) dont le système a besoin pour bien fonctionner. L’individu automystifié « choisit » alors de devenir, dans le cadre socioprofessionnel, ce fameux « battant » assoiffé de réussite individualiste, et, dans la sphère privée, ce consommateur narcissique pour qui toute réalité d’un monde marchandisé est objet de consommation et de jouissance.

Il s’ensuit qu’un vrai combat politique de gauche se mène aussi à l’intérieur de soi-même. Le « militant » doit se demander : « Qu’est-ce qui en moi a déjà été acheté, approprié par le système et fait de moi un complice qui s’ignore ? » La rupture avec le capitalisme exigerait, en effet, l’éradication des connivences secrètes « qui nous attachent consubstantiellement à lui ».

François Brune

Agone, Marseille, 2001, 96 pages, 8 euros.

© Le Monde diplomatique - 2013