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    Futur

    Depuis la Silicon Valley, Elon Musk veut brancher notre cerveau sur les machines

    Par Amaelle Guiton
    Eilon Musk en janvier 2017.
    Eilon Musk en janvier 2017. Photo Shannon Stapleton. Reuters

    Le PDG de Tesla a discrètement créé en 2016 Neuralink, une société de recherche qui ambitionne de développer, à terme, une interface neuronale entre l’homme et l’ordinateur. Mais le pourra-t-il ?

    On le savait déjà décidé à entamer la colonisation de Mars à l’horizon 2040, mais il en avait encore sous le pied… Elon Musk, le PDG de l’entreprise d’astronautique SpaceX et du constructeur automobile Tesla, a fait d’un autre topos de la science-fiction son nouveau projet démesuré : connecter le cerveau humain aux ordinateurs. C’est le Wall Street Journal qui a levé un coin du voile, dans la nuit de lundi à mardi : en juillet, le quadragénaire américain a discrètement créé en Californie une nouvelle société, Neuralink. Sur Twitter, le principal intéressé en a confirmé l’existence, en promettant plus d’informations d’ici une semaine.

    Pour l’heure, on en sait encore peu, mais suffisamment pour y voir la stratégie désormais bien rodée de Musk. Encore «embryonnaire» selon l’un de ses cofondateurs, Neuralink est une entreprise de «recherche médicale» dont l’objectif pourrait être, dans un premier temps, de développer des implants cérébraux pour soigner des troubles neurologiques tels que l’épilepsie - la neurostimulation par l’implantation d’électrodes est déjà utilisée pour traiter certains patients atteints de la maladie de Parkinson. Mais le démiurge de la Silicon Valley voit plus loin.

    Utopie. Pour qui suit de près ses propos publics, ce n’est d’ailleurs pas une surprise, et l’affaire a tout du teasing millimétré. En juin 2016, lors d’une conférence organisée par le site d’actualité technologique Recode, Musk opposait au péril d’une intelligence artificielle vouée à nous transformer en «chats domestiques» ce qui, à ses yeux, constitue la parade : une «interface corticale directe» entre l’homme et la machine. Celui qui fait remonter son utopie martienne à la lecture du Guide du voyageur galactique empruntait alors aux romans de l’Ecossais Iain M. Banks l’expression de «lacis neural». A quelques reprises, il a évoqué ce projet sur Twitter. Et lors du World Government Summit de Dubaï, en février, il a de nouveau appelé à une «combinaison entre l’intelligence biologique et l’intelligence de la machine» pour échapper à «l’obsolescence» humaine. «Nous sommes grosso modo à quatre ou cinq ans d’une interface neuronale partielle significative», affirme-t-il dans une longue enquête publiée dimanche par Vanity Fair.

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    Il n’est pas le seul à y croire. Le fondateur de Braintree, une filiale de PayPal, a lui aussi lancé l’an dernier une start-up similaire, dont l’objectif premier est de lutter contre les maladies neurodégénératives, mais qui vise à plus long terme, là encore, à augmenter les capacités cognitives, à commencer par la mémoire. Facebook recrute un ingénieur spécialiste des interfaces cerveau-machine pour «Building 8», son labo de recherche et développement dirigé par une ancienne de Google. La Darpa, l’agence de recherche de l’armée américaine, investit elle aussi dans le domaine.

    Quel crédit accorder à ces grandes menées ? Pour Jean-Gabriel Ganascia, chercheur en intelligence artificielle au laboratoire informatique de Paris-VI et auteur du Mythe de la singularité, il faut surtout raison garder. Travailler sur les implants cérébraux peut «permettre d’améliorer un certain nombre de technologies médicales», relève-t-il - il rappelle que la neurostimulation pour les malades de Parkinson a été mise au point en France, à Grenoble. Reste à savoir jusqu’où les apôtres californiens de la «disruption» sont capables d’aller sur ce terrain… Quant à «cette idée de brancher directement une mémoire externe sur l’homme», il la juge, à ce stade, à la fois «totalement illusoire»… et proprement «cauchemardesque».

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    «Survie». C’est toute l’ambiguïté d’Elon Musk, qui prend ainsi pied dans un nouveau secteur sur fond de storytelling quasi millénariste. De quoi, paradoxalement, le rapprocher d’un Ray Kurzweil, le chantre de la «Singularité», ce moment où la machine dépasse son créateur. Ces dernières années, le patron de SpaceX avait pourtant défini l’intelligence artificielle comme «la menace la plus sérieuse pour la survie de la race humaine», prônant une «surveillance réglementaire», dans une tonalité pro-régulation qui n’est généralement pas le fort de la Valley. Ce qui ne l’a pas empêché d’investir dans la société britannique DeepMind, avant son rachat par Google et la victoire très médiatisée d’AlphaGo, le programme qui a battu le champion coréen de go Lee Sedol. Ou de cofonder OpenAI, une organisation à but non lucratif qui vise à développer une intelligence artificielle «open source», en libre accès.

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    Musk entend désormais contrer le pouvoir de la machine en y connectant l’homme, dans une logique, juge Jean-Gabriel Ganascia, de «pompier pyromane». «Avec l’intelligence artificielle, on convoque un démon», expliquait le milliardaire fin 2014 lors d’un symposium au Massachusetts Institute of Technology (MIT) de Boston. Avant de filer la métaphore : «Vous connaissez ces histoires, où il y a ce type, avec le pentagramme et l’eau bénite, et il est sûr qu’il peut contrôler le démon ? Ça ne marche pas.» Prémonitoire ?

    Amaelle Guiton
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