Face au Covid, la stratégie de l’immunité collective ne marche pas, alertent les autorités sanitaires mondiales

Parfois présentée comme la clé face au Covid-19, l’immunité collective est considérée par de nombreux scientifiques comme dangereuse sur les plans sanitaire et éthique.

Temps de lecture 4 min
L’immunité collective n’est pas la solution selon l’OMS. (ERIC DESSONS / JDD / SIPA)
L’immunité collective n’est pas la solution selon l’OMS. (ERIC DESSONS / JDD / SIPA)

L’Organisation mondiale de la Santé (OMS) et l’Institut national de la Santé et de la Recherche médicale (Inserm) l’assurent : l’immunité collective n’est pas la solution face au coronavirus. Parfois présentée, au début de la pandémie de Covid-19, comme un motif d’espoir et un moyen d’éviter des confinements généralisés, l’idée de laisser circuler le virus pour atteindre une immunité collective apparaît de plus en plus clairement comme un dangereux mirage, expliquent de nombreux scientifiques.

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L’idée, c’est qu’une fois qu’une certaine proportion de la population aura été touchée, l’épidémie s’arrêterait d’elle-même, faute de victimes à frapper. Mais après des mois de pandémie, « on est très très loin du compte », note auprès de l’AFP Frédéric Altare, spécialiste de l’immunité à l’Inserm.

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« Scientifiquement et éthiquement problématique »

L’OMS l’a d’ailleurs déclaré sans ambages, lundi 12 octobre : « Jamais, dans l’histoire de la santé publique, l’immunité collective n’a été utilisée comme stratégie pour répondre à une épidémie, et encore moins à une pandémie. C’est scientifiquement et éthiquement problématique », a déclaré son directeur général, Tedros Adhanom Ghebreyesus.

« Laisser libre cours à un virus dangereux, dont nous ne comprenons pas tout, est tout simplement contraire à l’éthique. Ce n’est pas une option », a-t-il insisté, rappelant qu’environ 10 % de la population pourrait avoir été contaminée par le virus dans la plupart des pays.

Des milliards de personnes restent donc en théorie à la merci d’un virus plus dangereux, plus létal et plus contagieux que la grippe saisonnière. Et pour lequel il n’existe pas de vaccin.

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Le docteur Anthony Fauci, infectiologue américain, est allé dans le même sens, sur ABC, jeudi 15 octobre, en qualifiant l’immunité collective de « ridicule » et de « total non-sens ».

Des risques importants en termes de mortalité

Dès le mois de mai, l’OMS avertissait que les pays misant sur l’immunité collective se livraient « à un calcul vraiment dangereux ».

Régulièrement, et encore très récemment, le président américain Donald Trump s’est montré partisan de cette idée. Début octobre, des scientifiques l’ont défendue, dans « The Great Barrington Declaration », un appel à laisser circuler le virus dans la population jeune et en bonne santé tout en protégeant les plus vulnérables. Un appel soutenu, selon la presse américaine, par la Maison-Blanche.

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Pour ses défenseurs, le principal bénéfice de cette « stratégie » serait d’éviter les dommages économiques, sociaux, sanitaires – des confinements généralisés alors même que certains pays, comme l’Espagne, ont dû réintroduire des mesures de confinements locaux, ou comme la France, de couvre-feu.

C’est « une erreur », ont répondu, jeudi 15 octobre, 80 scientifiques dans une lettre ouverte, publiée par la revue médicale « The Lancet » : « Une transmission incontrôlée chez les plus jeunes ferait courir des risques importants en termes de santé et de mortalité à l’ensemble de la population », relèvent-ils, notant aussi le risque de saturation des systèmes de santé.

Eléments manquants sur la durée de l’immunité

La Suède, qui a refusé de confiner sa population et de fermer écoles, bars et restaurants, semble désormais rattrapée par la pandémie. Rapportée à sa population, la mortalité du Covid-19 y est parmi les quinze plus élevées au monde, selon les données de l’Université Johns Hopkins.

Autre problème : on ne sait pas combien de temps dure l’immunité contre cette maladie et des cas de réinfections, quoique très rares, ont été rapportés. « Il est possible que les anticorps s’affaiblissent avec le temps », rappelait la semaine dernière une responsable de l’OMS, Maria Van Kerkhove.

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« Les réinfections nous montrent que nous ne pouvons pas nous appuyer sur l’immunité acquise par l’infection naturelle pour atteindre une immunité de groupe », a écrit la professeure Akiko Iwasaki, spécialiste de l’immunité à l’université de Yale.

Certaines personnes protégées… sans avoir rencontré le virus

Certains tenants de l’immunité collective naturelle font aussi valoir que son seuil – estimé habituellement à quelque 60 à 70 % – serait en fait plus bas, notamment parce que tout le monde n’est pas de la même manière susceptible d’attraper le virus (entre campagnards et citadins par exemple ou jeunes et vieux).

Ce que l’on a découvert également au fil du temps, c’est que certaines personnes sont protégées du Sars-CoV-2 alors qu’ils ne l’ont pas rencontré, explique Frédéric Altare de l’Inserm.

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Plutôt que des anticorps (ceux que l’on cherche avec les tests sérologiques) spécifiquement dirigés contre ce virus, elles ont développé une autre immunité, dite « cellulaire », grâce à un certain type de globules blancs. Sans doute parce qu’ils ont déjà rencontré des agents infectieux ressemblant au Sars-CoV-2, ces globules l’identifient comme un danger et s’y attaquent, dit-il.

L’immunité doit passer par « des vaccins sûrs et efficaces »

« Ce qui veut dire que les chiffres qu’on annonce 5 à 10 % d’immunité possible , c’est vraisemblablement un peu sous-estimé mais on ne sait pas dans quelle mesure », relève Frédéric Altare.

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Mais même « en poussant les statistiques, en tenant compte de (cette) autre immunité, du fait que les gens ne s’infectent pas tous pareil, que les populations âgées ont moins de risques de s’infecter parce qu’elles se protègent plus », on arrive « à faire descendre les pourcentages jusqu’à 50 %, pas en dessous », dit-il.

Tout en notant qu’atteindre ce seuil se solderait par un nombre de décès considérable. L’immunité collective doit donc passer par « des vaccins sûrs et efficaces », tranche la professeure Akiko Iwazaki.

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Commentaires 20 commentaires
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    JCLACIO

    Septembre 2019 : 46787 décès Septembre 2020 : 40056 décès donc 6700 décès de moins qu’en 2019 pourtant début de la deuxième vague covid selon nos autorités officielles...

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      JCLACIO

      c'est une info de l'INSEE. Et de plus,insee/information/4190491 et sur les 9 premiers mois qui englobe donc les mois de mars-avril sommet de l’épidémie covid 2019 : 480363 et pour 2020 : 481747 soit 1400 de plus en 2020…...et pour 2018 sur les 9 premiers mois on avait 481462 décès.

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    JCLACIO

    les tests PCR pratiqués n'importe comment. Ce 18 octobre:Le covid-19 fait vivre les montagnes russes à la Paillade. Quelques heures après avoir communiqué les résultats des tests PCR pratiqués sur son groupe, le club de Montpellier a donné des nouvelles rassurantes vendredi soir. Des douze cas positifs annoncés suite aux tests de jeudi, seuls deux ont décelé ce vendredi une contamination au coronavirus, un joueur et un membre du staff héraultais. "Les dix autres cas relevés hier sont en fait négatifs", informe le MHSC. RMC précise que les deux personnes positives sont le défenseur Pedro Mendes et l'entraîneur Michel Der Zakarian.

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    JCLACIO

    M. Blachier le médecin épidémiologiste qui pourtant a été toujours très alarmiste déclare ce jour sur LCII au sujet des chiffres de contamination : « En toute franchise, on commence à se demander si ces chiffres de contaminations sont réels.. » Si lui commence à douter…..

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      caracteresalphanumeriques

      LCII (avec deux ii, comme dans l'autre épiphanie de ce message : JCLACIO a appris à faire des copier-coller parfaits) chaîne de référence ? M. Blachier absout de son ancien alarmiste qui s'est converti à la bonne et saine doctrine ? On ne peut plus avoir confiance en personne.

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    diabolodenfer

    C'est drôle ce ton péremptoire pour affirmer que l'umminité collective ne marche pas alors qu'en fait on n'en sait rien du tout actuellement...de plus 95% au moins des positifs étant asymptomatiques on n'a pas trop de soucis à se faire....Et puis de toute facon, il vaudrait mieux que ca marche parce qu'on empêchera plus le virus de se propager maintenant.....

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      caracteresalphanumeriques

      Péremptoire pour péremptoire, je crois plus les experts que diabolo l'imprécateur.

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      plinder

      Il n'a jamais été question d'empêcher le virus de se propager. Il s'agit juste de ralentir la propagation pour désengorger le système hospitalier. En attendant un vaccin dans quelques années.

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    Cassandrelucide

    La courbe des décès en Suède montre au contraire que l'immunité collective semble fonctionner....

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      pegasse

      A savoir ?

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        JCLACIO

        Du 1 au 15 octobre il y a eu 17 morts (15 jours) en Suede rapporté a la population de la France cela donnerait 114 décès. (sources officielles du Public Health Agency of Swed et des données quotidiennes communiquées). Au 9 octobre il y avait 23 patients en réa ce qui ramené à la population française correspondrait à 154 patients en réa. Etes-vous sûr de vos données ? Il faut me semble t’il faire attention aux informations données par l’OMS . Sans être complotiste, mais le monde étant ce qu’il est et les tentations ce qu’elles sont il faut rappeler que l’OMS n’est plus alimentée majoritairement par les états mais par des fonds privés.

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      caracteresalphanumeriques

      Pour l'instant, "Rapportée à sa population, la mortalité du Covid-19 y est parmi les quinze plus élevées au monde, selon les données de l’Université Johns Hopkins." Comme dit l'article.

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        diabolodenfer

        Comparez l'économie de la Suède à la notre....pour commencer....De plus, il vaudrait mieux que ca marche parce qu'on empêchera plus le virus de se propager...il est trop tard depuis des mois.....

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        123456789

        La Suède est toujours devant a population égale mais la France rattrape son retard sur elle.

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