Parents, n’ayez plus peur de l’adolescence

Cette période entre enfance et âge adulte n’est pas facile à vivre pour les ados. Encore moins pour les parents. La psychanalyste Claude Halmos donne quelques repères pour mieux aborder les problèmes et répond à cette préoccupation majeure : quels sont les signes qui doivent inquiéter ?

Claude Halmos
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Une zone de turbulences

Ce n’est un secret pour personne : l’adolescence est une zone de turbulences. Elle ne « secoue » pas seulement ceux qui la traversent – les adolescents –, mais aussi leur entourage et, en premier lieu, leurs parents.

Confrontés à leur enfant en mutation, ceux-ci voient en effet s’abolir leurs repères et, désorientés, vivent, pour nombre d’entre eux, dans la peur de passer à côté d’un problème, voire d’une catastrophe. D’où leur quête angoissée auprès des spécialistes : « Mais à quoi voit-on qu’un adolescent va vraiment mal ? A partir de quand faut-il s’inquiéter ? »

La recherche de signes

Cette recherche de "signes" qui permettraient de savoir ce qui se passe est compréhensible, car l’adolescent est, pour ses parents, aussi impossible à saisir que le furet de la chanson. La démarche, cependant, n’est pas sans danger. Elle présente en effet un risque majeur : celui de mettre les parents dans une logique de "chasse à la maladie". Leur angoisse les prédispose à cette traque et leurs craintes ont toutes les chances d’être majorées par ce que véhicule la notion de "signes". Parler en ces termes induit l’idée que ces signes seraient les mêmes chez tous les adolescents, qu’ils auraient chez tous la même signification et constitueraient toujours les prémices d’un trouble grave.

Or, il n’en est rien. Qu’une jeune fille rechigne à se nourrir ne signifie pas pour autant qu’elle soit, d’ores et déjà, "une anorexique". Elle exprime par ce refus de s’alimenter une difficulté à vivre qu’elle ne parvient pas à dire avec des mots. Sa souffrance peut être plus ou moins importante, mais elle est toujours singulière. Elle n’a pas le même sens que celle d’une autre adolescente qui présenterait des troubles équivalents et doit être, dans chaque cas, décryptée en fonction de l’histoire personnelle. Figer d’emblée les choses en mettant une "étiquette" serait une erreur car, à l’adolescence, tout est en mouvement, le pire comme le meilleur.

Ce serait, de plus, une erreur dangereuse, car les adolescents sont toujours prompts à s’identifier à l’image d’eux-mêmes qu’on leur propose. Objets d’un diagnostic, ils peuvent être amenés, si l’on n’y prend pas garde, à la reprendre à leur compte et à en "rajouter" dans les symptômes pour "coller au personnage".

D’observateurs à incompétents

Dangereuse, la recherche de signes l’est aussi pour les parents. Prisonniers d’une telle logique, ils se mettent souvent, croyant bien faire, en position "d’observateurs" de leur enfant. Cette attitude est dommageable, car leur regard, parasité par l’angoisse, ne leur fait voir que ce qu’ils redoutent et imaginent.

Elle l’est également pour la relation à leur enfant. Qui "observe", en effet, "n’écoute" plus. Or, ce dont un adolescent a besoin, ce n’est pas d’être sous le microscope ni que l’on épie ses faits et gestes, c’est qu’on l’écoute. L’adolescent qui se sent "observé" par ses parents vit toujours leur attitude comme une preuve de défiance à son égard. Cela casse à la fois la confiance qu’il a en eux et celle qu’il peut avoir en lui-même. Car, quelle que soit la désinvolture qu’il affiche, l’opinion que ses parents ont de lui compte. Elle est même un appui essentiel pour l’image qu’il se construit de lui-même.

Enfin, contrairement à ce qu’ils croient, la connaissance de signes ne rend pas les parents plus "savants". Au contraire. Si ce savoir extérieur à eux-mêmes les rassure dans un premier temps, il les fait toujours à terme se sentir encore plus "incompétents". Il les empêche même, dans bien des cas, de suivre une intuition qui était juste. S’ils refusent de se laisser duper par les illusoires "modes d’emploi" qu’on leur propose, ici ou là, que peuvent faire les parents qui s’inquiètent pour évaluer les problèmes de leurs adolescents ?

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